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Principales conclusions de la mission
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En mai 1998, la FAO a lancé une Alerte spéciale pour attirer l'attention sur les graves difficultés rencontrées en matière de disponibilités alimentaires dans le Soudan méridional, particulièrement dans le Bahr el Ghazal, du fait d'une succession de mauvaises récoltes dues à la sécheresse et à une intensification des troubles intérieurs qui durent depuis déjà longtemps. Plus tard dans l'année, des pluies et inondations importantes ont entraîné le déplacement d'un grand nombre de familles et l'endommagement des récoltes dans les régions centrales et orientales du pays. Ces événements ont déclenché l'envoi d'une mission de la FAO dans le Soudan méridional en octobre, ainsi que celui d'une mission conjointe FAO/PAM d'évaluation des récoltes et des disponibilités alimentaires dans toutes les zones de production du Soudan septentrional, mission qui, du 15 novembre au 3 décembre 1998, a évalué la production de céréales et les disponibilités alimentaires ainsi que les besoins en aide alimentaire en se fondant sur la récolte en cours, essentiellement composée de sorgho et de millet, et a établi les premières prévisions de ce que sera la production de blé au premier trimestre de 1999.
Sur la base de ces estimations de la production et des stocks de report, la mission a procédé à l'évaluation de la situation céréalière en 1998-1999 en tenant compte du potentiel d'exportation, des importations nécessaires et des besoins en aide alimentaire.
De hauts fonctionnaires du Ministère de l'agriculture et des forêts (Khartoum) et de la Commission chargée de l'aide humanitaire ont accompagné la mission en tant qu'observateurs dans tous ses déplacements, à l'exception de ceux effectués dans les zones occupées par les rebelles dans le Sud.
La mission a reçu des Ministères de l'agriculture de tous les Etats du Nord des données avant récolte sur la superficie et la productivité de toutes les cultures de céréales. Dans le Sud, où il n'y avait pas de statistiques officielles, la superficie des cultures traditionnelles a été déduite des statistiques démographiques auxquelles a été appliqué un multiplicateur correspondant à la taille moyenne ajustée des exploitations dans chaque Etat, tandis que la productivité était vérifiée grâce au rapport des organismes compétents et aux observations effectuées par la mission. Les données que celle-ci a reçues ont été vérifiées par recoupement avec les informations qualitatives reçues des ONG, des exploitants, des négociants et des organismes internationaux intervenant dans les deux secteurs.
Les renseignements sur les conditions de végétation, la situation en matière de ravageurs et de maladies, la pluviométrie, les prix et la disponibilité des intrants obtenus au cours des visites sur le terrain ont été vérifiés par recoupement avec les données que les bureaux de la FAO et du PAM travaillant dans les régions septentrionales et méridionales ainsi que le bureau central des statistiques de Khartoum ont obtenues par télédétection et en exerçant une surveillance sur le terrain. Les chiffres concernant les importations, les exportations et les stocks existants ont été fournis par la Banque agricole du Soudan et les associations d'exploitants des principales zones de production.
La mission, en se divisant en deux groupes au moment de se rendre sur le terrain dans le Nord, a pu visiter tous les Etats, mener des enquêtes sur le terrain et procéder à des évaluations par sondage dans les systèmes de cultures irriguées et non irriguées, y compris les grands périmètres d'irrigation, les exploitations se livrant à des cultures traditionnelles de quasi-subsistance, les exploitations mécanisées à grande échelle délimitées et non délimitées et les cultures de décrue ("demira") dans les plaines d'inondation.
La mission prévoit une production céréalière totale de 6,51 millions de tonnes en 1998-1999, dont 4,89 millions de tonnes de sorgho, 1,12 million de tonnes de millet, 444 000 tonnes de blé (qui sera récolté pendant le premier trimestre de 1999) et 52 000 tonnes de maïs (produit dans le Sud); le total prévu est supérieur de 46% à celui de l'an dernier.
L'amélioration des résultats est due à une production accrue dans le secteur des cultures pluviales, où la combinaison de l'extension notable de la superficie récoltée et dune meilleure productivité due à une pluviométrie favorable qui, quoique tardive, a été forte et bien distribuée, fait que lon prévoit une production de sorgho et de millet supérieure à la récolte record précédente de 1996-1997. En revanche, la production céréalière dans les périmètres d'irrigation structurés devrait être inférieure de quelque 20% à celle de l'an dernier par suite de problèmes chroniques d'entretien aggravés par les dégâts sans précédent à l'équipement et à l'infrastructure (canaux et collecteurs) causés par les inondations, de difficultés de financement et dune moindre utilisation des engrais. Le secteur non structuré des cultures irriguées a connu, quant à lui, une bonne année due à l'extension de la superficie de "demira", c'est-à-dire de cultures de décrue.
La récolte céréalière record de cette année, associée aux stocks de report provenant de l'interdiction des exportations de sorgho depuis trois ans, assurera de grandes disponibilités céréalières en 1999, ce qui permettra d'exporter de grandes quantités de grains tout en augmentant la consommation alimentaire et la formation de stocks de céréales. Les prix des céréales ont fortement baissé. Dans la principale zone de culture du sorgho - le Gedaref - les prix du sorgho étaient bien inférieurs en novembre à ce qu'ils étaient un an plus tôt et inférieurs aux coûts moyens de production. Malgré les exportations attendues, il pourrait en résulter une forte réduction de la superficie plantée l'an prochain.
La situation générale est donc tout à fait favorable, mais le tableau d'ensemble cache de graves déficits au niveau local dans certaines zones. Dans le Sud, la situation est très grave. Malgré un doublement général de la production, cinq Etats - le Bahr el Ghazal septentrional, les Lacs, le Warrab, le Jonglei et le Bahr el Jebel - connaîtront un déficit céréalier. Malheureusement, les excédents annoncés pour cette année dans le Haut Nil et l'Equatoria occidentale ne sont pas accessibles aux communautés vivant dans les zones déficitaires par suite de la segmentation du marché due aux troubles intérieurs et à la dégradation des routes commerciales et de l'infrastructure. Même dans ces Etats qui pourtant enregistrent un excédent et dans les trois Etats où le bilan céréalier est équilibré (le Bahr el Ghazal occidental, Unity et lEquatoria orientale), l'impossibilité où se trouvent les pauvres, tant des villes que des campagnes, d'accéder à la production par manque de revenu et de biens cessibles, fait quune aide alimentaire sera indispensable, tout au long de l'année dans le Sud. Dans le Nord, les personnes déplacées à l'intérieur du territoire dans le Kassala, le Kordofan occidental, le Kordofan méridional, le Darfour méridional, le Nil Blanc et Khartoum, sont dans une situation préoccupante. Dans ces communautés, une aide alimentaire sera indispensable, particulièrement pendant la période de disette allant de mars à septembre, sauf dans le Kassala, où une aide simposera pendant toute l'année. Les agriculteurs du Kordofan septentrional marqué par un déficit alimentaire chronique qui pratiquent une agriculture de subsistance risquent aussi de rencontrer des difficultés l'année prochaine et leur situation mérite d'être suivie de près.
Pour les diverses interventions dans le Soudan méridional, dans les régions touchées par la guerre et dans celles des Etats septentrionaux qui souffrent d'un déficit alimentaire, la mission estime qu'il faudra au total en 1999 une aide alimentaire durgence pour 2 360 000 personnes, soit un total de 173 500 tonnes de denrées composites, dont quelque 130 000 tonnes de céréales. En outre, quelque 52 600 tonnes de produits alimentaires seront distribuées par le PAM dans le Soudan septentrional pour aider les zones souffrant d'un déficit alimentaire chronique, les victimes des inondations et les réfugiés.
Au Soudan, les denrées alimentaires de base sont des céréales, parmi lesquelles le sorgho représente 65% de la consommation céréalière totale, suivi du blé (dont la moitié environ est importée) et du millet. Les rendements sont extrêmement faibles, même comparés à ceux d'autres pays moins avancés d'Afrique.
La superficie totale de céréales récoltées cette année est évaluée à 9,62 millions d'hectares, y compris la récolte de blé du printemps prochain. Cette superficie est supérieure de 13% à celle de l'an dernier, mais légèrement inférieure (2%) à la superficie de céréales récoltées en 1994-1995. Le sorgho et le millet sont cultivés dans tout le pays pendant la saison des pluies qui va de juin à octobre. Les blé est cultivé sous irrigation pendant les mois d'hiver qui vont de novembre à mars.
Les emblavures de sorgho ont augmenté de 20% grâce à l'expansion des semis a) dans le secteur mécanisé non irrigué du Gedaref, du Kassala, du Kordofan méridional et des Etats du Haut Nil et b) dans le secteur traditionnel non irrigué du Gezira (Butana), du Kassala, du Kordofan septentrional, du Kordofan méridional, du Darfour méridional, du Nil Blanc et des Etats de l'Equatoria occidentale.
Dans les secteurs tant mécanisé que traditionnel, ces augmentations ont été en partie dues à une pluviométrie bien meilleure dans les zones septentrionales des Etats susmentionnés, où la production de sorgho est toujours hasardeuse. Une pluviométrie plus tardive que dordinaire dans les zones centrales et méridionales de ces mêmes Etats na pas permis de planter le sésame au moment voulu, ce qui a amené certains exploitants à semer davantage de sorgho à la place.
