L’ÉTAT DELA SÉCURITÉ
ALIMENTAIRE ET
DE LA NUTRITION
DANS LE MONDE
2021

TRANSFORMER LES SYSTÈMES ALIMENTAIRES POUR
QUE LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE, UNE MEILLEURE
NUTRITION ET UNE ALIMENTATION SAINE ET
ABORDABLE SOIENT UNE RÉALITÉ POUR TOUS

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Les pays révisent régulièrement leurs statistiques officielles passées et présentes. Il en est de même pour les données statistiques qui figurent dans le présent rapport, et les estimations sont révisées en conséquence. Les utilisateurs sont donc invités à ne considérer la variation des estimations dans le temps que pour une même édition de L’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde et à ne pas comparer des données publiées dans des éditions différentes.

Régions géographiques

La composition des régions géographiques adoptée dans le présent ouvrage est celle de la classification M49 de la Division de statistique de l’Organisation des Nations Unies (ONU), qui l’utilise surtout dans ses publications et ses bases de données (https://unstats.un.org/unsd/methodology/m49). Les pays, zones ou territoires sont classés par groupe pour des raisons de commodité statistique. Cela n’implique en rien, de la part des Nations Unies, une quelconque supposition quant à leur situation politique ou autre. Veuillez vous reporter à la liste ci-après pour connaître la composition par pays de chaque région figurant dans les tableaux des annexes 1 et 2 ainsi que dans les tableaux 1 à 4 de la section 2.1.

Les pays, zones ou territoires pour lesquels on ne disposait pas de données suffisantes ou suffisamment fiables pour réaliser l’estimation n’ont pas été pris en compte ni inclus dans les agrégats. Plus précisément:

  • Afrique du Nord: Outre les pays énumérés dans le tableau, les estimations concernant la prévalence de la sous-alimentation (PoU) et l’insécurité alimentaire déterminée d’après l’échelle de mesure de l’insécurité alimentaire vécue (échelle FIES) englobent le Sahara occidental. En revanche, les estimations relatives à l’émaciation, au retard de croissance et à l’excès pondéral chez les enfants, à l’insuffisance pondérale à la naissance, à l’obésité chez les adultes, à l’allaitement exclusif et à l’anémie excluent le Sahara occidental.

  • Afrique de l’Est: Par rapport à la classification M49, le Territoire britannique de l’océan Indien, les Terres australes et antarctiques françaises, Mayotte et la Réunion sont exclus.

  • Afrique de l’Ouest: Par rapport à la classification M49, Sainte-Hélène est exclue.

  • Asie et Asie de l’Est: Par rapport à la classification M49, les agrégats relatifs à l’insuffisance pondérale à la naissance et à l’émaciation excluent le Japon.

  • Caraïbes: Par rapport à la classification M49, sont exclus Anguilla, Aruba, Bonaire, Saint-Eustache et Saba, Curaçao, la Guadeloupe, les Îles Caïmanes, les Îles Turques et Caïques, les Îles Vierges américaines, les Îles Vierges britanniques, la Martinique, Montserrat, Saint-Barthélemy, Saint-Martin (partie française) et Sint Maarten (partie néerlandaise). Les agrégats relatifs à l’obésité chez les adultes, à l’émaciation chez les enfants, à l’insuffisance pondérale à la naissance et à l’allaitement exclusif excluent Porto Rico et les Îles Vierges américaines.

  • Amérique du Sud: Par rapport à la classification M49, sont exclues la Géorgie du Sud-et-Îles Sandwich du Sud, la Guyane française, l’Île Bouvet et les Îles Falkland (Malvinas).

  • Australie et Nouvelle-Zélande: Par rapport à la classification M49, sont exclues l’Île Christmas, les Îles des Cocos (Keeling), les Îles Heard et McDonald et l’Île Norfolk.

  • Mélanésie: Par rapport à la classification M49, la Nouvelle-Calédonie est exclue en ce qui concerne l’anémie, l’émaciation, le retard de croissance et l’excès pondéral chez les enfants, l’insuffisance pondérale à la naissance et l’allaitement exclusif.

  • Micronésie: Par rapport à la classification M49, Guam, les Îles Mariannes du Nord et les Îles mineures éloignées des États-Unis sont exclus en ce qui concerne l’obésité chez les adultes, l’anémie, l’émaciation chez les enfants, l’insuffisance pondérale à la naissance et l’allaitement exclusif. Les agrégats relatifs au retard de croissance et à l’excès pondéral chez les enfants excluent uniquement les Îles mineures éloignées des États-Unis d’Amérique.

  • Polynésie: Par rapport à la classification M49, sont exclues les Îles Pitcairn et les Îles Wallis-et-Futuna. Les estimations concernant l’obésité chez les adultes, l’émaciation chez les enfants, l’insuffisance pondérale à la naissance et l’allaitement exclusif n’incluent pas la Polynésie française, les Samoa américaines et Tokélaou (Membre associé). Les agrégats relatifs au retard de croissance et à l’excès pondéral chez les enfants excluent uniquement la Polynésie française.

  • Amérique du Nord: Par rapport à la classification M49, Saint-Pierre-et-Miquelon est exclu. Les agrégats relatifs à l’obésité chez les adultes, à l’anémie, à l’insuffisance pondérale à la naissance et à l’allaitement exclusif n’incluent pas non plus les Bermudes ni le Groenland. Les agrégats relatifs à l’émaciation se fondent uniquement sur des données concernant les États-Unis d’Amérique.

  • Europe du Nord: Par rapport à la classification M49, sont exclues les Îles d’Åland, les Îles Anglo-Normandes, les Îles Féroé (Membre associé), l’Île de Man et les Îles Svalbard-et-Jan Mayen.

  • Europe du Sud: Par rapport à la classification M49, sont exclus Gibraltar, Saint-Marin et le Saint Siège. Toutefois, les estimations relatives au retard de croissance, à l’excès pondéral chez les enfants et à l’insuffisance pondérale à la naissance incluent Saint-Marin.

  • Europe de l’Ouest: Par rapport à la classification M49, le Liechtenstein et Monaco sont exclus. Toutefois, les estimations relatives au retard de croissance, à l’excès pondéral chez les enfants, à l’anémie et à l’insuffisance pondérale à la naissance incluent Monaco.

Autres regroupements

Les catégories «pays les moins avancés», «pays en développement sans littoral» et «petits États insulaires en développement» incluent les pays indiqués par la Division de statistique de l’ONU (https://unstats.un.org/unsd/methodology/m49).

Petits États insulaires en développement: Les agrégats concernant le retard de croissance, l’émaciation et l’excès pondéral chez les enfants, l’obésité chez les adultes, l’allaitement exclusif et l’insuffisance pondérale à la naissance n’incluent pas Anguilla, Aruba, Bonaire, Saint-Eustache et Saba, Curaçao, les Îles Vierges britanniques, Montserrat, la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française et Sint Maarten (partie néerlandaise). En outre, les estimations relatives à l’émaciation chez les enfants, à l’obésité chez les adultes et à l’insuffisance pondérale à la naissance excluent les Samoa américaines et Porto Rico.

Les pays à revenu élevé, pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure, pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure et pays à faible revenu correspondent à la classification de la Banque mondiale pour l’exercice budgétaire 2020-2021 (https://datahelpdesk.worldbank.org/knowledgebase/articles/906519).

Pays à faible revenu et à déficit vivrier (2018): Afghanistan, Bangladesh, Bénin, Burkina Faso, Burundi, Cameroun, Comores, Congo, Côte d’Ivoire, Djibouti, Érythrée, Éthiopie, Gambie, Ghana, Guinée, Guinée-Bissau, Haïti, Îles Salomon, Inde, Kenya, Kirghizistan, Lesotho, Libéria, Madagascar, Malawi, Mali, Mauritanie, Mozambique, Népal, Nicaragua, Niger, Ouganda, Ouzbékistan, République arabe syrienne, République centrafricaine, République démocratique du Congo, République populaire démocratique de Corée, République-Unie de Tanzanie, Rwanda, Sao Tomé-et-Principe, Sénégal, Sierra Leone, Somalie, Soudan, Soudan du Sud, Tadjikistan, Tchad, Togo, Viet Nam, Yémen et Zimbabwe.

Composition des régions géographiques

AFRIQUE

Afrique du Nord: Algérie, Égypte, Libye, Maroc, Sahara occidental, Soudan et Tunisie.

Afrique subsaharienne

Afrique australe: Afrique du Sud, Botswana, Eswatini, Lesotho et Namibie.

Afrique centrale: Angola, Cameroun, Congo, Gabon, Guinée équatoriale, République centrafricaine, République démocratique du Congo, Sao Tomé-et-Principe et Tchad.

Afrique de l’Est: Burundi, Comores, Djibouti, Érythrée, Éthiopie, Kenya, Madagascar, Malawi, Maurice, Mozambique, Ouganda, République-Unie de Tanzanie, Rwanda, Seychelles, Somalie, Soudan du Sud, Zambie et Zimbabwe.

Afrique de l’Ouest: Bénin, Burkina Faso, Cabo Verde, Côte d’Ivoire, Gambie, Ghana, Guinée, Guinée-Bissau, Libéria, Mali, Mauritanie, Niger, Nigéria, Sénégal, Sierra Leone et Togo.

ASIE

Asie centrale: Kazakhstan, Kirghizistan, Ouzbékistan, Tadjikistan et Turkménistan.

Asie de l’Est: Chine, Japon, Mongolie, République de Corée et République populaire démocratique de Corée.

Asie de l’Ouest: Arabie saoudite, Arménie, Azerbaïdjan, Bahreïn, Chypre, Émirats arabes unis, Géorgie, Iraq, Israël, Jordanie, Koweït, Liban, Oman, Palestine, Qatar, République arabe syrienne, Turquie et Yémen.

Asie du Sud: Afghanistan, Bangladesh, Bhoutan, Inde, Iran (République islamique d’), Maldives, Népal, Pakistan et Sri Lanka.

Asie du Sud-Est: Brunéi Darussalam, Cambodge, Indonésie, Malaisie, Myanmar, Philippines, République démocratique populaire lao, Singapour, Thaïlande, Timor-Leste et Viet Nam.

AMÉRIQUE LATINE ET CARAÏBES

Caraïbes: Antigua-et-Barbuda, Bahamas, Barbade, Cuba, Dominique, Grenade, Haïti, Jamaïque, Porto Rico, République dominicaine, Sainte-Lucie, Saint-Kitts-et-Nevis, Saint-Vincent-et-les Grenadines et Trinité-et-Tobago.

Amérique latine

Amérique centrale: Belize, Costa Rica, El Salvador, Guatemala, Honduras, Mexique, Nicaragua et Panama.

Amérique du Sud: Argentine, Bolivie (État plurinational de), Brésil, Chili, Colombie, Équateur, Guyana, Paraguay, Pérou, Suriname, Uruguay et Venezuela (République bolivarienne du).

OCÉANIE

Australie et Nouvelle-Zélande: Australie et Nouvelle-Zélande.

Océanie (hors Australie et Nouvelle-Zélande)

Mélanésie: Fidji, Îles Salomon, Nouvelle-Calédonie, Papouasie-Nouvelle-Guinée et Vanuatu.

Micronésie: Îles Marshall, Kiribati, Micronésie (États fédérés de), Nauru et Palaos.

Polynésie: Îles Cook, Nioué, Polynésie française, Samoa, Samoa américaines, Tokélaou (Membre associé), Tonga et Tuvalu.

AMÉRIQUE DU NORD ET EUROPE

Amérique du Nord: Bermudes, Canada, États-Unis d’Amérique et Groenland.

Europe

Europe de l’Est: Bélarus, Bulgarie, Fédération de Russie, Hongrie, Pologne, République de Moldova, Roumanie, Slovaquie, Tchéquie et Ukraine.

Europe du Nord: Danemark, Estonie, Finlande, Irlande, Islande, Lettonie, Lituanie, Norvège, Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord et Suède.

Europe du Sud: Albanie, Andorre, Bosnie-Herzégovine, Croatie, Espagne, Grèce, Italie, Macédoine du Nord, Malte, Monténégro, Portugal, Serbie et Slovénie.

Europe de l’Ouest: Allemagne, Autriche, Belgique, France, Luxembourg, Pays-Bas et Suisse.

Le monde est à un tournant décisif: il présente un visage bien différent de celui d’il y a six ans, lorsque nous nous sommes engagés à éliminer la faim, l’insécurité alimentaire et toutes les formes de malnutrition d’ici à 2030. À l’époque, même si nous étions bien conscients des difficultés, nous avions confiance, persuadés que grâce à des approches de transformation bien conçues nous parviendrions à accélérer suffisamment les progrès déjà engagés et à nous mettre sur la voie de la réalisation de ces objectifs. Or les quatre dernières éditions de L’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde nous ont ramenés à plus d’humilité face à la réalité. Le monde n’a pas progressé, en général, que ce soit vers la réalisation de la cible 2.1 (faire en sorte que chacun ait accès toute l’année à une alimentation saine, nutritive et suffisante) ou de la cible 2.2 (mettre fin à toutes les formes de malnutrition) des objectifs de développement durables (ODD).

L’édition de 2020 soulignait que la pandémie de covid-19 avait un effet dévastateur sur l’économie mondiale, causant une récession à un degré que nous n’avions pas connu depuis la deuxième guerre mondiale, et mettait en garde contre le fait que si l’on ne prenait pas rapidement des mesures, des millions de personnes, y compris des enfants, verraient leur situation en matière de sécurité alimentaire et de nutrition se dégrader. Malheureusement, la pandémie continue de faire ressortir les faiblesses de nos systèmes alimentaires, lesquelles mettent en péril la vie et les moyens d’existence, en particulier des plus vulnérables et des personnes qui vivent dans des contextes fragiles, partout dans le monde.

L’édition de cette année évalue de 720 à 811 millions le nombre de personnes qui ont été confrontées à la faim en 2020 – soit 161 millions de plus qu’en 2019. Près de 2,37 milliards de personnes n’ont pas eu accès à une nourriture adéquate en 2020 – soit 320 millions de personnes de plus en une année seulement. Aucune région du monde n’a été épargnée. Une alimentation saine, du fait de son coût et de la persistance de niveaux élevés de pauvreté et d’inégalités de revenu, demeure hors de portée de quelque 3 milliards de personnes, dans toutes les régions du monde. En outre, d’après de nouvelles analyses présentées dans le rapport, l’inaccessibilité économique accrue d’une alimentation saine est associée à des degrés plus élevés d’insécurité alimentaire modérée ou grave.

Il n’est pas encore possible de quantifier dans sa totalité l’impact qu’aura eu la pandémie de covid-19 en 2020, mais les millions d’enfants de moins de 5 ans chez qui on constate un retard de croissance (149,2 millions), une émaciation (45,4 millions) ou un excès pondéral (38,9 millions) ont de quoi inquiéter. Le problème de la malnutrition chez l’enfant persiste, en particulier en Afrique et en Asie. L’obésité chez l’adulte continue par ailleurs de progresser, et on ne voit pas se dessiner un renversement de la tendance, que ce soit au niveau mondial ou au niveau régional. Les interventions nutritionnelles essentielles ont été perturbées durant la pandémie et celle-ci a eu une incidence négative sur les modes d’alimentation, rendant plus difficile encore l’élimination de la malnutrition sous toutes ses formes. Sur le plan sanitaire, les interactions entre l’obésité, les maladies non transmissibles liées à l’alimentation et la pandémie font ressortir la nécessité urgente d’assurer l’accès de tous à une alimentation saine. Malgré tout, derrière ces difficultés se cachent quelques progrès importants – la prévalence de l’allaitement maternel exclusif des nourrissons de moins de 6 mois, notamment, est en progression.

La situation aurait pu être pire si les gouvernements n’avaient pas agi et sans les mesures de protection sociale impressionnantes qu’ils ont mises en place durant la crise due à la pandémie de covid-19. Malheureusement, non seulement les mesures prises pour enrayer la pandémie ont causé une récession économique d’une gravité sans précédent, mais en outre d’autres facteurs importants sont intervenus qui expliquent les récents revers enregistrés en matière de sécurité alimentaire et de nutrition. Parmi ces facteurs figurent les conflits et la violence dans de nombreuses régions du monde, et les catastrophes liées au climat, partout dans le monde. Compte tenu des interactions, passées et présentes, entre ces facteurs et les ralentissements et les fléchissements économiques, et compte tenu également de l’ampleur (croissante, dans certains pays) et de la persistance des inégalités, il n’est pas surprenant que les gouvernements n’aient pu empêcher que se matérialise le scénario le plus pessimiste en ce qui concerne la sécurité alimentaire et la nutrition, pour des millions de personnes dans le monde entier.

Le monde est donc à un tournant décisif, non seulement parce que nous avons à surmonter de plus grands défis pour mettre un terme à la faim, à l’insécurité alimentaire et à toutes les formes de malnutrition, mais aussi parce que, la fragilité de nos systèmes alimentaires se trouvant largement exposée, il nous est donné la possibilité de construire, en mieux, et de nous mettre sur la voie de la réalisation de l’ODD 2. Le Sommet des Nations Unies sur les systèmes alimentaires, qui aura lieu cette année, débouchera sur une série de mesures que les gens, les acteurs des systèmes alimentaires et les gouvernements, partout dans le monde, pourront prendre à l’appui d’une transformation des systèmes alimentaires mondiaux. Nous devons nous arrimer à la dynamique qui s’est d’ores et déjà créée à l’approche du Sommet et continuer de rassembler des éléments d’information sur les interventions et les modèles d’action les plus susceptibles de permettre une transformation des systèmes alimentaires. Le présent rapport ambitionne de contribuer à cet effort mondial.

Nous savons qu’il y a plusieurs points d’entrée pour transformer les systèmes alimentaires de sorte qu’ils offrent à tous une alimentation nutritive et abordable et deviennent plus efficaces, résilients, inclusifs et durables, et que nous puissions ainsi contribuer au progrès vers la réalisation de l’ensemble des ODD. Les systèmes alimentaires de l’avenir doivent offrir des moyens d’existence décents à ceux qui travaillent en leur sein, en particulier les petits producteurs des pays en développement – eux qui cultivent, transforment, emballent, transportent et vendent les aliments dont nous nous nourrissons. Ils doivent aussi être inclusifs et encourager la pleine participation des peuples autochtones, des femmes et des jeunes, individuellement et par le biais des organisations qui les rassemblent. Les générations futures ne deviendront des acteurs productifs et des forces de progrès au sein des systèmes alimentaires que si des mesures décisives sont prises pour que les enfants ne soient plus privés de leur droit à la nutrition.

L’objectif général de la transformation des systèmes alimentaires est actuellement au centre de l’attention mondiale, mais le présent rapport va plus loin en mettant en évidence les voies qui doivent être empruntées face aux principaux facteurs à l’origine de la récente montée de la faim et du ralentissement des progrès vers une réduction de toutes les formes de malnutrition. Le rapport reconnaît que les voies de transformation à emprunter ne seront faisables que si elles satisfont à certaines conditions, notamment si elles créent des débouchés pour ceux qui sont toujours marginalisés, si elles favorisent la santé humaine et si elles assurent la protection de l’environnement. Se mettre sur la voie de l’élimination de la faim et de la malnutrition sous toutes ses formes suppose que l’on cesse de cloisonner les solutions et que l’on se tourne vers des solutions intégrées appliquées au système alimentaire et vers des politiques et des investissements qui relèvent, immédiatement, le défi mondial de la sécurité alimentaire et de la nutrition.

Le Sommet des Nations Unies sur les systèmes alimentaires, le Sommet de la nutrition pour la croissance et la vingt-sixième Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (COP26), qui ont tous lieu cette année, offrent une occasion unique de progresser vers l’objectif de la sécurité alimentaire et de la nutrition par la transformation des systèmes alimentaires.

Nul doute que les conclusions auxquelles aboutiront ces grandes manifestations auront une incidence déterminante sur les actions qui seront menées au cours de la deuxième moitié de la Décennie d’action des Nations Unies pour la nutrition. Nous sommes déterminés à saisir pleinement cette occasion pour susciter de nouveaux engagements en faveur d’une transformation des systèmes alimentaires, afin d’éliminer la faim et la malnutrition sous toutes ses formes et de mettre une alimentation saine à la portée de tous, et afin d’avancer, toujours mieux et plus loin, après la pandémie de covid-19.

Qu Dongyu
Directeur général de la FAO

Gilbert F. Houngbo
Président du FIDA

Henrietta H. Fore
Directrice exécutive de l’UNICEF

David Beasley
Directeur exécutif du PAM

Tedros Adhanom Ghebreyesus
Directeur général de l’OMS

TABLEAUX

1 Prévalence de la sous-alimentation dans le monde, 2005-2020

2 Nombre de personnes sous-alimentées dans le monde, 2005-2020

3 Prévalence de l’insécurité alimentaire grave uniquement et de l’insécurité alimentaire modérée ou grave, évaluée selon l’échelle FIES, 2014-2020

4 Nombre de personnes en situation d’insécurité alimentaire grave uniquement et en situation d’insécurité alimentaire modérée ou grave, évalué selon l’échelle FIES, 2014-2020

5 En 2019, une alimentation saine demeurait hors de portée de quelque 3 milliards de personnes dans le monde. De 2017 à 2019, le nombre de personnes dans cette situation a augmenté en Afrique et en Amérique latine et dans les Caraïbes

6 Cibles mondiales en matière de nutrition approuvées par l’Assemblée mondiale de la Santé et cibles correspondantes à l’horizon 2030

7 La plupart des régions ont enregistré des progrès, mais pas assez pour atteindre les cibles mondiales si les tendances (avant covid-19) se poursuivent; aucune sous-région n’est en voie d’atteindre la cible relative à l’insuffisance pondérale à la naissance, et l’obésité des adultes s’est aggravée dans toutes les sous-régions

8 Principaux domaines d’action et objectifs s’agissant d’intégrer l’action humanitaire, le développement et la consolidation de la paix dans les zones touchées par des conflits

9 Principaux domaines d’action et objectifs s’agissant d’accroître la résilience face aux changements climatiques dans l’ensemble du système alimentaire

10 Principaux domaines d’action et objectifs s’agissant de renforcer la résilience des plus vulnérables face à l’adversité économique

11 Principaux domaines d’action et objectifs s’agissant d’intervenir le long de la chaîne d’approvisionnement alimentaire en vue de réduire le coût des aliments nutritifs

12 Principaux domaines d’action et objectifs s’agissant de lutter contre les inégalités structurelles en veillant à ce que les interventions soient favorables aux pauvres et inclusives

13 Principaux domaines d’action et objectifs s’agissant de renforcer l’environnement alimentaire et de changer le comportement des consommateurs afin de favoriser des habitudes alimentaires ayant une incidence positive sur la santé humaine et sur l’environnement

A1.1 Progrès accomplis vers la réalisation des objectifs de développement durable (ODD) et des cibles nutritionnelles mondiales: prévalence de la sous-alimentation, de l’insécurité alimentaire modérée ou grave, de certaines formes de malnutrition, de l’allaitement exclusif et de l’insuffisance pondérale à la naissance

A1.2 Progrès accomplis vers la réalisation des objectifs de développement durable (ODD) et des cibles nutritionnelles mondiales: nombre de personnes sous-alimentées, en situation d’insécurité alimentaire modérée ou grave et souffrant de certaines formes de malnutrition; nombre de nourrissons exclusivement nourris au sein et nombre de bébés présentant une insuffisance pondérale à la naissance

A2.1 Prévisions immédiates des plages de la prévalence de la sous-alimentation et du nombre de personnes sous-alimentées pour 2020

A2.2 Coefficients de régression de trois modèles estimés à partir des valeurs CVy historiques (2000-2019)

A2.3 Règles relatives à l’évaluation des progrès accomplis au regard des cibles nutritionnelles mondiales

A4.1 Liste des pays par association de facteurs

FIGURES

1 En 2020, le nombre de personnes sous-alimentées dans le monde a continué d’augmenter, de sorte que 720 à 811 millions de personnes ont été confrontées à la faim, soit 118 millions de plus qu’en 2019 si l’on prend en compte le milieu de la fourchette (768 millions) et jusqu’à 161 millions de plus si l’on prend en compte la limite supérieure de la fourchette

2 Plus de la moitié (418 millions) des personnes touchées par la faim dans le monde en 2020 vivent en asie et plus d’un tiers (282 millions) en afrique

3 Toutes les sous-régions d’Afrique et d’Amérique latine et des Caraïbes, et la plupart des sous-régions d’Asie, enregistrent une augmentation de la prévalence de la sous-alimentation en 2020 par rapport à 2019, la hausse la plus forte étant observée en Afrique de l’Ouest

4 L’insécurité alimentaire modérée ou grave progresse lentement depuis six ans et touche désormais plus de 30 pour cent de la population mondiale

5 L’ampleur et la répartition des différents degrés d’insécurité alimentaire varient considérablement selon les régions du monde

6 Dans l’ensemble du monde et dans chaque région, la prévalence de l’insécurité alimentaire est plus élevée chez les femmes que chez les hommes

7 Atteindre les cibles mondiales relatives à la nutrition d’ici à 2025 et 2030 reste un défi. On estime qu’en 2020 le retard de croissance touchait 22 pour cent des enfants de moins de 5 ans, l’émaciation 6,7 pour cent et le surpoids 5,7 pour cent. En 2019, près de 30 pour cent des femmes âgées de 15 à 49 ans présentaient une anémie

8 Le retard de croissance est le seul indicateur qui enregistre d’importants progrès dans plusieurs régions depuis 2000. Deux indicateurs, le surpoids chez l’enfant et l’anémie chez les femmes en âge de procréer, n’ont connu aucun progrès en deux décennies. L’obésité des adultes est en forte augmentation dans toutes les régions

9 En août 2020, 90 pour cent environ des pays étudiés ont signalé des changements dans la couverture des principaux services de nutrition suite à la covid-19. Si 80 pour cent d’entre eux ont signalé des perturbations dans la couverture des services, une petite proportion a constaté une amélioration

10 Le scénario covid-19 prévoit un léger recul de la faim au niveau mondial de 2021 à 2030, avec de grandes différences dans l’évolution selon les régions

11 Des progrès ont été réalisés en matière de malnutrition mais il faut accélérer le rythme, et inverser les tendances pour certaines formes de malnutrition, si l’on veut atteindre les cibles mondiales de nutrition fixées pour 2025 et 2030

12 La moitié environ des enfants vivent dans des pays qui ne sont pas en voie d’atteindre, d’ici à 2030, les cibles relatives au retard de croissance, à l’émaciation et au surpoids chez l’enfant

13 Selon des estimations prudentes de l’incidence potentielle de la pandémie de covid-19, 5 à 7 millions d’enfants de plus pourraient souffrir d’un retard de croissance et 570 000 à 2,8 millions de plus pourraient souffrir d’émaciation, dans les pays à revenu faible ou intermédiaire, en 2030. On estime cependant que le nombre cumulatif de cas supplémentaires d’émaciation sera de 16 à 40 millions sur la période 2020-2030

14 Les divers facteurs ont des incidences qui se propagent dans l’ensemble du système alimentaire, compromettant la sécurité alimentaire et la nutrition

15 La fréquence et l’intensité des facteurs dans les pays à revenu faible ou intermédiaire vont croissant

16 Tandis que la pauvreté recule dans le monde, les inégalités de revenu demeurent importantes, et ont augmenté en 2020 dans les pays à revenu faible ou intermédiaire

17 Plus de la moitié des pays à revenu faible ou intermédiaire présentent un point de réorientation à la hausse de la prévalence de la sous-alimentation coïncidant avec un ou plusieurs facteurs (conflits, extrêmes climatiques, ralentissements et fléchissements économiques) entre 2010 et 2018

18 L’augmentation du nombre de personnes sous-alimentées en 2020 a été plus de cinq fois supérieure à la hausse la plus importante enregistrée au cours des deux dernières décennies, et les fléchissements économiques ont été deux fois plus graves que ceux connus précédemment dans les pays à revenu faible ou intermédiaire

19 En 2020, la plupart des pays à revenu faible ou intermédiaire touchés par des fléchissements économiques présentent une augmentation de la prévalence de la sous-alimentation, mais les fléchissements économiques s’accompagnent souvent de catastrophes liées au climat et d’extrêmes climatiques

20 La majorité des personnes sous-alimentées et des enfants souffrant d’un retard de croissance vivent dans des pays touchés par des facteurs multiples (2019)

21 La faim atteint des niveaux plus élevés et a davantage progressé dans les pays touchés par des conflits, des extrêmes climatiques ou des fléchissements économiques, et dans les pays où les inégalités sont très marquées

22 Les pays à faible revenu touchés par des conflits et des extrêmes climatiques présentent la plus forte augmentation de la prévalence de la sous-alimentation, tandis que parmi les pays à revenu intermédiaire, la hausse la plus importante est enregistrée lors des fléchissements économiques

23 Sur la période 2017-2019, l’Amérique latine et les Caraïbes ont connu la plus forte hausse de la prévalence de la sous-alimentation (PoU) causée par des facteurs multiples, et l’Afrique est la seule région où l’augmentation de la PoU est liée aux trois facteurs

24 En 2020, l’Afrique, l’Amérique latine et les Caraïbes et l’Asie ont enregistré des augmentations importantes de la prévalence de la sous-alimentation (PoU) lorsqu’elles ont été frappées à la fois par des fléchissements économiques et par des catastrophes liées au climat ou des conflits, ou les deux

25 L’inaccessibilité économique d’une alimentation saine en 2019 est fortement associée à un accroissement de l’insécurité alimentaire grave ou modérée et de l’insécurité alimentaire grave

26 En 2019, les pays touchés par des facteurs multiples et les pays touchés par un conflit (facteur unique ou associé à d’autres) affichent parmi les pourcentages les plus élevés de population ne pouvant financièrement se permettre une alimentation saine et en situation d’insécurité alimentaire modérée ou grave

27 Voies possibles à emprunter pour transformer les systèmes alimentaires face aux principaux facteurs de l’insécurité alimentaire, de la malnutrition et de l’inaccessibilité économique d’une alimentation saine

28 Étapes de la transformation des systèmes alimentaires – pour une alimentation plus saine et plus abordable

29 Principaux éléments d’un portefeuille de politiques et d’investissements

30 Assurer la cohérence et la complémentarité entre les systèmes – agroalimentaire*, environnement, santé, protection sociale et autres** – en vue de transformer les systèmes alimentaires, pour que la sécurité alimentaire, une meilleure nutrition et une alimentation saine soient une réalité pour tous

A4.1 Pays par association de facteurs

ENCADRÉS

1 Principaux facteurs et causes sous-jacentes qui compromettent la sécurité alimentaire et la nutrition dans le monde: synthèse des quatre éditions précédentes

2 Données actualisées relatives à la prévalence de la sous-alimentation et méthode employée pour établir les prévisions pour 2020 (prévisions immédiates)

3 Adapter la collecte de données FIES au contexte de la pandémie de covid-19 en 2020

4 Utilisation de l’échelle FIES pour orienter et cibler l’action face à la pandémie de covid-19 au niveau infranational

5 Évaluation des progrès accomplis dans la réalisation des cibles fixées pour 2030 concernant les indicateurs de nutrition

6 Méthode: estimations des cas supplémentaires potentiels de retard de croissance et d’émaciation dus à la pandémie de covid-19 (scénario)

7 Voies par lesquelles les effets de la pandémie de covid-19 influent sur la sécurité alimentaire et la nutrition

8 Définition des pays touchés par des conflits, des extrêmes climatiques et des fléchissements économiques et présentant de grandes inégalités de revenu

9 L’alimentation scolaire issue de la production locale en tant que levier de transformation des systèmes alimentaires

10 Le pacte agroalimentaire de Quito au service de la transformation du système alimentaire de la ville

11 Accélérer la transformation des systèmes alimentaires par l’autonomisation des femmes et des jeunes

12 Protéger les enfants contre les effets néfastes de la promotion des produits alimentaires

13 Mesures en matière de nutrition propres à accroître les avantages et à limiter au maximum les risques qui découlent du commerce

14 Approches systémiques autochtones: de nombreuses connaissances utiles en vue de la transformation durable et inclusive des systèmes alimentaires

L’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde 2021 a été élaboré par la Division de l’économie agroalimentaire de la FAO, en collaboration avec la Division de la statistique (axe Développement économique et social) et une équipe de spécialistes techniques de la FAO, du FIDA, de l’OMS, du PAM et de l’UNICEF.

Le rapport a été produit sous la supervision d’une équipe consultative composée de hauts responsables des cinq organismes onusiens partenaires de la publication. Sous la direction de la FAO, l’équipe consultative a défini le thème du rapport et déterminé sa structure. Elle a dirigé les travaux de l’équipe de rédaction technique, qui était composée de spécialistes de chacune des cinq organisations coéditrices. Des documents techniques ont été élaborés à l’appui des recherches et des analyses effectuées par les membres de l’équipe de rédaction. Pour établir le rapport de cette année, un appel a été lancé en vue de recueillir les «bonnes pratiques pour transformer les systèmes alimentaires dans le sens d’une alimentation saine et abordable et pour s’attaquer aux principaux facteurs d’insécurité alimentaire et de malnutrition», suite à quoi ont été envoyées plus de 80 contributions émanant de diverses personnes et d’institutions de développement du monde entier. D’autres contributions ont été tirées d’un webinaire organisé par l’intermédiaire du Forum global sur la sécurité alimentaire et la nutrition (Forum FSN), auquel ont participé des experts, qui ont mené une réflexion sur le thème du rapport.

L’équipe de rédaction a produit plusieurs documents intérimaires, notamment un plan annoté, un avant-projet et un projet final. Ces documents ont été examinés, validés et approuvés par l’équipe consultative de haut niveau à chaque étape du processus. Le rapport final a été soumis à un examen technique rigoureux effectué par de hauts responsables et les spécialistes de différents départements et divisions de chacune des cinq organisations, au siège des organisations et dans les bureaux décentralisés. Enfin, le rapport a été examiné et validé par les chefs de secrétariat des cinq organisations coéditrices.

L’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde 2021 a été établi conjointement par l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), le Fonds international de développement agricole (FIDA), l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), le Programme alimentaire mondial (PAM) et le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF).

Sous la supervision générale de Maximo Torero Cullen, la réalisation du présent ouvrage a été dirigée par Marco V. Sánchez Cantillo et José Rosero Moncayo, et la coordination globale a été assurée par Cindy Holleman, directrice de la publication. Tous relèvent de l’axe Développement économique et social (ES). L’élaboration du rapport a été encadrée par un comité directeur composé de représentants des cinq organisations coéditrices: Marco V. Sánchez Cantillo (Président), Sara Savastano (FIDA), Francesco Branca (OMS), Arif Husain (PAM) et Victor Aguayo (UNICEF). Alessandra Garbero et Tisorn Songsermsawas (FIDA), Marzella Wüstefeld (OMS), Eric Branckaert et Saskia de Pee (PAM), et Chika Hayashi et Jo Jewell (UNICEF) ont contribué à la coordination et ont fourni un appui technique. Les responsables exécutifs et les fonctionnaires principaux des cinq organisations coéditrices ont formulé de précieuses observations et donné l’aval final.

Le chapitre premier a été écrit par Cindy Holleman, avec la contribution de Marco V. Sánchez Cantillo et José Rosero Moncayo (FAO).

Le chapitre 2 a été coordonné par Anne Kepple (FAO). La section 2.1 a été établie par Carlo Cafiero, avec la contribution de Piero Conforti, Valentina Conti, Juan Feng, Cindy Holleman, Anne Kepple et Sara Viviani (FAO). La section 2.2 a été établie par Elaine Borghi et Monica Flores Urrutia (OMS), et Chika Hayashi, Richard Kumapley, Vrinda Mehra et Ann Mizumoto (UNICEF), avec la contribution d’Anne Kepple (FAO), Katrina Lundberg, Juan Pablo Peña-Rosas et Marzella Wüstefeld (OMS) et de Julia Krasevec (UNICEF). La section 2.3 a été établie par Carlo Cafiero (FAO), Elaine Borghi (OMS), et Chika Hayashi, Julia Krasevec, Richard Kumapley et Vrinda Mehra (UNICEF), avec la contribution d’Anne Kepple (FAO), Monica Flores Urrutia et Katrina Lundberg (OMS) et de Saskia de Pee (PAM). Olivier Lavagne d’Ortigue (FAO) a apporté un appui à la conception des graphiques et José Rosero Moncayo (FAO) a fourni un appui et des conseils éditoriaux en ce qui concerne les sections 2.1 et 2.3. Nona Reuter (UNICEF) a apporté un appui à la conception des graphiques des sections 2.2 et 2.3.

Le chapitre 3 a été coordonné et écrit par Cindy Holleman et Valentina Conti (FAO), avec la contribution d’Aurélien Mellin et Trudy Wijnhoven (FAO); d’Aslihan Arslan, Romina Cavatassi, Ilaria Firmian, Stefania Gnoato, Caterina Ruggeri Laderchi, Tisorn Songsermsawas, Isabelle Stordeur et Sakiusa Tubuna (FIDA); d’Elaine Borghi, Karen McColl, Leanne Margaret Riley et Marzella Wüstefeld (OMS); d’Eric Branckaert, Saskia de Pee, Simone Gie et Sarah Piccini (PAM); et de Chika Hayashi et Jo Jewell (UNICEF). L’actualisation de l’analyse agroclimatique et la détection des points de retournement de la prévalence de la sous-alimentation ont été effectuées par Maria Dimou, Michele Meroni, Felix Rembold, Anne-Claire Thomas, Andrea Toreti, Ferdinando Urbano et Matteo Zampieri (Commission européenne – Centre commun de recherche), et l’actualisation des indicateurs climatiques a été effectuée par Christopher Jack, avec la contribution d’Olivier Crespo et de Pierre Kloppers (Université de Cape Town). Marco V. Sánchez Cantillo a assuré l’appui éditorial des sections de ce chapitre.

Le chapitre 4 a été coordonné et écrit par Mark Smulders et Giovanni Carrasco Azzini (FAO), avec la contribution de Melisa Aytekin, Luisa Castañeda, Mariana Estrada, Yon Fernandez de Larrinoa, Ileana Grandelis, Cindy Holleman, Julius Jackson, Susan Kaaria, Lourdes Orlando, Marzia Pafumi, Luana Swensson, Mikaila Way et Trudy Wijnhoven (FAO); de Tarek Ahmed, Daniel Anavitarte, Ilaria Bianchi, Antonella Cordone, Isabel de la Peña, Aolin Gong, Caterina Ruggeri Laderchi, Joyce Njoro, Karla Sofia Pita Vidal et Tisorn Songsermsawas (FIDA); de Maria De Las Nieves Garcia Casal, Katrin Engelhardt, Hyun Jin Kim, Karen McColl, Benn McGrady, Kathryn Robertson et Marzella Wüstefeld (OMS); d’Eric Branckaert, Saskia de Pee, Simone Gie et Sarah Piccini (PAM); et de Jo Jewell (UNICEF). D’autres contributions au chapitre 4 ont été apportées par des collègues de la FAO, du FIDA, de l’OMS, du PAM et de l’UNICEF, ainsi que par des experts techniques du monde entier, suite à l’appel mondial destiné à recueillir les «bonnes pratiques pour transformer les systèmes alimentaires dans le sens d’une alimentation saine et abordable et pour s’attaquer aux principaux facteurs d’insécurité alimentaire et de malnutrition». Ont également contribué Grahame Dixie et Erin Sweeney, de Grow Asia. Plus de 80 personnes et institutions de développement du monde entier ont répondu à un autre appel à recueillir les meilleures pratiques susceptibles de transformer les systèmes alimentaires, par l’intermédiaire du Forum global sur la sécurité alimentaire et la nutrition (Forum FSN), avec l’appui de Svetlana Livinets et d’Elise Polak (FAO). Le chapitre 4 s’inspire également des réflexions menées dans le cadre d’un webinaire organisé par le Forum FSN et auquel ont participé les experts suivants: Tim Benton (Chatham House), Michael Carter (Université de Californie, Davis), Jessica Fanzo (Université Johns Hopkins), Ndidi Nwuneli (Sahel Consulting), David Spielman (Institut international de recherche sur les politiques alimentaires [IFPRI]) et Robert Townsend (Banque mondiale). Marco V. Sánchez Cantillo a assuré l’appui éditorial des sections de ce chapitre.

Le chapitre 5 a été écrit par Marco V. Sánchez Cantillo, avec la contribution de Cindy Holleman et de José Rosero Moncayo (FAO).

De nombreux collègues des différents départements et unités techniques des cinq organisations coéditrices ont fourni des contributions utiles au rapport, ainsi que de précieuses observations techniques. Une procédure d’approbation technique à l’échelle des organisations a facilité un examen approfondi mené par de nombreux spécialistes. Citer chacune des contributions serait difficile et pourrait donner lieu à de nombreuses omissions.

Juan Feng, Abdul Sattar et Sara Viviani étaient chargés de la préparation des données sur la sous-alimentation et la sécurité alimentaire, dans la section 2.1, avec la contribution de Verónica Boero, Marinella Cirillo, Filippo Gheri, Adeeba Ishaq, Talent Manyani, Ana Moltedo, María Rodríguez et Firas Yassin et sous la supervision de Carlo Cafiero. Les données de base ont été fournies par l’équipe chargée du bilan des disponibilités alimentaires, dirigée par Salar Tayyib de la Division de la statistique (ESS) de la FAO. Valentina Conti et Cindy Holleman (FAO) étaient chargées de l’analyse du coût et de l’accessibilité économique d’une alimentation saine (section 2.1), avec la contribution de Yan Bai, Leah Costlow, Alissa Ebel, Anna Herforth, William A. Masters et Aishwarya Venkat (Tufts University), et de Piero Conforti, Jean Marie Vianney Munyeshyaka et Michele Vollaro (FAO). Richard Kumapley (UNICEF) était chargé de rassembler les données relatives à la nutrition (section 2.2), avec la contribution d’Elaine Borghi, Monica Flores Urrutia et Leanne Riley (OMS), et de Chika Hayashi, Julia Krasevec et Vrinda Mehra (UNICEF). Carlo Cafiero a établi les projections sur la sous-alimentation à l’horizon 2030, avec la contribution de Juan Feng, Adeeba Ishaq et Abdul Sattar (FAO) (section 2.3). David Laborde a apporté une contribution essentielle à l’élaboration des scénarios (projections) de la sous-alimentation à l’horizon 2030, dans le cadre d’une collaboration avec l’IFPRI. Elaine Borghi et Giovanna Gatica Dominguez (OMS) et Chika Hayashi et Richard Kumapley (UNICEF) étaient chargés des analyses figurant dans la section 2.3 et à l’annexe 2, notamment concernant les progrès vers la réalisation des cibles mondiales de nutrition et les incidences potentielles de la pandémie de covid-19 sur le retard de croissance et l’émaciation chez les enfants à l’horizon 2030, avec la contribution de Julia Krasevec et de Vrinda Mehra (UNICEF).

Giovanni Carrasco Azzini, Andrew Park (rédacteur consultant) et Daniela Verona, du Département du développement économique et social de la FAO, ont apporté leur appui à la production du rapport.

La traduction de la publication a été assurée par la Sous-Division des langues et la Sous-Division des réunions de la FAO (Division des services aux organes directeurs – CSG), avec une contribution des intervenants mentionnés ci-dessus.

Le Groupe de l’édition (OCCP) du Bureau de la communication de la FAO a prêté des moyens éditoriaux et s’est chargé de la maquette et de la mise en page, ainsi que de la coordination de la production dans les six langues officielles.

ACI
agriculture climato-intelligente

ADER
besoins énergétiques alimentaires moyens (Average Dietary Energy Requirement)

ANASE
Association des nations de l’Asie du Sud-Est

ASAP
système Anomaly Hotspots of Agriculture Production

CEPMMT
Centre européen de prévisions météorologiques à moyen terme

CRED
Centre de recherche sur l’épidémiologie des désastres

CV
coefficient de variation

CV|r
CV imputable aux besoins énergétiques

CV|y
CV imputable au revenu

DEA
disponibilités énergétiques alimentaires

DEC
consommation d’énergie alimentaire (Dietary Energy Consumption)

échelle FIES
échelle de mesure de l’insécurité alimentaire vécue

FAO
Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture

FIDA
Fonds international de développement agricole

FImod+sev
prévalence de l’insécurité alimentaire (food insecurity) modérée ou grave

FIsev
prévalence de l’insécurité alimentaire (food insecurity) grave

FMI
Fonds monétaire international

GES
gaz à effet de serre

IMC
indice de masse corporelle

IPC
indice des prix à la consommation

IPC/CH
Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire/Cadre harmonisé

JME
estimations communes de la malnutrition (Banque mondiale, OMS et UNICEF)

MDD
diversité alimentaire minimale (Minimum Dietary Diversity)

MDD-W
diversité alimentaire minimale chez les femmes (Minimum Dietary Diversity for Women)

MDER
besoins énergétiques alimentaires minimaux (Minimum Dietary Energy Requirement)

MNT
maladies non transmissibles

modèle EGC
modèle d’équilibre général calculable

NoU
nombre de personnes sous-alimentées (Number of Undernourished)

ODD
objectif de développement durable

OIT
Organisation internationale du Travail

OMS
Organisation mondiale de la Santé

PAM
Programme alimentaire mondial

PIB
produit intérieur brut

PME
petites et moyennes entreprises

PoU
prévalence de la sous-alimentation (Prevalence of Undernourishment)

PPA
parité de pouvoir d’achat

QI
quotient intellectuel

TRAM
taux de réduction annuel moyen

UNICEF
Fonds des Nations Unies pour l’enfance

USD
dollar des États-Unis

WHA
Assemblée mondiale de la Santé (World Health Assembly)

Bien avant la pandémie de covid-19, nous n’étions déjà pas en voie d’éliminer la faim et toutes les formes de malnutrition dans le monde d’ici à 2030. Aujourd’hui, la pandémie a rendu la tâche encore plus difficile. Le présent rapport contient la première évaluation mondiale de l’insécurité alimentaire et de la malnutrition pour l’année 2020 et souligne combien il est nécessaire de mener une réflexion plus approfondie sur ce qu’il convient de faire pour tenter de mieux remédier à la situation mondiale en matière de sécurité alimentaire et de nutrition.

La faim dans le monde a progressé au cours de l’année 2020, qui a été assombrie par la pandémie de covid-19. La prévalence de la sous-alimentation (PoU), qui était restée à peu près stable pendant cinq ans, a progressé de 1,5 point de pourcentage en un an seulement, pour atteindre 9,9 pour cent environ – ce qui rend plus difficile la réalisation de l’objectif «Faim zéro» d’ici à 2030.

D’après les projections, en 2020, entre 720 et 811 millions de personnes dans le monde ont été confrontées à la faim, soit environ 118 millions de personnes de plus qu’en 2019 si l’on prend en compte le milieu de la fourchette (768 millions) et jusqu’à 161 millions de plus si l’on prend en compte la limite supérieure de la fourchette.

Plus de la moitié des personnes sous-alimentées dans le monde vivent en Asie (418 millions) et plus du tiers en Afrique (282 millions). Par rapport à 2019, environ 46 millions de personnes de plus ont été touchées par la faim en Afrique en 2020, 57 millions de plus en Asie et environ 14 millions de plus en Amérique latine et dans les Caraïbes.

Les nouvelles projections confirment que la faim ne sera pas éliminée d’ici à 2030 si des mesures audacieuses ne sont pas prises pour accélérer les progrès, en particulier des mesures visant à remédier aux inégalités dans l’accès à la nourriture. Toutes choses étant constantes par ailleurs, 660 millions de personnes environ pourraient encore connaître la faim en 2030, en partie à cause des effets à long terme de la pandémie de covid-19 sur la sécurité alimentaire mondiale – soit 30 millions de plus que dans un scénario où il n’y aurait pas eu de pandémie.

Alors que la prévalence mondiale de l’insécurité alimentaire modérée ou grave (déterminée à l’aide de l’échelle de mesure de l’insécurité alimentaire vécue – échelle FIES) augmente lentement depuis 2014, l’augmentation estimative pour l’année 2020 était égale à celle constatée sur l’ensemble des cinq années précédentes. En 2020, près d’une personne sur trois dans le monde (2,37 milliards) n’avait pas accès à une nourriture adéquate, soit une augmentation de près de 320 millions de personnes en seulement un an.

Près de 12 pour cent de la population mondiale (928 millions de personnes) était en situation d’insécurité alimentaire grave en 2020, soit 148 millions de plus qu’en 2019.

Au niveau mondial, l’écart entre les femmes et les hommes dans la prévalence de l’insécurité alimentaire modérée ou grave s’est encore accentué durant l’année de la pandémie de covid-19, l’insécurité alimentaire ayant été 10 pour cent plus élevée chez les femmes que chez les hommes en 2020, contre 6 pour cent en 2019.

Le coût élevé d’une alimentation saine et la persistance de fortes inégalités de revenu ont mis une alimentation saine hors de portée de quelque 3 milliards de personnes, en particulier les pauvres, dans toutes les régions du monde, en 2019. Ce chiffre est légèrement inférieur à celui constaté en 2017 et il est probable qu’il sera plus élevé dans toutes les régions en 2020 en raison de la pandémie de covid-19.

Le passage à une alimentation saine qui inclue des considérations de durabilité peut aider à réduire, d’ici à 2030, les coûts liés à la santé et au changement climatique, car les coûts cachés de cette alimentation sont inférieurs à ceux des modes de consommation actuels.

À l’échelle mondiale, la malnutrition sous toutes ses formes reste aussi un défi. Il n’est pas encore possible de tenir pleinement compte de l’incidence de la pandémie de covid-19 car on ne dispose que de données limitées, mais on estime qu'en 2020, le retard de croissance a touché 22,0 pour cent (149,2 millions) des enfants de moins de 5 ans, l’émaciation 6,7 pour cent (45,4 millions) et le surpoids 5,7 pour cent (38,9 millions). Les chiffres effectifs, en particulier en ce qui concerne le retard de croissance et l’émaciation, devraient être plus élevés par suite des effets de la pandémie.

La plupart des enfants qui souffrent de malnutrition vivent en Afrique et en Asie. Plus de neuf enfants sur dix souffrant d’un retard de croissance, plus de neuf enfants sur dix souffrant d’émaciation et plus de sept enfants sur dix en surpoids, dans le monde, vivent dans ces régions.

On estime qu’au niveau mondial, en 2019, l’anémie chez les femmes âgées de 15 à 49 ans – désormais un indicateur (2.2.3) des objectifs de développement durable (ODD) – s’établissait à 29,9 pour cent. Toutefois, les données font apparaître des différences marquées entre les régions: plus de 30 pour cent des femmes en Afrique et en Asie présentaient une anémie, contre seulement 14,6 pour cent des femmes en Amérique du Nord et en Europe. L’obésité chez les adultes est en forte progression dans toutes les régions.

Le monde n’est en voie d’atteindre les cibles fixées pour 2030 pour aucun des indicateurs de nutrition. Le rythme actuel des progrès réalisés concernant le retard de croissance, l’allaitement maternel exclusif et l’insuffisance pondérale à la naissance est insuffisant, et les progrès concernant le surpoids et l’émaciation chez les enfants, l’anémie chez les femmes en âge de procréer et l’obésité chez les adultes stagnent, quand on ne constate pas une régression.

La pandémie de covid-19 a probablement eu des répercussions sur la prévalence de multiples formes de malnutrition et pourrait avoir des effets durables, au-delà de 2020, comme on le constate déjà en 2021. Ces effets seront aggravés du fait de la dimension intergénérationnelle de la malnutrition et des conséquences qui en résulteront pour la productivité. Des efforts exceptionnels sont nécessaires pour contrer et surmonter les effets de la pandémie afin d’accélérer le progrès vers la réalisation de la cible 2.2 des ODD.

Les conflits, la variabilité du climat et les phénomènes climatiques extrêmes, ainsi que les ralentissements et les fléchissements économiques (exacerbés par la pandémie de covid-19), sont de grands facteurs de l’insécurité alimentaire et de la malnutrition; ils continuent de croître en intensité et en fréquence et surviennent de plus en plus souvent ensemble.

Le renversement de tendance qui s’est produit en 2014 dans la prévalence de la sous-alimentation et l’augmentation constante de celle-ci, particulièrement prononcée dans les pays à revenu faible ou intermédiaire à partir de 2017, sont en grande partie le fait des pays touchés par des conflits, des phénomènes climatiques extrêmes ou des fléchissements économiques et des pays où règne une grande inégalité des revenus.

Sur la période 2017-2019, la prévalence de la sous-alimentation a augmenté de 4 pour cent dans les pays touchés par un ou plusieurs de ces grands facteurs et a diminué de 3 pour cent dans les pays non touchés. Les pays à revenu intermédiaire touchés par ces facteurs ont enregistré une augmentation de 2 pour cent seulement de la prévalence de la sous-alimentation, mais dans ceux où il y a une forte inégalité des revenus, l’augmentation a été du double – 4 pour cent.

Sur la même période, les pays touchés par des facteurs multiples ont connu l’augmentation la plus marquée de la prévalence de la sous-alimentation, avec une augmentation 12 fois supérieure à celle constatée dans les pays touchés par un seul facteur.

Des facteurs externes (conflits ou chocs climatiques, par exemple) et internes (faible productivité et chaînes d’approvisionnement alimentaire inefficientes, par exemple), qui agissent sur les systèmes alimentaires, poussent à la hausse le coût des aliments nutritifs, ce qui, associé à de faibles revenus, rend l’alimentation saine plus inaccessible financièrement. En 2019, dans les pays touchés par des facteurs multiples, le pourcentage de la population pour qui une alimentation saine était inaccessible financièrement était supérieur de 39 pour cent à ce qu’il était dans les pays touchés par un seul facteur et de 66 pour cent à ce qu’il était dans ceux touchés par aucun facteur. Les augmentations de l’inaccessibilité économique d’une alimentation saine sont associées à des niveaux plus élevés de l’insécurité alimentaire, en particulier dans les pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure.

En 2020, presque tous les pays à revenu faible ou intermédiaire ont été confrontés à des fléchissements économiques par suite de la pandémie, et l’augmentation du nombre de personnes sous-alimentées dans ces pays a été plus de cinq fois supérieure à la plus forte hausse observée ces 20 dernières années. Parmi ces pays, lorsque les fléchissements économiques se sont accompagnés d'autres facteurs (catastrophe liée au climat, conflit ou les deux), la hausse la plus importante de la prévalence de la sous-alimentation a été observée en Afrique, suivie de l’Asie.

Du fait que ces grands facteurs ont une incidence négative sur la sécurité alimentaire et la nutrition, en raison de leurs effets multiples et cumulatifs sur l’ensemble du système alimentaire – et des interactions entre le système alimentaire et d’autres systèmes –, il est essentiel de les aborder sous l’angle des systèmes alimentaires, pour mieux comprendre les interactions et déterminer les points d’entrée des interventions.

Transformés de manière à être plus résilients face aux principaux facteurs, dont les conflits, la variabilité du climat et les phénomènes climatiques extrêmes, et les ralentissements et fléchissements économiques, les systèmes alimentaires peuvent fournir une alimentation saine et abordable de façon durable et inclusive et devenir de puissants moteurs de la lutte contre la faim, l’insécurité alimentaire et la malnutrition sous toutes ses formes, au service de tous.

Six voies peuvent être empruntées, en fonction du contexte, pour transformer les systèmes alimentaires: intégrer l’action humanitaire, les politiques de développement et la consolidation de la paix, dans les zones touchées par des conflits; renforcer la résilience face aux changements climatiques dans l’ensemble du système alimentaire; renforcer la résilience des plus vulnérables face à l’adversité économique; intervenir le long de la chaîne d’approvisionnement alimentaire en vue de réduire le coût des aliments nutritifs; lutter contre la pauvreté et les inégalités structurelles en veillant à ce que les interventions soient favorables aux pauvres et inclusives; et renforcer l’environnement alimentaire et changer le comportement des consommateurs afin de favoriser des habitudes alimentaires ayant une incidence positive sur la santé humaine et sur l’environnement.

Étant donné que les systèmes alimentaires sont le plus souvent touchés par plus d’un facteur et qu’ils ont par ailleurs des répercussions de tous ordres sur les résultats en matière de sécurité alimentaire et de nutrition, des portefeuilles complets de politiques, d’investissements et de lois pourraient être élaborés sur plusieurs voies simultanément. Cela permettra de maximiser leurs effets conjugués sur la transformation des systèmes alimentaires, de tirer parti de solutions gagnant-gagnant et de limiter les compromis indésirables.

La cohérence dans la formulation et la mise en œuvre des politiques et des investissements, entre les différents systèmes (alimentation, santé, protection sociale et environnement), est également essentielle pour créer des synergies en vue de solutions plus efficientes et plus efficaces applicables aux systèmes alimentaires, de façon à assurer une alimentation saine et abordable, dans des conditions durables et inclusives.

Des institutions et des mécanismes de gouvernance efficaces et inclusifs doivent, outre l’accès aux technologies, aux données et à l’innovation, servir d’accélérateurs importants dans les portefeuilles complets de politiques, d’investissements et de lois visant à transformer les systèmes alimentaires.

Des approches par système doivent être mises en place pour élaborer des portefeuilles de politiques, d’investissements et de lois qui permettent d’aboutir à des solutions gagnant-gagnant tout en gérant les compromis, à savoir des approches territoriales, des approches écosystémiques, des approches par système alimentaire des peuples autochtones, et des interventions qui apportent des solutions systémiques aux situations de crise prolongée.

L’année 2020 a été celle d’un énorme défi pour le monde. Si l’on ne passe pas plus résolument à l’action pour changer le cours des choses, elle pourrait être aussi un avertissement annonciateur de phénomènes qu’on ne voudrait pas voir se produire. Les principaux facteurs à l’origine des évolutions récentes de la sécurité alimentaire et de la nutrition ont chacun leur propre trajectoire et des cycles qui leur sont propres, à savoir qu’ils se reproduiront et qu’ils pourraient même empirer dans les années à venir.

Le Sommet des Nations Unies sur les systèmes alimentaires, qui aura lieu en 2021, débouchera sur une série de mesures concrètes qui pourront être prises partout dans le monde à l’appui d’une transformation des systèmes alimentaires mondiaux. Les six voies de transformation mises en évidence dans le présent rapport sont nécessaires pour accroître la résilience et agir spécifiquement contre les effets des grands facteurs qui ont causé la récente hausse de la faim et le ralentissement de la progression vers une réduction de la malnutrition sous toutes ses formes.

Bien avant la pandémie de covid-19, nous n’étions déjà pas en voie d’éliminer la faim et toutes les formes de malnutrition dans le monde d’ici à 2030. Aujourd’hui, la pandémie a rendu cet objectif bien plus difficile à atteindre. Le présent rapport contient la première évaluation mondiale de l’insécurité alimentaire et de la malnutrition pour l’année 2020 et donne une idée de ce à quoi ressembleraient la faim et la malnutrition en 2030, dans un scénario encore compliqué par les effets prolongés de la pandémie. Les tendances constatées soulignent la nécessité d’une réflexion plus approfondie sur les mesures à prendre pour mieux faire face à la situation mondiale en matière de sécurité alimentaire et de nutrition.

L’une des principales questions posées dans le rapport de cette année est la suivante: comment le monde en est-il arrivé à cette situation critique? Pour y répondre, le rapport prend appui sur l’analyse fournie dans les quatre éditions précédentes, qui ont produit un vaste ensemble de connaissances fondées sur des données factuelles concernant les principaux facteurs de l’évolution récemment constatée en matière de sécurité alimentaire et de nutrition. De nouvelles données ont été ajoutées pour permettre une analyse plus vaste de leurs interactions, et obtenir une vue d’ensemble de leurs effets réciproques et de leur incidence sur les systèmes alimentaires. On peut ainsi examiner en profondeur comment passer de solutions cloisonnées à des solutions intégrées appliquées au système alimentaire, qui répondent spécifiquement aux défis que constituent les principaux facteurs, et mettre en évidence les types de politiques et d’investissements qui seront nécessaires pour transformer les systèmes alimentaires en vue d’assurer à tous la sécurité alimentaire, une meilleure nutrition et une alimentation saine et abordable.

La sécurité alimentaire et la nutrition dans le monde

Indicateurs de sécurité alimentaire: dernières données en date et progrès vers l’élimination de la faim et la sécurité alimentaire

Le nombre de personnes dans le monde touchées par la faim a continué d’augmenter au cours de l’année 2020, qui a été assombrie par la pandémie de covid-19. Après être restée à peu près stable de 2014 à 2019, la prévalence de la sous-alimentation a augmenté, passant de 8,4 pour cent en 2019 à 9,9 pour cent environ en 2020, ce qui complique la réalisation de l’objectif «Faim zéro» d’ici à 2030. L’estimation pour 2020 varie de 9,2 à 10,4 pour cent, en fonction des hypothèses qui sont retenues pour tenir compte des incertitudes.

En chiffres absolus, on estime que 720 à 811 millions de personnes dans le monde ont été confrontées à la faim en 2020, soit 118 millions de personnes de plus qu’en 2019 si l’on prend en compte le milieu de la fourchette (768 millions), avec des estimations allant de 70 à 161 millions.

Les chiffres font apparaître des inégalités régionales persistantes et inquiétantes. Environ une personne sur cinq (21 pour cent de la population) a été confrontée à la faim en Afrique en 2020, soit plus du double que dans toute autre région. Cela représente une augmentation de 3 points de pourcentage en un an. Viennent ensuite l’Amérique latine et les Caraïbes (9,1 pour cent) et l’Asie (9,0 pour cent), avec des progressions de 2,0 et 1,1 points de pourcentage de 2019 à 2020.

Sur le nombre total de personnes sous-alimentées (768 millions) en 2020, plus de la moitié (418 millions) vivent en Asie, plus du tiers (282 millions) en Afrique et 8 pour cent (60 millions) en Amérique latine et dans les Caraïbes. Par rapport à 2019, 46 millions de personnes de plus ont été touchées par la faim en Afrique en 2020, près de 57 millions de plus en Asie et environ 14 millions de plus en Amérique latine et dans les Caraïbes.

Au niveau mondial, l’insécurité alimentaire modérée ou grave (déterminée à l’aide de l’échelle de mesure de l’insécurité alimentaire vécue ou échelle FIES) était en lente progression. De 22,6 pour cent en 2014, elle est passée à 26,6 pour cent en 2019. Puis au cours de l’année 2020, marquée par la propagation de la covid-19 dans le monde, elle a augmenté presque autant que sur toute cette période de cinq ans, pour atteindre 30,4 pour cent. Ainsi, près d’une personne sur trois dans le monde n’avait pas accès à une nourriture adéquate en 2020, soit 320 millions de personnes de plus en un an seulement (2,37 milliards contre 2,05 milliards un an auparavant). Parmi elles, près de 40 pour cent – 11,9 pour cent de la population mondiale, soit presque 928 millions de personnes – étaient en situation d’insécurité alimentaire grave, soit pas loin de 148 millions de personnes de plus en 2020 qu’en 2019.

De 2019 à 2020, la progression de l’insécurité alimentaire modérée ou grave a été la plus marquée en Amérique latine et dans les Caraïbes (9 points de pourcentage) et en Afrique (5,4 points de pourcentage), contre 3,1 points de pourcentage en Asie. Même en Amérique du Nord et en Europe, qui affichent les plus faibles taux d’insécurité alimentaire, la prévalence a augmenté pour la première fois depuis 2014, année où on a commencé à recueillir des données à l’aide de l’échelle FIES.

Au niveau mondial, l’écart entre les femmes et les hommes dans la prévalence de l’insécurité alimentaire modérée ou grave s’est encore accentué durant l’année de la pandémie, l’insécurité alimentaire ayant été 10 pour cent plus élevée parmi les femmes que parmi les hommes en 2020, contre 6 pour cent en 2019.

Le suivi du coût d’une alimentation saine et du nombre de personnes qui n’ont pas les moyens de se la procurer fournit des paramètres précieux pour mieux comprendre le lien entre ces déterminants importants de l’accès à la nourriture et de l’évolution des multiples formes de malnutrition. On estime que, en 2019, 3 milliards de personnes environ n’avaient pas accès à une alimentation saine en raison de son coût élevé et de la persistance de fortes inégalités de revenu. La plupart de ces personnes vivent en Asie (1,85 milliard) et en Afrique (1,0 milliard), mais des millions de personnes sont également dans cette situation en Amérique latine et dans les Caraïbes (113 millions) ainsi qu’en Amérique du Nord et en Europe (17,3 millions).

Indicateurs de nutrition: mises à jour les plus récentes et progrès vers la réalisation des cibles mondiales en matière de nutrition

En raison des mesures de distanciation physique prises pour contenir la pandémie, on ne dispose que de données limitées sur les résultats nutritionnels de 2020. Par conséquent, les estimations les plus récentes ne tiennent pas compte des effets de la pandémie de covid-19.

En 2020, le retard de croissance (indicateur 2.1.1) touchait 149,2 millions (22 pour cent) d’enfants de moins de 5 ans dans le monde. La prévalence du retard de croissance a diminué, passant de 33,1 pour cent en 2000 à 26,2 pour cent en 2012, puis à 22 pour cent en 2020. En 2020, près des trois quarts des enfants souffrant d’un retard de croissance dans le monde vivaient dans deux régions seulement: l’Asie centrale et l’Asie du Sud (37 pour cent) et l’Afrique subsaharienne (37 pour cent).

En 2020, l’émaciation touchait 45,4 millions d’enfants de moins de 5 ans (6,7 pour cent). Près d’un quart d’entre eux vivaient en Afrique subsaharienne et plus de la moitié en Asie du Sud, la sous-région où la prévalence de l’émaciation est la plus élevée – plus de 14 pour cent.

La même année, 5,7 pour cent environ (38,9 millions) des enfants de moins de 5 ans présentaient une surcharge pondérale. Au niveau mondial, la situation a peu évolué en deux décennies (5,7 pour cent en 2020 contre 5,4 pour cent en 2000) et les tendances sont à la hausse dans certaines régions et dans de nombreux contextes.

L’obésité chez les adultes continue de suivre une courbe ascendante, la prévalence mondiale étant passée de 11,7 pour cent en 2012 à 13,1 pour cent en 2016. Toutes les sous-régions ont affiché des tendances à la hausse sur cette période, et aucune n’est en voie d’atteindre l’objectif de l’Assemblée mondiale de la Santé, à savoir stopper cette hausse d’ici à 2025.

En 2015, un nourrisson sur sept, soit 20,5 millions (14,6 pour cent) dans le monde, était en état d’insuffisance pondérale à la naissance. Ces nouveau-nés ont un risque plus élevé de mourir dans les 28 premiers jours; ceux qui survivent sont plus susceptibles de présenter un retard de croissance et un quotient intellectuel plus faible, et sont exposés à un plus grand risque de surpoids et d’obésité et de maladies chroniques à l’âge adulte, parmi lesquelles le diabète.

Des pratiques d’allaitement optimales, notamment l’allaitement maternel exclusif pendant les six premiers mois de la vie, sont essentielles à la survie de l’enfant et à la promotion de la santé, du développement cérébral et de la motricité. À l’échelle mondiale, 44 pour cent des nourrissons de moins de 6 mois étaient exclusivement nourris au sein en 2019 – un progrès par rapport aux 37 pour cent de 2012.

L’anémie chez les femmes en âge de procréer a été récemment ajoutée comme indicateur des ODD (indicateur 2.2.3). Au niveau mondial, près d’une femme sur trois (29,9 pour cent) en âge de procréer souffrait encore d’anémie en 2019, et aucun progrès n’a été réalisé depuis 2012. On observe de grandes disparités d’une région à l’autre, la prévalence en Afrique étant près de trois fois supérieure à celle de l’Amérique du Nord et de l’Europe.

Dans tous les pays du monde, les systèmes de santé, d’alimentation, d’éducation et de protection sociale ont beaucoup de mal à maintenir les services de nutrition essentiels tout en faisant face à la pandémie de covid-19. D’après une enquête rendant compte de la situation des enfants pendant la pandémie, 90 pour cent des pays (122 sur 135) ont signalé, en août 2020, que leurs chiffres avaient évolué dans la couverture des services de nutrition essentiels. Globalement, la couverture des services nutritionnels essentiels a diminué de 40 pour cent, et près de la moitié des pays ont signalé une baisse de 50 pour cent ou plus pour au moins une intervention nutritionnelle.

On manque de données sur les résultats nutritionnels pour 2020, mais les travaux de recherche basés sur des scénarios modélisés peuvent apporter des informations précieuses pour mesurer l’incidence de la pandémie de covid-19, en attendant que de nouvelles données soient disponibles pour permettre une évaluation officielle aux niveaux mondial et régional. D’après une de ces analyses, dans un scénario modéré, du fait de la pandémie, de 2020 à 2022, 11,2 millions d’enfants de moins de 5 ans viendraient s’ajouter au nombre de ceux qui souffrent d’émaciation dans les pays à faible revenu et ceux à revenu intermédiaire, dont 6,9 millions pour la seule année 2020. Selon un scénario plus pessimiste, l’émaciation toucherait 16,3 millions d’enfants supplémentaires. Le modèle prévoit que 3,4 millions d’enfants supplémentaires présenteront un retard de croissance en raison des effets de la pandémie de covid-19, en 2022.

Éliminer la faim et toutes les formes de malnutrition d’ici à 2030

À moins d’une décennie de l’horizon fixé pour la réalisation des ODD, le présent rapport fournit des évaluations actualisées de la probabilité de réalisation des cibles 2.1 et 2.2 d’ici à 2030.

Les projections relatives à la prévalence de la sous-alimentation pour l’année 2030 ont été établies sur la base d’une approche structurelle fondée sur un modèle d’équilibre général dynamique mondial. Deux scénarios ont été modélisés: un scénario qui vise à prendre en compte l’incidence de la pandémie de covid-19, et un scénario qui n’en tient pas compte. Les deux scénarios reposent sur l’hypothèse selon laquelle les trajectoires ne sont perturbées par aucun des principaux facteurs à l’origine de l’insécurité alimentaire et que les mesures importantes à prendre pour transformer les systèmes alimentaires de manière à garantir la sécurité alimentaire et à réduire les inégalités dans l’accès à la nourriture ne sont pas mises en œuvre.

Selon le scénario covid-19, après avoir atteint un maximum de 768 millions de personnes environ (9,9 pour cent de la population) en 2020, la faim dans le monde diminuerait pour toucher 710 millions de personnes environ (9 pour cent) en 2021, puis continuerait de diminuer légèrement, jusqu’à moins de 660 millions de personnes (7,7 pour cent) en 2030. Toutefois, l’évolution entre 2020 et 2030 est très variable selon les régions. Alors qu’une réduction sensible est projetée pour l’Asie (de 418 millions à 300 millions de personnes), une augmentation notable est attendue en Afrique (de plus de 280 millions à 300 millions de personnes), ce qui mettra ce continent à égalité avec l’Asie d’ici à 2030 en tant que région comptant le plus grand nombre de personnes sous-alimentées.

Également selon le scénario covid-19, la faim pourrait toucher en 2030 quelque 30 millions de personnes de plus que si la pandémie n’avait pas eu lieu, ce qui montre les effets persistants de la pandémie sur la sécurité alimentaire mondiale. La différence observée s’explique principalement par une plus grande inégalité dans l’accès à la nourriture.

À l’échelle mondiale, des progrès sont réalisés pour certaines formes de malnutrition, mais le monde n’est pas en voie d’atteindre les cibles fixées pour 2030 concernant les indicateurs de nutrition. Le rythme actuel des progrès réalisés concernant le retard de croissance, l’allaitement maternel exclusif et l’insuffisance pondérale à la naissance est insuffisant, et les progrès concernant le surpoids et l’émaciation chez les enfants, l’anémie chez les femmes en âge de procréer et l’obésité chez les adultes stagnent (pas de progression), quand on ne constate pas une régression.

Alors que les répercussions, notamment économiques, de la pandémie de covid-19 continuent de se manifester, il est difficile de prévoir la trajectoire qui se dégagera ces prochaines années. On dispose encore de peu de données sur les conséquences effectives de la pandémie sur diverses formes de malnutrition, notamment sur la prévalence du retard de croissance, de l’émaciation et du surpoids chez l’enfant, ainsi que sur l’obésité chez l’adulte, l’anémie chez les femmes en âge de procréer, l’insuffisance pondérale à la naissance et l’allaitement maternel exclusif. Ces effets seront aggravés du fait de la dimension intergénérationnelle de la malnutrition et des conséquences qui en resulteront pour la productivité, et donc pour la reprise économique. Quoiqu’il en soit, il est clair que la pandémie de covid-19 a probablement eu des répercussions sur la prévalence de multiples formes de malnutrition et qu’elle pourrait avoir des effets durables au-delà de 2020, comme on le constate déjà en 2021. Par conséquent, des efforts exceptionnels sont nécessaires pour contrer et surmonter les effets de la pandémie afin d’accélérer le progrès vers la réalisation de la cible 2.2 des ODD.

Principaux facteurs à l’origine des évolutions récentes en matière de sécurité alimentaire et de nutrition

Il est essentiel d’aborder sous l’angle des systèmes alimentaires les facteurs à l’origine des évolutions récentes en matière de sécurité alimentaire et de nutrition

Les conflits, la variabilité du climat et les phénomènes climatiques extrêmes, ainsi que les ralentissements et les fléchissements économiques (exacerbés par la pandémie de covid-19), expliquent que la faim ait récemment gagné du terrain tandis que ralentissait le progrès vers la réduction de toutes les formes de malnutrition. Les effets de ces facteurs sont en outre aggravés par l’ampleur et la persistance des inégalités. De plus, des millions de personnes dans le monde connaissent l’insécurité alimentaire et diverses formes de malnutrition parce qu’elles n’ont pas les moyens financiers de se procurer une alimentation saine. Ces grands facteurs ont chacun leurs propres particularités mais ne sont pas mutuellement exclusifs: ils interagissent, créant des effets multiplicateurs en de nombreux points du système alimentaire, au détriment de la sécurité alimentaire et de la nutrition.

Par exemple, les conflits ont des répercussions sur presque tous les aspects du système alimentaire (culture, récolte, transformation, transport, approvisionnement en intrants, financement, vente et consommation). Ils ont des effets directs: actifs agricoles et moyens d’existence détruits et commerce et mouvements de biens et services restreints ou gravement perturbés, avec des conséquences sur les disponibilités des denrées alimentaires et les prix, notamment en ce qui concerne les aliments nutritifs.

