ALICOM 99/22





Conférence sur le commerce international des denrées alimentaires au-delà de l'an 2000: décisions fondées sur des données scientifiques, harmonisation, équivalence et reconnaissance mutuelle
Melbourne (Australie), 11 - 15 octobre 1999

Harmonisation, reconnaissance mutuelle et équivalence:
Étiquetage et revendications nutritionnelles -
Jusqu'où aller ?

par

Dr Christine J. Lewis, Center for Food Safety and applied Nutrition,
Food and Drug Administration, États-Unis d'Amérique


Table des Matières


I. Introduction

1. Le présent document donne brièvement les raisons d'un étiquetage des denrées alimentaires et il examine la question dans l'optique des informations à fournir pour assurer la protection du consommateur. Les échanges de vues à ce sujet ont pour objet non seulement d'identifier des stratégies qui nous permettent d'assurer par l'étiquette une protection convenable du consommateur, mais aussi de prendre en considération la nécessité de minimiser la possibilité que l'étiquetage des denrées alimentaires puisse entraîner une restriction inutile ou injustifiée des échanges commerciaux et des mouvements de produits alimentaires de part et d'autre des frontières. Le but n'est pas de trouver un équilibre entre ces deux intérêts - d'autant plus qu'ils ne sont pas forcément mutuellement exclusifs - mais d'envisager l'étiquetage des denrées alimentaires de manière à pouvoir définir des principes raisonnés sur lesquels il soit possible de s'appuyer pour faire la démarcation entre étiquetage "nécessaire" et "non nécessaire".

2. Les étiquettes auxquelles il est demandé de fournir une quantité excessive de renseignements sont clairement une source de difficultés parce qu'elles font obstacle au commerce et découragent les fabricants mais, ce qui est plus important, elles peuvent aussi dérouter les consommateurs et les induire en erreur. De la manière la plus simple, la détermination de ce que sont des renseignements suffisants à faire figurer sur l'étiquette d'un produit alimentaire est fonction d'un accord au sujet de ce que les consommateurs ont besoin de savoir. Mais, certainement, le processus est tempéré par ce que les consommateurs veulent savoir, ainsi que par ce que les fabricants veulent leur dire et par ce que certains groupes ayant des intérêts spéciaux - légitimes aussi bien que strictement intéressés - veulent que les consommateurs sachent.

3. Si l'étiquette du produit alimentaire a connu le succès, c'est en grande partie parce qu'elle a continué de s'appuyer sur un principe fondamental, à savoir qu'elle doit en dernier ressort être étayée par des données scientifiques solidement fondées, bien établies et acceptées. Toutefois, l'étiquette du produit alimentaire est également une interface entre les administrations assurant le contrôle des produits alimentaires, les fabricants et les consommateurs. Ces interfaces signifient un dialogue dynamique et ce dialogue peut changer selon les exigences des groupes participants. Les différences culturelles conduisent à des perspectives très diverses sur ce qu'il faudrait faire pour les consommateurs, sur ce qu'il faudrait permettre aux consommateurs de faire pour eux-mêmes, et sur la manière dont il faudrait permettre aux nouvelles technologies alimentaires et à leur élaboration de se répercuter sur l'approvisionnement alimentaire. Le dialogue peut se compliquer beaucoup et il ne conduit pas toujours exclusivement à des décisions fondées sur la science.

II. Historique

A. DÉFINITIONS ET HYPOTHÈSES

4. Le premier point à considérer est le problème de la définition de la "protection du consommateur". En effet, la signification donnée à cette expression n'est pas la même parmi tous les groupes ni dans tous les pays. La notion de protection du consommateur repose sur plusieurs principes fondamentaux, mais elle évolue à des vitesses différentes et quelquefois de manière différente dans différentes parties du monde. Dès l'abord, nous devons convenir que la protection du consommateur considérée dans l'optique de l'étiquetage des produits alimentaires est en grande partie une question de choix du consommateur; autrement dit, elle est l'occasion d'un choix informé, fondé sur des renseignements véridiques et précis. L'hypothèse de base est que les consommateurs doivent disposer de certaines informations pour être en mesure d'effectuer le meilleur choix ou au moins des choix meilleurs. En permettant ces derniers, l'étiquette du produit alimentaire offre une protection aux consommateurs. En outre, la protection n'est pas possible sans leur participation puisque les consommateurs doivent utiliser les informations fournies pour être protégés. Ce type de protection est beaucoup plus compliqué que, et se distingue de, celui qui découle de spécifications "automatiques" auxquelles il est donné effet avant que les consommateurs aient l'option d'acheter et de consommer le produit alimentaire.

