|
Pour cette évaluation, la mission s’est entretenue avec divers représentants des ministères, d’institutions des Nations Unies, d’organisations bilatérales et d’ONG. Elle a également inspecté des zones de production vivrière dans la mesure où les conditions de sécurité le permettaient et eu des entretiens avec des agriculteurs, des chefs de village et des personnes déplacées à l’intérieur du pays.
La mission a constaté que la production animale avait plus souffert des conséquences des troubles intérieurs que la production végétale du fait que le manioc, aliment de base du pays, est une culture résistante qui peut supporter des conditions défavorables. La production des principales cultures vivrières en 1998 devrait atteindre 791 000 tonnes pour le manioc, 77 000 tonnes pour les bananes-plantains, 16 000 tonnes pour les légumineuses et un peu plus de 2 000 tonnes pour les céréales. Ces volumes sont comparables à ceux des années récentes.
Sur la base d’une population totale estimée à 3 124 000 habitants au milieu de l’année 1998, et après déduction des pertes et autres utilisations alimentaires, on estime que la production vivrière totale, en équivalent céréales, sera inférieure d’environ 118 000 tonnes aux besoins de consommation en 1998. En temps normal, un déficit de cet ordre pourrait être couvert par des voies commerciales car le pays a la capacité d’importation voulue. Toutefois, en raison de la désorganisation des activités commerciales, en particulier à Brazzaville, les importations commerciales de vivres n’atteindront probablement en 1998 que 80 pour cent du niveau de 1995/96, soit 72 000 tonnes. Il resterait donc un déficit de 46 000 tonnes, qui devrait être comblé grâce à divers mécanismes d’adaptation (intensification des activités de chasse et de pêche, cultures à cycle court, etc...) et à une aide alimentaire ciblée sur des groupes vulnérables, tels que les personnes déplacées, les réfugiés, victimes d’inondations, les enfants égarés etc.
Les habitants de Brazzaville qui ont perdu leur emploi dans le secteur
privé moderne après la destruction du quartier central des
affaires auront des difficultés à se procurer les aliments
dont ils ont besoin. Les prix alimentaires sont encore élevés,
en raison de contraintes logistiques et commerciales.
Durant la guerre civile, on estime qu’entre 500 000 et 600 000 personnes se sont enfuies de Brazzaville. On considère que 50 à 60 000 personnes ont trouvé refuge dans le pays voisin, en République démocratique du Congo, et environ 30 000 au Cameroun. On estime qu’il ne reste que 5 000 à 10 000 personnes qui s’étaient réfugiées à l’étranger qui ne sont pas encore revenues.
Les mouvements de population concernent principalement les personnes déplacées à l’intérieur du pays (PDI) qui se sont enfuies de Brazzaville, qui a été durant la guerre civile le théâtre des affrontements les plus violents et les plus destructeurs. La distribution géographique des PDI peut être résumée comme suit:
Régions | Population totale au 1/6/97 1/ |
Population totale au 30/1/98 2/ |
Population totale au 30/12/98 3/ |
Kouilou | 87 | ||
Niari | 122 | ||
Lekoumou | 77 | ||
Bouenza | 195 | ||
Pool | 234 | ||
Plateaux | 134 | ||
Cuvette | 164 | ||
Sangha | 39 | ||
Likouala | 79 | ||
Total régions | (38%)1 131 | 1 365 | 1 273 |
Brazzaville | 1 059 | 759 | 948 |
Pointe-Noire | 647 | 772 | 762 |
Autres Urbaines | 169 | 179 | 189 |
Total pop. urbaine | (62%)1 875 | 1 710 | 1 899 |
Total Congo | 3 006 | 3 075 | 3 172 |
Au 31 janvier 1998, on estime qu’entre 250 000 et 350 000 personnes
n’auront pas encore regagné leur domicile à Brazzaville,
soit environ 50 pour cent de ceux qui s’étaient enfuis pendant la
guerre civile. De ce fait, la population de Brazzaville peut être
estimée à environ 75 pour cent de son niveau d’avant les
troubles. La majorité des PDI regagneront peu à peu Brazzaville
au fur et à mesure que l’activité économique redeviendra
normale, mais il est probable que certains d’entre eux tarderont à
revenir pour diverses raisons, notamment de sécurité
personnelle, ou parce qu’ils ont perdu leur gagne-pain. Au 31 janvier 1998,
les PDI en provenance de Brazzaville devraient se répartir comme
suit:
Kinshasa et environs | 5 000 - 10 000 |
Pointe-Noire | 75 000 - 110 000 |
Régions du sud | 150 000 - 200 000 |
Régions du nord | 20 000 - 30 000 |
Dans le nord, Owando a été touchée par les combats et on estime que 5 000 personnes ont quitté la ville et ses environs. Les personnes déplacées se sont réfugiées à Oyo et dans les forêts et les camps de pêche, au nord du fleuve Kouyou. D’après les estimations, environ 50 pour cent seraient revenues à Owando. Etant donné qu’un grand nombre de personnes déplacées se sont regroupées en chemin aux points de transit clés ou près de villages comme Kintele, PK 45, Odziba, Ngo et Oyo, les communautés locales ont été affectées.