La variabilité du climat et les phénomènes climatiques extrêmes ont eux aussi des effets cumulatifs multiples sur les systèmes alimentaires. Ils nuisent à la productivité agricole, et ont aussi des incidences sur les importations de denrées alimentaires, les pays essayant de compenser les pertes de production intérieures. Les catastrophes liées au climat peuvent avoir des répercussions importantes sur toute la chaîne de valeur alimentaire, notamment sur la croissance du secteur et sur les agro-industries alimentaires et non alimentaires.

Les ralentissements et les fléchissements économiques ont essentiellement des répercussions sur les systèmes alimentaires en ce qu’ils compromettent l’accès des personnes aux aliments, y compris l’accessibilité économique d’une alimentation saine, du fait de la hausse du chômage et de la baisse des salaires et des revenus. Il en est ainsi qu’ils soient causés par des fluctuations brutales du marché, des guerres commerciales, des troubles politiques ou une pandémie mondiale comme la covid-19.

L’inaccessibilité économique d’une alimentation saine s’explique par d’autres éléments qui influent sur les revenus des personnes et sur le coût des aliments nutritifs à tous les niveaux des systèmes alimentaires. Il s’agit donc d’un facteur qui intervient au sein du système alimentaire en portant atteinte à la sécurité alimentaire et à la nutrition.

La pauvreté et les inégalités sont des facteurs structurels sous-jacents critiques qui amplifient les effets négatifs des principaux facteurs, faisant sentir leurs effets à tous les niveaux des systèmes et des environnements alimentaires, jusqu’à compromettre l’accessibilité économique d’une alimentation saine et les résultats en matière de sécurité alimentaire et de nutrition.

Au-delà de leurs effets directs sur les systèmes alimentaires, les principaux facteurs mondiaux et les causes structurelles sous-jacentes compromettent la sécurité alimentaire et la nutrition en raison de leurs effets, interdépendants et circulaires, sur d’autres systèmes, notamment sur les systèmes environnementaux et les systèmes de santé.

Effets des principaux facteurs sur la sécurité alimentaire et la nutrition

Ces dix dernières années, la variabilité du climat et les phénomènes climatiques extrêmes ainsi que les ralentissements et les fléchissements économiques ont gagné en fréquence et en intensité, menaçant la sécurité alimentaire et la nutrition partout dans le monde. La situation des pays à revenu faible ou intermédiaire est particulièrement préoccupante, car ce sont ces pays qui subissent le plus durement les effets sur la sécurité alimentaire et la nutrition et qui comptent le plus grand nombre de personnes sous-alimentées, exposées à l’insécurité alimentaire ou souffrant d’une ou de plusieurs formes de malnutrition.

De 2010 à 2018, la prévalence de la sous-alimentation a progressé dans plus de la moitié des pays à revenu faible ou intermédiaire du fait d’un ou de plusieurs facteurs (conflits, phénomènes climatiques extrêmes et fléchissements économiques), avec des augmentations récurrentes dans plusieurs d’entre eux.

On constate dans les analyses que le renversement de tendance qui s’est produit en 2014 dans la prévalence de la sous-alimentation et l’augmentation constante de celle-ci, particulièrement prononcée à partir de 2017, sont en grande partie le fait des pays à revenu faible ou intermédiaire touchés par des conflits, des phénomènes climatiques extrêmes ou des fléchissements économiques et des pays où règne une grande inégalité des revenus. La prévalence de la sous-alimentation est plus forte et a davantage progressé dans les pays qui sont sous l’emprise de ces facteurs.

Au cours de la période de hausse la plus récente avant le déclenchement de la pandémie de covid-19, à savoir 2017-2019, les pays à revenu faible ou intermédiaire touchés par un ou plusieurs facteurs ont vu la prévalence de la sous-alimentation augmenter, tandis que ceux qui n’étaient touchés par aucun facteur ont vu la prévalence diminuer. À l’inverse, la prévalence du retard de croissance chez les enfants a reculé de manière constante de 2017 à 2019, et une analyse des pays touchés par les facteurs n’a pas permis de dégager de schéma particulier, ce qui donne à penser que d’autres facteurs plus décisifs sont à l’origine de cette tendance.

On observe également des différences importantes entre les tendances selon qu’un pays est touché par un ou par plusieurs facteurs (facteurs multiples) et selon le niveau de revenu du pays et la région. Les pays soumis à plusieurs facteurs affichent systématiquement les augmentations les plus marquées de la prévalence de la sous-alimentation, avec une augmentation 12 fois supérieure à celle constatée dans les pays touchés par un seul facteur. Pour les trois régions analysées (Afrique, Amérique latine et Caraïbes et Asie), 36 pour cent environ des pays à revenu faible ou intermédiaire sont touchés par des facteurs multiples.

Les pays à faible revenu touchés par des conflits et des extrêmes climatiques sont ceux qui connaissent la plus forte augmentation de la prévalence de la sous-alimentation, tandis que dans le cas des pays à revenu intermédiaire, ce sont les fléchissements économiques qui provoquent les augmentations les plus fortes. L’Afrique est la seule région où les augmentations de la prévalence de la sous-alimentation observées sur la période 2017-2019 sont liées aux trois facteurs (conflits, phénomènes climatiques extrêmes et fléchissements économiques). Les pays qui subissent des fléchissements économiques, en Afrique, en Amérique latine et dans les Caraïbes et en Asie, enregistrent l’accroissement de la prévalence le plus élevé par rapport à ceux qui sont frappés par des phénomènes climatiques extrêmes ou des conflits, l’accroissement le plus important étant constaté en Afrique et en Amérique latine et dans les Caraïbes.

En 2020, presque tous les pays à revenu faible ou intermédiaire ont été confrontés à des fléchissements économiques. L’augmentation du nombre de personnes sous-alimentées a été plus de cinq fois supérieure à la plus forte hausse observée ces 20 dernières années, et le fléchissement économique a été deux fois plus profond que tout autre fléchissement enregistré sur cette même période. Là où les fléchissements se sont accompagnés d’autres facteurs (catastrophe liée au climat, conflit ou les deux), la hausse la plus importante de la prévalence de la sous-alimentation a été observée en Afrique, suivie de l’Asie.

L’édition 2020 du présent rapport a montré que l’inaccessibilité économique d’une alimentation saine, en 2017, était fortement associée à la sous-alimentation et à différentes formes de malnutrition, y compris le retard de croissance chez les enfants et l’obésité chez les adultes. Ces résultats sont reconfirmés pour 2019 et une nouvelle analyse montre que les niveaux élevés d’inaccessibilité économique, en 2019, sont fortement associés à un accroissement de l’insécurité alimentaire grave et modérée ou de l’insécurité alimentaire grave, telles que mesurées selon l’échelle FIES.

Les pays touchés par plusieurs facteurs affichent le plus fort pourcentage de la population pour qui une alimentation saine est inaccessible financièrement (68 pour cent). Cette part, en moyenne, est supérieure de 39 pour cent à celle des pays touchés par un seul facteur et de 66 pour cent à celle des pays qui ne sont touchés par aucun facteur. Ces pays affichent également des niveaux plus importants d’insécurité alimentaire modérée ou grave (47 pour cent), supérieurs de 12 pour cent à ceux des pays touchés par un seul facteur et de 38 pour cent à ceux des pays où aucun facteur n’entre en jeu. L’inaccessibilité économique d’une alimentation saine tend à être plus marquée dans les zones de conflit.

Que faut-il faire pour transformer les systèmes alimentaires aux fins de la sécurité alimentaire, d’une meilleure nutrition et d’une alimentation saine et abordable?

Six voies de transformation à emprunter face aux principaux facteurs à l’origine des tendances récentes en matière de sécurité alimentaire et de nutrition

Six voies possibles sont recommandées pour transformer les systèmes alimentaires face aux principaux facteurs de l’insécurité alimentaire et de la malnutrition et pour assurer l’accès à une alimentation saine et abordable pour tous, de façon durable et inclusive. Ces six voies sont les suivantes: i) intégrer l’action humanitaire, les politiques de développement et la consolidation de la paix, dans les zones touchées par des conflits; ii) renforcer la résilience face aux changements climatiques dans l’ensemble du système alimentaire; iii) renforcer la résilience des plus vulnérables face à l’adversité économique; iv) intervenir le long de la chaîne d’approvisionnement alimentaire en vue de réduire le coût des aliments nutritifs; v) lutter contre la pauvreté et les inégalités structurelles en veillant à ce que les interventions soient favorables aux pauvres et inclusives; et vi) renforcer l’environnement alimentaire et changer le comportement des consommateurs afin de favoriser des habitudes alimentaires ayant une incidence positive sur la santé humaine et sur l’environnement.

Étant donné que de nombreux pays sont touchés par des facteurs multiples, plusieurs voies devront être empruntées simultanément, ce qui signifie qu’elles doivent être cohérentes entre elles si on veut les mettre en œuvre efficacement. Des portefeuilles complets de politiques, d’investissements et de lois sont donc indispensables à la transformation des systèmes alimentaires par ces voies.

Dans les situations de conflit, les systèmes alimentaires sont souvent fortement perturbés à tous les niveaux, ce qui compromet l’accès des populations à des aliments nutritifs. De graves crises économiques peuvent se produire lorsque les causes profondes des conflits sont liées à la concurrence pour les ressources naturelles, notamment les terres productives, les forêts, la pêche et les ressources en eau. Il est impératif que des politiques, des investissements et des mesures visant à réduire rapidement l’insécurité alimentaire et la malnutrition soient mis en œuvre en même temps que les mesures d’apaisement des conflits et qu’ils soient alignés sur les efforts à long terme de développement socioéconomique et de consolidation de la paix.

La manière dont nous produisons notre alimentation et dont nous utilisons nos ressources naturelles peut contribuer à un avenir qui sera bon pour le climat, où les hommes et la nature pourront coexister et prospérer. Cet aspect est important non seulement parce que les systèmes alimentaires subissent les effets des phénomènes climatiques, mais aussi parce qu’ils ont eux-mêmes une incidence sur l’état de l’environnement et sont un facteur de changement climatique. Les efforts à cet égard doivent avoir pour priorité de protéger la nature, de gérer dans des conditions durables les systèmes de production et d’approvisionnement alimentaires existants et de remettre en état les environnements naturels. Ces efforts aux fins de la durabilité permettront également de renforcer la résilience face aux chocs climatiques, ce qui favorisera la sécurité alimentaire et une meilleure nutrition.

Des politiques et des lois économiques et sociales, et les structures de gouvernance correspondantes, doivent être en place bien avant que ne surviennent les ralentissements et les fléchissements économiques, de manière à contrecarrer les effets de cycles économiques défavorables au moment où ils se produisent et à maintenir l’accès aux aliments nutritifs, en particulier pour les groupes de population les plus vulnérables, notamment les femmes et les enfants. Dans l’immédiat, les mesures prises doivent prévoir des dispositifs de protection sociale et des services de soins de santé primaires.

Il faut intervenir tout au long des chaînes d’approvisionnement alimentaire si l’on veut accroître les disponibilités d’aliments sûrs et nutritifs et faire baisser leur coût, essentiellement pour mettre à la portée des gens une alimentation saine plus abordable. Un ensemble cohérent de politiques, d’investissements et de lois doit être mis en place, de la production à la consommation, pour réaliser des gains d’efficience et réduire les pertes et le gaspillage de denrées alimentaires et contribuer à la concrétisation de ces objectifs.

Donner plus de moyens aux populations pauvres ou vulnérables, souvent des petits exploitants qui ont un accès limité aux ressources ou qui vivent dans des régions reculées, ainsi qu’aux femmes, aux enfants et aux jeunes, qui autrement seraient exclus, constitue un levier important du changement transformationnel. Les mesures en ce sens consistent à améliorer l’accès aux ressources productives, y compris aux ressources naturelles, aux intrants et technologies agricoles et aux ressources financières, ainsi qu’aux savoirs et à l’éducation. D’autres mesures consistent à renforcer les compétences de gestion et, surtout, l’accès aux technologies informatiques et à la communication numérique.

L’évolution des habitudes alimentaires a eu et des effets positifs mais aussi négatifs sur la santé humaine et l’environnement. En fonction du contexte propre au pays et des schémas de consommation dominants, il faut élaborer des politiques, des lois et des programmes d’investissement qui favorisent des environnements alimentaires plus sains et donnent aux consommateurs les moyens d’adopter des régimes alimentaires qui soient nutritifs, sains et sans risques pour la santé et aient moins d’incidences sur l’environnement.

Créer des portefeuilles de politiques et d’investissements cohérents

Un problème de taille qui fait obstacle à la transformation des systèmes alimentaires est que les politiques, stratégies, dispositions législatives et investissements qui existent aux niveaux national, régional et mondial sont compartimentés et donnent lieu à des réflexions séparées. Il est possible de remédier à ce problème en formulant et en mettant en œuvre des portefeuilles intersectoriels de politiques, d’investissements et de lois couvrant l’ensemble des répercussions que peuvent avoir sur la sécurité alimentaire et la nutrition les multiples facteurs qui touchent les systèmes alimentaires.

Ces portefeuilles doivent être bien ciblés et prévoir des mesures d’incitation propres à encourager tous les acteurs à contribuer de façon constructive à des changements novateurs et systémiques qui permettront de transformer les systèmes alimentaires. Le présent rapport fait fond sur des études de cas du monde entier d’où peuvent être tirés de bonnes pratiques et des enseignements utiles et donne de nombreux exemples de ce qu’il faut faire – concrètement et en innovant – pour transformer les systèmes alimentaires aux niveaux local, national, régional et mondial en vue d’accroître la résilience face aux facteurs qui font augmenter l’insécurité alimentaire et la malnutrition, tout en améliorant l’accès à une alimentation saine et abordable.

Les performances des systèmes alimentaires dépendent de leur cohérence et de leurs interactions avec plusieurs autres systèmes, en particulier avec les systèmes agroalimentaires dans leur ensemble, mais aussi avec les systèmes environnementaux, les systèmes de santé et les systèmes de protection sociale. D’autres systèmes, notamment le système éducatif, jouent un rôle central dans le système alimentaire, qu’il s’agisse de donner accès à des repas scolaires nutritifs aussi bien qu’aux connaissances et aux compétences nécessaires à la production alimentaire, de dispenser une éducation nutritionnelle aux écoliers ou encore de sensibiliser les consommateurs pour inciter à des choix alimentaires qui nuisent le moins possible à la santé et à l’environnement.

Les systèmes de santé et les services qu’ils assurent sont d’une importance vitale s’agissant de faire en sorte que les populations puissent s’alimenter et reçoivent les nutriments nécessaires à leur santé et à leur bien-être. Les systèmes alimentaires peuvent avoir des effets aussi bien positifs que négatifs sur la santé humaine par le biais de multiples voies interconnectées, elles-mêmes influencées par des facteurs prenant naissance à l’intérieur et à l’extérieur des systèmes alimentaires, dont les déterminants sociaux, économiques et environnementaux de la santé.

Les investissements dans les systèmes de protection sociale ont grandement contribué à renforcer l’accès à des aliments nutritifs, notamment pendant la pandémie de covid-19. Il importe de souligner que la protection sociale est plus qu’une réponse à court terme à des situations d’insécurité alimentaire et de malnutrition aiguë. Lorsqu’elle est prévisible et bien ciblée, la protection sociale peut aider les ménages à entreprendre de nouvelles activités économiques et à tirer parti des possibilités créées par le maintien du dynamisme économique des systèmes alimentaires, améliorant durablement l’accès à une alimentation saine.

La bonne mise en œuvre des portefeuilles de politiques et d’investissements exige un environnement favorable doté de dispositifs de gouvernance et d’institutions qui facilitent le dialogue entre les secteurs et les principales parties prenantes. Il est indispensable de rendre les technologies, les données et les innovations plus accessibles, pour accélérer la transformation des systèmes alimentaires, tout en veillant à trouver le cas échéant les meilleurs compromis possibles dans le cadre du processus de transformation.

Si l’on veut transformer les systèmes alimentaires de sorte qu’ils soient plus résilients face aux facteurs auxquels ils sont soumis et que tous puissent davantage se permettre une alimentation saine, et produite de façon durable, il faut pleinement mettre à profit des solutions qui soient gagnant-gagnant. Comme pour tout changement systémique, il y aura des gagnants et des perdants et l’introduction de nouvelles technologies, l’amélioration de l’accès aux données et à l’innovation et les transformations qui en résulteront dans le fonctionnement des systèmes alimentaires auront des répercussions à la fois positives et négatives. La cohérence entre les systèmes ainsi que les accélérateurs transversaux sont essentiels pour porter au maximum les avantages et limiter le plus possible les conséquences négatives de la transformation.

Conclusion

À moins d’une décennie de l’échéance de 2030, le monde n’est pas sur la voie de l’élimination de la faim et de la malnutrition. En ce qui concerne la faim, nous avançons dans la mauvaise direction. Comme le montre le présent rapport, les fléchissements économiques, qui se sont produits partout dans le monde par suite des mesures prises pour endiguer la pandémie de covid-19, ont contribué à l’une des poussées de la faim dans le monde les plus fortes depuis des décennies, dans presque tous les pays à revenu faible ou intermédiaire, une poussée de la faim qui risque de faire reculer les progrès obtenus sur le front de la nutrition. La pandémie de covid-19 n’est que la pointe émergée de l’iceberg. Plus inquiétant encore, elle a fait apparaître au grand jour les failles qui se sont formées au fil des ans dans nos systèmes alimentaires sous l’effet des grands facteurs que sont les conflits, la variabilité du climat et les phénomènes climatiques extrêmes, ainsi que les ralentissements et les fléchissements économiques. De plus en plus souvent, on voit ces grands facteurs se manifester ensemble dans les pays, avec des interactions qui compromettent gravement la sécurité alimentaire et la nutrition.

Le Sommet des Nations Unies sur les systèmes alimentaires, qui aura lieu cette année, en 2021, devrait déboucher sur une série de mesures concrètes qui pourront être prises partout dans le monde à l’appui d’une transformation des systèmes alimentaires mondiaux. Six voies de transformation sont énoncées dans le présent rapport, des voies qui, isolément ou, souvent, plusieurs à la fois, selon le contexte, seront nécessaires pour accroître la résilience et agir spécifiquement contre les effets des grands facteurs qui ont causé la récente hausse de la faim et le ralentissement des progrès vers une réduction de la malnutrition sous toutes ses formes, et faire en sorte que chacun ait financièrement accès à une alimentation saine.

La cohérence des politiques et des actions menées pour transformer les systèmes alimentaires, et la cohérence des systèmes entre eux, ainsi que les accélérateurs transversaux, sont essentiels pour maximiser les avantages de la transformation par les six voies énoncées en en limitant le plus possible les effets dommageables. C’est pourquoi la cohérence des politiques, à savoir une situation dans laquelle la mise en œuvre d’une politique dans un secteur ne compromet pas la politique suivie dans un autre (voire une situation où les politiques se renforcent l’une l’autre), sera un élément essentiel des portefeuilles multisectoriels qui seront élaborés pour la transformation. Il faut mettre en place des approches par système pour élaborer des portefeuilles de politiques, d’investissements et de lois qui aboutissent à des solutions gagnant-gagnant, à savoir des approches territoriales, des approches écosystémiques, des approches par système alimentaire des peuples autochtones, et des interventions qui apportent des solutions systémiques aux situations de crise prolongée.

Bien avant la pandémie de covid-19, plusieurs grands facteurs étaient déjà intervenus qui faisaient que le monde n’est plus sur la bonne voie pour mettre un terme à la faim et à la malnutrition sous toutes ses formes d’ici à 2030. La pandémie, et les mesures de confinement prises pour la contrer, ont rendu cet objectif encore plus difficile à atteindre. Mais cette situation nouvelle a mis en évidence la nécessité d’une réflexion plus approfondie sur ce qu’il convient de faire pour tenter de mieux remédier à l’insécurité alimentaire et à la malnutrition qui sévissent actuellement dans le monde.

En 2014, le long déclin de la faim, commencé en 2005, a connu un coup d’arrêt. Le nombre de personnes sous-alimentées s’est mis à croître lentement, jusqu’à ce que, en 2020, le monde connaisse une régression sans précédent dans ses efforts de lutte contre la faim, comme le font apparaître les estimations les plus récentes présentées dans les chapitres qui suivent. En outre, les progrès dans la lutte contre le retard de croissance se sont considérablement ralentis et l’excès pondéral et l’obésité chez l’adulte continuent de progresser, dans les pays riches comme dans les pays pauvres.

Que nous ont appris les précédentes éditions?

L’une des principales questions posées dans le rapport de cette année est la suivante: comment le monde en est-il arrivé à cette situation critique? Pour y répondre, le rapport prend appui sur les analyses fournies dans les quatre éditions précédentes, qui ont produit un vaste ensemble de connaissances fondées sur des données factuelles, concernant les principaux facteurs de l’évolution récemment constatée en matière de sécurité alimentaire et de nutrition. De nouvelles données ont été ajoutées pour permettre une analyse plus vaste de leurs interactions, et obtenir une vue d’ensemble de leurs effets réciproques et de leur incidence sur les systèmes alimentaires. Les connaissances accumulées au fil des éditions successives sont fondées sur des données factuelles. Par ailleurs, la mise au point d’indicateurs de la sécurité alimentaire et de la nutrition, et le suivi de ces indicateurs, ont permis d’établir des diagnostics clairs de la situation au niveau des pays, des régions et du mondea. Leur analyse a en outre permis de dresser des statistiques faisant le lien entre les principaux facteurs et les récents revers enregistrés dans la marche vers l’élimination de la faim et de toutes les formes de malnutrition d’ici à 2030. On a ainsi pu mieux comprendre où se situent les points d’entrée auxquels doivent être appliquées les politiques à mettre en place face aux grands facteurs.

Trois des grands facteurs qui sont à l’origine des évolutions récentes de la sécurité alimentaire et de la nutrition, et qui ont été analysés dans les quatre éditions précédentes du rapport, sont les conflits, la variabilité du climat et les extrêmes climatiques, et les ralentissements et les fléchissements économiques, des facteurs dont les effets sont exacerbés par les causes profondes de la pauvreté et par des degrés d’inégalité persistants et très élevés (qu’il s’agisse, notamment, des revenus, de la capacité de production, des biens, de la technologie, du niveau d’instruction ou de la santé) (encadré 1).

Par ailleurs, des millions de personnes dans le monde connaissent l’insécurité alimentaire et diverses formes de malnutrition parce qu’elles n’ont pas les moyens financiers de se procurer une alimentation saine. L’inaccessibilité économique d’une alimentation saine résulte de tout un ensemble de facteurs qui poussent à la hausse le coût des aliments nutritifs et ont pour effet de réduire les revenus des personnes. Ce quatrième facteur est associé à une augmentation de l’insécurité alimentaire et de toutes les formes de malnutrition, dont le retard de croissance, l’émaciation, les carences en micronutriments, l’excès pondéral et l’obésité, et les maladies non transmissibles. Dans l’édition de 2020 figurait aussi une évaluation préliminaire qui était un avertissement au sujet des effets sans précédent de la pandémie sur la sécurité alimentaire et la nutrition. La présente édition confirme ces conclusions et contient la première évaluation mondiale de l’insécurité alimentaire et de la malnutrition pour l’année 2020, établie sur la base des données les plus récentes recueillies dans le monde entier, en une année difficile.

De nombreux autres facteurs contribuent à l’insécurité alimentaire et à la malnutritionb, sans compter que des facteurs peuvent eux-mêmes résulter d’autres facteursc, mais dans le présent rapport nous nous intéressons aux facteurs énoncés dans l’encadré 1 et aux incidences sur la sécurité alimentaire et la nutrition qui résultent de leur interaction. Ces facteurs sont ceux qui pèsent le plus dans la récente poussée de la faim dans le monde et le ralentissement des progrès dans la réduction de la malnutrition sous toutes ses formes. Si on ne s’y attaque pas plus résolument, ils continueront de déterminer pendant de nombreuses années encore les tendances observées dans la sécurité alimentaire et la nutrition.

Les principaux facteurs mis en évidence dans le présent rapport et les causes sous-jacentes de la pauvreté et des inégalités sont présents dans de nombreux pays, partout dans le monde, souvent simultanément, créant des effets cumulatifs qui sont analysés dans les chapitres qui suivent. La pandémie de covid-19 et les mesures prises pour la contrer ont bien entendu causé un fléchissement économique sans précédent. En plus de cela, certaines régions du monde continuent de se débattre dans des conflits et, à l’échelle mondiale, les phénomènes climatiques demeurent une menace constante. Un point particulièrement préoccupant tient à ce que, comme nous le montrons dans le présent rapport, plusieurs des pays les plus touchés par la pandémie connaissaient déjà des niveaux élevés de sous-alimentation et de différentes formes de malnutrition avant que celle-ci n’éclate.

De la synthèse à l’action

La pandémie de covid-19 a brutalement mis au jour la fragilité de nos progrès sur les plans de la sécurité alimentaire et de la nutrition. Mais c’est aussi une occasion de réévaluer notre action face aux principaux facteurs de la faim et de la malnutrition et de recentrer nos efforts de manière à aller de l’avant, en mieux. Cependant, pour tirer le meilleur parti de cette occasion qui nous est donnée, nous devons examiner ces facteurs dans l’optique des systèmes alimentaires, en saisissant bien la nature interdépendante des facteurs, et mener une action sur la base des données qui découleront de cet examen.

Comme on le montre dans le rapport, les conflits, la variabilité et les extrêmes climatiques, les ralentissements et les fléchissements économiques, et la pauvreté et les inégalités sont des forces extérieures qui agissent sur les systèmes alimentaires, tandis que le coût et l’accessibilité économique de l’alimentation sont des forces qui agissent sur les systèmes alimentaires de l’intérieur. Ces facteurs internes et externes ont des répercussions sur la sécurité alimentaire et la nutrition en raison de leurs incidences sur les systèmes alimentaires et de leur impact interdépendant et circulaire sur d’autres systèmes, notamment l’environnement et les systèmes de santé.

Les systèmes alimentaires ne pourront contribuer puissamment à éliminer la faim et la malnutrition sous toutes ses formes dans le monde que s’ils sont transformés en sorte de devenir plus résilients face aux grands facteurs mentionnés dans les quatre éditions précédentes, et si l’on y crée des incitations à fournir une alimentation saine et abordable dans des conditions durables et inclusives. Les appels à une transformation plus vaste des systèmes alimentaires dans le sens de l’efficacité, de la résilience, de la durabilité environnementale et de l’inclusivité sont actuellement au centre de l’attention mondiale, et le présent rapport met en évidence les voies qui doivent être empruntées spécifiquement face aux principaux facteurs à l’origine de la récente montée de la faim et du ralentissement des progrès vers une réduction de toutes les formes de malnutrition.

Le rapport se compose de trois grands chapitres. Il commence par un tour d’horizon des données et des évolutions les plus récentes concernant la sécurité alimentaire et la nutrition, et donne une idée de ce à quoi ressemblerait la faim en 2030, dans un scénario encore compliqué par les effets prolongés de la pandémie de covid-19. Il se poursuit dans le chapitre suivant par une synthèse des connaissances et par une analyse empirique, dans l’optique des systèmes alimentaires, des grands facteurs qui, seuls ou conjugués à d’autres facteurs, sont à l’origine des évolutions constatées. Enfin, un autre chapitre contient une analyse approfondie de la manière dont on pourrait passer de solutions cloisonnées à des solutions intégrées appliquées au système alimentaire, qui répondent spécifiquement aux défis que constituent les principaux facteurs. Ce chapitre met aussi en évidence les portefeuilles de politiques, d’investissements et de lois qui seront nécessaires pour transformer les systèmes alimentaires en vue d’assurer à tous la sécurité alimentaire, une meilleure nutrition et une alimentation saine et abordable. Le rapport se termine par une conclusion générale.

On trouvera dans le présent chapitre la première évaluation mondiale de l’insécurité alimentaire et de la malnutrition pour 2020, année durant laquelle la covid-19 s’est rapidement répandue dans le monde. Avant la pandémie, la réalisation des cibles 2.1 (faire en sorte que chacun ait accès toute l’année à une alimentation saine, nutritive et suffisante) et 2.2 (mettre fin à toutes les formes de malnutrition) des objectifs de développement durables (ODD) piétinait déjà. La pandémie a causé de graves revers, mais elle a fait apparaître au grand jour des failles et des situations d’inégalité dont l’étude a beaucoup à nous enseigner. Si nous nous attelons à la tâche, alors cette sagesse et ces connaissances nouvelles que nous aurons acquises pourront nous aider à remettre le monde sur la voie de la réalisation des cibles 2.1 et 2.2. L’évaluation mondiale fournit un diagnostic clair, sur la base duquel mettre en place les politiques nécessaires.

La section 2.1 présente une évaluation complète de la situation en matière de sécurité alimentaire ainsi que des progrès accomplis dans la réalisation des objectifs correspondants (cible 2.1 des ODD). Elle se répartit en évaluations mondiales, régionales et sous-régionales pour l’année 2020, fondées sur les données les plus récentes recueillies dans le monde entier. Elle intègre également de nouvelles estimations du coût et de l’accessibilité économique d’une alimentation saine, estimations qui sont importantes car elles permettent de faire le lien entre les indicateurs de la sécurité alimentaire (section 2.1) et ceux de la nutrition (section 2.2). Présentés pour la première fois dans l’édition 2020 de L’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde, ces indicateurs sont mis à jour et diffusés chaque année dans le rapport.

La section 2.2 présente les dernières données disponibles sur l’état de la nutrition et les progrès vers la réalisation des cibles mondiales en matière de nutrition établies par l’Assemblée mondiale de la Santé en 2012 et dans le cadre du Programme de développement durable (cible 2.2 des ODD). On y trouve des estimations actualisées pour quatre des indicateurs de nutrition.

La section 2.3 est tournée vers 2030, avec de nouvelles projections concernant l’état de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans un scénario encore compliqué par la pandémie de covid-19. Elle fournit des estimations de la prévalence de la sous-alimentation en 2030, sur la base d’un modèle d’équilibre général qui détermine les trajectoires de l’offre alimentaire, de la croissance économique, des taux de pauvreté et du prix réel des aliments. Les projections concernant les indicateurs de nutrition ne tiennent pas compte de la pandémie, sauf en ce qui concerne la prévalence de la dénutrition chez l’enfant (retard de croissance et émaciation).

2.1 Indicateurs de la sécurité alimentaire: dernières données en date et progrès vers l’élimination de la faim et la sécurité alimentaire
MESSAGES CLÉS

La faim dans le monde a progressé au cours de l’année 2020, qui a été assombrie par la pandémie de covid-19. La prévalence de la sous-alimentation (PoU), qui était restée à peu près stable pendant cinq ans, est passée de 8,4 à environ 9,9 pour cent en un an seulement, ce qui rend plus difficile la réalisation de l’objectif «Faim zéro» d’ici à 2030.

D’après les projections, en 2020, entre 720 et 811 millions de personnes dans le monde ont été confrontées à la faim, soit environ 118 millions de personnes de plus qu’en 2019 si l’on prend en compte le milieu de la fourchette (768 millions) et jusqu’à 161 millions de plus si l’on prend en compte la limite supérieure de la fourchette.

La faim touche 21,0 pour cent de la population en Afrique, contre 9,0 pour cent en Asie et 9,1 pour cent en Amérique latine et dans les Caraïbes. En chiffres absolus, plus de la moitié des personnes sous-alimentées dans le monde vivent en Asie (418 millions) et plus du tiers en Afrique (282 millions).

Par rapport à 2019, environ 46 millions de personnes de plus ont été touchées par la faim en Afrique en 2020, 57 millions de plus en Asie et environ 14 millions de plus en Amérique latine et dans les Caraïbes.

Alors que la prévalence mondiale de l’insécurité alimentaire modérée ou grave (déterminée à l’aide de l’échelle de mesure de l’insécurité alimentaire vécue – échelle FIES) augmente lentement depuis 2014, l’augmentation estimative pour l’année 2020 était égale à celle constatée sur l’ensemble des cinq années précédentes. En 2020, près d’une personne sur trois dans le monde (2,37 milliards) n’avait pas accès à une nourriture adéquate, soit près de 320 millions de personnes de plus en un an seulement.

Toujours en 2020, la progression de l’insécurité alimentaire modérée ou grave a été la plus marquée en Amérique latine et dans les Caraïbes. En Amérique du Nord et en Europe, l’insécurité alimentaire a augmenté pour la première fois depuis 2014, année où on a commencé à recueillir des données à l’aide de l’échelle FIES.

Sur les 2,37 milliards de personnes en situation d’insécurité alimentaire modérée ou grave, la moitié (1,2 milliard) vit en Asie, un tiers (799 millions) en Afrique et 11 pour cent (267 millions) en Amérique latine et dans les Caraïbes.

Près de 12 pour cent de la population mondiale (928 millions de personnes) était en situation d’insécurité alimentaire grave en 2020, soit 148 millions de plus qu’en 2019.

Au niveau mondial, l’écart entre les femmes et les hommes dans la prévalence de l’insécurité alimentaire modérée ou grave s’est encore accentué durant l’année de la pandémie, la prévalence ayant été 10 pour cent plus élevée chez les femmes que chez les hommes en 2020, contre 6 pour cent en 2019.

Le coût élevé d’une alimentation saine et la persistance de fortes inégalités de revenu ont mis une alimentation saine hors de portée de quelque 3 milliards de personnes, en particulier les pauvres, dans toutes les régions du monde, en 2019 – un peu moins qu’en 2017.

Il convient de noter que seules l’Afrique et l’Amérique latine enregistrent une augmentation de l’inaccessibilité économique d’une alimentation saine entre 2017 et 2019, mais il est probable que des augmentations seront observées dans la plupart des régions en 2020 par suite de la pandémie de covid-19.

Gérer l’incertitude face à la pandémie de covid-19

Une chose est sûre, 2020 a été une année de grandes pertes économiques et humaines, qui ont eu pour cause la pandémie mondiale de covid-19 et ses incidences sur la santé, la vie et les moyens de subsistance de millions de personnes, dans le monde entier. Par ailleurs, les mesures de distanciation physique prises pour contenir la pandémie ont également perturbé les activités de collecte de données partout dans le monde, ce qui a compliqué l’évaluation de l’état de la sécurité alimentaire en 2020, y compris sur le plan méthodologique. La marge d’incertitude en ce qui concerne le nombre de personnes qui ont souffert de la faim et de l’insécurité alimentaire dans le monde est de ce fait plus grande cette année que les années précédentes.

La présente édition du rapport propose une fourchette de prévisions immédiates (prévisions portant sur le passé récent) pour 2020 en ce qui concerne la prévalence mondiale de la sous-alimentation (indicateur 2.1.1 des ODD) de manière à tenir compte de l’incertitude supplémentaire entourant les estimations de la faim causée par le choc sans précédent de la pandémie de covid-19. Il est important de noter que les estimations de la prévalence de la sous-alimentation pour 2020 ne sont pas basées sur les données communiquées par les pays pour 2020. Elles ont été obtenues à partir des paramètres utilisés pour estimer la prévalence de la sous-alimentation, en les ajustant à l’aide des meilleures données dont dispose la FAO sur l’offre alimentaire et à l’aide d’hypothèses raisonnables sur l’ampleur de l’inégalité d’accès à la nourriture (encadré 2).

En revanche, les évaluations de 2020 de la prévalence de l’insécurité alimentaire modérée ou grave, fondées sur l’échelle FIES (indicateur 2.1.2 des ODD), également fournies dans la présente section, s’appuient principalement sur des données d’enquête que la FAO a recueillies par l’intermédiaire du sondage mondial de Gallup© dans plus de 140 pays différents, essentiellement par des entretiens téléphoniques en raison des restrictions imposées par la pandémie (encadré 3).

Indicateur 2.1.1 des ODD: Prévalence de l’insécurité alimentaire

Il ne fait aucun doute que le nombre de personnes dans le monde touchées par la faim a continué d’augmenter au cours de l’année 2020, qui a été assombrie par la pandémie de covid-19. Le long recul de la sous-alimentation, constaté de 2005 à 2014, avait déjà pris fin, comme décrit dans les précédentes éditions de L’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde. Après être restée à peu près stable de 2014 à 2019, la prévalence de la sous-alimentation a augmenté, passant de 8,4 pour cent en 2019 à 9,9 pour cent environ en 2020 (figure 1), ce qui complique la réalisation de l’objectif «Faim zéro» d’ici à 2030. Les estimations pour 2020 varient de 9,2 à 10,4 pour cent, selon les hypothèses qui sont retenues pour tenir compte des incertitudes (encadré 2).

Figure 1
EN 2020, LE NOMBRE DE PERSONNES SOUS-ALIMENTÉES DANS LE MONDE A CONTINUÉ D’AUGMENTER, DE SORTE QUE 720 À 811 MILLIONS DE PERSONNES ONT ÉTÉ CONFRONTÉES À LA FAIM, SOIT 118 MILLIONS DE PLUS QU’EN 2019 SI L’ON PREND EN COMPTE LE MILIEU DE LA FOURCHETTE (768 MILLIONS) ET JUSQU’À 161 MILLIONS DE PLUS SI L’ON PREND EN COMPTE LA LIMITE SUPÉRIEURE DE LA FOURCHETTE

En chiffres absolus, on estime que 720 à 811 millions de personnes dans le monde ont été confrontées à la faim en 2020, soit 118 millions de personnes de plus qu’en 2019 si l’on prend en compte le milieu de la fourchette (768 millions) (figure 1), avec des estimations allant de 70 à 161 millions. Les estimations pour 2020 présentées dans les tableaux 1 et 2 sont basées sur le milieu de la fourchette de projections. On trouvera la série complète des estimations à l’annexe 2.

TABLEAU 1
PRÉVALENCE DE LA SOUS-ALIMENTATION DANS LE MONDE, 2005-2020
TABLEAU 2
NOMBRE DE PERSONNES SOUS-ALIMENTÉES DANS LE MONDE, 2005-2020

Si la pandémie de covid-19 a incontestablement joué un rôle, les changements observés entre 2019 et 2020 ne peuvent être attribués uniquement à la pandémie, de nombreux autres facteurs entrant en ligne de compte, comme indiqué au chapitre 3. Toutefois, l’augmentation de la faim en 2020 concorde avec les données dont on dispose et qui montrent que les difficultés économiques provoquées par la crise de la covid-19 ont probablement aggravé les inégalités d’accès à la nourriture. La Banque mondiale estime que la pandémie a fait basculer 119 à 124 millions de personnes supplémentaires dans l’extrême pauvreté en 202010. D’après les enquêtes menées par la Banque mondiale et d’autres organismes, une très forte proportion de ménages, urbains et ruraux, ont subi une baisse de leurs revenus après le début de la crise de la covid-1911,12.

Tout ceci malgré un effort sans précédent des pays pour mettre en œuvre des mesures de protection sociale. Ces mesures étaient toutefois très variables selon les pays et les régions (rapidité de mise en œuvre, couverture et montant et durée des aides), et elles n’ont pas toutes été aussi efficaces les unes que les autres face aux effets de la pandémie sur la pauvreté. À quelques exceptions près, les données montrent que les aides ont été de relativement courte durée. En moyenne, les mesures mises en place ont duré un peu plus de trois mois, et 40 pour cent environ des programmes prévoyaient des versements ponctuels uniques13,14.

Les chiffres font apparaître des inégalités régionales persistantes et inquiétantes. Environ une personne sur cinq (21 pour cent de la population) a été confrontée à la faim en Afrique en 2020, soit plus du double que dans toute autre région. Cela représente une augmentation de 3 points de pourcentage en un an. Viennent ensuite l’Amérique latine et les Caraïbes (9,1 pour cent) et l’Asie (9,0 pour cent), avec des progressions de 2,0 et 1,1 points de pourcentage de 2019 à 2020 (tableau 1).

Si les estimations de la prévalence régionale renseignent sur l’ampleur de la faim dans chaque région, les chiffres absolus donnent une idée des régions où vivent la plupart des personnes souffrant de la faim dans le monde (tableau 2). Sur le nombre total de personnes sous-alimentées (768 millions) en 2020, plus de la moitié (418 millions) vivent en Asie, plus du tiers (282 millions) en Afrique et 8 pour cent environ (60 millions) en Amérique latine et dans les Caraïbes (figure 2). Par rapport à 2019, 46 millions de personnes de plus ont été touchées par la faim en Afrique en 2020, près de 57 millions de plus en Asie et 14 millions de plus environ en Amérique latine et dans les Caraïbes.

Figure 2
PLUS DE LA MOITIÉ (418 MILLIONS) DES PERSONNES TOUCHÉES PAR LA FAIM DANS LE MONDE EN 2020 VIVENT EN ASIE ET PLUS D’UN TIERS (282 MILLIONS) EN AFRIQUE

Si on examine de plus près les différences sous-régionales (tableaux 1 et 2), on constate qu’en Afrique, la proportion de la population touchée par la faim en 2020 dans la sous-région Afrique du Nord (7,1 pour cent) est beaucoup plus faible que dans presque toutes les sous-régions d’Afrique subsaharienne, à l’exception de l’Afrique australe (10,1 pour cent). Dans les autres sous-régions, la prévalence varie de 18,7 pour cent en Afrique de l’Ouest à 31,8 pour cent en Afrique centrale. C’est l’Afrique de l’Est qui compte le plus grand nombre de personnes sous-alimentées, plus de 125 millions.

En Asie, la prévalence de la sous-alimentation en 2020 varie de moins de 2,5 pour cent en Asie de l’Est à un maximum de 15,8 pour cent en Asie du Sud, sous-région qui compte également le plus grand nombre de personnes sous-alimentées (près de 306 millions). La prévalence de la sous-alimentation en Asie de l’Ouest (15,1 pour cent) est presque équivalente à celle constatée en Asie du Sud.

En Amérique latine et dans les Caraïbes, les estimations indiquent une prévalence de la sous-alimentation de 16,1 pour cent dans les Caraïbes, contre 10,6 en Amérique centrale et 7,8 en Amérique du Sud.

Comme l’illustre la figure 3, toutes les sous-régions d’Afrique et d’Amérique latine et des Caraïbes, et la plupart des sous-régions d’Asie, ont connu une augmentation de la prévalence de la sous-alimentation de 2019 à 2020, ce qui traduit probablement le fait que la pandémie de covid-19 a exacerbé les facteurs préexistants d’insécurité alimentaire et a eu un impact sur l’accès à la nourriture (voir le chapitre 3). La plus forte augmentation de la sous-alimentation a été enregistrée en Afrique de l’Ouest, avec une hausse de 5,8 points de pourcentage en un an seulement, ce qui correspond à 24,6 millions de personnes supplémentaires. Si les estimations s’avèrent exactes, cela confirmerait la tendance relevée par la FAO et le PAM en 2020 dans plusieurs pays de cette sous-région16, et la nécessité d’accorder plus d’attention à l’évolution de la situation pour éviter une nouvelle détérioration.

Figure 3
TOUTES LES SOUS-RÉGIONS D’AFRIQUE ET D’AMÉRIQUE LATINE ET DES CARAÏBES, ET LA PLUPART DES SOUS-RÉGIONS D’ASIE, ENREGISTRENT UNE AUGMENTATION DE LA PRÉVALENCE DE LA SOUS-ALIMENTATION EN 2020 PAR RAPPORT À 2019, LA HAUSSE LA PLUS FORTE ÉTANT OBSERVÉE EN AFRIQUE DE L’OUEST

Indicateur 2.1.2 des ODD Prévalence d’une insécurité alimentaire modérée ou grave, évaluée à l’aide de l’échelle FIES

La cible 2.1 des ODD engage le monde à ne pas se contenter d’éliminer la faim. Pour optimiser la santé et le bien-être, il est impératif de garantir l’accès de tous à une alimentation sûre, nutritive et suffisante tout au long de l’année. L’indicateur 2.1.2 (prévalence d’une insécurité alimentaire modérée ou grave, évaluée à l’aide de l’échelle FIES) a été spécifiquement conçu pour suivre les progrès réalisés en vue d’assurer à tous l’accès à une alimentation adéquate.

Les estimations de la prévalence de l’insécurité alimentaire à des niveaux graves seulement fournissent une grille de lecture supplémentaire pour le suivi de la faim, en complément de la prévalence de la sous-alimentation. Bien qu’obtenues à l’aide de données et de méthodes très différentes de celles qui servent à mesurer la prévalence de la sous-alimentation, elles devraient être en corrélation avec celles-ci, pour toutes les populations. Il est en effet peu probable que les personnes en situation d’insécurité alimentaire grave soient en mesure d’acquérir suffisamment de nourriture pour satisfaire en permanence leurs besoins énergétiques, ce qui correspond au concept de sous-alimentation chronique mesuré par la prévalence de la sous-alimentation5,7.

Les estimations de l’insécurité alimentaire qui figurent dans le présent rapport reposent principalement sur les données FIES recueillies par la FAO par l’intermédiaire du sondage mondial de Gallup© (encadré 3). Il est à noter que comme un nombre croissant de pays adoptent l’échelle FIES comme outil normalisé d’évaluation de la sécurité alimentaire, de plus en plus de données FIES sont disponibles auprès des sources nationales officielles. Cette année, les données FIES ou des données équivalentes sur la sécurité alimentaire basées sur l’expérience vécue et recueillies par des organismes nationaux ont été utilisées pour 40 pays correspondant à un quart environ de la population mondiale (voir annexe 1B). Le rapport s’appuie aussi sur des données FIES recueillies par la FAO en 2020 en vue d’établir une évaluation préliminaire de la situation de l’insécurité alimentaire dans le contexte de la pandémie de covid-19 dans un groupe de 20 pays confrontés à des crises d’insécurité alimentaire17 (encadré 4).

Depuis 2014, année où la FAO a commencé à recueillir des données FIES, l’insécurité alimentaire modérée ou grave au niveau mondial a progressé, passant de 22,6 pour cent à 26,6 pour cent sur la période 2014-2019 (tableau 3 et figure 4). Puis au cours de l’année 2020, marquée par la propagation de la covid-19 dans le monde, elle a augmenté presque autant que sur toute cette période de cinq ans, pour atteindre 30,4 pour cent. Ainsi, près d’une personne sur trois dans le monde n’a pas eu accès à une nourriture adéquate en 2020, soit 320 millions de personnes de plus en un an seulement (2,37 milliards contre 2,05 milliards un an auparavant) (tableau 4).

TABLEAU 3
PRÉVALENCE DE L’INSÉCURITÉ ALIMENTAIRE GRAVE UNIQUEMENT ET DE L’INSÉCURITÉ ALIMENTAIRE MODÉRÉE OU GRAVE, ÉVALUÉE SELON L’ÉCHELLE FIES, 2014-2020
TABLEAU 4
NOMBRE DE PERSONNES EN SITUATION D’INSÉCURITÉ ALIMENTAIRE GRAVE UNIQUEMENT ET EN SITUATION D’INSÉCURITÉ ALIMENTAIRE MODÉRÉE OU GRAVE, ÉVALUÉ SELON L’ÉCHELLE FIES, 2014-2020

Près de 40 pour cent de ces personnes (11,9 pour cent de la population mondiale, soit près de 928 millions) étaient confrontées à une insécurité alimentaire à un niveau grave, à savoir qu’elles s’étaient trouvées dans des situations où elles avaient manqué de nourriture ou bien, dans le pire des cas, où elles avaient passé une journée sans manger. L’augmentation de la prévalence de l’insécurité alimentaire grave de 2019 à 2020 était elle aussi égale à l’augmentation totale constatée sur la période 2014-2019; près de 148 millions de personnes supplémentaires étaient en situation d’insécurité alimentaire grave en 2020.

L’insécurité alimentaire grave est normalement corrélée à la prévalence de la sous-alimentation, or il est à noter que l’augmentation, de 2019 à 2020, du nombre de personnes en situation d’insécurité alimentaire grave est plus élevée que l’augmentation du nombre estimatif de personnes sous-alimentées, présenté dans la section précédente et qui correspond au milieu de la fourchette (tableau 2). Cet écart est probablement dû principalement au fait que les indicateurs sont de nature très différente. Comme on l’a vu, les données FIES ont été recueillies directement auprès des personnes interrogées dans le cadre d’enquêtes, la collecte des données ayant commencé à la fin de 2020 et s’étant prolongée jusqu’au début de 2021, lorsque les effets de la pandémie de covid-19 étaient déjà plus apparents. Les estimations de la prévalence de la sous-alimentation, elles, sont des prévisions immédiates basées sur des données relatives aux disponibilités alimentaires et à l’accès à la nourriture, qui ne traduisent peut-être pas encore la totalité des répercussions de la pandémie de covid-19.

La progression de l’insécurité alimentaire modérée ou grave en 2020 par rapport à 2019 a été la plus marquée en Amérique latine et dans les Caraïbes (9 points de pourcentage) et en Afrique (5,4 points de pourcentage), alors qu’elle a été de 3,1 points de pourcentage en Asie (tableau 3 et figure 4). Toutefois, l’Afrique enregistre toujours la plus forte prévalence d’insécurité alimentaire aux deux niveaux de gravité. Près de 60 pour cent de la population africaine a été touchée par une insécurité alimentaire modérée ou grave en 2020, et 26 pour cent par une insécurité alimentaire grave. En Amérique latine et dans les Caraïbes, 41 pour cent de la population était en situation d’insécurité alimentaire modérée ou grave en 2020, et 14 pour cent en situation d’insécurité alimentaire grave. La situation de l’insécurité alimentaire était comparativement meilleure en Asie, où 26 pour cent de la population était touchée par une insécurité alimentaire modérée ou grave en 2020, et 10 pour cent par une insécurité alimentaire grave. Néanmoins, en raison de la taille de sa population, l’Asie compte encore la moitié des personnes en situation d’insécurité alimentaire modérée ou grave dans le monde (figure 5).

Figure 4
L’INSÉCURITÉ ALIMENTAIRE MODÉRÉE OU GRAVE PROGRESSE LENTEMENT DEPUIS SIX ANS ET TOUCHE DÉSORMAIS PLUS DE 30 POUR CENT DE LA POPULATION MONDIALE
Figure 5
L’AMPLEUR ET LA RÉPARTITION DES DIFFÉRENTS DEGRÉS D’INSÉCURITÉ ALIMENTAIRE VARIENT CONSIDÉRABLEMENT SELON LES RÉGIONS DU MONDE

Même en Amérique du Nord et en Europe, les deux régions qui affichent les plus faibles taux d’insécurité alimentaire, la prévalence a augmenté en 2020 pour la première fois depuis que l’on a commencé à recueillir des données à l’aide de l’échelle FIES, en 2014 (tableau 3). En 2020, 8,8 pour cent de la population d’Amérique du Nord et d’Europe était en situation d’insécurité alimentaire modérée ou grave, et 1,4 pour cent en situation d’insécurité alimentaire grave, contre 7,7 et 1,0 pour cent respectivement en 2019. Les taux étaient légèrement plus élevés en Océanie: 12 pour cent de la population était en situation d’insécurité alimentaire modérée ou grave en 2020, dont 2,6 pour cent en situation d’insécurité alimentaire grave. Il est intéressant de noter qu’une légère amélioration de la sécurité alimentaire a été observée dans cette région en 2020, aux deux niveaux de gravité, tendance qui a débuté en 2017 et que la pandémie ne semble pas avoir modifiée.

La figure 5 montre que sur les 2,37 milliards de personnes en situation d’insécurité alimentaire, la moitié (1,2 milliard) se trouve en Asie; un tiers (799 millions) en Afrique; et 11 pour cent (267 millions) en Amérique latine et dans les Caraïbes. Elle met aussi en évidence les écarts entre les régions dans la répartition des différents niveaux de gravité de l’insécurité alimentaire au sein des populations. Par exemple, l’Afrique est non seulement la région où la prévalence de l’insécurité alimentaire en général est la plus élevée, mais aussi celle où les niveaux graves représentent la plus grande part du total cumulé de l’insécurité alimentaire modérée et grave (43 pour cent, contre 39 pour cent en Asie et 35 pour cent en Amérique latine et dans les Caraïbes). En Amérique du Nord et en Europe, la proportion de la population touchée par une insécurité alimentaire grave est beaucoup plus faible.

Au sein des régions, on observe des différences importantes entre les sous-régions en matière d’insécurité alimentaire (tableau 3). En Afrique, l’insécurité alimentaire modérée ou grave a augmenté sensiblement dans la sous-région de l’Ouest, passant de 54,2 pour cent en 2019 à 68,3 pour cent en 2020, et dépassant ainsi le niveau observé en Afrique de l’Est (65,3 pour cent) où l’augmentation a été plus faible. On relève le même schéma en ce qui concerne l’insécurité alimentaire grave, à savoir que celle-ci a fortement augmenté en Afrique de l’Ouest, passant de 19,6 à 28,8 pour cent en 2019-2020, et beaucoup moins en Afrique de l’Est, où elle est passée de 26 à 28,7 pour cent. Des augmentations modérées ont été observées en Afrique australe, où la prévalence de l’insécurité alimentaire modérée ou grave est passée de 44,3 à 49,7 pour cent, et l’insécurité alimentaire grave de 19,2 à 22,7 pour cent. Des augmentations beaucoup plus faibles, d’environ 1 point de pourcentage, ont été observées en Afrique du Nord, où 30,2 pour cent de la population était en situation d’insécurité alimentaire modérée ou grave en 2020, dont un tiers environ en insécurité alimentaire grave (9,5 pour cent de la population).

En Asie, les plus fortes augmentations ont eu lieu dans la sous-région Sud, où l’insécurité alimentaire modérée ou grave est passée de 37,6 en 2019 à 43,8 pour cent en 2020. On observait déjà une forte augmentation dans cette sous-région depuis 2017 – la prévalence était alors de 29,4 pour cent. L’insécurité alimentaire grave a également augmenté en Asie du Sud en un an, passant de 18,3 à près de 19,9 pour cent. Une légère augmentation de l’insécurité alimentaire modérée ou grave a été observée en Asie de l’Ouest, qui présente la deuxième plus forte prévalence de l’insécurité alimentaire dans la région (28,3 pour cent en 2020). Une légère augmentation de l’insécurité alimentaire grave y a également été observée, celle-ci étant passé de 8,8 à 8,9 pour cent de 2019 à 2020. Des augmentations relativement importantes de l’insécurité alimentaire ont été observées en Asie centrale sur la période 2019-2020, avec une progression de l’insécurité alimentaire modérée ou grave (passée de 13,2 à 18 pour cent) et de l’insécurité alimentaire grave (passée de 2,3 à 4,7 pour cent). Malgré cette augmentation, la sous-région se classe au deuxième rang, derrière l’Asie de l’Est, parmi les sous-régions qui ont les taux d’insécurité alimentaire les plus bas; elle est suivie de l’Asie du Sud-Est. Il est à noter que la prévalence de l’insécurité alimentaire modérée ou grave en Asie de l’Est est inférieure à la moyenne relevée pour l’Amérique du Nord et l’Europe.

De fortes hausses de l’insécurité alimentaire ont été observées dans la plupart des sous-régions d’Amérique latine et des Caraïbes. En Amérique centrale et en Amérique du Sud, moins de 40 pour cent de la population est confrontée à une insécurité alimentaire modérée ou grave, et les niveaux d’insécurité alimentaire grave se situent à 11 et 13 pour cent respectivement. Toutefois, les deux sous-régions ont enregistré en 2020 une augmentation de 9 points de l’insécurité alimentaire modérée ou grave et de 4 points de l’insécurité alimentaire grave. Dans la sous-région des Caraïbesd, pour laquelle des estimations ont été communiquées cette année pour la première fois, la prévalence de l’insécurité alimentaire modérée ou grave était de 71,3 pour cent en 2020, ce qui représente près des trois quarts de la population. Parmi les personnes touchées, plus de la moitié étaient en situation d’insécurité alimentaire grave, soit 39 pour cent de la population.

Les niveaux les plus bas d’insécurité alimentaire dans la région Amérique du Nord et Europe – et dans le monde – se trouvent en Europe du Nord et en Europe de l’Ouest, où 4 pour cent environ de la population est confrontée à une insécurité alimentaire modérée ou grave. L’insécurité alimentaire modérée ou grave a d’ailleurs légèrement diminué dans ces deux sous-régions en 2020. En Amérique du Nord et en Europe du Sud, en revanche, elle a augmenté légèrement de 2019 à 2020, pour atteindre 7,8 et 9,2 pour cent respectivement. Au cours de la même période, une hausse sensible de l’insécurité alimentaire modérée ou grave a été observée en Europe de l’Est (14,8 pour cent en 2020, contre 10,4 pour cent en 2019). L’insécurité alimentaire grave, tout en progressant dans toutes les sous-régions sauf en Amérique du Nord, est restée faible partout. Les hausses les plus fortes ont eu lieu en Europe de l’Est (de 1,3 à 2,2 pour cent) et en Europe du Sud (de 1,6 à 2,3 pour cent).

Vers une évaluation des répercussions de la crise de la covid-19 sur la sécurité alimentaire

En résumé, les estimations basées sur les données FIES indiquent que la situation de la sécurité alimentaire s’est aggravée en 2020 par rapport à 2019 dans la plupart des régions du monde. Il ne fait guère de doute que la pandémie de covid-19 a contribué à la dégradation de l’accès à la nourriture. Comme mentionné dans l’encadré 3, la collecte de données par l'intermédiaire du sondage mondial de Gallup© a été réalisée à l'aide d'une version modifiée du module d'enquête FIES, pour tenter d’évaluer les répercussions de la pandémie de covid-19 sur la sécurité alimentaire. En moyenne, 60 pour cent environ des personnes interrogées qui se trouvaient en situation d’insécurité alimentaire modérée ou grave, et 55 pour cent de celles qui se trouvaient à un niveau grave d’insécurité, ont imputé principalement leurs difficultés d’accès à la nourriture à la pandémie de covid-19. Il est cependant difficile d’isoler les répercussions de la pandémie sur l’insécurité alimentaire car la pandémie a exacerbé des vulnérabilités préexistantes et modifié beaucoup d’aspects de la vie des gens. Les résultats ne doivent donc pas être interprétés comme rendant compte des seules répercussions de la covid-19 sur l’insécurité alimentaire, mais plutôt comme une indication que les gens perçoivent celle-ci comme un facteur important dans la diminution de leur accès à la nourriture.

Une autre façon d’examiner les conséquences de la pandémie de covid-19 sur la sécurité alimentaire est d’étudier les effets sur des facteurs spécifiques d’insécurité alimentaire, comme la perte de revenus. Des questions relatives aux conséquences de la pandémie de covid-19 sur l’emploi et les revenus ont été intégrées au sondage mondial réalisé en 2020 par Gallup© sur la base de l'échelle FIES, ce qui a permis d’examiner la relation entre la gravité de l’insécurité alimentaire et la perte de revenus causée par la crise de la covid-19. On a demandé aux répondants si, du fait de la pandémie: 1) ils avaient cessé temporairement leur travail (emploi salarié ou activité de leur entreprise); 2) ils avaient perdu leur emploi ou fermé leur entreprise; 3) ils avaient travaillé moins d’heures (emploi salarié ou activité de l’entreprise); 4) ils avaient perçu moins d’argent que d’habitude de leur employeur ou avaient tiré moins de revenus de leur entreprise. Comme on pouvait s’y attendre, les résultats de l’analysee montrent que les répondants dont l’emploi et le revenu ont été touchés par la pandémie ont été plus susceptibles de souffrir d’insécurité alimentaire. C’est la perte d’un emploi ou la cessation d’une activité qui ont eu les conséquences les plus grandes sur la sécurité alimentaire, suivies de la diminution des revenus et des arrêts de travail temporaires (32, 20 et 19 pour cent de probabilité supplémentaire d’être en situation d’insécurité alimentaire modérée ou grave, respectivement).

L’effet a été plus marqué pour l’insécurité alimentaire modérée ou grave que pour l’insécurité alimentaire grave. En outre, plus le revenu de la personne interrogée était élevé, moins les effets de la pandémie sur l’emploi avaient de répercussions sur la sécurité alimentaire. Ces résultats peuvent traduire une forte incidence de la pandémie sur la sécurité alimentaire des personnes à revenu moyen qui comptent normalement sur un emploi stable, ce qui laisse espérer une amélioration rapide de la sécurité alimentaire une fois que les gens seront en mesure de reprendre des activités professionnelles normales.

Les écarts entre les sexes en matière d’insécurité alimentaire

Les questions qui composent le module d’enquête FIES étant à caractère individuel, elles permettent également de comparer la situation des hommes et des femmes en matière d’insécurité alimentaire. La figure 6 montre l’évolution de la prévalence de l’insécurité alimentaire à différents niveaux de gravité chez les hommes et les femmes adultes dans l’ensemble du monde et dans chacune des régions, de 2014 à 2020. Au niveau mondial, l’écart entre les femmes et les hommes dans la prévalence de l’insécurité alimentaire modérée ou grave s’est encore accentué durant l’année de la pandémie, les femmes ayant été 10 pour cent de plus que les hommes en insécurité alimentaire en 2020, contre 6 pour cent de plus que les hommes en 2019. Cette situation s’explique principalement par le fait que l’écart s’est creusé en Amérique latine et dans les Caraïbes (30 pour cent en 2020 contre 24 pour cent en 2019) et en Asie (10 pour cent en 2020 contre 4 pour cent en 2019). En ce qui concerne l’insécurité alimentaire grave seule, la prévalence est également plus élevée chez les femmes que chez les hommes. L’écart s’est accru de 2019 à 2020, les femmes ayant été 11 pour cent de plus que les hommes en insécurité alimentaire en 2020, contre 9 pour cent de plus que les hommes en 2019. Autrement dit, l’écart entre les hommes et les femmes au niveau mondial, au cours de l’année de la pandémie, s’est davantage creusé pour l’insécurité alimentaire modérée ou grave.

Figure 6
DANS L’ENSEMBLE DU MONDE ET DANS CHAQUE RÉGION, LA PRÉVALENCE DE L’INSÉCURITÉ ALIMENTAIRE EST PLUS ÉLEVÉE CHEZ LES FEMMES QUE CHEZ LES HOMMES

Les femmes sont toujours touchées de manière disproportionnée par les crises sanitaires et économiques, avec des répercussions dans un certain nombre de domaines, notamment la sécurité alimentaire et la nutrition, la santé, la charge de travail journalière et les dimensions productives et économiques. Les résultats de cette analyse confirment les données dont on disposait déjà concernant l’incidence disproportionnée de la pandémie sur les perspectives économiques des femmes et leur accès à des aliments nutritifs20.

L’accessibilité économique d’une alimentation saine, lien entre la sécurité alimentaire et les résultats nutritionnels

Le coût et l’accessibilité économique d’une alimentation saine sont des déterminants importants des choix alimentaires et, en fin de compte, de la sécurité alimentaire, de la nutrition et de la santé des personnes7,21. Le coût fait référence à ce que les gens doivent payer pour obtenir une alimentation saine, tandis que l’accessibilité économique désigne le coût par rapport au revenu d’une personne, moins les autres dépenses nécessairesf. Le suivi du coût d’une alimentation saine et du nombre de personnes qui n’ont pas les moyens de se procurer une alimentation saine fournit des paramètres précieux qui permettent de mieux comprendre le lien entre ces déterminants importants de l’accès à la nourriture et l’évolution des multiples formes de malnutrition décrites dans la section suivante. Plus important encore, ces paramètres peuvent servir à éclairer un large éventail de politiques et de programmes aux niveaux mondial, national et infranational.

Selon l’OMS, une alimentation saine protège contre la malnutrition sous toutes ses formes, et notamment contre les maladies non transmissibles telles que le diabète, les maladies cardiaques, les accidents vasculaires cérébraux et le cancer. Par «alimentation saine» on entend la consommation d’un choix équilibré, diversifié et adéquat d’aliments sur une période de temps donnée. Une alimentation saine est telle que les besoins en macronutriments (protéines, lipides et glucides, y compris les fibres alimentaires) et en micronutriments essentiels (vitamines et minéraux) sont satisfaits, en fonction du sexe, de l’âge, du niveau d’activité physique et de l’état physiologique de chaque personne. Dans une alimentation saine, moins de 30 pour cent de l’apport énergétique total provient des lipides, les graisses saturées étant remplacées par des graisses insaturées et les graisses trans industrielles étant éliminées; moins de 10 pour cent de l’apport énergétique total provient de sucres libres (de préférence moins de 5 pour cent); la consommation de fruits et de légumes est d’au moins 400 g par jour; et la consommation de sel (iodé) ne dépasse pas 5 g par jour. Si la composition exacte d’une alimentation saine varie en fonction des caractéristiques individuelles, ainsi que du contexte culturel, des aliments disponibles localement et des habitudes alimentaires, les principes de base sur lesquels repose une alimentation saine sont les mêmes22,23.

Une alimentation saine peut également jouer un rôle important dans le renforcement de la durabilité des systèmes alimentaires. Comme indiqué dans l’édition 2020 du présent rapport, le passage à une alimentation saine qui intègre des considérations de durabilitég peut aider à réduire, d’ici à 2030, les coûts liés à la santé et au changement climatique, car les coûts cachés de cette alimentation sont inférieurs à ceux des modes de consommation actuels. D’après les projections, l’adoption d’une alimentation saine devrait permettre d’aboutir en 2030 à une réduction des coûts de santé directs et indirects dans une proportion qui pourrait aller jusqu’à 97 pour cent, et des coûts sociaux des émissions de gaz à effet de serre dans une proportion de 41 à 47 pour cent7.

Les estimations du coût et de l’accessibilité économique d’une alimentation saine dans le monde en 2017, par région et par groupe de revenu, ont été présentées pour la première fois dans la précédente édition du présent rapport7. Pour l’édition de cette année, les chiffres estimatifs jusqu’à l’année 2019 comprise ont été mis à jour à l’aide des données disponibles les plus récentes, afin de pouvoir suivre les progrès accomplis pour assurer à tous une alimentation saine et abordable. En revanche, on ne dispose pas encore des données nécessaires sur les prix et sur la répartition des revenus pour pouvoir actualiser les estimations de 2020, mais on a examiné l’évolution des revenus et celle des prix à la consommation des produits alimentaires en en déduisant les conséquences sur le coût et l’accessibilité économique d’une alimentation saine en 2020 et en 2021. Voir à l’annexe 2 une description complète de la méthode et des sources de données.

Coût d’une alimentation saine

Comme nous l’avons vu dans l’édition précédente du présent rapport, le coût de l’alimentation augmente à mesure que la qualité augmente, dans toutes les régions et pour tous les groupes de revenu des pays. Cette analyse était basée sur trois régimes de référence qui simulent des niveaux progressifs de qualité, depuis une alimentation «suffisamment énergétique» à une alimentation «suffisamment nutritive», et jusqu’à une alimentation «saine»8. En moyenne, le coût d’une alimentation saine était 60 pour cent plus élevé que celui d’une alimentation couvrant simplement les besoins en nutriments essentiels, et près de cinq fois plus élevé que celui d’une alimentation couvrant seulement les besoins énergétiques minimaux au moyen de féculents.

Les résultats actualisés indiquent qu’en 2019, au niveau mondial, le coût d’une alimentation saine était de 4,04 USD par personne et par jour. Cependant, le coût moyen d’une alimentation saine et l’évolution du coût entre 2017 et 2019 varient selon la région et le groupe de revenu auquel le pays appartient (tableau 5).

TABLEAU 5
EN 2019, UNE ALIMENTATION SAINE DEMEURAIT HORS DE PORTÉE DE QUELQUE 3 MILLIARDS DE PERSONNES DANS LE MONDE. DE 2017 À 2019, LE NOMBRE DE PERSONNES DANS CETTE SITUATION A AUGMENTÉ EN AFRIQUE ET EN AMÉRIQUE LATINE ET DANS LES CARAÏBES

Le coût d’une alimentation saine a augmenté de 7,9 pour cent au niveau mondial de 2017 à 2019, mais on observe des différences notables entre les régions (tableau 5). À l’exception de l’Afrique, toutes les régions présentent des augmentations plus faibles que la moyenne mondiale. C’est en Afrique que le coût d’une alimentation saine a le plus augmenté de 2017 à 2019 (12,9 pour cent)h. Viennent ensuite la région Amérique du Nord et Europe et la région Amérique latine et Caraïbes, qui ont toutes deux enregistré une hausse moyenne de 6,8 pour cent. L’Asie a enregistré une légère augmentation de 4,1 pour cent. Parmi les sous-régions, c’est l’Afrique de l’Est qui a connu la plus forte augmentation (33 pour cent), suivie de l’Amérique du Sud (9,2 pour cent)i.

L’analyse du coût d’une alimentation saine par groupe de revenu des pays montre que les augmentations les plus importantes se sont produites dans les pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure et dans les pays à revenu élevé (14,3 pour cent et 6,6 pour cent respectivement). Les augmentations du coût d’une alimentation saine sont beaucoup plus faibles dans les pays à bas revenu et dans les pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure (5,4 pour cent et 5,7 pour cent, respectivement).

Accessibilité économique d’une alimentation saine avant la pandémie de covid-19

L’accessibilité économique est un élément clé de la sécurité alimentaire et de la nutrition et une mesure de l’accès économique à la nourriture et à une alimentation saine. Comme l’accessibilité économique est la mesure du coût d’une alimentation donnée par rapport au revenu, les changements dans le temps peuvent résulter de l’évolution du coût de l’alimentation, des revenus, ou des deux. La hausse du coût des denrées alimentaires, si elle ne s’accompagne pas d’une hausse équivalente des revenus, peut avoir pour résultat qu’un plus grand nombre de personnes ne peut se procurer une alimentation saine. En outre, des problèmes économiques plus vastes, tels que des ralentissements et les fléchissements économiques qui entraînent une hausse du chômage et une baisse des salaires, peuvent rendre les aliments sains hors de portée pour un plus grand nombre de personnes, indépendamment de l’évolution des prix.

On estime qu’en 2019 le coût élevé d’une alimentation saine et la persistance de fortes inégalités de revenu ont mis une alimentation saine hors de portée de quelque 3 milliards de personnes (tableau 5) dont la plupart vivaient en Asie (1,85 milliard) et en Afrique (1,0 milliard), mais aussi en Amérique latine et dans les Caraïbes (113,0 millions) ainsi qu’en Amérique du Nord et en Europe (17,3 millions).

Le nombre total de personnes dans le monde qui ne pouvaient pas se permettre d’avoir une alimentation saine en 2019j est légèrement inférieur, d’environ 21 millions, à l’estimation pour 2017 publiée dans le rapport de l’année dernièrek. Il existe toutefois d’importantes différences entre les régions, l’Amérique latine et les Caraïbes et l’Afrique enregistrant une augmentation, tandis que l’Asie, l’Amérique du Nord et l’Europe et l’Océanie affichent une diminution. La plus forte augmentation du nombre de personnes qui ne peuvent pas se permettre une alimentation saine a été observée en Amérique latine et dans les Caraïbes (8,4 pour cent), en grande partie à cause de l’augmentation enregistrée en Amérique du Sud (14,3 pour cent)l. En Afrique, le nombre de personnes qui ne peuvent pas se permettre une alimentation saine a augmenté de 5,4 pour cent entre 2017 et 2019, allant de 2,0 pour cent en Afrique australe à 6,8 pour cent en Afrique centrale.

Tant l’Asie que l’Amérique du Nord et l’Europe, en revanche, ont connu une diminution du nombre de personnes qui ne peuvent pas se permettre une alimentation saine, sur la période 2017-2019 (4,2 et 3,6 pour cent, respectivement). Toutes les sous-régions d’Asie, à l’exception de l’Asie de l’Ouest, affichent une diminution du nombre de personnes qui n’ont pas les moyens d’avoir une alimentation saine, avec des baisses importantes en Asie centrale (22 pour cent)m et en Asie de l’Est (7,4 pour cent). L’Asie de l’Ouest affiche une augmentation de 8,1 pour cent. C’est l’Amérique du Sud qui a connu la diminution la plus marquée.

La comparaison du coût et de l’accessibilité économique sur plusieurs périodes met en évidence le rôle important de l’évolution des revenus et des prix dans la détermination de l’accessibilité économique. En Asie, l’augmentation du coût d’une alimentation saine a coïncidé avec une hausse des revenus, de sorte que le nombre de personnes qui ne pouvaient pas se permettre une alimentation saine a diminué. En revanche, l’Afriquen est l’une des régions où l’augmentation du coût d’une alimentation saine a été la plus faible, mais où l’on a cependant observé la plus forte hausse du nombre de personnes n’en ayant pas les moyens, ce qui met en évidence le rôle de la baisse des revenus. Au cours de la période considérée, la croissance économique et l’augmentation des revenus ont été plus faibles en Afrique.

En comparaison, la forte augmentation du coût des aliments sains en Amérique latine et dans les Caraïbes a coïncidé avec une augmentation du nombre de personnes qui n’avaient pas les moyens de les acheter. Cette situation est très différente de celle de l’Amérique du Nord et de l’Europe, qui ont connu une augmentation similaire du coût des aliments sains, mais où moins de personnes étaient dans l’incapacité de les acheter. Dans le cas de l’Amérique latine et des Caraïbes, l’augmentation du coût de l’alimentation saine a été aggravée par la baisse des revenus, ce qui a eu pour effet de rendre les aliments sains doublement inabordables, alors qu’en Amérique du Nord et en Europe, l’augmentation du coût a été compensée par une hausse des revenus.

Derrière ces différences se cachent d’importantes dynamiques liées au contexte et aux caractéristiques structurelles des pays, notamment les niveaux de pauvreté et d’inégalité des revenus. Les pauvres consacrent une grande partie de leurs revenus à l’alimentation, si bien que de légères augmentations du coût des aliments peuvent être lourdes de conséquences dans les pays où les pauvres représentent un pourcentage élevé de la population. En Afrique, par exemple, les faibles augmentations de coût touchent une plus grande proportion de la population. On estime que 80 pour cent de la population n’a pas les moyens d’avoir une alimentation saine.

Autre facteur important, le niveau d’inégalité des revenus dans le pays, qui détermine les effets de la croissance ou au contraire de la décélération économique sur les revenus moyens. Comme on l’a montré dans l’édition 2019 du présent rapport, dans les régions où les inégalités sont plus importantes, les ralentissements et les fléchissements économiques ont un effet disproportionné sur les populations à faible revenu, qui consacrent une grande partie de leurs revenus à l’achat de nourriture. En Amérique latine et dans les Caraïbes, l’effet cumulatif d’une très forte inégalité des revenus, d’un ralentissement et d’un fléchissement économiqueso et d’une forte augmentation du coût des aliments sains s’est traduit par l’une des plus fortes augmentations de l’inaccessibilité économique d’une alimentation saine sur la période 2017-2019. En revanche, l’Asie, qui a enregistré des niveaux plus faibles d’inégalité des revenus et de croissance économique au cours de cette même période, a pu compenser les fortes augmentations du coût de cette alimentation, avec pour résultat l’une des plus fortes améliorations de l’accessibilité économique.