Cinquante-neuf pour cent de la superficie plantée en sorgho cette année sont exploités par une dizaine de milliers de grands producteurs par des moyens mécanisés. Tous les facteurs étant égaux par ailleurs, les rendements de ces exploitations varient de 300 à 1 000 kg par hectare, selon les types de sol et le moment des semailles. On s'attendrait à avoir des rendements bien supérieurs dans ces sols qui, contenant moins d'argile, ont permis de planter le sorgho à temps en juillet et août au moment où les cultures nont pas été saturées deau et où, d'une manière générale, l'accès a été plus facile, ce qui a largement permis de désherber à temps. Dans les années où les ravageurs et les maladies ne sévissent pas, on estime que les rendements moyens de sorgho peuvent atteindre 763 kg par hectare.
Dans le secteur non irrigué traditionnel, les rendements devraient être semblables dans la plupart des Etats, même si l'on prévoit des rendements de 300 à 500 kg par hectare seulement dans le Kordofan septentrional et le Kordofan occidental, où la pluviosité a été moins favorable.
La production de sorgho dans le secteur irrigué n'atteindrait que 92% de la production de l'an dernier par suite d'une réduction des semis dans les principaux périmètres, dune moindre utilisation d'engrais et de problèmes de gestion de l'eau. L'accroissement des semis opportunistes de sorgho dans le cadre des systèmes demira (de décrue) au Kassala et dans les Etats du Nil ont fait augmenter la superficie du sorgho irrigué de quelque 12%. On estime que le rendement moyen, proportionnellement plus faible, se situe à environ 900 kg par hectare dans les plaines d'inondation, contre 2 000 kg par hectare dans les périmètres structurés.
La récolte totale des cultures irriguées et non irriguées de sorgho devrait être de 4 890 000 tonnes, soit 54% de plus que l'an dernier et 15% de plus que la récolte record de 1996-1997.
La superficie plantée de millet correspond pour l'essentiel aux sols plus légers du Soudan occidental. Cette année, une pluviométrie favorable a encouragé des semailles de même niveau que l'an dernier; toutefois, on s'attend à ce que la récolte sétende sur une plus grande proportion de la superficie plantée, par suite du renforcement des taux d'exploitation dans le Darfour. Près de 93% de la récolte de millet est produite par le secteur non irrigué traditionnel, dont 81% et 12% proviennent respectivement du Darfour et du Kordofan. Toutefois, dans la région avoisinante, d'importantes superficies de terres ont été abandonnées après les semailles, particulièrement dans le Kordofan septentrional (60%) et dans le Kordofan occidental (40%). Dans ces régions, le semis en sec sur des sols sablonneux nest suivi daucune façon culturale ou presque, de sorte que l'abandon n'entraîne pas une perte notable d'investissement, mais bien un manque à produire. Cette année, les occasions perdues ont été dues à des précipitations tardives dans les secteurs les plus secs des Etats et à des attaques du ver de l'épi de millet ("nafasha").
En règle générale, la production de millet atteint près du double de celle de l'an dernier, avec 1,12 million de tonnes, par suite des meilleurs rendements obtenus grâce à la pluie sur une plus grande superficie. Cette production est la plus forte jamais enregistrée.
Le blé est cultivé sous irrigation pendant la saison d'hiver. La mission a coïncidé avec les travaux de préparation des sols et la culture d'ensemencement dans les principaux périmètres d'irrigation. On a constaté que les travaux préparatoires étaient en retard, par suite des dommages causés par les inondations aux pompes et à l'infrastructure d'irrigation. Le système de culture "demira" (de décrue) s'étant prolongé pendant la saison d'hiver dans les Etats septentrionaux et dans les Etats du Nil, les exploitants ont été amenés à compter sur lirrigation par inondation au lieu de se préparer à la saison d'hiver.
Les emblavures de blé devraient diminuer de 35% par rapport à la moyenne des dix dernières années. Une baisse aussi prononcée est due pour moitié au recul enregistré dans les périmètres dirrigation des Etats septentrionaux et des Etats du Nil et également à la réduction continue de la superficie plantée de blé dans le Gezira, où cette culture est actuellement considérée comme économiquement risquée. Les niveaux densemencement dans le Rahad et dans le Nouveau Halfa se sont stabilisés après le passage au sorgho, l'an dernier, dans les zones marginales des périmètres.
Par suite du retard pris dans la préparation des sols et l'ensemencement,
les rendements en blé devraient être inférieurs à
la normale. On prévoit une production de 443 000 tonnes, soit 30% de
moins que la récolte de l'an dernier, ce qui correspond au recul de la
superficie ensemencée et aux prévisions pessimistes en matière
de rendement.
La pluviométrie annuelle dans l'ensemble du pays varie entre le niveau zéro dans les Etats septentrionaux à 1 800 mm au Sud dans l'Etat de lEquatoria occidentale. En 1998, le régime des pluies s'est caractérisé par un début tardif en juillet, suivi de fortes précipitations continues en août qui ont duré jusqu'à septembre et octobre dans la plupart des régions.
D'après les images obtenues à partir de l'indice de végétation (NBVi), la végétation est restée en-dessous de la normale jusqu'en juillet-août, mais des images ultérieures confirment l'effet positif des pluies en août, septembre et octobre, qui ont fait apparaître dans tout le pays un tapis végétal au-dessus de la moyenne.
Les cultures céréalières du secteur non irrigué, plantées plus tard que d'habitude, ont profité des précipitations qui se sont poursuivies jusqu'en octobre et novembre. Le rendement de toutes les cultures plantées dans les sols plus légers est bien plus élevé que d'habitude. En revanche, sur les sols plus lourds, de fortes pluies ont fait ressortir l'importance de pratiques agricoles qui respectent le calendrier voulu. Les vertisols du sud du Gedaref et d'ailleurs sont particulièrement difficiles à gérer les années de forte pluviosité, car on peut y accéder moins longtemps pour les cultiver et les désherber. Cette année, le début tardif de la campagne a écourté davantage encore la période de culture, ce qui a nui à la qualité de la préparation et a contraint les exploitants qui sèment tardivement à attendre jusqu'à septembre avec, en fin de compte, un effet négatif sur le rendement dans ces zones. Malgré cette situation et la saturation en eau des jeunes cultures, l'effet positif des précipitations dans le secteur non irrigué, y compris les grandes superficies exploitées sur les plaines d'inondation du Kassala et des Etats du Nil, a largement compensé les inconvénients signalés.
Les fortes pluies du mois d'août ont malheureusement créé des problèmes dans les périmètres d'irrigation, aggravant les difficultés dues à un mauvais drainage provoqué par l'envasement et l'enherbement des rigoles et des canaux. Le pire a été lorsque le haut niveau des cours d'eau a inondé les systèmes de pompage et a endommagé les entrées d'eau et les réseaux de canaux. Les mesures prises à titre préventif pour limiter l'envahissement de l'eau ont eu pour effet de réduire la superficie effectivement irriguée et donc de faire baisser la production dans certains périmètres.
Compte tenu des résultats enregistrés dans le secteur irrigué, cette saison a été décevante, avec une production de sorgho qui a baissé de 18% par rapport à la récolte de l'an dernier, malgré l'extension de la superficie irriguée par inondation dans les zones cultivées du type "demira".
Etant donné que plus de 80% des céréales sont produites dans le secteur non irrigué au moyen de systèmes traditionnels et de systèmes mécanisés à faible consommation d'intrants, l'effet stratégique des intrants se limite à l'apport de combustibles et de fonds pour la location de tracteurs ou lembauche de main-d'uvre. Dans le secteur non irrigué, seuls les programmes pilotes du Damazin et du Sim Sim emploient des semences améliorées et des engrais. La plupart (98%) des exploitants de cultures pluviales emploient leurs propres semences ou des semences obtenues localement à partir de stocks de report et ne réclament pas d'engrais. C'est l'inverse qui se produit dans le secteur irrigué, où la plupart des exploitants utilisent des semences améliorées obtenues dans le cadre des programmes et sont incités à utiliser des engrais à base d'urée qui leur sont fournis sous forme de crédits en nature.
Cette année, les exploitants des périmètres d'irrigation ont pu obtenir facilement des semences et des engrais. La mission a relevé que, si on signalait une utilisation normale des semences améliorées, l'emploi des engrais avait baissé d'environ 20%, ce qui sest traduit par une baisse correspondante des rendements moyens.
Depuis le début de la saison il a été possible de se procurer du combustible et des tracteurs dans les secteurs irrigués et non irrigués mécanisés. Les fonds, eux, ont été plus difficiles à obtenir. Dans toutes les grandes zones d'exploitation mécanisée, les prêts bancaires n'ont pas suffi à répondre à la demande et ont été d'une manière générale retardés du fait que la plupart des banques n'ont annoncé leur politique de prêt qu'en juillet. Les agriculteurs tributaires des crédits, que l'on estime représenter 10 à 20% de l'ensemble des exploitants, n'ont donc pas pu cultiver et semer au moment voulu, doù une baisse de la superficie plantée et des rendements.