Dans le sud, les communautés locales vivant le long de l’axe
Brazzaville- Dolisie ont aussi été affectées par ces
mouvements de population. A Dolisie, où de violents affrontements
ont eu lieu, jusqu’à un tiers de la population se serait enfuie.
Plus de 50 pour cent des fugitifs sont à présent revenus.
La production agricole est essentiellement concentrée sur le manioc, qui est de loin le principal aliment de base, et occupe au moins 50 pour cent des superficies mises en culture (162 000 ha). La production de manioc s’élève approximativement à 790 000 tonnes par an. Avec 75 000 à 80 000 tonnes par an, la production de bananes-plantains se place au deuxième rang. La production céréalière est négligeable. Celle de maïs est tombée de 5 000 tonnes en 1995 à 4 000 tonnes en 1997. La moitié de ce volume est utilisée pour nourrir les volailles. Les importations de viande de volaille à bas prix ont eu un effet dissuasif sur la production locale et réduit la demande de maïs. Bien que la demande dépasse 25 000 tonnes par an, la production rizicole locale est très faible et en baisse depuis cinq ans. Le niveau atteint ces dernières années s’est échelonné entre 300 à 500 tonnes seulement. La commercialisation, qui relevait habituellement du monopole de l’Etat, semble être un obstacle majeur, de même que le transport des champs jusqu’aux marchés.
La production d’arachides est stationnaire, à environ 15 000 tonnes par an, et celle de haricots marque une légère progression avec moins de 1 000 tonnes par an. Les productions annuelles de fruits et de légumes s’élèvent à quelque 30 000 tonnes chacune.
Avec deux campagnes principales par an, la République du Congo a un bon potentiel agricole, grâce à ses sols riches, à de bonnes pluies et à d’abondantes ressources en eau. Toutefois, ce potentiel est encore dans une large mesure inexploité. La première campagne agricole principale dure de septembre/octobre à janvier/février et la deuxième de mars/avril à juin/juillet.
La production vivrière englobe aussi les produits de la pêche et la viande. La production halieutique totale provenant des fleuves, de la mer, et des étangs piscicoles, est évaluée à quelque 50 000 tonnes par an, pour un potentiel estimé à près de 150 000 tonnes par an. Si ce potentiel était pleinement exploité, il serait largement suffisant pour couvrir la demande intérieure de poisson, de l’ordre de 100 000 tonnes par an. Le poisson est un aliment de base en République du Congo, avec une consommation annuelle par habitant de 30 kg, représentant, selon les estimations, 22 pour cent de la ration protéique totale [ République du Congo, Consultation sectorielle - Agriculture, Forêts, Pêche, Eaux, Environnement et Recherche Agronomique, Document de synthèse, février 1997.] de la population.
Le régime alimentaire se compose essentiellement de manioc et,
dans une moindre mesure, de bananes-plantains, de poisson et de riz. Les
habitants consomment aussi de la viande. Dans les campagnes, la viande
de gibier constitue une importance source de protéines. D’après
les estimations faites par l’UNICEF en 1992, la ration calorique moyenne
est de 2 393 kcal/habitant/jour.