5. Il nous faut également convenir que l'étiquette apparaît sur des aliments produits conformément à de bonnes pratiques de fabrication et que ces produits sont fondamentalement considérés comme sans danger. L'étiquette du produit alimentaire ne doit pas servir à combattre les produits frauduleux ou présentant des risques pour la santé. Lorsque nous admettons fondamentalement la sécurité des produits alimentaires qui portent des étiquettes, nous n'en reconnaissons pas moins que la question de la sécurité de ces produits est, sous certains aspects qui apparaissent maintenant, sujette à une large interprétation et que, pour cette raison, elle est également à considérer dans le débat sur l'étiquetage des produits alimentaires - et par conséquent sur le choix du consommateur.

B. PAYS EN DÉVELOPPEMENT

6. La protection offerte au consommateur par l'étiquette du produit alimentaire exige généralement un certain degré de développement dans le système de production et de distribution d'une société. En outre, l'alphabétisation et l'éducation doivent précéder l'étiquetage des produits alimentaires pour que celui-ci se révèle utile. Étant donné que l'étiquette a clairement son maximum de valeur lorsque les consommateurs ont et peuvent effectuer des choix alimentaires, que peut-on dire des situations dans lesquelles ces choix sont limités ou font totalement défaut ?

7. Dans l'optique de l'harmonisation des étiquettes portées par les aliments, il ne nous faut pas perdre de vue le fait que la première tâche d'un pays en développement est d'assurer que les disponibilités alimentaires soient suffisantes pour permettre à la population de ne pas mourir de faim ni de souffrir des effets nocifs pour la santé d'une mauvaise nutrition. Cela ne veut pas dire que l'étiquetage des produits alimentaires n'a aucun rôle à jouer dans les pays en développement, mais plutôt que le concept de protection du consommateur y diffère de celui retenu dans les pays développés.

8. Dans la mesure où une région ou un pays n'a pas atteint le niveau apparemment nécessaire de développement de la production alimentaire et/ou n'a pas atteint le niveau suffisant d'alphabétisation, il peut sembler que l'étiquetage des produits alimentaires n'ait de répercussions de type commercial que si la nation s'engage dans le commerce des denrées alimentaires. Néanmoins, les efforts en matière d'étiquetage des produits alimentaires considérés dans la perspective de la santé publique ne doivent pas être ignorés seulement pour cause de choix alimentaire ou d'alphabétisation limités. Fondamentalement, les besoins nutritionnels sont très analogues pour les divers êtres humains et les diverses cultures. Toutefois, l'étiquetage des produits alimentaires peut être utile dans toute la largeur du spectre, les pays en développement s'intéressant surtout aux données concrètes de base sur les éléments nutritifs, les pays développés craignant les excès de nutriments et les interactions entre diverses substances nutritives. L'étiquette d'un produit alimentaire donne des informations très importantes dans les situations où le pays est en voie de développement ou a des difficultés économiques, quoique les informations à faire figurer sur l'étiquette dans un pays en développement puissent être très différentes de celles qui doivent apparaître dans un pays développé. Des informations de base sur les éléments nutritifs sont souvent d'une valeur inestimable dans de telles conditions et englobent, par exemple, non seulement les ingrédients et le mode de formulation, mais aussi les calories, les grammes de protéines et la qualité des protéines.

9. La distribution de produits alimentaires avec un étiquetage nutritionnel dans la langue du pays qui les reçoit a été identifiée comme une technique utilisable pour promouvoir la nutrition dans les groupes pauvres. Il est clair que ceux-ci ont toutes chances d'avoir surtout besoin d'étiquettes portant des informations de base en ce qui concerne l'identité et la composition du produit, y compris la composition nutritionnelle de base. De ce fait, les organismes multinationaux et nationaux d'aide au développement qui s'occupent d'assurer l'accessibilité de la nourriture à ceux qui en ont besoin sont à même de promouvoir des régimes nutritionnellement équilibrés en recourant à l'étiquetage et diverses autres techniques, ainsi qu'en faisant place à des programmes d'éducation et de démonstration. En outre, les organismes d'aide au développement pourraient collaborer avec les pays peu avancés pour déterminer ce que les gouvernements et la population considèrent comme être les besoins d'informations sur le plan alimentaire, y compris les informations relevant de l'étiquetage, et pour aider à élaborer des programmes et des lois en conséquence. Quoique la question ait été explorée à d'autres tribunes que celle de l'étiquetage des produits alimentaires, les divers modes d'utilisation des termes servant à la présentation des informations sur l'étiquette d'un produit alimentaire - pictogrammes, icônes ou symboles -méritent une étude plus approfondie. Les activités de ce genre entreprises dans ce but insistent sur le fait que l'étiquette d'un produit alimentaire est un instrument très important pour la santé publique, et offre un moyen durable et polyvalent de protection du consommateur.