Une bonne pluviosité profite également aux mauvaises herbes et tous les agriculteurs ont eu cette année la lourde tâche de lutter contre leur envahissement. On a signalé que dans tout le secteur traditionnel il a fallu désherber deux, voire trois fois. Faute de désherbage, les rendements étaient moindres et la récolte plus difficile. Les mauvaises herbes les plus pernicieuses signalées étaient l'herbe du Soudan et le chiendent rampant. Le striga continue de poser un problème grave sur les sols pauvres ou épuisés, particulièrement autour des villes de garnison dans le Sud et sur les terres des zones marginales du Nord où le sorgho est cultivé en permanence. On ne pratique toujours pas l'application différentielle de l'urée dans les zones envahies par le striga, même si l'on se rend compte que l'application d'engrais compense l'effet négatif du striga sur les rendements. Certains exploitants ont opté pour le millet (dans la province du Butana) pour rompre le cycle du striga ou ont retourné les sols des cultures infestées au début de la saison. L'un des principaux soucis des exploitants de cultures irriguées et non irriguées de l'Etat du Kassala a été l'invasion des terres cultivées par le mesquite (Prosopis juliaflora) et des campagnes ont été organisées pour encourager son élimination.
Heureusement, il n'y a pas eu cette année de problèmes de migrateurs nuisibles. On a signalé dans les Etats du Gedaref et du Damazin et dans ceux du Nil et du Kassala une pulvérisation préventive des gîtes larvaires du Quelea quelea dans les premiers et du criquet pèlerin dans les seconds. Aucun autre migrateur nuisible na été signalé. De même, hormis l'infestation du millet par le «nafasha » (Heliochelitus albipuntelle) dans le Kordofan septentrional et occidental, il n'a été signalé aucun autre problème important de ravageurs non migratoires qui dépasse le niveau habituel de tolérance. Les ravageurs signalés comprenaient les sauteriaux (Darfour), le ver africain, la punaise du sorgho, la cécidomye du sorgho, le foreur des tiges, les rongeurs, les termites et les oiseaux locaux.
Le charbon du sorgho a été signalé dans les exploitations traditionnelles non irriguées de l'est et du sud du pays, mais on a réussi à éviter laggravation du problème en appliquant un traitement universel des semences dans les secteurs mécanisés plantés de sorgho aussi bien irrigués que non irrigués. Les méthodes de traitement des semences devraient, toutefois, être revues pour assurer une distribution uniforme du produit chimique et, surtout, la protection de la main-d'uvre chargée du traitement.
Le bas niveau des prix des céréales en 1998, dû au grand
volume de grains stocké et à l'interdiction d'exporter des céréales,
a découragé toute expansion et tout investissement dans les secteurs
mécanisés et irrigués du Nord. On na toutefois pas
enregistré de réduction de la superficie semée de sorgho
car les exploitants n'avaient guère le choix: en effet, des cultures
de rapport comme le coton et le sésame ont besoin de beaucoup plus de
pluie que le sorgho, or la saison des pluies a été nettement en
retard en 1998. En outre, les coûts de production du sésame sont
beaucoup plus élevés que ceux du sorgho. Or, les exploitants se
trouvaient dans une situation financière difficile, vu la faible disponibilité
des crédits et les prix déprimés de l'année précédente.
Dans les tableaux 1 et 2, la production totale de céréales est présentée par culture, par Etat et par secteur sur la base des statistiques fournies par les Ministères de l'agriculture des Etats, actualisées au cours de la mission. On a inclus aux fins de comparaison les chiffres d'après récolte de 1997-1998. On notera que par suite de l'effondrement du système de collecte des données agricoles dans tous les Etats du Sud, à l'exception du Haut Nil, il a fallu évaluer la superficie du secteur traditionnel de la région méridionale daprès les statistiques démographiques en appliquant à ces dernières un multiplicateur correspondant à la taille moyenne des exploitations, corrigée selon les observations de la mission.
On prévoit cette année une production céréalière de 6,51 millions de tonnes, soit 46% de plus que l'an dernier et 22% de plus que la production record calculée pour 1996-1997.
Sorgho | Millet | Blé | Total des céréales 1/ | 1998/999 par rapport à 1997/1998 (en %) | |||||
1997/98 | 1998/99 | 1997/98 | 1998/99 | 1997/98 | 1998/99 | 1997/98 | 1998/99 | ||
Production irriguée | |||||||||
Nord | 11 | 6 | - | - | 195 | 169 | 206 | 175 | 85 |
Nil | 63 | 84 | - | - | 120 | 58 | 183 | 142 | 78 |
Nil bleu | 39 | 53 | - | - | - | - | 39 | 53 | 136 |
Nil blanc | 38 | 68 | - | - | 3 | 6 | 41 | 74 | 181 |
Gezira & Managil | 342 | 269 | - | - | 226 | 160 | 568 | 429 | 75 |
Rahad | 105 | 63 | - | - | 9 | 15 | 114 | 78 | 68 |
Suki | 27 | 19 | - | - | 1 | - | 28 | 19 | 68 |
Nouveau Halfa | 50 | 44 | - | - | 40 | 33 | 90 | 76 | 85 |
Gash | 32 | 24 | - | - | - | - | 32 | 24 | 75 |
Tokar | 3 | 4 | 1 | 3 | - | - | 4 | 7 | 173 |
Kassala (divers) | 20 | 40 | - | - | - | - | 20 | 40 | 198 |
Production irriguée totale | 730 | 674 | 1 | 3 | 594 | 441 | 1 325 | 1 117 | 84 |
Superficie récoltée totale (milliers dhectares) | 351 | 394 | 2 | 5 | 274 | 199 | 629 | 598 | 95 |
Production mécanisée non irriguée | |||||||||
Kassala | 153 | 219 | - | - | - | - | 153 | 219 | 143 |
Gedaref | 494 | 1 298 | 8 | 10 | - | - | 502 | 1 307 | 260 |
Damazin | 227 | 230 | 2 | 3 | - | - | 229 | 233 | 102 |
Sennar | 153 | 410 | 1 | 6 | - | - | 154 | 416 | 270 |
Nil blanc | 204 | 244 | 4 | 8 | - | - | 208 | 252 | 121 |
Kordofan méridional | 154 | 154 | 1 | 2 | - | - | 155 | 156 | 100 |
Haut Nil | 90 | 190 | 2 | 3 | - | - | 92 | 193 | 210 |
Darfour méridional | 2 | 2 | - | - | - | - | 2 | 2 | 100 |
Production mécanisée totale | 1 477 | 2 746 | 18 | 31 | 0 | 0 | 1 495 | 2 776 | 186 |
Superficie récoltée totale (milliers dhectares) | 3 419 | 3 840 | 44 | 60 | 3 463 | 3 900 | 113 | ||
Production traditionnelle | |||||||||
Gezira | 6 | 217 | - | - | - | - | 6 | 217 | 3 612 |
Nil bleu | 72 | 22 | 2 | 1 | - | - | 74 | 23 | 32 |
Sennar | 8 | 47 | 2 | 12 | - | - | 10 | 60 | 597 |
Nil blanc | 18 | 113 | 13 | 12 | - | - | 31 | 125 | 404 |
Kassala | 6 | 1 | - | - | - | - | 6 | 1 | 23 |
Nil | 7 | 11 | - | - | - | - | 7 | 11 | 154 |
Mer rouge | 4 | 6 | 5 | 3 | - | - | 9 | 9 | 100 |
Kordofan septentrional | 11 | 64 | 34 | 31 | - | - | 45 | 96 | 213 |
Kordofan méridional | 100 | 149 | 21 | 36 | - | - | 121 | 185 | 152 |
Kordofan occidental | 67 | 94 | 166 | 72 | - | - | 233 | 166 | 71 |
Darfour septentrional | 6 | 15 | 75 | 251 | - | - | 81 | 266 | 329 |
Darfour méridional | 402 | 280 | 209 | 525 | 1 | 1 | 612 | 806 | 132 |
Darfour occidental | 120 | 163 | 98 | 138 | 2 | 2 | 220 | 304 | 138 |
Etats méridionaux | 125 | 289 | 4 | 5 | - | - | 129 | 294 | 228 |
Production traditionnelle totale | 952 | 1 471 | 629 | 1 088 | 3 | 3 | 1 584 | 2 563 | 162 |
Superficie récoltée totale (milliers dhectares) | 1 559 | 2 171 | 2 780 | 2 872 | 3 | 2 | 4 342 | 5 045 | 116 |
Production nationale | 3 159 | 4 891 | 648 | 1 122 | 597 | 444 | 4 456 | 6 508 | 146 |
Superficie récoltée nationale | 5 329 | 6 405 | 2 826 | 2 938 | 277 | 201 | 8 515 | 9 618 | 113 |
Superficie (milliers dhectares) | Rendement (Kg/ha) | Production (milliers de tonnes) | ||||||||||||||||
Moyenne 88/89- 92/93 |
1994/95 | 1995/96 | 1996/97 | 1997/98 | 1998/99 | Moyenne 88/89- 92/93 |
1994/95 | 1995/96 | 1996/97 | 1997/98 | 1998/99 | Moyenne 88/89- 92/93 |
1994/95 | 1995/96 | 1996/97 | 1997/98 | 1998/99 | |
Sorgho | ||||||||||||||||||
Région septentrionale | 17 | 107 | 95 | 81 | 36 | 80 | 1 471 | 953 | 979 | 1 802 | 2 361 | 1 275 | 25 | 102 | 93 | 146 | 85 | 102 |
Région orientale | 1 539 | 1 984 | 1 403 | 1 843 | 1 759 | 2 202 | 674 | 560 | 500 | 722 | 495 | 772 | 1 038 | 1 111 | 701 | 1 331 | 870 | 1 699 |
Région centrale | 2 117 | 2 634 | 2 162 | 2 582 | 1 925 | 2 132 | 699 | 610 | 593 | 756 | 585 | 793 | 1 479 | 1 606 | 1 282 | 1 952 | 1 127 | 1 691 |
Kordofan | 511 | 982 | 559 | 773 | 799 | 867 | 423 | 372 | 206 | 371 | 416 | 535 | 216 | 365 | 115 | 287 | 332 | 464 |