1995 | 1996 | 1997 | |
Racines et tubercules | 806.5 | 807.0 | 810.3 |
Manioc | 790.0 | 791.0 | 795.0 |
Autres | 16.5 | 16.9 | 15.3 |
Bananes/Plantains | 74.5 | 75.5 | 76.0 |
Légumineuses | 15.3 | 15.5 | 14.9 |
Arachides | 14.5 | 14.6 | 14.0 |
Haricots | 0.8 | 0.9 | 0.9 |
Céréales | 5.8 | 5.0 | 4.3 |
Maïs | 5.0 | 4.5 | 4.0 |
Riz | 0.8 | 0.5 | 0.3 |
3.2.1 Production vivrière
L’impact sur la production vivrière semble avoir été limité. L’incidence des troubles intérieurs sur les productions de racines et tubercules, de bananes-plantains et de légumineuses a été relativement limitée. Les productions de céréales et de légumineuses ont été affectées dans la mesure où des semences ont été utilisées pour la consommation humaine à l’arrivée des personnes déplacées dans les zones rurales. En outre, les travaux de préparation des sols pour les semis de la première campagne (septembre-octobre) ont été entravés par l’insécurité qui régnait dans de nombreuses zones de production. Avec l’arrivée des personnes déplacées, le manioc a probablement été surexploité, dans quelques zones à forte concentration de PDI. En compensation, dans les villages où elles ont élu domicile, les PDI ont fourni un réservoir de main-d’oeuvre supplémentaire qui a contribué aux activités agricoles, ce qui pourrait se traduire par une augmentation de la production pendant le deuxième semestre de 1998. Le secteur de l’élevage, notamment d’ovins, de caprins et de volaille, a considérablement plus souffert de la guerre civile que la production végétale. Ceci devrait avoir un effet négatif sur la production de viande, estimée à quelque 5 000 tonnes dans les années normales. En outre, en janvier 1998, des inondations ont endommagé les cultures et les logements dans les régions de Cuvette et de Likouala. Selon les estimations provisoires du CICR, jusqu’à 792 ménages vivant dans 71 villages auraient eu leurs récoltes endommagées par des inondations. Les activités halieutiques ont été perturbées par l’insécurité, la destruction du matériel et le manque d’accès aux marchés. Dans l’ensemble, on estime toutefois que le principal aliment de base, qui est le manioc, n’a subi que des pertes limitées.
3.2.2 Pouvoir d’achat dans les villes
Le deuxième impact des troubles intérieurs concerne l’accès aux vivres des habitants des villes, en particulier à Brazzaville, où ceux-ci ont perdu leurs emplois, avec la destruction du quartier central des affaires. Cette baisse du pouvoir d’achat réduira leur accès aux produits alimentaires importés qui couvrent jusqu’à 50 pour cent de leurs besoins. Elle pourrait aussi avoir un impact négatif sur les échanges de produits locaux.
3.2.3 Prix alimentaires
On constate dans le Tableau 3 que les prix des aliments de base ont
monté en flèche durant la guerre civile. Une étude
des marchés de Brazzaville, réalisée en décembre
1997, a montré que les prix étaient encore élevés
après la cessation des hostilités. A la fin du mois de janvier,
les prix tendaient à fléchir, mais ils devraient rester élevés
pendant les prochains mois. Ceci n’est pas dû à une chute
de la production vivrière, mais à l’augmentation des coûts
de la commercialisation, imputable à la destruction des véhicules
de transport, à l’augmentation des coûts du carburant, à
la persistance de l’insécurité dans certaines zones de production
et à la détérioration du réseau de routes de
desserte.
|
Mai 1997 (avant les troubles) |
Septembre 1997 (pendant les troubles) |
Decembre 1997 (après les troubles) |
Variation déc. 97 par rapport à Mai 97(%) |
Manioc (Tchikwangue) | 242 | 580 | 465 | 192 |
Bananes/Plantains | 527 | 883 | 697 | 132 |
Farine de blé | 327 | 507 | 523 | 160 |
Riz | 273 | 380 | 387 | 142 |
Poisson (Fleuve Congo) | 1 425 | 1 958 | 1 738 | 122 |
Lait en poudre | 2 600 | 3 958 | 3 277 | 126 |
Haricots | 917 | 1 945 | 1 195 | 130 |
Ces prix alimentaires élevés pourraient prévaloir
pendant presque toute l’année 1998, et il faudra sans doute du temps
avant que la situation ne redevienne normale. S’ils persistent trop longtemps,
des problèmes nutritionnels risquent d’apparaître.