Il ressort de ces constatations que pour améliorer l’accessibilité économique des aliments sains, il faut une approche stratégique plus large qui vise à accroître les revenus et à réduire le coût de l’alimentation saine, et qui porte aussi sur la question des inégalités (voir chapitres 3 et 4).

L’accessibilité économique d’une alimentation saine en 2020

Il n’y a pas lieu de se réjouir en ce qui concerne l’accès à une alimentation saine et abordable, surtout suite à la pandémie de 2020, y compris dans les régions où des améliorations ont pourtant été observées entre 2017 et 2019. Il n’est pas possible pour l’instant d’actualiser les estimations jusqu’en 2020, mais on sait que le nombre de personnes qui ne peuvent pas se permettre une alimentation saine a probablement augmenté en raison des effets conjugués de l’inflation des prix des denrées alimentaires et des pertes de revenus, suite aux répercussions économiques de la pandémie de covid-19 et aux mesures prises pour la contenir.

En décembre 2020, les prix mondiaux à la consommation en ce qui concerne les denrées alimentaires étaient à leur niveau le plus élevé depuis six ans, quel que soit le mois considéré, et ils ont continué à augmenter au cours du premier trimestre de 2021. En Amérique latine et dans les Caraïbes, par exemple, les prix ont augmenté de 16 pour cent entre janvier et décembre 2020, la hausse la plus forte ayant été enregistrée en Amérique du Sudp.

La récession économique mondiale qui a débuté en 2020 s’est prolongée en 2021, avec des niveaux de chômage record, des moyens d’existence perdus et des niveaux de pauvreté en hausse dans de nombreux pays du monde (voir chapitre 3). Il ressort d’une étude fondée sur des estimations modéliséesq de l’évolution des revenus dans 63 pays à revenu faible ou intermédiaire (population totale de 3,5 milliards) que la pandémie de covid-19 aura aggravé l’écart en 2020, rendant les aliments sains encore plus inaccessibles24,25. L’analyse montre que dans les pays étudiés, 141 millions de personnes de plus n’avaient pas les moyens d’acheter des aliments sains du fait de la pandémie. Il est à noter, en particulier, que le nombre de personnes dont les revenus ne leur permettent même pas de couvrir la moitié du coût d’une alimentation saine a également augmenté, passant de 43 à 50 pour cent. Lorsque l’écart à combler est aussi important en ce qui concerne l’accessibilité économique, combler les lacunes en matière d’apport nutritionnel chez les plus vulnérables sur le plan nutritionnel au cours des 1 000 premiers jours de la vie, de la conception au deuxième anniversaire, devrait être une priorité urgente, en raison des conséquences graves et durables que peut avoir la dénutrition lorsqu’elle survient très tôt dans la vie.

Les estimations du coût et de l’accessibilité économique d’une alimentation saine seront mises à jour chaque année et diffusées dans les éditions successives du présent rapport, en tenant compte des données les plus récentes à mesure qu’elles seront disponibles. Lorsque les nouvelles données pour 2020 seront disponibles, il sera possible d’estimer les répercussions économiques globales de la pandémie de covid-19 sur le coût et l’accessibilité économique des aliments sains. Des écarts régionaux, sous-régionaux, nationaux et même infranationaux sont à prévoir, compte tenu des différences de calendrier, de durée et d’intensité des confinements, et compte tenu du fait que les chocs économiques n’ont pas le même effet dans tous les pays.

2.2 Indicateurs de la nutrition: mises à jour les plus récentes et progrès vers la réalisation des cibles mondiales en matière de nutrition
MESSAGES CLÉS

À l’échelle mondiale, la malnutrition sous toutes ses formes reste un défi. Il n’est pas encore possible de tenir pleinement compte de l’incidence de la pandémie de covid-19 car on ne dispose que de données limitées, mais on estime qu’en 2020, le retard de croissance a touché 22,0 pour cent (149,2 millions) des enfants de moins de 5 ans, l’émaciation 6,7 pour cent (45,4 millions) et le surpoids 5,7 pour cent (38,9 millions). Les chiffres effectifs, en particulier en ce qui concerne le retard de croissance et l’émaciation, devraient être plus élevés par suite des effets de la pandémie.

La plupart des enfants de moins de 5 ans qui souffrent de malnutrition vivent en Afrique et en Asie. Plus de neuf enfants sur dix souffrant d’un retard de croissance, plus de neuf enfants sur dix souffrant d’émaciation et plus de sept enfants sur dix en surpoids, dans le monde, vivent dans ces régions.

On constate un progrès dans le pourcentage d’enfants âgés de 0 à 5 mois nourris exclusivement au lait maternel, puisqu’il est passé de 37 pour cent en 2012 à 44 pour cent en 2019.

L’anémie chez les femmes âgées de 15 à 49 ans constitue désormais un indicateur (2.2.3) des ODD. À l’échelle mondiale, 29,9 pour cent des femmes qui appartiennent à cette tranche d’âge présentent une anémie; toutefois, les données font apparaître des différences marquées entre les régions. En 2019, plus de 30 pour cent des femmes en Afrique et en Asie présentaient une anémie, contre seulement 14,6 pour cent des femmes en Amérique du Nord et en Europe.

Ces estimations ne tiennent pas compte des répercussions de la pandémie de covid-19, à cause des difficultés rencontrées pour recueillir des données en 2020. On a pu cependant constater, d’après les enquêtes téléphoniques menées en 2020, que les services nutritionnels essentiels avaient été perturbés et qu’il y avait eu une dégradation de l’alimentation. La modélisation des répercussions des chocs économiques et des perturbations des services montre par ailleurs que la pandémie est susceptible d’avoir accru toutes les formes de malnutrition.

L’intensification des activités en vue du Sommet des Nations Unies sur les systèmes alimentaires, qui se tiendra en septembre 2021, et du Sommet Nutrition pour la croissance, qui aura lieu à Tokyo en décembre 2021, devrait déboucher sur des engagements et des plans concrets pour l’élimination de toutes les formes de malnutrition au cours de la seconde moitié de la Décennie d’action des Nations Unies pour la nutrition, d’ici à 2025, et la réalisation des ODD, à l’horizon 2030.

Tendances mondiales

On trouvera dans la présente section une évaluation des progrès accomplis dans la réalisation des sept cibles mondiales en matière de nutrition. Six de ces cibles ont été approuvées par l’Assemblée mondiale de la Santé en 2012 et à ce titre devront être atteintes d’ici à 2025, et ont été ultérieurement inscrites parmi les cibles des ODD, avec pour horizon 203026 (tableau 6). Quatre des six indicateurs ont par ailleurs été sélectionnés pour suivre les progrès accomplis dans la réalisation de la cible 2.2 des ODD, dont l’anémie chez les femmes âgées de 15 à 49 ans, qui a été récemment ajoutée comme indicateur des ODD (indicateur 2.2.3)27. La septième cible consiste à enrayer l’augmentation de l’obésité chez les adultes, et s’inscrit dans le cadre du Plan d’action mondial pour la lutte contre les maladies non transmissibles adopté par l’Assemblée mondiale de la Santé en 201328.

TABLEAU 6
CIBLES MONDIALES EN MATIÈRE DE NUTRITION APPROUVÉES PAR L’ASSEMBLÉE MONDIALE DE LA SANTÉ ET CIBLES CORRESPONDANTES À L’HORIZON 2030

Les progrès accomplis dans la réalisation de chacune des sept cibles relatives à la nutrition sont résumés à la figure 7. Les dernières estimations ne tiennent pas compte des effets de la pandémie de covid-19 car les données sur les résultats en matière de nutrition n’ont pas été recueillies ou n’ont pas encore été entièrement évaluées. Les estimations 2020 du retard de croissance, de l’émaciation et de la surcharge pondérale chez l’enfant qui figurent dans la présente édition reposent presque entièrement sur des données recueillies avant 2020, car les données obtenues au moyen d’enquêtes réalisées auprès des ménages sur la taille et le poids des enfants ont été limitées l’année dernière en raison des mesures de distanciation physique visant à contenir la propagation de la pandémie; seules quatre enquêtes nationales ayant au moins fait l’objet d’un travail de terrain en 2020 sont prises en compte dans ces estimations actualisées. Néanmoins, certaines des répercussions observées et modélisées de la pandémie sur la nutrition sont examinées à la fin de la présente section.

Figure 7
ATTEINDRE LES CIBLES MONDIALES RELATIVES À LA NUTRITION D’ICI À 2025 ET 2030 RESTE UN DÉFI. ON ESTIME QU’EN 2020 LE RETARD DE CROISSANCE TOUCHAIT 22 POUR CENT DES ENFANTS DE MOINS DE 5 ANS, L’ÉMACIATION 6,7 POUR CENT ET LE SURPOIDS 5,7 POUR CENT. EN 2019, PRÈS DE 30 POUR CENT DES FEMMES ÂGÉES DE 15 À 49 ANS PRÉSENTAIENT UNE ANÉMIE

En 2015, 20,5 millions (14,6 pour cent) de nourrissons dans le monde, soit une naissance vivante sur sept, présentaient une insuffisance pondérale29. Ces nouveau-nés ont un risque plus élevé de mourir dans les 28 premiers jours; ceux qui survivent sont plus susceptibles de présenter un retard de croissance et un quotient intellectuel plus faible, et arrivés à l’âge adulte sont exposés à un plus grand risque de surpoids et d’obésité ainsi que de maladies chroniques, parmi lesquelles les maladies cardiovasculaires et le diabète30,31. Les données montrent que peu de progrès ont été faits depuis 2012 en vue de réduire l’insuffisance pondérale à la naissance. De nouvelles estimations de l’insuffisance pondérale à la naissance seront publiées au début de 2022.

Des pratiques d’allaitement optimales, notamment l’allaitement maternel exclusif pendant les six premiers mois de la vie, sont essentielles à la survie des enfants ainsi qu’à leur santé et à leur développement cérébral et moteur. À l’échelle mondiale, 44 pour cent des nourrissons de moins de 6 mois étaient exclusivement nourris au sein en 2019 – un progrès par rapport aux 37 pour cent de 2012. L’Océanie (hors Australie et Nouvelle-Zélande) a enregistré les niveaux les plus élevés d’allaitement exclusif, avec 61,3 pour cent. En 2019, plus de deux nourrissons de moins de 6 mois sur cinq en Afrique (43,6 pour cent) et en Asie (45,3 pour cent) ont été exclusivement nourris au sein, contre seulement un nourrisson sur trois en Amérique du Nord (34,7 pour cent). Cette pratique varie toutefois considérablement en Asie et en Afrique selon les sous-régions. En Asie, trois sous-régions sur cinq ont une prévalence plus élevée que les chiffres estimatifs mondiaux. L’Asie du Sud présente la prévalence la plus élevée, avec 57,2 pour cent des nourrissons nourris exclusivement au sein, contre seulement 22,0 pour cent en Asie de l’Est. De même, en Afrique, la prévalence de l’allaitement maternel exclusif est presque deux fois plus élevée en Afrique de l’Est (60,7 pour cent) qu’en Afrique australe (33,5 pour cent) ou en Afrique de l’Ouest (32,3 pour cent). Des progrès ont été réalisés dans de nombreuses régions, mais deux sous-régions en particulier ont enregistré une baisse inquiétante de la prévalence de l’allaitement maternel exclusif sur la période 2012-2019 – les Caraïbes, où le niveau est passé de 29,7 à 25,9 pour cent, et l’Asie de l’Est, où le niveau est passé de 28,5 à 22,0 pour cent.

Les estimations du retard de croissance et du surpoids chez l’enfant, présentées ci-après, ont été générées à l’aide d’un nouveau modèle au niveau des pays (voir l’annexe 1B pour plus de détails). Toutefois, comme indiqué plus haut, la pandémie de covid-19 continue d’avoir des répercussions sur la malnutrition infantile qui ne sont pas prises en compte dans les estimations de 2020.

À l’échelle mondiale, 149,2 millions (22,0 pour cent) d’enfants de moins de 5 ans présentaient un retard de croissance (indicateur 2.2.1 des ODD) en 202032. Le retard de croissance (à savoir une taille trop petite pour l’âge considéré) nuit à la croissance physique et au développement cognitif des enfants et augmente leur risque de mourir d’une infection courante. Il est également associé à un risque accru de développer des maladies non transmissibles à l’âge adulte. La prévalence du retard de croissance a diminué, passant de 33,1 pour cent en 2000 à 26,2 pour cent en 2012, puis à 22,0 pour cent en 2020. Près des trois quarts des enfants souffrant d’un retard de croissance dans le monde vivaient, en 2020, dans deux régions seulement: l’Asie centrale et l’Asie du Sud (37 pour cent) et l’Afrique subsaharienne (37 pour cent). Ce sont les régions d’Asie de l’Est et du Sud-Est qui ont le plus progressé au cours des deux dernières décennies, la prévalence du retard de croissance ayant diminué de près de moitié, passant de 26,1 pour cent en 2000 à 13,4 pour cent en 2020. Les progrès en matière de retard de croissance ont été plus lents en Afrique, où la prévalence est passée de 41,5 pour cent en 2000 à 30,7 pour cent en 2020 (soit une baisse de 26 pour cent seulement en termes relatifs); ces progrès plus lents, associés à l’augmentation de la population, en fait la seule région où le nombre d’enfants souffrant d’un retard de croissance a augmenté depuis 2000. Certaines sous-régions africaines ont enregistré des progrès moindres que d’autres. L’Afrique centrale et l’Afrique australe, par exemple, ont enregistré une baisse de la prévalence du retard de croissance inférieure à 20 pour cent, en termes relatifs, depuis 2000.

L’émaciation de l’enfant (qui relève de l’indicateur 2.2.2 des ODD) est une pathologie potentiellement mortelle résultant d’un apport nutritionnel faible et de maladies fréquentes ou prolongées. Les enfants qui en sont atteints sont dangereusement maigres, ont un système immunitaire affaibli et sont exposés à un plus grand risque de décès. En 202032, l’émaciation touchait 45,4 millions d’enfants de moins de 5 ans (6,7 pour cent). Près d’un quart d’entre eux vivaient en Afrique subsaharienne et plus de la moitié en Asie du Sud, sous-région où la prévalence de l’émaciation est la plus élevée – plus de 14 pour cent. Cette forme de malnutrition est celle sur laquelle la pandémie de covid-19 a eu le plus d’effets à court terme, car il s’agit d’une pathologie grave qui peut surgir rapidement dans les situations de choc. La pandémie a probablement rendu plus lointaine la perspective d’une réalisation des objectifs mondiaux dans ce domaine. Comme indiqué plus haut, le chiffre de 45,4 millions d’enfants ne tient pas compte des répercussions de la pandémie, car il n’a pas été possible de mesurer les enfants lorsque les politiques de distanciation physique étaient en vigueur. Toutefois, une étude basée sur la modélisation indique que l’émaciation pourrait avoir touché en 2020 environ 15 pour cent d’enfants de plus que ce qu’indiquent les chiffres estimatifs, mettant en danger la vie de dizaines de millions d’enfants33.

Le surpoids chez l’enfant (qui relève de l’indicateur 2.2.2 des ODD) a des effets immédiats sur la santé et le bien-être des enfants et augmente le risque que s’installent à l’âge adulte des maladies non transmissibles liées à l’alimentation. Il est en augmentation dans de nombreux pays, en raison de la politique commerciale des gros fabricants et d’un accès accru à des aliments hautement transformés, souvent riches en énergie, en graisses (en particulier les graisses saturées et les graisses trans), en sucres libres et en sel34, et aussi à cause d’un niveau d’activité physique insuffisant. Par exemple, d’après une étude menée en Europe, plus de la moitié des aliments complémentaires pour nourrissons contenaient des niveaux excessifs de sucre35. En 2020, 5,7 pour cent (38,9 millions) des enfants de moins de 5 ans étaient en surpoids32. La situation a peu évolué au niveau mondial en deux décennies – 5,7 pour cent en 2020 contre 5,4 pour cent en 2000 – et les tendances dans certaines régions et dans de nombreux contextes sont à la hausse. En Afrique, la prévalence de la surcharge pondérale chez l’enfant est similaire à la prévalence mondiale (5,3 pour cent en 2020), mais elle varie selon les sous-régions, et atteint 13,0 et 12,1 pour cent en Afrique du Nord et en Afrique australe respectivement. Le surpoids chez l’enfant a connu une forte augmentation entre 2000 et 202032, notamment dans deux régions, l’Asie de l’Est et du Sud-Est et l’Australie et la Nouvelle-Zélande, où les taux sont passés respectivement de 5,2 à 7,7 pour cent et de 7,7 à 16,9 pour cent. Il faut inverser la trajectoire si l’on veut atteindre la cible mondiale de 3 pour cent d’ici à 2030.

On trouvera de nouvelles mises à jour pour 2019 sur l’anémie chez les femmes en âge de procréer (indicateur 2.2.3 des ODD) dans le rapport de cette année. Au niveau mondial, près d’une femme sur trois (29,9 pour cent) en âge de procréer souffrait encore d’anémie, et aucun progrès n’a été réalisé depuis 2012. On observe de grandes disparités d’une région à l’autre, la prévalence en Afrique étant près de trois fois supérieure à celle relevée en Amérique du Nord et en Europe. La prévalence est particulièrement élevée en Afrique de l’Ouest, où elle est de 51,8 pour cent et n’a que peu progressé depuis 2012 (52,9 pour cent). Aucune région n’a enregistré une baisse sensible de la prévalence de l’anémie chez les femmes en âge de procréer, ce qui souligne la nécessité d’une plus grande attention et d’une action renforcée. Des tendances similaires s’observent également pour l’anémie chez les femmes enceintes36.

L’obésité des adultes est un facteur de risque en ce qui concerne plusieurs maladies non transmissibles liées à l’alimentation. L’obésité chez les adultes continue d’augmenter, la prévalence mondiale étant passée de 11,8 pour cent en 2012 à 13,1 pour cent en 2016. Toutes les sous-régions ont affiché des tendances à la hausse sur cette période, et aucune n’est en voie d’atteindre la cible de l’Assemblée mondiale de la Santé d’ici à 2025. En 2016, l’Amérique du Nord, l’Asie de l’Ouest ainsi que l’Australie et la Nouvelle-Zélande présentaient les niveaux les plus élevés, avec respectivement 35,5 pour cent, 29,8 pour cent et 29,3 pour cent. L’Amérique latine et les Caraïbes, ainsi que l’Océanie (hors Australie et Nouvelle-Zélande) affichent également des taux supérieurs à 20 pour cent. Des estimations actualisées de l’obésité chez l’adulte seront publiées fin 2021.

Les tendances régionales décrites précédemment sont récapitulées à la figure 8 et les tendances sous-régionales sont présentées dans le tableau 7 de la section suivante.

Figure 8
LE RETARD DE CROISSANCE EST LE SEUL INDICATEUR QUI ENREGISTRE D’IMPORTANTS PROGRÈS DANS PLUSIEURS RÉGIONS DEPUIS 2000. DEUX INDICATEURS, LE SURPOIDS CHEZ L’ENFANT ET L’ANÉMIE CHEZ LES FEMMES EN ÂGE DE PROCRÉER, N’ONT CONNU AUCUN PROGRÈS EN DEUX DÉCENNIES. L’OBÉSITÉ DES ADULTES EST EN FORTE AUGMENTATION DANS TOUTES LES RÉGIONS

Comme indiqué précédemment dans le présent rapport, des centaines de millions de personnes souffraient déjà de faim et de malnutrition avant le début de la pandémie de covid-19. À long terme, sans une action coordonnée à grande échelle, les effets de la propagation de la covid-19, conjugués aux mesures prises pour la contrer et à la récession mondiale émergente, pourraient perturber le fonctionnement des systèmes alimentaires et avoir des conséquences désastreuses sur la santé et la nutrition. Dans la section ci-après, nous examinons certaines des données relatives aux effets de la pandémie de covid-19 sur la nutrition.

Effets de la pandémie de covid-19 sur la nutrition

La pandémie de covid-19 a entraîné de multiples chocs économiques, alimentaires et sanitaires qui menacent d’annuler les progrès réalisés à ce jour dans la lutte contre toutes les formes de malnutrition37. Il faudra probablement attendre un certain temps avant de disposer à l’échelle mondiale de données empiriques qui permettent d’évaluer correctement les répercussions de la pandémie sur l’état nutritionnel. Les résultats des études mentionnées ci-après donnent déjà un aperçu des répercussions de la pandémie de covid-19 sur les facteurs liés à la nutrition, dont dépendent, en fin de compte, les résultats nutritionnels.

Évolution des habitudes alimentaires

Certaines activités de collecte de données se sont poursuivies pendant la pandémie, par téléphone et en ligne, voire en personne avec toutes les précautions voulues. De nombreuses enquêtes liées à la nutrition menées en 2020 comprenaient des questions sur les stratégies d’adaptation adoptées par les ménages face à la pandémie, mettant en lumière les changements survenus dans les habitudes alimentaires.

Lors d’une enquête nationale menée en Indonésie, 31 pour cent des ménages ont signalé des pénuries alimentaires et 38 pour cent ont déclaré manger moins que d’habitude, contre 3 pour cent et 5 pour cent respectivement l’année précédente11. D’après les résultats de l’enquête, les ménages ne consommaient pas une quantité suffisante d’aliments et leur nourriture n’était pas assez diversifiée, ce qui augmente le risque de carences nutritionnelles et de déficits physiques et cognitifs irréversibles chez les enfants, et, à l’âge adulte, le risque d’insuffisance pondérale, de surpoids, d’obésité et de maladie non transmissible. Il ressort d’une autre étude menée au Yémen que la diversité alimentaire des ménages ayant déjà une mauvaise alimentation s’était détériorée de février à avril 2020, la part des ménages ne consommant que trois catégories d’aliments ou moins étant passée de 22 à 30 pour cent au cours de cette période. Ces ménages ont déclaré manger principalement des céréales, des matières grasses et du sucre, au lieu d’aliments nutritifs38.

Les conditions imposées par la pandémie de covid-19 – mobilité restreinte, fermeture des marchés ou heures d’ouverture limitées, et augmentation du prix des aliments périssables, souvent plus nutritifs39 – sont autant de facteurs qui ont provoqué des changements dans l’alimentation. Ces conditions, ainsi que la baisse des revenus, peuvent amener les familles à choisir des aliments moins chers, hautement transformés et à longue durée de conservation – souvent à haute densité énergétique et à valeur nutritionnelle minimale – plutôt que des aliments frais plus nutritifs. Au Brésil, 49 pour cent des personnes interrogées ont déclaré que leurs habitudes alimentaires avaient changé pendant les périodes de quarantaine et de distanciation sociale. Parmi les ménages comprenant des enfants et des adolescents de moins de 17 ans, cette proportion est passée à 58 pour cent. Près d’un tiers (31 pour cent) des ménages avec enfants ont augmenté leur consommation d’aliments hautement transformés, contre 18 pour cent des ménages sans enfants, ce qui montre bien que la baisse de la qualité de l’alimentation touche surtout les enfants40.

L’étude sur le Brésil a mis en évidence des inégalités sociodémographiques en ce qui concerne la qualité de l’alimentation: les personnes appartenant aux quintiles de richesse inférieurs, les chômeurs, les personnes de couleur et les répondants de la région nord-est du pays, plus pauvre, ont déclaré qu’ils s’étaient mis à consommer davantage d’aliments hautement transformés. Ces résultats montrent que les politiques doivent viser surtout à promouvoir une alimentation saine tout en prévoyant des systèmes de protection sociale pour soutenir les groupes vulnérables pendant la durée de la crise de covid-19. Des tendances analogues ont été observées dans la région Amérique latine et Caraïbes41.

Perturbation des services nutritionnels essentiels

Partout dans le monde, les systèmes de santé, d’alimentation, d’éducation et de protection sociale ont beaucoup de mal à maintenir les services nutritionnels essentiels tout en faisant face à la pandémie de covid-19. D’après une étude qui rend compte de la situation des enfants pendant la pandémie42, 90 pour cent des pays (122 sur 135) ont signalé que la couverture des services nutritionnels essentiels avait changé en août 2020 par rapport à la situation antérieure (figure 9). Globalement, la couverture des services nutritionnels essentiels a diminué de 40 pour cent, et près de la moitié des pays ont signalé une baisse de 50 pour cent ou plus pour au moins un service nutritionnel. Les programmes de nutrition dans les écoles ont été les plus touchés, avec une réduction globale de 60 pour cent de la couverture des services, suivis par la supplémentation en acide folique pour les adolescentes (45 pour cent). Dans la plupart des pays qui ont fourni des données sur les programmes nutritionnels en milieu scolaire (cantine et rations à emporter), à savoir 39 des 68 pays disposant de données, les programmes nutritionnels en milieu scolaire ont été perturbés dans une proportion de 75 à 100 pour cent en raison des mesures de lutte contre la covid-19 (figure 9).

Figure 9
EN AOÛT 2020, 90 POUR CENT ENVIRON DES PAYS ÉTUDIÉS ONT SIGNALÉ DES CHANGEMENTS DANS LA COUVERTURE DES PRINCIPAUX SERVICES DE NUTRITION SUITE À LA COVID-19. SI 80 POUR CENT D’ENTRE EUX ONT SIGNALÉ DES PERTURBATIONS DANS LA COUVERTURE DES SERVICES, UNE PETITE PROPORTION A CONSTATÉ UNE AMÉLIORATION

Les résultats de l’étude montrent que les régions les plus vulnérables ont également été les plus touchées par la pandémie de covid-19. L’Afrique et l’Asie, régions qui concentrent la plus grande part de toutes les formes de malnutrition infantile, ont également enregistré les plus fortes baisses globales de la couverture des services nutritionnels essentiels, avec un recul de 27 pour cent et de 49 pour cent respectivement. De même, plus de 90 pour cent de tous les pays en situation fragiler ont signalé que les services avaient été perturbés, contre 75 pour cent des pays qui ne sont pas en situation fragile. Partout dans le monde, les pays ont tenté d’adapter leurs programmes pour continuer à fournir des services nutritionnels essentiels pendant la pandémie. Par exemple, plus de 70 pays ont mis en œuvre des mesures, notamment la distanciation physique dans les centres de soin, pour continuer d’assurer la supplémentation en vitamine A à forte dose pour les enfants. Une petite proportion de pays (11 pour cent) a même signalé une augmentation de la couverture des services nutritionnels pendant cette période.

La pandémie de covid-19 n’a pas seulement perturbé les systèmes de santé, elle a également eu des répercussions sur la capacité de la communauté internationale à suivre les résultats nutritionnels chez les enfants et les adultes. Alors que dans 90 pour cent des pays, les systèmes d’information habituels ont continué plus ou moins à fonctionner, près de la moitié des pays ont déclaré ne pas être en mesure de réaliser des enquêtes, qui sont la principale source de données pour le suivi des cibles mondiales en matière de nutrition.

Outre l’interruption des services nutritionnels essentiels, les pays ont également signalé que d’autres services de santé avaient été perturbés, notamment les campagnes de vaccination de masse – les campagnes contre la rougeole ayant été suspendues dans 27 pays – ce qui expose les enfants dont la croissance n’est pas optimale à un risque plus élevé de décès43,44. Par ailleurs, trois quarts des pays ont signalé que les services de prévention ou de traitement des maladies non transmissibles avaient été considérablement perturbés45. Selon une étude portant sur la continuité des services de santé essentiels pendant la pandémie de covid-19, la prise en charge de la malnutrition modérée et grave était, en avril 2021, l’un des services les plus fréquemment perturbés dans le domaine de la santé reproductive, maternelle, néonatale, infantile et adolescente et dans celui de la nutrition, puisque c’était le cas dans 41 pour cent des pays ayant répondu46.

Conséquences sur la malnutrition infantile

Les travaux de recherche basés sur des scénarios modélisés peuvent apporter des informations précieuses, du moins jusqu’à ce que de nouvelles données empiriques pour 2020 et 2021 soient disponibles dans un nombre suffisant de pays pour permettre une évaluation officielle des répercussions de la pandémie de covid-19 aux niveaux mondial et régional. L’une des activités menées par les membres du Consortium Standing Together for Nutrition a consisté à estimer, à l’aide d’un ensemble d’outils de modélisation, les effets conjugués des perturbations économiques, alimentaires et sanitaires de la pandémie sur diverses formes de dénutrition maternelle et infantile, dans 118 pays à revenu faible ou intermédiaire47. On a ainsi évalué combien d’enfants supplémentaires pourraient être touchés par l’émaciation en 2020, 2021 et 2022 par suite de la pandémie. Les cas supplémentaires potentiels de retard de croissance dus à la pandémie ont été estimés uniquement pour 2022, par rapport à 2019, étant donné la nature cumulative du retard de croissance. Il est probable que l’augmentation de l’émaciation chez les jeunes enfants vivant dans des communautés durement touchées par les perturbations des services de santé, des chaînes d’approvisionnement alimentaire ou la perte d’emplois et de moyens de subsistance liée à la pandémie se manifeste en l’espace de quelques mois, et qu’elle disparaitra dès que les circonstances s’amélioreront. Le retard de croissance chez l’enfant, en revanche, est le reflet de périodes de dénutrition ou d’infections fréquentes qui s’inscrivent davantage dans la durée. Le retard de croissance entraîne des déficits de développement précoces et les tendances en la matière ne peuvent pas être aussi facilement inversées7.

Trois scénarios différents ont été modélisés sur la base de trajectoires de reprise économique et de perturbations des services dues à la pandémie de covid-19, pour 2021 et 2022: une reprise rapide en 2021 (optimiste), un scénario avec une deuxième vague d’infections en 2021 (modéré), et un scénario de perturbations persistantes avec une reprise qui se fait attendre (pessimiste). Un modèle mondial d’équilibre générals lié à des données d’enquête par pays sur les ménages a été utilisé pour prévoir les effets de la pandémie sur le revenu national brut par habitant, les revenus des ménages et les taux de pauvreté (sur la base d’un revenu de 1,90 USD/jour) sur la période 2020-2022, pour chaque scénario. Ces estimations ont ensuite été utilisées pour prévoir l’évolution de la prévalence de l’émaciation dans chaque pays, sur la base des associations observées dans le passé. Les estimations de la pauvreté et de l’émaciation, ainsi que les hypothèses sur les niveaux de perturbation des services de santé et de nutrition, ont été intégrées dans l’outil Lives Saved Tool (LiST) pour prévoir l’évolution du retard de croissance. S’agissant de l’analyse présentée ci-après, les résultats obtenus à l’aide de ce modèle pour 118 pays ont été extrapolés pour estimer les répercussions qu’il pourrait y avoir si l’ensemble des 135 pays à revenu faible ou intermédiaire connaissaient des augmentations relatives analogues en ce qui concerne la malnutrition (voir l’encadré 6 à la section suivante).

En ce qui concerne l’émaciation chez l’enfant, dans l’hypothèse du scénario modéré, 11,2 millions d’enfants de moins de 5 ans viendraient s’ajouter, de 2020 à 2022, au nombre de ceux qui souffrent d’émaciation, dans les pays à faible revenu et ceux à revenu intermédiaire, du fait de la pandémie, dont 6,9 millions pour la seule année 2020. Dans le scénario pessimiste, l’estimation des cas supplémentaires passe à 16,3 millions. En ce qui concerne le retard de croissance des enfants, dans l’hypothèse du scénario modéré, le modèle prévoit que 3,4 millions d’enfants supplémentaires souffriront d’un retard de croissance en 2022 en raison des répercussions de la pandémie de covid-19 – 4,5 millions de plus dans le scénario pessimiste.

On s’est aussi interrogé sur l’impact que la pandémie pourrait avoir sur les carences en micronutriments ainsi que sur le surpoids et l’obésité et sur le risque de maladies non transmissibles, même si le modèle ne portait pas sur ces questions. Les effets négatifs susmentionnés sur le caractère économiquement abordable d’une alimentation saine et sur la qualité du régime alimentaire augmentent la probabilité de carences en micronutriments et, avec la diminution de l’activité physique, peuvent exacerber le surpoids et l’obésité, ainsi que les maladies non transmissibles, bien au-delà de la durée de la pandémie. C’est particulièrement inquiétant car on sait, d’après les données scientifiques, que le pronostic est nettement moins bon chez les patients hospitalisés atteints de covid-19 s’ils sont obèses (y compris dans le cas des jeunes adultes)48.

2021, année de la nutrition

En résumé, la malnutrition persiste sous de multiples formes et les répercussions de la pandémie de covid-19 ne sont pas encore toutes connues. De plus en plus de régions et de pays sont confrontés simultanément à plusieurs formes de malnutrition. La coexistence de la dénutrition et du surpoids et de l’obésité, associés à des maladies non transmissibles liées à l’alimentation, chez les individus et au sein des ménages et des populations, est ce qu’on appelle le «double fardeau de la malnutrition»49. Par exemple, l’émaciation et le surpoids chez les enfants de moins de 5 ans peuvent coexister au sein d’une population à des niveaux problématiques. En Océanie (hors Australie et Nouvelle-Zélande), en 2020, la prévalence de l’émaciation était de 9,0 pour cent et celle du surpoids de 8,0 pour cent. Les différentes formes de malnutrition peuvent également interagir tout au long de la vie et d’une génération à l’autre. Afin d’atteindre les cibles mondiales, la malnutrition doit donc être traitée de manière globale dans les politiques et les programmes conçus aux niveaux régional et national50,51. Pour y parvenir, il faudra trouver des moyens de viser plusieurs types de malnutrition à la fois, en intensifiant les actions dites à double effet52,50.

Les initiatives qui ont été prises et les efforts qui ont été menés en matière de nutrition ont abouti à des progrès notables au niveau mondial en matière d’allaitement maternel exclusif et de retard de croissance. Cependant, il faut agir plus vite, non seulement pour maintenir les progrès accomplis, mais aussi pour progresser davantage vers les cibles mondiales en matière de nutrition – notamment du fait de la pandémie de covid-19. Compte tenu de l’intensification des activités réalisées en vue du Sommet des Nations Unies sur les systèmes alimentaires, qui se tiendra en septembre 2021, et du Sommet de Tokyo Nutrition pour la croissance, qui aura lieu en décembre 2021, l’occasion est donnée de prendre des engagements et d’élaborer des plans concrets afin d’éliminer toutes les formes de malnutrition d’ici à 202553,54, au cours de la seconde moitié de la Décennie d’action des Nations Unies pour la nutrition, et d’atteindre les ODD à l’horizon 2030.

2.3 Éliminer la faim et toutes les formes de malnutrition d’ici à 2030
MESSAGES CLÉS

Les nouvelles projections confirment que la faim ne sera pas éliminée d’ici à 2030 si des mesures audacieuses ne sont pas prises pour accélérer les progrès, en particulier des mesures visant à remédier aux inégalités dans l’accès à la nourriture. La pandémie de covid-19 a aggravé les tendances décourageantes qu’on constatait déjà avant la crise.

D’après les projections qui prennent en compte les effets potentiels de la pandémie de covid-19, après avoir atteint un maximum de plus de 760 millions de personnes en 2020, la faim dans le monde régresserait lentement, jusqu’à moins de 660 millions de personnes en 2030. Ce serait néanmoins 30 millions de personnes de plus que prévu pour 2030 si la pendémie n'avait pas eu lieu, ce qui indique que la pandémie aura des effets à long terme sur la sécurité alimentaire mondiale.

Alors qu’une réduction sensible de la faim est projetée pour l’Asie d’ici à 2030 (de 418 millions en 2020 à 300 millions de personnes), une augmentation notable est attendue en Afrique (de plus de 280 millions à 300 millions de personnes), ce qui mettra ce continent à égalité avec l’Asie d’ici à 2030 en tant que région comptant le plus grand nombre de personnes sous-alimentées.

À l’échelle mondiale, des progrès sont réalisés pour certaines formes de malnutrition, mais le monde n’est en voie d’atteindre les cibles fixées pour 2030 pour aucun des indicateurs de nutrition. Le rythme actuel des progrès réalisés concernant le retard de croissance des enfants, l’allaitement maternel exclusif et l’insuffisance pondérale à la naissance est insuffisant, et les résultats concernant le surpoids et l’émaciation chez les enfants, l’anémie chez les femmes en âge de procréer et l’obésité des adultes stagnent, quand on ne constate pas une régression.

Malgré de faibles progrès au niveau mondial, des améliorations notables se produisent dans certaines régions, puisqu'environ un quart des pays sont en bonne voie pour atteindre, d’ici à 2030, les cibles relatives au retard de croissance et à l’émaciation chez l’enfant, et environ un pays sur six est en bonne voie pour atteindre la cible relative au surpoids chez l’enfant.

La pandémie de covid-19 a probablement eu des répercussions sur la prévalence de multiples formes de malnutrition et pourrait avoir des effets durables au-delà de 2020, comme on le constate déjà en 2021. Ces effets seront aggravés du fait de la dimension intergénérationnelle de la malnutrition et des conséquences qui en résulteront pour la productivité. Des efforts exceptionnels sont nécessaires pour contrer et surmonter les effets de la pandémie afin d’accélérer les progrès vers la réalisation de la cible 2.2 des ODD.

À dix ans de l’horizon fixé pour la réalisation des ODD, l’édition 2020 du présent rapport contenait une première évaluation de la probabilité que les cibles 2.1 et 2.2 soient atteintes ou non7. Les prévisions décrivaient un monde qui n’était pas en voie d’atteindre la faim zéro d’ici à 2030. Elles mettaient également en évidence les énormes difficultés qu’il y aurait, malgré des progrès sur le retard de croissance des enfants et l’insuffisance pondérale à la naissance, à atteindre toutes les cibles mondiales en matière de nutrition d’ici à 2030. Cette année, alors qu’il reste neuf ans pour atteindre les cibles, de nouveaux efforts ont été déployés pour se projeter vers 2030 dans un scénario encore compliqué par la pandémie de covid-19.

Vers l’élimination de la faim: projections à l’horizon 2030

En ce qui concerne la cible 2.1 des ODD, la conclusion du rapport de l’année dernière, à savoir que la cible relative à l’élimination de la faim serait hors de portée, reposait sur une extrapolation des tendances récentes des trois variables fondamentales utilisées pour calculer la prévalence de la sous-alimentation pour chaque pays: l’offre totale de nourriture, la taille et la composition de la population (qui déterminent les besoins énergétiques alimentaires totaux) et le degré d’inégalité de l’accès à la nourriture au sein de la population. Les prévisions fondées sur de simples séries chronologiques faisaient apparaître un scénario dans lequel les approvisionnements alimentaires ne suivraient pas le rythme de la croissance démographique, réduisant ainsi les disponibilités en nourriture par habitant, tandis que les inégalités en matière d’accès à la nourriture continuaient de s’accroître.

Il est clair qu’une méthode qui projette l’avenir par extrapolation des tendances passées ne peut pas rendre compte correctement des conséquences qu’un choc sans précédent comme la pandémie de covid-19 a eues – et peut continuer d’avoir – sur les moteurs de l’insécurité alimentaire. C’est pourquoi, pour la présente édition du rapport, une approche différente a été utilisée.

Les projections de cette année concernant les éléments qui déterminent les valeurs de la prévalence de la sous-alimentation jusqu’en 2030 ont été réalisées à l’aide d’une approche structurelle basée sur MIRAGRODEP55. Il s’agit d’un modèle dynamique d’équilibre général qui reproduit le fonctionnement des marchés agricoles et non agricoles mondiaux, prend en compte les évolutions des marchés agricoles et les applique à l’économie dans son ensemble pour générer de nouvelles valeurs d’équilibre pour un ensemble de paramètres macroéconomiques. Le modèle MIRAGRODEP a été calibré sur la situation de l’économie mondiale en 2018, avant la pandémie, et a été utilisé pour générer des projections des fondamentaux macroéconomiques sur la période 2019-2030 pour deux scénarios: un scénario de référence visant à déterminer l’incidence macroéconomique de la pandémie de covid-19 d’après les données de l’édition la plus récente des Perspectives de l’économie mondiale du FMI, publiées en avril 2021 (ci-après «scénario covid-19»); et un scénario qui ne tient pas compte de la pandémie et qui est fondé sur les projections de croissance économique présentées dans l’édition d’octobre 2019 des Perspectives de l’économie mondiale (la dernière avant la pandémie).

Plus précisément, les trajectoires de l’offre alimentaire, de la croissance économique et du prix réel des aliments ont été établies à partir du scénario covid-19 pour 171 pays et celle des taux de pauvreté pour 85 pays. Ces trajectoires ont à leur tour été utilisées pour prévoir l’évolution de la consommation d’énergie alimentaire (DEC) pour tous les pays et du CV pour 85 pays. Associées aux projections de la taille et des taux de croissance de la population fournies par l'édition 2019 de la publication des Nations Unies World Population Prospects (Perspectives de la population mondiale), elles ont ensuite été utilisées pour projeter les trajectoires futures des trois variables fondamentales sur lesquelles repose la prévalence de la sous-alimentation (PoU) (voir ci-dessus). Ces trajectoires ont ensuite été reliées aux prévisions immédiates pour 2020 pour les mêmes variables afin de générer les prévisions de la PoU pour la période 2021-2030. Dans le cas du scénario non-covid-19, les trajectoires des variables fondamentales à partir de 2019 ont été reliées à la situation en 2018, pré-covid-19 (pour plus de détails, voir l’annexe 2). Les deux scénarios supposent que les trajectoires ne seront pas perturbées par de nouveaux conflits, par la variabilité du climat ou des phénomènes météorologiques extrêmes, ni par des fléchissements économiques, qui sont les principaux facteurs de l’augmentation récente de l’insécurité alimentaire (voir chapitre 3). Ils prennent aussi pour hypothèse que les mesures importantes nécessaires à la transformation des systèmes alimentaires pour assurer la sécurité alimentaire et réduire les inégalités d’accès à la nourriture (chapitre 4) ne seront pas mises en œuvre.

La figure 10 montre les deux séries de projections concernant le nombre de personnes sous-alimentées, aux niveaux mondial et régional. Dans le scénario covid-19, après avoir atteint un maximum de 768 millions de personnes environ (9,9 pour cent de la population) en 2020, la faim dans le monde diminuerait pour toucher 710 millions de personnes environ (9,0 pour cent) en 2021, puis continuerait de diminuer légèrement, pour passer en-dessous des 660 millions de personnes (7,7 pour cent) en 2030. Toutefois, l’évolution entre 2020 et 2030 est très variable selon les régions. Alors qu’une réduction sensible est projetée pour l’Asie (de 418 millions à 300 millions de personnes), une augmentation notable se produirait en Afrique (de plus de 280 millions à 300 millions de personnes), ce qui mettrait ce continent à égalité avec l’Asie d’ici à 2030 en tant que région comptant le plus grand nombre de personnes sous-alimentées. Les chiffres restent stables en Amérique latine et dans les Caraïbes, et faibles dans les autres régions.

Figure 10
LE SCÉNARIO COVID-19 PRÉVOIT UN LÉGER RECUL DE LA FAIM AU NIVEAU MONDIAL DE 2021 À 2030, AVEC DE GRANDES DIFFÉRENCES DANS L’ÉVOLUTION SELON LES RÉGIONS

Si on compare le scénario covid-19 au scénario hypothétique ne tenant pas compte de la pandémie, on constate que la faim dans le monde en 2030 devrait être supérieure au niveau qu’elle aurait atteint si la pandémie n’avait pas eu lieu. La faim pourrait toucher en 2030 quelque 30 millions de personnes de plus que si la pandémie n’avait pas eu lieu, ce qui révèle des effets persistants de la pandémie sur la sécurité alimentaire mondiale.

Un examen plus approfondi des paramètres sous-jacents sur lesquels se fondent les estimations du nombre de personnes sous-alimentées (voir l’encadré 2 et l’annexe 2) permet de mieux comprendre pour quelles raisons la pandémie aurait des répercussions jusqu’en 2030. Le scénario covid-19 prévoit que les approvisionnements alimentaires reviendront aux niveaux qui auraient prévalu en l’absence de pandémie, mais il prévoit aussi que la pandémie aura une incidence durable sur les taux de croissance du PIB, les inégalités de revenu et les taux de pauvreté, incidences qui ne seront pas entièrement absorbées d’ici à 2030 et se traduiront par des niveaux d’inégalité accrus dans l’accès à la nourriture par rapport au scénario non-covid. L’écart observé s’expliquerait donc principalement par une plus grande inégalité dans l’accès à la nourriture.

L’approche structurelle utilisée pour établir les nouvelles projections confirme le résultat fondamental annoncé l’année dernière: la faim ne sera pas éliminée d’ici à 2030 si des efforts exceptionnels ne sont pas déployés. Les perspectives étaient déjà décourageantes avant la pandémie de covid-19, laquelle a aggravé la situation. Des actions audacieuses sont nécessaires pour accélérer les progrès – en particulier des actions visant à remédier aux inégalités d’accès à la nourriture (voir chapitre 4).

Vers l’élimination de toutes les formes de malnutrition: projections à l’horizon 2030

En ce qui concerne la cible 2.2 des ODD et les cibles mondiales de l’Assemblée mondiale de la Santé en matière de nutrition, il était également indiqué dans le rapport de l’année dernière que les progrès accomplis pour mettre fin à la malnutrition sous toutes ses formes étaient insuffisants, même sans tenir compte de l’incidence de la pandémie de covid-19. À l’instar des projections relatives à la faim, les estimations concernant les niveaux de malnutrition en 2030 sont caractérisées par un degré élevé d’incertitude. Dans la plupart des cas, les enquêtes auprès des ménages sur la taille et le poids des enfants n’ont pas eu lieu en 2020 en raison des mesures de distanciation physique; de plus, on ne sait pas comment évoluera la pandémie de covid-19, ni quels seront ses incidences au cours de la prochaine décennie. Nous avons donc utilisé la même approche que celle de l’édition 2020 pour établir les projections pour les indicateurs nutritionnels, à savoir qu’on s’est basé sur les taux observés avant la pandémie. Ces taux ont ensuite été comparés aux taux de progression qui seraient nécessaires pour atteindre les cibles fixées pour 2030, afin de fournir une évaluation des progrès accomplis vers les cibles nutritionnelles mondiales (voir encadré 5 et annexe 2). Cette approche présente toutefois des limites puisqu’elle ne prend pas en compte les répercussions de la pandémie de covid-19, qu’elle n’accorde pas de poids aux tendances les plus récentes et qu’elle ne tient pas compte de l’évolution potentielle des tendances dans l’avenir.

À l’échelle mondiale, des progrès ont été réalisés pour certaines formes de malnutrition, mais le monde n’est pas en voie d’atteindre les cibles fixées pour 2030 concernant les indicateurs de nutrition. Le rythme actuel des progrès réalisés concernant le retard de croissance chez l’enfant, l’allaitement maternel exclusif et l’insuffisance pondérale à la naissance est insuffisant, et les progrès concernant le surpoids et l’émaciation chez les enfants, l’anémie chez les femmes en âge de procréer et l’obésité des adultes stagnent (pas de progression), quand on ne constate pas une régression (tableau 7).

TABLEAU 7
LA PLUPART DES RÉGIONS ONT ENREGISTRÉ DES PROGRÈS, MAIS PAS ASSEZ POUR ATTEINDRE LES CIBLES MONDIALES SI LES TENDANCES (AVANT COVID-19) SE POURSUIVENT; AUCUNE SOUS-RÉGION N’EST EN VOIE D’ATTEINDRE LA CIBLE RELATIVE À L’INSUFFISANCE PONDÉRALE À LA NAISSANCE, ET L’OBÉSITÉ DES ADULTES S’EST AGGRAVÉE DANS TOUTES LES SOUS-RÉGIONS

Les progrès ont été inégaux selon les régions (tableau 7 et figure 11). Si presque toutes les sous-régions sont sur la bonne voie en ce qui concerne le retard de croissance, ou progressent en ce sens, elles sont trop nombreuses à ne pas être en voie d’atteindre les autres cibles mondiales en matière de nutrition, d’où la nécessité d’accélérer les actions pour changer de cap d’ici à 2030. Les niveaux actuels en ce qui concerne l’émaciation restent bien supérieurs à la cible mondiale de 5 pour cent en 2025 et à la cible mondiale de 3 pour cent en 2030. Si l’Amérique latine et les Caraïbes sont sur la bonne voie en ce qui concerne l’émaciation, ce n’est pas le cas d’autres régions, où de nombreux enfants souffrent de cette pathologie potentiellement mortelle. La plupart des régions n’enregistrent aucun progrès ou voient leur situation s’aggraver en ce qui concerne la prévalence du surpoids chez les enfants de moins de 5 ans. La détérioration de la situation en Asie de l’Est et en Asie du Sud-Est, ainsi qu’en Australie et en Nouvelle-Zélande, est particulièrement préoccupante. La prévalence du surpoids est plus importante dans les groupes d’âge plus élevés, et les efforts de prévention dans la petite enfance sont essentiels pour réduire le risque de surpoids et d’obésité tout au long de la vie5. Des progrès considérables doivent être faits dans ce domaine pour ramener le surpoids chez les enfants à moins de 3 pour cent; de tels efforts contribueraient également à endiguer l’augmentation alarmante de l’obésité chez l’adulte, qui s’aggrave dans toutes les sous-régions. Aucune sous-région n’est en passe d’atteindre les cibles de réduction fixées pour 2025 ni celles fixées pour 2030 concernant l’anémie chez les femmes en âge de procréer, les tendances stagnant ou s’aggravant dans toutes les régions, à l’exception de l’Amérique latine et des Caraïbes. De même, d’après les dernières estimations, aucune sous-région n’est en passe d’atteindre les cibles mondiales établies pour 2025 ou 2030 en matière d’insuffisance pondérale à la naissance.

Figure 11
DES PROGRÈS ONT ÉTÉ RÉALISÉS EN MATIÈRE DE MALNUTRITION MAIS IL FAUT ACCÉLÉRER LE RYTHME, ET INVERSER LES TENDANCES POUR CERTAINES FORMES DE MALNUTRITION, SI L’ON VEUT ATTEINDRE LES CIBLES MONDIALES DE NUTRITION FIXÉES POUR 2025 ET 2030

Si les tendances actuelles se poursuivent, la cible fixée pour 2025 concernant l’allaitement maternel exclusif devrait être atteinte au niveau mondial, mais pas celle de 2030. La plupart des sous-régions font au moins quelques progrès dans la réalisation de la cible établie pour 2030, à l’exception de l’Asie de l’Est et des Caraïbes, qui sont les seules sous-régions à connaître une baisse de la prévalence. L’Amérique centrale est presque sur la bonne voie pour atteindre la cible fixée pour 2030 en matière d’allaitement maternel exclusif; elle ne manquera la cible que d’un an si les tendances actuelles se poursuivent. Si les taux actuels de progression de l’allaitement maternel exclusif se maintiennent en Asie centrale et en Asie du Sud, ces sous-régions atteindront la cible établie pour 2030.

La plupart des régions enregistrent des progrès, mais ceux-ci ne sont pas suffisants pour atteindre les cibles mondiales en matière de nutrition. Les progrès réalisés au niveau régional peuvent souvent masquer une absence de progrès au niveau des pays. La figure 12 montre le pourcentage de pays dans chaque région qui sont sur la bonne voie ou qui sont en retard, ces derniers étant ventilés selon les trois catégories «quelques progrès», «aucun progrès» et «aggravation». Pour la cible relative au retard de croissance (réduction de 50 pour cent du nombre d’enfants souffrant d’un retard de croissance), il est confirmé que seuls 25 pour cent des pays sont sur la bonne voie, et que dans la région Afrique, seuls 9 pour cent des pays sont sur la bonne voie (cinq pays). En ce qui concerne la cible relative à l’émaciation (réduction du taux d’émaciation à moins de 3 pour cent), seuls 28 pour cent des pays semblent être sur la bonne voie d’après les données disponibles (57 pays). Les tendances en Afrique et en Asie sont particulièrement préoccupantes, puisque plus de la moitié des pays pour lesquels on dispose de données sont en retard ou voient leur situation s’aggraver. À l’échelle mondiale, il est confirmé que 17 pour cent seulement des pays sont sur la bonne voie pour atteindre la cible de réduction à moins de 3 pour cent de la prévalence de la surcharge pondérale chez l’enfant; aucun pays n’est sur la bonne voie en Amérique latine et dans les Caraïbes et seulement 2 pour cent des pays sont sur la bonne voie en Amérique du Nord, Europe, Australie et Nouvelle-Zélande. En 2020, la moitié environ des enfants de moins de 5 ans dans le monde vivaient dans des pays qui n’étaient en voie d’atteindre les cibles des ODD à l’horizon 2030 sur aucun des trois points suivants: retard de croissance, émaciation et surcharge pondérale. Cette analyse démontre clairement la nécessité d’intensifier les efforts en vue d’éliminer la malnutrition des enfants si l’on veut atteindre les cibles d’ici à 2030.

Figure 12
LA MOITIÉ ENVIRON DES ENFANTS VIVENT DANS DES PAYS QUI NE SONT PAS EN VOIE D’ATTEINDRE, D’ICI À 2030, LES CIBLES RELATIVES AU RETARD DE CROISSANCE, À L’ÉMACIATION ET AU SURPOIDS CHEZ L’ENFANT
Cas supplémentaires potentiels de retard de croissance et d’émaciation dus à la pandémie de covid-19

Les projections présentées ci-dessus ne rendent pas compte des effets de la pandémie de covid-19 sur la malnutrition. Elles décrivent l’évolution qu’on peut attendre dans la réalisation des cibles mondiales en matière de nutrition si les tendances antérieures à la pandémie devaient se poursuivre jusqu’en 2030. La présente section décrit un scénario (voir l’encadré 6) qui prend en compte les effets potentiels de la pandémie de covid-19 sur la prévalence du retard de croissance et de l’émaciation chez l’enfant jusqu’en 2030. Ces projections sont purement hypothétiques, mais elles illustrent néanmoins un point important: alors qu’il fallait déjà, avant la pandémie, redoubler d’efforts, faire davantage attention et intensifier l’action, la situation actuelle, aggravée par la covid-19, nécessite de faire encore plus pour atteindre les cibles fixées pour 2030.

Dans un scénario non-covid, le TRAM du retard de croissance qui prévalait avant la pandémie resterait le même, à savoir que 23,2 pour cent des enfants de moins de 5 ans souffriraient d’un retard de croissance en 2022. Dans notre scénario avec covid, 23,9 pour cent des enfants de moins de 5 ans souffriraient d’un retard de croissance en 2022 dans l’hypothèse pessimiste, et 23,7 pour cent dans l’hypothèse modérée (figure 13A). Cette augmentation de la prévalence, bien que faible, se traduirait par 4,5 et 3,4 millions, respectivement, d’enfants supplémentaires souffrant d’un retard de croissance en 2022.

Figure 13
SELON DES ESTIMATIONS PRUDENTES DE L’INCIDENCE POTENTIELLE DE LA PANDÉMIE DE COVID-19,5 À 7 MILLIONS D’ENFANTS DE PLUS POURRAIENT SOUFFRIR D’UN RETARD DE CROISSANCE ET 570 000 À 2,8 MILLIONS DE PLUS POURRAIENT SOUFFRIR D’ÉMACIATION, DANS LES PAYS À REVENU FAIBLE OU INTERMÉDIAIRE, EN 2030. ON ESTIME CEPENDANT QUE LE NOMBRE CUMULATIF DE CAS SUPPLÉMENTAIRES D’ÉMACIATION SERA DE 16 À 40 MILLIONS SUR LA PÉRIODE 2020-2030

Lorsqu’on établit des projections pour 2030, il est important de tenir compte de la nature cumulative et chronique du retard de croissance chez l’enfant, car un enfant qui souffre d’un retard de croissance conservera très probablement ce retard les années suivantes. Si on cumule chaque année le nombre d’enfants supplémentaires souffrant d’un retard de croissance, certains enfants seront comptés deux fois. Pour éviter ce biais, on part de l’hypothèse que 35 pour cent du nombre annuel total d’enfants souffrant d’un retard de croissance contribue à la population supplémentaire en retard de croissance les années suivantes. En outre, si on suppose que, de 2022 à 2030, le retard de croissance suit la trajectoire antérieure à la covid-19, 16 à 22 millions d’enfants supplémentaires dans les pays à revenu faible ou intermédiaire souffriront d’un retard de croissance entre 2020 et 2030 dans les scénarios modéré et pessimiste, respectivement, par rapport au scénario sans pandémie de covid-19.

Il est très probable que les projections du nombre supplémentaire d’enfants souffrant d’un retard de croissance sous-estiment l’incidence totale de la pandémie sur le retard de croissance, et ce pour plusieurs raisons. Les effets du retard de croissance persisteront après l’âge de 5 ans tout au long de la vie et peuvent avoir des effets intergénérationnels, car les adultes souffrant d’un retard de croissance risquent davantage de gagner moins et les mères souffrant d’un retard de croissance sont plus susceptibles de donner naissance à des enfants qui souffriront eux-mêmes d’un retard de croissance, la pauvreté et le retard de croissance se perpétuant. Par ailleurs, si les effets de la pandémie de covid-19 persistent et s’il n’y a pas d’amélioration des conditions qui contribuent à faire augmenter le retard de croissance (mauvaise nutrition et perturbations de l’accès aux services de santé et de nutrition, par exemple), il est possible que le nombre supplémentaire d’enfants souffrant de retard de croissance augmente avec le temps (scénario non montré). Il y aura également un effet intergénérationnel dû à la dégradation de la nutrition maternelle pendant la pandémie de covid-19 (non montré), qui fera qu’un plus grand nombre de mères mal nourries donneront naissance à une cohorte d’enfants plus susceptibles de souffrir d’un retard de croissance (et d’émaciation), ce qui augmenterait le nombre d’enfants souffrant d’un retard de croissance par rapport à notre scénario actuel56.

Parmi les sept cibles mondiales en matière de nutrition, les progrès les plus importants obtenus au cours des deux dernières décennies concernent le retard de croissance des enfants. Pourtant, même avant la pandémie, on prévoyait que 119 millions d’enfants de moins de 5 ans souffriraient d’un retard de croissance en 2030 dans les 135 pays à revenu faible ou intermédiaire, ce qui est bien supérieur à 85 millions, cible de l’ODD fixée pour 2030 (Réduire de 50 pour cent le nombre d’enfants de moins de 5 ans souffrant d’un retard de croissance). Selon notre scénario covid-19, 125 à 127 millions d’enfants souffriraient d’un retard de croissance en 2030 (20,4 à 20,7 pour cent), soit 5 à 7 millions d’enfants de plus que si les tendances antérieures à la pandémie se poursuivaient, et ce nombre dépasserait de 42 millions la cible des ODD (figure 13A). Il est essentiel de déployer des efforts de large portée pour remédier aux effets néfastes de la pandémie de covid-19 sur la nutrition maternelle et infantile afin de revenir au niveau de progrès antérieur à la pandémie et d’atteindre la cible mondiale de 2030 concernant le retard de croissance chez l’enfant.

En ce qui concerne l’émaciation des enfants, si la pandémie n’avait pas eu lieu, on estime que 6,8 pour cent des enfants de moins de 5 ans dans les pays à revenu faible ou intermédiaire auraient été touchés par cette forme grave de dénutrition en 202032. Si l’on tient compte des répercussions de la pandémie de covid-19, le scénario pessimiste prévoit une augmentation de la prévalence de l’émaciation dans les pays à revenu faible ou intermédiaire, où elle passerait à 8,0 pour cent en 2020, 7,8 pour cent en 2021 et 7,2 pour cent en 2022 (figure 13B), soit 16 millions d’enfants supplémentaires touchés par l’émaciation entre 2020 et 2022. Selon le scénario modéré, 11 millions d’enfants supplémentaires dans les pays à revenu faible ou intermédiaire souffriront d’émaciation au cours de cette période de trois ans. Si on suppose que, après 2022, les tendances en matière d’émaciation suivront un schéma semblable à celui d’avant la pandémie, 16 à 40 millions d’enfants supplémentaires seront touchés par l’émaciation entre 2020 et 2030, selon les scénarios modélisés modéré et pessimiste, respectivement.

Ces chiffres ne tiennent pas compte de chocs ou de situations d’urgence de grande ampleur qui pourraient dans l’avenir provoquer un pic du nombre d’enfants émaciés. L’application du TRAM pré-covid à la période 2022-2030 ne tient pas non plus forcément compte des variations saisonnières associées à l’émaciation. En effet, le TRAM utilisé représente l’évolution des points temporels de l’enquête, qui est menée auprès d’un échantillon spécifique, au sein duquel les cas d’émaciation fluctuent et qui peut ne pas être représentatif des tendances générales. Néanmoins, les effets immédiats de la pandémie de covid-19 se manifestent d’abord par la gravité de l’émaciation des enfants et, si les conditions économiques, l’accès à la nourriture et l’alimentation dans les conditions habituelles ne se rétablissent pas complètement, les niveaux d’émaciation des enfants dans le monde seront élevés. En outre, la prise en charge de la dénutrition modérée et grave a été l’un des services les plus fréquemment perturbés.

Sur la base des scénarios covid-19, on prévoit que 6,1 à 6,5 pour cent des enfants de moins de 5 ans (37,3 à 39,6 millions d’enfants) seront atteints d’émaciation en 2030 dans les pays à revenu faible ou intermédiaire, selon les scénarios modéré et pessimiste respectivement (figure 13B). Cela représente 570 000 à 2,8 millions d’enfants de plus que si la pandémie n’avait pas eu lieu, et correspond à un niveau d’émaciation deux fois plus élevé que la cible mondiale de 3 pour cent pour 2030. Si l’on ne parvient pas à enrayer l’augmentation de l’émaciation chez les enfants et si ces enfants ne peuvent être pris en charge comme il se doit, la mortalité infantile augmentera elle aussi. Il est clair que la prévention, la prise en charge, le traitement et la gestion de l’émaciation infantile nécessitent une attention urgente.

Alors que la pandémie se poursuit sans que l’on puisse en voir la fin avec certitude et que ses répercussions, notamment économiques, continuent de se faire sentir, il est difficile de prévoir la trajectoire des prochaines années. On dispose encore de peu de données sur les conséquences effectives de la pandémie sur les diverses formes de malnutrition, notamment sur la prévalence du retard de croissance, de l’émaciation et du surpoids chez l’enfant, ainsi que sur l’obésité chez l’adulte, l’anémie chez les femmes en âge de procréer, l’insuffisance pondérale à la naissance et l’allaitement maternel exclusif. Ces effets seront aggravés du fait de la dimension intergénérationnelle de la malnutrition et des conséquences qui en résulteront pour la productivité, et donc pour la reprise économique. Quoiqu’il en soit, il est clair que la pandémie de covid-19 a probablement eu des répercussions sur la prévalence de multiples formes de malnutrition et qu’elle pourrait avoir des effets durables au-delà de 2020, comme on le constate déjà en 2021. Par conséquent, des efforts exceptionnels sont nécessaires pour contrer et surmonter les effets de la pandémie afin d’accélérer les progrès vers la réalisation de la cible 2.2 des ODD.

Les scénarios qui montrent simplement des projections et font apparaître une inversion des progrès sont certes décourageants, mais si dès maintenant on prend les mesures qui s’imposent et on suit de bonnes politiques, il sera possible de mettre le monde sur la voie de l’élimination de la faim et de la malnutrition. Dans un contexte de baisse des projections concernant l’aide publique au développement, il faudrait un financement suffisant et novateur, un engagement fort et une mise en œuvre efficace pour garantir la fourniture de services nutritionnels essentiels à ceux qui en ont besoin. La pandémie a mis clairement en évidence les vulnérabilités des systèmes alimentaires, et il en va de même des mesures à prendre pour renforcer la résilience face aux divers facteurs qui ont entravé les progrès. Le chapitre 3 fournit une analyse intégrée de ces facteurs et le chapitre 4 présente des voies de transformation des systèmes alimentaires qui peuvent aider à faire en sorte que le monde progresse de nouveau vers l’objectif de la faim et de la malnutrition zéro.

MESSAGES CLÉS

Ces dix dernières années, les conflits, la variabilité du climat et les extrêmes climatiques ainsi que les ralentissements et les fléchissements économiques ont considérablement gagné en fréquence et en intensité. La fréquence accrue de ces principaux facteurs, aggravés par la pandémie de covid-19, s’est traduite par une augmentation de la faim et a compromis les progrès vers la réduction de toutes les formes de malnutrition, en particulier dans les pays à revenu faible ou intermédiaire.

Les fléchissements économiques de 2020, y compris ceux résultant des mesures prises pour endiguer la pandémie de covid-19, ont contribué à l’une des plus fortes poussées de la faim que le monde ait connues depuis des décennies, touchant presque tous les pays à revenu faible ou intermédiaire. Lorsque les fléchissements économiques se sont trouvés associés à d’autres facteurs, en particulier des catastrophes liées au climat ou des conflits, voire les deux, on a observé les plus fortes augmentations de la prévalence de la sous-alimentation en Afrique, suivie de l’Asie.

Chacun de ces grands facteurs est exceptionnel et tous sont extérieurs aux systèmes alimentaires, mais ils jouent l’un sur l’autre et génèrent des effets multiples et cumulatifs, en différents points de ces systèmes, non sans conséquences sur la sécurité alimentaire et la nutrition.

Soixante-dix pour cent des pays à revenu faible ou intermédiaire sont touchés par au moins un des facteurs et dans 41 pour cent d’entre eux (38 pays sur 93) les inégalités de revenu sont élevées, ce qui aggrave les effets des facteurs.

La majorité des personnes sous-alimentées et des enfants qui souffrent d’un retard de croissance vivent dans des pays touchés par des facteurs multiples. De 2017 à 2019, dans toutes les régions, les pays touchés par des facteurs multiples ont connu l'augmentation la plus marquée de la prévalence de la sous-alimentation, avec une augmentation 12 fois supérieure à celle constatée dans les pays touchés par un seul facteur.

Dans les pays à revenu intermédiaire, les fortes inégalités de revenu amplifient l'incidence négative de ces facteurs sur l’insécurité alimentaire. C’est ainsi que, entre 2017 et 2019, l’augmentation de la prévalence de la sous-alimentation, qui était de 2 pour cent dans les pays à revenu intermédiaire touchés par ces facteurs, a atteint le double – 4 pour cent – dans ceux où l’inégalité des revenus était forte.

La hausse de la prévalence de la sous-alimentation a été encore plus forte dans les pays à faible revenu touchés par ces mêmes facteurs entre 2017 et 2019, puisque ces pays ont subi des augmentations 2,5 fois plus élevées que celles que connaissaient les pays à revenu intermédiaire subissant ces facteurs durant la même période.

Les pays qui connaissent des fléchissements économiques, en Afrique, en Amérique latine et dans les Caraïbes et en Asie, enregistrent un accroissement de la prévalence de la sous-alimentation plus élevé que ceux qui sont frappés par des phénomènes climatiques extrêmes ou des conflits, toujours entre 2017 et 2019. L’Afrique est la seule région où la montée de la prévalence de la sous-alimentation est associée aux trois facteurs principaux.

Des données nouvelles tendent à prouver que les aggravations récentes de l’inaccessibilité économique d’une alimentation saine sont associées à des augmentations des formes graves et modérées d’insécurité alimentaire, en particulier dans les pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure.

Des facteurs externes (conflits et chocs climatiques, par exemple) et internes (faible productivité et chaînes d’approvisionnement alimentaire inefficientes, par exemple) qui agissent sur les systèmes alimentaires poussent à la hausse le coût des aliments nutritifs, ce qui, associé à de faibles revenus, rend l’alimentation saine plus inaccessible financièrement.

Les pays touchés par plusieurs facteurs comptaient en 2019 la plus forte proportion de personnes ne pouvant pas se permettre une alimentation saine (68 pour cent), proportion qui, en moyenne, est supérieure de 39 pour cent et de 66 pour cent respectivement à celle constatée dans les pays touchés par un seul facteur ou dans les pays qui ne sont touchés par aucun facteur. L’inaccessibilité économique d’une alimentation saine tend à être plus marquée dans les zones de conflit.

3.1 Il est essentiel d’aborder sous l’angle des systèmes alimentaires les principaux facteurs à l’origine des évolutions récentes en matière de sécurité alimentaire et de nutrition

Comme le soulignaient les quatre dernières éditions de la présente publication et comme on le rappelle au chapitre 1 (voir l’encadré 1), les conflits, la variabilité du climat et les extrêmes climatiques ainsi que les ralentissements et fléchissements économiques battent en brèche les efforts déployés pour éliminer la faim et toutes les formes de malnutrition. Les effets de ces facteurs sont encore aggravés par l’ampleur et la persistance des inégalités. Des millions de personnes dans le monde connaissent l’insécurité alimentaire et diverses formes de malnutrition parce qu’elles n’ont pas les moyens financiers de se procurer une alimentation saine7. La raison en est que d’autres facteurs poussent à la hausse le coût des aliments nutritifs dans l’ensemble du système alimentaire – faible productivité, chaînes d’approvisionnement alimentaire inefficientes, politiques commerciales, entre autrest –, alors que le revenu de millions de personnes ne leur permet pas de suivre. Pour dire les choses simplement, une alimentation saine inabordable peut être considérée comme un facteur résultant d’autres facteurs et de la faiblesse des revenus. Elle est associée à une augmentation de l’insécurité alimentaire et de toutes les formes de malnutrition, y compris le retard de croissance, l’émaciation, les carences en micronutriments, l’excès pondéral et l’obésité, et les maladies non transmissibles.

Les systèmes alimentaires sont des réseaux étendus composés de toutes les activités – et de toutes les personnes – intervenant dans la production, le stockage, l’emballage, la transformation, la distribution, la commercialisation, la consommation et l’élimination des aliments, ce qui comprend les systèmes sociaux, politiques, économiques, juridiques et environnementaux57,58,59,60,61,62,63,23,64,65. Le terme «systèmes agroalimentaires» est de plus en plus employé dans le contexte du mouvement de transformation qui doit rendre les systèmes alimentaires durables et inclusifs; il couvre un champ plus large car il englobe les systèmes agricoles et alimentaires et comprend à la fois les produits agricoles alimentaires et non alimentaires, avec des chevauchements évidents (voir au chapitre 4, la figure 29). La transformation des systèmes agroalimentaires, plus largement, est primordiale, mais sort du cadre du présent rapport.

Il est important de comprendre que les systèmes alimentaires jouent un rôle central lorsqu’il s’agit non seulement de déterminer la quantité, la qualité, la diversité et la teneur en nutriments des aliments proposés à la consommation, mais aussi de soutenir les moyens d’existence de millions de personnes dans le monde. Ils exercent en outre, par différentes voies66, des effets considérables (aussi bien positifs que négatifs) sur la santé humaine, ainsi que sur la santé de l’environnement et des écosystèmes de notre planète. De ce fait, la façon dont ils fonctionnent, le coût et la qualité des aliments qu’ils fournissent et les effets qu’ils produisent sur la santé des gens et de notre planète retentissent directement et indirectement sur les résultats obtenus en matière de sécurité alimentaire et de nutrition. Il est donc essentiel d’aborder toute analyse des facteurs traités ci-après et de leurs effets sous l’angle des systèmes alimentaires, ce qui implique d’examiner les compromis et les effets de synergie entre ces différents résultats.

Les précédentes éditions de la présente publication, qui analysaient chaque facteur séparément et en détail, nous ont enseigné que ces facteurs ne sont pas mutuellement exclusifs, mais qu’ils interagissent, générant des effets multiples, qui s’aggravent les uns les autres, en différents points de nos systèmes alimentaires, non sans conséquences sur la sécurité alimentaire et la nutrition. Nous avons également appris que les facteurs n’évoluent pas nécessairement dans le même sens et que des compromis et des effets de synergie sont associés aux mesures prises en réponse aux différents facteurs. Il devient dès lors essentiel d’aborder ces derniers sous l’angle des systèmes alimentaires afin de mieux comprendre comment les effets délétères de ces facteurs s’influencent mutuellement et de faciliter la recherche de points d’entrée ciblés pour les interventions qui visent à relever les défis de taille que ces facteurs représentent.

Ce point de vue permet également d’examiner les effets de synergie et les compromis qui existent entre les interventions publiques et de se rendre compte qu’agir sur un facteur peut avoir des effets favorables et défavorables sur différents résultats. Ainsi, une relance efficace face à un fléchissement économique peut améliorer l’accès à la nourriture et son utilisation, mais ses effets sur l’environnement peuvent aussi bien être positifs que négatifs. Une approche au coup par coup ne permet pas de réfléchir à l’imbrication des problèmes, que ce soit au sein des systèmes alimentaires ou à l’interface entre ceux-ci et d’autres systèmes, notamment les systèmes environnementaux, les systèmes de santé et les systèmes de protection sociale.

La figure 14 illustre les répercussions multiples, dans tout le système (systèmes alimentaires et environnements alimentaires compris), des facteurs à l’origine des tendances récentes en matière de sécurité alimentaire et de nutrition, avec les conséquences qui s’ensuivent pour les quatre dimensions de la sécurité alimentaire (disponibilité, accessibilité, utilisation et stabilité) ainsi que pour les deux autres dimensions que sont l’agencéité et la durabilitéu. Ces facteurs agissent sur les caractéristiques des régimes alimentaires (quantité, qualité, diversité, sécurité sanitaire et adéquation) et sur les résultats en matière de nutrition et de santé (nutrition et santé). La figure 14 comprend d’autres facteurs en plus de ceux sélectionnés dans le présent rapport, notamment des facteurs démographiquesv et des facteurs liés à la technologie et à l’innovationw, mais ceux-là ne sont pas analysés plus avant car leurs effets sur la sécurité alimentaire et la nutrition se font généralement sentir sur le long terme, or le présent rapport s’intéresse en priorité aux conséquences à court terme. Il traite spécifiquement des grands facteurs (cases bleu foncé de la figure 14) qui ont causé la récente hausse de la faim et le ralentissement de la progression vers une réduction de la malnutrition sous toutes ses formes. Dans cette section, le texte en orange entre parenthèses fait directement référence aux éléments cités dans la figure 14 afin de mettre ceux-ci en évidence et de faciliter les renvois à la figure.