Darfour | 263 | 312 | 245 | 267 | 269 | 481 | 418 | 804 | 629 | 749 | 1 970 | 956 | 110 | 251 | 154 | 200 | 530 | 460 |
Région méridionale | 222 | 276 | 272 | 706 | 538 | 643 | 387 | 377 | 327 | 452 | 400 | 739 | 86 | 104 | 89 | 319 | 215 | 475 |
Total partiel | 4 669 | 6 295 | 4 736 | 6 252 | 5 326 | 6 405 | 633 | 562 | 514 | 677 | 593 | 764 | 2 954 | 3 539 | 2 434 | 4 235 | 3 159 | 4 891 |
Millet | ||||||||||||||||||
Région septentrionale | 11 | 15 | 14 | 19 | 36 | 32 | 545 | 400 | 357 | 421 | 389 | 500 | 6 | 6 | 5 | 8 | 14 | 16 |
Région orientale | 52 | 46 | 53 | 70 | 54 | 88 | 346 | 304 | 358 | 386 | 444 | 477 | 18 | 14 | 19 | 27 | 24 | 42 |
Kordofan | 757 | 1 697 | 1 033 | 906 | 1 632 | 970 | 129 | 245 | 40 | 128 | 141 | 145 | 98 | 415 | 41 | 116 | 230 | 141 |
Darfour | 633 | 1 472 | 1 310 | 763 | 1 086 | 1 836 | 276 | 365 | 244 | 377 | 344 | 498 | 175 | 537 | 319 | 288 | 374 | 914 |
Région méridionale | 2 | 7 | 8 | 22 | 18 | 11 | 500 | 143 | 125 | 227 | 333 | 727 | 1 | 1 | 1 | 5 | 6 | 8 |
Total partiel | 1 455 | 3 237 | 2 418 | 1 780 | 2 826 | 2 937 | 205 | 301 | 159 | 249 | 229 | 382 | 298 | 973 | 385 | 444 | 648 | 1 121 |
Blé | ||||||||||||||||||
Région septentrionale | 39 | 65 | 76 | 97 | 113 | 79 | 2 513 | 2 400 | 2 553 | 2 835 | 2 788 | 2 873 | 98 | 156 | 194 | 275 | 315 | 227 |
Région orientale | 7 | 7 | 31 | 32 | 24 | 32 | 1 571 | 1 286 | 1 419 | 1 406 | 1 667 | 1 031 | 11 | 9 | 44 | 45 | 40 | 33 |
Région centrale | 263 | 203 | 199 | 191 | 137 | 88 | 1 551 | 1 379 | 1 533 | 1 602 | 1 745 | 2 057 | 408 | 280 | 305 | 306 | 239 | 181 |
Darfour | 2 | 3 | 8 | 11 | 3 | 2 | 1 000 | 667 | 875 | 1 273 | 1 000 | 1 500 | 2 | 2 | 7 | 14 | 3 | 3 |
Total partiel | 311 | 278 | 314 | 331 | 277 | 201 | 1 669 | 1 608 | 1 752 | 1 934 | 2 155 | 2 209 | 519 | 447 | 550 | 640 | 597 | 444 |
Toutes céréales | 6 435 | 9 810 | 7 468 | 8 363 | 8 429 | 9 543 | 586 | 506 | 451 | 636 | 522 | 677 | 3 771 | 4 959 | 3 369 | 5 319 | 4 404 | 6 456 |
Les précipitations fortes et bien réparties ont été favorables aux cultures pérennes, au brout, aux pâturages et aux cultures arbustives dans tout le pays. Inversement, le retard des précipitations dans le Nord a entraîné une réduction des semis de sésame, tandis que la plantation de coton dans les périmètres d'irrigation sest trouvée réduite par les problèmes de gestion d'eau. On a signalé que les faibles prix payés l'an dernier pour le sésame et les arachides ont découragé les investissements dans ces deux cultures pour ce qui est du secteur non irrigué et dans les légumes et la jachère pour ce qui est des périmètres d'irrigation.
Les rendements des deux cultures devraient toutefois avoir été renforcés par une meilleure pluviosité cette année et lappréciation des prix devrait se traduire par un regain dintérêt l'an prochain.
La mission a pu constater, pendant ses visites sur le terrain, que les troupeaux étaient en très bon état dans toutes les régions, sauf dans les Etats septentrionaux et les Etats du Nil, où les cultures fourragères irriguées ont souffert des inondations et les prix de la luzerne et du sorgho utilisé pour le fourrage ont triplé pendant la période d'inondation. On trouve ailleurs dans le pays des pâturages et des plantes de brout de qualité exceptionnelle.
Aucun foyer de maladie du bétail n'a été signalé dans les Etats septentrionaux. Des campagnes de vaccination ont été menées à bien dans toutes les régions, sauf dans les zones du Sud dont l'accès a été refusé à cause des opérations militaires.
D'après les chiffres estimatifs de la population animale, 34,6 millions de bovins, 78,8 millions d'ovins et de caprins et 3 millions de chameaux vivent sur les terrains de parcours.
La pluviosité enregistrée cette année garantit une bonne alimentation de l'ensemble du cheptel. De meilleures réserves d'eau potable ont permis d'utiliser les parcours normalement fermés pendant la saison sèche. Cette abondance des pâturages se traduit par une stabilité ou un relèvement des prix du bétail dans la mesure où les agro-pasteurs, les pasteurs et les hommes d'affaires augmentent leurs troupeaux de bovins et d'ovins.
La situation alimentaire des ménages des communautés d'agro-pasteurs et de pasteurs du Kordofan, du Darfour et de la plupart des Etats méridionaux, à laquelle l'élevage contribue largement, sera stimulée par une meilleure production et des termes favorables de l'échange.
Outre les systèmes traditionnels de production extensive qui prédominent en matière d'élevage, le secteur moderne fournit des produits laitiers et des produits dérivés de l'aviculture. Grâce à une bonne récolte et aux prix modérés des céréales, le secteur moderne devrait se développer et englober l'engraissement des bovins et des ovins pour la consommation intérieure et l'exportation.
Les animaux de bât et de trait, notamment les mules, les chevaux et les ânes, jouent un rôle d'une importance vitale dans tous les Etats septentrionaux. Lan prochain, leurs rations devraient s'améliorer dans la mesure où lon disposera de davantage de fourrage, de céréales de qualité inférieure et de sous-produits céréaliers.
La moins bonne récolte de 1995 a amené le Gouvernement du Soudan à interdire les exportations de sorgho. Puis, une récolte record a été obtenue en 1996, tandis que celle de 1997 a été relativement bonne. Toutefois, pour garantir la sécurité alimentaire nationale et pour contenir l'inflation, dans le cadre de la politique de resserrement du crédit appliquée, l'interdiction a été maintenue pendant près de trois ans jusqu'au mois d'octobre dernier. De ce fait, l'approvisionnement en sorgho a été tout-à-fait satisfaisant en 1998, tandis que les prix restaient bas et relativement stables.
Le graphique ci-dessous permet de comparer les prix de gros du sorgho en 1998 et 1997 dans le Gedaref, principale zone de culture qui assure 27% de la production nationale. Dans les autres régions, les prix sont généralement plus élevés, mais suivent la tendance enregistrée dans le Gedaref.
Source: Ministère de l'agriculture et des forêts, Division de la planification et de l'économie
Le mouvement saisonnier des prix dépend notamment des précipitations enregistrées pendant la campagne en cours susceptibles de trahir les espérances. C'est ainsi qu'en 1998, les prix ont augmenté entre mai et juillet par suite du retard de la saison des pluies et ont baissé à partir d'août sous l'effet des pluies abondantes tombées à la mi-juillet et qui ont continué jusqu'à la fin de la saison. En novembre, lorsque la saison des pluies s'est terminée, l'absence de ravageurs et de maladies et les bons rendements obtenus ont fait encore baisser de 11% les prix de l'ancienne récolte de sorgho qui sont tombés à 16 000 livres soudanaises par sac de 90 kg.
En novembre, le cours du sorgho était inférieur de 6% à celui de l'année précédente. Si l'on tient compte du niveau de l'inflation (officieusement évalué à au moins 30% en 1998), la baisse des prix en termes réels est bien plus forte. Les prix sont historiquement faibles par rapport au cours de 40 000 livres soudanaises par sac atteint avant la récolte de 1996. Les prix actuels du marché sont également inférieurs au prix "Salem" [ Les prêts Salem de l'ABS ou d'autres banques sont servis en liquide mais remboursés en nature sous forme de sorgho à un prix que l'on escompte être celui de l’après-récolte mais qui est fixé en avril-mai avant les semailles. Le système prévoit également une fourchette de prix comprise entre un tiers de plus et un tiers de moins que le prix initialement arrêté. Pour autant que le prix du marché après la récolte reste à l'intérieur de cette fourchette, aucune modification n'est apportée. Toutefois, si l'écart entre le prix initialement fixé et le prix du marché après la récolte devient supérieur ou inférieur à un tiers du prix initialement fixé, l'exploitant reçoit de l'ABS ou doit verser à cette institution un montant en liquide équivalant à cet écart.] , fixé cette année à 23 000 livres soudanaises par sac et qui est censé tenir compte des coûts de production majorés d'une marge bénéficiaire pour les agriculteurs.