La production de manioc devrait atteindre environ 790 000 tonnes en
1998, soit 5 000 tonnes de moins qu’en 1997. Au total, la production de
racines et de tubercules devrait se chiffrer à 807 000 tonnes, soit
un recul de 3 000 tonnes par rapport à 1997. La production de bananes-plantains
devrait rester de l’ordre du niveau de 1997. On s’attend à une récolte
d’arachides plus abondante en 1998, grâce à des pluies bien
distribuées dans les principales zones de production (Bouenza et
Lekoumou). On prévoit une très faible production de maïs
en 1998, de 2 000 tonnes, soit la moitié du niveau de 1997 et 40
pour cent de celui de 1995.
Régions | Volume (en milliers de tonnes) |
Part en pourcentage |
Kouilou | 38.7 | 4.9 |
Niari | 86.9 | 11.0 |
Lekoumou | 52.9 | 6.7 |
Bouenza | 153.3 | 19.4 |
Pool | 241.0 | 30.5 |
Plateaux | 83.7 | 10.6 |
Cuvette | 99.5 | 12.6 |
Sangha | 12.2 | 1.5 |
Likouala | 21.8 | 2.8 |
Total | 790.0 | 100 |
Le secteur de l’élevage a été durement touché
par les troubles intérieurs. Le nombre d’animaux aurait été
réduit de plus de 20 pour cent par rapport à 1996. Etant
donné que la région de Pool détient 44 pour cent du
cheptel national, cette perte pourrait aussi avoir des effets à
moyen terme sur la production de viande.
Un grand nombre d’animaux, notamment de moutons, de chèvres et
de volailles, ont été perdus, mais les productions de manioc
et d’arachides n’ont été que peu touchées. La production
de manioc en 1998 devrait atteindre quelque 153 000 tonnes. La pêche
de subsistance progresse.
Les sous-secteurs du petit bétail et de la volaille ont subi
de lourdes pertes durant la guerre civile. La pêche est bien développée
le long des fleuves, en particulier à M’Pouya et à Makotipoko.
La production de manioc en 1998 devrait atteindre 84 000 tonnes.
Des inondations ont touché quatre des six districts de la région en janvier 1998. Une partie des terres sous manioc seront probablement endommagées. Il est encore trop tôt pour évaluer les conséquences des inondations, mais d’après les estimations, 790 familles auraient eu leurs logements et leurs récoltes endommagés.
La chasse et la pêche sont des activités très répandues
dans la région. On estime que 87 pour cent de la population pratique
la pêche à des fins de subsistance ou pour en retirer un profit
économique. La production de manioc, qui occupe entre 90 et 99 pour
cent des surfaces cultivées, devrait atteindre 100 000 tonnes en
1998.
Ouesso a été touchée par les troubles intérieurs,
de violents affrontements ayant eu lieu dans un camp militaire, près
de la ville. Les habitants de la ville ont franchi la frontière
du Cameroun pour aller se cacher dans la forêt.
La distribution alimentaire se caractérise par un réseau routier dans un état déplorable et un système d’approvisionnement éparpillé, dispersé sur de longues distances. Pointe-Noire est approvisionnée par les régions de Niari et de Lekoumou, et Brazzaville par les trois principales zones de production, à savoir:
La voie ferrée "Congo-océan" est, avec la Route Nationale 1, la principale artère par laquelle sont acheminés les produits du sud vers Brazzaville et vers Pointe-Noire. Les principaux points d’entrée pour les importations de denrées en République du Congo sont Pointe-Noire pour les produits venant d’Europe, d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique du Sud et le port de Yoro et Plage Main Bleue pour les produits provenant de la République démocratique du Congo (RDC). Les principaux aliments importés via Pointe-Noire sont la farine de blé, le poisson salé et fumé et l’huile végétale. Ces produits sont importés par quelques gros commerçants et transmis à des grossistes et à des détaillants qui les redistribuent. Le commerce transfrontalier avec la RDC est important et probablement sous-estimé.