C. ACCORDS COMMERCIAUX

10. L'applicabilité des récents accords commerciaux aux aspects intéressant l'étiquetage des produits alimentaires peut être considérée sous deux angles, à savoir ceux qui relèvent de l'Accord sur les obstacles techniques au commerce (OTC) ou ceux qui relèvent de l'Accord sur l'application des mesures sanitaires et phytosanitaires (SPS). Chacun a des répercussions différentes sur les dispositions relatives à l'étiquetage des produits alimentaires.

11. L'Accord OTC est, fondamentalement, un code de transparence visant à faire connaître les processus d'établissement de règlements adoptés par des partenaires commerciaux pour ce qui est de leurs règlements techniques impératifs et de leurs normes d'application volontaire. Il a été récemment élargi de manière à englober les procédures d'évaluation de la conformité des procédures ainsi que les processus intéressant les produits et les méthodes de production. Une réaction initiale serait qu'une administration nationale prenne la décision d'exiger des dispositions spécifiant que la nature et la teneur de l'étiquette d'un produit alimentaire peuvent être incompatibles avec l'Accord OTC. Toutefois, ce dernier a été rédigé de manière à assurer que ses dispositions n'empêchent pas une autorité nationale de prendre les mesures nécessaires pour assurer la protection de la santé humaine aux niveaux qu'elle juge appropriés.

12. L'aspect OTC est peut-être celui qui intéresse le plus l'étiquetage des produits alimentaires lorsque l'on examine la situation créée par les États-Unis d'Amérique lorsqu'ils ont adopté des dispositions législatives de grande envergure exigeant des informations de type nutritionnel sur pratiquement tous les aliments emballés vendus dans le pays. Quoique le problème n'ait pas été complètement résolu, on fait valoir énergiquement que des mesures d'étiquetage nutritionnel du type mis en vigueur par les États-Unis au cours des dix dernières années sont l'expression du niveau de protection que les États-Unis ont jugé approprié et sont, par conséquent, conformes à l'Accord OTC. On peut s'attendre à ce que d'autres pays suivent la même voie en prenant en considération les intérêts et la protection de leurs consommateurs dans le domaine de l'étiquetage nutritionnel dans l'avenir. À l'heure actuelle, la question est de savoir comment promouvoir l'harmonisation entre ces intérêts potentiellement divers.

13. Certaines mesures d'étiquetage nutritionnel relèvent de l'Accord SPS. Ces mesures intéressent directement la sécurité des produits alimentaires, tandis que d'autres visent à protéger la vie ou la santé humaines contre les risques liés à la présence d'additifs, de contaminants, de toxines ou d'organismes causant des maladies dans les produits alimentaires, les boissons ou les aliments pour animaux. Les mesures au titre de l'Accord SPS sont en elles-mêmes relativement objectives puisqu'elles sont exprimées essentiellement en termes de principes scientifiques et qu'elles démontrent l'équivalence de données par des moyens scientifiques. La considération essentielle est qu'une mesure SPS ne s'applique que dans la mesure nécessaire pour protéger la santé humaine et qu'elle n'est pas maintenue en l'absence d'informations scientifiques suffisantes. Si les dispositions du type SPS peuvent jouer un rôle dans les décisions en matière d'étiquetage, par exemple en exigeant la fourniture d'informations sur les méthodes de transformation et de traitement, elles restent toutefois ordinairement associées aux pratiques de transformation des produits alimentaires et aux pratiques agricoles.