A 16 000 livres par sac, le prix du sorgho ne compense pas les coûts de production, ce qui cause de grandes difficultés financières aux exploitants, particulièrement dans les secteurs mécanisés non irrigués et irrigués et pourrait entraîner de fortes réductions des emblavures à la prochaine campagne.
Les coûts de production pour un agriculteur gérant une exploitation mécanisée moyenne qui produit normalement trois sacs par feddan (soit 0,64 tonne par hectare) sont évalués à 18 000 livres par sac environ, y compris les taxes à la production (5% environ) et le transport jusqu'au marché. Même si l'on n'applique pas d'engrais dans les secteurs d'exploitation mécanisés non irrigués, les coûts de production restent élevés en raison de la cherté de l'essence nécessaire aux opérations agricoles et au transport et de la main-d'oeuvre considérable nécessaire pour le désherbage et la récolte. La plupart des agriculteurs gèrent de grandes exploitations de 1 000 feddans, soit 420 hectares (contre cinq feddans dans les secteurs irrigués et traditionnels) et ne peuvent donc pas compter uniquement sur la main-d'uvre familiale. Pour les grands producteurs, disposant de plus de 10 000 feddans, ou pour les exploitants des meilleures zones de culture du nord du Gedaref, les coûts de production sont inférieurs et se situent autour de 16 000 livres par sac.
Les prix devraient baisser à mesure que la récolte record enregistrée se confirmera. A l'époque de la visite de la mission, le sorgho était à peine coté à 11 000 livres par sac dans le Gedaref et 9 000 dans le Darfour occidental. Toutefois, il n'était pas rare de trouver des prix allant de 13 à 15 000 livres, là où la récolte était encore en cours. Le coût des travaux de récolte représentant plus de 60% des coûts totaux de production, si les prix continuent de baisser, ils pourraient atteindre un seuil où les agriculteurs auraient financièrement avantage à laisser les cultures sur pied dans les champs.
Les exportations semblent être seules susceptibles de renforcer le marché, puisque les quantités de sorgho achetées par l'ABS pour constituer des réserves stratégiques et pour le remboursement des prêts Salem n'ont pas d'effet notable sur le marché. Il est toutefois difficile de prévoir dans quelle mesure les exportations pourraient contrebalancer la tendance qu'ont les prix à baisser par suite de la faible compétitivité du sorgho soudanais, de la mévente sur le marché international et de l'incertitude qui règne quant à la réglementation officielle.
Le sorgho soudanais est moins concurrentiel sur les marchés internationaux du fait à la fois de la faiblesse des rendements (0,6 tonne par hectare) et de l'importance des taxes et des coûts du transport jusqu'à Port-Soudan. Au prix d'équilibre de 18 000 livres soudanaises par sac dans le Gedaref, il faut ajouter entre 11 et 12% [ Ce pourcentage comprend une taxe sur les ventes ("Gebana") de 8% prélevée sur le prix par sac, une taxe de 2% pour financer la mise en valeur des eaux dans le Gedaref, plus des taxes fixes pour l'Université du Gedaref (100 livres par sac) et les opérations militaires (50 livres par sac).] pour couvrir divers impôts et taxes acquittés par lacheteur. Le coût du chargement et du déchargement du sorgho transporté par camion et du stockage dans les silos et les commissions renchérissent encore le prix du sac de quelque 1 300 livres. Le prix franco camion à Gedaref atteint ainsi un niveau équivalant à 107,3 dollars des Etats-Unis par tonne [ Au taux de change officiel de 2 200 livres soudanaises pour 1 dollar des Etats-Unis en novembre 1998.] . Lorsqu'on ajoute le transport jusqu'à Port-Soudan (11 dollars) ainsi que les frais portuaires supplémentaires, les taxes à l'exportation et les droits de douane et les commissions bancaires (9 dollars), le prix franco à bord s'élève à 128,3 dollars par tonne, contre 95 dollars par tonne pour le prix actuel des exportations internationales (sorgho des Etats-Unis FOB Golfe).
Toutefois, au prix intérieur effectif qui nest que de 16 000 livres par sac, le prix Gedaref franco camion descend à 96,2 dollars et le prix FOB Port-Soudan à 117 dollars par tonne. Avec des tarifs du fret vers l'Italie et le Japon (les principales destinations des exportations de sorgho avant l'interdiction) de l'ordre de 14 et 20 dollars respectivement, le sorgho soudanais ne devient intéressant que pour les pays importateurs voisins. Toutefois, il est douteux que l'excédent exportable soit entièrement absorbé par les marchés de la région. Même si l'Arabie saoudite et la Libye, d'importants partenaires commerciaux pour le Soudan, importent de grandes quantités de céréales secondaires tous les ans, depuis cinq ans ils importent de l'orge et non pas du sorgho. Au prix de 79 dollars la tonne sur le marché international, l'orge est actuellement moins chère que le sorgho.
Les prix intérieurs devraient connaître d'autres baisses qui renforceront probablement la compétitivité du sorgho soudanais. Au prix intérieur de 11 000 livres le sac, le prix FOB à Port-Soudan tomberait à 83 dollars la tonne, ce qui rendrait le sorgho soudanais intéressant pour l'Italie, le Japon et d'autres pays asiatiques.
Toutefois, les exportations de sorgho seront assujetties à des prix minimums à l'exportation visant à protéger les producteurs. Les exportations ont beau être dorénavant autorisées, aucune autorisation n'avait encore été délivrée à la fin du mois de novembre, le Gouvernement du Soudan continuant d'étudier le prix minimum à fixer. Selon des informations officieuses, ce prix minimum serait d'environ 120 à 130 dollars la tonne. Les quantités effectivement exportées en 1998 et en 1999 dépendront en grande partie du niveau auquel le prix minimum à l'exportation sera établi. Le Gouvernement du Soudan étudie également la possibilité de réduire les taxes afin de rendre les exportations de sorgho plus concurrentielles.
Deux autres facteurs peuvent stimuler les exportations: le premier est la dévaluation
continue de la livre soudanaise qui, entre septembre et décembre 1998,
a perdu 20% de sa valeur. Le deuxième tient au manque de devises étrangères
au Soudan. Dans ce contexte, les négociants qui souhaitent importer doivent
se procurer des devises étrangères grâce aux exportations.
Or, par suite d'une demande régulière, les négociants tirent
leurs bénéfices pour l'essentiel des importations. Ils pourraient
donc, dans certaines limites, exporter du sorgho sans faire de bénéfice
ou en faisant un bénéfice minimum, tout en compensant leurs "pertes"
par des importations très profitables telles que celles dhuile
ou de produits manufacturés.
Le tableau 3 montre le bilan céréalier national prévu par la mission pour 1998-1999, ainsi que le bilan correspondant à l'année précédente.
1997/98 | 1998/99 | |||||||||
Céréales | Sorgho | Millet | Blé | Divers | Céréales | Sorgho | Millet | Blé | Divers | |
Disponibilités | 5 598 | 3 909 | 818 | 817 | 54 | 7 351 | 5 341 | 1 372 | 584 | 54 |
Stocks d'ouverture | 1 141 | 750 | 170 | 220 | 1 | 841 | 450 | 250 | 140 | 1 |
Production | 4 457 | 3 159 | 648 | 597 | 53 | 6 510 | 4 891 | 1 122 | 444 | 53 |
Utilisation | 6 165 | 3 932 | 818 | 1 297 | 118 | 8 026 | 5 341 | 1 372 | 1 234 | 79 |
Aliments pour les personnes | 4 477 | 2 802 | 493 | 1 072 | 110 | 4 645 | 2 907 | 562 | 1 104 | 72 |
Aliments pour les animaux | 260 | 250 | 10 | 0 | 0 | 530 | 450 | 80 | 0 | 0 |
Divers | 507 | 350 | 65 | 85 | 7 | 870 | 634 | 150 | 80 | 6 |
Exportations | 80 | 80 | 0 | 0 | 0 | 980 | 900 | 80 | 0 | 0 |
Stocks de clôture | 841 | 450 | 250 | 140 | 1 | 1 001 | 450 | 500 | 50 | 1 |
Importations | 567 | 23 | 0 | 480 | 64 | 675 | 0 | 0 | 650 | 25 |
Commerciales | 509 | 0 | 0 | 480 | 29 | 675 | 0 | 0 | 650 | 25 |
Aide alimentaire | 58 | 23 | 0 | 0 | 35 | - 1/ | 0 | 0 | 0 | 0 |
S'agissant de l'offre, les stocks d'ouverture sont évalués à 841 000 tonnes. Même si ce chiffre est élevé, ces stocks ne sont pas exceptionnels et sont inférieurs à ceux de l'année précédente. Des stocks importants de sorgho ont été constitués après l'interdiction des exportations et après les bonnes récoltes des deux dernières années. Pour ce qui est du millet, les récoltes satisfaisantes enregistrées en 1997-1998 et en 1996-1997 ont permis de conserver des stocks importants provenant de la précédente récolte record de 1994-1995. Les conditions climatiques propres au Soudan permettent de conserver les grains, particulièrement le millet, plusieurs années dans des entrepôts souterrains traditionnels ("matmurahs").