Les troubles intérieurs ont eu divers effets perturbateurs sur la commercialisation des denrées de production locale ou importées: i) désorganisation des transports ferroviaires de Pointe-Noire à Brazzaville; ii) restriction de la circulation des marchandises dans tout le pays, en raison de l’insécurité; iii) réduction du nombre de véhicules de transport; iv) détérioration du réseau routier. La ligne ferroviaire est à nouveau en service, mais les autres contraintes n’ont pas encore été totalement éliminés.
Les stocks de report céréaliers étaient faibles à l’ouverture de la campagne, du fait de la désorganisation des importations au deuxième semestre de 1997. Le PAM avait des stocks céréaliers d’environ 2 500 tonnes à Pointe-Noire à l’époque de la mission. Les éventuelles petites réserves conservées par les producteurs ont été épuisées par les milices ou pour nourrir les PDI. Les seules réserves significatives dont dispose le pays sont les stocks de manioc conservés en terre. Leur ampleur n’étant pas connue, il n’en a pas été tenu compte dans l’évaluation des disponibilités alimentaires.
Les estimations des importations alimentaires pour 1998 diffèrent selon les sources. D’un point de vue macro-économique, rien n’empêche d’atteindre un niveau d’importations comparable à celui des années précédentes. Le pays dispose de devises et le taux de change du Franc CFA est resté à peu près stable. Le problème pourrait dériver de la baisse du pouvoir d’achat des habitants de Brazzaville qui étaient employés dans le secteur privé moderne avant la guerre civile. Selon les estimations de la mission, en 1998 les importations alimentaires atteindront 80 pour cent du niveau de la période 1994-96.
Les besoins de consommation alimentaire sont calculés sur la base de la consommation effective pendant la période 1994-96, à savoir 30 kg de céréales par habitant et par an, 5 kg de légumineuses, 276 kg de racines et tubercules et 26 kg de bananes-plantains. Ces chiffres sont un peu inférieurs à ceux indiqués dans certaines enquêtes sur la consommation. Ceci tendrait à confirmer que la production nationale et/ou les importations alimentaires sont probablement sous-estimés. L’utilisation fourragère des céréales a été estimée à 50 pour cent de la production de maïs (elle-même négligeable). D’après les données fournies par le Ministère de l’agriculture, les utilisations non alimentaires et les pertes de légumineuses et de racines et tubercules, seraient de 2 pour cent, alors que celles de bananes-plantains sont estimées à 3 pour cent.
Le bilan alimentaire a été établi sur la base d’une
population estimée à 3 124 000 habitants pour l’année
1998. Cette estimation tient compte du fait que la quasi-totalité
des 90 000 à 100 000 personnes qui avaient quitté le pays
(pour se réfugier à Kinshasa et au Cameroun) sont à
présent revenues. Ce chiffre correspond à la moyenne de la
population estimée pour janvier 1998 et décembre 1998 (voir
Tableau 1).
Céréales | Légumineuses | Racines et tubercules | Bananes/Plantains | |
Disponibilités intérieures | 5 | 16 | 807 | 77 |
Stocks d’ouverture1/ | 3 | 0 | 0 | 0 |
Production de 1998 | 2 | 16 | 807 | 77 |
Utilisation totale | 100 | 16 | 879 | 83 |
Utilisation alimentaire | 94 | 16 | 862 | 81 |
Autres utilisation/pertes2/ | 1 | .3 | 17 | 2 |
Stocks de clôture | 5 | 0 | 0 | 0 |
Besoins d’importations | 95 | 0 | 72 | 6 |
(en equivalent céréales) 2/ | 95 | 0 | 21 | 2 |
Importations commerciales3/ | 72 | 0 | 0 | 0 |
Déficit ou besoin d’aide alimentarie | 23 | 0 | 21 | 2 |
Le bilan met en évidence un déficit alimentaire de 23 000 tonnes de céréales, 72 000 tonnes de racines et tubercules et 6 000 tonnes de bananes-plantains. Après conversion des racines et des tubercules et des bananes-plantains en équivalent céréales, le déficit alimentaire total pour 1998 est estimé à 46 000 tonnes.