III. Situation actuelle en matière d'étiquetage des produits alimentaires

14. Bien qu'aux fins du présent examen, on simplifie excessivement le caractère varié des informations à faire figurer sur l'étiquette d'un produit alimentaire, on peut dire que les renseignements nécessaires peuvent être regroupés dans trois grandes catégories: identification, valeur nutritionnelle et transformation/traitement des produits. On trouve pour chaque catégorie des illustrations des divers facteurs influant sur la décision à prendre en vue de l'étiquetage. En outre, comme indiqué plus bas, chaque catégorie de renseignements peut être associée avec des activités qui, si elles sont mises en oeuvre, sont susceptibles de favoriser l'harmonisation à l'échelle internationale.

A. IDENTIFICATION DES PRODUITS

 

Activités d'harmonisation
Intensification des recherches en vue d'un accord technique

15. Le point de départ de l'étiquetage d'un produit alimentaire dans l'optique de la protection du consommateur est la prise en considération du rôle qu'il doit jouer dans la fourniture d'informations essentielles sur l'identité et la composition du produit, informations qui peuvent être considérées comme constituant l'étiquette de base. Il est clair qu'il appartient à un certain degré au fabricant de fournir des renseignements de base sur son produit aux consommateurs et l'étiquette est apposée dans ce but. Mais les renseignements ainsi fournis sont aussi un instrument de réglementation parce que, en exigeant l'inclusion d'informations telles que l'identification du produit, une liste des ingrédients, les quantités contenues et l'adresse du fabricant, les administrations chargées du contrôle des produits alimentaires peuvent assurer que les consommateurs ne soient pas induits en erreur et, par conséquent, qu'ils n'achètent pas ni ne consomment de produits frauduleux ni de produits ne portant pas les spécifications appropriées.

16. Les consommateurs peuvent aussi utiliser les informations fournies pour effectuer des choix ou prendre des décisions d'acheter ou de consommer un produit alimentaire, cela principalement sur la base de la liste des ingrédients. Le fabricant, quant à lui, peut informer le consommateur quant au goût et à la consommation courante du produit, et même lui donner des orientations, par exemple pour ce qui est des méthodes et recettes de préparation. En outre, l'étiquette de base peut préciser des méthodes de préparation conformes à certaines exigences culturelles ou religieuses, dont un exemple bien connu est l'étiquetage cacher.

17. Un autre aspect de l'étiquette de base est qu'elle vise à fournir des informations sur certains objectifs de sécurité. Par exemple, dans le cas de substances allergènes, leur identification dans la liste d'ingrédients peut être suffisante pour permettre à la majorité des consommateurs de faire des choix informés. Pour d'autres allergènes, des déclarations particulières doivent apparaître sur l'emballage. Les échanges de vues se poursuivent quant aux orientations appropriées à adopter sur la manière d'identifier ou déclarer les mélanges d'ingrédients sur l'étiquette.

18. Globalement, l'étiquette de base est caractérisée par des informations qui sont jugées essentielles pour permettre aux consommateurs d'effectuer un choix et qui sont généralement neutres en ceci qu'elles renseignent sur les caractères les plus évidents du produit alimentaire. Les fabricants reconnaissent un degré considérable de responsabilité à ce niveau de l'étiquetage et ils prévoient des informations dans diverses langues, ainsi que dictées par les intérêts commerciaux. À ce jour, l'étiquette de base a fait l'objet d'efforts d'harmonisation considérables et elle est pour cette raison un mode de présentation bien accepté, largement utilisé dans le monde entier. Sa présente acceptation générale dépend néanmoins des travaux bien dirigés et quelquefois ardus entrepris par divers organismes de normalisation et de réglementation, plus particulièrement la Commission du Codex Alimentarius.

19. Les éléments constitutifs de l'étiquette de base peuvent sembler évidents au stade actuel, mais il s'agissait à l'origine de principes controversés qui ont été progressivement reconnus et appuyés par des recherches scientifiques. Néanmoins, le "caractère fondamental" d'une telle étiquette du produit alimentaire n'a pas pour objet de suggérer que tous les problèmes aient été résolus et que nous disposons d'une étiquette d'un type harmonieux. Plutôt, si beaucoup des principes contentieux ont maintenant fait l'objet d'un accord, il n'en reste pas moins beaucoup de différences techniques à résoudre, qui vont de la manière d'exprimer les poids des emballages aux règles à suivre pour donner la liste des ingrédients.

B. VALEUR NUTRITIONNELLE DES PRODUITS

 

Activités en matière d'harmonisation
Élucidation et accord sur des principes scientifiques pour la promotion de la santé, en vue de permettre l'établissement d'une base uniforme pour influencer une décision nationale visant à protéger la santé humaine à des niveaux appropriés; surveillance de la nutrition; éducation du consommateur.