Les stocks des sorgho sont évalués à 450 000 tonnes. La Banque agricole du Soudan, le principal détenteur de stocks officiels (avec une capacité de stockage d'un million de tonnes entre silos et moyens d'entreposage traditionnels), disposerait de 150 000 tonnes de stock, dont 61% proviennent de la récolte de 1996-1997. D'autres banques détiennent également des quantités moindres. Ces stocks officiels proviennent du remboursement des prêts selon le système Salem et d'achats effectués sur le marché pour constituer des réserves stratégiques. A l'heure actuelle, le Gouvernement du Soudan s'efforce d'exporter ces réserves pour renouveler les stocks compte tenu de laugmentation des coûts de stockage des récoltes précédentes. On estime que les négociants détiennent 60 000 tonnes de sorgho et les agriculteurs environ 230 000 tonnes.
Production et approvisionnements céréaliers: On a enregistré cette année des récoltes record de sorgho et de millet. Même si l'on prévoit une réduction de la production de blé l'an prochain, la production totale de céréales en 1998-1999 devrait atteindre, d'après les prévisions, 6,5 millions de tonnes, soit 46% de plus que le niveau normal de l'an dernier et représenter la meilleure récolte jamais enregistrée. La récolte exceptionnellement bonne, jointe à un fort volume de stocks de report, se traduira par des approvisionnements en céréales considérables en 1999 et donc par un excédent exportable important, ce qui permettra du même coup de renforcer la consommation alimentaire et d'augmenter les stocks.
S'agissant de la consommation et de l'utilisation, la mission a rectifié légèrement à la hausse le chiffre correspondant à la population en 1998 en se fondant sur une évaluation plus fiable de la situation démographique dans les Etats méridionaux. L'application d'un taux de croissance annuel de 2,7% amène à prévoir pour le milieu de 1999 une population de 30 292 000 habitants.
Compte tenu de lamélioration des approvisionnements en céréales et de la baisse des prix réels prévues, la mission a réévalué la consommation de "toutes les céréales" par habitant en 1998-1999 qui passe à 153,4 kg contre le niveau historique normal de 140 kg, encore que cette consommation ne soit que légèrement supérieure au niveau déjà élevé de l'an dernier. La consommation accrue de cette année concernerait essentiellement le millet dans les zones du Kordofan occidental et du Darfour où se pratique l'agriculture de subsistance. La consommation nationale de millet par habitant devrait augmenter de 10% pour passer à 18,6 kg (bien au-dessus de la moyenne qui était depuis longtemps de 11 kg). Pour ce qui est du sorgho, essentiellement produit dans des exploitations commerciales des régions occidentales, la consommation ne devrait augmenter que marginalement car l'inflation a entraîné une érosion du pouvoir d'achat de la majorité de la population et la demande intérieure s'est tassée. Par ailleurs, l'augmentation de la production de sorgho enregistrée cette année dans les régions occidentales fait que peu de sorgho sera transféré vers ces zones. D'après les prévisions, la demande de blé devrait rester forte dans les zones urbaines. La raison en est que le blé est un aliment prêt à consommer et que le relèvement du prix du bois de feu nécessaire à la préparation du sorgho a annulé l'avantage économique que présentait la consommation de cette céréale.
L'utilisation des céréales pour lalimentation des animaux et d'autres utilisations devraient augmenter en 1998-1999 parallèlement à l'augmentation de la production. Les densités de semis sont évaluées à 7,5 kg/ha pour le sorgho, 5 kg/ha pour le millet et 150 kg/ha pour le blé. On a calculé un pourcentage supérieur de pertes de récoltes cette année pour tenir compte des pertes pré-récolte. Les cultures sont en effet restées longtemps sur pied dans les zones mécanisées. Au total, les pertes pré-récolte et les pertes normales après récolte sont évaluées à 12% pour le sorgho et le millet et à 8% pour le blé.
Sans compter les stocks nationaux, la mission estime que les disponibilités de sorgho pour l'exportation seront de 900 000 tonnes environ. Comme signalé plus haut, cela dépendra pour l'essentiel de la réglementation gouvernementale en matière d'exportations et de la capacité d'absorption des marchés. Il y aura sans doute très peu dexportations non déclarées de sorgho par suite des contrôles sévères aux frontières de l'est et des bonnes récoltes enregistrées en Ethiopie et en Erythrée. En revanche, on s'attend à des exportations non déclarées de millet vers l'ouest car les disponibilités sont d'un niveau encore jamais atteint alors que, dans certaines parties du Tchad, la récolte a été moins bonne sous leffet des inondations et que dans les zones orientales de la République démocratique du Congo touchées par les troubles intérieurs, cette céréale se trouve en quantités peu abondantes.
Les importations ne devraient concerner que le blé. Les importations de blé, denrée pour laquelle le pays souffre d'un déficit structurel, ont fortement fluctué ces dernières années (voir tableau 4). Il est prévu que pour compenser la baisse de production, les importations de blé augmenteront par rapport à l'an dernier et passeront à 650 000 tonnes environ. La faiblesse relative des prix à l'exportation sur les marchés mondiaux devrait favoriser les importations de blé. On s'attend également, comme dordinaire, à l'importation de petites quantités de riz pour les zones urbaines. Compte tenu de l'excédent céréalier que connaît le Soudan au niveau national, il est instamment recommandé aux donateurs d'acheter localement la plus grande quantité possible de sorgho, là où il se trouvera en excédent, afin de soutenir les ventes et de fournir des variétés de céréales qui soient acceptées localement. Pour des raisons de rentabilité et de logistique, l'aide alimentaire destinée à l'Etat de l'Equatoria et à certaines parties des Etats du Bahr el Ghazal continuera d'être apportée à partir du Kenya.
1993 | 1994 | 1995 | 1996 | 1997 | 19984 |
400 | 617 | 379 | 419 | 676 | 480 |
4/ Sur la base des prévisions de la mission.
Source: Bulletin des statistiques sur le commerce extérieur - Banque du Soudan et évaluations de la FAO concernant l'aide alimentaire.
Stocks de clôture: La récolte record de céréales
de cette année permettra de consolider les stocks nationaux. Grâce
à l'augmentation de 73% de la production de millet, les stocks devraient
doubler et passer à 500 000 tonnes, soit l'équivalent des besoins
de consommation pour une année. D'après les prévisions,
les stocks de sorgho ne devraient pas dépasser le haut niveau atteint
en 1997-1998, mais si l'excédent d'exportation prévu ne se réalise
pas, ils augmenteront notablement d'ici la fin de la campagne de commercialisation.
Seul le blé devrait connaître une baisse de stock. Au total, la
mission a provisoirement prévu des stocks de clôture des céréales
pour 1998-1999 d'un million de tonnes, soit 19% de plus que l'année précédente.
Une rapide évaluation, menée dans le cadre de la mission, a permis de faire le point de la situation nutritionnelle de la population du nord du pays. Les informations concernant le sud ont fait l'objet de rapports séparés établis par l'Opération survie au Soudan du PAM.
D'après l'enquête menée en 1996-1997 par le Ministère de la santé et l'OMS, la prévalence d'une malnutrition aiguë par carence protéo-calorique chez les enfants de moins de cinq ans (19,6%) était bien plus élevée que celle relevée dans l'enquête de référence sur le Soudan septentrional menée en 1986-1987. Les taux de malnutrition étaient particulièrement élevés dans les zones chroniquement vulnérables du Darfour septentrional et du Kordofan dans l'ouest du pays, ainsi que dans les Etats de la Mer Rouge à l'est. Ces régions connaissent de manière récurrente des périodes de sécheresse et se caractérisent par une production alimentaire faible.
Les problèmes liés aux régimes déséquilibrés et aux maladies endémiques sont aggravés par les carences en vitamine A et en iode dans les Etats susmentionnés et dans l'Etat du Gezira. La carence en iode pose également un problème dans les Etats du Nil Bleu et du Haut Nil. L'anémie nutritionnelle est très répandue dans tous les Etats et touche aussi bien les enfants que leurs mères, avec un taux de prévalence plus élevé dans le Kordofan et dans les Etats du Nil.
La malnutrition aiguë varie selon les zones et les années et est liée à l'insécurité alimentaire, particulièrement pendant la période de disette allant de mars à octobre. Les agriculteurs pratiquant une agriculture de subsistance et les femmes chefs de famille vivant dans des régions sujettes à la sécheresse sont particulièrement vulnérables.
Les déplacements fréquents de populations et les pertes de biens et de stocks dus à la guerre civile dans le Sud sont une des principales causes de l'insécurité alimentaire. Il importe toutefois de faire la différence entre divers groupes de personnes déplacées à l'intérieur du territoire qui ne sont pas tous autant exposés au risque de malnutrition. Les groupes récemment déplacés sont particulièrement vulnérables, alors que ceux qui se sont établis depuis des années ont trouvé des moyens de faire face à leur situation. Il ressort des enquêtes nutritionnelles menées en 1997-1998 par le Ministère de la santé et ADRA que la malnutrition est davantage répandue dans les groupes de personnes déplacées vivant dans des camps ; les personnes déplacées dans les zones rurales qui habitent chez des parents ou bâtissent des camps de fortune subissent les mêmes contraintes que les ménages ruraux pauvres avec, en plus, des problèmes d'accès à la terre ou de métayage.