Le déficit peut être comblé de plusieurs manières:
Les distributions ont commencé à Pointe-Noire en octobre (avant la signature de la Lettre d’entente) et à Brazzaville en novembre. Les bénéficiaires de Brazzaville se répartissaient comme suit: 51 000 PDI et 3 312 personnes vulnérables (enfants non accompagnés, personnes âgées, femmes allaitantes et enfants atteints de malnutrition dans les hôpitaux), ainsi que 2 500 réfugiés rwandais installés dans des camps et environ 2 000 Congolais rapatriés de République démocratique du Congo. Le HCR estime à 25 000 le nombre de rapatriés qui recevront une ration de trois mois, comme prime de retour, dont les deux tiers seront distribués à Brazzaville.
D’après les premières estimations, les bénéficiaires potentiels seraient au nombre de 400 000, mais l’effectif recevant actuellement une aide du PAM est d’environ 58 000 personnes. Ce chiffre ne comprend pas l’effectif de Pointe-Noire, où les distributions ont été suspendues pour être réorganisées. En outre, des estimations récentes et des visites sur le terrain à Brazzaville et à Pointe-Noire indiquent que l’effectif actuellement desservi par le PAM est très inférieur au nombre de personnes qui ont besoin d’une aide alimentaire. En effet, un grand nombre de PDI qui ont récemment regagné Brazzaville et ont trouvé leurs logements détruits, doivent encore être inscrites sur la liste des bénéficiaires potentiels.
Malgré l’amélioration des conditions de sécurité, il est encore difficile d’accéder à certaines zones pour évaluer les besoins alimentaires. On a donc encore beaucoup de mal à obtenir des chiffres exacts sur l’effectif de PDI. La situation a récemment été aggravée par de fortes pluies et des inondations qui auraient détruit des récoltes et des logements dans le nord du pays, laissant des milliers de personnes pratiquement sans moyens de subsistance.
Vu la situation actuelle, on estime que quelque 50 000 personnes auront
encore besoin d’une aide à l’achèvement du projet en cours.
Les objectifs globaux de cette assistance seront de prévenir des
souffrances et de fournir une aide en quantité suffisante pour permettre
aux personnes déplacées à l’intérieur du pays
ou affectées par les conflits de reprendre leurs activités
sociales et économiques normales. On part du principe que les conditions
de sécurité se stabiliseront d’ici environ trois mois et
que la majeure partie de l’aide alimentaire sera utilisée pour des
activités de reconstruction. A partir de mai 1998 (le présent
projet prendra fin le 20 avril 1998), il a été recommandé
d’organiser l’intervention d’aide alimentaire comme indiqué dans
le tableau ci-après:
Catégorie | Effectif de bénéficiaires |
Besoins alimentaire (en tonnes) |
PDI (vivant sur les sites) et personnes vulnérables | 50 000 | 2 430 |
Réfugiés rwandais 1/ | 8 000 | 1 706 |
Vivres-contre-travail | 75 000 | 1 102 |
Total | 133 000 | 5 238 |
Les denrées peuvent entrer dans le pays par le port maritime de Pointe-Noire, qui a les installations requises pour recevoir et entreposer les quantités envisagées. Une liaison ferroviaire est en service pour transporter les denrées jusqu’à la capitale. Pour le transport des vivres de Pointe-Noire ou de Brazzaville vers d’autres destinations, il est possible de faire appel à des transporteurs privés car le secteur des transports, qui avait souffert du conflit, est en phase de reprise.
Avec la cessation des hostilités et le retrait des forces paramilitaires vaincues vers les régions du sud, les agriculteurs riverains des grandes routes ont été pillés et ont perdu des biens, notamment des bovins et des petits ruminants. L’intervention militaire et le déploiement des forces paramilitaires armées dans les régions de Pool, Bouenza et Niari dans le sud du pays, et dans les régions de Shanga, de Plateaux et du bassin dans le nord, ont empêché bon nombre de paysans et de paysannes, d’aller dans les champs pour semer les plantes normalement cultivées pendant la campagne principale.
En outre, les 250 000 à 340 000 personnes qui se sont déplacées dans les zones rurales à travers tout le pays, ont épuisé les ressources des familles rurales. Les déplacés ont dû séjourner chez des parents, des amis ou des connaissances et les populations locales qui les ont accueillies, suivant leur tradition d’hospitalité spontanée et continue, ont été mises à rude contribution. Les vivres, qui étaient déjà disponibles en quantités insuffisantes, ont dû être partagés entre un plus grand nombre de personnes et de nombreux paysans ont été contraints de consommer leurs semences.