Figure 14
LES DIVERS FACTEURS ONT DES INCIDENCES QUI SE PROPAGENT DANS L’ENSEMBLE DU SYSTÈME ALIMENTAIRE, COMPROMETTANT LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE ET LA NUTRITION

Le diagramme rend compte également des boucles de rétroaction susceptibles de créer des effets mutuellement aggravants, qui apparaissent au fil du temps. Ainsi, les fléchissements économiques qui réduisent l’accessibilité économique des aliments nutritifs et accroissent la consommation d’aliments mauvais pour la santé ne sont pas seulement nuisibles pour la nutrition et la santé des populations, ils peuvent aussi (comme on l’a vu dans l’édition 2020 de la présente publication) contribuer à des effets plus larges sur l’environnement et le changement climatique, en augmentant les émissions de gaz à effet de serre (GES).

À la figure 14, les conflits (facteurs politiques et institutionnels), la variabilité et les extrêmes climatiques (facteurs biophysiques et environnementaux), les ralentissements et fléchissements économiques (facteurs économiques et commerciaux) ainsi que la pauvreté et les inégalités (facteurs économiques et socioculturels) sont des facteurs externes qui agissent sur les systèmes alimentaires (zone jaune). Ces différents facteurs n’ont pas une incidence unique, mais produisent généralement, sur les systèmes alimentaires, des effets multiples, qui s’aggravent mutuellement et qui nuisent à la sécurité alimentaire et à la nutrition. Le fait que les facteurs coexistent et interagissent crée une complexité qu’il importe de comprendre pleinement et de prendre en compte lors de la conception des programmes et des interventions publiques.

Les différents facteurs n’ont pas une incidence unique, mais produisent généralement, sur les systèmes alimentaires, des effets multiples, qui s’aggravent mutuellement.

Par exemple, comme on l’a vu dans l’édition 2017 de la présente publication, les conflits ont des répercussions sur presque tous les aspects des systèmes alimentaires1 (production, récolte, transformation, transport, approvisionnement en intrants, financement, commercialisation et consommation). Les effets directs peuvent être importants, en particulier en ce qui concerne la destruction des actifs agricoles et des moyens d’existence (tels que les terres, les animaux d’élevage, les cultures, les stocks de semences ou les infrastructures d’irrigation), la confiscation ou la saisie abusive de ressources naturelles et l’éviction hors des terres, des aires de pâturage et des fonds de pêches. Lorsqu’un conflit ou une période d’insécurité civile perturbent gravement et restreignent le commerce et les mouvements de biens et de services, cela peut aussi nuire à la disponibilité des aliments, y compris des aliments nutritifs indispensables à une alimentation saine, et pousser les prix des produits échangés à la hausse, non sans conséquences défavorables sur l’accès à la nourriture et l’utilisation de celle-ci au niveau des ménages. Un conflit désorganise les flux de produits alimentaires, de fonds, de main-d’œuvre et d’autres éléments essentiels passant par les marchés; crée des pénuries; et contribue à faire monter les prix, portant atteinte au fonctionnement des marchés. Les conflits peuvent aussi éroder les crédits destinés à la protection sociale et aux soins de santé, compromettant ainsi la santé et la nutrition1.

De même, l’édition 2018 de cette même publication analysait comment la variabilité et les extrêmes climatiquesx sont à l’origine d’effets multiples, et qui s’aggravent mutuellement, sur les systèmes alimentaires3. Ils nuisent à la productivité agricole (rendements des cultures et nombre de récoltes par an) et ont aussi des incidences sur les importations de denrées alimentaires, les pays essayant de compenser les pertes de production intérieure. Les catastrophes liées au climat de moyenne et grande ampleur peuvent avoir des répercussions importantes sur toute la chaîne de valeur alimentaire, notamment sur la croissance du secteur, et sur les agro-industries alimentaires et non alimentaires. Les flambées des prix des produits alimentaires et l’instabilité de ces prix tendent à suivre les extrêmes climatiques (souvent en association avec des pertes de revenu agricole), réduisant l’accès à la nourriture et exerçant une influence préjudiciable sur la quantité, la qualité et la diversité des aliments consommés. À cela s’ajoutent des précipitations plus irrégulières et des températures plus élevées, qui mettent en péril la qualité et la sécurité sanitaire des aliments et multiplient les cas de contamination des cultures et d’apparition de foyers d’organismes nuisibles et de maladiesy. La nutrition est extrêmement sensible aux changements climatiques et paie un lourd tribut: diminution de la qualité des nutriments et de la diversité des aliments produits et consommés; effets sur l’eau et l’assainissement; effets sur les profils de risque sanitaire et de maladies; répercussions sur les soins aux mères et aux enfants et sur l’allaitement3.

Les ralentissements et fléchissements économiques, à leur tour, ont avant tout des répercussions sur les systèmes alimentaires en ce qu’ils compromettent l’accès des personnes aux aliments, y compris en rendant l’alimentation saine inaccessible économiquement, du fait de la hausse du chômage et de la baisse des salaires et des revenus5. Il en est ainsi, que ces ralentissements et fléchissements soient causés par des fluctuations brutales du marché, des guerres commerciales, des troubles politiques ou une pandémie mondiale comme la covid-19 (encadré 7). Comme on l’a vu dans l’édition 2019 de la présente publication, lorsque les pays dépendent du commerce des produits de base, la sécurité alimentaire et la nutrition y sont particulièrement vulnérables quand les ralentissements et fléchissements économiques sont liés à des chocs touchant les échanges internationaux5. Dans tous les pays, les pauvres, qui dépensent une grande partie de leur revenu en nourriture et dépendent des marchés pour une part importante de leur alimentation, sont particulièrement vulnérables aux ralentissements et fléchissements économiquesz. Lorsque les revenus baissent, il devient encore plus inabordable d’adopter une alimentation saine, car celle-ci coûte plus cher qu’une alimentation de base.

Les effets des ralentissements et fléchissements économiques peuvent aussi se faire particulièrement sentir dans les secteurs de l’alimentation et de l’agriculture, à la fois en raison des conséquences internes à ces secteurs (une réduction de la capacité d’investir dans le cycle de planification suivant, par exemple) et du fait des liens entre zones urbaines et rurales. Ces effets peuvent être singulièrement dommageables pour les pays qui accusent un retard de développement économique, car les secteurs de l’alimentation et de l’agriculture y représentent une part importante de l’emploi et de la production. Contraints de modifier leurs modes de consommation, les ménages vulnérables peuvent en arriver à abandonner les aliments riches en nutriments au profit d’aliments ayant une intensité énergétique élevée mais une valeur nutritionnelle minimale, ou à réduire les dépenses qu’ils consacraient à une série de services de base dans le but d’améliorer leur santé ou de prévenir les maladies. Les ralentissements et fléchissements économiques réduisent également le volant budgétaire dont les pouvoirs publics disposent pour venir en aide aux populations pauvres.

L’inaccessibilité économique d’une alimentation saineaa est considérée ici comme un facteur interne résultant de l’incidence d’autres facteurs qui agissent directement sur le coût des aliments nutritifs tout au long du système alimentaire. L’accessibilité économique d’un mode d’alimentation est déterminée par le coût des aliments rapporté au revenu des personnes. Ce facteur agit donc à l’intérieur des systèmes alimentaires, et plus spécifiquement à l’intérieur des environnements alimentaires (environnement alimentaire, accessibilité économique d’une alimentation saine), nuisant à la sécurité alimentaire et à la nutrition (figure 14). La notion d’environnement alimentaire renvoie aux conditions physiques, économiques, socioculturelles et réglementaires qui déterminent l’accès à la nourriture, l’accessibilité économique et la sécurité sanitaire des aliments ainsi que les préférences alimentaires58,67,68,69. Il est clair que l’inaccessibilité économique d’une alimentation saine peut être déterminée par l’évolution des revenus (laquelle peut elle-même être due, entre autres, à un conflit, à la variabilité et aux extrêmes climatiques ou à des ralentissements et fléchissements économiques); elle peut aussi l’être par des facteurs de l’offre et de la demande, internes au système alimentaire, qui influent sur les prix des aliments7.

Comme on l’a vu dans l’édition 2020 de la publication, les facteurs qui déterminent le coût des aliments nutritifs sont présents tout au long du système alimentaire. Du côté de la production ou de l’offre, les facteurs clés du coût d’une alimentation saine, surtout dans les pays à faible revenu, sont les faibles niveaux de productivité70,71, les risques élevés au stade de la production et une diversification insuffisante dans la production d’aliments plus nutritifs. Dans les chaînes d’approvisionnement alimentaire, ce sont les conditions inadéquates de manipulation et de stockage des aliments72, l’insuffisance des infrastructures routières7 et le manque de capacités de conservation des aliments (en particulier des denrées hautement périssables)73 ainsi que les défauts d’efficience le long de la chaîne d’approvisionnement alimentaire qui font monter le coût des aliments nutritifs7. Du côté de la demande, les environnements alimentaires influencent le comportement des consommateurs; par ailleurs, les préférences de ces derniers représentent aussi un facteur important déterminant le coût et l’accessibilité économique – ainsi que la disponibilité – d’une alimentation saine7. Le rythme rapide de l’urbanisation a entraîné une augmentation du travail et de la consommation alimentaire hors du domicile, ce qui a eu un impact direct sur la demande d’aliments faciles à préparer, hautement transformés ou prêts à consommer, lesquels sont souvent très caloriques et riches en graisses, en sucre et en sel. Ces catégories d’aliments sont aussi devenues plus largement disponibles et abordables, mais ne contribuent pas nécessairement à une alimentation saine. Cela étant, la demande des consommateurs peut aussi constituer une force positive: une demande accrue d’aliments nutritifs, par exemple, peut en encourager la production et faire ainsi baisser le prix.

La pauvreté et les inégalités (facteurs économiques et commerciaux) ainsi que la stratification socioculturelle et l’accès aux moyens d’action, y compris la dynamique des rapports hommes-femmes et la dynamique de pouvoir (facteurs socioculturels), sont des facteurs externes critiques (figure 14), qui tendent à amplifier les effets préjudiciables des autres facteurs. Point important, les inégalités sont liées aux facteurs économiques et commerciaux de façon plus large (multidimensionnelle), notamment l’inégalité d’accès aux ressources (terre, eau) et aux services de base (santé, éducation, etc.). Leurs effets se font sentir dans l’ensemble des systèmes et des environnements alimentaires, pour finir par peser sur l’accessibilité économique d’une alimentation saine et sur les résultats en matière de sécurité alimentaire et de nutrition. Dans l’édition 2019 de la présente publication, on analysait le point d’intersection entre la croissance économique, la pauvreté et la sécurité alimentaire et la nutrition, en tenant compte des inégalités. L’analyse a une nouvelle fois confirmé que les ralentissements et fléchissements économiques étaient associés à des montées de l’insécurité alimentaire, mais elle a également montré non seulement que l’inégalité de revenu accroissait la probabilité d’une insécurité alimentaire, mais aussi qu’une forte inégalité de revenu amplifiait les effets néfastes des ralentissements ou des fléchissements économiques sur la sécurité alimentaire des individus5,6.

Les inégalités et la stratification socioculturelle amplifient les effets préjudiciables des autres facteurs.

Au-delà de leurs conséquences directes sur les systèmes alimentaires, ces grands facteurs mondiaux compromettent la sécurité alimentaire et la nutrition en raison des effets interdépendants et circulaires qu’ils exercent sur d’autres systèmes, notamment sur les systèmes environnementaux et les systèmes de santé. Ainsi, comme le montre l’étude approfondie figurant dans l’édition 2020 de la présente publication, une alimentation de mauvaise qualité et insuffisante en quantité a des impacts plus larges sur la santé humaine et sur l’environnement, comme une augmentation de la morbidité, de la mortalité et des coûts sociaux associés aux multiples formes de malnutrition (retard de croissance, émaciation, carences en micronutriments, excès pondéral et obésité notamment) et des coûts associés à la dégradation de l’environnement et aux émissions de gaz à effet de serre (impacts plus larges: économiques, socioéconomiques, environnementaux) (figure 14).

Certains facteurs exercent des effets circulaires et interdépendants sur d’autres systèmes, notamment les systèmes environnementaux et les systèmes de santé.

Les modes de consommation alimentaire actuels font partie des principales causes de morbidité et d’incapacité – les régimes alimentaires inadéquats étant à l’origine de 8 millions de décès prématurés dans le monde chaque année83 –, lesquelles nécessitent d’augmenter les dépenses consacrées aux soins de santé, ce qui pèse considérablement sur les systèmes nationaux de soins médicaux et sur les économies59. D’après les projections présentées dans l’édition 2020 de la publication, si les modes de consommation alimentaire actuels se maintiennent, les coûts sanitaires liés à l’alimentation, en termes de maladies non transmissibles et de mortalité, devraient dépasser les 1 300 milliards d’USD par an d’ici à 20307. Parallèlement, les modes de consommation alimentaire actuels sont lourds de conséquences pour l’environnement et génèrent des coûts importants dans ce domaine. Les coûts sociaux (c’est-à-dire les coûts économiques) des émissions de GES associées aux habitudes alimentaires actuelles devraient, quant à eux, dépasser les 1 700 milliards d’USD par an d’ici à 20307.

Ces impacts plus larges, ainsi que leurs répercussions sur d’autres systèmes, sont importants, car ils alimentent une boucle de rétroaction sur des facteurs qui influencent le système alimentaire; c’est le cas par exemple de la façon dont l’alimentation influe sur les émissions de GES, qui sont un facteur de changement climatique, lequel, en retour, agit sur les systèmes alimentaires (facteurs biophysiques et environnementaux) (figure 14).

Les autres facteurs qu’il faut prendre en considération sont les politiques et la gouvernance – y compris la législation et la finance –, qui déterminent les systèmes alimentaires, et donc les résultats en matière de sécurité alimentaire et de nutrition (politiques et gouvernance) (figure 14). Celles-ci peuvent constituer une force positive mais aussi négative.

La gouvernance et les politiques déterminent la façon dont les systèmes alimentaires fonctionnent et les résultats qu’ils produisent, y compris les résultats, positifs ou négatifs, en matière de sécurité alimentaire et de nutrition.

Ainsi, les politiques alimentaires et agricoles peuvent avoir, directement ou indirectement, des effets favorables sur les disponibilités, l’accès à la nourriture et le coût des aliments nutritifs. L’action publique dans des domaines tels que les normes alimentaires, la fiscalité, l’étiquetage, la reformulation, les achats publics et la commercialisation peut aussi créer des environnements alimentaires plus sains.

À l’inverse, il peut arriver que certaines mesures de politique économique entraînent un ralentissement de la croissance ou que la gouvernance déclenche un conflit. Les mesures protectionnistes et les programmes de subvention aux intrants, par exemple, tendent à protéger et encourager la production nationale d’aliments de base, comme le riz et le maïs, souvent au détriment d’aliments plus nutritifs, comme les fruits et les légumes7,84,85. Ces initiatives peuvent aussi maintenir le coût des fruits et des légumes au-dessus du niveau du marché mondial ou enfermer les agriculteurs dans la production exclusive d’aliments de base – dans les deux cas, cela réduit également l’accès des consommateurs à une alimentation diversifiée. De la même manière, la libéralisation des règles applicables au commerce et à l’investissement peut aussi transformer les systèmes alimentaires, et donc exercer sur la sécurité alimentaire et la nutrition une influence à la fois favorable et défavorable – en améliorant l’accès à des aliments diversifiés et nutritifs ou en augmentant les disponibilités en aliments riches en graisses, en sucre ou en sel et en rendant ces derniers plus abordables. Enfin, les mesures commerciales non tarifaires sont susceptibles d’améliorer la sécurité sanitaire, les normes de qualité et la valeur nutritionnelle des aliments et peuvent aider à réduire autant que possible les conséquences imprévues, mais elles peuvent aussi accroître le coût des échanges et donc le prix des aliments, ce qui nuit à l’accessibilité économique d’une alimentation saine7.

Élaborer les bonnes politiques ne suffit pas toutefois; la gouvernance, la législation et les institutions jouent un rôle clé lorsqu’il s’agit de mettre en œuvre ces politiques et de s’assurer qu’elles tiennent compte des effets sur toutes les dimensions de la sécurité alimentaire et de la nutrition (cohérence des politiques) et sur toutes les parties prenantes, surtout les plus vulnérables. Pour pouvoir être effectivement appliquées, les politiques doivent être ancrées dans la législation, ce qui souligne l’importance d’un environnement législatif propice à la sécurité alimentaire et à la nutrition. Un cadre juridique de ce type comprend des réseaux complexes de domaines juridiques interdépendants, aussi est-il préférable de l’interpréter sous l’angle des systèmes alimentaires pour s’assurer de son uniformité et de sa cohérence.

En particulier, il est aussi très important de prendre en considération les déficits institutionnels et les déséquilibres de pouvoir. Ainsi, les ménages les plus pauvres sont exposés à l’instabilité des prix des produits alimentaires, et ce même quand ils sont vendeurs nets de denrées alimentaires, car leur faible pouvoir de négociation au sein des filières ne leur permet pas de profiter de prix plus élevés86. La dimension d’agencéité dans l’analyse de la sécurité alimentaire est également un élément clé pour remédier aux déséquilibres de pouvoir et réduire les inégalités, en améliorant la participation des populations rurales pauvres à la transformation des systèmes alimentaires et à leurs avantages, par exemple. L’agencéité ne se résume pas à l’accès aux ressources matérielles car elle comprend l’autonomisation – la capacité des personnes à agir pour améliorer leur propre bien-être, y compris leur sécurité alimentaire et leur nutrition, et à jouer un rôle dans la société de façon à y exercer une influence58.

Ces facteurs diffèrent d’un pays à l’autre, voire au sein d’un même pays, ainsi que dans la façon dont ils agissent les uns sur les autres. Ils peuvent gagner ou perdre en intensité, et peuvent même disparaître complètement pour un moment. En revanche, le point commun à tous les pays est l’absence de résilience des systèmes alimentaires face aux effets préjudiciables de ces facteurs, et leur incapacité à assurer la sécurité alimentaire et une bonne nutrition dans ces circonstances.

L’analyse montre que cette vulnérabilité des systèmes alimentaires est encore accentuée en présence d’inégalités profondes et persistantes – inégalité de revenu et inégalité au regard des actifs productifs et des services de base (santé, éducation, etc.). Les inégalités de revenu et de richesse sont étroitement corrélées avec l’accès à la nourriture et, par conséquent, la faim. Si nous voulons vraiment éliminer la faim, l’insécurité alimentaire et la malnutrition sous toutes ses formes, il nous faut transformer les systèmes alimentaires et réduire les inégalités, de façon à renforcer la résilience face aux effets préjudiciables de ces facteurs. La complexité du défi impose de l’aborder sous l’angle des systèmes alimentaires, en approfondissant notre compréhension des relations réciproques entre les principaux facteurs et leurs effets défavorables, afin qu’elle nous aide à formuler les solutions appropriées. Ce n’est qu’à cette condition qu’une transformation mondiale sera possible et que nous obtiendrons des systèmes alimentaires efficaces et résilients, offrant une alimentation saine et abordable.

3.2 Effets des principaux facteurs sur la sécurité alimentaire et la nutrition

Comme cela a été souligné plus haut, les conflits, la variabilité du climat et les extrêmes climatiques, ainsi que les ralentissements et fléchissements économiques peuvent porter atteinte à la sécurité alimentaire et à la nutrition du fait de leurs répercussions sur nos systèmes alimentaires. Toutes les dimensions de la sécurité alimentaire et de la nutrition sont ainsi susceptibles d’être concernées – la disponibilité, l’accès, l’utilisation et la stabilité. Ce constat est corroboré par le lien qui a été mis en évidence entre la présence de ces facteurs et les indicateurs de la sécurité alimentaire et de la nutrition, comme nous allons le voir en détail dans cette section.

La fréquence et l’intensité de ces facteurs vont croissant, et compromettent la sécurité alimentaire et la nutrition

Ces dix dernières années, les conflits, la variabilité du climat et les extrêmes climatiques, ainsi que les ralentissements et fléchissements économiques ont gagné en fréquence et en intensité, menaçant la sécurité alimentaire et la nutrition partout dans le monde. La situation des pays à revenu faible ou intermédiaire est particulièrement préoccupante, car ce sont ces pays qui subissent le plus durement les effets sur la sécurité alimentaire et la nutrition et qui comptent le plus grand nombre de personnes sous-alimentées (13 pour cent) et d’enfants souffrant d’un retard de croissance (24 pour cent). En outre, ces pays sont confrontés à plusieurs formes de malnutrition, y compris l’excès pondéral chez les enfants (6 pour cent) et l’obésité chez les adultes (18 pour cent).

Certains de ces grands facteurs se font également de plus en plus sentir dans les pays à revenu élevé, notamment la variabilité du climat et les extrêmes climatiques ainsi que les ralentissements et fléchissements économiques. Dans ces pays, ils font basculer certaines personnes dans l’insécurité alimentaire et la malnutrition, en particulier dans le contexte de la pandémie de covid-19. Notre analyse est cependant axée sur les pays à revenu faible ou intermédiaire, où ces grands facteurs ont les incidences les plus marquées sur la faim et la malnutrition.

On a constaté une augmentation notable de la fréquence et de l’intensité des conflits, de la variabilité du climat et des extrêmes climatiques, et des ralentissements et fléchissements économiques dans les pays à revenu faible ou intermédiaire ces dix dernières années (figure 15). S’agissant des deux derniers facteurs, nous avons ciblé notre analyse sur les extrêmes climatiques et les fléchissements économiques.

Figure 15
LA FRÉQUENCE ET L’INTENSITÉ DES FACTEURS DANS LES PAYS À REVENU FAIBLE OU INTERMÉDIAIRE VONT CROISSANT

Conflits

Depuis dix ans, ce sont peu ou prou les mêmes pays qui connaissent de violents conflits, et leur nombre n’a pas beaucoup varié non plus. On observe cependant une augmentation marquée du nombre de conflits par an et de la durée en pourcentage pendant laquelle les pays y ont été exposés (figure 15A). Une recrudescence des conflits violents a également été constatée, et le nombre de décès liés à ces derniers a augmenté, alors qu’il était à un plus bas historique en 2005. Le nombre de conflits donnant lieu à une violence unilatérale, étatique ou non étatique, a fortement progressé (de 86 pour cent depuis 2010, avec au total 145 conflits en 2019)ab et se situe désormais à un plus haut historique1. Ces augmentations se sont accompagnées d’un accroissement du nombre de personnes déplacées. Le nombre de réfugiés et de personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays est en hausse notable du fait de la multiplication des conflits: il a presque doublé, de 40 millions en 2010 à plus de 70 millions en 2019, et il a dépassé la barre des 80 millions en 202087,88.

La nature des conflits évolue également: ils sont de plus en plus complexes, enlisés et insolubles. Les conflits internes sont devenus plus nombreux que les conflits entre États, et on constate une augmentation importante des conflits internes internationalisés (conflits internes qui se sont propagés à d’autres nations)87,88. Les grands déplacements de personnes vers d’autres pays et l’implication d’acteurs internationaux externes en font également des problèmes de plus en plus régionaux, et les réseaux armés transnationaux ne sont que trop disposés à partager leurs ressources pour poursuivre leurs objectifs communsac. Les conflits se jouent souvent à plusieurs niveaux dans de nombreux pays, et on peine en pratique à démêler certaines notions (leur commencement et leur achèvement, par exemple) lorsqu’on les analyse. Même dans les contextes sortis d’un conflit, la violence peut tout simplement changer de forme à mesure qu’évoluent les circonstances qui l’entourent, les acteurs qui l’animent et les forces qui la déterminent89. Parfois, les causes d’un conflit ne disparaissent pas une fois celui-ci en apparence terminé; de surcroît, les conflits peuvent devenir cycliques si leurs causes profondes ne sont pas traitéesad.

Extrêmes climatiques

Les pays sont confrontés à une variabilité croissante du climat et à des extrêmes climatiques de plus en plus fréquents, liés en partie au changement climatique4. Le nombre de pays à revenu faible ou intermédiaire exposés à des extrêmes climatiques n’a pas cessé d’augmenter au cours des 20 dernières années: ils représentaient 76 pour cent des pays en 2000-2004, et 98 pour cent en 2015-2020. Il est encore plus frappant de constater que cette exposition des pays aux extrêmes climatiques s’est considérablement intensifiée (trois ou quatre types de phénomènes sur une période de cinq ans) (figure 15B). La fréquence – ou nombre d’années pendant lesquelles un pays est exposé à des extrêmes climatiques au cours de chaque sous-période – a augmenté de 42 points de pourcentage, passant de 30 pour cent en 2000-2004 à 72 pour cent en 2015-2019 (chiffres non illustrés sur la figure). S’agissant de l’intensification, on constate que, sur la période 2015-2020, 52 pour cent des pays ont été exposés à trois ou quatre types d’extrêmes climatiques (vagues de chaleur, sécheresses, inondations ou tempêtes), contre 11 pour cent sur la période 2000-2004. En d’autres termes, leur nombre a presque quintuplé sur les 20 dernières années (voir à l’annexe 3 les définitions, la méthodologie et les sources de données).

L’analyse au niveau régional confirme l’intensité des extrêmes climatiques constatée au niveau mondial. La manifestation de trois types ou plus d’extrêmes climatiques, par exemple, a augmenté de 39 points de pourcentage dans les pays d’Afrique, de 10 pour cent en 2000-2004 à 49 pour cent en 2015-2020. De manière similaire, le pourcentage de pays asiatiques qui sont confrontés à plusieurs types d’extrêmes climatiques est passé à 57 pour cent en 2015-2020, contre 11 pour cent en 2000-2004. L’intensité de ces phénomènes en Amérique latine et dans les Caraïbes a également bondi de 9 pour cent en 2000-2004 à 57 pour cent en 2015-2020.

Fléchissements économiques

Avant même la pandémie de covid-19, des rapports sur la situation économique mondiale avaient mis en évidence dans plusieurs économies des ralentissements, des stagnations et de franches récessions, qui avaient déjà commencé à faire monter le chômage et entraîné une baisse des revenus5,90,91. Le taux de croissance économique, mesuré par la variation en pourcentage de la croissance du PIB réel par habitant entre deux périodes, est généralement utilisé pour déterminer si une économie ralentit ou se contracte. Dans la plupart des régions, ce taux est reparti à la hausse après le brutal fléchissement de l’économie mondiale en 2008-2009. Mais la reprise a été inégale et de courte durée, et un grand nombre de pays ont enregistré des tendances générales à la baisse depuis 2011. Depuis 2014, cette croissance insuffisante et inégale a été particulièrement prégnante en Afrique subsaharienne, en Amérique latine et en Asie de l’Ouest. Le pourcentage de pays qui ont connu des fléchissements économiques dans ces régions est passé de 25 pour cent en 2014 à 38 pour cent en 2019. Ces régions ont ainsi enregistré une réduction marquée de la croissance de leur PIB par habitant comparativement aux autres entre 2014 et 2019 (figure 15C).

Les mesures mises en place pour endiguer la pandémie de covid-19 ont porté un coup sévère à l’économie, plongeant la plupart des pays dans la récession au cours de l’année 2020. En ce qui concerne les pays à revenu faible ou intermédiaire, on a constaté une diminution du revenu par habitant dans 117 des 129 pays pour lesquels des informations sur le PIB par habitant sont disponibles. Plus précisément, 94 pour cent des pays d’Afrique subsaharienne, d’Amérique latine et d’Asie de l’Ouest ont connu un fléchissement économique en 2020, contre 86 pour cent dans les autres régions (figure 15C). La récession mondiale de 2020 est la plus profonde depuis des décennies, malgré les efforts extraordinaires déployés par les États pour contrer le fléchissement de l’activité par un soutien budgétaire et monétaire. Certains pays ont vu leur économie commencer à se relever en 2021, mais les prévisions indiquent qu’il n’en sera pas de même pour beaucoup d’autres. L’un des éléments qui vont compromettre la reprise dans certains pays en 2021 est le poids croissant de la dette extérieure, qui pourrait faire obstacle aux investissements dans la reprise économique et la protection sociale, et donc aggraver la situation de la sécurité alimentaire et de la nutrition. La récession économique mondiale qui a débuté en 2020 s’est prolongée sur 2021, et a engendré des niveaux records de chômage, de perte de moyens d’existence et d’augmentation des niveaux de pauvreté dans de nombreux pays du monde.

Pauvreté et inégalités

La pauvreté et les inégalités sont des causes profondes fondamentales, d’ordre structurel, qui amplifient les effets négatifs des conflits, de la variabilité du climat et des extrêmes climatiques, et des ralentissements et fléchissements économiques. Tandis que la pauvreté reculait, les inégalités de revenu – mesurées par l’indice de Gini – ont persisté et sont restées très marquées au cours des 20 dernières années au niveau mondial (figure 16). Comme l’a montré l’édition 2019 de la présente publication, une analyse en profondeur des données au niveau des pays révèle que les inégalités de revenu sont en augmentation dans près de la moitié des pays du monde, notamment dans de nombreux pays à revenu faible ou intermédiaire5. C’est la région de l’Amérique latine et des Caraïbes qui a fait le plus de progrès dans la réduction des inégalités de revenu, mais elle présente toujours les niveaux d’inégalité les plus élevés du mondeae. En 2020, pour la première fois en plus de 20 ans, la pauvreté et les inégalités de revenu ont augmenté au niveau mondial, par suite de la pandémie de covid-19 et des mesures qui ont été mises en place pour l’endiguer (figure 16). Les estimations indiquent que la pandémie a engendré entre 119 et 124 millions de «nouveaux pauvres» (personnes qui sont venues s’ajouter à celles qui étaient déjà pauvres) en 2020. En 2021, ce nombre devrait se situer dans une fourchette comprise entre 143 et 163 millions10. Les inégalités de revenu sont quant à elles passées de 38 pour cent à 41 pour cent en 2020.

Figure 16
TANDIS QUE LA PAUVRETÉ RECULE DANS LE MONDE, LES INÉGALITÉS DE REVENU DEMEURENT IMPORTANTES, ET ONT AUGMENTÉ EN 2020 DANS LES PAYS À REVENU FAIBLE OU INTERMÉDIAIRE

Lien entre les facteurs et les causes profondes, et relations circulaires interdépendantes

Bien que les tendances relatives aux conflits, à la variabilité du climat et aux extrêmes climatiques, ainsi qu’aux ralentissements et fléchissements économiques, d’une part, et les causes profondes de la pauvreté et des inégalités, d’autre part, soient présentées séparément, elles interagissent dans de nombreux cas, et produisent souvent des relations circulaires interdépendantes. Par exemple, comme cela a été mis en évidence dans l’édition 2017 de la présente publication, les conflits peuvent gravement perturber la production et la croissance économiques, et entraîner de profondes récessions. Les récessions économiques qui engendrent une hausse de l’inflation et des augmentations brutales des prix des produits alimentaires ont ensuite tendance à aggraver le risque de troubles politiques, comme cela s’est produit en 2007-2008 lorsque des émeutes de la faim ont éclaté dans plus de 50 pays1. De la même façon, l’augmentation de la variabilité du climat et des extrêmes climatiques (les graves sécheresses, en particulier) met souvent en péril la sécurité alimentaire en réduisant les disponibilités en aliments et l’accès à la nourriture, situation qui, on l’a constaté, accroît le risque de conflits1.

On observe également des relations circulaires interdépendantes entre les conflits, la variabilité du climat et les extrêmes climatiques, les ralentissements et fléchissements économiques – notamment lorsqu’ils sont graves, prolongés ou récurrents – et la pauvreté et les inégalités. Par exemple, l’édition 2018 de la présente publication a montré que la variabilité du climat et les extrêmes climatiques aggravaient le risque d’insécurité alimentaire et de malnutrition, mais que s’ils étaient prolongés ou récurrents, ils réduisaient la capacité à faire face et entraînaient la perte de moyens d’existence, des migrations de détresse et la misère. En d’autres termes, ils ne font pas que contribuer à accroître l’insécurité alimentaire et la malnutrition, ils peuvent aussi entraîner de la pauvreté et la perpétuer, et renforcer les inégalités3af. Cela engendre d’autres relations circulaires qui contribuent à accroître l’insécurité alimentaire et la malnutrition, ainsi que la vulnérabilité actuelle et future face aux extrêmes climatiques.

Le couloir de la sécheresse en Amérique centrale – El Salvador, Guatemala et Honduras, principalement – est fortement exposé aux risques de catastrophes liées au climat du fait de sa position géographique, de la fréquence des extrêmes climatiques (sécheresses récurrentes, précipitations excessives et graves inondations, notamment), et des faiblesses institutionnelles et socioéconomiques3,4. Les moyens d’existence des populations sont très tributaires du climat, sachant que plus d’un million de familles dépendent de l’agriculture de subsistance. De surcroît, les niveaux de pauvreté, d’inégalités, d’insécurité alimentaire et de malnutrition sont alarmants, en particulier chez les populations rurales et les peuples autochtones. Les cycles récurrents et de plus en plus fréquents liés à la variabilité du climat et aux extrêmes climatiques ne sont pas seulement une menace pour la sécurité alimentaire et la nutrition, ils entraînent souvent des déplacements et des migrations de population de grande ampleur – et ceux qui restent sont souvent les personnes âgées, les femmes et les enfants. Cet exode crée un terreau favorable aux conflits, et alimente une relation circulaire entre l’augmentation de la pauvreté, l’aggravation des inégalités et l’accroissement de la vulnérabilité face aux extrêmes climatiques.

Démêler les liens et les relations de causalité entre les facteurs et les causes profondes de la pauvreté et des inégalités est souvent si complexe et ardu qu’on ne parvient pas clairement à déterminer dans quel ordre les éléments se sont enchaînés. Cependant, il reste possible d’observer la présence simultanée, ou dans le temps, des différents facteurs, et leurs liens avec l’évolution de la sécurité alimentaire et de la nutrition.

Augmentation de la sous-alimentation coïncidant avec des conflits, des extrêmes climatiques et des fléchissements économiques

Les conflits, les extrêmes climatiques et les fléchissements économiques mettent les systèmes alimentaires à rude épreuve – par leurs effets sur les systèmes appuyant la production alimentaire, sur l’approvisionnement alimentaire, sur les environnements alimentaires ou sur les comportements des consommateurs, ou sur plusieurs de ces éléments – et ont des répercussions sur la sécurité alimentaire et la nutrition. C’est notamment le cas lorsque le système alimentaire d’un pays est très vulnérable face aux répercussions de ces facteurs et lorsque le pays présente des niveaux élevés de pauvreté et d’inégalités, mais qu’il n’a pas mis en place de moyens suffisants pour faire front.

Il est difficile d’établir une relation causale directe, sachant que les estimations de la prévalence de la sous-alimentation varient peu d’une année sur l’autreag, mais on peut déterminer si des points de réorientation à la hausse dans une série chronologique correspondent à la présence de ces facteurs. Un point de réorientation à la hausse est une augmentation statistiquement significative de la prévalence de la sous-alimentation pendant deux années consécutives avant ou après l’année du point de retournement (voir la présentation de la méthodologie à l’annexe 3). Une analyse des points de retournement a été proposée pour les sécheresses graves dans l’édition de 2018 de la publication et pour les ralentissements et fléchissements économiques dans l’édition de 2019. Dans la présente édition, nous analysons pour la première fois les conflits, les extrêmes climatiques et les ralentissements et fléchissements économiques ensemble, ce qui donne un autre éclairage sur les incidences possibles de facteurs multiples dans les pays qui enregistrent en parallèle des augmentations de la prévalence de la sous-alimentation. Étant donné que la méthode demande d’observer une augmentation pendant deux années avant et après le point de retournement, on ne peut pas établir d’estimation des points de retournement après 2018.

L’analyse des points de retournement dans la série chronologique de la prévalence de la sous-alimentation présentée ici couvre les changements intervenus entre 2010 et 2018 et détermine, pour 109 pays à revenu faible ou intermédiaire pour lesquels on dispose d’informations, les années de cette période où la sous-alimentation a augmenté après des années de réduction ou de stabilisationah. Elle fait apparaître 87 points de retournement de la prévalence de la sous-alimentation sur cette période dans 65 de ces 109 pays. Sur ce total, 79 points de réorientation à la hausse de la prévalence de la sous-alimentation dans 60 pays coïncident avec un ou plusieurs facteurs (conflits, extrêmes climatiques ou ralentissements et fléchissements économiques) (figure 17). Cela signifie que plus de la moitié des pays (55 pour cent) ont connu une augmentation de la prévalence de la sous-alimentation coïncidant avec au moins un de ces facteurs sur la période 2010-2018.

Figure 17
PLUS DE LA MOITIÉ DES PAYS À REVENU FAIBLE OU INTERMÉDIAIRE PRÉSENTENT UN POINT DE RÉORIENTATION À LA HAUSSE DE LA PRÉVALENCE DE LA SOUS-ALIMENTATION COÏNCIDANT AVEC UN OU PLUSIEURS FACTEURS (CONFLITS, EXTRÊMES CLIMATIQUES, RALENTISSEMENTS ET FLÉCHISSEMENTS ÉCONOMIQUES) ENTRE 2010 ET 2018

Quelque 45 pour cent des pays (soit 27 sur 60) ont affiché une augmentation de la prévalence de la malnutrition coïncidant avec la présence d’un des facteurs. Il s’agissait la plupart du temps de ralentissements ou fléchissements économiques (18 pays), suivis d’extrêmes climatiques (9 pays), tandis que les conflits, fait intéressant, étaient toujours associés à d’autres facteurs. Cependant, sept de ces pays ont enregistré non seulement un accroissement de la prévalence de la sous-alimentation coïncidant avec un autre facteur pendant une année donnée, mais aussi des augmentations supplémentaires, parallèlement à une association de facteurs, pendant d’autres années. Ainsi, 52 des 79 augmentations de la prévalence de la sous-alimentation coïncident avec une association de facteurs (dans 40 des 60 pays): 32 points de retournement dans 26 pays avec des extrêmes climatiques et des ralentissements et fléchissements économiques, 10 points de retournement dans 9 pays avec les trois facteurs associés, 5 points de retournement dans 5 pays avec des conflits et des extrêmes climatiques, et enfin 5 points de retournement dans 5 pays avec des conflits et des ralentissements et fléchissements économiques.

Comme le montre cette analyse, le nombre d’augmentations de la prévalence de la sous-alimentation (79) est supérieur à celui des pays (60), ce qui implique que plusieurs pays ont subi plus d’une hausse de la prévalence de la sous-alimentation sur la période 2010-2018. En d’autres termes, plusieurs pays ont fait face à des augmentations récurrentes de la prévalence de la sous-alimentation au cours de cette période. Bien que la plupart des pays (44 sur 60) aient enregistré des hausses de la prévalence de la sous-alimentation tout en étant touchés par un facteur ou une association de facteurs pendant une seule année, plusieurs (16) ont subi une augmentation de la prévalence de la sous-alimentation qui a coïncidé avec l’un des facteurs pendant deux ou trois ans. Pour 13 des pays, en particulier, cette présence simultanée est constatée pendant deux ans, et pendant trois ans pour trois pays (la Gambie, le Liban et la République démocratique du Congo).

Il est important de noter que les points de retournement récurrents de la prévalence de la sous-alimentation ne sont pas toujours accompagnés du même facteur. Seuls 4 des 16 pays sont dans ce cas, tandis que les 12 restants ont été touchés par différents facteurs ou différentes associations de facteurs. Pour la Côte d’Ivoire, le Liban et le Lesotho, par exemple, le premier point de retournement de la prévalence de la sous-alimentation a coïncidé avec des ralentissements et fléchissements économiques (en 2010, 2014 et 2013, respectivement), et le suivant avec des extrêmes climatiques (en 2018 pour le Liban et en 2017 pour les deux autres pays). De manière analogue, la République démocratique du Congo a enregistré des points de réorientation à la hausse qui ont coïncidé avec les trois facteurs pendant deux années (2011 et 2017) et avec des conflits et des extrêmes climatiques en 2014. L’Afghanistan présente également des points de retournement de la prévalence de la sous-alimentation avec les trois facteurs en 2011, et avec des conflits et des ralentissements et fléchissements économiques en 2014.

Alors qu’une analyse des points de retournement de la prévalence de la sous-alimentation est généralement nécessaire pour détecter des points d’inflexion statistiquement significatifs et les augmentations de la prévalence d'une année sur l'autre, la hausse brutale et sans précédent de la prévalence entre 2019 et 2020 permet d’adopter une approche plus directe. Dans ce cas, il est possible de détecter une augmentation en 2020 en comparant la hausse de la prévalence entre 2019 et 2020 avec celle observée entre 2017 et 2019 (voir à l’annexe 5 la présentation de la méthode). Cette approche est utilisée pour examiner l’accroissement de la prévalence de la sous-alimentation en 2020 et déterminer si un ou plusieurs des facteurs ont exercé des effets au même moment.

Le nombre de personnes sous-alimentées vivant dans des pays à revenu faible ou intermédiaire a augmenté de 110 millions entre 2019 et 2020, un chiffre bien supérieur à tous les chiffres annuels enregistrés depuis des décennies (figure 18). Cette hausse sans précédent de la sous-alimentation est due en grande partie aux fléchissements économiques tout aussi exceptionnels qui ont frappé la plupart des pays du monde du fait des mesures prises pour endiguer la pandémie de covid-19 (voir l’encadré 7). Dans les pays à revenu faible ou intermédiaire, la croissance du PIB par habitant a diminué, en moyenne, de 6,7 points de pourcentage en 2020, soit le double de la chute constatée lors de la crise financière mondiale et du fléchissement économique en 2009 (figure 18)ai. En outre, les fléchissements économiques de 2020 ont touché presque deux fois plus de pays que ceux de 2009 (99 pays en 2020, contre 57 en 2009).

Figure 18
L’AUGMENTATION DU NOMBRE DE PERSONNES SOUS-ALIMENTÉES EN 2020 A ÉTÉ PLUS DE CINQ FOIS SUPÉRIEURE À LA HAUSSE LA PLUS IMPORTANTE ENREGISTRÉE AU COURS DES DEUX DERNIÈRES DÉCENNIES, ET LES FLÉCHISSEMENTS ÉCONOMIQUES ONT ÉTÉ DEUX FOIS PLUS GRAVES QUE CEUX CONNUS PRÉCÉDEMMENT DANS LES PAYS À REVENU FAIBLE OU INTERMÉDIAIRE

La plupart des pays à revenu faible ou intermédiaire pour lesquels on dispose de données sur la prévalence de la sous-alimentation et sur le PIB par habitant pour 2020 (81 pays sur 107) ont enregistré une hausse de la prévalence de la sous-alimentation entre 2019 et 2020. L’ampleur de cette hausse annuelle est supérieure à l’augmentation sur les deux années précédentes dans la plupart des pays (66 sur 81) (figure 19). L’accroissement n’a pas dépassé celui enregistré de 2017 à 2020 dans seulement 15 des pays qui ont connu une hausse de la prévalence de la sous-alimentation entre 2019 et 2020.

Figure 19
EN 2020, LA PLUPART DES PAYS À REVENU FAIBLE OU INTERMÉDIAIRE TOUCHÉS PAR DES FLÉCHISSEMENTS ÉCONOMIQUES PRÉSENTENT UNE AUGMENTATION DE LA PRÉVALENCE DE LA SOUS-ALIMENTATION, MAIS LES FLÉCHISSEMENTS ÉCONOMIQUES S’ACCOMPAGNENT SOUVENT DE CATASTROPHES LIÉES AU CLIMAT ET D’EXTRÊMES CLIMATIQUES

Presque tous les pays à revenu faible ou intermédiaire qui ont enregistré en 2020 une hausse de la prévalence de la sous-alimentation supérieure à celle des deux années précédentes (60 pays sur 66) ont également été touchés par un fléchissement économique (figure 19). Sur ces pays, 11 présentent une augmentation de la prévalence de la sous-alimentation qui coïncide uniquement avec un fléchissement économique, tandis que dans les autres, cet accroissement s’est produit dans le cadre d’un fléchissement économique et d’un ensemble d’autres facteurs.

La combinaison de facteurs la plus fréquente en 2020 est constituée par des fléchissements économiques associés à des extrêmes climatiques ou des catastrophes liées au climat (34 pays sur 60) (figure 19). L’aspect le plus frappant est que dans la plupart de ces pays (19 sur 34), les répercussions des aléas climatiques sont très prononcées (catastrophes liées au climat de moyenne ou de grande ampleur)aj. Les catastrophes liées au climat dominent l’environnement des risques, au point qu’elles représentent désormais plus de 80 pour cent de l’ensemble des grandes catastrophes recensées à l’échelle internationale92,93. Deux pays (l’Iraq et le Mali) ont connu une hausse de la prévalence de la sous-alimentation et ont été touchés en parallèle à la fois par des fléchissements économiques et des conflits; ces deux pays, frappés par une crise alimentaire associée à des niveaux élevés d’insécurité alimentaire aiguë, nécessitent une assistance humanitaire d’urgence. Treize des 60 pays ont connu des fléchissements économiques associés à des conflits et des extrêmes climatiques ou des catastrophes liées au climat; sept d’entre eux sont des pays traversant une crise alimentaire et présentant des niveaux élevés d’insécurité alimentaire aiguë qui ont également été frappés par des catastrophes liées au climat (Burkina Faso, Jordanie, Liban, Nigéria, Pakistan, Ukraine et Yémen). Comme nous le verrons dans la suite de cette analyse, certaines des plus fortes hausses de la prévalence de la sous-alimentation entre 2019 et 2020 ont été recensées dans des pays où des fléchissements économiques se sont accompagnés de catastrophes liées au climat, ou dans des pays qui traversent une crise alimentaire principalement causée par un conflit.

Les niveaux d’insécurité alimentaire et de malnutrition les plus élevés dans les pays touchés par des facteurs multiples

L’ampleur des effets négatifs d’un facteur sur la sécurité alimentaire et la nutrition des populations dépend du degré d’exposition et de la vulnérabilité face à ses répercussions. Dans l’analyse qui suit, les pays sont classés selon le facteur auquel ils sont exposés: conflits, extrêmes climatiques, fléchissements économiques ou fortes inégalités. Les variables définissant les différentes catégories sont exposées à l’encadré 8.

Pour résumer, deux critères sont utilisés pour définir qu’un pays est touché par un facteur: i) preuve de la présence d’un événement lié au facteur dans un pays (conflit, extrême climatique ou fléchissement économique, par exemple); et ii) preuve d’une vulnérabilité face aux répercussions d’un tel événement, à savoir des conditions qui augmentent la probabilité que l’événement en question ait des effets préjudiciables sur la situation du pays en matière de sécurité alimentaire et de nutrition.

Par exemple, un pays touché par des extrêmes climatiques est un pays dans lequel on observe ce type de phénomènes dans les zones agricoles (exposition) et dans lequel on constate une probabilité accrue que ces phénomènes aient des effets qui aggravent l’insécurité alimentaire et la malnutrition (vulnérabilité). Si les deux conditions sont réunies, le pays est classé dans la catégorie des «pays touchés par des extrêmes climatiques». Un pays peut être soumis à plusieurs types de facteurs s’il répond aux critères correspondants, par exemple à la fois à des extrêmes climatiques et à un conflit.

Bien que plusieurs causes de vulnérabilité soient associées à chaque facteur, un grand nombre d’entre elles sont difficiles à définir de manière cohérente pour tous les pays aux fins d’une analyse au niveau mondial du fait du manque de données et de possibilités de comparaison. Dans la présente analyse, un petit sous-ensemble d’indicateurs sert d’indicateur de substitution de la meilleure mesure de la vulnérabilité liée aux facteurs et de leur importance relative pour la sécurité alimentaire et la nutrition, afin d’assurer la mesurabilité pour 133 pays à revenu faible ou intermédiaire.

Comme nous l’avons vu plus haut, 2020 est une année à part en ce que la plupart des pays à revenu faible ou intermédiaire ont connu des fléchissements économiques marqués. On constate donc pour cette année un nombre exceptionnellement élevé de pays touchés par des facteurs multiples (fléchissements économiques conjugués à des extrêmes climatiques et des conflits). Il convient donc d’en séparer l’analyse et de commencer par examiner la période pré-covid-19.

Si on considère la période pré-covid-19, on constate que la majeure partie (70 pour cent) des pays à revenu faible ou intermédiaire subissent au moins un des facteurs (93 sur 133). Sur les 133 pays à revenu faible ou intermédiaire, seuls 40 ne sont soumis à aucun des trois facteurs, alors que la plupart des autres pays sont touchés soit par un facteur (52 pays), soit par une association de facteurs (41 pays). La plupart des pays concernés par un seul facteur sont touchés par des extrêmes climatiques (38 pays), suivis des conflits (8 pays), puis des fléchissements économiques (6 pays). Les extrêmes climatiques constituent le facteur le plus fréquent, qu’ils se produisent seuls ou conjugués à d’autres facteurs (75 pays). Viennent ensuite les conflits, seuls ou conjugués à d’autres facteurs (40 pays), puis les fléchissements économiques (24 pays). Parmi les pays qui font face à plusieurs facteurs, 41 pour cent présentent aussi de grandes inégalités de revenu (38 pays sur 93).

La plupart des pays concernés par des facteurs multiples sont touchés par des conflits et des extrêmes climatiques (23 pays), ou des extrêmes climatiques associés à des fléchissements économiques (9 pays). Cinq pays sont touchés par les trois facteurs. On trouvera à l’annexe 4 la liste des pays concernés par ces facteurs.

La majorité des personnes souffrant de sous-alimentation chronique et des enfants qui présentent un retard de croissance vivent dans des pays touchés par des facteurs multiples (figure 20). De surcroît, les pays soumis à des facteurs multiples enregistrent également une prévalence de la sous-alimentation et du retard de croissance bien plus importante. En 2019, la moyenne non pondérée de la prévalence de la sous-alimentation dans ces pays (17 pour cent) était supérieure de 6 points de pourcentage à celle des pays qui étaient en butte à un facteur unique ou n’étaient touchés par aucun facteur (figure 20A). On peut principalement en conclure que la majeure partie des personnes souffrant de la faim vivent dans des pays touchés par des facteurs multiples: 381,4 millions sur les 650,3 millions de personnes souffrant de sous-alimentation chronique en 2019 dans le monde (figure 20A).

Figure 20
LA MAJORITÉ DES PERSONNES SOUS-ALIMENTÉES ET DES ENFANTS SOUFFRANT D’UN RETARD DE CROISSANCE VIVENT DANS DES PAYS TOUCHÉS PAR DES FACTEURS MULTIPLES (2019)

Le tableau est similaire pour le retard de croissance chez l’enfant. En 2019, s'agissant des pays pour lesquels on dispose d’informations, la moyenne non pondérée de la prévalence du retard de croissance chez l’enfant dans les pays faisant face à une association de facteurs était supérieure de 6 points de pourcentage à celle des pays en butte à un seul facteur et de 9 points de pourcentage à celle des pays qui n’étaient touchés par aucun des facteurs (28,5, 22,6 et 19,6 pour cent, respectivement) (figure 20B). Sur le nombre total d’enfants de moins de 5 ans souffrant d’un retard de croissance, 130 millions environ (soit 90 pour cent) vivaient dans des pays touchés par un ou plusieurs facteurs (figure 20B). Cependant, les facteurs ne sont pas les seuls éléments qui déterminent les résultats en matière de sécurité alimentaire et de nutrition dans ces pays, et il convient par conséquent de procéder à une analyse plus approfondie.

Si l’on intègre l’année 2020 dans l’analyse visant à déterminer les pays touchés par les différents facteurs, on constate que, sur les 133 pays à faible revenu et à revenu intermédiaire pour lesquels on dispose d’informations, le nombre de pays qui ne sont concernés par aucun des facteurs passe de 40 (sur la période 2010-2019) à seulement 14, et que la plupart des pays (80) font face à une association de facteurs, tandis qu’un petit nombre seulement (39) n’en subit qu’un seul. Les extrêmes climatiques restent le facteur le plus fréquent, qu’ils se produisent seuls ou conjugués à d’autres facteurs (104 pays). Les fléchissements économiques, en revanche, soit seuls, soit en association avec d’autres facteurs, arrivent en deuxième position (72 pays), suivi par les conflits (40).

Par suite, en 2020, le nombre de personnes souffrant de sous-alimentation qui vivent dans des pays à revenu faible ou intermédiaire touchés par des facteurs multiples augmente de manière significative pour s’établir à plus de 585 millions (pas de figure). Les pays en butte à des facteurs multiples présentent également une prévalence de la sous-alimentation plus élevée en 2020 (16 pour cent) que celle des pays qui ne font face qu’à un seul facteur ou qui ne sont soumis à aucun facteur (10 pour cent et 8 pour cent, respectivement).

De façon similaire, en 2020, la prévalence la plus élevée du retard de croissance a été observée dans les pays touchés par des facteurs multiples (23 pour cent), suivis par ceux soumis à un facteur et ceux où aucun facteur n’entre en jeu (18 pour cent et 14 pour cent, respectivement). Cependant, le retard de croissance chez l’enfant dans les pays à revenu faible ou intermédiaire est passé de 24 pour cent en 2019 à 21 pour cent en 2020.

C’est dans les pays touchés par des conflits, des extrêmes climatiques, des fléchissements économiques et de fortes inégalités de revenu que la faim augmente le plus

Comme nous l’avons vu dans le chapitre précédent, la tendance relative à la faim dans le monde, mesurée par la prévalence de la sous-alimentation, s’est inversée après une longue période de baisse et a commencé à augmenter lentement à partir de 2014. Compte tenu de l’inversion de la tendance et des hausses enregistrées récemment, avant même la pandémie de covid-19, il est important d’examiner plus attentivement l’évolution dans les pays à revenu faible ou intermédiaire touchés par des conflits, des extrêmes climatiques et des fléchissements économiques, ainsi que les différences présentées par les pays où règnent de fortes inégalités de revenu.

Cette analyse montre que le renversement de la tendance qui s’est produit en 2014 dans la prévalence de la sous-alimentation et l’augmentation continue de celle-ci (particulièrement prononcée à partir de 2017) sont en grande partie le fait de pays à revenu faible ou intermédiaire touchés par des conflits, des extrêmes climatiques ou des fléchissements économiques et de pays affichant de fortes inégalités de revenu (figure 21). La prévalence de la sous-alimentation est plus forte et a davantage augmenté dans les pays qui sont en butte à ces facteurs.

Figure 21
LA FAIM ATTEINT DES NIVEAUX PLUS ÉLEVÉS ET A DAVANTAGE PROGRESSÉ DANS LES PAYS TOUCHÉS PAR DES CONFLITS, DES EXTRÊMES CLIMATIQUES OU DES FLÉCHISSEMENTS ÉCONOMIQUES, ET DANS LES PAYS OÙ LES INÉGALITÉS SONT TRÈS MARQUÉES

Sur les 110 pays à revenu faible ou intermédiaire pour lesquels on dispose d’informations, c’est dans ceux qui font face à des fléchissements économiques qu’on observe la plus forte hausse de la prévalence de la sous-alimentation. Le groupe des pays touchés par des fléchissements économiques a connu des augmentations de la prévalence de la sous-alimentation dès 2010; il affiche la plus forte prévalence, dépassant les pays touchés par d’autres facteurs (figure 21).

Les pays touchés par des conflits enregistrent une augmentation faible, mais tendancielle, de la prévalence de la sous-alimentation (de 16 pour cent à 16,9 pour cent) entre 2017 et 2019. Bien que cela ne soit pas illustré à la figure 21, la prévalence de la sous-alimentation est encore plus élevée et progresse encore plus rapidement dans les pays où les conflits se doublent d’une crise prolongée. Sur la période 2010-2019, les pays qui ont connu des crises prolongées ont enregistré la plus forte prévalence de la sous-alimentation (30 pour cent en moyenne), avec une augmentation de 1,5 point de pourcentage entre 2017 et 2019 (de 28,7 pour cent à 30,2 pour cent).

La figure 21 montre que 2020 se détache très nettement des années précédentes, avec des envolées de la prévalence de la sous-alimentation dans tous les pays à revenu faible ou intermédiaire. Comme nous l’avons vu précédemment, les fléchissements économiques résultant de la pandémie de covid-19 et des mesures prises pour l’endiguer ont porté le plus sévère coup d’accélérateur à la faim dans le monde depuis des décennies, et ont contribué, en l’espace d’une seule année, à une augmentation brutale et importante de la sous-alimentation.

On observe également des différences importantes entre les tendances selon qu’un pays est touché par un ou par plusieurs facteurs (facteurs multiples) et selon le niveau de revenu du pays (figure 22). Au cours de la période de hausse la plus récente avant le déclenchement de la pandémie de covid-19, à savoir 2017-2019, les pays à revenu faible ou intermédiaire touchés par un ou plusieurs facteurs ont vu la prévalence de la sous-alimentation augmenter de 4 pour cent, tandis que ceux qui n’étaient soumis à aucun facteur l’ont vu diminuer de 3 pour cent. Globalement, de 2017 à 2019, les pays touchés par des facteurs multiples ont connu la plus forte hausse de la prévalence de la sous-alimentation (6 pour cent), soit une augmentation 12 fois supérieure à celle constatée dans les pays touchés par un seul facteur (0,5 pour cent).

Figure 22
LES PAYS À FAIBLE REVENU TOUCHÉS PAR DES CONFLITS ET DES EXTRÊMES CLIMATIQUES PRÉSENTENT LA PLUS FORTE AUGMENTATION DE LA PRÉVALENCE DE LA SOUS-ALIMENTATION, TANDIS QUE PARMI LES PAYS À REVENU INTERMÉDIAIRE, LA HAUSSE LA PLUS IMPORTANTE EST ENREGISTRÉE LORS DES FLÉCHISSEMENTS ÉCONOMIQUES

Sur l’ensemble des pays à revenu faible ou intermédiaire, 24 de ceux qui font face à des fléchissements économiques présentent l’augmentation la plus importante de la prévalence de la sous-alimentation (1,5 point de pourcentage), suivis de 36 pays en butte à des facteurs multiples (1,0 point de pourcentage) (figure 22). À titre de comparaison, l’accroissement n’est que de 0,1 point de pourcentage dans les 45 pays touchés par un seul facteur, tandis que les 29 pays qui ne sont concernés par aucun des facteurs ont enregistré une baisse de 0,3 point de pourcentage.

Une analyse plus détaillée considère toutes les combinaisons possibles de facteurs qui peuvent toucher les pays à revenu faible ou intermédiaire. Huit groupes qui s’excluent mutuellement ont été définis pour les 110 pays pour lesquels on dispose d’informations sur la sous-alimentation. La figure A4.1 illustre les pays répartis dans les huit catégories correspondant aux différentes associations de facteurs, et le tableau A4.1 donne la liste de ces pays. Les plus fortes augmentations de la prévalence de la sous-alimentation (non illustrées sur la figure) sont observées dans les neuf pays touchés à la fois par des extrêmes climatiques et par des fléchissements économiques, avec un accroissement de 2,1 points de pourcentage sur la période 2017-2019, suivis par les cinq pays faisant face aux trois facteurs, qui enregistrent une augmentation de 2 points de pourcentage (Afghanistan, Nigéria, République centrafricaine, République démocratique du Congo et Yémen). Les pays confrontés à une association de conflits et d’extrêmes climatiques (18 pays) ou de conflits et de fléchissements économiques (4 pays), connaissent respectivement une hausse de 0,4 point de pourcentage et de 0,5 point de pourcentage de la prévalence de la sous-alimentation.

Entre 2017 et 2019, les pays à faible revenu touchés par les facteurs analysés sont ceux qui affichent la plus forte augmentation de la prévalence de la sous-alimentation (entre 30,8 et 32,4 pour cent), soit un accroissement 2,5 fois plus élevé que dans les pays à revenu intermédiaire également confrontés à ces facteurs sur la même période (entre 8,9 et 9,1 pour cent) (figure 22). Plus précisément, on observe un accroissement de 1,6 point de pourcentage de la prévalence de la sous-alimentation dans les pays à faible revenu, contre 0,2 point de pourcentage dans les pays à revenu intermédiaire (pas d’augmentation dans les pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure et hausse de 0,4 dans les pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure). Les pays à faible revenu enregistrent également des hausses plus importantes quels que soient les facteurs, qu’ils soient touchés par un ou plusieurs d’entre eux. Elles sont respectivement de 2,3 points de pourcentage et 1,4 point de pourcentage pour les pays à faible revenu touchés par des conflits (11 pays) et des extrêmes climatiques (14 pays), soit des chiffres supérieurs à ceux observés pour les pays à revenu intermédiaire touchés par ces mêmes facteurs (figure 22). En outre, la hausse de 2,3 points de pourcentage dans les pays à faible revenu touchés par des conflits est à mettre en parallèle avec l’absence d’augmentation de la prévalence de la sous-alimentation dans les pays à faible revenu qui ne connaissent pas de conflits.

Contrairement aux pays à faible revenu, les pays à revenu intermédiaire qui présentent des augmentations de la prévalence de la sous-alimentation sur cette période sont principalement touchés par des fléchissements économiques et des facteurs multiples (figure 22). Ceux qui font face à des fléchissements économiques (16 pays) enregistrent une augmentation de 1,7 point de pourcentage, tandis qu’on observe une diminution de 0,3 point de pourcentage pour ceux qui n’y sont pas confrontés (74). Concernant les premiers, la hausse est de 1,9 point de pourcentage pour les 8 pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure et de 1,4 point de pourcentage pour les 8 pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure.

Les grandes inégalités de revenu sont également l’une des causes à l’origine d’augmentations de la prévalence de la sous-alimentation lors de cette période, en particulier dans les pays à revenu intermédiaire. Les pays à revenu intermédiaire qui affichent des inégalités de revenu importantes (39 pays) enregistrent une hausse de la prévalence de la sous-alimentation plus forte que ceux qui n’en présentent pas. Plus précisément, les premiers connaissent une hausse de 0,3 point de pourcentage et les seconds une réduction de 0,3 point de pourcentage. Par ailleurs, l’augmentation de la prévalence de la sous-alimentation est de 2 pour cent entre 2017 et 2019 dans les pays à revenu intermédiaire touchés par un ou plusieurs facteurs, tandis qu’elle atteint le double (4 pour cent) dans ceux qui présentent également de fortes inégalités de revenu.

Contrairement aux tendances récentes de la prévalence de la sous-alimentation, la prévalence du retard de croissance chez l’enfant continue de baisser sur la période 2017-2019. Cependant, l’analyse du retard de croissance chez l’enfant dans les pays touchés par des conflits, des extrêmes climatiques et des fléchissements économiques, ainsi que des différences entre les pays présentant de fortes inégalités de revenu, n’a pas permis de dégager de schéma particulier, ce qui donne à penser que d’autres facteurs plus décisifs sont à l’origine de cette tendance. De la même façon, s’agissant de l’augmentation de l’obésité chez l’adulte observée entre 2012 et 2016 dans les pays à revenu faible ou intermédiaire, l’analyse indique que cette tendance est due à des causes structurelles liées au développement économique des pays et à l’évolution connexe des environnements alimentaires plutôt qu’aux aléas liés aux facteurs. En réalité, l’augmentation de l’obésité chez l’adulte est corrélée avec le niveau de revenu des pays et avec la transition nutritionnelle qui accompagne souvent le développement économique. De fait, les pays à revenu intermédiaire présentent un accroissement de l’obésité considérablement plus significatif sur le plan statistique que les pays à faible revenu (1,9 point de pourcentage, contre 1,4 point de pourcentage), le plus important étant recensé dans les pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure (2,1 points de pourcentage).

Différences régionales dans les facteurs et les effets sur la sécurité alimentaire et la nutrition

Une analyse régionale montre des différences dans les tendances liées aux facteurs. L’examen de la présente section est axé sur les pays à revenu faible ou intermédiaire d’Afrique, d’Amérique latine et des Caraïbes et d’Asie. Ces trois régions du monde sont celles où l’on recense la plupart des personnes sous-alimentées et des enfants souffrant d’un retard de croissance et pour lesquelles on dispose de suffisamment de données pour l’analyse. Nous allons commencer par étudier la période 2017-2019, avant de nous concentrer sur l’année 2020.

Sur la période 2017-2019, on constate que, dans les trois régions considérées, quelque 78 pour cent des pays à revenu faible ou intermédiaire sont touchés par l’un au moins des trois facteurs (conflits, extrêmes climatiques et fléchissements économiques) (figure 23). En outre, dans 45 pour cent d’entre eux (33 pays sur 74), les inégalités de revenu sont élevées, ce qui aggrave les effets des facteurs. On observe une hausse de 0,6 point de pourcentage de la prévalence de la sous-alimentation entre 2017 et 2019 dans les pays touchés par des facteurs et où les inégalités de revenu sont très marquées (non représentées sur la figure), et une légère diminution de cette prévalence dans les pays touchés par des facteurs mais où les inégalités de revenu sont faibles. Sur les 44 pays de ces régions où règnent de grandes inégalités de revenu, 26 sont situés en Afrique, 5 en Asie et 13 en Amérique latine et dans les Caraïbesak.

Figure 23
SUR LA PÉRIODE 2017-2019, L’AMÉRIQUE LATINE ET LES CARAÏBES ONT CONNU LA PLUS FORTE HAUSSE DE LA PRÉVALENCE DE LA SOUS-ALIMENTATION (PoU) CAUSÉE PAR DES FACTEURS MULTIPLES, ET L’AFRIQUE EST LA SEULE RÉGION OÙ L’AUGMENTATION DE LA PoU EST LIÉE AUX TROIS FACTEURS

En Afrique, en Amérique latine et dans les Caraïbes et en Asie, les pays qui connaissent des fléchissements économiques enregistrent un accroissement de la prévalence de la sous-alimentation entre 2017 et 2019 plus élevé que ceux qui sont frappés par des extrêmes climatiques ou des conflits (figure 23). La hausse la plus forte est constatée en Afrique et en Amérique latine et dans les Caraïbes (2 points de pourcentage). L’Afrique est la seule région où la montée de la prévalence de la sous-alimentation est associée aux trois facteurs principaux. Sur les 24 pays touchés par des fléchissements économiques, 11 sont en Afrique (27 pour cent des pays), 6 en Asie (19 pour cent des pays) et 5 en Amérique latine et dans les Caraïbes (22 pour cent des pays). On trouve également en dehors de ces régions des pays qui connaissent des fléchissements économiques (mais qui ne sont pas représentés sur la figure), à savoir deux en Océanie.

Les extrêmes climatiques sont un facteur important en Afrique, où les pays touchés enregistrent une augmentation de la prévalence de la sous-alimentation de 1,2 point de pourcentage entre 2017 et 2019, alors que l’Asie affiche une réduction de 0,4 point de pourcentage (figure 23). On dénombre 21 pays touchés par des extrêmes climatiques en Afrique (51 pour cent des pays), et 24 en Asie (77 pour cent des pays).

Les pays d’Afrique qui font face à des conflits présentent une hausse de 1,7 point de pourcentage de la prévalence de la sous-alimentation sur la période 2017-2019 (figure 23). En revanche, le seul pays dans ce cas en Amérique latine et dans les Caraïbes (la Colombie) n’affiche aucune augmentation de la prévalence.

L’Afrique est la seule région où les augmentations de la prévalence de la sous-alimentation observées sur la période 2017-2019 sont liées aux trois facteurs (conflits, extrêmes climatiques et fléchissements économiques) (figure 23). En outre, les pays d’Afrique touchés par des conflits et des extrêmes climatiques enregistrent une plus forte hausse de la prévalence de la sous-alimentation comparativement aux pays confrontés aux mêmes facteurs en Amérique latine et dans les Caraïbes et en Asie. On trouve des différences intéressantes dans l’évolution de la prévalence de la sous-alimentation sur la période 2017-2019 au sein des régions. En Afrique, les pays confrontés à des conflits et à des fléchissements économiques présentent des augmentations de la prévalence plus fortes que ceux qui ne sont pas touchés par les mêmes facteurs (ces derniers n’enregistrent qu’une faible hausse, comprise entre 0,3 et 0,4 point de pourcentage). De la même façon, en Amérique latine et dans les Caraïbes et en Asie, on constate dans les pays qui connaissent des fléchissements économiques des augmentations plus importantes de la prévalence de la sous-alimentation que dans ceux qui ne sont pas concernés par ce facteur (hausse de 0,2 point de pourcentage en Amérique latine et dans les Caraïbes et réduction de 0,6 point de pourcentage en Asie).

La plus forte hausse (2,1 points de pourcentage) est observée dans les pays confrontés à des facteurs multiples en Amérique latine et dans les Caraïbes (figure 23). En Afrique, les pays touchés par des facteurs multiples présentent également de très fortes augmentations (1,9 point de pourcentage). Les conflits et les extrêmes climatiques constituent l’association la plus fréquente de facteurs en Afrique (5 pays). En Amérique latine et dans les Caraïbes, quatre pays sont aux prises avec des facteurs multiples: trois par des extrêmes climatiques et des fléchissements économiques, et un par un conflit et des extrêmes climatiques (la Colombie).

Les pays touchés par des facteurs multiples (un ou plusieurs des facteurs) affichent systématiquement les augmentations les plus marquées de la prévalence de la sous-alimentation sur la période 2017-2019. Sur cette période, pour les trois régions considérées (Afrique, Amérique latine et Caraïbes et Asie), quelque 36 pour cent des pays à revenu faible ou intermédiaire ont été touchés par des facteurs multiples, à savoir 15 en Afrique, 4 en Amérique latine et dans les Caraïbes et 15 en Asie. Les pays touchés par des facteurs multiples affichent une augmentation de 1,9 point de pourcentage en Afrique et de 2,1 points de pourcentage en Amérique latine et dans les Caraïbes; aucune hausse n’est constatée en Asie (figure 23). D’un autre côté, tandis que presque la moitié des pays touchés sont concernés par des facteurs multiples en Asie, on ne constate un accroissement de la prévalence de la sous-alimentation que dans ceux qui connaissent des fléchissements économiques.

En 2020, l’ensemble des pays à revenu faible ou intermédiaire pour lesquels on dispose d’informations ont subi des fléchissements économiques, sauf neuf pays (Bangladesh, Chine, Égypte, Éthiopie, Guyana, Iran, Myanmar, Turquie et Viet Nam). Le Guyana, par exemple, a enregistré un taux de croissance de 43,5 pour cent en 2020 grâce à une production de pétrole exceptionnelle. De façon similaire, le PIB de l’Iran a progressé de 8 points de pourcentage en 2020 en raison des bonnes recettes pétrolières du deuxième trimestre.

La figure 24 illustre les augmentations de la prévalence de la sous-alimentation en présence de fléchissements économiques et de différentes associations de ces derniers avec d’autres facteurs en 2020. Là où les fléchissements s’accompagnent d’autres facteurs (catastrophe liée au climat, conflit, ou les deux), la hausse la plus importante de la prévalence de la sous-alimentation est observée en Afrique (5,2 points de pourcentage), suivie de l’Asie (3,1 points de pourcentage). Sur les 49 pays touchés par des facteurs multiples,16 sont en Afrique (16 des 41 pays africains) et 18 sont en Asie (18 des 30 pays asiatiques), 8 sont en Amérique latine ou dans les Caraïbes (8 des 21 pays d’Amérique latine et des Caraïbes), et les 7 pays restants sont en Amérique du Nord et en Europe ou en Océanie. Sur ces 7 pays, 3 se trouvent en Amérique du Nord et en Europe (3 des 9 pays de la région), et 4 en Océanie (4 des 6 pays de la région).

Figure 24
EN 2020, L’AFRIQUE, L’AMÉRIQUE LATINE ET LES CARAÏBES ET L’ASIE ONT ENREGISTRÉ DES AUGMENTATIONS IMPORTANTES DE LA PRÉVALENCE DE LA SOUS-ALIMENTATION (PoU) LORSQU’ELLES ONT ÉTÉ FRAPPÉES À LA FOIS PAR DES FLÉCHISSEMENTS ÉCONOMIQUES ET PAR DES CATASTROPHES LIÉES AU CLIMAT OU DES CONFLITS, OU LES DEUX

Un grand nombre des pays (49 sur les 107) qui ont enregistré une augmentation de la prévalence de la sous-alimentation en 2020 n’ont été touchés que par un seul facteur (fléchissements économiques), mais la hausse est en moyenne bien inférieure à celle observée dans les pays où les fléchissements économiques se sont accompagnés d’autres facteurs (figure 24). En moyenne, l’accroissement est inférieur de 1,1 point de pourcentage au niveau mondial, et de 1,5 point de pourcentage en Afrique et en Asie.

Des fléchissements économiques associés à des catastrophes liées au climat ont frappé 35 pays et ont débouché sur des augmentations importantes de la prévalence de la sous-alimentation dans les trois régions (figure 24). La plus forte hausse concerne la région de l’Amérique latine et des Caraïbes (2,1 points de pourcentage), suivie de l’Afrique (1,6 point de pourcentage) et de l’Asie (1 point de pourcentage). Sur les 35 pays, 9 sont en Afrique (9 des 41 pays de la région), 12 en Asie (12 des 30 pays de la région) et 8 en Amérique latine et dans les Caraïbes (8 des 21 pays de la région).

En 2020, les pays qui ont été touchés par des conflits associés à d’autres facteurs ont enregistré une forte augmentation de la prévalence de la sous-alimentation. Les pays africains qui ont subi les trois facteurs (fléchissements économiques, catastrophes liées au climat et conflits) affichent la plus forte progression de la prévalence de la sous-alimentation (5,2 points de pourcentage), suivis des pays asiatiques touchés par des fléchissements économiques et des conflits (3,1 points de pourcentage).

L’inaccessibilité économique croissante d’une alimentation saine est fortement associée aux formes graves et modérées d’insécurité alimentaire

Avec le présent rapport, la FAO a commencé à suivre de manière systématique le coût et l’accessibilité économique d’une alimentation saine dans le monde. Les nouvelles estimations pour 2019 qui sont présentées au chapitre 2 sont importantes pour mieux comprendre les liens entre ces éléments et l’insécurité alimentaire, et comment leur évolution au fil du temps influe sur l’insécurité alimentaire et les différentes formes de malnutrition.