La bonne récolte de 1998-1999 devrait renforcer la sécurité alimentaire des ménages dans les zones vulnérables grâce à des approvisionnements accrus tant de céréales que de produits d'origine animale et grâce aux meilleures possibilités d'emploi qu'offre la saison des récoltes.
Toutefois, linquiétude se justifie dans certaines parties de la région du Kordofan, où les récoltes ont à nouveau été décevantes. Les hommes ont en effet quitté leur communauté plus tôt que d'habitude à la recherche d'un emploi, tandis que les femmes, les personnes âgées et les enfants courront un plus grand risque de malnutrition dans les semaines à venir: les femmes, leur charge de travail s'accroissant, ont moins de temps pour s'occuper des tâches domestiques (notamment de la préparation des aliments et des enfants). La situation alimentaire et nutritionnelle au Kordofan exigera donc un suivi plus étroit dans les mois à venir.
D'une manière plus générale, les comparaisons entre les enquêtes anthropométriques nationales sur les enfants de moins de cinq ans montrent que la situation ne s'est pas améliorée depuis dix ans. L'enquête anthropométrique de 1996-1997 montre un taux général de malnutrition de 19,6% chez les enfants de moins de cinq ans, avec un taux préoccupant de malnutrition aiguë de 6,8%. Pour ce qui est des carences en oligo-éléments, la situation ne s'est pas améliorée comme on le croyait et les zones de forte endémicité restent les mêmes quil y a des années.
La sous-nutrition et les carences en oligo-éléments ont beau
être toujours les deux principaux problèmes de santé publique
rencontrés dans le Soudan septentrional, aucun système de surveillance
nutritionnelle na pourtant été mis en place. Il est recommandé
dinstaurer, en prenant pour base les collectes actuelles de données,
un système d'information alimentaire et nutritionnelle qui permette de
cibler, de concevoir et de suivre des projets et des programmes d'assistance.
Il sera particulièrement important de coordonner les secteurs sanitaires
et agricoles au niveau fédéral et au niveau des Etats et des provinces
et de faire participer les organismes et les institutions compétents.
Grâce à la bonne récolte de cette année, la situation nationale en matière de sécurité alimentaire devrait nettement s'améliorer pour la plupart des agriculteurs traditionnels. Toutefois, près de la moitié des céréales étant produite par une minorité de grands exploitants, la population des régions septentrionales ne bénéficiera qu'indirectement de l'augmentation des disponibilités alimentaires, de la stabilité des prix et des possibilités accrues d'emploi pendant la saison des récoltes, sans pouvoir se procurer directement des vivres.
Dans le Sud du Soudan, la situation est en revanche tout à fait différente. La poursuite de la guerre civile entre les forces gouvernementales et les groupes rebelles provoque des déplacements fréquents de populations, des pertes de biens et de stocks et une perturbation permanente des marchés locaux qui maintiennent des centaines de milliers de Soudanais dans l'insécurité alimentaire. Cette situation touche particulièrement les segments de la population qui ne participent pas aux combats, à savoir les femmes, les enfants, les personnes âgées et les malades qui, étant les plus vulnérables, sont ceux qui souffrent le plus de la faim.
De ce fait, des interventions à grande échelle s'imposeront pour assurer l'apport d'une aide alimentaire. Dans les Etats du Jonglei, du Haut Nil occidental et de Unity, des semailles et une récolte limitées et de fortes inondations ont provoqué des pénuries alimentaires dans une grande partie de la population touchée par la guerre. Dans le Bahr el Ghazal, malgré les améliorations apportées dans les zones contrôlées tant par le gouvernement que par les rebelles, les groupes de personnes déplacées et de personnes sans ressources, qui constituent dans certaines zones 50% de la population, auront besoin d'une aide pour survivre, pour remplacer leurs biens, pour remettre leurs exploitations en état et pour assurer leur sécurité alimentaire.
On a beau escompter que l'est et l'ouest de l'Etat de l'Equatoria produiront des excédents alimentaires, plusieurs villes assiégées ou isolées et les régions accueillant des personnes déplacées et des rapatriés connaîtront un déficit alimentaire.
Dans le Soudan septentrional, la principales source de préoccupation est la situation des communautés de personnes déplacées à l'intérieur du territoire qui se trouvent dans le Kassala et à l'ouest et au sud du Kordofan, dans le sud du Darfour, dans le Nil Blanc et à Khartoum. Faute de pouvoir produire ou obtenir assez de vivres pour satisfaire leurs besoins fondamentaux, ces communautés resteront vulnérables en 1999, particulièrement pendant la période de soudure allant de mars à septembre.
Dans le Kordofan septentrional, la récolte décevante obtenue amène à penser que certaines communautés auront besoin d'être suivies de près. Toutefois, il conviendrait de stimuler l'économie générale des ménages en leur assurant des possibilités de travail dans les Etats voisins et en améliorant létat du cheptel, la productivité de l'élevage et les termes de l'échange des produits animaux.
La mission FAO/PAM de décembre 1997 a évalué à quelque 73 500 tonnes de produits alimentaires les besoins en aide alimentaire d'urgence pour les 2,4 millions de personnes déplacées dans les Etats méridionaux, les zones de transition, Khartoum et le Nil Blanc. Cette même mission a été d'avis que pour combler le déficit alimentaire du Darfour et de la Mer Rouge, il faudrait recourir à des interventions d'urgence. Mais 1998 a été une année particulièrement mauvaise. Après un report de récolte de 1997 très peu satisfaisant, les hostilités entre le SPLM et le Gouvernement du Soudan ont provoqué de nouveaux déplacements d'environ 150 000 personnes dans le Bahr el Ghazal. Toute la région a subi de très graves pénuries alimentaires qui, à certains endroits, se sont transformées en famine et ont entraîné d'importantes pertes en vies humaines par inanition. Les combats qui se sont déroulés dans l'Equatoria orientale, le Haut Nil occidental et l'Etat d'Unity ont également provoqué déplacements de populations et famine. Une fois encore, dans de nombreuses régions, léconomie a été dévastée par des combats permanents, de mauvaises récoltes, des vols de bétail et un abattage excessif, des déplacements massifs de populations, des pertes de stocks alimentaires et un accès difficile à ces territoires. Le commerce et les échanges ont pratiquement cessé dans la plupart des régions. En outre, l'arrivée tardive des pluies dans les régions concernées, suivies de graves inondations, a provoqué la destruction des récoltes sur plus de 100 000 ha.
Pour répondre à cette urgence soudaine, le PAM a lancé la plus grande opération humanitaire de parachutage de son histoire et, en combinant des interventions par air, par péniche et par route, a réussi à faire parvenir plus de 98 000 tonnes de secours alimentaires d'urgence à plus de 2 millions de personnes entre janvier et novembre 1998. En outre, le PAM, grâce à ses programmes permanents d'alimentation scolaire, au programme "Vivres contre travail" et à l'Opération en faveur des réfugiés de longue date, a apporté un total de 30 000 tonnes de divers produits alimentaires aux populations vulnérables qui vivent dans le Darfour, le Kordofan, les Etats de la Mer Rouge et les régions orientales du pays.
La distribution accrue d'aide alimentaire d'urgence aux populations dans le besoin a eu un effet nettement positif et la crise dans l'Etat du Bahr el Ghazal et dans divers autres zones a pu être contenue. Elle est cependant loin d'être terminée. La situation nutritionnelle s'améliore d'une manière générale, mais jusqu'à 46% des enfants continuent de souffrir de malnutrition dans certaines régions et la mortalité journalière peut encore atteindre le taux alarmant de 2 décès pour 10 000 personnes aux endroits les plus durement touchés. Repérer les groupes les plus vulnérables reste une tâche difficile. La récolte de 1998, bien que généralement meilleure que celle de 1997 dans tout le pays, ne réussit pas à compenser le manque à produire enregistré dans plusieurs des régions touchées. Les excédents ne peuvent être transportés jusqu'aux zones déficitaires par suite de l'insuffisance de l'infrastructure routière et d'une insécurité permanente et même dans les zones où les récoltes ont été relativement suffisantes, les groupes de population n'y ont pas tous un accès direct faute d'espèces ou de ressources vendables.
Les secours alimentaires d'urgence acheminés par les bureaux du PAM au Soudan sont soit achetés localement, soit débarqués à Port-Soudan. Le PAM dispose d'installations portuaires et logistiques suffisantes pour recevoir, transporter et stocker les denrées à l'intérieur du pays. En 1998, 50 000 tonnes de sorgho environ ont été achetées localement par le PAM et distribuées au titre de l'aide alimentaire. Vu les bons approvisionnements en céréales au Soudan et les bas prix du marché, on prévoit qu'il sera de nouveau possible d'acheter du sorgho local en 1999 à des tarifs très favorables.