20. La science de la nutrition s'est développée rapidement pendant la deuxième moitié de ce siècle, quelquefois à une vitesse extraordinaire. Il était inévitable qu'à un point ou à un autre ces observations scientifiques se répercutent sur l'étiquetage des produits alimentaires parce qu'elles influaient sur le choix du consommateur. Avec le passage du temps, un intérêt croissant a été manifesté pour le rôle que la nutrition peut jouer dans la santé. Cet intérêt a concerné initialement les maladies liées aux carences en éléments nutritifs, et il a progressé dans des domaines visant plus particulièrement la promotion de la santé et la réduction des risques de maladies chroniques imputables à la surconsommation.

21. Il y a des parties du monde, mais quelques-unes seulement, où les progrès des sciences de la nutrition ont déterminé un élargissement du concept de protection du consommateur. Si l'on admet que la meilleure protection que l'on peut offrir au consommateur est de lui permettre d'effectuer des choix informés, il apparaît logique de penser qu'il doit connaître les caractéristiques nutritionnelles du produit alimentaire. De ce fait, l'étiquette peut devenir un instrument utilisable aux fins de l'éducation nutritionnelle, mais cela ne signifie pas qu'elle ait en elle-même une valeur éducative. Elle signifie plutôt que les consommateurs ont été informés sur l'influence que certains choix nutritionnels peuvent avoir sur leur santé et qu'ils sont incités à apporter des changements à leur régime. L'étiquette fournit les renseignements nécessaires pour permettre de choisir de façon saine, mais elle ne fournit pas les raisons du choix.

22. En outre, le degré auquel les consommateurs s'intéressent aux informations ainsi fournies dicte le degré auquel les fabricants se montrent désireux de les fournir ou, peut-être, de formuler des produits compatibles avec un régime sain. On ne peut guère s'attendre à ce que les fabricants engagent les dépenses que comporte la fourniture d'informations nutritionnelles sur leurs produits si ces dernières ne sont pas utilisées par les consommateurs pour effectuer une sélection ou exigées par eux à des fins de comparaison. L'étiquetage nutritionnel accroît la valeur de l'étiquette lorsqu'il conduit à des choix mieux avisés et aide le gouvernement à promouvoir des stratégies de santé publique.

23. L'intérêt que suscite ce type de protection du consommateur par le moyen de l'étiquetage nutritionnel s'accroît, mais il n'est pas universel. En raison de son intérêt immédiat au moment de l'achat, de la préparation et de la consommation, l'étiquette peut facilement renseigner sur la qualité nutritionnelle du produit alimentaire et son rôle dans un régime sain. Toutefois, la taille réduite de la majorité des étiquettes associée au fait que les fabricants sont désireux de promouvoir leurs produits, signifie que l'étiquetage peut être ambigu au mieux et trompeur au pire. Par suite, la question de savoir comment les résultats scientifiques en matière de nutrition et de santé peuvent être traduits aux fins d'utilisation par le consommateur a suscité beaucoup de controverses, ainsi que par suite, celle de savoir de quel type d'informations nutritionnelles les consommateurs ont véritablement besoin, compte tenu de l'espace restreint disponible, et celle de savoir comment ce type d'information peut être fourni sans devenir fallacieux.

24. Les questions posées par l'étiquetage nutritionnel se fondent actuellement et prennent un caractère assez ordonné car les controverses scientifiques relativement au rôle de la nutrition dans la santé commencent à être résolues et un consensus semble possible dans plusieurs domaines au moins. En outre, s'il apparaît probable que l'étiquetage nutritionnel puisse favoriser l'harmonisation, il est également clair que cette dernière aura elle-même ses avantages si les autorités nationales entreprennent, conjointement avec les fabricants de produits alimentaires, les experts scientifiques et les consommateurs, un effort concerté pour conduire certaines activités et élaborer des bases de données. Certes, les données sur la composition des produits alimentaires sont peut-être les informations les plus évidemment nécessaires à l'appui de l'étiquetage nutritionnel, mais il est également vrai que ce dernier n'est pas possible en l'absence d'orientations alimentaires, sous la forme de politiques et recommandations nationales. En outre, il importe de recueillir des données sur les quantités de différents produits alimentaires consommées et cela pour diverses raisons, notamment pour caractériser la nature des régimes sur le plan aussi bien des apports excessifs que des lacunes, et tenter d'identifier des rations moyennes. Bien que les données sur la ration alimentaire fournissent une base pour surveiller l'adéquation sur le plan nutritionnel, l'évaluation de l'état nutritionnel est la règle d'or pour sa détermination effective. De telles mesures cliniques sont, pour l'instant, difficiles et coûteuses, mais elles sont aussi essentielles pour définir des lignes d'orientation en matière d'alimentation.