L’édition 2020 de la présente publication a montré que l’inaccessibilité économique d’une alimentation saine, en 2017, était fortement associée à la sous-alimentation et à différentes formes de malnutrition, y compris le retard de croissance chez les enfants et l’obésité chez les adultes. Ces résultats sont reconfirmés cette année par une analyse des estimations pour 2019 qui montre que les niveaux élevés d’inaccessibilité économique d’une alimentation saine sont fortement corrélés à des niveaux élevés d’insécurité alimentaire grave ou modérée et d’insécurité alimentaire grave, mesurées selon l’échelle FIES (figure 25). Comme on s’y attendait, plus le revenu d’un pays est faible, plus le niveau de l’inaccessibilité économique d’une alimentation saine et des formes graves ou modérées et graves d’insécurité alimentaire est important.

Figure 25
L’INACCESSIBILITÉ ÉCONOMIQUE D’UNE ALIMENTATION SAINE EN 2019 EST FORTEMENT ASSOCIÉE À UN ACCROISSEMENT DE L’INSÉCURITÉ ALIMENTAIRE GRAVE OU MODÉRÉE ET DE L’INSÉCURITÉ ALIMENTAIRE GRAVE

L’examen de l’intersection entre le pourcentage de la population pour lequel une alimentation saine est hors de portée, le pourcentage de la population qui est en situation d’insécurité alimentaire modérée ou grave et le fait que ces populations vivent dans des pays en butte aux facteurs révèle des schémas intéressants (figure 26). Dans les pays qui font face à un ou plusieurs des facteurs, on constate en moyenne un pourcentage de la population en situation d’insécurité alimentaire modérée ou grave (44 pour cent) qui est supérieur de près de 10 points de pourcentage à celui des pays qui ne sont touchés par aucun facteur (34 pour cent). De plus, le pourcentage de la population de ces pays pour qui une alimentation saine est inaccessible financièrement (57 pour cent) est supérieur à celui des pays qui ne sont touchés par aucun facteur (41 pour cent). Les pays en butte à des facteurs multiples comptent la plus forte proportion de personnes qui n’ont pas les moyens d’adopter une alimentation saine (68 pour cent), proportion qui, en moyenne, est supérieure de 39 pour cent à celle des pays touchés par un seul facteur et de 66 pour cent à celle des pays qui ne sont soumis à aucun facteur. Ces pays affichent également des niveaux plus importants d’insécurité alimentaire modérée ou grave (47 pour cent), supérieurs de 12 pour cent à ceux des pays touchés par un seul facteur (42 pour cent) et de 38 pour cent à ceux des pays où aucun facteur n’entre en jeu (34 pour cent).

Figure 26
EN 2019, LES PAYS TOUCHÉS PAR DES FACTEURS MULTIPLES ET LES PAYS TOUCHÉS PAR UN CONFLIT (FACTEUR UNIQUE OU ASSOCIÉ À D’AUTRES) AFFICHENT PARMI LES POURCENTAGES LES PLUS ÉLEVÉS DE POPULATION NE POUVANT FINANCIÈREMENT SE PERMETTRE UNE ALIMENTATION SAINE ET EN SITUATION D’INSÉCURITÉ ALIMENTAIRE MODÉRÉE OU GRAVE

Les pays frappés par des conflits font partie de ceux où l’on observe les niveaux les plus élevés d’insécurité alimentaire modérée ou grave et d’inaccessibilité économique d’une alimentation saine en 2019, qu’ils soient touchés uniquement par des conflits, ou par des conflits associés à d’autres facteurs. La seule exception concerne les pays frappés par des conflits associés à des extrêmes climatiques, où le niveau d’insécurité alimentaire modérée ou grave est inférieur à celui des pays touchés par des extrêmes climatiques associés à des fléchissements économiques (figure 26). Les quelques pays en butte aux trois facteurs (conflits, extrêmes climatiques et fléchissements économiques) présentent les niveaux les plus importants d’inaccessibilité économique (94 pour cent de leur population) et d’insécurité alimentaire modérée ou grave (69 pour cent de leur population).

Point important, nous avons aujourd’hui pour la première fois la possibilité d’élargir l’analyse et d’étudier le lien entre l’évolution de l’inaccessibilité économique d’une alimentation saine (en comparant les données de 2017 et de 2019) et les niveaux d’insécurité alimentaire mesurés à l’aide des deux indicateurs fondés sur l’échelle FIES. Si, au niveau mondial, le nombre total de personnes pour lesquelles une alimentation saine est hors de portée en 2019 est légèrement inférieur à l’estimation publiée pour 2017 dans le rapport de l’année dernière, ce chiffre est en revanche en hausse dans plusieurs régions (voir au chapitre 2 le tableau 5). L’Amérique latine et les Caraïbes ont enregistré la plus forte augmentation (8,4 pour cent), et les hausses sous-régionales sont même encore supérieures (9,7 pour cent pour l’Amérique latine et 14,3 pour cent pour l’Amérique du Sud). Des accroissements importants ont également été enregistrés en Afrique (5,4 pour cent), notamment en Afrique centrale (6,8 pour cent) et en Afrique de l’Ouest (5,9 pour cent). La variabilité est suffisante, avec à la fois des augmentations et des baisses du nombre total de personnes ne pouvant financièrement se permettre d’avoir une alimentation saine selon les pays entre 2017 et 2019. En revanche, l’insécurité alimentaire grave et l’insécurité alimentaire modérée ou grave, telles que mesurées au moyen de l’échelle FIES, ne présentent pas une telle variabilité sur une aussi courte période; on utilise de ce fait pour l’analyse leurs niveaux de 2019, plutôt que leur évolution entre 2017 et 2019al.

L’analyse montre une corrélation positive (non présentée par la figure) entre l’évolution sur 2017-2019 du nombre de personnes pour qui une alimentation saine est inaccessible et l’insécurité alimentaire modérée ou grave ainsi que l’insécurité alimentaire grave en 2019. Même si la première variable ne peut pas expliquer une grande partie de la variabilité des indicateurs fondés sur l’échelle FIES compte tenu du faible coefficient de détermination (R2 de 0,06 environ), la corrélation est significative sur le plan statistique. Ainsi, les pays où l’inaccessibilité économique d’une alimentation saine a augmenté entre 2017 et 2019 affichent également des niveaux d’insécurité alimentaire (grave ou modérée et grave) plus importants. D’autres statistiques descriptives et tests de signification statistique indiquent que cette corrélation positive est principalement imputable aux pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure.

La FAO commence juste à suivre de manière systématique le coût et l’accessibilité économique d’une alimentation saine. On s’attend donc, à mesure qu’on disposera de davantage de points de données, à une amélioration notable de la capacité à analyser et à mieux comprendre comment l’évolution du coût et de l’accessibilité économique d’une alimentation saine influe sur l’insécurité alimentaire et les différentes formes de malnutrition. En outre, une collecte systématique des prix des principaux produits alimentaires qui constituent la base d’une alimentation saine permettra de composer un assortiment alimentaire sain à partir de produits pertinents pour les différents pays et comparables entre ces derniers tout en prenant en compte les réalités locales.

MESSAGES CLÉS

Transformés de manière à être plus résilients face aux principaux facteurs, les systèmes alimentaires peuvent fournir une alimentation saine et abordable de façon durable et inclusive et devenir de puissants moteurs de la lutte contre la faim, l’insécurité alimentaire et la malnutrition sous toutes ses formes.

Dans les zones touchées par des conflits, si l’on veut renforcer la résilience des plus vulnérables, il est essentiel de maintenir dans la mesure du possible les fonctions des systèmes alimentaires en tenant compte du conflit, et d’aligner les mesures d’aide humanitaire immédiates, pour protéger les vies et les moyens d’existence, assurer le développement à long terme et pérenniser la paix.

Des mécanismes novateurs propres à réduire les risques liés au climat, l’adoption généralisée de techniques de production climato-intelligentes et respectueuses de l’environnement et la conservation et la remise en état des environnements naturels permettront de renforcer la résilience des systèmes alimentaires face à l’accroissement de la variabilité du climat et des phénomènes climatiques extrêmes.

Les répercussions économiques de la pandémie de covid-19 ont montré qu’en cas de ralentissement ou de fléchissement économique, il est impératif de faire en sorte que les chaînes d’approvisionnement alimentaire continuent de fonctionner, tout en soutenant suffisamment les moyens d’existence des plus vulnérables et en veillant au maintien de la production et de l’accès à des aliments nutritifs, notamment au moyen d’un renforcement des programmes de protection sociale.

La persistance des inégalités socioéconomiques fait qu’il est d’autant plus nécessaire d’apporter des changements systémiques aux systèmes alimentaires afin de donner aux populations vulnérables et marginalisées de longue date davantage accès aux ressources productives, aux technologies, aux données et à l’innovation, de sorte qu’elles puissent devenir des agents du changement œuvrant en faveur de systèmes alimentaires plus durables.

Des politiques complètes visant l’alimentation et l’environnement naturel, renforcées par des règlements et des lois, peuvent entraîner des changements de comportement le long de la chaîne d’approvisionnement alimentaire et chez les consommateurs, et ainsi favoriser des habitudes alimentaires ayant une incidence positive sur la santé humaine et sur l’environnement.

La cohérence dans la formulation et la mise en œuvre des politiques et des investissements entre les différents systèmes (agroalimentaire, santé, protection sociale et environnement) est essentielle pour créer des synergies en vue de solutions plus efficientes et plus efficaces applicables aux systèmes alimentaires, de façon à assurer une alimentation saine et abordable pour tous.

Des institutions et des mécanismes de gouvernance efficaces et inclusifs doivent, outre l’accès aux technologies, aux données et à l’innovation, servir d’accélérateurs importants dans les portefeuilles complets de politiques, d’investissements et de lois visant à transformer les systèmes alimentaires en vue de mettre à la portée des gens une alimentation saine plus abordable.

Étant donné que les systèmes alimentaires sont touchés par plus d’un facteur et qu’ils ont par ailleurs des répercussions de tous ordres sur les résultats en matière de sécurité alimentaire et de nutrition, des portefeuilles complets de politiques, d’investissements et de lois, adaptés au contexte, doivent être élaborés, de telle sorte que leurs effets conjugués sur la transformation des systèmes alimentaires soient portés au maximum, sachant aussi que les ressources financières sont limitées.

Des approches par système qui favorisent des solutions gagnant-gagnant et aident à gérer les compromis doivent être mises en place pour élaborer des portefeuilles cohérents de politiques, d’investissements et de lois, à savoir des approches territoriales, des approches écosystémiques, des approches par système alimentaire des peuples autochtones, et des mesures coordonnées prises dans les situations de crise prolongée, en complément des efforts de consolidation de la paix.

Appels mondiaux à l’action en faveur de la transformation des systèmes alimentaires

Ces dernières décennies, les systèmes alimentaires ont permis de produire une grande variété d’aliments, nécessaires pour nourrir une population mondiale en expansion rapide et de plus en plus urbanisée. Toutefois, nombre de ces systèmes n’ont pu fournir des aliments sûrs et nutritifs en quantité suffisante pour nourrir correctement l’ensemble de la population mondiale. En effet, avant même le déclenchement de la pandémie de covid-19, près de trois milliards de personnes n’avaient pas les moyens financiers de se procurer une alimentation saine. En outre, une part de plus en plus grande de la population consomme désormais régulièrement des aliments et des boissons fortement transformés et à densité énergétique élevée, riches en graisses, en sucres et en sel94.

Étant donné que les systèmes alimentaires actuels ne peuvent donner aux ménages un accès adéquat à des aliments nutritifs qui participent à une alimentation saine – en particulier au lendemain des mesures de confinement visant à endiguer la pandémie de covid-19 –, il est d’autant plus nécessaire de transformer ces systèmes7 pour rendre l’alimentation saine accessible à tous, notamment sur le plan financier. Ce besoin urgent de transformation est aujourd’hui au cœur du débat mondial qui vise à lever certains des plus grands obstacles au développement durable, en particulier à éliminer la faim, l’insécurité alimentaire et la malnutrition sous toutes ses formes d’ici à 2030. Trois sommets mondiaux doivent se tenir en 2021 sur des sujets qui sont au centre de ce débat: le Sommet des Nations Unies sur les systèmes alimentaires, à New York (et la manifestation préalable, à Rome), la vingt-sixième réunion de la Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (COP 26), à Glasgow, et le Sommet Nutrition pour la croissance, à Tokyo.

Comme indiqué au chapitre 3, plusieurs facteurs principaux, du fait de leur incidence sur les systèmes alimentaires, compromettent de plus en plus les résultats en matière de sécurité alimentaire et de nutrition à l’échelle mondiale. Ces facteurs sont les conflits, la variabilité du climat et les extrêmes climatiques, et les ralentissements et les fléchissements économiques, dont les retombées sont aggravées par la pauvreté et les inégalités. Malgré ces difficultés, s’ils sont transformésam de façon à être plus résilients face aux facteurs auxquels ils sont soumis, et si des mesures d’incitation sont prises afin qu’ils fournissent un alimentation abordable et saine dans des conditions durables et inclusives, les systèmes alimentaires peuvent devenir de puissants moteurs de la lutte contre la faim, l’insécurité alimentaire et la malnutrition sous toutes ses formes, et nous mettre sur la bonne voie pour atteindre l’ODD 2, tout en créant des effets de synergie importants pour la réalisation d’autres ODD.

La transformation des systèmes alimentaires exige que l’on introduise des changements novateurs et systémiques en prenant appui sur un environnement favorable, constitué d’institutions, de politiques, de lois, de règlements et d’investissements dotés d’objectifs cohérents et complémentaires, dans tous les secteurs86,95. En outre, il est nécessaire de procéder de manière coordonnée et intégrée à des transitions progressives à petite échelle et à des modifications structurelles à plus grande échelle au niveau des institutions, des lois et des normes en vue de parvenir à la transformation souhaitée96. Il importe de noter qu’une action coordonnée doit être menée par tous les grands acteurs des secteurs public et privé, du secteur universitaire, de la société civile et des institutions internationales, comme le reconnaissent les participants aux manifestations mondiales susmentionnées. Les obstacles à surmonter pour apporter ces modifications sont considérables; il faudra donc mobiliser énormément de ressources financières, tout en définissant des solutions gagnant-gagnant et en gérant les compromis.

Les bonnes pratiques aident à illustrer les changements transformationnels à opérer

Le présent chapitre fait fond sur des études de cas du monde entier97 d’où peuvent être tirés de bonnes pratiquesan et des enseignements utiles, et propose des orientations destinées aux acteurs qui interviennent aux niveaux local, national, régional et mondial. Il s’agira de transformer les systèmes alimentaires et de les rendre plus résilients face aux principaux facteurs qui ont récemment causé une poussée de l’insécurité alimentaire et de la malnutrition, tout en améliorant l’accès de tous à une alimentation saine et abordable, grâce à des approches durables sur le plan environnemental. On y montre à quel point il importe de bien comprendre le contexte, en plus des besoins des groupes de population vulnérables, notamment les femmes, les enfants et les jeunes, les peuples autochtones et les habitants de pays en proie à des conflits et de zones reculées.

Il n’existe pas de solutions «universelles», et par conséquent les expériences au niveau des pays donnent des exemples de ce qu’il faut faire – concrètement et en innovant – pour transformer les systèmes alimentaires. En particulier, on s’intéresse à la cohérence des politiques et des investissements entre les systèmes alimentaires et les systèmes qui leur sont étroitement liés, notamment les systèmes agroalimentaires, les systèmes de santé, les systèmes environnementaux et les systèmes de protection sociale. Les exemples montrent que des mesures spécifiques, en particulier des mécanismes de gouvernance inclusifs, la technologie, l’exploitation des données et l’innovation (outre des lois, des normes et d’autres mesures), peuvent permettre de transformer les systèmes alimentaires.

Plus d’une centaine de contributions ont été reçues en réponse à l’«appel aux bonnes pratiques pour transformer les systèmes alimentaires dans le sens d’une alimentation saine et abordable et pour s’attaquer aux principaux facteurs d’insécurité alimentaire et de malnutrition»98, lancé à l’échelle mondiale aux fins du présent rapport et accompagné d’un formulaire qui a été distribué aux organismes partenaires. Des exemples de bonnes pratiques et les enseignements qui en ont été tirés sont présentés en détails dans les sections ci-après. Les contributions montrent quelles solutions peuvent être apportées face aux principaux facteurs de l’insécurité alimentaire et de la malnutrition et quelles mesures clés doivent être prises dans le cadre d’une ou de plusieurs des six voies de transformation présentées ci-après. Dans tous les cas, il importe de veiller à une meilleure intégration des différentes plateformes stratégiques et des mesures adoptées au sein des secteurs et entre ceux-ci, en mettant l’accent sur les ressources naturelles, l’alimentation, l’agriculture, la santé, la protection sociale, l’éducation, la commercialisation, les échanges et l’investissement.

4.1 Six voies de transformation à emprunter face aux principaux facteurs à l’origine des tendances récentes en matière de sécurité alimentaire et de nutrition

Un problème de taille qui fait obstacle à la transformation des systèmes alimentaires est que les politiques, stratégies, dispositions législatives et investissements qui existent aux niveaux national, régional et mondial sont compartimentés et font l’objet de réflexions séparées. C’est le cas par exemple des priorités dans les domaines suivants: stabilité politique et redressement économique, réduction des risques de catastrophe et résilience face au changement climatique, commerce et développement dans les secteurs de l’alimentation et de l’agriculture, ou relèvement des systèmes de santé et mise en place de dispositifs de protection sociale adéquats1,3,5,7. Trop souvent, l’importance des relations et de la complémentarité entre ces réflexions et leur pertinence au regard de fonctions essentielles des systèmes alimentaires ne sont pas reconnues comme il se doit – ou ne sont pas assez prises en considération dans la pratique lorsqu’elles sont reconnues. Parmi ces fonctions essentielles, on peut citer la production et la fourniture d’aliments nutritifs en quantité suffisante et l’accessibilité économique d’une alimentation saine et abordable.

C’est certes plus facile à dire qu’à faire. On ne parviendra à surmonter ces difficultés qu’en mettant en place des portefeuilles intersectoriels de politiques et d’investissements qui apportent des solutions complètes face aux principaux facteurs dont les effets généralisés sur les systèmes alimentaires nuisent aux résultats en matière de sécurité alimentaire et de nutrition (comme indiqué et analysé au chapitre 3). Ces portefeuilles doivent être bien ciblés et prévoir des mesures d’incitation propres à encourager tous les acteurs à changer de comportement et à contribuer de façon constructive à des changements novateurs et systémiques qui permettront de transformer les systèmes alimentaires.

On trouvera dans les sections ci-après six voix qui peuvent être empruntées (figure 27) pour transformer les systèmes alimentaires face aux principaux facteurs de l’insécurité alimentaire et de la malnutrition énoncés et examinés aux précédents chapitres et résumés à l’encadré 1. Chacune fait fond sur des recommandations clés des quatre précédentes éditions du présent rapport (2017, 2018, 2019 et 2020) et correspond à un ou à plusieurs des principaux facteurs examinés et analysés au chapitre 3.

Figure 27
VOIES POSSIBLES À EMPRUNTER POUR TRANSFORMER LES SYSTÈMES ALIMENTAIRES FACE AUX PRINCIPAUX FACTEURS DE L’INSÉCURITÉ ALIMENTAIRE, DE LA MALNUTRITION ET DE L’INACCESSIBILITÉ ÉCONOMIQUE D’UNE ALIMENTATION SAINE

Ces voies de transformation servent de fondement à la formulation d’un ensemble cohérent de portefeuilles (politiques et investissements) devant permettre une transformation des systèmes alimentaires (voir également les figures 28 et 29). On choisira les voies à emprunter sur la base d’une analyse de la situation dans son contexte (voir ci-dessous) pour déterminer quel facteur ou quelle association de facteurs a le plus d’effets sur le système alimentaire visé et sur les résultats en matière de sécurité alimentaire et de nutrition liés à ce système. Les voies choisies peuvent également se compléter et se renforcer mutuellement.

Figure 28
ÉTAPES DE LA TRANSFORMATION DES SYSTÈMES ALIMENTAIRES – POUR UNE ALIMENTATION PLUS SAINE ET PLUS ABORDABLE

Sur la base d’exemples tirés d’études de cas portant sur divers pays, et de recommandations formulées par la communauté scientifique et dans les précédentes éditions du présent rapport, le reste de ce chapitre énonce les étapes à suivre pour élaborer les portefeuilles de politiques et d’investissements recommandés sur les six voies de transformation. La figure 28 illustre les étapes qu’il est recommandé de suivre tout au long du processus de transformation des systèmes alimentaires face aux principaux facteurs de l’insécurité alimentaire, de la malnutrition et de l’inaccessibilité économique d’une alimentation saine. De façon générale, il faut: i) réaliser une analyse approfondie de la situation dans son contexte; ii) définir des portefeuilles cohérents et intersectoriels de politiques, d’investissements et de lois, y compris déterminer les accélérateurs qui hâteront la transformation; iii) mettre en œuvre ces portefeuilles tout en effectuant un suivi et une évaluation adéquats et en mettant en place des mécanismes de responsabilité.

L’analyse de la situation consiste en une évaluation complète, en contexte, des principaux facteurs qui nuisent aux systèmes alimentaires et compromettent les résultats en matière de sécurité alimentaire et de nutrition, sur la base des données et informations disponibles communiquées chaque année dans l’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition de la situation dans le monde (et d’autres références aux niveaux mondial, national et local)99,100,101,102,103,104. En fonction des facteurs de l’insécurité alimentaire et de la malnutrition auxquels on a affaire, les parties prenantes décident des changements systémiques à apporter au système alimentaire pour obtenir les résultats souhaités. En outre, des concertations multipartites permettent de cerner les politiques, les investissements et les dispositifs de gouvernance auxquels il faut s’intéresser au niveau national, en tenant compte des institutions qui sont les premières concernées et de toute question d’économie politique pertinente7. Toutes les étapes qui précèdent aideront à déterminer, en fonction du contexte, quelles voies doivent être empruntées pour transformer les systèmes alimentaires.

Pour chacune des voies envisageables, les politiques et les bonnes pratiques recommandées sont ensuite examinées afin d’illustrer le type de mesures qui peuvent être prises et d’étayer la formulation des portefeuilles de politiques et d’investissements – et des accélérateurs connexes – aux fins de la transformation des systèmes alimentaires. Cette partie du processus est illustrée dans la section ci-après. Les conséquences catastrophiques de la pandémie de covid-19, qui continue de sévir, sur la santé humaine et sur l’économie, dans le monde entier, et l’importance des systèmes de protection sociale, qui permettent aux plus vulnérables d’accéder à une alimentation nutritive, montrent à quel point les systèmes agroalimentaires, la santé, l’environnement et la protection sociale sont étroitement liés. Il est indispensable de veiller à la cohérence entre ces systèmes et d’autres systèmes pertinents si l’on veut faciliter les processus de transformation. Cet aspect et d’autres éléments fondamentaux des portefeuilles de politiques et d’investissements (figure 29) sont abordés plus avant à la section 4.2.

Exemples de bonnes pratiques pour les six voies qui peuvent mener à la transformation des systèmes alimentaires

Une fois que les principaux facteurs et leurs effets sur les systèmes alimentaires et l’insécurité alimentaire et la malnutrition sous toutes ses formes ont fait l’objet d’une analyse approfondie dans leur contexte, les voies choisies indiquent quelles mesures de transformation doivent être envisagées. Des exemples de bonnes pratiques et de mesures importantes sont présentés ci-après pour chacune des voies de transformationao.

Étant donné que de nombreux pays sont touchés par les principaux facteurs, qui interagissent également entre eux (comme indiqué plus en détails au chapitre 3), plusieurs voies devront être empruntées simultanément, ce qui signifie qu’elles doivent être cohérentes entre elles si on veut les mettre en œuvre efficacement. De même, un grand nombre de bonnes pratiques et de mesures évoquées dans la présente section contribuent à la mise en œuvre de plusieurs voies. Par exemple, les bonnes pratiques visant à renforcer la résilience face à la variabilité du climat et aux extrêmes climatiques (voie 2) peuvent également améliorer la résilience des pays touchés par des ralentissements et des fléchissements économiques (voie 3) ou des conflits (voie 1). En outre, au vu de la persistance de fortes inégalités de revenu dans la plupart des pays à revenu faible ou intermédiaire en particulier, les bonnes pratiques et les mesures qui relèvent de la voie 5 s’appliquent à de nombreux pays. Celles qui correspondent à la voie 6, qui porte sur l’environnement alimentaire et le comportement des consommateurs, s’appliquent généralement aux difficultés rencontrées par la majorité des systèmes alimentaires7.

1. Intégrer l’action humanitaire, les politiques de développement et la consolidation de la paix, dans les zones touchées par des conflits

Il importe de rappeler que la majeure partie des personnes exposées à l’insécurité alimentaire chronique et un grand nombre des personnes souffrant de malnutrition vivent dans des pays touchés par l’insécurité ou des conflits. Il est donc impératif que des politiques, des investissements et des mesures adaptées aux situations de conflit et visant à réduire rapidement l’insécurité alimentaire et la malnutrition tout en tenant compte des conflits soient mis en œuvre en même temps que les mesures d’apaisement des conflits et qu’ils soient alignés sur les efforts à long terme de développement socioéconomique et de consolidation de la paix1. Dans les situations de conflit violent, les systèmes alimentaires sont souvent fortement perturbés à tous les niveaux, ce qui compromet l’accès des populations à des aliments nutritifs. Les dispositifs de réponse aux crises et de protection sociale mis en place pour assurer des niveaux minimaux de sécurité alimentaire et de nutrition prévoient généralement des programmes d’aide alimentaire d’urgence, une aide d’urgence visant à fournir de l’eau propre, des services de santé et d’assainissement de qualité et des interventions qui permettent de préserver les moyens d’existence.

Au Yémen, le conflit est le principal facteur à l’origine d’une situation grave d’insécurité alimentaire et de malnutrition, qui exige une intervention humanitaire à grande échelle. La malnutrition aiguë a atteint des niveaux record et touche la moitié des enfants de moins de 5 ans105. Parmi les causes premières, on trouve la forte prévalence de maladies transmissibles due à la mauvaise qualité de l’eau. Près de Sanaa, la capitale, à la suite d’une défaillance d’une grande installation de traitement des eaux usées, en 2017, de l’eau contaminée a été utilisée pour la production de légumes, ce qui a causé une épidémie de choléra et un manque de légumes frais dans les zones périurbaines. Dans le cadre d’une intervention d’urgence menée en 2018 et 2019, de petites stations peu coûteuses de traitement des eaux ont été construites et des systèmes d’irrigation au goutte-à-goutte consommant peu d’eau ont été installés pour irriguer plus de 60 hectares de terrains horticoles. L’intervention a eu de nombreux avantages, notamment la fourniture d’eau potable, des disponibilités en légumes non contaminés et le rétablissement des moyens d’existence97,106. Cet exemple montre qu’il importe de veiller à ce que les systèmes alimentaires locaux fournissent un accès minimum à des aliments sûrs et nutritifs, y compris dans les zones touchées par des conflits.

Dans les zones de conflit, les efforts de consolidation de la paix sont d’une importance capitale pour parvenir à la sécurité alimentaire et améliorer la nutrition à long terme. En outre, des programmes de renforcement de la résilience, ainsi que les dispositifs de protection sociale, doivent être mis en place sans attendre; autrement, les individus et les ménages risquent de se tourner vers des stratégies d’adaptation de plus en plus destructrices, et irréversibles (notamment la vente des moyens de production), qui mettent en péril leurs futurs moyens d’existence ainsi que leur sécurité alimentaire et leur nutrition1. Les pays touchés par des conflits ont particulièrement souffert de la pandémie de covid-19. Par exemple, en raison des restrictions imposées aux déplacements, il a souvent été difficile d’apporter aux réfugiés et aux personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays l’assistance humanitaire et d’autres formes d’appui dont ils avaient besoin pour accéder à des aliments nutritifs en quantité suffisante.

De graves crises économiques peuvent se produire lorsque les causes structurelles des conflits sont liées à la concurrence pour les ressources naturelles, notamment les terres productives, les forêts, la pêche et les ressources en eau. Des politiques complétées, le cas échéant, par des réformes institutionnelles et juridiques doivent être mises en place pour lutter contre ces causes et atténuer – et si possible prévenir – leurs incidences sur les systèmes alimentaires, la sécurité alimentaire et la nutrition, et l’économie en général. Dans les situations de crise prolongée, en particulier, où les conflits, tout en persistant, peuvent s’atténuer par moment et où la population connaît de longues périodes de déplacement, il est vital de maintenir la production alimentaire et agricole, les chaînes d’approvisionnement alimentaire et l’accès des personnes à des aliments sains et nutritifs5.

Le scénario susmentionné s’applique à la Somalie, où la population connaît depuis 30 ans une crise prolongée ponctuée de graves périodes d’insécurité alimentaire et de malnutrition (y compris une famine en 2011), en plus des extrêmes climatiques (essentiellement des sécheresses et des inondations). Ces dernières années, des mesures qui s’imposaient ont été prises, par exemple face à l’insécurité alimentaire et à la malnutrition dues à la sécheresse qui, pendant la période 2017-2019, ont touché jusqu’à 6 millions de personnes, dont 900 000 enfants en situation de malnutrition aiguë107. Le programme Cash+, qui tient compte des enjeux nutritionnels, a été mis en place en 2018; il associe des transferts monétaires sur une longue durée, non assortis de conditions, et des mesures d’appui aux moyens d’existence afin de renforcer la résilience aux chocs futurs, tout en visant à préserver les capacités de production et les chaînes d’approvisionnement alimentaire108. Les ménages agricoles ont reçu des semences et des outils pour leur jardin potager et les pasteurs ont bénéficié d’un appui pour améliorer la santé de leurs bêtes et accroître la production de lait. Le programme a permis aux ménages de se nourrir plus facilement dans les situations d’urgence et a permis d’améliorer la qualité et la diversité de l’alimentation des familles, et aussi d’enrichir les connaissances nutritionnelles des participants grâce à la diffusion d’informations sur la nutrition et la sécurité sanitaire des aliments.

Face à l’escalade des conflits, aux déplacements, aux chocs climatiques et aux fluctuations des prix des produits de base dans le centre du Sahel (Burkina Faso, Mali et Niger), une approche pluridimensionnelle par système alimentaire a été adoptée. Selon cette approche, la production alimentaire, la transformation, la logistique, la vente au détail et la consommation contribuent à répondre aux crises qui touchent la sécurité alimentaire et la nutrition, mais aussi à renforcer les systèmes afin de mieux prévenir les futures crises, de mieux les gérer et de mieux y faire face. Au niveau de la production alimentaire, les agriculteurs reçoivent un appui sous la forme de moyens de production, d’une formation aux pratiques agricoles climato-intelligentes et d’un accès facilité aux marchés. Au niveau de la transformation des produits alimentaires, les capacités des groupes de femmes et des entreprises agricoles locales sont renforcées afin que ces acteurs puissent produire des aliments composés et des aliments de base enrichis, de façon à améliorer la qualité nutritionnelle des denrées alimentaires disponibles sur le marché. Au niveau de l’environnement alimentaire, en vue de prévenir la malnutrition, on s’attache à donner accès à des aliments nutritifs et à protéger les personnes contre les fluctuations des prix en distribuant des bons d’alimentation pour des aliments nutritifs qui sont disponibles au niveau local et qui autrement ne seraient pas abordables. En outre, des programmes visant à prévenir la malnutrition aiguë sont mis en place pour aider les femmes et les enfants vulnérables sur le plan nutritionnel. De nombreux points d’entrée sont donc exploités pour faire en sorte que des liens soient établis entre les systèmes alimentaires, les systèmes de santé et les systèmes de protection sociale et pour développer la capacité des pouvoirs publics d’améliorer la qualité et la sécurité sanitaire des aliments et d’analyser systématiquement les données sur les prix des aliments aux fins de la prise de décisions. De cette façon, les besoins urgents à court terme sont pris en charge et la résilience des individus, des ménages et des communautés est renforcée109.

Avant le conflit violent et meurtrier qui a éclaté récemment avec Israël, les conditions de sécurité en Palestine étaient déjà fragiles depuis des dizaines d’années, compromettant la sécurité alimentaire et la nutrition. Les restrictions imposées à la circulation des personnes et aux mouvements de biens, et un accès limité aux ressources naturelles et aux marchés internationaux, exerçaient de fortes pressions sur les systèmes alimentaires et les moyens d’existence. Malgré des circonstances éprouvantes, des efforts ont été faits pour renforcer la résilience des systèmes alimentaires dans un contexte de conflit périodique et face aux chocs sociaux, environnementaux et économiques. Des systèmes alimentaires ont été transformés en systèmes plus économes en ressources, plus diversifiés et axés sur les marchés, grâce à un renforcement des connaissances agricoles, des capacités de postproduction et de commercialisation, des chaînes de valeur et des coopératives de producteurs. Les résultats (avant le conflit récent) montrent, parmi les exploitations petites et moyennes qui bénéficient du projet, une amélioration de 12 pour cent de la productivité des terres, une hausse de 10 pour cent de la valeur marchande de la production, une réduction de 15 pour cent des coûts de production et une augmentation globale de 10 pour cent de la rentabilité97. La production de cultures à valeur élevée, conformément aux normes internationales de qualité et de sécurité sanitaire, et le renforcement des liens entre les petits producteurs (et les coopératives auxquelles ils appartiennent) et d’autres acteurs de la filière, y compris les distributeurs et les commerçants, ont entraîné une augmentation des recettes d’exportation, en plus de contribuer aux disponibilités en aliments nutritifs et sûrs sur les marchés locaux.

Sur la base des principales recommandations issues de l’édition 2017 du présent rapport, et de données plus récentes, le tableau 8 donne une courte liste des mesures les plus importantes à envisager pour intégrer l’action humanitaire, le développement et la consolidation de la paix, dans les zones touchées par des conflits.

TABLEAU 8
PRINCIPAUX DOMAINES D’ACTION ET OBJECTIFS S’AGISSANT D’INTÉGRER L’ACTION HUMANITAIRE, LE DÉVELOPPEMENT ET LA CONSOLIDATION DE LA PAIX DANS LES ZONES TOUCHÉES PAR DES CONFLITS
2. Accroître la résilience face aux changements climatiques dans l’ensemble du système alimentaire

Nos choix dans la manière dont nous produisons notre alimentation et dont nous utilisons nos ressources naturelles peuvent contribuer à un avenir qui sera bon pour le climat et où les hommes et la nature pourront coexister et prospérer110. Cet aspect est important non seulement parce que les systèmes alimentaires subissent les effets des phénomènes climatiques et de la dégradation de l’environnement, mais aussi parce qu’ils ont eux-mêmes une incidence sur l’état de l’environnement et sont un grand facteur de dérèglement climatique. Les efforts à cet égard doivent avoir pour priorité de protéger la nature, de gérer dans des conditions durables les systèmes de production et d’approvisionnement alimentaires existants et de remettre en état les environnements naturels111,112.

Les solutions trouvées exigent que l’on renforce les partenariats et que l’on dispose d’un financement pluriannuel à grande échelle, à l’appui, notamment: de programmes intégrés de réduction et de gestion des risques de catastrophe; de politiques d’adaptation aux effets du changement climatique; et de pratiques à court, moyen et long termes3 visant à atténuer les incidences de la variabilité du climat et des extrêmes climatiques, y compris sur la pauvreté et les inégalités persistantes113. En tenant compte du climat dans les investissements alimentaires et agricoles, on peut réduire les risques pour la sécurité alimentaire associés aux extrêmes climatiques, renforcer la résilience à long terme et améliorer les mécanismes d’adaptation le long des chaînes d’approvisionnement114.

La mise en œuvre de politiques et de programmes de résilience climatique exige que l’on adapte et ajuste des outils et des interventions, à savoir: des systèmes de suivi des risques et d’alerte rapide; des dispositifs de préparation aux situations d’urgence et de secours; des mesures de réduction de la vulnérabilité et de renforcement de la résilience; des mécanismes de protection sociale réactifs face aux chocs; des mécanismes de transfert des risques (y compris l’assurance contre les aléas climatiques) et de financement basé sur les prévisions; en plus de structures solides de gouvernance des risques dans le trio environnement-alimentation-santé3. Afin de pouvoir être utilisés, ces outils devront peut-être être encadrés par des lois. Les risques climatiques et l’insécurité alimentaire sont étroitement liés dans les zones rurales des pays en développement, où l’on a imaginé des régimes d’assurance des moyens de production spécialement pour les ménages pauvres ou vulnérables. Il n’est pas facile de bien faire fonctionner les marchés de la micro-assurance mais, d’après les analyses, les gains potentiels pourraient être considérables si on parvient à résoudre les problèmes que cela pose115.

En Zambie, de nouvelles initiatives ont été prises pour améliorer la résilience face aux changements climatiques, notamment la création d’une assurance agricole à destination des ménages vulnérables. Les ménages qui adoptent des techniques d’agriculture de conservation ont la possibilité de prendre une assurance agricole, ce qui leur permet d’investir dans des projets plus risqués, susceptibles de rapporter davantage. Les assurances agricoles contribuent à renforcer la résilience face aux changements climatiques, mais pourraient aussi réduire la pauvreté, accroître la sécurité alimentaire et améliorer la nutrition. D’autres pays ont mis au point différents types de régimes d’assurance agricole qui ciblent spécifiquement les petits exploitants pauvres ou vulnérables.

Les régimes d’assurance contre les risques de catastrophes agricoles sont coûteux et comportent certes des difficultés (notamment des contraintes infrastructurelles, réglementaires et socioéconomiques), mais en les intégrant aux programmes de protection sociale, on peut accroître la résilience des petits exploitants et réduire la pauvreté rurale. On peut aussi faire baisser le coût des mécanismes de protection sociale existants et renforcer les capacités de planification des organismes publics s’agissant d’atténuer et de transférer les risques associés aux catastrophes naturelles. Ces avantages ont été mis en évidence par un certain nombre de régimes efficaces mis en place ces dernières années, par exemple un programme d’assurance bétail indicielle en Éthiopie et au Kenya115. De même, au Mexique, le programme CADENA a élargi l’accès des petits producteurs à l’assurance agricole au moyen d’un régime public-privé subventionné qui encourage le secteur privé de l’assurance à participer à la petite agriculture en proposant une assurance contre un large éventail de risques liés au climat116.

Une approche qui s’est révélée efficace pour renforcer la résilience face aux changements climatiques est le passage à l’agriculture climato-intelligente, qui accroît la résilience de plusieurs façons au moyen d’approches tenant compte du climat et avantageuses sur le plan socioéconomique. Ces approches donnent des résultats positifs sur trois fronts de la transformation des systèmes alimentaires: l’agriculture climato-intelligente accroît durablement la productivité agricole et les revenus, renforce la résilience face aux effets du changement climatique et réduit les émissions de gaz à effet de serre117.

En République démocratique populaire lao, des pratiques agricoles diversifiées et qui offrent une résistance face aux aléas climatiques ont été introduites en 2016 par l’intermédiaire d’écoles pratiques d’agriculture et d’écoles de nutrition destinées aux agriculteurs. Ces pratiques ont eu des retombées positives sur la conservation des sols, la biodiversité, les revenus et la nutrition. En particulier, des approches communautaires fortement axées sur l’autonomisation des femmes ont permis d’accroître le pouvoir d’achat et d’améliorer la diversité des apports alimentaires chez les femmes et les enfants, en plus d’avoir des effets positifs sur la santé des enfants97.

En Éthiopie, pendant la période 2015-2020, un projet d’agriculture climato-intelligente destiné aux femmes a fait augmenter les revenus tirés des cultures, tout en réduisant le risque de déficit vivrier auquel beaucoup de participantes étaient auparavant exposées. D’autres exemples, partout dans le monde, ont montré que l’adoption de pratiques agricoles durables augmentait la productivité et la résilience des systèmes alimentaires, tout en contribuant à réduire la pauvreté, l’insécurité alimentaire et la malnutrition3.

L’accès à l’eau est essentiel pour que les petits agriculteurs puissent devenir plus résilients face au climat et puissent produire dans des conditions plus équitables et plus durables. On estime que 77 pour cent des petites exploitations des pays à revenu faible ou intermédiaire sont situées dans des régions pauvres en eau, tandis que seuls 37 pour cent ont accès à l’irrigation118. Dans les zones arides de la région du Sahel, le changement climatique a aggravé l’irrégularité des précipitations et d’autres extrêmes climatiques, comme les sécheresses et les inondations à répétition. Les conséquences ont été dévastatrices pour les ménages ruraux les plus pauvres, qui sont devenus plus vulnérables et peinent à faire face à ces chocs. Une gestion efficace, durable et équitable des ressources en eau est plus que jamais un objectif prioritaire à atteindre si l’on veut améliorer la résilience, la sécurité alimentaire et la nutrition des communautés vulnérables119. De nombreuses études ont montré que les investissements dans les techniques de récupération de l’eau et les infrastructures d’irrigation aboutissaient à des solutions gagnant-gagnant, car une utilisation plus efficiente des ressources en eau donne également de meilleurs rendements agricoles118.

À Kiribati, le changement climatique, l’accès limité à l’eau propre et le manque de fiabilité des importations alimentaires ont favorisé la malnutrition et une mauvaise alimentation. Un projet de développement communautaire a été lancé en 2014 en vue de fournir des infrastructures de collecte des eaux pluviales et une formation à la production alimentaire des ménages (potagers et élevages de volaille familiaux). Grâce au projet, d’après les informations communiquées par les ménages, les cas de diarrhée et de dysenterie ont diminué de 80 pour cent et l’accès à l’eau propre a augmenté de 90 pour cent120.

Les terres sont également une ressource naturelle qu’il faut impérativement prendre en compte pour renforcer la résilience face aux extrêmes climatiques. Nombre de producteurs vulnérables voient la qualité de leurs terres se dégrader, un phénomène qui est de plus en plus associé à la pauvreté et à l’insécurité alimentaire, et sont plus exposés aux effets du changement climatique. Une vaste majorité des personnes qui occupent des terres agricoles dégradées vit dans des pays à revenu faible ou intermédiaire121. En Éthiopie, un projet de remise en état des territoires mené de 2015 à 2020 a non seulement aidé à accroître la productivité des exploitations agricoles grâce à des mesures de conservation des eaux et des sols, mais a également donné aux agriculteurs accès aux marchés, augmentant leur potentiel de création de revenus. Les ménages ont fait état d’une plus grande sécurité alimentaire, le revenu moyen des familles a cru considérablement et les scores de diversité alimentaire minimale étaient plus élevés98. En Inde, un projet de remise en état des terres et d’intensification des cultures exécuté de 2012 à 2016 associait des systèmes traditionnels de stockage de l’eau (haveli) à des investissements dans les infrastructures et à des transferts de technologie. Les effets sur les terres dégradées et les terres pluviales ont été positifs: le rendement des cultures a augmenté de 10 à 70 pour cent et le revenu moyen des ménages a cru de 170 pour cent97,122. Cette stratégie a également permis de réalimenter les nappes phréatiques et ainsi d’améliorer la durabilité de l’utilisation de l’eau.

Les connaissances des peuples autochtones et leurs systèmes de gestion des territoires peuvent contribuer à améliorer la résilience face aux changements climatiques, sachant qu’ils ont permis à ces peuples de produire de la nourriture dans certains des environnements les plus hostiles et des écosystèmes les plus fragiles au monde112,123,124. Au Guatemala, depuis des années, le peuple autochtone Maya Ch’orti’, qui vit dans le couloir de la sécheresse (Corredor Seco), subsiste grâce à l’agriculture dans un environnement sec, mais l’intensification de la sécheresse causée par le changement climatique a fait grimper les taux d’insécurité alimentaire et de malnutrition. Un projet de reboisement et de gestion de l’eau mis en œuvre actuellement redynamise l’utilisation et la conservation d’espèces végétales et animales endémiques qui sont bien adaptées à l’environnement sec. Les Maya Ch’orti’ ont bénéficié de cet appui, ce qui a fait baisser le taux de retard de croissance de 51 pour cent du fait de la meilleure qualité de l’alimentation98.

En Colombie, les peuples autochtones Tikuna, Cocama et Yagua, qui vivent sur les rives du lac Tarapoto, ont fonctionné pendant des centaines d’années selon des systèmes alimentaires sophistiqués qui étaient adaptés à l’écosystème forestier et aquatique amazonien. Cette zone est par la suite devenue un site protégé relevant de la Convention de Ramsar112ap. Cependant, la croissance rapide des marchés alimentaires dans les zones urbaines a fait augmenter la demande de poisson et d’animaux sauvages et entraîné l’apparition de nouvelles méthodes de pêche et de chasse. Ces pratiques, et notamment le remplacement des pièges traditionnels par des fils de métal et de nylon, ne sont pas durables et ont mené à l’épuisement des stocks de poisson et du gibier. Sur la base des connaissances et des systèmes de gouvernance traditionnels autochtones, un accord de pêche communautaire a été élaboré, puis complété par un programme éducatif à l’intention des jeunes, afin de rétablir des pratiques de pêche durables. L’accord, qui s’appuie sur les droits collectifs, régit l’utilisation des outils de pêche, prévoit des interdictions temporaires de pêcher pour certaines espèces et fixe des normes de pêche112,125. Aujourd’hui, des populations de poissons en bonne santé sont une source essentielle de protéines dans un système alimentaire autochtone prospère qui compte plus de 153 aliments différents – en grande partie issus de la faune et de la flore sauvages ou semi-sauvages126,127,128.

Le Brésil, le Kenya, Sri Lanka et la Turquie sont parmi les pays qui ont utilisé des variétés traditionnelles et des espèces sauvages comestibles issues des systèmes alimentaires locaux pour renforcer la résilience face aux changements climatiques97. Cette stratégie consiste à rechercher les améliorations qui peuvent être apportées aux chaînes de valeur alimentaires et à renforcer la capacité des agriculteurs de cultiver des espèces traditionnelles de qualité en quantité suffisante, et à informer les consommateurs pour stimuler la demande. Cette initiative tire également parti de liens avec d’autres programmes: au Brésil, les produits locaux sont désormais pris en compte dans la passation des marchés publics et servis dans les cantines scolaires. Au Kenya, des produits traditionnels ont été introduits dans le cadre de réseaux «de la ferme à l’école» qui fournissent des repas scolaires, et au Sri Lanka 32 commerces vendent désormais des produits issus de la culture de variétés traditionnelles129.

Les exemples ci-dessus de bonnes pratiques adoptées par des pays illustrent certaines des mesures novatrices prises ces dernières années pour renforcer la résilience face aux changements climatiques. On trouvera au tableau 9 les principaux domaines d’action et objectifs s’agissant d’accroître la résilience face aux changements climatiques dans l’ensemble du système alimentaire. L’édition de 2018 du présent rapport comprend un examen en profondeur des domaines d’action et des mesures qui permettent de renforcer la résilience face à la variabilité du climat et aux extrêmes climatiques.

TABLEAU 9
PRINCIPAUX DOMAINES D’ACTION ET OBJECTIFS S’AGISSANT D’ACCROÎTRE LA RÉSILIENCE FACE AUX CHANGEMENTS CLIMATIQUES DANS L’ENSEMBLE DU SYSTÈME ALIMENTAIRE
3. Renforcer la résilience des plus vulnérables face à l’adversité économique

En 2020, selon les estimations, le PIB mondial a reculé de 3,3 pour cent pendant la pandémie130. Des mesures visant à lutter contre les effets de la crise sanitaire, notamment un renforcement des programmes d’assistance sociale, d’emploi et d’assurance sociale, et des mesures d’urgence à grande échelle visant à protéger les économies partout dans le monde ont alors été prises et ont montré à quel point il importait de renforcer la résilience face à l’adversité économique13. Il est devenu évident qu’il était impératif de mettre en place des politiques, des institutions et des lois dans les domaines économique et social, ainsi que d’autres mesures, bien avant que ne surviennent les ralentissements et les fléchissements économiques. En effet, ces mesures sont destinées à contrecarrer les effets de cycles économiques défavorables au moment où ils se produisent, en particulier pour les groupes de population les plus vulnérables, et à maintenir l’accès aux aliments nutritifs et à une alimentation saine. Dans l’immédiat, les politiques, lois et investissements de ce type doivent prévoir des dispositifs de protection sociale et des services de soins de santé primaires, et aider les ménages à percevoir des revenus et à disposer de moyens d’existence suffisants grâce à des programmes d’assistance sociale et à des politiques dynamiques visant le marché du travail.

Les programmes de protection sociale jouent un rôle central dans les mesures prises par les pouvoirs publics face aux conséquences de la pandémie sur les revenus et les moyens d’existence. En mai 2021, plus de 200 pays et territoires avaient mis en œuvre au moins une initiative de protection sociale, essentiellement sous la forme d’aides en espèces ou en nature, d’annulations ou de reports d’obligations financières, et de règlements relatifs au travail. Au total, plus de 1,5 milliard de personnes dans le monde ont bénéficié de ces mesures13. Il est important de noter que, en grande partie du fait de contraintes financières, nombre de mesures de protection sociale liées à la covid-19 avaient une portée restreinte, prévoyaient des aides modestes et ne s’appliquaient que pour une courte durée. Par exemple, les programmes de transferts monétaires ont été mis en œuvre pour une durée moyenne de quatre mois seulement. Au Timor-Leste, l’un des pays les plus pauvres au monde, une initiative de transfert monétaire universel a été lancée en juin 2020, suivie d’une subvention de trois mois destinée aux travailleurs indépendants et aux travailleurs du secteur informel13, ce qui a aidé à amortir le choc sur les revenus, subi par la population en raison des mesures appliquées pendant la pandémie131.

Au Panama, un programme interministériel visant à épauler les familles touchées par la pandémie a permis d’apporter une aide en nature à certaines des populations les plus vulnérables. Il fournit des aliments variés et nutritifs, notamment des aliments d’origine animale, des légumes, des fruits, des racines et des tubercules, qui sont obtenus directement auprès de producteurs nationaux. En Jamaïque, on a soutenu les moyens d’existence ruraux en renforçant en 2020 le mécanisme de passation des marchés publics, l’accent étant mis sur les ménages agricoles dirigés par des femmes. En outre, des aides en nature sous la forme d’aliments frais cultivés localement ont été distribuées aux bénéficiaires du programme, ce qui a contribué aux revenus et aux apports alimentaires des ménages.

Au Brésil, la fermeture obligatoire des écoles suite à la pandémie a mis en péril la poursuite d’un programme national d’alimentation scolaire qui vient en aide à des millions de bénéficiaires. Le programme a rapidement été modifié afin que les aides alimentaires en nature soient distribuées directement au domicile des enfants. Même dans ces circonstances encore plus éprouvantes, les paniers alimentaires comprennent au moins 30 pour cent de produits frais d’origine locale, conformément à la loi brésilienne relative aux repas scolaires97.

Avant la pandémie, les programmes d’alimentation scolaire venaient en aide à 388 millions d’enfants dans le monde, ce qui en fait l’un des plus grands dispositifs de protection sociale. De 2013 à 2020, le nombre d’enfants qui ont reçu des repas par l’intermédiaire de programmes scolaires a augmenté de 9 pour cent dans le monde et de 36 pour cent dans les pays à faible revenu. Cette croissance traduit une institutionnalisation généralisée de ces programmes. En effet, 80 pour cent des pays ont intégré l’alimentation scolaire dans leurs politiques (contre 42 pour cent en 2013) et 90 pour cent du financement des programmes provient des budgets nationaux132. L’importance des programmes alimentaires et nutritionnels menés au niveau des écoles a été mise en exergue en 2020 et en 2021 lorsque des millions d’enfants dans le monde ont dû sauter des repas à cause de la fermeture des écoles suite à la covid-19. À ce jour, 27 pays n’ont pas rouvert leurs écoles; sept d’entre eux disposent d’importants programmes scolaires d’alimentation et de nutrition.

Dans plusieurs pays, en vue de mieux institutionnaliser les programmes d’alimentation scolaire, des approches novatrices sont adoptées, comme l’alimentation scolaire issue de la production locale et les jardins potagers scolaires, qui permettent d’améliorer l’état nutritionnel des enfants scolarisés tout en donnant accès à un plus grand stock d’aliments nutritifs abordables. D’autres avantages qui découlent de ces initiatives sont la sensibilisation à l’importance d’une alimentation saine et l’orientation de la demande alimentaire des ménages vers des aliments plus nutritifs. On trouvera à l’encadré 9 des arguments en faveur d’une alimentation scolaire issue de la production locale en tant que mesure de transformation.

En Éthiopie, une autre initiative novatrice de protection sociale donne accès en ligne à des bons d’alimentation mensuels, dont le montant est adapté à la taille du ménage et se fonde sur le coût d’une alimentation nutritive. Dans les zones rurales, les mères d’enfants de moins de 2 ans reçoivent des bons qui leur permettent d’acheter des fruits, des légumes et des œufs frais. Ces bons sont valables auprès de commerçants locaux, qui ont eux-mêmes reçu une formation en vue d’améliorer la qualité et la sécurité sanitaire de leurs produits. Pour compléter cette initiative, des changements de comportement sont encouragés par des activités de conseil au niveau communautaire et des campagnes médiatiques qui visent à promouvoir la diversification de l’alimentation et de meilleures pratiques de soins et à accroître la demande de fruits et de légumes frais. D’après une évaluation externe, le programme de bons s’est traduit par une augmentation des bénéfices des détaillants (jusqu’à 40 pour cent d’augmentation), la création de chaînes d’approvisionnement plus courtes, et une plus grande diversité des apports alimentaires des mères et des enfants97.

Au Kirghizistan, l’approche Cash+ appliquée actuellement vise à renforcer les effets du programme national de transferts monétaires. Parmi les résultats positifs observés au niveau des ménages, on compte l’accroissement et la diversification de la production alimentaire destinée à la consommation familiale et une plus grande participation aux activités rémunératrices. Soixante-quatorze pour cent des ménages ont vu leur productivité agricole s’accroître et 90 pour cent des bénéficiaires ont amélioré la diversité de leur alimentation et leurs résultats nutritionnels, aussi bien les mères que les enfants98.

Alors que les pays se relèvent de la pandémie de covid-19, il est vital de maintenir des niveaux adéquats de dépenses publiques consacrées aux systèmes de santé et de protection sociale. Toute coupe budgétaire risquerait d’aggraver les difficultés que connaissent déjà les groupes défavorisés, de nuire au bon fonctionnement des systèmes, d’augmenter le risque de mauvais résultats en matière de santé et de nutrition, d’exercer des pressions budgétaires supplémentaires et d’entamer les acquis du développement139,140. À moyen terme, les politiques adoptées doivent être institutionnalisées dans le cadre de systèmes nationaux de protection sociale et l’accès aux services sociaux doit être élargi5. En outre, d’autres mesures innovantes de renforcement de la résilience économique doivent être prises, notamment l’élargissement de l’accès à l’assurance agricole au profit des producteurs de denrées alimentaires, dont beaucoup sont vulnérables face aux chocs climatiques et économiques141. L’assurance agricole (comme évoqué au titre de la voie 2) peut contribuer à réduire la pauvreté, en particulier si elle est associée à des dispositifs de protection sociale142.

Les exemples de pays qui ont suivi cette troisième voie ont montré qu’il importait de disposer d’un certain nombre de mécanismes novateurs de protection sociale visant en particulier à renforcer la résilience des populations les plus vulnérables face aux ralentissements et aux fléchissements économiques, importance qui a aussi été mise en exergue pendant la pandémie. Il existe de nombreuses autres mesures à plus long terme qui doivent être envisagées pour renforcer la résilience économique, comme on l’a vu en détail dans l’édition 2019 du présent rapport. Plusieurs des principaux objectifs et domaines d’action sont présentés au tableau 105.

TABLEAU 10
PRINCIPAUX DOMAINES D’ACTION ET OBJECTIFS S’AGISSANT DE RENFORCER LA RÉSILIENCE DES PLUS VULNÉRABLES FACE À L’ADVERSITÉ ÉCONOMIQUE
4. Intervenir le long de la chaîne d’approvisionnement alimentaire en vue de réduire le coût des aliments nutritifs

Il faut intervenir tout au long des chaînes d’approvisionnement alimentaire si l’on veut accroître les disponibilités d’aliments sûrs et nutritifs et faire baisser leur coût, essentiellement pour mettre à la portée des gens une alimentation saine plus abordable. Cela suppose de mettre en place un ensemble cohérent de politiques et d’investissements, de la production à la consommation, pour réaliser des gains d’efficience et réduire les pertes et le gaspillage de denrées alimentaires et contribuer à la concrétisation de ces objectifs7. Des mesures d’incitation doivent viser, entre autres, à encourager la diversification de la production dans les secteurs alimentaire et agricole en faveur des aliments nutritifs, notamment les fruits, les légumes, les légumineuses et les céréales, ainsi que des aliments d’origine animale et des variétés bio-enrichies, en plus de stimuler les investissements dans l’innovation, la recherche et la vulgarisation pour augmenter la productivité. À d’autres niveaux de la chaîne d’approvisionnement, on peut améliorer la qualité nutritionnelle des produits alimentaires et des boissons en enrichissant après récolte les aliments de base, dans le respect des directives internationales143,144,145,146. Les fabricants et les détaillants de produits alimentaires peuvent également revoir la composition de leurs produits afin d’éliminer les acides gras trans industriels et de réduire la teneur en graisses saturées, en sucres et en sel (voir également la voie 6).

L’enrichissement et le bio-enrichissement des aliments permettent, pour un bon rapport coût-efficacité, de réduire les carences en micronutriments tout en augmentant les disponibilités en aliments nutritifs – et en faisant baisser le coût de ces derniers. L’enrichissement des aliments de base a été un moyen efficace d’apporter des micronutriments à des populations entières (voir notamment l’iodation universelle du sel et l’enrichissement en fer et en acide folique des farines de blé et de maïs). Au Pérou, l’enrichissement du riz au moyen de neuf vitamines et minéraux a été intensifié et intégré au programme d’alimentation scolaire et à d’autres programmes de protection sociale. Face à la forte incidence des carences en micronutriments et de l’anémie dans tous les groupes socioéconomiques, le pays a approuvé en 2021 la loi nationale relative à l’enrichissement du riz.

Au Zimbabwe, dans le cadre d’un programme qui promeut l’agriculture de conservation aux fins de la résilience face aux changements climatiques et de la productivité agricole, des agriculteurs ont adopté des variétés bio-enrichies. Les hausses de la productivité dues à l’adoption de techniques résistantes aux aléas climatiques ont également accru les disponibilités en micronutriments pour les ménages qui bénéficient du programme. Enfin, au Rwanda, des haricots bio-enrichis en fer ont été introduits et rapidement adoptés par les agriculteurs. À la fin de 2018, on estimait que 20 pour cent des haricots produits dans le pays étaient bio-enrichis en fer et que 15 pour cent de la population consommait ce type de haricot. La consommation régulière de haricots enrichis peut couvrir jusqu’à 80 pour cent des besoins quotidiens en fer. Les variétés bio-enrichies en fer ont par ailleurs un rendement de 20 pour cent supérieur à celui d’autres variétés, ce qui en fait une option intéressante pour les agriculteurs97.

Les petites et moyennes entreprises (PME) jouent un rôle central dans les systèmes alimentaires locaux à assise communautaire et peuvent contribuer à un approvisionnement adéquat en aliments sûrs et nutritifs. Leur contribution à la sécurité alimentaire et à une bonne nutrition est de plus en plus reconnue147. Par exemple, en Afrique, les PME spécialisées dans la transformation des aliments se fournissent à 95 pour cent auprès de petits producteurs, preuve de l’importance de ces entreprises dans le développement et la transformation de l’ensemble du système alimentaire148. De nombreuses PME ont subi de plein fouet les retombées économiques des confinements imposés pendant la pandémie de covid-19149, mais du fait même de leur implantation locale elles sont essentielles pour reconstruire en mieux à l’issue des crises et approvisionner en suffisance les populations en produits sûrs et nutritifs.

Au Kenya, les PME de la filière fruits et légumes ont reçu l’appui des pouvoirs publics150, l’objectif étant de renforcer le rôle qu’elles jouent dans la promotion d’une alimentation saine prenant en considération la durabilité. Les mesures d’appui comprennent le renforcement des capacités en matière de contrôle de la qualité et de la sécurité sanitaire des aliments, l’amélioration de l’accès aux ressources financières et le resserrement des liens avec les marchés. De même, au Myanmar, les PME du secteur la production alimentaire ont bénéficié d’une assistance à la diversification des produits, sous la forme de transferts directs, d’un meilleur accès aux nouvelles technologies et d’une formation aux techniques de production durable. Plus de la moitié des participants au programme ont vu leurs revenus augmenter de 50 pour cent et ont élargi leur production, qui englobe désormais des légumes frais, ce qui a fait considérablement augmenter les disponibilités en aliments nutritifs sur les marchés locaux151. À Sao Tomé-et-Principe, un projet quinquennal de développement mené récemment a aidé des coopératives agricoles et des plantations familiales, par l’intermédiaire de partenariats public-privé, à commercialiser du cacao, du café et du poivre de qualité issus de l’agriculture biologique et à développer leurs ventes sur les marchés intérieurs et à l’exportation. L’évaluation de l’impact du projet a montré qu’il avait eu des effets positifs sur les revenus agricoles (qui ont augmenté de 46 pour cent) et sur la diversité alimentaire (qui s’est accrue de 5 pour cent)152.

L’urbanisation rapide qui s’opère à l’échelle mondiale exerce d’énormes pressions sur des chaînes d’approvisionnement alimentaire qui sont de plus en plus longues et qui doivent fournir des aliments nutritifs dans des conditions sûres et durables à des zones métropolitaines de plus en plus denses. Dans de nombreuses zones urbaines et périurbaines, la pauvreté et les inégalités font que les plus vulnérables ne peuvent accéder à des aliments nutritifs en quantité suffisante. En parallèle, l’évolution de l’environnement alimentaire et des modes de consommation a entraîné une hausse de l’excédent pondéral, de l’obésité et des maladies non transmissibles liées à l’alimentation. Les processus en jeu dans l’urbanisation créent des difficultés, mais offrent aussi des possibilités s’agissant de mettre en place des systèmes alimentaires plus inclusifs, plus durables sur le plan environnemental et qui donnent davantage accès à des aliments nutritifs153. Dans ce contexte, des politiques alimentaires urbaines adéquates et des liens solides entre les milieux ruraux et urbains sont indispensables pour transformer les systèmes alimentaires et rendre plus abordable une alimentation saine dans les zones urbaines et périurbaines (encadré 10)154. Les villes de petite taille et de taille moyenne peuvent contribuer de manière déterminante à renforcer les liens entre les milieux urbains et ruraux en raison de leur proximité avec les zones rurales environnantes (ce qu’on appelle la zone «fonctionnelle») et à relever les grands défis sociaux, économiques et environnementaux155. Des mesures de politique générale adaptées peuvent jouer un rôle décisif en aidant ces territoires à améliorer les moyens d’existence et à accroître la résilience des populations et des systèmes agroalimentaires. En outre, le développement des systèmes alimentaires dans l’espace fonctionnel est de nature à faire reculer durablement la pauvreté, l’insécurité alimentaire et la malnutrition, du fait que les systèmes alimentaires qui s’y trouvent doivent s’adapter à la croissance des villes et à l’évolution concomitante des modes d’alimentation, lesquels dépendent à leur tour des liens entre zones rurales et zones urbaines156.

L’agriculture urbaine peut contribuer à la diversité de l’alimentation et aux revenus des ménages157. Au Brésil, à Rio de Janeiro, un projet qui existe de longue date vise à créer des jardins urbains dans les zones d’habitat informel et dans les écoles. La production est consommée par les ménages participants et l’excédent est donné ou vendu aux quartiers voisins – les habitants ont ainsi accès à des aliments nutritifs et gagnent de l’argent. Comme dans bien des lieux, pendant la pandémie de covid-19, il est devenu très difficile de maintenir l’approvisionnement en aliments nutritifs dans les zones urbaines. En Équateur, les liens entre certaines zones de la ville de Quito où le nombre de cas de covid-19 est élevé et les agriculteurs de la province environnante ont été renforcés dans le cadre d’associations culturelles de quartier, qui ont créé un réseau de vente. Des paniers alimentaires sont envoyés par les agriculteurs puis livrés directement au domicile des acheteurs. Ces paniers contiennent des fruits et des légumes frais issus de l’agriculture biologique. Ainsi, les citadins ont accès à des aliments nutritifs et les agriculteurs vendent leurs produits dans des filières courtes, et donc pour un coût moindre. Ces pratiques ont été maintenues après le confinement dû à la pandémie, et de nouveaux réseaux se sont ainsi créés entre citadins et producteurs ruraux97.

Les exemples de pays qui ont suivi cette quatrième voie mettent en évidence certains des principaux domaines d’action, énumérés au tableau 11, qui consistent à intervenir tout au long de la chaîne d’approvisionnement alimentaire en vue de réduire le coût des aliments nutritifs. Des recommandations complémentaires à cette fin sont abordées plus en détails dans l’édition 2020 du présent rapport.

TABLEAU 11
PRINCIPAUX DOMAINES D’ACTION ET OBJECTIFS S’AGISSANT D’INTERVENIR LE LONG DE LA CHAÎNE D’APPROVISIONNEMENT ALIMENTAIRE EN VUE DE RÉDUIRE LE COÛT DES ALIMENTS NUTRITIFS
5. Lutter contre la pauvreté et les inégalités structurelles en veillant à ce que les interventions soient favorables aux pauvres et inclusives

Les possibilités d’échapper à la faim, à l’insécurité alimentaire et à la malnutrition sous toutes ses formes sont fortement limitées par la persistance et l’ampleur des inégalités. Il faut mettre en œuvre des politiques, des investissements et des lois qui s’attaquent aux inégalités structurelles sous-jacentes subies par les groupes de population vulnérables dans les zones rurales et urbaines, et améliorer l’accès de ces groupes aux ressources productives et aux nouvelles technologies. Environ 80 pour cent des personnes touchées par la pauvreté extrême vivent en milieu rural, où les taux de pauvreté sont trois fois supérieurs à ceux observés en milieu urbain. La pandémie de covid-19 a aggravé cette situation: elle a creusé les inégalités et a eu des répercussions en particulier sur la vie et le bien-être des pauvres des zones rurales160. Si elle est mise en œuvre comme il se doit, cette cinquième voie peut permettre de réduire la pauvreté extrême et les inégalités structurelles en accélérant la transformation des systèmes alimentaires dans des conditions qui soient favorables aux pauvres et inclusives.

Dans les zones rurales en particulier, la transformation des systèmes agroalimentaires crée des possibilités en faveur de certains des petits exploitants les plus pauvres qui ne sont pas bien intégrés aux chaînes de valeur alimentaires. En Asie du Sud-Est, la pauvreté rurale des petits agriculteurs est exacerbée par le manque d’accès aux ressources productives et une mauvaise intégration aux marchés, facteurs auxquels s’ajoutent les chocs liés au climat et les chocs économiques, ainsi que les épidémies périodiques de maladies végétales et animales97. Dans cette région, l’intégration des petits producteurs pauvres aux chaînes de valeur alimentaires a été facilitée par des partenariats public-privé-producteurs qui offrent des solutions contre la pauvreté et les inégalités structurelles, en particulier si ces partenariats sont appuyés par de meilleurs dispositifs de gouvernance et des plateformes multipartites97.

En Indonésie, en 2017, la production et la valeur totales du cacao ont chuté de 70 pour cent par rapport au pic atteint en 2009. Cette chute a durement frappé les revenus et les moyens d’existence des petits producteurs. En 2014, une approche multipartite visant l’ensemble de la chaîne de valeur a été introduite en vue de réduire le nombre de producteurs de cacao qui vivent sous le seuil de pauvreté et de leur donner les moyens de participer de façon plus efficiente et résiliente à la filière du cacao. L’approche, qui est axée sur les partenariats public-privé-producteurs et mobilise 150 000 petits exploitants, prévoit notamment les mesures suivantes: faciliter l’accès au financement et aux technologies, pour accroître la productivité; introduire des systèmes de traçabilité; octroyer des certifications, pour vendre les produits à meilleur prix; améliorer la transformation primaire; dispenser une éducation nutritionnelle; et monter des organisations d’agriculteurs. En cinq ans, les rendements du cacao ont augmenté de 73 pour cent et les petits exploitants, dotés de plus grands moyens, ont vu leurs revenus croître de plus de 200 pour cent97.

Au Viet Nam, 500 000 petits agriculteurs environ, pauvres pour la plupart, gagnent leur vie en produisant du café. À la mi-2020, les prix du café avaient chuté de 48 pour cent par rapport au pic atteint à la fin de 2016. Ils se sont depuis redressés mais restent instables. Afin d’atténuer la vulnérabilité des petits exploitants face aux chocs économiques et aux chocs liés au climat, des conseils ont été établis aux niveaux des provinces et des districts pour aider les petits producteurs de café à adopter des technologies plus avancées et de bonnes pratiques environnementales. Le recours à de meilleures pratiques a permis aux producteurs de faire certifier leur café et de le vendre plus cher, tout en renforçant leur résilience, qu’il s’agisse du climat ou des chocs économiques qui ne manqueront pas de survenir97.

Au Maroc, depuis une dizaine d’années, une approche territoriale transversale est mise en œuvre afin de lutter contre les inégalités régionales observées dans le pays161. Un grand programme d’investissement a transformé une vaste zone géographique de 5,2 millions d’habitants qui couvre 16 provinces. Il cible des oasis et des zones reculées de culture de l’arganier et a pour objectif de transformer la chaîne de valeur agroalimentaire du dattier et de l’arganier, deux cultures à valeur élevée. Avant le lancement du projet, la population était touchée par des niveaux élevés de pauvreté, d’analphabétisme et de malnutrition, associés à des conditions de vie éprouvantes et à une vulnérabilité dues aux menaces naturelles et environnementales (désertification, érosion du sol, rareté de l’eau, conditions météorologiques extrêmes)97. En dix ans, le programme d’investissement territorial et transversal a permis d’obtenir une hausse de 41 pour cent du PIB régional par habitant, une augmentation de 33 pour cent des revenus des agriculteurs et une diminution de 50 pour cent des taux de pauvreté, entre autres nombreux indicateurs de développement positifs.

Un autre projet visant à améliorer les moyens d’existence des habitants des zones reculées est l’initiative sur les produits du Partenariat de la montagne, qui a pour objet de renforcer la résilience des populations de montagne ainsi que leurs économies et leurs écosystèmes dans huit pays97. En donnant accès à un programme de certification et d’étiquetage fondé sur des approches éthiques et respectueuses de l’environnement, l’initiative promeut des chaînes de valeur courtes tout en veillant à la transparence et à la confiance entre les producteurs et les consommateurs, à l’indemnisation équitable des producteurs primaires, à la conservation de l’agrobiodiversité et à la préservation des techniques ancestrales utilisées dans plusieurs pays. En Bolivie, par exemple, des femmes qui produisent du miel certifié à l’aide d’une variété locale d’abeille ont pu renforcer leurs liens avec les marchés locaux, tout en préservant leurs traditions culturelles et la biodiversité locale.

Au Népal, sur la période 2011-2018, un projet agricole a été mené dans certaines des zones montagneuses les plus reculées de la province de Karnali, selon une approche visant l’ensemble de la chaîne de valeur, afin de rapprocher les producteurs des marchés pour ce qui est de l’information et de l’accès. Les mesures prises tendaient à rendre les nouvelles chaînes de valeur plus inclusives en levant les obstacles qui entravent généralement la participation des groupes sous-représentés, comme les femmes et les minorités ethniques. Le projet a permis d’augmenter de 32 pour cent les revenus annuels des groupes cibles, sachant que les revenus issus de la culture et de l’élevage ont connu des hausses de 47 pour cent et de 44 pour cent respectivement162. Les participants ont vu leur niveau d’insécurité alimentaire diminuer (de 9 pour cent) et leur score de consommation alimentaire augmenter (de 4 pour cent).

L’exemple du Népal illustre un grand thème commun à de nombreuses études de cas dont sont tirées les bonnes pratiques examinées ici, à savoir qu’il est capital de donner davantage de moyens, d’une façon ou d’une autre, aux groupes de population pauvres ou vulnérables, souvent des petits exploitants qui ont un accès limité aux ressources ou ceux qui vivent dans des zones reculées, si l’on veut opérer un changement transformationnel. Les mesures en ce sens varient énormément mais consistent en particulier à améliorer l’accès aux ressources productives (ressources naturelles, intrants et technologies agricoles, ressources financières, savoirs et éducation). D’autres mesures visent à renforcer les compétences de gestion (amélioration de la participation aux groupes de producteurs et aux coopératives), les programmes de certification (par exemple pour les produits locaux issus de l’agriculture biologique) et, surtout, l’accès à l’informatique et à la communication numérique.

Les effets de la pandémie de covid-19 ont également mis en lumière des inégalités structurelles et ont touché de façon disproportionnée les capacités des femmes en matière de production et de création de revenus. En effet, les femmes ont vu les possibilités économiques et l’accès aux aliments nutritifs dont elles jouissaient se réduire et leur charge de travail s’alourdir. Les mesures prises doivent donc tenir compte du rôle joué par les femmes dans les systèmes agroalimentaires et veiller à ce que les multiples besoins des femmes – en tant que garantes de la sécurité alimentaire des ménages, productrices d’aliments, gestionnaires d’exploitation, transformatrices, négociantes, salariées et entrepreneuses – soient satisfaits163. Au-delà de l’objectif d’égalité, les politiques et les interventions qui visent à renforcer le rôle des femmes dans les systèmes alimentaires et leur capacité de prise de décisions peuvent être un puissant moteur de la transformation des systèmes alimentaires164. Il a été clairement établi que la lutte contre les disparités entre femmes et hommes pouvait contribuer à accroître la productivité165, et de plus en plus de données attestent que l’autonomisation des femmes permet également d’améliorer la nutrition des enfants166. Les innovations qui tendent à accroître la capacité de production des femmes, directement ou indirectement, en leur laissant davantage de temps libre sont particulièrement efficaces. Il peut s’agir par exemple de rendre l’eau de consommation plus accessible. Cela permet aux femmes de se consacrer à des activités de production, comme la culture de fruits et de légumes destinés à la consommation familiale119.