La grande variété des systèmes de culture locaux, basés sur la culture extensive de racines et de tubercules sur des sols extrêmement fertiles, la disponibilité d’aliments forestiers dans la plupart des régions et la possibilité de chasser et de pêcher ont sauvé la population touchée de la famine et d’une catastrophe humanitaire majeure. Cependant, les conséquences à moyen terme de cette crise sur le système de production ne doivent pas être sous-estimées et, si des mesures correctives ne sont pas prises à temps dans les zones rurales, le pays pourrait être confronté à une augmentation spectaculaire de l’exode rural, qui est déjà un problème sérieux, surtout si l’on tient compte des possibilités de travail non qualifié qui seront offertes pour la reconstruction de la capitale dévastée par la guerre.
Pour plusieurs raisons, il est probable qu’un grand nombre de personnes resteront dans les zones rurales; elles auront besoin d’un appui immédiat pour se lancer dans des activités agricoles. Un autre phénomène est particulièrement préoccupant: de nombreux jeunes paramilitaires ne seront pas admis dans les forces armées nationales et risquent de retourner au banditisme et de semer la panique dans les zones urbaines et rurales si une autre possibilité de gagner leur vie ne leur est pas offerte.
En outre, l’effondrement spectaculaire des institutions et le pillage systématique de l’équipement des services de soutien du gouvernement et des archives à Brazzaville et dans les villes précédemment mentionnées, auront sans aucun doute une incidence négative, à court terme, sur la capacité du gouvernement à conduire le processus de relèvement et de construction.
C’est pourquoi la FAO propose de mettre en oeuvre un programme de secours et de relèvement qui devrait permettre au pays d’effectuer la transition entre la situation de crise actuelle et le relèvement complet du secteur agricole, en tenant compte des défis de développement qui se présenteront, dans l’ordre de priorité clairement défini dans le Plan-cadre de développement rural élaboré par le gouvernement et présenté en 1996 à la communauté internationale, à une table ronde de donateurs.
La priorité absolue est de fournir aux personnes directement touchées sur le plan économique des semences de base et des outils à main afin qu’elles puissent reprendre leurs activités de production. La même approche s’applique aux pêcheurs de Brazzaville qui ont perdu leur matériel et leurs engins.
Une fois que les agriculteurs et les pêcheurs, qui sont les plus touchés sur le plan économique, auront été aidés, quelques programmes susceptibles d’avoir un impact positif sur le développement de l’agriculture, de l’élevage et des pêches devraient être lancés sans attendre. Ceci contribuerait à atténuer l’impact de la crise et favoriserait l’installation des populations dans les zones rurales; ces programmes comprendraient un appui aux activités de multiplication de semences, à la reconstitution des stocks de volailles et de petits ruminants, au relèvement du secteur de l’alimentation animale, à la production artisanale, au relèvement immédiat du secteur de la pêche et aux organisations de paysans, par la fourniture de matériel d’agro-transformation à petite échelle.
Enfin, il faudrait reconstruire les capacités du Ministère de l’agriculture, de l’élevage et des pêches, afin qu’il soit en mesure de prendre la tête du secteur et de coordonner les interventions axées sur le relèvement de l’agriculture.
Pour s’attaquer aux priorités mentionnées ci-dessus, la
FAO a préparé sept profils de projet en vue d’obtenir un
financement immédiat de 3 903 500 dollars E.-U., qui seront inclus
dans l’Appel commun interinstitutions des Nations Unies, actuellement en
préparation.
Le présent rapport a été établi sous la responsabilité des secrétariats de la FAO et du PAM à partir d'informations provenant de sources officielles et officieuses. La situation pouvant évoluer rapidement, prière de s'adresser, pour un complément d'information à:. | |
Abdur Rashid
Chef, SMIAR, FAO Télex 610181 FAO 1 Télécopie: 0039-6-5705-4495 Mél:[email protected] |
Ismat Fahmi
Chef de Section, OSA/2, PAM Télex: 626675 WFP 1 Télécopie: 0039-6-6513-2839 Mél:[email protected] |
Il est également possible de recevoir
automatiquement, par messagerie électronique, les Alertes spéciales
et les Rapports spéciaus, dès leur publication, en souscrivant
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