i) Valeurs nutritionnelles et modèles de présentation

25. Pour placer aussi bien la situation actuelle que les efforts d'harmonisation dans leur juste perspective, il est intéressant de comparer les lignes d'orientation internationales définies par le Codex Alimentarius avec les spécifications détaillées en matière d'étiquetage qui ont été établies par les États-Unis. À première vue, il semble y avoir de nombreuses différences, mais il ne faut pas toujours les considérer comme des contradictions. Il s'agit plutôt de l'expression de besoins variables quant à la spécificité des étiquettes, variabilité qui découle elle-même des différences entre les buts et objectifs des lignes d'orientation internationales pour l'étiquetage nutritionnel et ceux des réglementations nationales. Outre les différences admises quant à la spécificité, il y a des différences véritables qui découlent des controverses scientifiques qui se font jour et des variations dans l'interprétation des recherches accessibles.

Questions de spécificité: Bien que l'énumération actuellement prévue par le Codex des éléments nutritifs soit fondée sur quatre déclarations (valeur énergétique, protéines, hydrates de carbone et matières grasses) et qu'elle ne soit exigée que lorsqu'une revendication figure sur l'étiquette, le système des États-Unis impose la déclaration de quatorze éléments nutritifs qu'il y ait revendication ou pas. Et pourtant, il y a une similitude entre les deux systèmes d'étiquetage qui suggère un degré notable d'accord pour l'étiquetage nutritionnel. Par exemple, pratiquement tous les systèmes spécifient une énumération quantitative des éléments nutritifs présents. Les procédures adoptées limitent généralement les déclarations à faire à celle des éléments pour lesquels des doses d'absorption recommandées ont été établies. Les définitions des éléments nutritifs et les méthodes d'analyse identifiées sont semblables dans de nombreux cas, de même que les procédures de calcul lorsque les valeurs ne sont pas directement mesurées. En bref, il semble que les disparités soient en voie de diminution plutôt que d'augmentation mais que, simultanément, des degrés à la fois supérieurs et moindres de spécificité ne soient exigés pour ces déclarations. Cela tient indubitablement au rythme différent auquel les autorités nationales ont réussi à se mettre d'accord sur la quantité d'informations nutritionnelles dont les consommateurs ont besoin, ainsi que sur le degré différent d'intérêt des consommateurs et la conscience différente qu'ils ont de ces informations à l'intérieur de leur pays.

Controverses et différences d'interprétation: Trois questions principales découlent de controverses de plus grande envergure. En premier lieu, il s'agit de définir la base sur laquelle déclarer les éléments nutritifs. Dans de nombreuses parties du monde, on tend à se fonder sur des portions de 100 g ou sur un autre poids, tandis que le système des États-Unis exige que l'on se fonde sur des portions d'un volume établi. Il n'y a clairement pas d'accord sur l'utilité relative des informations basées sur le poids et des informations basées sur la quantité typiquement consommée (à savoir "portion"). Il importe de résoudre cette question aux fins de l'harmonisation et, pour cela, il n'y a pas seulement lieu de déterminer les capacités et les préférences des consommateurs dans le monde entier, mais aussi - si la portion devait être sélectionnée comme l'approche préférée - de déterminer une portion qui serait internationalement applicable et acceptable. Par suite, il importe de considérer le fait que, pour rendre l'harmonisation possible, il sera peut-être nécessaire d'entreprendre d'abord une enquête sur les consommateurs.