L’exploitation du potentiel que représentent les jeunes peut considérablement contribuer à la transformation des systèmes alimentaires, en particulier dans les pays moins développés, où vivent plus de 80 pour cent des jeunes167. Les jeunes (soit les 15-24 ans) constituent environ 16 pour cent (1,2 milliard de personnes) de la population mondiale168 et, en tant qu’entrepreneurs potentiels, ils sont de futurs agents du changement. Pourtant, les jeunes d’aujourd’hui sont confrontés à de plus grandes contraintes. Ils ont plus de mal à accéder à des emplois décents169, aux ressources productives, au capital social et aux mécanismes de gouvernance qui façonnent les systèmes alimentaires170. Si l’on veut libérer le potentiel des jeunes dans les domaines de l’entrepreneuriat et de l’innovation, il est indispensable de renforcer leurs compétences et leur agencéité en leur proposant des programmes de formation et de mentorat et en mettant sous leurs yeux des exemples qu’ils auront envie de suivre171. Les jeunes entrepreneurs des systèmes agroalimentaires ont été particulièrement touchés par la pandémie. Celle-ci a aggravé les difficultés que les jeunes rencontraient déjà, notamment en limitant l’accès aux ressources productives, aux financements et aux marchés172. De façon générale, un manque de dynamisme économique et de possibilités d’emploi en milieu rural ne laisse pas d’autre choix aux jeunes que de migrer173. Il faut donc, dans le cadre d’initiatives plus larges destinées à stimuler les investissements responsables, prendre des mesures visant à élargir l’accès des jeunes aux ressources productives, aux financements, aux marchés et à la connectivité, ainsi qu’aux mécanismes de prise de décisions. Il faut également s’attaquer aux normes sociales qui empêchent les jeunes des zones rurales de trouver de nouveaux débouchés, en particulier ceux issus de groupes vulnérables, comme les jeunes femmes et les jeunes autochtones174.

On trouvera à l’encadré 11 d’autres éléments qui montrent que l’autonomisation des femmes et des jeunes pourrait accélérer la transformation des systèmes alimentaires et ainsi améliorer la sécurité alimentaire et la nutrition.

Les approches communautaires sont essentielles pour nouer des relations et renforcer la cohésion sociale, ainsi que pour faire grandir les aspirations et la confiance en soi et entre les personnes. Ces éléments sont indispensables pour lutter contre les inégalités structurelles et faire en sorte que les politiques, les lois et les interventions soient favorables aux pauvres et inclusives et donnent accès à des services équitables. Au Burundi, la Caisse de résilience est la manifestation d’une approche intégrée, communautaire et participative qui associe les dimensions technique, financière et sociale de sorte qu’elles se renforcent mutuellement. Dans le cadre de cette approche, des petits groupes de ménages ruraux sont formés aux pratiques agricoles durables dans des écoles pratiques d’agriculture, et un fonds d’épargne et de prêt géré par les communautés mêmes vient renforcer les capacités financières de celles-ci. Cette approche a permis d’augmenter la production agricole de 30 à 60 pour cent, et les revenus des ménages de 40 à 52 pour cent97.

Tout en prenant en considération la nécessité de lutter contre la pauvreté dans les milieux ruraux et urbains, les exemples de pays donnés au titre de cette cinquième voie soulignent combien il importe de lutter contre les inégalités structurelles (comme indiqué également au chapitre 3) en veillant non seulement à ce que les interventions soient favorables aux pauvres et inclusives, mais aussi à ce qu’elles donnent plus de moyens aux femmes et aux jeunes, pour accélérer la transformation des systèmes alimentaires. Les principaux domaines d’action et objectifs à cet égard sont présentés au tableau 12. On trouvera d’autres recommandations qui facilitent la mise en œuvre de cette voie dans l’édition 2019 du présent rapport.

TABLEAU 12
PRINCIPAUX DOMAINES D’ACTION ET OBJECTIFS S’AGISSANT DE LUTTER CONTRE LES INÉGALITÉS STRUCTURELLES EN VEILLANT À CE QUE LES INTERVENTIONS SOIENT FAVORABLES AUX PAUVRES ET INCLUSIVES
6. Renforcer l’environnement alimentaire et changer le comportement des consommateurs afin de favoriser des habitudes alimentaires ayant une incidence positive sur la santé humaine et sur l’environnement

L’accès aux aliments nutritifs et à une alimentation saine n’est pas qu’une question de coût et d’accessibilité économique. De nombreux éléments de l’environnement alimentaire déterminent les habitudes alimentaires, tandis que la culture, la langue, les pratiques culinaires, les savoirs, les modes de consommation, les préférences alimentaires, les croyances et les valeurs déterminent la façon dont les aliments sont obtenus, produits et consommés. L’évolution des habitudes alimentaires a eu des effets positifs mais aussi négatifs sur la santé humaine et l’environnement58. Les coûts sanitaires et environnementaux cachés qui caractérisent la plupart des systèmes alimentaires actuels sont négligés. Comme ils ne sont pas mesurés, pour la plupart, ils ne sont pas pris en compte, notamment dans les prix alimentaires, ce qui compromet la durabilité des systèmes alimentaires. En fonction du contexte propre au pays et des schémas de consommation dominants, il faut donc élaborer des politiques, des lois et des programmes d’investissement qui favorisent des environnements alimentaires plus sains et donnent aux consommateurs les moyens d’adopter des régimes alimentaires qui soient nutritifs, sains et sans risques pour la santé et aient moins d’incidences sur l’environnement7.

Les disponibilités accrues en aliments ultratransformés et la publicité dont ils font l’objet ont fait augmenter la consommation d’aliments mauvais pour la santé chez les personnes de tous âges. La promotion des substituts du lait maternel dissuade les mères d’allaiter et rend plus difficile la tâche des agents de santé auprès des mères allaitantes. Une part importante des opérations promotionnelles menées par les grandes entreprises agroalimentaires ciblent les jeunes, et la production locale à petite échelle d’aliments à densité énergétique élevée et à valeur nutritionnelle minimale se développe rapidement. Cette évolution de l’environnement alimentaire fait que l’incidence du surpoids et de l’obésité chez l’enfant croît aussi rapidement, voire plus rapidement, que l’incidence de l’insuffisance pondérale ne diminue, dans toutes les régions du monde en développement183.

Les jeunes adolescents sont les plus touchés par l’incidence croissante du surpoids, mais il convient de noter que ce problème trouve ses origines dans la petite enfance, si ce n’est pendant la grossesse. La publicité peut influencer les préférences alimentaires et la consommation, sans même que les consommateurs en aient conscience68. Il s’agit d’un des principaux facteurs à l’origine des habitudes alimentaires actuelles et les enfants y sont particulièrement sensibles184,185. Il faut imposer des restrictions aux opérations promotionnelles qui ciblent les enfants, dans le cadre d’un ensemble complet de mesures visant à créer des environnements alimentaires sains, qui permettent de faire des choix alimentaires compatibles avec une nutrition optimale et une bonne santé. Des directives internationales peuvent fournir des recommandations claires sur la promotion des substituts du lait maternel, des aliments complémentaires et des aliments et boissons destinés aux enfants plus âgés186,187,188. On trouvera à l’encadré 12 un aperçu des bonnes pratiques adoptées dans plusieurs pays.

Des stratégies législatives peuvent être appliquées pour améliorer la qualité nutritionnelle des aliments transformés les plus répandus, et ainsi favoriser une alimentation plus saine. À partir de 2004, l’Argentine a mis en œuvre plusieurs mesures pour réduire la teneur en acides gras trans industriels des aliments, notamment un effort de reformulation volontaire en coopération avec le secteur alimentaire, l’obligation de mentionner sur l’étiquette la présence d’acides gras trans et, par la suite, l’obligation de ne pas dépasser des niveaux maximums d’acides gras trans189. En 2015, 93 pour cent des aliments étaient conformes aux règles imposées190. Une coopération multisectorielle entre les ministères concernés et des instituts de recherche, des groupes de consommateurs et le secteur alimentaire a permis d’apporter un appui technique au processus.

En République de Corée, dans les «zones d’alimentation verte», créées en 2009-2010, il est désormais interdit de vendre des aliments à densité énergétique élevée et à valeur nutritionnelle minimale, y compris dans la restauration rapide, dans un rayon de 200 mètres autour des écoles. En 2017, des «zones d’alimentation verte» avaient été établies autour de plus de 90 pour cent des écoles. Cette initiative fait partie d’un ensemble de mesures réglementaires visant à garantir la qualité nutritionnelle des aliments consommés par les enfants et les adolescents. Parmi ces mesures figurent: l’introduction d’un étiquetage nutritionnel à code couleur sur les menus des chaînes de restauration; l’interdiction de vendre des boissons sucrées dans les établissements scolaires; des restrictions concernant la promotion auprès des enfants d’aliments riches en calories et en caféine et pauvres en nutriments; et la certification de la qualité des aliments destinés aux enfants191,193,193,194.

En vue d’encourager la consommation d’aliments nutritifs et d’éviter les effets nuisibles sur la santé humaine, la composition de certains aliments a été reformulée195. Les aliments visés sont ceux qui menacent le plus la santé humaine, en particulier ceux qui contiennent des graisses saturées ou des acides gras trans, des sucres ou du sel. Au Koweït, l’autorité chargée de l’alimentation et de la nutrition a constaté que le pain produit localement était une source importante de sel dans l’alimentation de la population et a demandé aux minoteries et aux boulangeries publiques, qui produisent la majorité du pain consommé dans le pays, de réduire progressivement sa teneur en sel196. La teneur en sel du pain blanc non levé a été réduite de 10 pour cent en deux mois et de 20 pour cent en un an197.

De nombreux pays ont vu leur système alimentaire se transformer rapidement du fait de la mondialisation7. Ces dernières décennies, l’intensification des échanges internationaux de produits alimentaires et agricoles a largement contribué à garantir un approvisionnement suffisant en aliments de base, tout en permettant d’accéder à des aliments nutritifs variés, en particulier dans les contextes où les disponibilités en fruits et en légumes frais sont susceptibles de baisser considérablement pendant une partie de l’année. Or, les politiques commerciales, notamment les mesures commerciales protectionnistes, peuvent avoir une incidence sur la disponibilité et le coût des aliments nutritifs sur les marchés locaux, ainsi que sur la disponibilité et le prix des aliments à densité énergétique élevée. De même, si les mesures commerciales non tarifaires peuvent aider à améliorer la sécurité sanitaire, la qualité et la valeur nutritionnelle de l’alimentation, elles peuvent aussi avoir pour effet d’accroître le coût des échanges et donc le prix des aliments, ce qui rend une alimentation saine moins abordable.

Au Pérou, par exemple, l’accord de libre-échange avec les États-Unis d'Amérique a éliminé un droit de douane de 25 pour cent qui était appliqué aux boissons non alcoolisées en provenance des États-Unis, entraînant une augmentation des flux d’investissement, suivie d’une hausse de 122 pour cent de la production de boissons non alcoolisées au Pérou (jus, eau en bouteille et boissons énergétiques)215. La consommation de boissons sucrées a augmenté et a fini par se stabiliser à des niveaux élevés. Dans le cadre d’une stratégie nationale complète de prévention des maladies non transmissibles, en particulier au vu de la prévalence croissante du surpoids et de l’obésité, le Pérou a augmenté les taxes sur les boissons sucrées216. Depuis 2019, un régime fiscal à plusieurs niveaux – qui prévoit des taxes plus élevées sur les boissons à plus forte teneur en sucre – est en vigueur. Les taxes de ce type freinent en principe les achats des consommateurs, en particulier si elles sont associées à des avertissements obligatoires placés sur le devant des emballages, et elles peuvent aussi fortement encourager le secteur à revoir la composition des produits afin d’en réduire la teneur en sucre.

Un certain nombre de mesures en matière de nutrition peuvent accroître les avantages et limiter au maximum les risques que représente l’intensification du commerce et de l’investissement dans les systèmes alimentaires mondiaux (encadré 13).

Le tableau 13 récapitule les principaux domaines d’action, y compris les lois et les règlements, qui permettent de renforcer l’environnement alimentaire et de changer le comportement des consommateurs afin de favoriser des habitudes alimentaires ayant une incidence positive sur la santé humaine et sur l’environnement. On trouvera d’autres recommandations qui ont trait à cette voie d’action dans l’édition 2020 du présent rapport.

TABLEAU 13
PRINCIPAUX DOMAINES D’ACTION ET OBJECTIFS S’AGISSANT DE RENFORCER L’ENVIRONNEMENT ALIMENTAIRE ET DE CHANGER LE COMPORTEMENT DES CONSOMMATEURS AFIN DE FAVORISER DES HABITUDES ALIMENTAIRES AYANT UNE INCIDENCE POSITIVE SUR LA SANTÉ HUMAINE ET SUR L’ENVIRONNEMENT
4.2 Créer des portefeuilles de politiques et d’investissements cohérents

Principaux éléments des portefeuilles de politiques et d’investissements

Comme on l’a montré plus haut et comme illustré à la figure 28, l’élaboration de portefeuilles de politiques et d’investissements complets commence par une analyse de la situation dans son contexte. Cette analyse permet de bien saisir la réalité du pays, notamment la nature et l’intensité des principaux facteurs qui jouent sur les systèmes alimentaires, de faire le point de la sécurité alimentaire et de la nutrition, et de mettre en évidence les acteurs, les institutions et les mécanismes de gouvernance pertinents. Elle doit aider le pays à décider quelles voies emprunter pour transformer les systèmes alimentaires, compte tenu des principaux facteurs de l’insécurité alimentaire et de la malnutrition, et quelles mesures et quels investissements inscrire dans les portefeuilles (figure 29, colonne de gauche).

Figure 29
PRINCIPAUX ÉLÉMENTS D’UN PORTEFEUILLE DE POLITIQUES ET D’INVESTISSEMENTS

En raison de la nature intersectorielle des interventions nécessaires pour transformer les systèmes alimentaires et parvenir à la sécurité alimentaire et à une meilleure nutrition (voir les exemples présentés dans la section précédente), il est essentiel que les politiques et les investissements soient cohérents d’un système à l’autre – agroalimentaire, environnement, santé, protection sociale et autres systèmes, dont les systèmes éducatif, énergétique, commercial et financier –, afin d’obtenir un changement qui soit véritablement porteur de transformation (figure 29, colonne de droite). La cohérence s’impose non seulement pour bien concevoir les portefeuilles, mais aussi pour les mettre en œuvre efficacement et rapidement, ce qui suppose des mécanismes de gouvernance multipartites et le soutien des institutions. Outre des ressources productives et financières, la transformation du système requiert la mise au point et la production de technologies, de données et d’innovations (et l’accès à celles-ci), qui seront des accélérateurs des processus transformationnels (figure 29, colonne de droite).

La section précédente était consacrée à l’examen des meilleures pratiques et mesures à mettre en place le long des six voies possibles de transformation des systèmes alimentaires. Dans la présente section, nous insisterons sur la cohérence nécessaire et sur le rôle des accélérateurs. On y présentera aussi brièvement un certain nombre d’approches par système, cadres utiles à l’élaboration de portefeuilles cohérents et à l’instauration de mesures et d’investissements multisectoriels visant la sécurité alimentaire et des niveaux de nutrition plus élevés.

Cohérence des politiques et des investissements entre les systèmes alimentaires et les autres systèmes

Les performances générales des systèmes alimentaires dépendent de leur cohérence et de leurs interactions avec plusieurs autres systèmes, en particulier avec le système agroalimentaire, mais aussi avec l’environnement, le système de santé et le système de protection sociale. D’autres systèmes jouent un rôle central dans le système alimentaire, qu’il s’agisse de donner accès aux connaissances et aux compétences nécessaires à la production alimentaire, de dispenser une éducation nutritionnelle aux écoliers ou encore de sensibiliser les consommateurs pour que ces derniers fassent des choix alimentaires éclairés qui ne nuisent pas à la santé ni à l’environnement. Les systèmes énergétiques sont indispensables au fonctionnement des systèmes alimentaires car ils fournissent l’énergie nécessaire à la production, au transport, à la transformation, au stockage et à la consommation des aliments. S’agissant de la transformation des systèmes alimentaires, les systèmes énergétiques sont déterminants dans l’amélioration de la productivité et la réduction des pertes et du gaspillage de denrées alimentaires. Une efficacité énergétique accrue pourrait contribuer à réduire le coût d’une alimentation saine et nutritive.

Du fait des liens importants qui existent entre les différents systèmes, le système alimentaire apparaît comme un espace commun où l’on peut œuvrer à des résultats positifs mutuels pour tout un éventail d’objectifs, de façon efficace et efficiente57. Dès lors, on ne doit pas se contenter de définir des portefeuilles de politiques et d’investissements pour la transformation des systèmes alimentaires, il faut aussi veiller à la cohérence des politiques, entre les différentes voies de transformation décrites plus haut, mais aussi entre les autres systèmes sur lesquels repose la viabilité à long terme des systèmes alimentaires (voir la figure 30).

Figure 30
ASSURER LA COHÉRENCE ET LA COMPLÉMENTARITÉ ENTRE LES SYSTÈMES – AGROALIMENTAIRE*, ENVIRONNEMENT, SANTÉ, PROTECTION SOCIALE ET AUTRES** – EN VUE DE TRANSFORMER LES SYSTÈMES ALIMENTAIRES, POUR QUE LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE, UNE MEILLEURE NUTRITION ET UNE ALIMENTATION SAINE SOIENT UNE RÉALITÉ POUR TOUS

Les systèmes agroalimentaires regroupent les systèmes agricoles et alimentaires et englobent l’ensemble complet des acteurs et l’ensemble des activités interdépendantes qui apportent une valeur ajoutée, à savoir la production primaire de produits alimentaires et non alimentaires dans les secteurs de l’agriculture, de la pêche et des forêts, ainsi que le stockage, le regroupement des produits, la manutention après récolte, le transport, la transformation, la distribution, la vente, la consommation et l’élimination des déchets224. Les systèmes agroalimentaires et les filières non alimentaires interagissent lorsque les producteurs achètent des intrants agricoles et lorsqu’ils vendent des intrants intermédiaires destinés à la fabrication de produits de base non alimentaires (maïs pour le biocarburant ou coton pour le textile, par exemple). Comme indiqué au chapitre 3, la question de la transformation des systèmes agroalimentaires, primordiale, est traitée de façon approfondie dans l’édition 2021 de La Situation mondiale de l’alimentation et de l’agriculture224 et sort du cadre du présent rapport.

Dans le processus d’élaboration de portefeuilles de politiques et d’investissements, il importe de veiller à la cohérence entre ceux qui sont spécifiquement axés sur les systèmes alimentaires et ceux qui relèvent plus largement des systèmes agroalimentaires, pour plusieurs raisons, la moindre n’étant pas les millions de ménages dont les revenus et l’emploi dépendent des systèmes agroalimentaires. Les systèmes agroalimentaires et les systèmes alimentaires (lesquels font partie intégrante des premiers) sont clairement touchés par les mêmes facteurs, présentés au chapitre 3, et ils sont influencés et façonnés par les mêmes environnements sociaux, économiques et naturels au sein desquels se déroule la production.

L’interaction des systèmes environnementaux avec les systèmes alimentaires se fait principalement au niveau de la production, car les premiers offrent les conditions environnementales et les éléments nutritifs nécessaires à l’agriculture, à la pêche et aux forêts en vue de la production alimentaire. Par ailleurs, les systèmes de production alimentaires et agricoles ont des effets sur l’environnement à divers niveaux – biodiversité, qualité des sols et des eaux, santé des animaux et des végétaux, émissions de gaz à effet de serre, toxicité, pertes et gaspillages de nourriture, notamment. Apparaît alors de plus en plus clairement la nécessité de disposer de modèles de production et d’approvisionnement respectueux de la nature qui permettent de produire plus avec moins, afin d’assurer un approvisionnement suffisant en aliments nutritifs à une population mondiale qui continuera de croître au cours des prochaines décennies. Une production respectueuse de la nature suppose des mesures visant trois objectifs liés entre eux: la protection de la nature, la gestion durable des systèmes de production et d’approvisionnement alimentaires existants, et la remise en état des environnements naturels111.

  • Protection de la nature: L’inefficacité des systèmes actuels est telle qu’il est possible de maintenir les mêmes niveaux de production en arrêtant d’empiéter sur les écosystèmes naturels et en protégeant les zones peu productives et riches en biodiversité, telles que les tourbières et les mangroves. Selon des prévisions mondiales récentes, il serait possible de remettre en état jusqu’à 40 pour cent des terres agricoles dans le monde sans que la production s’en trouve réduite, à condition d’optimiser l’utilisation des intrants et la distribution de la production, dans le respect des «points chauds» de la biodiversité225.

  • La gestion durable des systèmes de production et d’approvisionnement alimentaires existants permet de raviver la capacité des écosystèmes d’offrir des sols sains et des eaux propres et de préserver la biodiversité. Il s’agit d’améliorer l’efficacité tout en réduisant les intrants extérieurs, en développant l’utilisation circulaire des ressources et en soutenant les services écosystémiques (par exemple la rotation rend les engrais chimiques moins nécessaires, contribue à la bonne santé des sols et favorise l’absorption du carbone). Le champ des possibles est vaste (des pratiques de régénération basées sur les cultures intercalaires et des rotations rapides jusqu’à l’agriculture de précision et aux innovations au service de l’agriculture durable) et les solutions doivent être adoptées et adaptées en fonction de chaque contexte.

  • Remise en état des environnements naturels: En adoptant des modes de production respectueux de la nature on pourrait remettre en état les terres dégradées (un tiers des terres au niveau mondial sont considérées comme telles), par le réensauvagement ou par le rétablissement de leur productivité agricole (ce qui permet d’éviter de nouveaux changements d’affectation des sols en faveur de l’agriculture), et aussi préserver la qualité de l’ensemble des terres.

Les systèmes de santé et les services qu’ils assurent sont d’une importance vitale s’agissant de faire en sorte que les populations puissent s’alimenter et recevoir les nutriments nécessaires à leur santé et à leur bien-être. Le système alimentaire peut avoir des effets aussi bien positifs que négatifs sur la santé humaine par le biais de multiples voies interconnectées, qui elles-mêmes dépendent de facteurs internes au système ou externes, notamment les déterminants sociaux, économiques et environnementaux de la santé. Un examen plus poussé du lien entre l’alimentation et la santé montre qu’une mauvaise alimentation constitue l’un des principaux facteurs de risque en ce qui concerne la charge de morbidité mondiale et on sait qu’une alimentation de piètre qualité nuit considérablement à la santé. D’après une étude réalisée dans le cadre de l’initiative «Global Burden of Disease» (étude sur la charge mondiale de morbidité), 20 pour cent des décès prématurés dans le monde sont liés à une mauvaise alimentation226, notamment la consommation excessive d’aliments riches en matières grasses, en sucres et/ou en sel, et d’aliments peu nutritifs et à teneur insuffisante en protéines de qualité. Il est important que les nourrissons soient allaités et que les enfants en bas âge soient nourris convenablement, pour leur assurer une alimentation de qualité. Si les modes de consommation alimentaire actuels n’évoluent pas, les coûts sanitaires d’une mauvaise alimentation (mortalité et maladies non transmissibles) devraient dépasser 1 300 milliards d’USD par an en 20307.

Les effets néfastes des systèmes alimentaires sur la santé et le bien-être se manifestent sur plusieurs plans: mauvaise alimentation et insécurité alimentaire; zoonoses (dues à des pathogènes provenant d’animaux d’élevage ou d’animaux sauvages) et résistance aux antimicrobiens; aliments insalubres ou frelatés; contamination et dégradation de l’environnement; et risques professionnels139. L’ingestion d’aliments contenant des pathogènes ou des produits toxiques peut causer des maladies, et la consommation de produits modifiés ou nouveaux présente aussi des risques. On estime qu’au niveau mondial la consommation d’aliments insalubres est responsable de la perte de 33 millions d’années de vie en bonne santé227. Les maladies d’origine alimentaire, les zoonoses et les problèmes de santé, physique et mentale, sont plus fréquents chez les personnes touchées par la malnutrition, quelle qu’en soit la forme et, à l’inverse, une bonne alimentation et des systèmes alimentaires sains constituent une protection. Dans le cas particulier des zoonoses, l’approche multisectorielle et multidisciplinaire «Une seule santé» vise à instaurer des mécanismes nationaux contre les menaces sanitaires à l’interface hommes-animaux-environnement228,229.

Nombre des objectifs de santé publique sont tributaires des systèmes alimentaires, à savoir qu’ils dépendent de l’approvisionnement en aliments salubres et nutritifs, produits dans des conditions durables (idée aussi exprimée dans les ODD). Par exemple, la qualité nutritionnelle des aliments produits a une incidence sur les objectifs en matière d’alimentation et sur les objectifs sanitaires liés à l’alimentation; les méthodes de culture, la distribution et les modes de consommation ont une incidence sur les objectifs environnementaux; et la création d’emplois et de revenus dans le secteur agricole a une incidence sur les objectifs économiques (voir par exemple les stratégies visant à réduire la pauvreté rurale et les inégalités de revenu).

La pauvreté et les inégalités rendent ces risques plus probables, et plus graves quand ils se concrétisent. La pollution de l’environnement (métaux lourds, engrais, pesticides, pollution atmosphérique et smog, émissions de gaz à effet de serre, microplastiques, etc.) peut porter gravement atteinte à la santé, sans compter les risques professionnels (pesticides, risques de noyade, risques de blessure, etc.) auxquels sont exposés les exploitants, les travailleurs agricoles, les pêcheurs, les travailleurs du secteur de la transformation et du commerce, et bien d’autres139.

Les politiques, lois, règlements et investissements qui visent le système de santé font partie intégrante du lien alimentation-santé. Pour assurer la santé et le bien-être des populations, il faut une couverture de santé universelle, à savoir que toute personne doit pouvoir bénéficier des services de santé dont elle a besoin, et de services de qualité suffisante et qui ne soient pas d’un coût tel qu’ils plongent les patients dans des difficultés financières. Le système de santé peut favoriser la transformation des systèmes alimentaires, par exemple grâce à une action nutritionnelle dans le cadre de la sécurité sociale universelle230, à savoir notamment:

  • Conseils nutritionnels pendant la grossesse et aide à l’allaitement maternel et à l’alimentation complémentaire, assortis de mesures appliquées au sein du système alimentaire visant à réglementer la vente et la publicité des substituts du lait maternel.

  • Détection précoce et aide au traitement des différentes formes de malnutrition, mesures indispensables à une transformation des systèmes alimentaires et utiles pour connaître les besoins en matière de protection sociale en cas de crise.

  • Apport de micronutriments sous forme de compléments alimentaires, à l’intention des groupes vulnérables. Cette mesure peut être appliquée à titre provisoire tant que les systèmes alimentaires n’offriront pas une plus grande diversité alimentaire et ne permettront pas à chacun d’accéder à tout moment à une alimentation saine et abordable.

D’autres initiatives appliquées dans les systèmes de santé peuvent être renforcées par des systèmes de protection sociale axés sur la nutrition, comme par exemple les aides sociales, la protection du congé de maternité, et les politiques favorables à l’allaitement maternel. Dans le contexte de la pandémie de covid-19, il est particulièrement important de renforcer l’action des systèmes de santé en matière de nutrition, sachant que les systèmes de soins de santé, mis sous pression, sont contraints de prendre sur les ressources normalement destinées à la nutrition37,66,66,231. La cohérence des politiques, des lois, des règlements et des investissements visant l’un et l’autre système importent d’autant plus que, comme on l’a vu plus haut, les systèmes alimentaires et les systèmes de santé sont étroitement liés entre eux.

Il est également important de prendre des mesures qui visent l’environnement alimentaire et favorisent une évolution des systèmes alimentaires dans le sens d’une alimentation saine. Comme on l’a vu au sujet de la voie 6, des mesures doivent être prises pour créer des environnements favorables à une alimentation saine. Ces mesures sont de plusieurs ordres: normes et lois visant à améliorer la qualité nutritionnelle des produits alimentaires et des boissons; taxation des aliments nutritifs et des aliments riches en graisses, en sucres et en sel, pour modifier leur prix relatif; limites aux opérations de promotion qui incitent à une mauvaise consommation; étiquettes nutritionnelles obligatoires, pour aider le consommateur à choisir des aliments plus sains; et distribution d’aliments qui contribuent à une alimentation saine dans les écoles, les hôpitaux, les établissements de soins et autres établissements publics, ainsi que dans le cadre des programmes d’aide alimentaire. Il faut aussi des politiques qui encouragent les consommateurs à changer leurs comportements et à privilégier des aliments plus sains issus de productions plus durables, et qui visent à réduire le gaspillage alimentaire7.

Les systèmes de protection sociale sont constitués d’un ensemble de politiques et de programmes, souvent inscrits dans la loi et d’application obligatoire, qui visent à contrer les facteurs économiques, environnementaux et sociaux causes de pauvreté, d’insécurité alimentaire et de malnutrition en protégeant et en renforçant les moyens d’existence, en particulier en aplanissant les obstacles financiers et sociaux qui compliquent l’accès aux aliments et aux autres biens essentiels7,232. Des centaines de millions de personnes, sur tous les continents, ont brusquement perdu leur emploi et se sont trouvées sans revenus, poussant à leur limite les capacités des systèmes de protection sociale, creusant davantage encore les inégalités et faisant monter la pauvreté233. Pendant plus d’un an, des millions d’enfants ne sont pas allés à l’école et ont ainsi été privés non seulement d’éducation mais aussi de repas scolaires, repas qui couvrent une part importante de leurs besoins journaliers en nutriments234.

Les programmes de protection sociale axés sur la nutrition sont particulièrement efficaces pour ce qui est d’aider les personnes qui, soient qu’elles sont pauvres soit qu’elles subissent une situation de crise, n’ont pas un accès minimal et en quantité suffisante à des aliments nutritifs qui leur permettraient d’avoir une alimentation saine, et qui n’ont pas non plus accès à des services complémentaires, essentiels, en matière de nutrition, de santé et d’assainissement. Il est à noter cependant que la mise en œuvre de politiques et de programmes de protection sociale n’est pas toujours synonyme d’accessibilité économique d’une alimentation saine. La cohérence des investissements dans les secteurs de l’alimentation, de l’agriculture et de la protection sociale est indispensable si l’on veut éradiquer la faim et la pauvreté, mais l’effet de ces investissements sur la qualité de l’alimentation et sur l’accessibilité économique des aliments nutritifs dépend de plusieurs facteurs: ils doivent être bien ciblés, les modalités et le montant des aides doivent être adaptés, et ils doivent comporter un volet nutrition235,236,237.

Les programmes de protection sociale peuvent agir efficacement contre les facteurs de l’insécurité alimentaire et de la malnutrition sous toutes ses formes et améliorer l’accessibilité économique d’une alimentation saine, essentiellement par deux moyens:

  • Contribution aux revenus et aux moyens d’existence des ménages pour les plus pauvres et les groupes les plus vulnérables. Ces mesures peuvent consister à stimuler la création d’emplois et mettre en œuvre des politiques relatives au marché du travail, par exemple on peut avoir recours, sur le court terme, à des programmes de travaux publics, qui permettront de soutenir le pouvoir d’achat en temps de crise et de produire des biens qui ultérieurement soutiendront les moyens d’existence; à mettre en place des initiatives d’assistance sociale, par exemple des programmes de transferts monétaires pour répondre aux besoins les plus immédiats et pour permettre aux ménages d’investir dans des activités de production235; et à élargir l’accès universel aux soins de santé, à l’éducation et aux services sociaux, pour protéger les familles, les nations et les régions contre de possibles revers5.

  • Amélioration de l’accès à une alimentation saine et de son accessibilité économique grâce à des repas scolaires et des programmes nutritionnels (entre autres) spécifiquement conçus pour améliorer la diversité des apports alimentaires, et inciter à l’approvisionnement en produits frais auprès de producteurs locaux. Les transferts en nature, en plus des subventions alimentaires, peuvent accroître l’accès aux aliments nutritifs, en particulier dans les zones où les marchés alimentaires ne fonctionnent pas bien, surtout s’il s’agit de transferts axés sur ce type d’aliments et à destination des plus vulnérables7.

Les investissements à grande échelle dans les systèmes de protection sociale se sont avérés très utiles pour renforcer l’accès aux aliments nutritifs, surtout pour les groupes vulnérables, en zone urbaine comme en zone rurale. Certes, les pays à revenu faible ou intermédiaire ont peu de moyens pour de tels investissements mais des investissements, des lois et des politiques bien conçus peuvent déjà permettre aux systèmes de protection sociale, aux systèmes de santé et aux systèmes alimentaires de conjuguer leurs effets pour mieux couvrir les besoins de la population en matière de santé et de nutrition37.

Du fait des répercussions des mesures de lutte contre la pandémie de covid-19, il est important que les politiques et investissements visent à ce que les fonds publics soient utilisés pour assurer la continuité des marchés alimentaires locaux et nationaux, renforcer les interventions sanitaires axées sur les soins nutritionnels, et donner plus de moyens aux personnes, les femmes en particulier, qui s’occupent des enfants et prennent les décisions dans les familles en matière d’alimentation. Par ailleurs, pour venir en aide aux plus vulnérables, il est important de prendre des mesures pour protéger les travailleurs de la filière alimentaire et combler les lacunes dans la distribution37. Il importe de souligner que la protection sociale est plus qu’une réponse à court terme à des situations d’insécurité alimentaire et de malnutrition aiguës. Lorsqu’elle est fiable et bien ciblée, la protection sociale peut aider les ménages à se lancer dans de nouvelles activités économiques et à tirer parti des possibilités créées par le maintien du dynamisme économique des systèmes alimentaires, améliorant durablement l’accès à une alimentation saine, en plus de stimuler les économies locales238,239,240.

Le rôle des accélérateurs dans la transformation des systèmes alimentaires

La bonne mise en œuvre des portefeuilles de politiques et d’investissements exige un environnement favorable doté d’institutions et de dispositifs de gouvernance en mesure de faciliter le dialogue entre les secteurs et les principales parties prenantes241. Il est essentiel également d’élargir l’accès aux technologies, aux données et aux solutions novatrices, afin d’accélérer les processus transformationnels242. On attribue souvent les transformations des systèmes alimentaires aux innovations technologiques, et on sous-estime l’importance des conditions sociales et politiques qui ont permis de les mettre en œuvre243. Il importe de noter la nécessité d’adopter une large gamme d’innovations institutionnelles, politiques et socioculturelles qui permettront la mise en œuvre et l’adoption de nouvelles technologies et autres innovations, pour une transformation systémique des systèmes alimentaires244.

L’examen des meilleures pratiques des pays confirme l’importance des accélérateurs liés à des facteurs institutionnels, politiques et socioculturels à fort potentiel transformationnel, lorsqu’ils sont joints aux nouvelles technologies, à un usage plus généralisé des données et à la promotion de solutions novatrices visant à renforcer la résilience face aux facteurs de l’insécurité alimentaire et de la malnutrition. Les deux grandes catégories d’accélérateurs de la transformation des systèmes alimentaires – une gouvernance et des institutions efficaces, et les technologies, les données et l’innovation – sont examinées ci-après.

Gouvernance et institutions

L’importance que revêtent une gouvernance et des institutions efficaces pour la mise en œuvre de politiques cohérentes et complémentaires en matière de systèmes alimentaires est de plus en plus reconnue, surtout depuis la crise des prix des denrées alimentaires de 2007-2008245. Il existe de nombreux mécanismes mondiaux, régionaux, nationaux et locaux pour permettre aux secteurs et aux principaux acteurs de collaborer et de se consulteraq. Des mécanismes internationaux de coordination facilitent l’instauration de normes (les normes sanitaires et phytosanitaires harmonisées, par exemple) et aussi de règles commerciales visant à renforcer les échanges régionaux et internationaux. Au niveau national, les mécanismes de gouvernance les plus efficaces pour la coordination des mesures multisectorielles et inter-systèmes se situent au moins à l’échelon ministériel, avec étroite consultation entre les ministères et les institutions chargées de chaque secteur. Il importe de souligner que ces mécanismes de gouvernance doivent faciliter la participation des principaux acteurs des secteurs public et privé et de la société civile.

En 2016, plus de trois pays sur quatre indiquaient qu’ils étaient dotés de mécanismes multisectoriels de coordination en matière de nutrition, des mécanismes qui réunissaient le plus souvent les secteurs de la santé, de l’agriculture et de l’éducation246. Sans doute faudrait-il développer les mécanismes de ce type, afin de mettre en place une approche pangouvernementale et accroître ainsi la cohérence des politiques. Des études de cas ont mis en évidence les forces et les faiblesses des mécanismes de gouvernance existants. Une étude diagnostique de 2017 sur la gouvernance des systèmes alimentaires en Afrique du Sud a tenté de déterminer quelles procédures institutionnelles étaient les plus adaptées. Il en est ressorti que l’existence de trois mécanismes de gouvernance différents posait des problèmes. Chaque programme étant confié à un seul organisme, il n’y avait pas suffisamment de souplesse dans les actions qui étaient menées et les parties prenantes ne participaient pas assez247.

Au Mexique, un mécanisme de gouvernance intersectoriel assorti de plusieurs objectifs a été créé en 2020 pour lutter contre la pauvreté et les inégalités, les problèmes environnementaux, et l’insécurité alimentaire et la malnutrition grâce à une transformation durable des systèmes alimentaires. Le mécanisme mexicain réunit 18 groupes de travail thématiques qui représentent un large éventail d’institutions du secteur public, de la société civile et des organismes des Nations Unies et traitent des questions de santé, d’alimentation et d’environnement. En peu de temps, le mécanisme a plaidé efficacement en faveur de l’étiquetage nutritionnel à l’avant des emballages et d’un accord visant l’interdiction progressive du glyphosate et du maïs génétiquement modifié destiné à la consommation humaine. Cette approche intersectorielle de la transformation des systèmes alimentaires mexicains n’a pas encore été reconnue officiellement, ce qui empêche les institutions participantes de lever des fonds et d’aller plus loin dans l’action en faveur de la sécurité alimentaire et d’une meilleure nutrition97.

Le dialogue et les activités de plaidoyer sont nécessaires pour susciter l’engagement politique et un large appui en faveur d’une transformation des systèmes alimentaires. L’élaboration des politiques relève des pouvoirs publics, mais pour que le changement se fasse, il est essentiel de créer un environnement qui permette l’interaction des différents acteurs –- publics, privés, et société civile –, et qui instaure des règles d’engagement transparentes, notamment pour parer au risque de conflit d’intérêts. Les systèmes alimentaires doivent permettre l’interaction entre les petits exploitants et le secteur agroalimentaire; entre les fournisseurs, les agences de publicité et les consommateurs; et entre les organes qui font la réglementation et les entités qui doivent l’appliquer. Les mécanismes multipartites qui prennent part à la formulation et à la mise en œuvre des politiques et des investissements, et qui fournissent des protections solides contre les abus et les conflits d’intérêts, s’avèrent être des plateformes consultatives efficaces. Une bonne gouvernance doit aussi comporter des mécanismes de responsabilisation et des mécanismes de supervision, de suivi et d’évaluation renforcés, notamment des systèmes d’information multisectoriels permettant de disposer de données fiables et à jour pour l’élaboration des politiques.

L’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ANASE) a beaucoup utilisé les plateformes multipartites en vue de parvenir à un changement porteur de transformation, notamment pour renforcer les chaînes de valeur alimentaires à l’échelle nationale et infranationale, et gérer les problèmes régionaux (les effets de la pandémie de covid-19, par exemple), et aussi pour étudier des moyens possibles de renforcer la participation des petits exploitants dans les chaînes de valeur alimentaires grâce à l’informatique. Dans six pays membres de l’ANASE, des partenariats public-privé-producteurs sont soutenus par des réseaux nationaux et par un réseau régional comptant plus de 520 organismes issus de toute la région et représentant le secteur public, des entreprises multinationales, des entreprises agroalimentaires locales, la société civile, des associations d’agriculteurs et des institutions d’enseignement et de recherche248.

Technologies, données et innovation

Les technologies, les données et l’innovation – au niveau de la production alimentaire, aux différentes étapes de la filière et dans l’environnement de consommation – constituent un ensemble d’accélérateurs essentiels au changement transformationnel des systèmes alimentaires. Les innovations technologiques du siècle passé ont permis d’apporter des améliorations considérables aux processus de production, de transformation et de distribution des aliments, entraînant à leur tour une amélioration substantielle du bien-être des populations. Aujourd’hui, tous les acteurs se heurtent à des difficultés dans l’instauration de changements systémiques qui permettraient d’instaurer des systèmes alimentaires plus favorables à la santé, plus équitables, plus résilients et plus durables. Il est urgent de faire appel à la technologie et à l’innovation249. À tous les stades de la filière, nombreuses sont les technologies susceptibles d’accroître les disponibilités en aliments nutritifs, depuis l’amélioration des variétés de semences maraîchères jusqu’à la culture hydroponique, en passant par la culture sur étagères dans les zones urbaines. Dans le même temps, le système alimentaire regorge de nouvelles technologies qui offrent un potentiel transformationnel et ne demandent qu’à être adoptées244.

Au-delà des données et de la capacité d’analyse nécessaires à une analyse détaillée qui permettra de déterminer les mesures à prendre en priorité pour transformer les systèmes alimentaires, il est nécessaire d’améliorer les outils d’exploitation des données, d’analyse et de prise de décisions pour la mise en œuvre des portefeuilles de politiques et d’investissements, afin d’accélérer le processus. De nouvelles méthodes sont à l’étude, dans une volonté de tirer pleinement parti de la révolution actuelle des données pour transformer les systèmes alimentaires et agricoles partout dans le monde, à l’aide d’initiatives pilotées par les pays eux-mêmes et basées sur des données probantes. Nous disposons de moyens sophistiqués, dont la modélisation et l’analyse géospatiales, pour tenter de trouver des moyens d’augmenter les revenus des populations rurales, qui constituent la grande majorité des pauvres de la planète, et pour réduire leur vulnérabilité250.

Les innovations le long de la chaîne de valeur alimentaire. Les mesures prises en réaction à la pandémie de covid-19 ont eu un impact sans précédent sur les chaînes de valeur alimentaires. La filière alimentaire, côté offre comme côté demande, s’est heurtée à d’importantes difficultés: d’une part, les mesures de confinement ont compliqué les relations entre les agriculteurs, les intermédiaires, les grossistes, les conditionneurs et les détaillants, d’autre part, les consommateurs ont subi des contraintes qui ont limité leur accès à la nourriture (fermeture des commerces et injonction à rester chez soi) et ont vu leur accès économique à la nourriture se réduire considérablement. La récession économique a entraîné dans le monde entier des pertes sans précédent de revenus, d’emplois et de moyens d’existence, et ce sont les populations les plus vulnérables qui ont payé le plus lourd tribut251.

Pourtant, contrairement à des prévisions initiales, la plupart des chaînes d’approvisionnement alimentaire ont résisté et ont continué de fonctionner, grâce à la mise en œuvre d’innovations et à des décisions prises rapidement pour protéger les filières, perçues comme des service essentiels pendant la pandémie252. Les mesures prises ont été plus largement appliquées aux chaînes d’approvisionnement modernes et intégrées verticalement qu’aux chaînes d’approvisionnement alimentaire traditionnelles (beaucoup plus courtes) mais, dans le contexte de la pandémie de covid-19, elles ont accéléré les changements au sein des chaînes d’approvisionnement alimentaire partout dans le monde. Nombre d’innovations et de nouvelles technologies se sont répandues rapidement, à l’instar de la numérisation qui a connu un essor formidable et dont le but était d’assurer la continuité des chaînes d’approvisionnement alimentaire pendant les périodes de confinement et de limitation des transports et de la distribution251.

Au Bangladesh, les confinements ordonnés en raison de la pandémie de covid-19 ont causé de grandes difficultés aux agriculteurs, qui se sont heurtés à de graves perturbations des flux de produits et de ressources. Ils ont eu du mal à se procurer des ressources (engrais et aliments pour le bétail, entre autres) et à vendre leurs récoltes. Les prix de tous les produits périssables comme le lait, les légumes et le poisson, ont chuté. Pour remédier aux ruptures d’approvisionnement et aux difficultés croissantes de leurs membres et des travailleurs agricoles, les organisations d’agriculteurs ont facilité la création de centres d’appel virtuels. Ces centres simplifient la coordination et la communication à l’échelle locale. Il s’agit d’aider les agriculteurs à continuer de vendre leurs produits, d’acheter les biens et les services dont ils ont besoin, et d’échanger les meilleures pratiques à mettre en œuvre pendant la pandémie. L’innovation que constituent ces centres a permis d’obtenir des gains d’efficacité et de productivité grâce à la coopération et à la technologie, et une hausse des revenus des petits exploitants. Les liens directs entre producteurs et vendeurs ont été renforcés, et les communautés locales ont tiré profit d’une activité économique accrue97.

Les technologies nouvelles prometteuses peuvent effectivement renforcer la résilience des systèmes alimentaires face aux facteurs de l’insécurité alimentaire et de la malnutrition, en même temps que s’opère une transformation des systèmes pour garantir une alimentation saine intégrant des considérations de durabilité. À titre d’exemple, s’ils sont gérés convenablement, les systèmes d’irrigation fonctionnant à l’énergie solaire constituent une solution écologique, fiable et abordable. Au Proche-Orient et en Afrique du Nord, une initiative régionale a mis l’accent sur l’utilisation de l’énergie solaire pour l’irrigation et le développement durable. Le système a permis de réduire les effets négatifs de l’agriculture sur l’environnement grâce à une moindre pollution des sols due aux déversements de diesel et à la baisse des émissions de gaz à effet de serre253.

Au Bénin, l’utilisation d’engrais biologique et de techniques isotopiques a permis de quadrupler la production de soja entre 2009 et 2019, d’accroître les revenus des petits exploitants et les disponibilités en aliments sains à base de soja, et d’augmenter considérablement la fertilité du sol et les recettes d’exportation. En Patagonie et dans la province de Mendoza, en Argentine, des cultures commerciales importantes (cerises, poires et pommes), aussi bien dans des petites que dans des grandes exploitations, avaient été victimes de la mouche des fruits méditerranéenne, occasionnant des pertes de production et une baisse de revenus considérables. En outre, l’application fréquente de pesticides avait suscité des inquiétudes pour la santé des producteurs et des consommateurs. La mise en place de la technique de l’insecte stérile a permis d’éradiquer l’insecte, entraînant ainsi une forte hausse de la production et des échanges internationaux dans le secteur fruitier, et, par voie de conséquence, une meilleure résilience économique et des revenus plus importants pour les agriculteurs et les négociants97.

Mais l’innovation ne prend pas seulement la forme de progrès scientifiques et technologiques. Par exemple, les investissements importants qui devront être faits pour transformer les systèmes alimentaires nécessiteront de nouveaux mécanismes de financement, et des cadres juridiques et réglementaires adaptés. Par ailleurs, en facilitant l’accès des plus vulnérables à une alimentation saine, les innovations dans les programmes de protection sociale peuvent avoir des retombées positives sur les systèmes alimentaires et accroître leur efficacité et leur viabilité249. La pandémie de covid-19 a mis une très forte pression, forçant à trouver des solutions nouvelles: dans plusieurs pays subsahariens, dont le Malawi, le Nigéria et le Togo, face à des besoins accrus, des images satellites ont été utilisées, en association avec d’autres méthodes, pour sélectionner de nouveaux bénéficiaires des programmes de transferts monétaires13.

Tirer profit de solutions gagnant-gagnant et gérer les compromis

Si l’on veut transformer les systèmes alimentaires de sorte qu’ils soient plus résilients face aux facteurs auxquels ils sont soumis et que tous puissent davantage se permettre une alimentation saine, et produite de façon durable, il faut pleinement mettre à profit des solutions qui soient gagnant-gagnant et soigneusement gérer les compromis. Comme pour tout changement systémique, il y aura des gagnants et des perdants et l’introduction de nouvelles technologies, l’innovation, et les transformations qui en résulteront dans le fonctionnement des systèmes alimentaires auront des répercussions à la fois positives et négatives249. La cohérence entre les systèmes ainsi que les accélérateurs transversaux sont essentiels pour porter au maximum les avantages et limiter le plus possible les conséquences négatives de la transformation visant à assurer la sécurité alimentaire, une meilleure nutrition et une alimentation saine et abordable. C’est pourquoi la cohérence des politiques, à savoir une situation dans laquelle la mise en œuvre d’une politique dans un secteur ne compromet pas la politique suivie dans un autre (voire une situation où les politiques se renforcent l’une l’autre)254, est un élément nécessaire des portefeuilles multisectoriels qui seront élaborés pour la transformation. Les exemples d’approches par système décrits ci-après montrent comment des solutions gagnant-gagnant peuvent aider à accélérer plus efficacement le type de processus porteurs de transformation préconisé dans le présent rapport, tout en gérant les compromis nécessaires en vue d’une transformation des systèmes alimentaires inclusive et plus durable.

Exemples d’approches par système pour l’élaboration de portefeuilles cohérents

Approches territoriales

Comme indiqué dans les sections du présent rapport consacrées aux différentes voies possibles, une approche territoriale peut faciliter des approches systémiques et globales de la transformation des systèmes alimentaires. Dans le processus d’élaboration de politiques et la mise en œuvre de mesures de transformation, les approches territoriales, qui s’intéressent plus particulièrement aux liens et aux possibilités qui existent entre les systèmes sur un territoire donné, supposent des mécanismes de gouvernance intersectoriels à plusieurs niveaux, ainsi que la cohérence entre les différents niveaux géographiques255. Elles sont propices à des gains d’efficience mais aussi à la gestion des compromis dans la mise en œuvre des politiques. Elles présentent l’avantage d’impliquer tous les acteurs concernés dans un espace donné et constituent un cadre idéal pour agir compte tenu du contexte et de la nature dynamique et changeante des facteurs agissant sur les systèmes alimentaires. Elles permettent en outre aux décideurs de concevoir des portefeuilles de politiques multisectoriels cohérents et plus efficaces.

Cette approche a été mise en œuvre en Colombie, touchée par 50 ans de conflit qui ont plongé les zones rurales et leurs populations dans la pauvreté et les ont laissées avec peu de capacités institutionnelles. Depuis l’accord de paix de 2016, des plans de développement ont été mis en œuvre dans 16 territoires. Il s’agit de plans d’investissement organisés selon huit composantes, dont le régime foncier, les infrastructures, les services de santé et d’éducation, le logement, l’eau et l’assainissement256. Au Sahel, la grande muraille verte constitue également une approche territoriale: cette initiative ambitieuse qui réunit 11 pays vise à transformer la vie de 100 millions de personnes principalement grâce au potentiel agroécologique de la remise en état des territoires, à la production de nourriture, à l’amélioration de la sécurité alimentaire, à la création d’emplois et à la promotion de la paix dans une région politiquement fragile257. Dans un contexte de changement climatique et de désertification, le projet permettra d’accroître la biodiversité et d’inverser le processus de dégradation des terres tout en créant des emplois «verts». Axé sur le renforcement de la capacité des petits producteurs de faire face au changement climatique, le projet vise aussi à améliorer l’accès aux marchés et à renforcer les filières, grâce à une plus large utilisation de l’énergie solaire, au développement de l’agroforesterie et à des initiatives pilotées par les communautés, pour parvenir à la sécurité alimentaire et à une meilleure nutrition258.

Comme indiqué au sujet de la voie 4, l’approche territoriale de la transformation des systèmes alimentaires vaut aussi pour les milieux urbain et périurbain. Étant donné que plus de la moitié de la population mondiale vit désormais en milieu urbain259, les autorités des villes et des agglomérations ont un rôle important à jouer dans la transformation des systèmes alimentaires s’agissant d’améliorer la sécurité alimentaire et la nutrition et d’accroître l’accessibilité économique d’une alimentation saine. Elles peuvent notamment user de leurs pouvoirs en matière de réglementation et de planification pour façonner l’environnement alimentaire (zonage des établissements de restauration rapide, mention des valeurs caloriques sur les étiquettes, restrictions publicitaires, ou encore taxations des boissons à teneur élevée en sucres)194. Le Pacte de Milan sur les politiques alimentaires en milieu urbain, par exemple, est un accord international conclu entre les villes, qui vise à des systèmes alimentaires durables, inclusifs, résilients, sûrs et diversifiés en mesure d’offrir à tous une alimentation saine et abordable dans un cadre respectueux des droits humains, de réduire au maximum le gaspillage et de préserver la biodiversité, grâce à l’adaptation aux changements climatiques et à l’atténuation de leurs effets. Le pacte a été signé par 211 villes du monde entier qui souhaitent renforcer la coopération entre elles et échanger sur leurs meilleures pratiques260.

Des portefeuilles de politiques cohérents doivent aussi permettre de résoudre le problème de l’exposition et de la vulnérabilité accrues des moyens d’existence, en particulier au sein des groupes de population défavorisés. En l’absence d’une planification efficace, la variabilité et les extrêmes climatiques auront aussi pour effet d’accroître la vulnérabilité face aux événements extrêmes qui surviendront dans l’avenir3. Toute accentuation des extrêmes climatiques risque d’exacerber la vulnérabilité des populations défavorisées, ce qui aura des répercussions à long terme sur le développement si rien n’est fait pour renforcer la résilience sur tous les plans (productif, social, climatique et environnemental). Pour être efficaces au niveau des moyens d’existence et des systèmes alimentaires et pour remédier à l’insécurité alimentaire et à toutes les formes de malnutrition, les politiques et les programmes de renforcement de la résilience doivent être élaborés sur la base d’évaluations des risques climatiques, de données scientifiques et de connaissances interdisciplinaires et intersectorielles. Ils doivent aussi reposer sur des approches associant action humanitaire, développement et consolidation de la paix, qui soient participatives et inclusives et à même de répondre aux besoins des groupes particulièrement vulnérables face au changement climatique3.

Approches écosystémiques

S’agissant de la cohérence entre les systèmes alimentaires et environnementaux, la transformation et le «verdissement» des premiers peut constituer un puissant outil de renforcement de la résilience face aux chocs climatiques et économiques. Selon les estimations du FMI, les multiplicateurs écologiques sont plusieurs fois supérieurs aux multiplicateurs non écologiques261. Si les portefeuilles de politiques et d’investissements visant à rendre les systèmes alimentaires plus respectueux de l’environnement sont conçus et mis en œuvre de façon à constituer un moteur de la reprise économique, alors ils peuvent engendrer des emplois viables et des moyens d’existence durables, réduire les inégalités et promouvoir la sécurité alimentaire et la nutrition. Ainsi, le renforcement de la résilience face au changement climatique favorise non seulement la durabilité et la réduction de l’empreinte carbone, mais aussi l’élimination de la faim et de la malnutrition sous toutes ses formes. Un autre moyen de contribuer à rendre les systèmes alimentaires plus respectueux de l’environnement est d’intégrer des aspects liés à la durabilité environnementale dans les recommandations nutritionnelles fondées sur le choix des aliments, lorsqu’elles sont mises au point ou modifiées, en tenant compte des contextes nationaux, et d’utiliser ces recommandations pour éclairer les politiques agricoles et alimentaires23.

La possibilité de renforcer les services écosystémiques et d’accroître la productivité, la sécurité alimentaire et la résilience a été démontrée par un certain nombre d’initiatives de gestion intégrée des bassins versants. Au Kenya, un nouveau Fonds pour l’eau aide les agriculteurs du bassin du haut Tana à adopter des pratiques de gestion durable de la terre et de l’eau. En plus de renforcer la résilience des petits exploitants face aux effets de la variabilité et des extrêmes climatiques, le Fonds a notamment contribué à la hausse de la productivité et de la rentabilité de la chaîne de valeur du café. L’approche intégrée qui a été adoptée pour le Fonds a en outre permis d’améliorer la qualité de l’eau potable dans la capitale, Nairobi, et d’accroître la production d’énergie hydroélectrique du pays. Cet investissement a donc contribué de façon directe aux systèmes hydriques et énergétiques et, de façon indirecte, aux systèmes alimentaires et aux systèmes de santé et de protection sociale262.

Au Mexique, un projet de gestion communautaire des forêts a été mis en place dans le but de résoudre les problèmes de dégradation des forêts et de déforestation dans les communautés rurales des zones forestières marginalisées des États de Campeche, Chiapas et Oaxaca. Le projet a des effets bénéfiques sur l’environnement. Les bénéficiaires se déclarent plus résilients face aux chocs (8 pour cent de plus que le groupe témoin), surtout aux chocs climatiques, et moins touchés par la sécheresse (16 pour cent de moins que le groupe témoin). En outre, les revenus qui découlent d’activités non agricoles ont considérablement augmenté (plus 22 Pour cent). Plus généralement, les actifs totaux ont aussi augmenté (15 pour cent), en particulier les biens de production (41 pour cent), fruit des investissements dans les entreprises et des améliorations dans le domaine de la mobilité économique263.

Pour une action coordonnée dans les situations de crise prolongée

Comme on l’a souligné à propos de la première voie de transformation, il est impératif que dans les pays touchés par des conflits, les politiques, les investissements et autres interventions visant à agir rapidement contre l’insécurité alimentaire et la malnutrition s’accompagnent de mesures d’apaisement des conflits et soient alignés sur les efforts à long terme de développement socioéconomique et de consolidation de la paix. En Iraq, trente années de crise ont eu des effets dévastateurs sur les systèmes agroalimentaires, entraînant d’importants déplacements de population, la destruction de l’infrastructure agricole, la perte de moyens d’existence et une profonde perturbation des chaînes de valeur alimentaires. Une faible productivité, aggravée par les effets des changements climatiques a ébranlé les secteurs alimentaire et agricole, deux grandes sources d’emploi dans les zones rurales et urbaines97. En 2020, le niveau de pauvreté, qui était de 20 pour cent (2017-2018), a atteint jusqu’à 35 pour cent dans les gouvernorats du centre, une hausse qui s’explique largement par les effets de la pandémie de covid-19264.

Des mesures à prendre d’urgence ont été recommandées pour aider l’Iraq à emprunter une voie durable vers le redressement, par exemple: élargissement des mécanismes de protection sociale; services de base à l’intention des pauvres; protection de l’emploi, des petites et moyennes entreprises et des travailleurs vulnérables de l’économie informelle265; et réformes transversales favorisant la diversification et la croissance pilotées par le secteur privé, grâce à la création d’emplois durables.266. Dans la même veine, un programme multisectoriel et multipartite sur les systèmes alimentaires et la chaîne de valeur, auquel participent les ministères de la planification, de l’agriculture, des ressources hydriques, du commerce, de l’éducation et des migrations, vise à faciliter le retour de millions de personnes déplacées à l’intérieur du pays et à aider les communautés d’accueil en créant des emplois pour que ces personnes puissent retrouver des moyens d’existence. Ce programme intersectoriel (2020-2024) fait partie d’un programme mené par les Nations Unies à l’interface action humanitaire-développement-paix. Il vise à promouvoir: i) la création d’un environnement favorable grâce à des actions et à des réformes législatives qui facilitent les échanges commerciaux et améliorent les conditions de travail; ii) le renforcement des capacités des prestataires de services publics et privés; iii) l’adoption de pratiques durables par les petits exploitants; iv) le renforcement des petites et moyennes entreprises du secteur agroalimentaire grâce à un soutien technique et financier; et v) le développement du secteur agroalimentaire et le réseautage. Le portefeuille complet de politiques et d’investissements permettra d’améliorer la gestion des ressources naturelles en Iraq, de susciter la création d’emplois durables et corrects, de créer du capital humain et d’intensifier la croissance du secteur privé, en vue du redressement du pays et de son développement à long terme.

En Palestine, plus de 1,7 million de personnes se trouvaient en situation d’insécurité alimentaire en 2018, soit un tiers de la population environ267. Ce chiffre a dépassé les 2 millions après l’épidémie de covid-19, en 2020268, et avant que n’éclate récemment un conflit violent avec Israël. Outre la crise sanitaire qu’elle a provoquée, la pandémie a aggravé la situation sur le plan humanitaire, et les confinements successifs ont nui au développement socioéconomique de la Palestine. Face à la crise, des mesures ont été prises d’urgence pour assurer le fonctionnement des systèmes agroalimentaires, et d’autres sont venues les compléter pour atténuer les effets de la crise sur les groupes vulnérables et protéger et promouvoir leurs moyens d’existence269.

Après des décennies d’action humanitaire, ces mesures traduisent une intensification, depuis cinq ans, de l’approche axée sur l’interface action humanitaire-développement-paix270. Dans ce contexte, le Cabinet palestinien a approuvé, fin 2020, sa première politique nationale en matière de sécurité alimentaire et nutritionnelle (NFNSP, 2019-2030)271, assortie d’un plan d’investissement national pour la sécurité alimentaire et nutritionnelle et l’agriculture durable (NIP, 2020-2022)268,272. Malgré la crise prolongée, la politique et le plan d’investissement – élaborés par le Ministère de l’agriculture, en coopération, notamment, avec les ministères de la santé, du développement social, de l’éducation et de l’enseignement supérieur, les autorités palestiniennes chargées de la gestion de l’eau et des questions environnementales, et le Bureau central des statistiques – visent à consolider les cadres d’action et à coordonner et hiérarchiser les interventions des différents acteurs. La nouvelle approche doit permettre de renforcer les liens entre le développement agricole, la protection sociale et les moyens économiques afin de répondre à la fois aux besoins les plus urgents de la population palestinienne et aux besoins en matière de développement structurel. Malheureusement, le récent conflit entre Israël et la Palestine a inévitablement détourné les efforts vers la consolidation de la paix, qui reste la principale priorité dans le futur proche.

Systèmes alimentaires des peuples autochtones

Les systèmes alimentaires des peuples autochtones constituent un bon exemple de systèmes holistiques et interconnectés qui fournissent des aliments nutritifs et variés au sein d’environnements sains et dans le respect de la biodiversité273,274. Au cours des dernières décennies, ces systèmes alimentaires durables et résilients – qui produisent des aliments et des médicaments depuis des siècles – ont été perturbés par les changements climatiques, les industries extractives, l’expansion de l’agriculture commerciale et une marginalisation croissante, autant de causes de déplacements, de violences, de pauvreté structurelle et d’inégalités112,276,276,277. La pandémie de covid-19 a exacerbé l’insécurité alimentaire des peuples autochtones, en particulier dans les zones urbaines et périurbaines et au sein des communautés qui comptent davantage sur les marchés de produits alimentaires.

Malgré ces difficultés, les peuples autochtones ont montré que des approches intégrées qui vont au-delà de l’approvisionnement alimentaire sont essentielles pour améliorer les environnements alimentaires et les systèmes de protection sociale273,278. Leurs systèmes alimentaires sont basés sur une vision globale et systémique qui embrasse la spiritualité, la vie et la culture, ainsi que les éléments biotiques et abiotiques de l’écosystème, et les interrelations entre ces divers aspects. Ils mettent en jeu la totalité de la capacité humaine, au service de la production, de l’utilisation, de la disponibilité, de la stabilité et de la gestion durables d’aliments nourrissants et nutritifs, et de l’accès à l’alimentation279.

Les systèmes alimentaires des peuples autochtones offrent de bonnes pratiques à divers égards: durabilité, prise en compte des saisons, grande variété d’aliments disponibles, résilience, production alimentaire, autogouvernance, et gestion des droits collectifs et des écosystèmes. Ces pratiques employées pourraient être appliquées ailleurs afin de créer des systèmes alimentaires plus sains et plus durables. Aux États-Unis d’Amérique, pays où les peuples autochtones sont deux fois plus sujets à l’insécurité alimentaire que le reste de la population280, la Nation Oneida, dans le Wisconsin, est touchée par l’insécurité alimentaire et la malnutrition. Elle compte notamment un grand nombre de cas de diabète et d’obésité, qui sont dus à une consommation excessive d’aliments transformés. Une approche intégrée et communautaire par système a été mise en place afin de remettre en avant les croyances, la cosmogonie et la gouvernance de la Nation. Une coalition a été créée pour gérer des systèmes alimentaires locaux, dans l’objectif de remettre en état les ressources en terres et en eau de ce peuple, afin qu’il produise de façon durable des aliments nutritifs pour ses membres. Le programme «de la ferme à l’école» a été reconnu à l’échelle nationale comme étant un moyen efficace d’inclure dans les repas scolaires des aliments nutritifs produits localement et culturellement adaptés. De plus, la stratégie interculturelle et intégrée de l’alimentation, qui suppose gouvernance, politiques, investissements et gestion par la communauté, a permis de renforcer l’environnement alimentaire, d’améliorer la santé publique et de consolider l’engagement intergénérationnel en faveur de la préservation des systèmes alimentaires de ce peuple97.

Présents dans plus de 90 pays et sept régions socioculturelles différentes, les peuples autochtones constituent 6,2 pour cent de la population mondiale (476 millions). Alors qu’une personne extrêmement pauvre sur cinq est autochtone, la pauvreté économique de ces peuples contraste fortement avec la richesse culturelle et écologique des sociétés au sein desquelles ils vivent: ils parlent 4 000 des 6 700 langues qui existent encore dans le monde et, si leurs terres et territoires représentent quelque 25 pour cent de la surface du globe, ils comprennent 80 pour cent de la biodiversité terrestre restante et sont moins touchés par la déforestation.

Compte tenu de leur présence dans le monde et de la richesse de leurs connaissances, les peuples autochtones sont des partenaires de premier plan dans les débats mondiaux sur les systèmes alimentaires durables et résilients. Les systèmes alimentaires de ces peuples produisent des aliments nutritifs et offrent une grande diversité, ils aident à préserver la biodiversité et ils ont prouvé leur résilience et leur capacité d’adaptation face aux chocs. Les peuples autochtones ont de plus en plus à apporter sur la question de la durabilité en vue de la transformation des systèmes alimentaires, mais ils restent en marge des débats politiques et des processus décisionnels281. La Plateforme mondiale sur les systèmes alimentaires des peuples autochtones, qui réunit des spécialistes, des scientifiques et des chercheurs, autochtones et non autochtones, tente de renverser la tendance en produisant des connaissances et des données susceptibles d’influencer les politiques282. Basé sur les expériences de peuples autochtones de diverses régions du monde, l’encadré 14 contient des orientations sur les meilleures pratiques en matière d’approches systémiques en vue d’une transformation durable et inclusive des systèmes alimentaires.

L’édition 2021 de l’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde, cinquième d’une série qui forme un tout, clos l’examen sur cinq ans des progrès réalisés vers l’élimination de la faim et de toutes les formes de malnutrition en application de l’ODD 2, et des principaux facteurs qui les déterminent, sur une note à la fois pessimiste et optimiste.

Les raisons d’être pessimiste sont évidentes. Il ressort clairement du chapitre 2 que, à moins de dix ans de l’échéance de 2030, nous ne sommes pas sur la voie de l’élimination de la faim et de la malnutrition – en fait, nous avançons dans la mauvaise direction. La situation n’est pas réjouissante. Alors qu’elle stagnait depuis cinq ans, la prévalence de la sous-alimentation s’est accrue, passant de 8,4 pour cent en 2019 à 9,9 pour cent environ en 2020, ce qui signifie que 720 à 811 millions de personnes dans le monde ont connu la faim en 2020 – 161 millions de plus qu’en 2019. En dehors de la faim, les perspectives sont également décourageantes. D’après les estimations, la prévalence mondiale de l’insécurité alimentaire modérée ou grave a progressé autant en 2020 que sur l’ensemble des cinq années précédentes. En 2020, près d’une personne sur trois dans le monde (2,37 milliards) n’avait pas accès à une nourriture adéquate, soit une augmentation de près de 320 millions de personnes en seulement un an. Liés à cette situation, le coût élevé d’une alimentation saine et la persistance de fortes inégalités de revenu ont mis l’alimentation saine hors de portée de quelque 3 milliards de personnes, dans toutes les régions du monde, en 2019. Ce nombre a probablement augmenté en 2020, dans la plupart des régions, du fait de la pandémie de covid-19.

En outre, l’objectif de l’élimination de toutes les formes de malnutrition demeure un défi. Il n’a pas été possible de tenir pleinement compte de l’incidence de la pandémie de covid-19 car on ne disposait que de données limitées, mais on estime qu’en 2020, 22,0 pour cent des enfants présentaient un retard de croissance, 6,7 pour cent souffraient d’émaciation et 5,7 pour cent étaient en surpoids. D’après les estimations, en 2019, dans l’ensemble du monde, 29,9 pour cent des femmes âgées de 15 à 49 ans étaient anémiques, et l’obésité chez les adultes est en forte croissance dans toutes les régions. Les taux actuels de progression, au niveau mondial, vers la réalisation des objectifs correspondant à ces indicateurs de l’état nutritionnel sont insuffisants, quand ils ne stagnent pas, voire régressent.

Comme indiqué au chapitre 3, ces évolutions indésirables ont pour moteurs une plus grande fréquence et une intensité accrue des conflits, de la variabilité et des extrêmes climatiques, ainsi que des ralentissements et des fléchissements économiques, et des degrés d’inégalité élevés. Les fléchissements économiques qui se sont produits en 2020, surtout par suite des mesures prises partout dans le monde pour endiguer la pandémie de covid-19, ont contribué à l’une des poussées de la faim dans le monde les plus fortes depuis des décennies, dans presque tous les pays à revenu faible ou intermédiaire, et risquent de faire reculer les progrès obtenus sur le front de la nutrition. Cependant, les fléchissements économiques dus à la pandémie ne sont qu’une petite partie d’un problème bien plus vaste. Plus inquiétantes en effet sont les vulnérabilités mises au jour par la pandémie et qui sont apparues ces dernières années dans nos systèmes alimentaires sous l’effet des grands facteurs que sont notamment les conflits, la variabilité et les extrêmes climatiques, et les fléchissements et les ralentissements économiques. De plus en plus souvent, ces grands facteurs se produisent simultanément à l’intérieur d’un même pays et interagissent de telle sorte que la sécurité alimentaire et la nutrition s’en trouvent gravement compromises. Il est démontré que la majorité des enfants qui connaissent la faim et présentent un retard de croissance vivent dans des pays qui sont touchés par des facteurs multiples. En outre, en 2020, la faim a davantage progressé dans les pays où les fléchissements économiques étaient associés à des catastrophes liées au climat ou à des conflits, ou aux deux.

Il est important aussi de relever que des millions de personnes sont en situation d’insécurité alimentaire et souffrent de malnutrition sous une forme ou sous une autre parce qu’elles ne peuvent pas se permettre une alimentation saine. Les facteurs susmentionnés, ainsi que les fortes inégalités, mais aussi d’autres facteurs qui poussent à la hausse le coût des aliments nutritifs – et qui concernent la production, la chaîne d’approvisionnement et l’environnement alimentaire, et aussi la demande des consommateurs et l’économie politique de l’alimentation – sont derrière cette importante défaillance de nos systèmes alimentaires. Il apparaît déjà que les pays où l’inaccessibilité économique d’une alimentation saine s’est accrue de 2017 à 2019 sont aussi ceux où les niveaux d’insécurité alimentaire grave, et modérée ou grave, sont les plus élevés, en particulier parmi les pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure.

La pandémie de covid-19 et les répercussions de la pandémie ont représenté un énorme défi pour le monde, et si l’on ne passe pas plus résolument à l’action pour changer le cours des choses, elles pourraient être aussi un avertissement annonciateur de phénomènes qu’on ne voudrait pas voir se produire. Comme le montre le présent rapport, les principaux facteurs qui menacent la sécurité alimentaire et la nutrition sont également reliés à d’autres systèmes, notamment l’environnement et le système de santé, sur lesquels ils ont des effets circulaires. Il en résulte des associations circulaires d’interdépendance qui contribuent à accroître l’insécurité alimentaire et la malnutrition et aboutissent aux vulnérabilités actuelles et à des vulnérabilités futures. Ces facteurs ont chacun leur propre trajectoire et des cycles qui leur sont propres, et qui font qu’ils continueront de se produire et qu’ils pourraient même gagner en puissance dans les années qui viennent; il faut donc agir à une plus grande échelle et avec plus d’audace pour renforcer la résilience face à leurs effets délétères sur la sécurité alimentaire et la nutrition.

Sur une note plus optimiste, une solution pour l'avenir est exposée au chapitre 4. Sachant que les principaux facteurs ont une incidence sur la sécurité alimentaire et la nutrition par le biais de leurs effets sur les systèmes alimentaires, la solution réside dans une transformation de ces systèmes, et de fait on constate déjà un mouvement dans ce sens. Nous savons que les systèmes alimentaires jouent un rôle central dans la réalisation de l’objectif de l’élimination de la faim et de la malnutrition sous toutes ses formes et s’agissant de faire en sorte que tous aient accès financièrement à une alimentation saine. Le Sommet des Nations Unies sur les systèmes alimentaires, qui aura lieu cette année, en 2021, devrait déboucher sur une série de mesures concrètes qui pourront être prises partout dans le monde à l’appui d’une transformation des systèmes alimentaires. Dans cette perspective, le présent rapport énonce six voies de transformation qui, mises en œuvre isolément, ou souvent plusieurs à la fois, permettront d’agir spécifiquement contre les effets des grands facteurs qui ont causé la récente hausse de la faim et le ralentissement de la progression vers une réduction de la malnutrition sous toutes ses formes. Ces six voies sont les suivantes: i) intégrer l’action humanitaire, les politiques de développement et la consolidation de la paix, dans les zones touchées par des conflits; ii) renforcer la résilience face aux changements climatiques dans l’ensemble du système alimentaire; iii) renforcer la résilience des plus vulnérables face à l’adversité économique; iv) intervenir le long de la chaîne d’approvisionnement alimentaire en vue de réduire le coût des aliments nutritifs; v) lutter contre la pauvreté et les inégalités structurelles en veillant à ce que les interventions soient favorables aux pauvres et inclusives; et vi) renforcer l’environnement alimentaire et changer le comportement des consommateurs afin de favoriser des habitudes alimentaires ayant une incidence positive sur la santé humaine et sur l’environnement.

La complexité des défis que présentent la sécurité alimentaire et la nutrition exige une synergie accrue et une plus grande cohérence dans la formulation des politiques et dans leur mise en œuvre dans les divers secteurs, avec à l’appui des investissements plus stratégiques de la part du secteur privé et du secteur public, une condition essentielle pour éviter les compromis indésirables. Cela signifie aussi que les solutions cloisonnées ne sont plus envisageables. Des portefeuilles intégrés de politiques, d'investissements et de lois seront nécessaires le long des voies de transformation – qui seront choisies en fonction de chaque contexte –, pour faire face résolument et spécifiquement aux défis de la sécurité alimentaire et de la nutrition.