Au Soudan, le PAM a pour bases opérationnelles et logistiques Port-Soudan, Khartoum, Kosti et El Obeid, tandis qu' hors du Soudan, les principales bases sont Mombasa et Lokichoggio au Kenya et Koboko en Ouganda. Les opérations de planification, d'évaluation, de distribution et de suivi dans les régions concernées sont assurées par un réseau de 12 bureaux extérieurs auxiliaires dans le secteur septentrional, par la base de Lokichoggio et par une base sur le terrain dans le secteur méridional. On procède actuellement à l'établissement d'autres bases avancées dans le secteur méridional. Les secours alimentaires d'urgence provenant de ces bases sont livrés à leurs destinataires tant dans le Nord que dans le Sud du Soudan, grâce à une combinaison de transports aériens, fluviaux et routiers. En 1998, 72% des livraisons ont été effectuées par air, les livraisons par route représentant 21% et celles par péniche 7%. S'il a fallu effectuer par air les livraisons dhuile en employant un système coûteux de ponts aériens, par contre, les livraisons par air de toutes les autres denrées se sont effectuées au moyen d'un système de parachutage plus économique. Afin de réduire les coûts, le PAM a également commencé en 1998 à effectuer les livraisons de vivres dans le secteur méridional à partir d'El Obeid au Soudan, qui se trouve beaucoup plus près des destinations situées dans les diverses régions du Bahr el Ghazal que Lokichoggio et Khartoum. Ces livraisons se sont révélées efficaces et seront poursuivies en 1999.
Depuis la signature, par les responsables de l'Opération survie au Soudan, le Gouvernement du Soudan et le SPLA, du protocole sur la sécurité et les normes opérationnelles minimales concernant les couloirs ferroviaires et les couloirs routiers de franchissement de la ligne, pendant la réunion sur laide humanitaire tenue à Rome à la fin de 1998, le PAM est résolu à augmenter ses livraisons par terre et discute énergiquement des différentes options possibles avec tous les pouvoirs concernés. Une première étude de faisabilité visant à utiliser le réseau ferroviaire soudanais a été entreprise en 1998. De nouvelles péniches vont être ajoutées à la flotte actuelle pour renforcer la capacité de livraison. Faute de réseau routier tous temps dans le Soudan méridional, on s'efforce actuellement d'obtenir des donateurs le financement d'une opération de type spécial visant à améliorer létat de deux couloirs routiers et à créer un parc de 40 camions qui soient la propriété directe du PAM. En 1999, le PAM fera tout son possible pour commencer à procéder à des distributions d'urgence à travers les lignes qui divisent les parties en lutte. S'il y parvient, laccès des secours aux zones touchées s'en trouveraient non seulement dune manière général amélioré, mais les interventions dans certains secteurs deviendraient beaucoup plus économiques.
Pour faciliter la distribution d'une aide alimentaire d'urgence à la population qui en a besoin et qui vit dans des zones où le réseau et l'infrastructure routiers sont en mauvais état, les vivres seront installées à l'avance, avant le début de la saison des pluies, aux points éloignés situés dans la zone de transition, l'Etat d'Unity, les collines de la Mer Rouge, lEtat du Nil Blanc et celui du Kassala.
Le PAM se propose d'aider tous les bénéficiaires prévus grâce à des distributions bien ciblées de céréales, de légumineuses, d'huile, de sel et de mélange maïs-soja. Dans le secteur septentrional, des aliments énergétiques (BP-5, lait écrémé en poudre, sucre, Unimix) seront également distribués par l'intermédiaire des ONG.
Dans le Soudan méridional, il faudra prévoir une aide alimentaire dans les régions du Bahr el Ghazal et de l'Equatoria, dans l'Etat d'Unity et dans certaines régions du Jonglei. Dans le Bahr el Ghazal, marqué par des déficits généraux de production, des déplacements de populations, des pertes de récolte et de bétail et l'absence dautres sources dapprovisionnement, 831 500 personnes auront besoin d'une aide alimentaire, particulièrement pendant la période de soudure. Dans l'Etat d'Unity, où des factions sont en lutte permanente et où les inondations ont entraîné d'importants déplacements et des pertes alimentaires, 239 000 personnes auront besoin d'aide. Dans le Jonglei, où les inondations et l'insécurité ont provoqué des déplacements massifs, des pertes de culture et des pertes de stocks alimentaires, 362 000 personnes environ seront touchées. Dans le Haut Nil et dans la région de lEquatoria, on escompte de bonnes récoltes, mais les personnes touchées par la guerre et les inondations devraient souffrir d'un déficit alimentaire limité, mais non négligeable. Dans le Haut Nil, le PAM prévoit d'apporter une aide alimentaire à 253 000 personnes touchées par les inondations, les déplacements et l'insécurité. Dans l'Equatoria, les carences alimentaires toucheront 267 500 personnes habitant dans des villes de garnison ou dans des zones hébergeant des personnes déplacées et des réfugiés. Au total, 2 millions de personnes, soit 40% de l'ensemble de la population du Soudan méridional, devraient avoir besoin d'une aide alimentaire en 1999.
Malgré la bonne production obtenue dans le Soudan occidental et oriental, quelque 350 000 personnes vulnérables vivant dans les camps de personnes déplacées de la zone de transition de Khartoum et du Nil Blanc et dans les zones du Soudan septentrional touchées par les inondations devraient souffrir de déficits alimentaires importants en 1999. Les mauvaises récoltes enregistrées ça et là et un pouvoir d'achat insuffisant compromettent la sécurité alimentaire des pauvres des villes, des exploitants vivant d'une agriculture de subsistance et des populations déplacées. La mission estime qu'il sera nécessaire d'apporter une aide aux bénéficiaires suivants: 180 000 à Khartoum, 8 500 dans le Nil Blanc, 30 000 dans le Kassala, 21 600 dans le Kordofan occidental, 72 500 dans le Kordofan méridional, 42 000 dans le Darfour méridional et 52 000 dans d'autres zones ne relevant pas de l'Opération survie au Soudan. Les approvisionnements alimentaires fournis pendant la période de soudure contribueront à prévenir la migration rurale et à stabiliser la population active.
Compte tenu des taux élevés de malnutrition dans de nombreuses régions, le PAM apportera également un supplément d'aliments riches en énergie à 25 000 enfants souffrant de malnutrition grave, à des femmes enceintes et allaitantes, à des adultes mal nourris, à des malades de la tuberculose et du kalazar. Dans toutes les régions touchées, le PAM distribuera également des rations aux personnes s'occupant dans leur famille des bénéficiaires des programmes d'alimentation thérapeutique et complémentaire (essentiellement les mères d'enfants souffrant de malnutrition).
Compte tenu des divers échecs enregistrés dans les négociations de paix par le passé et des hostilités actuellement en cours dans le Haut Nil occidental et dans les Etats d'Unity, de Jonglei et de lEquatoria orientale, il est à craindre que la guerre civile ne connaisse une autre escalade en 1999, voire que les hostilités ne s'étendent à d'autres régions. La crise actuelle s'en trouverait aggravée. Afin de se préparer à répondre à d'autres besoins en secours d'urgence dus à une éventuelle escalade du conflit ou à des catastrophes climatologiques et afin de pouvoir faire rapidement face à toute situation d'urgence potentielle, le PAM prévoira dans le programme de 1999 un stock d'intervention correspondant à 10% des besoins en aide alimentaire prévus pour une année.
Pour les diverses interventions prévues dans le Soudan méridional et dans les régions des Etats septentrionaux touchées par la guerre et souffrant de déficit alimentaire, la mission estime qu'au total 173 300 tonnes de denrées composites, dont 130 000 tonnes de céréales, seront nécessaires au titre de l'aide alimentaire d'urgence en 1999. On trouvera dans le tableau 5 une ventilation résumée des bénéficiaires prévus et des quantités de denrées nécessaires en 1999 pour les interventions d'urgence ne relevant pas du programme de développement en cours financé par le PAM.
Région | Bénéficiaires | Aide alimentaire |
Khartoum | 180 000 | 6 048 |
Nil Blanc | 8 500 | 857 |
Kassala | 30 000 | 6 048 |
Kordofan occidental | 21 600 | 726 |
Kordofan méridional | 72 500 | 2 437 |
Darfour méridional | 42 000 | 1 410 |
Bahr el Ghazal | 831 500 | 73 839 |
Haut Nil | 253 400 | 6 216 |
Unity | 239 000 | 16 942 |
Jonglei | 362 200 | 14 563 |
Equatoria | 267 500 | 19 005 |
Hors-Opération survie au Soudan | 52 000 | 1 512 |
Total partiel | 2 360 200 | 149 603 |
Alimentation complémentaire et thérapeutique | 25 000 | 7 931 |
Stocks d'intervention | 15 753 | |
Total général | 173 288 |
En plus de l'opération d'intervention d'urgence en cours dans le Soudan méridional, le PAM devrait fournir 52 600 tonnes de produits alimentaires au Soudan septentrional. Les interventions viseront les zones souffrant d'un déficit alimentaire chronique, les populations touchées par les inondations et les réfugiés.
Type | Bénéficiaires | Aide alimentaire (tonnes) |
Secours d'urgence pour les personnes touchées par les inondations au Soudan | 113 000 | 4 577 |
Opération en faveur des réfugiés de longue date | 159 500 | 30 642 |
Aide aux travailleurs ruraux des régions sujettes à la sécheresse | 100 000 | 6 600 |
Alimentation scolaire | 265 000 | 10 759 |
Total | 637 500 | 52 578 |
Le présent rapport a été établi sous la responsabilité des secrétariats de la FAO et du PAM à partir d'informations provenant de sources officielles et officieuses. La situation pouvant évoluer rapidement, prière de s'adresser aux soussignés pour un complément d'information le cas échéant. |
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Abdur Rashid |
Mohamed Zejjari |
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