La persistance des inégalités socioéconomiques et de la pauvreté est un problème majeur, qui ne peut être ignoré dans aucun des processus de transformation des systèmes alimentaires. Cette persistance fait qu’il est d’autant plus nécessaire de donner aux populations vulnérables et marginalisées de longue date davantage accès aux ressources productives, aux technologies, aux données et à l’innovation, afin qu’elles puissent devenir des agents du changement, dans la marche vers des systèmes alimentaires plus durables et plus équitables. Si l’on veut transformer les systèmes alimentaires de sorte qu’ils soient plus résilients face aux principaux facteurs auxquels ils sont soumis et que tous puissent davantage se permettre une alimentation saine, produite de façon durable, il faut pleinement mettre à profit des solutions qui soient gagnant-gagnant et gérer les compromis avec précaution. Au final, il ne suffit pas de s’attaquer aux facteurs qui font grimper le coût des aliments nutritifs: les inégalités et les bas revenus, qui sont le lot de bien des personnes vulnérables, doivent aussi appartenir au passé.

Comme pour tout changement systémique, les mesures qui seront prises dans le cadre des six voies de transformation proposées dans le présent rapport feront des gagnants et des perdants. Les innovations et les nouvelles technologies qui seront introduites serviront d’accélérateurs importants dans les portefeuilles complets de politiques, d’investissements et de lois à mettre en place pour transformer les systèmes alimentaires de manière à rendre l’alimentation saine plus abordable. Il faudra toutefois veiller à instaurer une bonne gouvernance pour que personne ne soit laissé pour compte dans l’accès aux accélérations et pour empêcher que se matérialisent des inégalités et des fractures potentielles. Il sera également essentiel de disposer en temps voulu, au niveau national et au niveau infranational, des données et des informations nécessaires pour suivre les progrès vers les cibles fixées et pour bien cibler les interventions de manière à agir là où il y en a le plus besoin. Comme indiqué au chapitre 2, le fait de disposer de données estimatives sur la sécurité alimentaire établies à l’aide de l’échelle de l’insécurité alimentaire vécue (échelle FIES) et ventilées par zones géographiques a permis aux décideurs et aux planificateurs de repérer les provinces et les régions qui ont le plus besoin d’interventions pour que soit garanti le droit à une nourriture adéquate. En outre, des données plus fournies et de meilleure qualité permettent d’effectuer des analyses de situation propres à chaque contexte, ainsi que des évaluations complètes des facteurs clés qui nuisent aux systèmes alimentaires et, par voie de conséquence, à la sécurité alimentaire et à la nutrition (voir le chapitre 4).

La cohérence des politiques appliquées aux différents systèmes, à savoir une situation dans laquelle la mise en œuvre d’une politique dans un secteur ne compromet pas la politique suivie dans un autre (voire une situation où les politiques se renforcent l’une l’autre), et les accélérateurs transversaux sont essentiels pour maximiser les avantages de la transformation et en limiter le plus possible les effets dommageables. C’est ainsi qu’on pourra créer des portefeuilles de politiques, d’investissements et de lois multisectoriels capables de susciter des transformations et qui permettront d'aboutir à des solutions gagnant-gagnant et aideront à gérer au mieux les compromis qui devront être faits. Il faut aussi mettre en place des approches par système, à savoir des approches territoriales, des approches écosystémiques, des approches par système alimentaire des peuples autochtones, et des interventions qui apportent des solutions systémiques aux situations de crise prolongée.

Le présent rapport souligne le caractère urgent d’une transformation plus générale des systèmes alimentaires, une transformation qui est actuellement au centre des préoccupations mondiales. Il montre aussi que pour nous remettre sur la voie de la réalisation de la cible 2.1 (faire en sorte que chacun ait accès toute l’année à une alimentation saine, nutritive et suffisante) et de la cible 2.2 (mettre fin à toutes les formes de malnutrition) des ODD, nous devons nous engager dans les voies de transformation et veiller à la cohérence des politiques, afin d'aider le plus grand nombre à faire face aux facteurs à l’origine de la récente poussée de la faim et du ralentissement des progrès vers la réduction de toutes les formes de malnutrition.

TABLEAU A1.1
PROGRÈS ACCOMPLIS VERS LA RÉALISATION DES OBJECTIFS DE DÉVELOPPEMENT DURABLE (ODD) ET DES CIBLES NUTRITIONNELLES MONDIALES: PRÉVALENCE DE LA SOUS-ALIMENTATION, DE L’INSÉCURITÉ ALIMENTAIRE MODÉRÉE OU GRAVE, DE CERTAINES FORMES DE MALNUTRITION, DE L’ALLAITEMENT EXCLUSIF ET DE L’INSUFFISANCE PONDÉRALE À LA NAISSANCE
TABLEAU A1.2
PROGRÈS ACCOMPLIS VERS LA RÉALISATION DES OBJECTIFS DE DÉVELOPPEMENT DURABLE (ODD) ET DES CIBLES NUTRITIONNELLES MONDIALES: NOMBRE DE PERSONNES SOUS-ALIMENTÉES, EN SITUATION D’INSÉCURITÉ ALIMENTAIRE MODÉRÉE OU GRAVE ET SOUFFRANT DE CERTAINES FORMES DE MALNUTRITION; NOMBRE DE NOURRISSONS EXCLUSIVEMENT NOURRIS AU SEIN ET NOMBRE DE BÉBÉS PRÉSENTANT UNE INSUFFISANCE PONDÉRALE À LA NAISSANCE
Sous-alimentation

Définition: La sous-alimentation est définie comme étant la situation dans laquelle la consommation alimentaire habituelle d’un individu est insuffisante pour fournir, en moyenne, l’apport énergétique alimentaire nécessaire à une vie normale, active et en bonne santé.

Indicateur: L’indicateur correspondant est une valeur de prévalence, la «prévalence de la sous-alimentation» (PoU, prevalence of undernourishment), qui est une estimation du pourcentage de personnes dans la population totale qui sont en situation de sous-alimentation. Pour tenir compte du manque de fiabilité de certains des paramètres sous-jacents, tels que la variation d’une année sur l’autre des stocks de produits alimentaires – l’une des composantes des bilans alimentaires annuels de la FAO, pour laquelle il est très rare qu’on dispose d’informations fiables –, on présente les estimations nationales sous forme de moyennes mobiles sur trois ans. Les agrégats régionaux et mondiaux, quant à eux, sont présentés sous forme d’estimations annuelles, car on considère qu’il n’y a en principe pas de corrélation entre les éventuelles erreurs d’estimation d’un pays à l’autre.

Méthode: Pour estimer la prévalence de la sous-alimentation dans une population, on modélise la loi de distribution de probabilité de l’apport énergétique alimentaire habituel, exprimé en kcal par personne et par jour pour un individu moyen, sous la forme d’une fonction de densité de probabilité paramétrique, f(x)290,291. On obtient ensuite l’indicateur en calculant la probabilité cumulée que l’apport énergétique alimentaire habituel (x) soit inférieur aux besoins énergétiques alimentaires minimaux (MDER) (limite inférieure de la plage des besoins énergétiques pour un individu moyen représentatif), comme dans la formule ci-dessous:

θ est un vecteur de paramètres caractérisant la fonction de densité de probabilité. On part du principe que la distribution est log-normale, et donc totalement caractérisée par deux paramètres seulement: la consommation d’énergie alimentaire (DEC) moyenne et son coefficient de variation (CV).

Source de données: Différentes sources de données sont utilisées pour estimer les paramètres du modèle.

Besoins énergétiques alimentaires minimaux (MDER): Pour déterminer les besoins énergétiques d’une personne appartenant à une classe d’âge/un sexe donné(e), on multiplie les besoins normalisés associés au taux métabolique de base (exprimés par kilogramme de poids corporel) par le poids idéal d’une personne en bonne santé de ce sexe/cette classe d’âge (compte tenu de sa taille); on multiplie ensuite la valeur obtenue par un coefficient correspondant au niveau d’activité physique (NAP) afin de prendre en compte cette dernièrear. Étant donné que l’indice de masse corporelle (IMC) et le NAP varient chez les personnes actives et en bonne santé de mêmes sexe et âge, on obtient une plage de besoins énergétiques pour chaque tranche d’âge de la population et chaque sexe. Les MDER d’un individu moyen dans la population – paramètre utilisé dans la formule de la PoU – correspondent à la moyenne pondérée des valeurs minimales des plages de besoins énergétiques pour chaque tranche d’âge et sexe, la part de la population représentée par chaque groupe tenant lieu de coefficient de pondération.

Des informations sur la structure de la population par sexe et par âge sont disponibles pour la plupart des pays et pour chaque année dans les World Population Prospects (Perspectives de la population mondiale) du Département des affaires économiques et sociales (DAES) de l’ONU, lesquelles sont établies tous les deux ans. La présente édition de L’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde utilise la version 2019 des World Population Prospects168.

Les informations relatives à la taille médiane de chaque tranche d’âge et sexe pour un pays spécifique sont tirées d’une enquête démographique et sanitaire (EDS) récente ou d’autres enquêtes qui collectent des données anthropométriques sur les enfants et les adultes. Même si ces enquêtes ne se rapportent pas à la même année que celle pour laquelle on estime la PoU, les changements possibles d’une année sur l’autre dans les statures médianes sont peu importants, et leur incidence sur les estimations de la PoU est donc considérée comme négligeable.

Consommation d’énergie alimentaire (DEC): Dans l’idéal, il faudrait disposer de données sur la consommation alimentaire issues d’enquêtes sur les ménages représentatives au niveau national (enquêtes sur le niveau de vie, ou sur les revenus et les dépenses des ménages, par exemple). Cependant, très peu de pays réalisent ce type d’enquêtes chaque année. De ce fait, dans les estimations de la PoU calculées par la FAO aux fins du suivi mondial, les valeurs de DEC sont estimées à partir des disponibilités énergétiques alimentaires (DEA) communiquées dans les bilans alimentaires établis par la FAO pour la plupart des pays du monde (voir FAO, 2021)329.

Depuis la dernière édition du présent rapport, le nouveau domaine ajouté à FAOSTAT a été mis à jour et comprend désormais l’année 2018. Au moment de la rédaction, les séries de bilans alimentaires avaient été actualisées jusqu’en 2019 pour les 56 pays suivants, qui représentent la plus grande partie de la population sous-alimentée ou de la population totale: Afghanistan, Afrique au sud, Algérie, Angola, Bangladesh, Bolivie (État plurinational de), Burkina Faso, Cambodge, Cameroun, Chine (continentale), Colombie, Congo, Côte d’Ivoire, Équateur, Eswatini, Éthiopie, Guatemala, Haïti, Honduras, Inde, Indonésie, Iran (République islamique d’), Iraq, Kenya, Libéria, Madagascar, Malawi, Mali, Mexique, Mongolie, Mozambique, Myanmar, Népal, Nigéria, Ouzbékistan, Pakistan, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Pérou, Philippines, République centrafricaine, République démocratique du Congo, République démocratique populaire lao, République populaire démocratique de Corée, République-Unie de Tanzanie, Rwanda, Sénégal, Sierra Leone, Somalie, Soudan, Sri Lanka, Tchad, Thaïlande, Togo, Venezuela (République bolivarienne du), Viet Nam et Yémen.

Les estimations des DEA moyennes par habitant pour 2020, calculées à partir des perspectives à court terme des marchés établies par la FAO pour éclairer la situation alimentaire mondiale330, sont utilisées pour obtenir une prévision immédiate de la valeur des DEA de chaque pays en 2020, en commençant par la dernière année en date disponible dans les séries des bilans alimentaires.

Coefficient de variation (CV): Lorsqu’on dispose de données fiables sur la consommation alimentaire, issues d’enquêtes sur les ménages représentatives au niveau national telles que celles mentionnées plus haut, le coefficient de variation imputable aux revenus (CV|y), qui décrit la distribution des besoins énergétiques alimentaires journaliers moyens dans la population, peut être estimé directement. Depuis la dernière édition de ce rapport, 21 nouvelles enquêtes réalisées dans les 17 pays suivants ont été traitées aux fins d’actualisation du CV|y: Afghanistan, Arménie, Bolivie, Botswana, Brésil, Burkina Faso, Éthiopie, Îles Salomon, Kiribati, Malawi, Mongolie, Namibie, Nigéria, Ouganda, Pakistan, Rwanda et Samoa. Le CV|y repose donc désormais sur un total de 101 enquêtes dans 54 pays.

Lorsqu’on ne dispose pas de données d’enquête appropriées, on a recours aux données FIES collectées par la FAO depuis 2014 pour établir une projection des variations du CV|y à partir de 2015 (ou à partir de l’année de la dernière enquête de consommation alimentaire réalisée) et jusqu’à 2019, en se basant sur une tendance lissée (moyenne mobile sur trois ans) de l’insécurité alimentaire grave. Pour la prévision immédiate du CV|y en 2020, voir l’annexe 2. Depuis 2014, les données FIES donnent des indications sur l’évolution récente de l’insécurité alimentaire grave qui peuvent refléter étroitement celle de la prévalence de la sous-alimentation. Si tant est qu’elles ne s’expliquent pas par des changements dans les approvisionnements alimentaires moyens, ces tendances de la PoU peuvent donc être utilisées pour inférer l’évolution possible du CV|y au cours de l’année la plus récente. L’analyse de l’ensemble combiné des estimations passées de la PoU montre qu’en moyenne, après neutralisation des différences liées à la DEC et aux MDER, le CV|y explique un tiers environ des écarts de PoU dans le temps et dans l’espace. Pour chaque pays pour lequel on dispose de données FIES, le CV|y est estimé par le montant susceptible d’entraîner une variation d’un tiers de point de pourcentage de la PoU pour chaque point de pourcentage de variation observé dans la prévalence de l’insécurité alimentaire grave. Pour tous les autres pays, on conserve la valeur estimée du CV|y pour 2017.

Dans l’approche paramétrique utilisée par la FAO pour estimer la prévalence de la sous-alimentation, le CV lié au poids corporel et au style de vie, également appelé coefficient de variation imputable aux besoins énergétiques (CV|r), reflète la variabilité de la distribution des besoins énergétiques alimentaires d’un individu moyen hypothétique représentatif d’une population en bonne santé, et correspond également au CV de la distribution des apports énergétiques alimentaires d’un individu moyen hypothétique si la population est parfaitement bien nourrie. La distribution des besoins énergétiques alimentaires d’un individu moyen hypothétique peut être considérée comme étant normale, et sa variabilité peut donc être estimée si au moins deux centiles et leurs valeurs sont connus. Par conséquent, sachant que nous souhaitons dériver la distribution théorique des besoins énergétiques alimentaires d’un individu moyen hypothétique en bonne santé afin d’estimer le CV|r, nous pouvons utiliser les MDER et les besoins énergétiques alimentaires moyens (ADER) pour obtenir une approximation du 1er centile et du 50e centile de la distribution des besoins énergétiques de cet individu, car ils reposent sur les mêmes principes, à savoir une moyenne pondérée, par groupes de sexe/d’âge/d’état physiologique331,332. La valeur du CV|r est donc dérivée sous la forme d’une distribution normale type cumulative inverse de la différence entre les MDER et les ADER. Comme pour les MDER, on estime les ADER à partir de la moyenne des valeurs minimale et maximale de la catégorie de NAP «Style de vie actif ou relativement actif».

On obtient ensuite le CV total en calculant la moyenne géométrique du CV|y et du CV|r:

Problèmes et limites: La sous-alimentation est normalement un état individuel, mais, étant donné qu’on dispose généralement de données à grande échelle, il est impossible de déterminer de manière fiable les individus qui, au sein d’un groupe spécifique, sont effectivement sous-alimentés. Avec le modèle statistique décrit plus haut, l’indicateur ne peut être calculé qu’en référence à une population ou à un groupe d’individus pour laquelle/lequel on dispose d’un échantillon représentatif. La prévalence de la sous-alimentation est donc une estimation du pourcentage d’individus du groupe considéré qui sont sous-alimentés, et ne peut pas être décomposée plus finement.

Compte tenu de la nature probabiliste de l’inférence et des marges d’incertitude associées aux estimations de chacun des paramètres du modèle, la précision des estimations de la prévalence de la sous-alimentation est généralement faible. Il n’est pas possible de calculer formellement les marges d’erreur associées aux estimations de la prévalence de la sous-alimentation, mais il est probable qu’elles sont supérieures à 5 pour cent dans la plupart des cas. C’est pourquoi la FAO considère que les estimations de la prévalence de la sous-alimentation qui sont inférieures à 2,5 pour cent ne sont pas suffisamment fiables pour figurer dans les rapports.

Références:

FAO. 1996. «Methodology for assessing food inadequacy in developing countries». Dans: FAO. The Sixth World Food Survey, p. 114-143. Rome.

FAO. 2003. Sommaire des débats: Mesure et évaluation des pénuries alimentaires et de la dénutrition: Colloque scientifique international. Rome.

FAO. 2014. Advances in hunger measurement: traditional FAO methods and recent innovations. Division de la statistique de la FAO. Document de travail n° 14-04. Rome.

Naiken, L. 2002. Résumé de la communication invitée: Méthodologie de la FAO pour estimer la prévalence de la sous-alimentation. Document présenté lors du colloque scientifique international Mesure et évaluation des pénuries alimentaires et de la dénutrition, Rome, 26-28 juin 2002. Rome, FAO.

Wanner, N., Cafiero, C., Troubat, N. et Conforti, P. 2014. Refinements to the FAO methodology for estimating the prevalence of undernourishment indicator. Rome, FAO.

Insécurité alimentaire évaluée à l’aide de l’échelle de mesure de l’insécurité alimentaire vécue (FIES)

Définition: L’insécurité alimentaire, telle qu’elle est mesurée par cet indicateur, fait référence à un accès à la nourriture limité, au niveau des individus ou des ménages, en raison d’un manque de ressources financières ou d’autres ressources. La gravité de l’insécurité alimentaire est mesurée à l’aide des données collectées grâce au module d’enquête FIES, un ensemble de huit questions qui permettent aux individus ou aux ménages de déclarer des conditions ou des expériences généralement associées à un accès limité à la nourriture. Aux fins du suivi annuel des ODD, les questions sont posées en référence aux 12 mois précédant l’enquête.

Des techniques statistiques sophistiquées fondées sur le modèle de mesure de Rasch permettent de valider les informations obtenues dans le cadre d’une enquête, aux fins de cohérence interne, et de les convertir en une mesure quantitative sur une échelle de gravité (de faible à élevée). Selon leurs réponses aux différentes questions du module d’enquête FIES, les individus ou les ménages interrogés dans le cadre d’une enquête représentative de la population au niveau national se voient associer une probabilité d’appartenir à l’une des trois classes suivantes, définies au moyen de deux seuils fixés à l’échelle internationale: en situation de sécurité alimentaire ou d’insécurité alimentaire marginale; en situation d’insécurité alimentaire modérée; en situation d’insécurité alimentaire grave. À partir des données FIES collectées sur trois ans (de 2014 à 2016), la FAO a défini l’échelle de référence FIES, qui est utilisée comme norme mondiale pour les mesures de l’insécurité alimentaire vécue ainsi que pour la fixation des deux seuils de gravité de référence.

L’indicateur 2.1.2 des ODD est obtenu en calculant la probabilité cumulée de se trouver dans les classes correspondant à l’insécurité alimentaire modérée ou grave. Un indicateur distinct (FIsev) est calculé en référence à la classe d’insécurité alimentaire grave uniquement.

Indicateur: Dans le présent rapport, la FAO fournit des informations relatives à deux niveaux d’insécurité alimentaire: l’insécurité alimentaire modérée ou grave (FImod+sev) et l’insécurité alimentaire grave (FIsev). Deux estimations sont données pour chacun de ces niveaux:

  • la prévalence (pourcentage) des individus dans la population qui vivent dans un ménage où l’on a constaté qu’au moins un adulte était en situation d’insécurité alimentaire;

  • l’estimation du nombre des individus dans la population qui vivent dans un ménage où l’on a constaté qu’au moins un adulte était en situation d’insécurité alimentaire.

Source de données: Depuis 2014, on utilise le module d’enquête FIES, qui comporte huit questions, pour recueillir des données sur des échantillons nationalement représentatifs de la population adulte (à savoir les individus âgés de 15 ans et plus) dans plus de 140 pays pris en compte dans le sondage mondial de Gallup© (GWP), qui couvre 90 pour cent de la population mondiale. En 2020, les entretiens se sont déroulés par téléphone compte tenu du risque élevé de contamination des communautés qu’aurait entraîné la collecte de données en présentiel pendant la pandémie de covid-19. Après évaluation de la couverture combinant deux modes (c’est-à-dire la proportion de la population adulte joignable par téléphone fixe ou par téléphone portable), les pays couverts à 70 pour cent au minimum ont été intégrés dans le sondage mondial de 2020 réalisé par entretien téléphonique assisté par ordinateur (méthode CATI). Dans la plupart des pays, les échantillons comptent un millier d’individus environ, mais ils sont plus importants en Inde (9 350 personnes) (où l’on a eu recours à une combinaison des méthodes CAPI [entretien individuel assisté par ordinateur] et CATI) et en Chine continentale (5 500 personnes). En 2020, on a eu recours à un suréchantillonnage pour cinq pays: Bangladesh (3 000), Égypte (2 000), Fédération de Russie (4 000), Turquie (2 000) et Viet Nam (2 000).

En plus du sondage mondial de Gallup©, en 2020, la FAO a collecté des données dans 20 pays au moyen de la plateforme Geopoll®, dans le but spécifique d’évaluer l’insécurité alimentaire en période de pandémie. Les pays concernés étaient les suivants: Afghanistan, Afrique du Sud, Burkina Faso, Cameroun, Tchad, El Salvador, Éthiopie, Guatemala, Haïti, Iraq, Libéria, Mozambique, Myanmar, Niger, Nigéria, République centrafricaine, République démocratique du Congo, Sierra Leone, Somalie et Zimbabwe. Pour tous ces pays, l’évaluation 2020 repose sur des données Geopoll.

S’agissant de l’Afghanistan, de l’Angola, de l’Arménie, du Botswana, du Burkina Faso, de Cabo Verde, du Canada, du Chili, du Costa Rica, de l’Équateur, des États-Unis d’Amérique, de la Fédération de Russie, des Fidji, du Ghana, de la Grèce, de la Grenade, du Honduras, de l’Indonésie, d’Israël, du Kazakhstan, du Kenya, du Kirghizistan, du Kiribati, du Lesotho, du Malawi, du Maroc, de la Mauritanie, du Mexique, de la Namibie, du Niger, du Nigéria, de l’Ouganda, de la Palestine, des Philippines, de la République de Corée, de la République-Unie de Tanzanie, de Sainte-Lucie, du Samoa, du Sénégal, des Seychelles, de la Sierra Leone, du Soudan, du Soudan du Sud, des Tonga, du Vanuatu, du Viet Nam et de la Zambie, on a utilisé les données provenant d’enquêtes publiques nationales pour estimer la prévalence de l’insécurité alimentaire, en appliquant les méthodes statistiques de la FAO afin d’ajuster les résultats nationaux sur la même norme de référence mondiale, ce qui couvre un quart environ de la population mondiale. Les pays sont pris en compte pour l’année/les années pour laquelle/lesquelles des données nationales sont disponibles, et sont intégrés dans les agrégats régionaux et mondiaux en faisant l’hypothèse d’une tendance constante sur la période 2014-2020 ou en complétant les années restantes par des données GWP ou Géopoll si celles-ci sont compatibles. Les pays suivants font exception à cette règle: Arménie, Botswana, Burkina Faso, Chili, Costa Rica, Équateur, Ghana, Honduras, Indonésie, Israël, Malawi, Namibie, Niger, Nigéria, Ouganda, Sierra Leone et Zambie. Pour ces pays, on a procédé comme suit:

  • Les données nationales recueillies sur une année ont été prises en compte pour l’année correspondante.

  • Pour les autres années, on a appliqué aux données nationales la tendance lissée obtenue à partir des données collectées par la FAO au moyen du sondage mondial de Gallup©, afin de rendre l’évolution dans le temps. La tendance lissée est calculée en prenant le taux moyen de variation entre les moyennes consécutives sur trois ans.

On a choisi de procéder ainsi en raison des solides éléments probants qui ont été réunis à l’appui de la tendance ressortant des données collectées par la FAO (évolution de la pauvreté, de la pauvreté extrême, de l’emploi, de l’inflation des prix des aliments, entre autres) et qui permettent de fournir une description plus à jour de la tendance sur la période 2014-2020.

Concernant l’Indonésie, le Kazakhstan, le Kirghizistan, la Mauritanie, le Nicaragua, le Paraguay, la République-Unie de Tanzanie, le Rwanda, les Seychelles et le Soudan, du fait de l’absence de données pour 2020, on a utilisé la tendance sous-régionale correspondante entre 2019 et 2020 pour obtenir 2020.

Méthode: Les données ont été validées et utilisées pour établir une échelle de gravité de l’insécurité alimentaire selon le modèle de Rasch, qui postule que la probabilité d’obtenir une réponse affirmative de la personne interrogée i à la question j est une fonction logistique de la distance, sur une échelle de gravité sous-jacente, entre la position de la personne interrogée, ai, et celle de l’item, bj.

En appliquant le modèle de Rasch aux données FIES, on peut estimer pour chaque personne interrogée i la probabilité qu’elle soit en situation d’insécurité alimentaire (pi,L), à chaque niveau L de gravité (modérée ou grave, ou grave) de cette situation, avec 0 < p i,L < 1.

La prévalence de l’insécurité alimentaire à chaque niveau de gravité (FIL) dans la population est calculée comme étant la somme pondérée de la probabilité d’être en situation d’insécurité alimentaire pour toutes les personnes interrogées (i) d’un échantillon:

wi correspond à la pondération poststratification qui indique la proportion d’individus ou de ménages dans la population nationale représentée par chaque enregistrement de l’échantillon.

Étant donné que seules les personnes âgées de 15 ans ou plus sont échantillonnées dans le sondage mondial de Gallup©, les estimations de prévalence produites directement à partir des données de ce sondage portent sur la population située dans cette tranche d’âge. Pour obtenir la prévalence et le nombre d’individus (de tous les âges) dans la population, il faut estimer le nombre de personnes qui vivent dans un ménage où au moins un adulte est considéré comme étant en situation d’insécurité alimentaire. À cet effet, on utilise la procédure par étapes expliquée à l’annexe 2 du rapport technique du projet Voices of the Hungry («La parole à ceux qui ont faim», voir le lien dans la section «Références» ci-après).

Les valeurs agrégées régionales et mondiales de l’insécurité alimentaire de niveau modéré ou grave et de niveau grave, FIL,r, sont calculées comme suit:

r indique la région, FIL,c est la valeur de FI de niveau L estimée pour le pays c dans la région, et Nc, la taille de la population correspondante. En l’absence d’estimation de FIL pour un pays, on considère que cette valeur est égale à la moyenne, pondérée par la population, des valeurs estimatives pour les pays restants de la même région. L’agrégat régional est calculé uniquement si les pays pour lesquels une estimation est disponible représentent au moins 50 pour cent, plutôt que 80 pour cent, de la population de la région.

Des seuils universels sont définis sur l’échelle FIES internationale de référence (une série de valeurs de paramètres d’items calculées à partir des résultats de tous les pays visés par le sondage mondial de Gallup© en 2014-2016) et convertis dans les valeurs correspondantes sur les échelles locales. Le processus d’étalonnage de l’échelle de chaque pays au regard de l’échelle FIES internationale de référence peut être présenté comme une mise en correspondance qui permet de produire des mesures comparables à l’échelle internationale de la gravité de l’insécurité alimentaire des personnes interrogées, ainsi que des taux de prévalence nationaux comparables.

Le problème vient du fait que, lorsqu’elle est définie comme un trait latent, la gravité de l’insécurité alimentaire ne peut pas être évaluée par rapport à une référence absolue. Le modèle de Rasch permet de déterminer la position relative occupée par les différents items sur une échelle libellée en unités logit, mais dont le «zéro» est défini arbitrairement (comme étant la gravité moyenne estimée, généralement). Cela signifie que le zéro de l’échelle change dans chaque cas. Pour produire des mesures comparables dans le temps et entre différentes populations, il faut définir une échelle commune qui sera utilisée comme référence, et trouver la formule nécessaire pour convertir les mesures entre les différentes échelles. Comme lorsqu’on convertit des mesures de température effectuées selon des échelles différentes (Celsius et Fahrenheit, par exemple), il faut déterminer un certain nombre de points d’«ancrage». Dans la méthode FIES, ces points d’ancrage sont les niveaux de gravité associés aux items dont la position relative sur l’échelle de gravité peut être considérée comme égale à celle des items correspondants sur l’échelle de référence internationale. Ensuite, pour «mettre en correspondance» les mesures établies selon les différentes échelles, on détermine la formule pour laquelle la moyenne et les écarts types des niveaux de gravité des items communs sont égaux.

Problèmes et limites: Lorsque les estimations de prévalence de l’insécurité alimentaire reposent sur les données FIES recueillies dans le cadre du sondage mondial de Gallup©, avec des échantillons nationaux d’un millier de personnes environ dans la plupart des pays, les intervalles de confiance dépassent rarement 20 pour cent de la prévalence mesurée (ce qui signifie que des taux de prévalence de 50 pour cent sont associés à des marges d’erreur pouvant aller jusqu’à plus ou moins 5 pour cent). Les intervalles de confiance pourront toutefois être beaucoup plus petits si les taux de prévalence nationaux sont estimés à partir d’échantillons plus importants ou s’il s’agit d’estimations portant sur des agrégats de plusieurs pays. Afin de réduire l’effet de la variabilité de l’échantillonnage d’une année sur l’autre, on présente les estimations nationales sous forme de moyennes sur trois ans, calculées en faisant la moyenne de toutes les années disponibles pour les périodes triennales considérées.

Références:

Gallup. 2020. «Gallup Keeps Listening to the World Amid the Pandemic». Dans: Gallup [en ligne]. [Référencé le 25 mai 2021] https://news.gallup.com/opinion/gallup/316016/gallup-keeps-listening-world-amid-pandemic.aspx.

FAO. 2016. Méthodes d’estimation de taux comparables de prévalence de l’insécurité alimentaire chez les adultes à l’échelle mondiale. Rome (également disponible à l’adresse www.fao.org/3/a-i4830f.pdf).

FAO. 2018. «Voices of the Hungry». Dans: FAO [en ligne]. Rome. [Référencé le 28 avril 2020] www.fao.org/in-action/voices-of-the-hungry/fr/

Retard de croissance, émaciation et excès pondéral chez les enfants de moins de 5 ans

Définition du retard de croissance (enfants de moins de 5 ans): Taille (en cm) rapportée à l’âge (en mois) inférieure d’au moins deux écarts types à la valeur médiane des normes OMS de croissance de l’enfant. Une faible taille par rapport à l’âge traduit les effets cumulés de la dénutrition et des infections depuis la naissance, voire avant. Elle peut résulter de privations nutritionnelles sur une longue durée, d’infections récurrentes et d’un manque d’eau et d’infrastructures d’assainissement.

Indicateur: Pourcentage d’enfants âgés de 0 à 59 mois dont la taille pour l’âge est inférieure d’au moins deux écarts types à la taille médiane pour leur âge selon les normes OMS de croissance de l’enfant.

Définition de l’émaciation: Poids (en kg) rapporté à la taille (en cm) inférieur d’au moins deux écarts types à la valeur médiane des normes OMS de croissance de l’enfant. Un faible poids par rapport à la taille indique une forte perte de poids ou l’absence de prise de poids et peut résulter d’un apport alimentaire insuffisant et/ou de maladies infectieuses, notamment la diarrhée.

Indicateur: Pourcentage d’enfants âgés de 0 à 59 mois dont le poids pour la taille est inférieur d’au moins deux écarts types au poids médian pour leur taille selon les normes OMS de croissance de l’enfant.

Définition de l’excès pondéral chez l’enfant: Poids (en kg) rapporté à la taille (en cm) supérieur d’au moins deux écarts types à la valeur médiane des normes OMS de croissance de l’enfant. Cet indicateur traduit une prise de poids excessive compte tenu de la taille, généralement due à des apports énergétiques supérieurs aux besoins énergétiques de l’enfant.

Indicateur: Pourcentage d’enfants âgés de 0 à 59 mois dont le poids pour la taille est supérieur d’au moins deux écarts types au poids médian pour leur taille selon les normes OMS de croissance de l’enfant.

Source de données: Banque mondiale, OMS et UNICEF. 2021. UNICEF-WHO-World Bank: Joint child malnutrition estimates - Levels and trends (2021 edition) [en ligne]. https://data.unicef.org/resources/jme-report-2021, www.who.int/data/gho/data/themes/topics/joint-child-malnutrition-estimates-unicef-who-wb, https://datatopics.worldbank.org/child-malnutrition.

Méthode:

Estimations au niveau des pays
Estimations communes UNICEF, OMS, Banque mondiale de la malnutrition (chez les enfants) (JME) – Ensemble de données nationales

Pour constituer l’ensemble de données de leurs estimations communes par pays, le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et la Banque mondiale (ci-après «le groupe JME») colligent des sources de données nationales contenant des informations sur la malnutrition chez les enfants – en particulier les données de taille, de poids et d’âge des enfants de moins de 5 ans, qui permettent d’estimer la prévalence du retard de croissance, de l’émaciation et de l’excès pondéral au niveau national. Ces sources de données nationales se composent principalement d’enquêtes menées auprès des ménages (enquêtes en grappes à indicateurs multiples ou enquêtes démographiques et sanitaires, par exemple). Certaines sources de données administratives (provenant de systèmes de surveillance, notamment) sont également prises en compte lorsque la couverture démographique est élevée. À la clôture du dernier examen de données en date, le 31 janvier 2021, l’ensemble de données primaires contenait 997 sources de données provenant de 157 pays et territoires et comprenant près de 80 pour cent des enfants qui vivent dans un pays ayant compté au moins un point de donnée sur le retard de croissance, l’émaciation ou l’excès pondéral au cours des cinq dernières années. Cela indique que les estimations mondiales sont très représentatives de la majorité des enfants du monde pour la période la plus récente. L’ensemble de données comprend l’estimation ponctuelle (ainsi que l’erreur type, lorsqu’elle est disponible), les bornes de l’intervalle de confiance à 95 pour cent et la taille de l’échantillon non pondéré. Lorsque des microdonnées sont disponibles, le groupe JME utilise des estimations qui ont été recalculées pour respecter la définition type mondiale. Lorsqu’aucune microdonnée n’est disponible, ce sont les estimations communiquées qui sont utilisées, sauf si des ajustements s’imposent à des fins de standardisation dans les cas suivants: i) utilisation d’une autre référence de croissance que les normes de croissance de l’OMS de 2006; ii) tranches d’âge ne comprenant pas entièrement le groupe des enfants de 0 à 59 mois; et iii) sources de données nationalement représentatives des populations résidant en milieu rural seulement. Des informations plus détaillées sur la compilation des sources de données, la réanalyse des microdonnées et l’examen des sources de données sont fournies ailleurs333.

L’ensemble de données nationales des JME est utilisé à différentes fins selon les indicateurs. Pour l’émaciation, il donne directement les estimations nationales (en d’autres termes, la prévalence de l’émaciation figurant dans l’ensemble de données nationales des JME et provenant d’une enquête auprès des ménages dans un pays et pour une année donnés est la prévalence de l’émaciation communiquée pour ce pays et cette année). Concernant le retard de croissance et l’excès pondéral, l’ensemble de données nationales des JME est utilisé pour générer les estimations modélisées par pays qui constitueront les JME officielles (autrement dit, la prévalence du retard de croissance provenant d’une enquête auprès des ménages menée dans un pays et pour une année donnés n’est pas communiquée telle quelle, mais sert à générer les estimations modélisées décrites à la section suivante du présent document).

Modèle de niveau pays utilisé pour produire les estimations relatives au retard de croissance et à l’excès pondéral

Les éléments techniques détaillés relatifs aux modèles statistiques sont fournis ailleurs333. En résumé, pour le retard de croissance comme pour l’excès pondéral, la prévalence a été modélisée à une échelle logit (fonction logit) à l’aide d’un modèle mixte longitudinal pénalisé avec un terme d’erreur hétérogène. La qualité des modèles a été quantifiée au moyen de critères d’adéquation au modèle qui équilibrent la complexité de ce dernier et la finesse de l’ajustement aux données observées. La méthode proposée présente des caractéristiques importantes, notamment des tendances temporelles non linéaires, des tendances régionales, des tendances propres aux pays, des données de covariable et un terme d’erreur hétérogène. Tous les pays disposant de données contribuent aux estimations de la tendance temporelle globale et de l’effet des données de covariable sur la prévalence. Concernant l’excès pondéral, les données de covariable consistent en des indices sociodémographiques linéaire et quadratiqueas et un type de source de données. Pour le retard de croissance, on a utilisé les mêmes covariables, auxquelles on a ajouté le nombre moyen d’accès au système de santé au cours des cinq années précédentes.

En 2021, le groupe JME a diffusé des estimations annuelles modélisées du retard de croissance et de l’excès pondéral couvrant la période 2000-2020at pour 155 pays qui avaient au moins un point de données (provenant d’une enquête auprès des ménages, par exemple) figurant dans l’ensemble de données des JME décrit précédemment. Des estimations modélisées ont également été établies pour 49 pays supplémentaires, à seule fin de générer les agrégats régionaux et mondiaux. Les estimations modélisées de ces 49 pays n’ont pas été diffusées parce qu’elles ne correspondaient à aucune enquête auprès des ménages enregistrée dans l’ensemble de données par pays des JME ou parce qu’elles étaient encore en attente d’examen final au moment de la publication. Les résultats obtenus pour les 204 pays peuvent servir à calculer des estimations et des intervalles d’incertitude pour tout agrégat de pays. Les intervalles d’incertitude jouent un rôle essentiel dans le suivi des tendances, en particulier lorsque les données des pays sont fragmentaires ou lorsque les sources de données primaires présentent d’importantes erreurs d’échantillonnage. Lorsqu’on ne dispose que de données fragmentaires pour la période la plus récente, la prise en compte d’une enquête peut modifier nettement l’évolution prévue. Des intervalles d’incertitude sont donc nécessaires pour améliorer l’interprétabilité des tendances en précisant le niveau de prudence utilisé. Les intervalles d’incertitude de la nouvelle méthode des JME ont été testés et validés avec différents types de données.

Estimations régionales et mondiales

Les estimations régionales et mondiales de l’émaciation ne sont présentées que pour l’année la plus récente, 2020, à la différence des estimations du retard de croissance et de l’excès pondéral, pour lesquelles on dispose d’une série chronologique annuelle couvrant 2000 à 2020au. La raison en est que les JME reposent sur des données de prévalence au niveau national, qui proviennent d’enquêtes transversales (donnant un instantané à un moment précis), lesquelles ne sont pas réalisées très fréquemment (tous les trois à cinq ans seulement) dans la plupart des pays. Le retard de croissance et l’excès pondéral n’évoluant guère sur une année calendaire, il est raisonnable de suivre les changements dans le temps de ces deux troubles de croissance au moyen des données en question. L’émaciation, en revanche, est une affection aiguë qui peut évoluer fréquemment et rapidement. Un même enfant peut en effet connaître plusieurs épisodes d’émaciation au cours d’une même année, entrecoupés de périodes où il se rétablit. De plus, dans de nombreux contextes, le risque d’émaciation peut être lié à des variations saisonnières, lesquelles entraînent des pics de prévalence. C’est ainsi que, dans certains contextes, la prévalence de l’émaciation peut doubler entre la saison après récolte (souvent associée à des disponibilités alimentaires plus importantes et des conditions météorologiques moins propices aux maladies) et la saison d’avant récolte (fréquemment caractérisée par des pénuries alimentaires et de fortes pluies, causes de maladies, qui peuvent dégrader l’état nutritionnel). Les enquêtes des pays pouvant être réalisées durant n’importe quelle saison, l’estimation de la prévalence qui en découle peut aussi bien être élevée ou basse; elle peut également être entre les deux si la collecte de données s’est déroulée sur plusieurs saisons. En d’autres termes, la prévalence de l’émaciation rend compte de ce trouble à un moment précis, et non sur une année entière. Les variations saisonnières d’une enquête à l’autre ne permettent guère d’en déduire des tendances. L’absence de méthodes de prise en compte de la saisonnalité et de l’incidence de l’émaciation est la principale raison expliquant que les JME ne présentent pas de tendances annuelles pour cette forme de malnutrition.

Génération des estimations régionales et mondiales

Les estimations régionales et mondiales du retard de croissance et de l’excès pondéral ont été obtenues par des méthodes différentes de celles utilisées pour l’émaciation, comme indiqué ci-après. Pour résumer, les premières ont été générées à partir des résultats du nouveau modèle de niveau pays, et les secondes, au moyen du modèle multiniveau sous-régional des JME.

Retard de croissance et excès pondéral

Les estimations régionales et mondiales établies pour chaque année de 2000 à 2020av ont été calculées en faisant la moyenne des chiffres des pays respectifs, pondérés par le nombre d’enfants de moins de 5 ans de ces pays, tel qu’il figure dans l’édition 2019 de la publication des Nations Unies World Population Prospects (Perspectives de la population mondiale), en utilisant les estimations modélisées pour 204 pays. Ce nombre comprend 155 pays possédant des sources de données nationales (des enquêtes auprès des ménages, par exemple) enregistrées dans l’ensemble de données nationales des JME décrit précédemment. Il comprend également 49 pays pour lesquels on a modélisé des estimations qui ont servi à élaborer les agrégats régionaux et mondiaux, mais qui n’ont pas été communiquées parce qu’elles ne correspondaient à aucune enquête auprès des ménages enregistrée dans l’ensemble de données par pays des JME ou parce qu’elles étaient encore en attente d’examen final au moment de la publication. Les intervalles de confiance ont été calculés en utilisant la technique du bootstrap.

Émaciation

Les données de prévalence de l’émaciation provenant des sources de données nationales, décrites à la section précédente traitant de l’ensemble de données par pays des JME, ont été utilisées pour générer des estimations régionales et mondiales pour l’année 2020aw à l’aide du modèle multiniveau sous-régional des JME, en appliquant des pondérations correspondant au nombre d’enfants de moins de 5 ans donné par les World Population Prospects 2019.

Problèmes et limites: La périodicité recommandée en matière de communication d’informations sur le retard de croissance, l’excès pondéral et l’émaciation est de trois à cinq ans, mais certains pays mettent ces données à disposition moins fréquemment. Bien que tout ait été fait pour optimiser la comparabilité des statistiques entre pays et dans le temps, les données des pays peuvent différer du point de vue des modalités de collecte, de la population couverte et des méthodes d’estimation utilisées. Les estimations issues des enquêtes sont assorties de niveaux d’incertitude imputables à la fois à des erreurs d’échantillonnage et à d’autres types d’erreurs (erreurs techniques de mesure, erreurs d’enregistrement, etc.). Aucune de ces deux sources d’erreurs n’a été pleinement prise en compte dans le calcul des estimations aux niveaux national, régional et mondial.

En ce qui concerne la prévalence de l’émaciation, la saison peut influer sur les estimations, car les enquêtes sont généralement menées pendant une période spécifique de l’année. Les facteurs saisonniers jouant sur l’émaciation sont notamment les disponibilités alimentaires (période avant récolte, par exemple) et les maladies (saison des pluies et diarrhées, paludisme, etc.). Par ailleurs, les catastrophes naturelles et les conflits peuvent aussi entraîner une profonde modification des tendances, qu’il conviendrait de traiter différemment des variations saisonnières. Les estimations de l’émaciation par pays et par année ne sont donc pas nécessairement comparables dans le temps, ce qui explique que seules les estimations les plus récentes (2020ax) soient présentées.

Références:

de Onis, M., Blössner, M., Borghi, E., Morris, R. et Frongillo, E.A. 2004. «Methodology for estimating regional and global trends of child malnutrition». International Journal of Epidemiology, 33(6): 1260-1270. https://doi.org/10.1093/ije/dyh202.

GBD 2019 Risk Factor Collaborators. 2020. «Global burden of 87 risk factors in 204 countries and territories, 1990-2019: a systematic analysis for the Global Burden of Disease Study 2019». The Lancet, 396(10258): 1223-1249. https://doi.org/10.1016/s0140-6736(20)30752-2.

Banque mondiale, OMS et UNICEF. 2021. UNICEF-WHO-World Bank: Joint child malnutrition estimates - Levels and trends (2021 edition) [en ligne]. https://data.unicef.org/resources/jme-report-2021, www.who.int/data/gho/data/themes/topics/joint-child-malnutrition-estimates-unicef-who-wb, https://datatopics.worldbank.org/child-malnutrition.

Banque mondiale, OMS et UNICEF. 2021. Technical notes from the background document for country consultations on the 2021 edition of the UNICEF-WHO-World Bank Joint Malnutrition Estimates. SDG Indicators 2.2.1 on stunting, 2.2.2a on wasting and 2.2.2b on overweight. New York (États-Unis d’Amérique), UNICEF (également disponible à l’adresse: data.unicef.org/resources/jme-2021-country-consultations.)

OMS. 2014. Plan d’application exhaustif concernant la nutrition chez la mère, le nourrisson et le jeune enfant. Genève (Suisse). www.who.int/nutrition/publications/CIP_document/fr

OMS. 2019. Nutrition Landscape Information System (NLIS) country profile indicators: interpretation guide. Genève (Suisse) (également disponible à l’adresse: www.who.int/publications/i/item/9789241516952).

Allaitement exclusif

Définition: L’allaitement exclusif du nourrisson de moins de 6 mois correspond à une alimentation composée uniquement de lait maternel, sans aliment ni boisson supplémentaire, pas même de l’eau. L’allaitement exclusif est un facteur fondamental de la survie des enfants et le meilleur moyen de nourrir les nouveau-nés, car le lait maternel met en place le microbiome du bébé, renforce son système immunitaire et réduit le risque de développement de maladies chroniques.

L’allaitement est également bénéfique pour les mères, car il prévient les hémorragies post-partum et favorise l’involution utérine, réduit le risque d’anémie ferriprive et de développement de divers types de cancer, et apporte des avantages psychologiques.

Indicateur: Pourcentage de nourrissons de 0 à 5 mois alimentés exclusivement par du lait maternel, sans aliment ni boisson supplémentaire, pas même de l’eau, au cours des 24 heures précédant l’enquête294.

Source de données: UNICEF. 2020. «Infant and young child feeding». Dans: UNICEF [en ligne]. New York (États-Unis d’Amérique). [Référencé le 19 avril 2021] data.unicef.org/topic/nutrition/infant-and-young-child-feeding.

Méthode:

Cet indicateur couvre également l’allaitement par une nourrice et l’emploi de lait maternel tiré.

Il repose sur une rétrospection de l’alimentation du jour précédent pour un échantillon transversal de nourrissons de 0 à 5 mois.

En 2012, les estimations régionales et mondiales de l’allaitement exclusif ont été établies à l’aide de l’estimation la plus récente disponible pour chaque pays sur la période comprise entre 2005 et 2012. De la même façon, les estimations de 2019 ont été élaborées à l’aide de l’estimation la plus récente disponible pour chaque pays sur la période comprise entre 2014 et 2019. Les moyennes mondiales et régionales ont été calculées en tant que moyennes pondérées de la prévalence de l’allaitement exclusif dans chaque pays, en utilisant le nombre total de naissances donné par les World Population Prospects 2019 (2012 pour la base de référence et 2019 pour les chiffres actuels) comme coefficients de pondération. Sauf indication contraire, les estimations ne sont présentées que lorsque les données disponibles sont représentatives d’au moins 50 pour cent du nombre total de naissances dans les régions correspondantes.

Problèmes et limites: De nombreux pays recueillent des données sur l’allaitement exclusif, mais on manque de données pour les pays à revenu élevé, notamment. La périodicité recommandée pour la communication d’informations sur l’allaitement exclusif est de trois à cinq ans. Cependant, les données de certains pays sont communiquées moins fréquemment, ce qui signifie que la modification des modes d’alimentation n’est souvent pas détectée avant plusieurs années.

Les moyennes régionales et mondiales ont pu en être affectées, selon les pays qui disposaient ou non de données relatives aux périodes visées dans le présent rapport.

Le fait de se baser sur l’alimentation du jour précédent est susceptible d’entraîner une surestimation de la proportion d’enfants exclusivement nourris au sein, car il se peut que des enfants qui reçoivent d’autres liquides ou aliments irrégulièrement n’en aient pas eu la veille de l’enquête.

Références:

UNICEF. 2020. «Infant and young child feeding: exclusive breastfeeding». Dans: UNICEF Data: Monitoring the Situation of Children and Women [en ligne]. New York (États-Unis d’Amérique). [Référencé le 19 avril 2021] Data.unicef.org/topic/nutrition/infant-and-young-child-feeding.

OMS. 2014. Plan d’application exhaustif concernant la nutrition chez la mère, le nourrisson et le jeune enfant. Genève (Suisse). www.who.int/nutrition/publications/CIP_document/fr

OMS. 2019. Nutrition Landscape Information System (NLIS) country profile indicators: interpretation guide. Genève (Suisse) (également disponible à l’adresse: www.who.int/publications/i/item/9789241516952).

OMS et UNICEF. 2021. Indicators for assessing infant and young child feeding practices: definitions and measurement methods.

Insuffisance pondérale à la naissance

Définition: L’insuffisance pondérale à la naissance correspond à un poids à la naissance inférieur à 2 500 grammes, quel que soit l’âge gestationnel. Le poids à la naissance est un marqueur important de la santé et de la nutrition maternelles et fœtales297.

Indicateur: Pourcentage de nouveau-nés dont le poids à la naissance est inférieur à 2 500 grammes.

Source de données: OMS et UNICEF. 2019. «UNICEF-WHO. Low birthweight estimates». Dans: Fonds des Nations Unies pour l’enfance [en ligne]. New York (États-Unis d’Amérique) et Genève (Suisse). [Référencé le 28 avril 2020] www.unicef.org/reports/UNICEF-WHO-low-birthweight-estimates-2019, www.who.int/nutrition/publications/UNICEF-WHO-lowbirthweight-estimates-2019.

Méthode: On peut établir des estimations de l’insuffisance pondérale à la naissance qui soient représentatives au niveau national à partir d’un ensemble de sources, définies globalement comme étant les données administratives ou les enquêtes sur les ménages représentatives à ce niveau. Les données administratives nationales proviennent des systèmes nationaux (notamment le registre et les statistiques de l’état civil), des systèmes d’information de gestion en matière de santé et des registres des naissances. Lorsque les enquêtes nationales menées auprès des ménages fournissent des informations sur le poids à la naissance ainsi que des indicateurs connexes clés, comme la perception maternelle de la taille à la naissance (enquêtes en grappes à indicateurs multiples, enquêtes démographiques et sanitaires), elles sont également une source importante de données sur l’insuffisance pondérale à la naissance, notamment dans les contextes où de nombreux enfants ne sont pas pesés à la naissance et ceux où la tendance à arrondir les données pose problème. Avant d’ajouter les données nationales à l’ensemble de données d’un pays, on vérifie leur couverture et leur qualité et on les ajuste si elles proviennent d’une enquête auprès des ménages. Les données administratives sont réparties dans les catégories suivantes: i) large couverture, si elles représentent au moins 90 pour cent des naissances vivantes; ii) couverture moyenne, si elles représentent entre 80 pour cent et 90 pour cent des naissances vivantes; ou iii) non prises en compte, si elles représentent moins de 80 pour cent des naissances vivantes. Pour être intégrées dans l’ensemble de données, les données d’enquête:

  1. doivent mentionner un poids à la naissance pour 30 pour cent minimum de l’échantillon;

  2. doivent comprendre au minimum 200 poids à la naissance;

  3. ne doivent comporter aucune indication de données très arrondies – ce qui signifie que: a) jusqu’à 55 pour cent de tous les poids à la naissance peuvent correspondre aux trois catégories les plus fréquentes (si les trois poids à la naissance les plus fréquents sont 3 000 g, 3 500 g et 2 500 g, il faut que leur cumul représente au plus 55 pour cent de tous les poids à la naissance de l’ensemble de données); b) jusqu’à 10 pour cent de l’ensemble des poids à la naissance peuvent être supérieurs ou égaux à 4 500 g; c) jusqu’à 5 pour cent des poids à la naissance peuvent correspondre aux extrêmes (500 g et 5 000 g);

  4. doivent avoir été ajustées pour tenir compte des poids à la naissance manquants et de la tendance à arrondir les données295.

Des méthodes de modélisation ont été appliquées aux données nationales acceptées (et aux données acceptées et ajustées, s’agissant de celles issues d’enquêtes auprès des ménages) afin de générer des estimations nationales annuelles pour la période allant de 2000 à 2015. Différentes méthodes ont été utilisées en fonction de la disponibilité et du type des données, comme suit:

  • B-spline: les données nationales présentant jusqu’à 8 points de données issus de sources administratives à large couverture, dont au moins un point avant 2005 et au moins un autre point plus récent que 2010, sont lissées à l’aide d’une régression par B-spline afin de générer des estimations annuelles de l’insuffisance pondérale à la naissance. Un modèle de régression par B-spline a été utilisé pour prédire l’erreur type et calculer des intervalles de confiance à 95 pour cent pour les estimations de l’insuffisance pondérale à la naissance au niveau national. Ces estimations sont très proches de celles figurant dans les propres rapports administratifs des pays.

  • Régression hiérarchique: les données nationales qui ne répondent pas aux exigences associées à la méthode de régression par B-spline mais qui présentent au moins un point de données sur l’insuffisance pondérale à la naissance issu d’une source satisfaisant aux critères d’inclusion sont modélisées au moyen de covariables afin de générer des estimations annuelles de l’insuffisance pondérale à la naissance, ainsi que des intervalles d’incertitude, par une approche de bootstrap. Le modèle comprend le logarithme naturel du taux de mortalité néonatale; la proportion d’enfants présentant une insuffisance pondérale (Z-score poids-taille inférieur d’au moins deux écarts types au poids médian pour leur âge dans la population de référence); le type de données (données administratives de grande/basse qualité, enquête auprès des ménages); la région géographique de l’ONU (Asie du Sud, Caraïbes, par exemple); et un effet aléatoire spécifique du pays. Ces estimations annuelles de l’insuffisance pondérale à la naissance peuvent être sensiblement différentes de celles figurant dans les rapports administratifs nationaux et dans les rapports d’enquête, car les estimations des enquêtes auprès des ménages sont ajustées pour tenir compte des poids à la naissance manquants et des données arrondies, tandis que les rapports d’enquête ne présentent souvent d’estimation de l’insuffisance pondérale à la naissance que pour les enfants dont le poids à la naissance est connu et que cette estimation n’est généralement pas ajustée pour tenir compte de la tendance à arrondir les données.

  • Aucune estimation: la mention «aucune estimation» est associée dans la base de données aux pays pour lesquels les données d’entrée relatives à l’insuffisance pondérale à la naissance n’étaient pas disponibles ou ne répondaient pas aux critères d’inclusion. Au total, 54 pays de la base de données actuelle ont été indiqués comme n’ayant «aucune estimation». Des estimations de l’insuffisance pondérale à la naissance ont néanmoins été calculées pour ces 54 pays, à l’aide des méthodes de régression hiérarchique présentées ci-dessus, mais uniquement aux fins d’établissement des estimations régionales et mondiales.

Les estimations nationales annuelles modélisées sont utilisées pour générer des estimations régionales et mondiales pour la période 2000-2015. Les estimations mondiales sont calculées en additionnant le nombre estimé de naissances vivantes d’un bébé pesant moins de 2 500 g dans les 195ay pays associés à une estimation dans les groupes régionaux des Nations Unies pour chaque année, puis en divisant le résultat par le nombre total de naissances vivantes dans ces 195 pays pendant l’année correspondante. Les estimations régionales sont calculées de manière similaire, pour les pays de chaque groupe régional. Pour obtenir des estimations de l’incertitude aux niveaux mondial et régional, 1 000 estimations ponctuelles du poids à la naissance ont été établies pour chaque pays et chaque année à l’aide soit d’une régression par B-spline (en procédant à un échantillonnage aléatoire à partir d’une distribution normale tracée à l’aide de l’erreur type calculée), soit d’une régression hiérarchique (en utilisant une approche de bootstrap). Les estimations de l’insuffisance pondérale à la naissance correspondant aux 1 000 échantillons ont été additionnées aux niveaux mondial et régional, et les 2,5e et 97,5e centiles des distributions obtenues ont été utilisés en tant qu’intervalles de confiance.

Problèmes et limites: L’une des principales limites du suivi de l’insuffisance pondérale à la naissance à l’échelle mondiale est le manque de données relatives au poids à la naissance de nombreux enfants. Il existe un biais notable lié au fait que les enfants nés de mères pauvres, peu éduquées et vivant en milieu rural auront moins de chances d’avoir été pesés à la naissance que ceux nés de mères plus aisées, ayant fait davantage d’études et vivant en milieu urbain296. Les caractéristiques des nouveau-nés non pesés étant des facteurs de risque d’insuffisance pondérale à la naissance, les estimations qui ne prennent pas correctement en compte ces enfants pourront être inférieures à la valeur réelle. Par ailleurs, on note une faible qualité de la plus grande partie des données disponibles pour les pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure296 s’agissant des arrondis excessifs aux multiples de 500 g ou de 100 g, ce qui peut également fausser les estimations de l’insuffisance pondérale à la naissance. Les méthodes utilisées pour tenir compte, dans la base de données actuelle, des données manquantes et de la tendance à arrondir les données dans les estimations d’enquête295 sont censées remédier à ce problème, mais pour 54 pays au total, il n’a pas été possible d’établir une estimation fiable du poids à la naissance. En outre, les seuils de confiance des estimations mondiales et régionales peuvent être artificiellement bas étant donné que près de la moitié des pays modélisés avaient un effet spécifique généré aléatoirement pour chaque prévision de bootstrap, positif ou négatif selon le cas, ce qui tend à rendre l’incertitude relative aux niveaux mondial et national moindre qu’au niveau des pays individuels.

Références:

Blanc, A. et Wardlaw, T. 2005. «Monitoring low birth weight: An evaluation of international estimates and an updated estimation procedure». Bulletin World Health Organization, 83(3): 178-185.

Blencowe, H., Krasevec, J., de Onis, M., Black, R.E., An, X., Stevens, G.A., Borghi, E., Hayashi, C., Estevez, D., Cegolon, L., Shiekh, S., Ponce Hardy, V., Lawn, J.E. et Cousens, S. 2019. «National, regional, and worldwide estimates of low birthweight in 2015, with trends from 2000: a systematic analysis». The Lancet Global Health, 7(7): e849-e860.

Obésité de l’adulte

Définition: IMC ≥ 30,0 kg/m2. L’indice de masse corporelle (IMC) est le rapport du poids à la taille habituellement utilisé pour classifier l’état nutritionnel des adultes. Il est calculé en divisant le poids corporel en kilogrammes par la taille en mètres élevée au carré (kg/m2). Les individus dont l’IMC est égal ou supérieur à 30 kg/m2 sont considérés comme obèses.

Indicateur: Pourcentage de la population d’individus de plus de 18 ans dont l’IMC est supérieur ou égal à 30,0 kg/m2 , normalisé par âge et pondéré par sexe210.

Source de données: OMS. 2020. Données de l’Observatoire de la santé mondiale. Dans: OMS [en ligne]. Genève (Suisse). [Référencé le 28 avril 2020] Apps.who.int/gho/data/node.main.A900A?lang=en (1 698 études en population, portant sur plus de 19,2 millions de participants âgés de 18 ans ou plus ayant fait l’objet de mesures dans 186 pays298).

Méthode: On a appliqué un modèle hiérarchique bayésien à un ensemble d’études en population qui avaient permis de mesurer la taille et le poids des adultes âgés de 18 ans ou plus afin d’estimer les tendances de l’IMC moyen et de la prévalence des catégories d’IMC (insuffisance pondérale, excès pondéral et obésité) sur la période comprise entre 1975 et 2014. Le modèle intégrait les éléments suivants: les tendances temporelles non linéaires et la structure par âge; la représentativité nationale par opposition à la représentativité infranationale ou communautaire; la couverture des zones rurales et des zones urbaines par opposition à la couverture de l’un de ces deux types de zone seulement. Le modèle comprenait également des covariables utiles à l’estimation de l’IMC, notamment les revenus nationaux, la proportion de population résidant en milieu urbain, le nombre moyen d’années d’études et des indicateurs synthétiques relatifs aux disponibilités de différents types d’aliments destinés à la consommation humaine.

Problèmes et limites: Dans certains pays, les sources de données étaient rares, et 42 pour cent seulement des sources retenues comprenaient des données relatives aux personnes de plus de 70 ans.

Références:

NCD Risk Factor Collaboration (NCD-RisC). 2016. «Trends in adult body-mass index in 200 countries from 1975 to 2014: a pooled analysis of 1698 population-based measurement studies with 19.2 million participants». The Lancet, 387 (10026): 1377–1396.

OMS. 2019. Nutrition Landscape Information System (NLIS) country profile indicators: interpretation guide. Genève (Suisse) (également disponible à l’adresse: www.who.int/publications/i/item/9789241516952).

Anémie chez les femmes en âge de procréer

Définition: Pourcentage des femmes âgées de 15 à 49 ans dont la concentration d’hémoglobine est inférieure à 120 g/litre (pour les femmes qui ne sont pas enceintes ou qui allaitent) ou à 110 g/litre (pour les femmes enceintes), après ajustement en fonction de l’altitude et du tabagisme des femmes considérées.

Indicateur: Pourcentage de femmes en âge de procréer (âgées de 15 à 49 ans) dont la concentration d’hémoglobine dans le sang est inférieure à 110 g/litre pour les femmes enceintes et à 120 g/litre pour les femmes non enceintes.

Source de données:

OMS. 2021. Vitamin and Mineral Nutrition Information System (VMNIS). Dans: OMS [en ligne]. Genève (Suisse). [Référencé le 25 mai 2021] www.who.int/teams/nutrition-food-safety/databases/vitamin-and-mineral-nutrition-information-system.

OMS. 2021. Global anaemia estimates, Edition 2021. Dans: Global Health Observatory (GHO) data repository [en ligne]. Genève (Suisse). [Référencé le 25 mai 2021] www.who.int/data/gho/data/indicators/indicator-details/GHO/prevalence-of-anaemia-in-women-of-reproductive-age-(-).

Méthode: Les études en population constituent la source de données jugée préférable. Les données proviennent de la base de données sur les micronutriments du Système d’informations nutritionnelles sur les vitamines et les minéraux (VMNIS) de l’OMS. Cette base de données regroupe et synthétise les données sur l’apport en micronutriments des populations à partir de diverses autres sources, y compris des données collectées dans les travaux scientifiques publiés et par le truchement de collaborateurs tels que les bureaux régionaux et les bureaux de pays de l’OMS, les organisations des Nations Unies, les ministères de la santé, les établissements universitaires et les établissements de recherche, ou les organisations non gouvernementales. Outre cela, des données individuelles anonymisées ont été récupérées dans des enquêtes multinationales, notamment les enquêtes démographiques et sanitaires, les enquêtes en grappes à indicateurs multiples, les enquêtes sur la santé de la reproduction et les enquêtes sur les indicateurs de paludisme.

L’édition 2021 des estimations relatives à l’anémie chez les femmes en âge de procréer, enceintes ou non, comprenaient 489 sources de données couvrant la période 1995-2020. L’ajustement des données sur les concentrations d’hémoglobine dans le sang en fonction de l’altitude et du tabagisme des femmes a été effectué chaque fois que possible. Les valeurs d’hémoglobine non plausibles sur le plan biologique (<25 g/l ou >200 g/l) ont été exclues. On a utilisé un modèle de mélange hiérarchique bayésien pour estimer les distributions d’hémoglobine et traiter systématiquement les données manquantes, les tendances temporelles non linéaires et la représentativité des sources de données. En bref, le modèle calcule des estimations pour chaque pays et chaque année, utilisant pour ce faire les données provenant du pays et concernant l’année considérés, si celles-ci sont disponibles, et les données concernant d’autres années pour le même pays et pour d’autres pays disposant de données sur des périodes similaires, en particulier les pays de la même région. Le modèle emprunte des données dans une plus large mesure lorsque les données sont inexistantes ou peu informatives et dans une moindre mesure lorsque les pays et régions disposent de beaucoup de données. Les estimations qui en résultent sont également éclairées par des covariables qui aident à prédire les concentrations d’hémoglobine dans le sang (indice sociodémographique, disponibilités en viande (kcal/habitant), IMC moyen des femmes et logarithme de la mortalité des enfants de moins de 5 ans, par exemple)299. Les plages d’incertitude (intervalles de crédibilité) reflètent les principales sources d’incertitude, notamment l’erreur d’échantillonnage; l’erreur indépendante de l’échantillonnage, due à des problèmes de conception d’échantillon/de mesure; et l’incertitude découlant du calcul des estimations relatives aux pays et aux années sans données.

Problèmes et limites: Malgré la proportion importante de pays disposant de données sur l’anémie issues d’enquêtes nationalement représentatives, la communication des informations relatives à cet indicateur est encore lacunaire, notamment dans les pays à revenu élevé. En conséquence, les estimations peuvent ne pas rendre pleinement compte de la variation entre pays et entre régions, tendant simplement à se resserrer autour des moyennes mondiales quand les données sont rares.

Références:

Stevens, G.A., Finucane, M.M., De-Regil, L.M., Paciorek, C.J., Flaxman, S.R., Branca, F., Peña-Rosas, J.P., Bhutta, Z.A. et Ezzati, M. 2013. «Global, regional, and national trends in haemoglobin concentration and prevalence of total and severe anaemia in children and pregnant and non-pregnant women for 1995-2011: a systematic analysis of population-representative data». The Lancet Global Health, 1(1): e16-e25.

OMS. 2014. Plan d’application exhaustif concernant la nutrition chez la mère, le nourrisson et le jeune enfant. Genève (Suisse).

OMS. 2021. Nutrition Landscape Information System (NliS) Country Profile. Dans: OMS [en ligne]. Genève (Suisse). [Référencé le 10 mai 2021] www.who.int/data/nutrition/nlis/country-profile.

OMS. 2021. Vitamin and Mineral Nutrition Information System (VMNIS). Dans: OMS [en ligne]. Genève (Suisse). [Référencé le 10 mai 2021] www.who.int/teams/nutrition-food-safety/databases/vitamin-and-mineral-nutrition-information-system.

OMS. 2021. WHO Global Anaemia estimates, 2021 Edition. Dans: The Global Health Observatory | WHO [en ligne]. Genève (Suisse). [Référencé le 10 mai 2021] www.who.int/data/gho/data/themes/topics/anaemia_in_women_and_children.

A. Méthodologie relative aux prévisions immédiates de la prévalence de la sous-alimentation en 2020

Comme dans les éditions précédentes de ce rapport, en raison d’un manque d’informations détaillées à propos des valeurs les plus récentes de chacun des éléments utilisés pour calculer la prévalence de la sous-alimentation (PoU) et le nombre de personnes sous-alimentées (NoU) (voir l’annexe 1B), les estimations relatives à l’année écoulée sont des prévisions immédiates; en d’autres termes, il s’agit de prévisions du passé très récent.

Cependant, 2020 est une année atypique à de nombreux égards, du fait de la pandémie de covid-19 et des restrictions sans précédent de la capacité des personnes à travailler et à se déplacer que celle-ci a imposées. Il a fallu prendre en compte des facteurs particuliers pour établir les prévisions immédiates des valeurs de prévalence de la sous-alimentation, notamment pour estimer l’évolution probable du coefficient de variation (CV) et pour modéliser la manière dont les inégalités d’accès à la nourriture contribuent aux taux de sous-alimentation. Ces deux aspects ont nécessité un traitement spécifique.

Estimation de l’évolution de FIsev de 2019 à 2020

La méthode classique fondée sur les informations fournies par la Division des marchés et du commerce de la FAO – lesquelles servent de base pour élaborer les Perspectives agricoles – a pu être utilisée pour établir les prévisions immédiates des valeurs de consommation d’énergie alimentaire (DEC) en 2020, mais il a fallu la modifier pour celles du coefficient de variation. Normalement, les changements de coefficient de variation imputable aux revenus (CV|y) – composante du coefficient de variation correspondant aux différences dans la situation économique des ménages – sont dérivés des différences entre les moyennes sur trois ans de la prévalence de l’insécurité alimentaire grave (FIsev) estimée à partir de l’échelle de mesure de l’insécurité alimentaire vécue (échelle FIES) qui ne sont pas expliquées par des variations des disponibilités alimentaires. L’utilisation de la moyenne sur trois ans permet de corriger l’éventuelle variabilité excessive de l’échantillonnage dans les estimations de la prévalence de l’insécurité alimentaire grave au niveau des pays (lesquelles sont, pour la plupart des pays, fondées sur des échantillons relativement petits de données FIES) et est conforme à l’hypothèse selon laquelle le coefficient de variation imputable aux revenus suit une tendance relativement stable. Étant donné la nature exceptionnelle de l’année 2020, cette hypothèse peut difficilement être maintenue. De ce fait, pour établir une prévision immédiate de la valeur du coefficient de variation imputable aux revenus pour 2020, on a utilisé l’écart entre la moyenne 2017-2019 et la valeur annuelle pour 2020 de la prévalence de l’insécurité alimentaire grave.

Ajustement de la part de la variation de FIsev attribuée à CV|y

Le deuxième paramètre dont il a fallu tenir compte pour établir la prévision immédiate de la valeur de la prévalence de la sous-alimentation pour 2020 est la part de la variation de la prévalence de l’insécurité alimentaire grave attribuée au coefficient de variation imputable aux revenus. On a habituellement considéré qu’elle était d’un tiers, d’après l’analyse économétrique des valeurs précédentes de la prévalence de la sous-alimentation, de la consommation d’énergie alimentaire et du coefficient de variation imputable aux revenus. La nature exceptionnelle de l’année 2020 remet en question cette régularité. Étant donné que les collectes de données dans le cadre d’enquêtes sur la consommation et les dépenses des ménages ont été presque inexistantes en 2020, on ne dispose pas d’une base empirique sur laquelle opérer un ajustement adéquat. La solution qui a été adoptée consiste à effectuer une analyse de sensibilité en modulant le pourcentage de variation de la prévalence de l’insécurité alimentaire grave qui est attribué au coefficient de variation imputable aux revenus entre un minimum d’un tiers et un maximum de un. On a ainsi obtenu la plage des valeurs possibles du coefficient de variation imputable aux revenus, et donc de la prévalence de la sous-alimentation, pour 2020. À des fins d’exhaustivité, le tableau A2.1 présente les limites inférieures et supérieures de la prévalence de la sous-alimentation aux niveaux mondial, régional et sous-régional.

TABLEAU A2.1
PRÉVISIONS IMMÉDIATES DES PLAGES DE LA PRÉVALENCE DE LA SOUS-ALIMENTATION ET DU NOMBRE DE PERSONNES SOUS-ALIMENTÉES POUR 2020

B. Méthodologie relative à l’analyse de l’incidence sur la sécurité alimentaire de la perte de revenu provoquée par la pandémie de covid-19

L’objectif de cette analyse présentée à la section 2.1 était d’estimer l’incidence sur l’insécurité alimentaire, mesurée selon l’échelle FIES, de la perte de revenu provoquée par la pandémie de covid-19. Cette analyse a été rendue possible grâce à l’intégration, dans le sondage mondial 2020 de Gallup© réalisé à partir du module d’enquête FIES, des questions ci-après, qui concernent les conséquences de la pandémie sur l’emploi et les revenus:

  • Avez-vous vécu les situations suivantes du fait des répercussions de la covid-19?

    1. Avez-vous cessé temporairement votre emploi ou les activités de votre entreprise: Oui/Non

    2. Avez-vous perdu votre emploi ou fermé votre entreprise: Oui/Non

    3. Avez-vous travaillé moins d’heures dans le cadre de votre emploi ou des activités de votre entreprise: Oui/Non

    4. Avez-vous perçu moins d’argent que d’habitude de votre employeur ou des activités de votre entreprise: Oui/Non

Les répondants étaient des femmes et des hommes adultes (15 ans et plus). Les personnes qui ont répondu «Je ne sais pas/Refus de répondre/Sans objet ou absence d’emploi» à chacune des questions ont été exclues de l’analyse. On peut donc supposer que les résultats concernent uniquement la population qui travaillait (emploi ou entreprise propre) au moment où la pandémie de covid-19 a débuté.

Un ensemble de modèles de régression logistique à effet aléatoire a été appliqué. On a utilisé comme variables de résultat (dépendantes) le degré d’insécurité alimentaire – modérée ou grave, et grave seulement – des répondants, comme suit:

  • Insécurité alimentaire modérée ou grave: variable dichotomique prenant la valeur 1 si la probabilité ajustée (niveau mondial) d’être en situation d’insécurité alimentaire modérée ou grave était supérieure à 0,5, et prenant sinon la valeur 0;

  • Insécurité alimentaire grave: variable dichotomique prenant la valeur 1 si la probabilité ajustée (niveau mondial) d’être en situation d’insécurité alimentaire grave était supérieure à 0,5, et prenant sinon la valeur 0.

Les deux variables d’insécurité alimentaire ont été intégrées dans des modèles de régression distincts afin d’étudier l’impact différentiel de la crise provoquée par la covid-19 sur les différents degrés d’insécurité alimentaire.

Les réponses aux questions 1 à 4 (cessation temporaire du travail; perte du travail; moins d’heures travaillées; moins d’argent gagné) ont été intégrées en tant que variables explicatives (indépendantes) dans un modèle de régression distinct. Par ailleurs, le niveau d’instruction, la situation dans l’emploi, le sexe, le lieu de résidence (zone urbaine/zone rurale) et la région dans le monde ont été intégrés en tant que variables de contrôle. Des termes d’interaction entre les variables 1 à 4 et le revenu et l’emploi ont également été ajoutés, ainsi que des effets aléatoires spécifiques des pays.

Le modèle économétrique mis en œuvre dans l’analyse correspond à l’équation suivante:

où:

  • est l’estimateur linéaire

  • i est le répondant, l test le degré d’insécurité alimentaire (l = modérée ou grave, ou grave uniquement), c correspond aux variables d’emploi pendant la crise engendrée par la covid-19 (c = cessation temporaire du travail; perte du travail; moins d’heures travaillées; moins d’argent gagné), ci est la valeur des variables d’emploi pendant la crise engendrée par la covid-19 pour l’individu i and ri est la région du monde (d’après la classification M49)

  • Yil est la variable dichotomique du degré d’insécurité alimentaire décrite ci-dessus

  • indique le vecteur d’effets fixes correspondant à l’intercept, à la région du monde, aux variables d’emploi pendant la crise engendrée par la covid-19 et à un ensemble de caractéristiques socioéconomiques de l’individu i (Xi, à savoir le niveau d’instruction, la situation dans l’emploi, le lieu de résidence (zone urbaine/zone rurale) et le sexe), et l’interaction de ci and Zit (sous-ensemble de Xi, à savoir le revenu et la situation dans l’emploi)

  • bi0lc est le vecteur des effets aléatoires spécifiques des pays correspondant à l’intercept

Les résultats présentés correspondent au calcul de exp(β2lc) sous la forme d’une estimation du rapport des cotes de la probabilité d’être en situation d’insécurité alimentaire. Plus le rapport de cotes se rapproche de 1, plus la probabilité d’être en situation d’insécurité alimentaire est élevée par rapport à la probabilité de ne pas être en situation d’insécurité alimentaire, du fait d’une réponse «oui» à une question donnée sur la perte de revenu en raison de la covid 19, par rapport à une réponse «non».

C. Méthodologie relative au coût et à l’accessibilité économique d’une alimentation saine

Dans le tableau 5, le coût et l’accessibilité économique d’une alimentation saine et l’évolution de ces indicateurs entre 2017 et 2019 sont indiqués par région, sous-région et niveau de revenu des pays, conformément au dernier classement des pays par niveau de revenu établi par la Banque mondiale pour 2019. À la FAO, au FIDA, à l’OMS, au PAM et à l’UNICEF (2020)7, les résultats ont été présentés à l’aide du classement par niveau de revenu de 2017. Certains pays ayant pu changer de niveau de revenu entre ces deux années, il est possible que la composition des groupes de pays de même niveau ait également évolué.

Coût d’une alimentation saine

Une alimentation saine garantit non seulement un apport suffisant de calories, mais aussi des niveaux satisfaisants s’agissant de l’ensemble des nutriments essentiels et des différents groupes d’aliments nécessaires pour mener une vie saine et active (voir la section 2.1). Le coût d’une alimentation saine correspond au coût minimum des aliments, établi à partir des articles les moins chers disponibles dans chaque pays, qui satisfont à une série de préconisations provenant de dix ensembles de recommandations nutritionnelles fondées sur le choix des aliments. Ces recommandations nutritionnelles fondées sur le choix des aliments préconisent explicitement des quantités pour chaque groupe d’aliments et offrent une large représentation régionale. Une alimentation saine comprend également des apports diversifiés d’aliments appartenant à plusieurs groupes d’aliments différents. Bien qu’elle ne soit pas établie en fonction de la teneur en éléments nutritifs, mais déterminée à partir des recommandations nutritionnelles fondées sur le choix des aliments, cette alimentation satisfait en moyenne 95 pour cent des besoins en nutriments, et peut donc être presque toujours considérée comme suffisamment nutritive. Elle n’est cependant pas optimisée spécifiquement pour tenir compte des questions de durabilité environnementale.

Les disponibilités et les prix des articles de chaque groupe d’aliments entrant dans une alimentation saine ont été obtenus du Programme de comparaison internationale (PCI) de la Banque mondiale sous la forme de moyennes nationales pour 2017. Les définitions des articles sont normalisées au niveau international, ce qui permet d’opérer un classement par groupe d’aliments et de calculer les moindres coûts d’une alimentation respectant les recommandations nutritionnelles fondées sur le choix des aliments dans chaque pays, sous la forme d’une moyenne entre les marchés sur l’ensemble de l’année300. Pour une description détaillée de ce qu’est une alimentation saine et de la méthode y afférente, voir FAO, FIDA, OMS, PAM et UNICEF (2020)7.

Accessibilité économique d’une alimentation saine

Pour déterminer l’accessibilité économique, on compare dans ce rapport le coût d’une alimentation saine aux répartitions de revenu spécifiques des pays dérivées de la base de données PovcalNet de la Banque mondiale301. Les mesures de l’accessibilité économique ainsi obtenues comprennent le pourcentage de personnes qui n’avaient pas les moyens d’avoir une alimentation saine dans un pays donné en 2019. Une alimentation saine est considérée comme inabordable lorsque son coût dépasse 63 pour cent du revenu moyen d’un pays donné. Ces 63 pour cent représentent la part du revenu qui peut raisonnablement être réservée à la nourriture, et sont fondés sur des observations qui indiquent que le segment le plus pauvre de la population dans les pays à faible revenu dépense en moyenne cette proportion de ses revenus en nourriture (base de données sur la consommation mondiale, Banque mondiale)301az.

En se fondant sur cette limite, on compare le coût de l’alimentation aux répartitions de revenu dans les pays pour obtenir le pourcentage de la population pour lequel il est trop élevé. Cette proportion est ensuite multipliée par la population de chaque pays en 2019, à partir des indicateurs du développement dans le monde292 de la Banque mondiale, pour obtenir le nombre de personnes dans un pays donné pour lesquelles une alimentation particulière est hors de portée. Pour une description détaillée des indicateurs de l’accessibilité économique et de la méthode y afférente, voir l’annexe 3 dans FAO, FIDA, OMS, PAM et UNICEF (2020)7.

Actualisation du coût d’une alimentation saine

Le PCI est actuellement la seule source de données sur les prix au détail des articles normalisés au niveau international, utilisée par la Banque mondiale pour ses activités plus vastes de calcul des taux de change en parité de pouvoir d’achat (PPA) entre tous les pays du monde. Cependant, ces données ne sont mises à disposition que tous les trois à cinq ans, ce qui ne permet pas d’effectuer un suivi annuel du coût de l’alimentation au niveau mondial aux fins d’orientation des programmes et des politiques. En l’absence de données actualisées sur les prix des produits alimentaires, la méthode utilisée dans ce rapport pour mettre à jour l’indicateur de coût entre deux années de publication du PCI repose sur l’indice des prix à la consommation (IPC) de la FAO. Cet ensemble de données suit l’évolution au niveau national des IPC, tant pour les denrées alimentaires que pour l’ensemble des produits, en prenant 2015 comme année de base. Les IPC annuels sont calculés en établissant une simple moyenne des 12 indices mensuels. Il convient de noter en particulier que les données des IPC des produits alimentaires et des boissons non alcoolisées sont utilisées pour actualiser le coût d’une alimentation saine en 2019 pour l’ensemble des pays, à l’exception du Guyana et de la République centrafricaine, pour lesquels on a recours à l’IPC général. Le coût d’une alimentation saine en 2019 est estimé en prenant le coût réel dans chaque pays en 2017 et en le multipliant par le ratio des IPC des produits alimentaires::

À partir des IPC (produits alimentaires), on commence par estimer le coût d’une alimentation saine en unités monétaires locales. Pour comparer ce coût entre les pays et entités politiques, on le convertit en dollars internationaux à l’aide des facteurs de conversion PPA de la consommation privée donnés par les indicateurs du développement dans le monde pour 2019. Pour une description détaillée de la méthodologie, voir Yan et al. (à paraître)302.

Le coût d’une alimentation saine a été calculé pour 170 pays en 2017. Ces informations ont été actualisées pour 2019 pour l’ensemble des pays, à l’exception de la Palestine, pour laquelle on ne dispose pas de facteurs de conversion PPA cohérents, et de la Province chinoise de Taïwan, pour laquelle il n’existe pas d’informations relatives aux IPC ni aux PPA. Sur les 168 pays restants, pour 2019, 18 n’avaient pas de données relatives aux PPP, et deux n’avaient pas de données sur les IPC. Pour les 18 pays ci-dessus, des imputations de PPA ont été appliquées à l’aide d’un modèle autorégressif à moyenne mobile intégrée avec variable explicative (ARIMAX), approche qui permet de choisir une covariable externe, à savoir le PIB par habitant ou les dépenses de consommation des ménages par habitant. Pour utiliser cette méthode, on a veillé à l’exhaustivité des séries des deux covariables en appliquant la méthode de lissage de Holt-Winter pour combler les lacunes lorsque cela était nécessaire. Le modèle ARIMAX sélectionne la covariable et les paramètres associés au critère d’information bayésien le plus faible. Enfin, il estime la meilleure spécification et calcule les valeurs prédites.

Pour les deux pays pour lesquels on ne disposait pas d’informations sur les IPC (Bermudes et Îles Turques-et-Caïques), des imputations de coûts (Imputed Diet Cost) ont été appliquées à partir du coût moyen de l’alimentation (Average [Avg] Diet Cost) dans la sous-région (s) du pays (i):

Les coûts moyens sous-régionaux en 2017 et en 2018 ont été déterminés en excluant des calculs les pays pour lesquels il manquait des informations.

L’une des limites de cette méthode est que l’évolution du coût d’une alimentation saine entre 2017 et 2019 dépend des IPC (produits alimentaires) et ne reflète pas les changements concernant des produits de base particuliers dans les prix des denrées alimentaires, ni les variations des prix selon les groupes d’aliments, en raison de l’absence de nouvelles données de prix au niveau des articles pour davantage d’aliments nutritifs. La FAO réfléchit à la manière d’étendre la couverture de l’ensemble de données de l’outil de suivi et d’analyse des prix des aliments pour intégrer divers aliments «sentinelles» adaptés à chaque pays dans des groupes d’aliments autres que des produits de base (fruits et légumes, par exemple), afin de pouvoir réaliser un suivi plus régulier et plus rigoureux du coût d’une alimentation saine.

Actualisation de l’accessibilité économique d’une alimentation saine

L’accessibilité économique a été actualisée pour l’année 2019 aux fins du présent rapport. Grâce à des mises à jour régulières à partir des nouvelles enquêtes nationales et des imputations de données, les répartitions des revenus pour les années de référence 2017, 2018 et 2019 ont été actualisées dans la base de données PovcalNet et sont désormais disponibles pour presque tous les pays (à l’exception de l’Inde, dont la répartition des revenus la plus récente remonte à 2017). Le pourcentage de personnes n’ayant pas les moyens d’avoir une alimentation saine en 2019 a été calculé à l’aide du coût de l’alimentation établi à partir des IPC (voir ci-dessus) et des répartitions des revenus pour l’année de référence 2019 disponibles dans la base PovcalNet. Cette proportion a ensuite été multipliée par la population de chaque pays en 2019, à partir des indicateurs du développement dans le monde de la Banque mondiale, pour obtenir le nombre de personnes pour lesquelles une alimentation spécifique était hors de portée cette année-là.

Cet indicateur de l’accessibilité économique a été calculé pour 143 pays pour l'année 2017. Ces informations ont été actualisées pour tous les pays pour l’année 2019, à l’exception de la Palestine. Pour ce pays, l’indicateur d’accessibilité économique pour 2019 a été calculé à l’aide des informations sur les coûts de 2017 et des chiffres de la population pour 2019ba.

D. Méthode de projection de la PoU jusqu’en 2030

Pour obtenir des projections des valeurs de prévalence de la sous-alimentation jusqu’en 2030, nous effectuons la projection des trois variables fondamentales de la formule de la prévalence de la sous-alimentation (consommation d’énergie alimentaire, coefficient de variation et besoins énergétiques alimentaires minimaux) séparément, avec des données d’entrée différentes selon le scénario considéré.

La principale source d’information est la sortie du modèle EGC MIRAGRODEP dynamique et récursif, qui fournit des séries de valeurs projetées, au niveau des pays, pour:

  • le PIB réel par habitant (GDP_Vol_pc);

  • le coefficient Gini des revenus (gini_income);

  • un indice des prix réels des produits alimentaires (Prices_Real_Food);

  • l’incidence de la pauvreté extrême (pourcentage de la population dont le revenu quotidien réel est inférieur à 1,9 USD) (x190_ALL);

  • la consommation journalière par habitant (DES_Kcal).

Le modèle MIRAGRODEP a été calibré sur la situation de l’économie mondiale en 2018, avant la pandémie de covid, et a été utilisé pour générer des projections des fondamentaux macroéconomiques sur la période 2019-2030 pour deux scénarios: un scénario de référence visant à déterminer l’incidence de la covid, telle qu’elle apparaît dans les dernières Perspectives de l’économie mondiale publiées en avril 2021 par le FMI, et un scénario sans covid fondé sur l’édition d’octobre 2019 des Perspectives de l’économie mondiale (la dernière avant la pandémie). Une description plus détaillée du modèle MIRAGRODEP, ainsi que des hypothèses utilisées pour élaborer le scénario de référence et le scénario sans covid, figure dans Laborde et Torero (à paraître)303.

Par ailleurs, nous utilisons les projections des variantes médianes de la population totale (des deux sexes), de sa composition par sexe et par âge, et du taux brut de natalité provenant des World Population Prospects 2019 (édition 2019 des Perspectives de la population mondiale).

Projections de la consommation d’énergie alimentaire (DEC)

Pour générer la projection de la série de la consommation d’énergie alimentaire, nous utilisons la formule suivante:

En d’autres termes, nous partons de la série de DES_Kcal projetée par le modèle et ajustons son niveau de sorte que la valeur pour 2018 corresponde à la valeur réelle. (Cet ajustement est nécessaire car le modèle MIRAGRODEP a été calibré sur les valeurs 2018 d’une ancienne série de bilans alimentaires.)

Projections des besoins énergétiques alimentaires minimaux (MDER)

Pour projeter les besoins énergétiques alimentaires minimaux, nous les calculons simplement à partir des données sur la composition de la population par sexe et par âge provenant des projections établies dans les World Population Prospects 2019 (variante moyenne).

Projections du coefficient de variation (CV)

Comme toujours, le coefficient de variation total est calculé de la manière suivante:

où les deux composantes correspondent à la variabilité due aux différences de niveau de revenu entre les ménages et à la variabilité entre les individus en fonction du sexe, de l’âge, de la masse corporelle et du niveau d’activité physique.

La composante CVr (coefficient de variation imputable aux besoins énergétiques) est calculée simplement à partir des projections établies dans les World Population Prospects (comme pour les besoins énergétiques alimentaires minimaux), tandis que la composante CVy (coefficient de variation imputable aux revenus) est obtenue à l’aide d’une combinaison linéaire des variables macroéconomiques et démographiques pertinentes, basée sur les coefficients estimés provenant d’une régression multiple des CVy historiques et alimentée par les projections du modèle MIRAGRODEP et des World Population Prospects.

Pour estimer les coefficients utilisés dans la formule ci-dessus, nous avons pris en compte d’autres modèles, résumés dans le tableau A2.2, qui ont donné des prévisions très similaires.

TABLEAU A2.2
COEFFICIENTS DE RÉGRESSION DE TROIS MODÈLES ESTIMÉS À PARTIR DES VALEURS CVy HISTORIQUES (2000-2019)

La série de valeurs CVy prédites par la formule pour chaque pays séparément pour la période 2021-2030 est ensuite calibrée en fonction des données historiques observées pour 2019, comme dans le cas des disponibilités énergétiques alimentaires:

avec T = 2021 pour le scénario de référence, et T = 2020 pour le scénario sans covid.

E. Méthode d’évaluation des progrès accomplis au regard des cibles nutritionnelles aux niveaux régional et mondial

Ces notes méthodologiques se réfèrent aux résultats présentés dans le tableau 7, la figure 10 et la figure 11 à la section 2.3 du rapport.

S’agissant du tableau 7, les progrès ont été mesurés au regard des cibles nutritionnelles fixées pour 2030 par l’OMS/l’UNICEF26 et à l’aide d’une version adaptée des règles du Groupe consultatif d’experts techniques sur la surveillance de la nutrition304 pour l’ensemble des indicateurs à l’exception de l’obésité chez l’adulte, pour laquelle il n’a pas été établi de cibles pour 2030 ni de règles pour l’évaluation des progrès accomplis. S’agissant de l’obésité chez l’adulte, on a retenu la cible fixée pour 2025, à savoir «aucune augmentation entre l’année de référence (2012) et 2025».

Pour déterminer la catégorie de progrès à utiliser pour chaque indicateur et chaque région dans le cadre de l’évaluation, deux taux de réduction annuel moyen (TRAM)bb ont été calculés: i) le TRAM nécessaire pour que la région atteigne la cible fixée pour 2030; et ii) le TRAM actuel dans la région. On a ensuite utilisé la valeur du TRAM actuel pour déterminer la catégorie dans laquelle classer la région, en tenant également compte du TRAM nécessaire. Le tableau A2.3 donne les plages de TRAM et les seuils de prévalence correspondant à chaque catégorie et chaque indicateur, que l’on peut résumer comme suit:

  • Sur la bonne voie: les régions présentant un TRAM actuel supérieur au TRAM nécessaire sont considérées comme «sur la bonne voie» (en vert) pour atteindre la cible. Un seuil statique pour les dernières estimations de la prévalence (indiqué pour chaque indicateur dans le tableau A2.3) permet également de déterminer si les régions sont «sur la bonne voie»; par exemple, une région dont la valeur la plus récente (2020) de prévalence de l’excès pondéral est inférieure à 3 pour cent sera considérée comme étant «sur la bonne voie» même si son TRAM actuel est inférieur au TRAM nécessaire.

  • En retard: les régions dont le TRAM actuel est inférieur au TRAM nécessaire et dont la valeur de prévalence la plus récente est supérieure au seuil statique «sur la bonne voie» indiqué dans le tableau A2.3 sont considérées comme étant «en retard». La catégorie «en retard» se subdivise en différentes sous-catégories selon les indicateurs. Pour les quatre indicateurs correspondant au retard de croissance, à l’excès pondéral chez l’enfant, à l’émaciation chez l’enfant et à l’anémie chez la femme, trois sous-catégories «en retard» ont été définies: «en retard – quelques progrès» (en jaune), «en retard – aucun progrès» (en rouge clair) et «en retard – aggravation» (en rouge foncé). Pour l’insuffisance pondérale à la naissance et l’allaitement exclusif, les catégories «en retard – aucun progrès» (en rouge clair) et «en retard – aggravation» (en rouge foncé) sont combinées dans la catégorie «en retard – aucun progrès ou aggravation» (en orange), car l’évolution à ce jour n’est pas suffisante pour utiliser deux catégories distinctes pour ces indicateurs. S’agissant de l’obésité chez l’adulte, la cible étant «pas d’augmentation» (TRAM nécessaire ≥ 0), il n’est pas possible d’avoir des catégories «en retard – quelques progrès» (en jaune), «en retard – aucun progrès» (en rouge clair); de ce fait, seule la catégorie «en retard – aggravation» (en rouge foncé) est utilisée.

  • Évaluation impossible: pour les cinq indicateurs reposant sur des données modélisées par pays (retard de croissance, excès pondéral chez l’enfant, insuffisance pondérale à la naissance, anémie chez la femme et obésité chez l’adulte), il est possible de procéder à une évaluation pour toutes les régions, car on dispose d’une estimation modélisée pour l’ensemble des pays, et donc de suffisamment de données pour générer des estimations représentatives pour toutes les régions et toutes les années. Concernant les indicateurs pour lesquels on ne dispose pas d’estimations modélisées par pays, à savoir l’émaciation chez l’enfant et l’allaitement exclusif, il n’est pas possible de procéder à une évaluation pour les régions où la couverture de la population est inférieure à 50 pour cent (voir les notes 16 et 17 sous le tableau A2.3).

TABLEAU A2.3
RÈGLES RELATIVES À L’ÉVALUATION DES PROGRÈS ACCOMPLIS AU REGARD DES CIBLES NUTRITIONNELLES MONDIALES

Les années des données utilisées pour calculer le TRAM actuel au niveau régional varient selon les indicateurs, comme le précisent les notes sous le tableau A2.3. Les TRAM actuels des différentes régions sont calculés à l’aide d’une droite d’ajustement de la tendance comprenant toutes les estimations disponibles entre 2012 (référence) et la dernière estimation en date de chaque indicateur, à l’exception de l’allaitement exclusif, pour lequel on ne dispose pas d’estimations modélisées et qui est calculé sur la base de deux estimations uniquement: la référence (2012) et la dernière année disponible (2019). Le TRAM nécessaire est calculé à partir de la prévalence de référence pour la région en 2012 et de la prévalence cible, telle qu’indiquée dans les cibles de nutrition chez la mère, le nourrisson et le jeune enfant26 (pour l’excès pondéral chez l’enfant, par exemple, le TRAM nécessaire est de 3,41 pour cent par an au niveau mondial, taux annuel de réduction nécessaire pour faire passer la prévalence de référence de 5,6 pour cent à 3,0 pour cent en 2030).

Pour la figure 10, les TRAM actuels calculés pour chaque indicateur et chaque région figurant dans le tableau 7 ont été utilisés dans la formule ci-après pour générer une estimation par projection pour 2030 en supposant un maintien de la tendance présente suivie par le TRAM actuel. Une ligne en pointillé a ensuite été tracée entre la dernière estimation (fin de la ligne pleine sur le graphique) et l’estimation par projection pour 2030.

Estimation par projection pour 2030 si la tendance actuelle se poursuit = j * (1-a ^(2030–2012))

où:

J = estimation de référence de la prévalence (2012)

a = TRAM actuel

La figure 11 illustre l’évaluation des progrès accomplis au niveau des pays s’agissant du retard de croissance, de l’excès pondéral chez l’enfant et de l’émaciation chez l’enfant. Les méthodes appliquées pour évaluer ces indicateurs au niveau des pays sont en grande partie celles utilisées pour les évaluations régionales du tableau 7, et sont décrites dans les paragraphes précédents et dans le tableau A2.3. En ce qui concerne les deux indicateurs pour lesquels on dispose d’estimations modélisées pour les pays, à savoir le retard de croissance et l’excès pondéral chez l’enfant, la seule différence entre les méthodes d’évaluation au niveau des régions et des pays concerne la définition des pays pour lesquels l’évaluation des progrès accomplis est impossible. Au niveau des pays, les progrès accomplis au regard des cibles relatives au retard de croissance et à l’excès pondéral n’ont pas été évalués pour les pays qui ne disposent pas de données d’entrée (provenant d’enquêtes auprès des ménages, par exemple) postérieures à l’année 2000 pouvant être utilisées dans le modèle au niveau des pays, ou pour lesquels les estimations modélisées sont en attente d’examen final. Concernant l’émaciation, en l’absence de modèle au niveau des pays, le calcul du TRAM est effectué au moyen de toutes les données nationales (provenant des enquêtes auprès des ménages, par exemple) disponibles pour la période 2005-2020 dans l’ensemble de données des Estimations communes UNICEF, OMS, Banque mondiale de la malnutrition (chez les enfants) de 2021 pour les pays présentant au moins deux points de données, dont un, au moins, postérieur à 2012. De ce fait, il n’est pas possible d’évaluer les progrès accomplis au regard de la cible relative à l’émaciation pour les pays ne répondant pas à ces critères.

A. Présence des trois facteurs

Présence de conflits

Renvoie au nombre total de conflits violents – causés par des conflits internes ou intra-États – au cours de chacune des cinq sous-périodes (de 2000 à 2019); la fréquence est donnée par la durée d’exposition en pourcentage, cette durée étant égale au nombre d’années de chaque sous-période de cinq ans durant lesquelles le pays considéré a connu un conflit violent (figure 15A).

Sources de données: Ensemble de données du programme UCDP (Uppsala Conflict Data Program)305 relatif au nombre de conflits violents.

Méthode: On a actualisé les informations sur les conflits qui figuraient dans L’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde 20171 (voir l’annexe 2 pour plus de détails) afin de couvrir les années les plus récentes. Voir Holleman et al. (2017)2.

Présence d’extrêmes climatiques

L’exposition aux extrêmes climatiques renvoie au pourcentage de pays ayant subi un type au moins d’extrême climatique (sécheresse, inondation, vague de chaleur, tempête) au cours des différentes sous-périodes de 2000 à 2020, à savoir trois sous-périodes de cinq ans – 2000-2004, 2005-2009 et 2010-2014 – et une sous-période de six ans – 2015–2020. On parle de forte exposition lorsque les pays ont fait état de trois ou quatre types d’extrêmes climatiques durant une sous-période donnée (figure 15B). La fréquence est donnée par la durée d’exposition en pourcentage, c’est-à-dire le nombre d’années de chaque sous-période où un pays a connu au moins un type d’extrême climatique.

Sources de données: Informations sur les sécheresses: Centre européen de prévisions météorologiques à moyen terme (CEPMMT)323 pour les années 2001 à 2005 (ERA5) et système Anomaly hot Spots of Agriculture Production (ASAP)324 pour les années 2006 à 2020. Informations sur les inondations: Climate Hazards Group Infrared Precipitation with Stations (CHIRPS)325. Informations sur les vagues de chaleur: Centre européen de prévisions météorologiques à moyen terme (CEPMMT)323 (ERA5). Informations sur les tempêtes: Centre de recherche sur l’épidémiologie des catastrophes (Base de données sur les catastrophes)326.

Méthode: On a actualisé les quatre types d’extrêmes climatiques qui figuraient dans L’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde 20183 (voir l’annexe 2 pour plus de détails) afin de couvrir les années les plus récentes. Voir Holleman et al. (2020)4.

Présence de fléchissements économiques

Renvoie au pourcentage de pays ayant fait état d’une croissance négative du PIB par habitant entre deux années successives (pourcentage de variation annuelle) durant la période 2011-2021, les pays d’Afrique subsaharienne, d’Amérique latine et d’Asie de l’Ouest ayant été touchés de façon disproportionnée (figure 15C).

Sources de données: Série chronologique des Perspectives de l’économie mondiale du FMI (avril 2021)327 sur le PIB annuel par habitant.

B. Analyse des points de retournement de la prévalence de la sous-alimentation en présence des trois facteurs

On parle de point de retournement à la hausse de la prévalence de la sous-alimentation (PoU) dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire lorsqu’une tendance à la hausse se dégage postérieurement à un point de retournement dans la série chronologique de la PoU. Plus précisément, la condition qui définit un point de retournement à la hausse au moment t est la présence d’une tendance à la hausse de la PoU entre t-2 et t+2. On utilise une série chronologique de prévalence de la sous-alimentation couvrant la période 2008-2020 pour déterminer les points de retournement à la hausse de la PoU entre 2010 et 2018. Cette série chronologique a été révisée en 2020. Lors de cette révision, la solution de continuité de la méthode servant à estimer la consommation d’énergie alimentaire (DEC) a été introduite sur la période 2009-2010 alors qu’elle l’était sur la période 2013-2014 dans la version précédente. Il s’en est suivi un décalage dans le repérage des années où s’est produit un point de retournement à la hausse de la PoU dans l’analyse actuelle, si on la compare à celle effectuée dans l’édition 2018 de L’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde3.

  • On associe un point de retournement à la hausse de la PoU à un conflit pour une année comprise entre 2010 et 2018 lorsque cette association s’est présentée dans un pays au cours d’une au moins des deux sous-périodes correspondantes (2010-2014 ou 2015-2019) et que le pays a enregistré 500 morts ou davantage durant les combats sur cette même sous-période (figure 17).

  • On associe un point de retournement à la hausse de la PoU à des extrêmes climatiques durant l’année lorsqu’un pays fait état d’un point de retournement de cette nature coïncidant avec la présence d’au moins un des extrêmes climatiques suivants: i) une alerte du système ASAP concernant un épisode de sécheresse classé au plus haut niveau de gravité (de 1 à 4); ii) une vague de chaleur; iii) une inondation; iv) une tempête (figure 17).

  • On associe un point de retournement à la hausse de la PoU à des ralentissements et fléchissements économiques lorsqu’il est fait état d’un ralentissement ou d’un fléchissement économique au cours de l’une des deux années précédant le point de retournement, par exemple, en 2015-2016 ou en 2016-2017 si le point de retournement de la PoU s’est produit en 2017 (figure 17).

Méthode: On a actualisé l’analyse des points de retournement de la PoU qui figurait dans L’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde 2018 (voir l’annexe 3 pour plus de détails)3 afin de couvrir les années les plus récentes. Voir Holleman et al. (2020)4.

L’analyse du chapitre 3 porte sur 133 pays et territoires à revenu faible ou intermédiaire pour lesquels on dispose d’informations relatives aux principaux facteurs de l’insécurité alimentaire. D’après la dernière classification par niveau de revenu de la Banque mondiale, sur ces 133 pays, 29 sont des pays à faible revenu, 50 sont des pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure et 54 sont des pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure. On dispose d’informations sur la prévalence de la sous-alimentation pendant la période 2010-2019 pour 110 pays à revenu faible ou intermédiaire parmi ces 133 pays.

A. Définition des groupes de pays

Crise prolongée

L’édition 2020 du rapport définissait les situations de crise prolongée comme présentant «les caractéristiques suivantes: catastrophes naturelles ou conflits répétés, longue durée des crises alimentaires, bouleversement des moyens d’existence et capacité institutionnelle insuffisante pour réagir aux crises». Trois critères sont employés pour établir qu’un pays se trouve en situation de crise prolongée: i) longue durée de la crise; ii) flux d’aide humanitaire reçu par le pays concerné; et iii) situation du pays au plan économique et au regard de la sécurité alimentaire. Les pays qui se trouvent en «situation de crise prolongée» répondent aux critères suivants:

  1. Le pays est un pays à faible revenu et à déficit vivrier, selon la définition qu’en a donné la FAO en 2018.

  2. Le pays a été en situation de crise – naturelle ou d’origine humaine – pendant quatre années consécutives de 2016 à 2019, ou bien pendant huit des dix années de 2010 à 2019, et il figure sur la liste des pays nécessitant une aide alimentaire extérieure307.

  3. Le pays a reçu plus de 10 pour cent de l’aide publique au développement totale sous forme d’aide humanitaire entre 2009 et 2017309.

En 2020, 22 pays remplissaient les trois critères ci-dessus.

B. Définition des pays touchés par les facteurs considérés (années 2010-2019)

Pays touchés par des conflits

Pays à revenu faible ou intermédiaire qui ont été touchés par des conflits pendant au moins une période de cinq années consécutives et qui ont enregistré 500 morts ou davantage durant les combats sur cette même période. L’analyse couvre quatre périodes de cinq ans comprises entre 2000 et 2019: 2000-2004; 2005-2009; 2010-2014; 2015-2019. Sur les 133 pays à revenu faible ou intermédiaire, 40 répondent à ces critères.

Sources de données: Ensemble de données du programme UCDP (Uppsala Conflict Data Program)305 relatif au nombre de conflits violents.

Méthode: On a actualisé les informations sur les conflits qui figuraient dans L’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde 20171 (voir l’annexe 2 pour plus de détails) afin de couvrir les années les plus récentes. Voir Holleman et al. (2017)2.

Pays touchés par des extrêmes climatiques

Pays à revenu faible ou intermédiaire qui présentent à la fois une forte exposition aux extrêmes climatiques (sécheresses, inondations, vagues de chaleur, tempêtes, etc.) et une vulnérabilité aux facteurs climatiques. On parle de forte exposition si un pays a fait face à trois ou quatre types d’extrêmes climatiques différents durant les deux sous-périodes 2010-2014 et 2015-2019, ou si des extrêmes climatiques s’y sont produits au moins lors de sept années au cours de la période 2010-2019. Un pays présente une vulnérabilité liée au climat lorsqu’il remplit au moins l’une des conditions suivantes: i) on constate l’existence d’une relation étroite et statistiquement significative entre la production ou les importations de céréales et au moins un facteur climatique (température, pluviométrie et croissance de la végétation) au cours des années 2001-2020; ii) le pays est fortement tributaire de l’agriculture (l’indicateur de mesure étant une proportion de 60 pour cent ou plus de la population travaillant dans ce secteur en 2019); iii) on observe un point de retournement de la prévalence de la sous-alimentation coïncidant avec une alerte du système ASAP relative à un grave épisode de sécheresse. Sur les 133 pays à revenu faible ou intermédiaire, 75 répondent à ces critères.

Sources de données: Les informations sur les sécheresses proviennent du système Anomaly hot Spots of Agriculture Production (ASAP)324; celles sur les inondations du Climate Hazards Group Infrared Precipitation with Stations (CHIRPS)325; et celles sur les vagues de chaleur du Centre européen de prévisions météorologiques à moyen terme (CEPMMT)323 (ERA5). Informations sur les tempêtes: Centre de recherche sur l’épidémiologie des catastrophes (Base de données sur les catastrophes)326.

Méthode: On a actualisé les informations sur les pays touchés par des extrêmes climatiques qui figuraient dans L’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde 20183 (voir l’annexe 2 pour obtenir une définition de l’exposition et de la vulnérabilité aux extrêmes climatiques) afin de couvrir les années les plus récentes. Voir Holleman et al. (2020)4.

Pays touchés par des fléchissements économiques

Pays à revenu faible ou intermédiaire qui font face à un fléchissement économique durant l’une des deux années précédant un point de réorientation à la hausse de la prévalence de la sous-alimentation, et durant la période 2010-2018. Plus précisément, un point de retournement de la prévalence de la sous-alimentation caractérisé par une réorientation à la hausse entre t-2 et t+2 est mis en évidence au moment t, et doit coïncider avec un fléchissement économique également relevé au moment t, ou au moment t-1. Sur les 133 pays à revenu faible ou intermédiaire, 24 répondent à ces critères.

Sources de données: Série chronologique des Perspectives de l’économie mondiale du FMI (avril 2021)327 sur le PIB annuel par habitant.

Méthode: Pour l’analyse des points de retournement de la prévalence de la sous-alimentation, voir L’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde 2018 (informations détaillées à l’annexe 3)3 et Holleman et al. (2017)2.

Pays présentant d’importantes inégalités de revenu

Pays à revenu faible ou intermédiaire qui présentent un indice de Gini supérieur à la valeur médiane de la répartition des inégalités de revenu, compte tenu des informations disponibles pour la période 2010-2018. Sur les 133 pays à revenu faible ou intermédiaire, 54 répondent à ces critères.

Sources de données: Indicateurs du développement dans le monde de la Banque mondiale292.

C. Définition des pays touchés par des facteurs multiples (années 2010-2019)

Les pays touchés par des facteurs multiples sont ceux dans lesquels deux facteurs associés ou plus sont présents sur la période 2010-2019. Sur les 133 pays à revenu faible ou intermédiaire, 41 sont touchés par les associations de facteurs suivantes: conflits et extrêmes climatiques (23 pays), conflits et fléchissements économiques (quatre pays), extrêmes climatiques et fléchissements économiques (neuf pays), et les trois facteurs réunis (cinq pays).

Pour l’analyse du chapitre 3, on ne dispose cependant d’informations sur la prévalence de la sous-alimentation que pour 110 pays (sur les 133), sur lesquels 36 font face à des facteurs multiples. Pour les trois régions analysées à la figure 23 (Afrique, Amérique latine et Caraïbes et Asie), 36 pour cent environ des pays à revenu faible ou intermédiaire (34 sur 95) sont touchés par des facteurs multiples.

Sur la base de ces 110 pays, huit groupes mutuellement exclusifs ont par ailleurs été créés pour classer ceux qui sont soumis à différents facteurs. Le classement en fonction du degré de prévalence de la sous-alimentation est le suivant::

  1. Conflits, extrêmes climatiques et fléchissements économiques (5)

  2. Extrêmes climatiques et fléchissements économiques (9)

  3. Conflits (5)

  4. Fléchissements économiques (6)

  5. Conflits et extrêmes climatiques (18)

  6. Conflits et fléchissements économiques (4)

  7. Aucun des trois facteurs (29)

  8. Extrêmes climatiques (34)

La figure A4.1 illustre les pays répartis dans les huit catégories correspondant aux différentes associations de facteurs, et le tableau A4.1 donne la liste des pays. L’association entre des facteurs multiples et la sous-alimentation étant l’objet principal du chapitre 3, la figure A4.1 et le tableau A4.1 fournissent des informations pour les 110 pays pour lesquels on dispose d’informations sur la prévalence de la sous-alimentation.

FIGURE A4.1
PAYS PAR ASSOCIATION DE FACTEURS
Tableau A4.1
LISTE DES PAYS PAR ASSOCIATION DE FACTEURs

Compte tenu de la situation exceptionnelle créée par la pandémie de covid-19 en 2020, le chapitre 3 présente une analyse séparée des facteurs de l’insécurité alimentaire sur la période 2019-2020, accompagnée de définitions plus précises.

A. Pays présentant une forte augmentation de l’insécurité alimentaire entre 2019 et 2020

S’entend des pays à faible revenu et à revenu intermédiaire qui ont déclaré une prévalence de la sous-alimentation en plus forte augmentation de 2019 à 2020 que ce n’était le cas lors des deux années précédentes, de 2017 à 2019. Sur les 107 pays pour lesquels on dispose d’informations sur la prévalence de la sous-alimentation en 2019-2020, 66 ont fait état d’une hausse importante de cet indicateur en 2019-2020 comparativement à 2017-2019 (figure 19).

B. Pays touchés par des fléchissements économiques

S’entend des pays à faible revenu et à revenu intermédiaire qui ont fait état d’une croissance négative du PIB par habitant en 2020.

Sources de données: Série chronologique des Perspectives de l’économie mondiale du FMI (avril 2021)327 sur le PIB annuel par habitant.

C. Pays touchés par des conflits

Renvoie aux pays et territoires à faible revenu et à revenu intermédiaire qui remplissent l’un des deux critères suivants:

  1. Le pays a été touché par un conflit au cours d’une au moins des sous-périodes de cinq années consécutives et a enregistré 500 morts ou davantage durant les combats sur cette même sous-période. Nous tenons compte des deux périodes de cinq ans les plus récentes pour définir les pays touchés par des conflits en 2020: 2010 -2014 et 2015-2019.

  2. Le pays a fait face à une crise alimentaire et le principal facteur d’insécurité alimentaire aiguë était un conflit. En 2020, on compte 23 pays et territoires où le principal facteur est un conflit/une situation d’insécurité: Afghanistan, Bangladesh, Burkina Faso, Cameroun, Égypte (réfugiés syriens), Iraq, Jordanie (réfugiés syriens), Liban (réfugiés syriens), Libye, Mali, Niger, Nigéria, Ouganda, Pakistan, Palestine, République arabe syrienne, République centrafricaine, République démocratique du Congo, Soudan du Sud, Tchad, Turquie (réfugiés syriens), Ukraine, Yémen.

Pour la figure 19, les pays touchés par des conflits sont déterminés à l’aide de l’un des deux critères; pour la figure 24, ils sont définis à l’aide du second critère uniquement.

Sources de données: Ensemble de données du programme UCDP (Uppsala Conflict Data Program)305 relatif au nombre de conflits violents. Global Report on Food Crises (2021)75 pour les pays où le principal facteur de l’insécurité alimentaire est un conflit..

D. Pays touchés par des extrêmes climatiques ou des catastrophes liées au climat

Renvoie aux pays et territoires à faible revenu et à revenu intermédiaire qui remplissent l’un des deux critères suivants:

  1. Le pays a été exposé à un type au moins d’extrême climatique (sécheresse, inondation, vague de chaleur) en 2020.

  2. En 2020, Le pays a été victime de l’une des catastrophes suivantes liées au climat: températures extrêmes, inondations et tempêtes, d’après les ensembles de données relatifs aux catastrophes de moyenne et grande ampleur de la base de données sur les catastrophes (EM-DAT). On parle d’exposition aux catastrophes liées au climat lorsque, dans un pays et pour une année donnés, une catastrophe de l’un des trois types a produit au moins l’un des effets suivants: i) dix personnes ou plus ont été tuées; ii) 100 personnes ou plus ont été touchées ou blessées ou se sont retrouvées sans abri; iii) le pays a décrété l’état d’urgence ou a fait appel à l’assistance internationale.

Source de données: Pour l’année 2020, les informations sur les sécheresses proviennent du système Anomaly hot Spots of Agriculture Production (ASAP)324; celles sur les inondations, du Climate Hazards Group Infrared Precipitation with Stations (CHIRPS)325, et celles sur les vagues de chaleur, du Centre européen de prévisions météorologiques à moyen terme (CEPMMT)323 (ERA5). Les informations sur les catastrophes liées au climat (températures extrêmes, inondations et tempêtes) proviennent du Centre de recherche sur l’épidémiologie des catastrophes (Base de données sur les catastrophes)326.

Méthode: On a actualisé les informations sur les pays touchés par des extrêmes climatiques qui figuraient dans L’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde 20183 (voir l’annexe 2 pour obtenir une définition de l’exposition et de la vulnérabilité aux extrêmes climatiques) afin de couvrir les années les plus récentes. Voir Holleman et al. (2020)4.

E. Définition des pays touchés par des facteurs multiples en 2020

En raison du caractère extraordinaire de la récession économique provoquée par la pandémie de covid-19, la plupart des pays du monde ont connu un fléchissement économique en 2020. Sur les 107 pays pour lesquels on dispose d’informations sur la sous-alimentation et la croissance du PIB par habitant en 2019 et 2020, 66 ont subi une augmentation de la prévalence de la sous-alimentation entre 2019 et 2020 qui a été supérieure à celle enregistrée entre 2017 et 2019. Parmi ceux-ci, 60 sont touchés par un ou plusieurs facteurs associés, notamment des formes plus graves d’extrêmes climatiques (catastrophes liées au climat) et des conflits (pays en situation de crise alimentaire où les conflits constituent le principal facteur d’insécurité alimentaire aiguë). La figure 19 présente la répartition des pays touchés par différentes associations de facteurs. Sur les 66 pays, on distingue 8 groupes de pays touchés par différentes associations de facteurs, et un groupe dans lequel aucun facteur n’entre en jeu:

  1. Fléchissements économiques (11)

  2. Fléchissements économiques et catastrophes liées au climat (19)

  3. Fléchissements économiques, conflits (crise alimentaire) et catastrophes liées au climat (5)

  4. Fléchissements économiques, conflits et catastrophes liées au climat (5)

  5. Fléchissements économiques et conflits (crise alimentaire) (2)

  6. Fléchissements économiques et extrêmes climatiques (15)

  7. Fléchissements économiques, conflits (crise alimentaire) et extrêmes climatiques (2)

  8. Fléchissements économiques, conflits et extrêmes climatiques (1)

  9. Pas de fléchissement économique (6)

Les pays touchés par des fléchissements économiques associés à des formes plus graves d’extrêmes climatiques (catastrophes liées au climat) et/ou des conflits (crise alimentaire) présentent les plus fortes augmentations de la prévalence de la sous-alimentation entre 2019 et 2020. Sur les 107 pays, 49 répondent à ce critère en 2020. La figure 24 illustre les augmentations de la prévalence de la sous-alimentation entre 2019 et 2020 pour cinq groupes de pays:

  1. Fléchissements économiques (49)

  2. Fléchissements économiques et conflits (crise alimentaire) (7)

  3. Fléchissements économiques et catastrophes liées au climat (35)

  4. Les trois facteurs – fléchissements économiques, catastrophes liées au climat et conflits (crise alimentaire) (7)

  5. Pays non touchés par un fléchissement économique (9).

Accessibilité économique

Désigne la capacité des gens à acheter des aliments dans leur environnement local. Dans le présent rapport, le coût renvoie à ce que les gens doivent payer pour se procurer une alimentation saine, tandis que l’accessibilité économique renvoie au coût de celle-ci par rapport au revenu de l’individu, après déduction des autres dépenses nécessaires.

Aléa

Processus, phénomène ou activité humaine pouvant faire des morts ou des blessés ou avoir d’autres effets sur la santé, ainsi qu’entraîner des dégâts matériels, des perturbations socioéconomiques ou une dégradation de l’environnement316. Dans le présent rapport, la notion d’aléa naturel est équivalente à celle de choc climatique.

Aliment de base

Aliment consommé régulièrement et en quantité telle qu’il constitue la part dominante du régime alimentaire et fournit une importante proportion de l’énergie totale.

Aliments à densité énergétique élevée

Aliments à haute teneur en calories (énergie) par rapport à leur masse ou à leur volume.

Aliments d’origine animale

Tous les types de viande, volaille, poisson, œufs, lait, fromage et yaourt et autres produits laitiers.

Aliments nutritifs

Aliments qui tendent à être riches en nutriments essentiels tels que les micronutriments, ainsi qu’en protéines, en glucides non raffinés riches en fibres et/ou en lipides non saturés. Ils ont une faible teneur en sodium, en sucres libres, en graisses saturées et en graisses trans.

Alimentation saine

Choix équilibré, diversifié et adéquat de denrées alimentaires consommées sur une période de temps donnée. Un régime sain protège contre la malnutrition sous toutes ses formes et contre les maladies non transmissibles et garantit que les besoins en macronutriments (protéines, lipides et glucides, y compris les fibres alimentaires) et en micronutriments essentiels (vitamines, minéraux et oligo-éléments) sont satisfaits, en fonction du sexe, de l’âge, du niveau d’activité physique et de l’état physiologique de chaque personne. Pour qu’un régime alimentaire soit sain, il doit respecter les critères suivants: 1) les besoins quotidiens en énergie et en micronutriments sont satisfaits, mais l’apport énergétique ne les dépasse pas; 2) la consommation de fruits et de légumes est d’au moins 400 g par jour; 3) l’apport de lipides ne dépasse pas 30 pour cent de l’apport énergétique total, les matières grasses saturées sont remplacées par des matières grasses insaturées et les graisses trans industrielles sont éliminées; 4) l’apport de sucres libres est inférieur à 10 pour cent de l’apport énergétique total ou, de préférence, inférieur à 5 pour cent; 5) l’apport de sel est inférieur à 5 g par jour. Pour les nourrissons et les jeunes enfants, les critères d’une alimentation saine sont analogues à ceux des adultes, mais les points suivants aussi sont importants: 1) les nourrissons devraient être exclusivement nourris au sein pendant les six premiers mois; 2) l’allaitement maternel devrait ensuite se poursuivre jusqu’à ce que l’enfant atteigne l’âge de 2 ans au moins; 3) à partir de l’âge de 6 mois, l’allaitement devrait être complété par un ensemble d’aliments adéquats, sûrs et riches en nutriments. On ne devrait pas ajouter de sel ni de sucres aux aliments complémentaires.

Besoins énergétiques alimentaires

Quantité d’énergie alimentaire dont un individu a besoin pour entretenir ses fonctions corporelles, se maintenir en bonne santé et mener une activité normale. Les besoins en énergie alimentaire dépendent de l’âge, du sexe, de la taille et du niveau d’activité physique. L’enfant, pour qu’il ait une croissance et un développement optimaux, et la femme enceinte, de même que la femme allaitante, pour qu’elle produise du lait, ont besoin d’un apport énergétique supplémentaire, pour la bonne santé de la mère et de l’enfant.

Changement climatique

Variation de l’état du climat, qu’on peut déceler (par exemple au moyen de tests statistiques) par des modifications de la moyenne et/ou de la variabilité de ses propriétés et qui persiste pendant une longue période, généralement pendant des décennies ou plus309.

Choc économique

Événement inattendu ou imprévisible, extérieur à l’économie considérée et susceptible de lui causer du tort ou au contraire de la stimuler. Une crise financière mondiale conduisant à un resserrement du crédit bancaire ou le fléchissement économique de l’un des principaux partenaires commerciaux d’un pays sont des chocs s’exerçant sur la demande qui peuvent avoir de multiples effets sur les dépenses et l’investissement. Une flambée des prix du pétrole ou du gaz, des catastrophes naturelles entraînant une chute brutale de la production, ou des conflits qui perturbent les échanges et la production sont autant d’exemples de chocs agissant sur l’offre.

Chocs climatiques

Terme désignant non seulement les perturbations touchant les régimes pluviométriques habituels et les tendances des températures, mais aussi des phénomènes complexes tels que les sécheresses et les inondations. Équivalent à la notion d’aléa naturel ou de stress, ce phénomène exogène peut avoir une incidence préjudiciable sur la sécurité alimentaire et nutritionnelle, selon la vulnérabilité de l’individu, du ménage, de la communauté ou des systèmes considérés311,312,313,314.

Climat

Dans son sens étroit, désigne en général le temps moyen ou, plus précisément, se réfère à une description statistique fondée sur les moyennes et la variabilité de grandeurs pertinentes sur des périodes variant de quelques mois à des milliers voire à des millions d’années309.

Conditions météorologiques (temps)

Conditions atmosphériques considérées sur une courte période (de quelques minutes à quelques jours), à la différence du climat qui représente la façon dont l’atmosphère se comporte sur des périodes relativement longues (évolution dans le temps de la moyenne des conditions météorologiques calculée sur une période longue). La différence entre les conditions météorologiques et le climat est une mesure de temps (voir les définitions du climat, du changement climatique, de la variabilité du climat et des extrêmes climatiques)318.

Conflit

Le conflit est entendu dans le présent rapport comme la lutte que se livrent des groupes interdépendants qui ont des incompatibilités, réelles ou perçues comme telles, au regard de leurs besoins, valeurs, objectifs, ressources ou intentions. Cette définition englobe (mais ne s’y limite pas) les conflits armés – qui sont des affrontements organisés et collectifs violents entre au moins deux parties, lesquelles peuvent être étatiques ou non. Le présent rapport s’intéresse aux conflits accompagnés de violences ou de destructions, ou qui en font peser la menace, y compris dans des situations où la fragilité entraîne un risque de conflits destructeurs et où les crises prolongées persistent.

Coûts cachés

Dans le présent rapport, on entend par «coût caché» de l’alimentation le coût pour la santé humaine et/ou l’environnement associé à la production et à la consommation d’aliments et n’entrant pas en ligne de compte dans le prix des denrées alimentaires ni dans le coût de tel ou tel régime alimentaire. En ce qui concerne la santé humaine, les coûts cachés sont le plus souvent supportés par les personnes qui subissent les conséquences de la consommation d’aliments dommageables pour la santé, notamment d’aliments à forte teneur énergétique contenant beaucoup de graisses, de sucres et/ou de sel, susceptibles de causer des maladies cardiovasculaires ou du diabète. Parmi les coûts cachés figure aussi le coût que représente pour les systèmes de santé le traitement des maladies non transmissibles dues à de mauvaises habitudes alimentaires. En ce qui concerne l’environnement, les coûts cachés touchent l’ensemble du monde. Ils ont trait aux incidences environnementales de la production et de la consommation d’aliments — utilisation des terres, de l’énergie et de l’eau pour la production et la consommation d’aliments, impacts liés au changements climatiques (gaz à effet de serre) et perte de biodiversité alimentaire. Voir FAO, FIDA, OMS, PAM et UNICEF (2020)7.

Dénutrition

Conséquence d’un apport nutritionnel insuffisant sur le plan quantitatif ou qualitatif, et/ou d’une mauvaise absorption ou d’une mauvaise métabolisation des nutriments consommés consécutives à des maladies répétées. La dénutrition peut se traduire par un poids insuffisant par rapport à l’âge, une taille trop petite par rapport à l’âge (retard de croissance), un poids dangereusement faible par rapport à la taille (émaciation) ou encore une carence en vitamines et en minéraux (carence en micronutriments).

Dimensions de la sécurité alimentaire

Dans le présent rapport, les dimensions de la sécurité alimentaire renvoient aux quatre dimensions traditionnelles de la sécurité alimentaire:

  1. Disponibilités – cette dimension a trait aux disponibilités effectives ou potentielles en aliments, ce qui recouvre notamment la production, les réserves alimentaires, les marchés et les transports, et les aliments prélevés dans la nature.

  2. Accès – si des disponibilités existent, effectivement ou potentiellement, il faut alors se demander si les ménages et les personnes ont un accès physique et économique suffisant à ces aliments.

  3. Utilisation – si des disponibilités existent et si les ménages y ont accès, il faut alors se demander si les ménages consomment au maximum des aliments constituant un apport nutritionnel et énergétique adéquat. Un apport suffisant en calories et en nutriments résulte de soins et de pratiques d’alimentation corrects, de la préparation des aliments, de la diversité du régime alimentaire, de la façon dont les aliments sont répartis au sein des ménages, et du fait que ceux-ci disposent ou non d’eau propre, de systèmes d’assainissement et de soins de santé. Joint à une bonne métabolisation des aliments consommés, cet apport détermine l’état nutritionnel des personnes.

  4. Stabilité – quand les conditions des trois premières dimensions sont suffisamment remplies, il convient de s’intéresser à la stabilité de l’ensemble du système, et de veiller à ce que les ménages soient toujours en situation de sécurité alimentaire. Les problèmes sur ce point peuvent renvoyer à une instabilité à court terme (qui peut conduire à une insécurité alimentaire aiguë) ou à une instabilité à moyen ou long terme (qui peut entraîner une insécurité alimentaire chronique). Les facteurs à l’origine de l’instabilité peuvent être d’ordre climatique, économique, social ou politique.

Le présent rapport fait aussi référence à deux autres dimensions de la sécurité alimentaire, proposées par le Groupe d’experts de haut niveau sur la sécurité alimentaire et la nutrition (HLPE) du Comité de la sécurité alimentaire mondiale (CSA); toutefois, il n’y a pas d’accord formel de la part de la FAO ou d’autres concernant ces deux dimensions, ni d’accord négocié concernant le libellé. Ces deux dimensions ont cependant été prises en considération ici en raison de leur pertinence dans le contexte du présent rapport. Ces deux dimensions supplémentaires de la sécurité alimentaire sont renforcées dans l’interprétation théorique et juridique du droit à l’alimentation, et sont actuellement définies ainsi:

  1. L’agencéité désigne la faculté qu’ont les personnes, individuellement ou collectivement, de choisir par elles-mêmes les aliments qu’elles consomment, les aliments qu’elles produisent et la manière dont ces aliments sont produits, transformés et distribués au sein des systèmes alimentaires, et de participer aux processus qui façonnent les politiques et la gouvernance des systèmes alimentaires58.

  2. La durabilité renvoie à la capacité des systèmes alimentaires, sur le long terme, d’assurer la sécurité alimentaire et la nutrition sans compromettre les bases économique, sociale et environnementale nécessaires à la sécurité alimentaire et à la nutrition des générations futures58.

Échelle de mesure de l’insécurité alimentaire vécue (échelle FIES)

Échelle permettant d’établir − à partir d’une mesure de l’expérience vécue de l’accès à la nourriture − des niveaux d’insécurité alimentaire susceptibles d’être comparés d’un contexte à un autre. Repose sur des données obtenues en demandant aux personnes directement, à l’aide d’enquêtes, si elles ont vécu des situations ou adopté des comportements dont on sait qu’ils correspondent à un accès restreint à la nourriture.

Émaciation

Poids insuffisant par rapport à la taille, résultant en général d’une perte de poids associée à une période récente d’apports caloriques insuffisants et/ou à une maladie. Chez l’enfant de moins de 5 ans, l’émaciation est caractérisée par un rapport poids/taille inférieur de deux écarts types ou plus à la valeur médiane des normes de croissance de l’enfant définies par l’OMS.

État nutritionnel

État physiologique d’une personne résultant de la relation entre l’apport et les besoins en nutriments, ainsi que de la capacité de l’organisme à digérer, absorber et utiliser ces nutriments.

Excès pondéral (ou surpoids) et obésité

Poids corporel supérieur à la normale compte tenu de la taille, en raison d’une accumulation excessive de graisse. Cet état de fait est généralement le signe que la quantité de calories consommées est supérieure à celle des calories dépensées. Chez l’adulte, l’excès pondéral est caractérisé par un indice de masse corporelle (IMC) égal ou supérieur à 25 kg/m2, et l’obésité par un IMC égal ou supérieur à 30 kg/m2. Chez l’enfant de moins de 5 ans, l’excès pondéral est caractérisé par un rapport poids/taille supérieur de deux écarts types ou plus à la valeur médiane des normes de croissance de l’enfant définies par l’OMS; l’obésité est caractérisée par un rapport poids/taille supérieur de trois écarts types ou plus à la valeur médiane de ces mêmes normes.

Exposition

Présence de personnes; de moyens de subsistance; d’espèces ou d’écosystèmes; de fonctions, ressources ou services environnementaux; d’éléments d’infrastructure; ou de biens économiques, sociaux ou culturels dans un lieu ou dans un contexte susceptibles de subir des dommages309.

Extrême climatique (phénomène météorologique ou climatique extrême)

Phénomène caractérisé par le fait qu’une variable météorologique ou climatique prend une valeur située au-dessus (ou au-dessous) d’un seuil proche de la limite supérieure (ou inférieure) de la plage des valeurs observées pour cette variable. Par souci de simplicité, on emploiera le terme «extrême climatique» pour désigner indifféremment un phénomène extrême météorologique ou climatique314.

Faim

Sensation physique pénible voire douloureuse causée par une consommation alimentaire ne permettant pas un apport énergétique suffisant. Dans le présent rapport, la faim est mesurée par la prévalence de la sous-alimentation (PoU) et le terme est synonyme de sous-alimentation chronique.

Fléchissement économique

Période de recul de l’activité économique ou de croissance négative telle que mesurée par le taux de croissance du PIB réel. Ce terme est synonyme de récession économique, un fléchissement temporaire ou de courte durée de la croissance économique qui se produit généralement sur deux trimestres consécutifs au minimum. Dans les analyses et les figures du présent rapport, le repérage d’un fléchissement économique se fait en utilisant l’année comme période de référence.

Fragilité

On définit la fragilité comme étant l’exposition aux risques couplée à des capacités insuffisantes de l’État, du système et/ou des communautés de gérer, absorber ou atténuer ces risques. Le nouveau cadre de l’OCDE sur la fragilité s’articule autour de cinq dimensions – économie, environnement, politique, société et sécurité – et mesure chacune d’entre elles au travers de l’accumulation et de la combinaison des risques et des capacités. Voir OCDE (2016)89.

Inondation

Submersion par l’eau débordant du lit normal d’un cours d’eau ou d’autres masses d’eau, ou accumulation d’eau sur des zones qui ne sont pas normalement submergées. On englobe sous ce terme les crues fluviales, les crues éclair, les crues en milieu urbain, les inondations pluviales, les débordements d’égouts, les inondations côtières et les crues de rupture de lacs glaciaires309.

Insécurité alimentaire aiguë

Insécurité alimentaire sévissant dans une zone et à un moment précis et dont le niveau de gravité menace des vies ou des moyens d’existence, voire les deux, quels qu’en soient les causes, le contexte ou la durée. Joue un rôle important dans l’orientation stratégique de mesures ciblant des objectifs à court terme de prévention, d’atténuation ou de réduction d’une insécurité alimentaire grave308.

Insécurité alimentaire chronique

Insécurité alimentaire persistant en raison principalement de causes structurelles. Peut comprendre une insécurité alimentaire saisonnière existant en l’absence de conditions exceptionnelles. Joue un rôle important dans l’orientation stratégique des mesures qui ciblent l’amélioration qualitative et quantitative à moyen et à long terme de la consommation alimentaire nécessaire à une vie saine et active308.

Insécurité alimentaire grave

Niveau de gravité de l’insécurité alimentaire, déterminé à partir de l’échelle de l’insécurité alimentaire vécue, se caractérisant par le fait que les personnes concernées ont probablement épuisé leurs réserves alimentaires, ont connu la faim et, au degré le plus avancé, sont restées plusieurs jours sans manger, mettant leur santé et leur bien-être en grand danger.

Insécurité alimentaire modérée

Niveau de gravité de l’insécurité alimentaire, déterminé à partir de l’échelle de l’insécurité alimentaire vécue, se caractérisant par le fait que les personnes concernées ne sont pas certaines de pouvoir se procurer à manger et ont été contraintes, à un moment ou à un autre durant l’année, de réduire la qualité et/ou la quantité des aliments consommés, en raison d’un manque d’argent ou d’autres ressources. L’insécurité alimentaire modérée renvoie donc à un manque de régularité dans l’accès à la nourriture, qui diminue la qualité de l’alimentation, perturbe les habitudes alimentaires normales et peut avoir des conséquences défavorables sur la nutrition, la santé et le bien-être.

Macronutriments

Les macronutriments sont nécessaires en grandes quantités (ils sont mesurés en grammes) et constituent la principale source d’énergie et de masse (volume) dans notre alimentation. Ils comprennent les glucides, les protides et les lipides. Ils sont la principale source d’énergie alimentaire, laquelle se mesure en calories. Il est essentiel pour chacun d’avoir un apport énergétique suffisant pour assurer la croissance et le développement du corps et une bonne santé. Les glucides, les protides et les lipides, en plus de fournir de l’énergie, remplissent chacun des fonctions très spécifiques dans le corps et doivent être disponibles en quantité suffisante pour remplir ces fonctions.

Malnutrition

Condition physiologique anormale provoquée par une consommation insuffisante, déséquilibrée ou excessive de macronutriments et/ou de micronutriments. La malnutrition comprend les problèmes de dénutrition (retard de croissance et émaciation des enfants et carences en vitamines et minéraux) ainsi que les situations d’excès pondéral et d’obésité.

Micronutriments

Les micronutriments comprennent les vitamines et les minéraux et sont nécessaires en quantités très faibles (micro), mais spécifiques. Les vitamines et les minéraux présents dans les aliments sont nécessaires à la croissance, au développement et au bon fonctionnement de l’organisme et sont essentiels à notre santé et à notre bien-être. Notre corps a besoin d’un certain nombre de vitamines et de minéraux différents, chacun ayant une fonction spécifique dans l’organisme et devant être disponible en quantités différentes et suffisantes.

Pauvreté extrême

Ou Extrême pauvreté. Pourcentage de la population vivant avec moins de 1,90 USD par jour (prix PPA de 2011) dans un pays et pour une année donnés.

Phénomène météorologique ou climatique extrême

Phénomène caractérisé par le fait qu’une variable météorologique ou climatique prend une valeur située au-dessus (ou au-dessous) d’un seuil proche de la limite supérieure (ou inférieure) de la plage des valeurs observées pour cette variable. Nombre de phénomènes météorologiques et climatiques extrêmes résultent de la variabilité naturelle du climat, et les variations naturelles décennales et multidécennales du climat servent de toile de fond aux changements climatiques d’origine anthropique. Même en l’absence de changements dus à l’activité humaine, il se produirait divers phénomènes météorologiques et climatiques extrêmes.

Prévalence de la sous-alimentation

Estimation de la proportion de la population n’ayant pas un apport énergétique alimentaire suffisant pour mener une vie saine et active. Cet indicateur est utilisé depuis longtemps par la FAO pour surveiller la faim aux niveaux mondial et régional et est aussi l’indicateur 2.1.1 des objectifs de développement durable (ODD).

Qualité de l’alimentation

Comprend quatre aspects clés: la diversité (diversité des groupes d’aliments et diversité au sein des groupes), l’adéquation (suffisance des nutriments ou des groupes d’aliments par rapport aux besoins), la modération (aliments et nutriments qui doivent être consommés avec modération) et l’équilibre général (composition de l’apport en macronutriments). L’exposition aux risques liés à la sécurité sanitaire des aliments est un autre aspect important de la qualité.

Ralentissement de la croissance économique

Ralentissement du rythme de croissance de l’activité économique par rapport à la période antérieure. Se produit quand la croissance du PIB réel baisse d’une période sur l’autre, tout en restant positive. Dans les analyses et les figures du présent rapport, le repérage d’un ralentissement de la croissance économique se fait en utilisant l’année comme période de référence, bien que la mesure habituelle soit plutôt le trimestre.

Résilience

Capacité des personnes, des ménages, des communautés, des villes, des institutions, des systèmes et des sociétés exposés à une grande diversité d’aléas de prévenir, d’affronter et d’amortir les conséquences de ceux-ci, de s’y adapter, d’y faire face et de s’en relever, de façon positive, efficiente et efficace, tout en conservant un niveau acceptable de fonctionnement et sans compromettre les perspectives à long terme de développement durable, la paix et la sécurité, les droits de l’homme et le bien-être de tous317.

Résilience face aux changements climatiques

Résilience (voir ce terme) permettant de faire face à la variabilité actuelle ou attendue du climat et à l’évolution des conditions climatiques moyennes, et donnant lieu à des stratégies de développement et/ou de renforcement.

Retard de croissance

Petite taille par rapport à l’âge, trahissant un ou plusieurs épisodes antérieurs prolongés de dénutrition. Chez l’enfant de moins de 5 ans, le retard de croissance est caractérisé par un rapport taille/âge inférieur de deux écarts types ou plus à la valeur médiane des normes de croissance de l’enfant définies par l’OMS.

Risque

Probabilité ou éventualité que des événements dangereux se produisent ou que des tendances préjudiciables se concrétisent, multipliée par les conséquences de ces événements ou tendances. Le risque d’insécurité alimentaire est la probabilité que l’interaction entre un aléa/un choc/une perturbation naturel(le) ou induit(e) par l’homme et une situation de vulnérabilité aboutisse à une insécurité alimentaire.

Sécheresse

Temps anormalement sec pendant une période suffisamment longue pour causer un grave déséquilibre hydrologique309.

Sécurité alimentaire

Situation dans laquelle chacun a, à tout moment, un accès matériel, social et économique à une nourriture suffisante, sûre et nutritive de nature à satisfaire ses besoins et préférences alimentaires et peut ainsi mener une vie saine et active. Suivant cette définition, on peut distinguer quatre dimensions de la sécurité alimentaire: disponibilités alimentaires, accès économique et matériel aux aliments, utilisation des aliments, et stabilité dans le temps. Le concept de sécurité alimentaire évolue de sorte à prendre en compte l’importance centrale de l’agencéité et de la durabilité. On trouvera une définition de ces deux éléments supplémentaires dans le présent glossaire.

Soins de santé

Fourniture organisée de soins médicaux à des individus ou à la communauté, à savoir services fournis aux individus ou à la communauté par des prestataires de services de soins de santé dans le but d’améliorer, de maintenir, de surveiller ou de rétablir la santé.

Sous-alimentation

Situation dans laquelle la consommation alimentaire habituelle d’un individu est insuffisante pour fournir l’apport énergétique alimentaire nécessaire à une vie normale, active et saine. Dans le présent rapport, le terme «faim» est synonyme de sous-alimentation chronique.

Système d’alerte précoce

Ensemble des capacités nécessaires pour produire et diffuser en temps opportun des bulletins d’alerte permettant à des personnes, des communautés et des organisations menacées par un danger de se préparer à agir sans délai et de façon appropriée pour réduire le risque de dommage ou de perte309,310,315.

Systèmes alimentaires

Ensemble complet des acteurs – et de leurs activités interdépendantes d’ajout de valeur – participant à la production, au groupage, à la transformation, à la distribution et à la consommation des produits alimentaires ainsi qu’à l’élimination des déchets correspondants. Les systèmes alimentaires comprennent tous les produits alimentaires issus de la production végétale et animale, des forêts, de la pêche et de l’aquaculture, ainsi que les contextes plus larges, économique, sociétal et naturel, dans lesquels ces divers systèmes de production sont intégrés. Les systèmes agroalimentaires, expression de plus en plus employée dans le contexte d’une transformation des systèmes alimentaires visant à rendre ceux-ci plus durables et plus inclusifs, couvrent un champ plus vaste du fait qu’ils englobent les systèmes agricoles et alimentaires et les produits agricoles alimentaires et non alimentaires, avec des chevauchements évidents.

Transition nutritionnelle

Avec l’augmentation des revenus et l’urbanisation des populations, les aliments riches en glucides complexes et en fibres font place à des aliments à plus forte densité énergétique, plus riches en sucre, en matières grasses et/ou en sel. Ces tendances mondiales s’accompagnent d’une transition démographique qui va dans le sens d’une augmentation de l’espérance de vie et d’une réduction des taux de fécondité. Dans le même temps, les schémas de morbidité s’éloignent des maladies infectieuses et des carences nutritionnelles pour s’orienter vers des taux plus élevés d’obésité chez les enfants, de maladies cardiovasculaires et de certains types de cancer.

Vague de chaleur

Période de conditions atmosphériques anormalement chaudes et désagréables309.

Variabilité du climat

Variations de l’état moyen et d’autres variables statistiques (écarts types, fréquence des extrêmes, etc.) du climat à toutes les échelles spatiales et temporelles au-delà de la variabilité propre à des phénomènes météorologiques particuliers. La variabilité peut être due à des processus internes naturels au sein du système climatique (variabilité interne) ou à des variations des forçages externes anthropiques ou naturels (variabilité externe)309.

Vulnérabilité

Situation causée par des facteurs ou processus physiques, sociaux, économiques et environnementaux qui ont pour effet de rendre les personnes, les communautés, les biens ou les systèmes plus sensibles aux aléas316. La vulnérabilité à l’insécurité alimentaire désigne l’ensemble des conditions susceptibles d’accroître la sensibilité d’un ménage aux conséquences d’un choc ou d’un aléa, en ce qui concerne la sécurité alimentaire.

1 Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), Fonds international de développement agricole (FIDA), Organisation mondiale de la Santé (OMS), Programme alimentaire mondial (PAM) et Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF). 2017. L’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde 2017. Renforcer la résilience pour favoriser la paix et la sécurité alimentaire. FAO, Rome (également disponible en ligne: www.fao.org/3/I7695f/I7695F.pdf).

2 Holleman, C., Jackson, J., Sánchez, M. V et Vos, R. 2017. Sowing the seeds of peace for food security – Disentangling the nexus between conflict, food security and peace. FAO, Rome (également disponible en ligne: www.fao.org/3/a-i7821e.pdf).

3 FAO, FIDA, OMS, PAM et UNICEF. 2018. L’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde 2018. Renforcer la résilience face aux changements climatiques pour la sécurité alimentaire et la nutrition. FAO, Rome (également disponible en ligne: www.fao.org/3/I9553fr/i9553fr.pdf).

4 Holleman, C., Rembold, F., Crespo, O. et Conti, V. 2020. The impact of climate variability and extremes on agriculture and food security - An analysis of the evidence and case studies. Document d’information établi pour servir de base à L’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde 2018. FAO, Rome (également disponible en ligne: https://doi.org/10.4060/cb2415en).

5 FAO, FIDA, OMS, PAM et UNICEF. 2019. L’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde 2019. Se prémunir contre les ralentissements et les fléchissements économiques. FAO, Rome (également disponible en ligne: www.fao.org/3/ca5162fr/ca5162fr.pdf).

6 Holleman, C. et Conti, V. 2019. Role of income inequality in shaping outcomes on individual food insecurity. Document d’information établi pour servir de base à L’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde 2019. FAO, Rome (également disponible en ligne: https://doi.org/10.4060/cb2036en).

7 FAO, FIDA, OMS, PAM et UNICEF. 2020. L’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde 2020. Transformer les systèmes alimentaires pour une alimentation saine et abordable. FAO, Rome (également disponible en ligne: https://doi.org/10.4060/ca9692fr).

8 Herforth, A., Bai, Y., Venkat, A., Mahrt, K., Ebel, A. et Masters, W.A. 2020. Cost and affordability of healthy diets across and within countries. Document d’information établi pour servir de base à L’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde 2020. FAO Agricultural Development Economics Technical Study No 9. FAO, Rome (également disponible en ligne: https://doi.org/10.4060/cb2431en).

9 Springmann, M. 2020. Valuation of the health and climate-change benefits of healthy diets. Document d’information établi pour servir de base à L’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde 2020. FAO Agricultural Development Economics Working Paper 20-03. FAO, Rome (également disponible en ligne: https://doi.org/10.4060/cb1699en).

10 Lakner, C., Yonzan, N., Gerszon Mahler, D., Castaneda Aguilar, R.A. et Wu, H. 2021. Actualisation des estimations de l’impact de la pandémie de COVID-19 sur la pauvreté: retour sur 2020 et perspectives pour 2021. Dans: Banque Mondiale, Blogs [en ligne]. Washington (États-Unis). [Référencé le 6 mai 2021] (également disponible en ligne: https://blogs.worldbank.org/fr/opendata/actualisation-des-estimations-impact-pandemie-covid-19-sur-pauvrete).

11 Purnamasari, R. et Ali, R. 2020. High-frequency monitorıng of households Summary of Results from Survey Round 1. 7 mai 2020. Indonesia COVID-19 Observatory Brief No 3. Washington (États-Unis) Banque mondiale (également disponible en ligne: https://openknowledge.worldbank.org/handle/10986/34740).

12 Egger, D., Miguel, E., Warren, S.S., Shenoy, A., Collins, E., Karlan, D., Parkerson, D., Mobarak, A.M., Fink, G., Udry, C., Walker, M., Haushofer, J., Larreboure, M., Athey, S., Lopez-Pena, P., Benhachmi, S., Humphreys, M., Lowe, L., Meriggi, N.F., Wabwire, A., Davis, C.A., Pape, U.J., Graff, T., Voors, M., Nekesa, C. et Vernot, C. 2021. Falling living standards during the COVID-19 crisis: Quantitative evidence from nine developing countries. Science Advances, 7(6): eabe0997.

13 Gentilini, U., Almenfi, M., Blomquist, J., Dale, P., De la Flor Giuffra, L., Desai, V., Fontenez, M.B., Galicia, G., Lopez, V., Marin, G., Mujica, I.V., Natarajan, H., Newhouse, D., Palacios, R., Quiroz, A.P., Rodriguez Alas, C., Sabharwal, G. et Weber, M. 2021. Social Protection and Jobs Responses to COVID-19: A Real-Time Review of Country Measures. “Living Paper” Version 15 (14 mai 2021). Washington, (États-Unis).

14 Oxfam. 2020. À l’abri de la tempête: un besoin mondial de protection sociale universelle en période de COVID-19. (www.oxfam.org/fr/publications/labri-de-la-tempete-un-besoin-mondial-de-protection-sociale-universelle-en-periode-de).

15 FAO. 2021. Situation alimentaire mondiale. Dans: FAO [en ligne]. [Référencé le 25 mai 2021] www.fao.org/worldfoodsituation/fr/?utm_cam1f40paign=featurebar.

16 FAO et PAM. 2020. FAO-WFP early warning analysis of acute food insecurity hotspots. October 2020. Rome (également disponible en ligne: https://doi.org/10.4060/cb1907en).

17 Boero, V., Cafiero, C., Gheri, F., Kepple, A.W., Rosero Moncayo, J., Viviani, S. 2021. Access to food in 2020. Results of twenty national surveys using the Food Insecurity Experience Scale (FIES). Rome (également disponible en ligne: https://doi.org/10.4060/cb5623en).

18 FAO. 2018. Voices of the Hungry. Dans: Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture [en ligne]. Rome. [Référencé le 28 avril 2020] http://www.fao.org/in-action/voices-of-the-hungry/fr/.

19 FAO. 2020. Using the Food Insecurity Experience Scale (FIES) to monitor the impact of COVID-19. Rome (également disponible en ligne: https://doi.org/10.4060/ca9205en).

20 FAO. 2020. Effets sexospécifiques de la covid-19 et mesures de politique générale équitables en matière d’agriculture, de sécurité alimentaire et de nutrition. Rome, FAO (également disponible en ligne: http://www.fao.org/3/ca9198fr/CA9198FR.pdf).

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