26. Une deuxième question est celle de l'utilisation de valeurs de référence en sorte que les consommateurs disposent d'une norme pour comparer la quantité de l'élément nutritif dans l'aliment proposé avec une dose journalière recommandée. La définition de valeurs de référence a toutes chances d'être l'un des aspects les plus difficiles de l'harmonisation de l'étiquetage nutritionnel. Les problèmes que pose la définition de valeurs nutritionnelles de référence sur une base internationale sont les plus ardus qui soient. Étant donné que de telles valeurs aident à orienter la majorité des politiques nutritionnelles nationales, un certain nombre de pays en ont établi. Il faut s'attendre à ce que l'on insiste sur des éléments nutritifs différents et spécifie des rations différentes d'un pays à l'autre. Bien souvent, les disparités s'expliquent par l'utilisation de facteurs de jugement et de facteurs de précaution qui sont appliqués à des valeurs qui ont elles-mêmes été fondées sur toute une variété de critères pour la fixation de valeurs recommandées. En outre, les valeurs sont établies en utilisant des critères divers - par exemple éviter les carences, satisfaire à des paramètres biochimiques et respecter des normes basées sur des apports alimentaires observés. Quoique divers efforts aient été entrepris pour résoudre ces différences, ils font généralement intervenir des groupes représentatifs qui se réunissent pour réviser des valeurs déjà établies; malgré cela, invariablement, les autorités nationales se réfèrent aux politiques nationales pour prendre leurs décisions finales. La clé de l'harmonisation des valeurs internationales de référence pourrait se trouver dans un effort pour harmoniser des facteurs de type plus fondamental que les valeurs nutritionnelles, facteurs tels que les concepts scientifiques, la terminologie et les procédures d'élaboration des normes alimentaires. À cet effet, des approches bien ciblées s'imposent.

27. Une troisième question est celle de la déclaration du cholestérol, des matières grasses saturées et du sodium. Il s'agit de constituants des produits alimentaires dont la déclaration est obligatoire dans le système des Etats-Unis. Ils ont été mis en considération par ceux qui élaborent des lignes d'orientation internationales et, dans certains cas, retenus à titre d'éléments dont la déclaration est librement consentie mais n'est pas imposée. Le fait qu'ils ne figurent généralement pas dans les lignes d'orientation internationales tient aux différences d'utilité et d'intérêt qu'on leur accorde dans la liste des éléments nutritifs, ainsi qu'à l'absence de consensus sur les quantités recommandées. Pour résoudre cette question, il faudra de nouveaux progrès de la science, avec des modifications correspondantes des recommandations adoptées dans les politiques de santé nationales.

ii) Allégations relatives à la nutrition

28. Des lignes directrices quant aux allégations formulables - notamment des allégations nutritionnelles - ont commencé à apparaître dans la communauté internationale dès 1979 sous la forme de lignes d'orientation du Codex Alimentarius. Le principe de base était qu'aucun aliment ne devrait être décrit ou présenté de manière fausse, mensongère ou trompeuse, risquant de créer une impression erronée sur ses caractéristiques. Les revendications d'ordre nutritionnel font place à des considérations supplémentaires, par exemple des définitions visant spécifiquement à assurer la cohérence et l'utilité pour les consommateurs. Les allégations envisagées jusqu'à aujourd'hui par la plupart des administrations nationales visaient essentiellement à attirer l'attention sur la teneur particulièrement élevée d'un aliment en un élément nutritif important (par exemple, bonne source de calcium) ou, peut-être, sa teneur spécialement faible en un élément nutritif pour lequel on observe un excès de consommation dans certains pays développés (par exemple une matière grasse). Il faudra parvenir à un accord sur les critères à adopter pour ce qui constitue, par exemple, une source abondante d'un élément nutritif particulier, quels sont les éléments nutritifs sur lesquels ont peut insister plus particulièrement sur les étiquettes, quel serait le critère de référence à adopter, etc. Si les allégations d'ordre nutritionnel nécessitent un tel ensemble d'accords sur le plan scientifique, elles n'en sont souvent pas moins fondamentalement liées à la teneur en éléments nutritifs du produit alimentaire, si bien que de telles revendications dépendent au plus haut point de l'étiquetage nutritionnel. Par suite, beaucoup des questions soulevées pour ce qui est des informations à donner sur la teneur en éléments nutritifs réapparaissent lorsque l'on envisage les revendications d'ordre nutritionnel.

29. À ce jour, un Comité du Codex s'efforce activement d'identifier les conditions dans lesquelles on peut utiliser des allégations du type "source d'un élément nutritif" et "teneur élevée en un élément nutritif" pour décrire des quantités d'éléments nutritifs pour lesquels il existe un critère de référence. Le travail dans ce sens a progressé à une vitesse remarquable si on considère les difficultés liées à l'harmonisation. Mais il a aussi fait apparaître comme extrêmement important de s'efforcer d'établir des valeurs nutritionnelles de référence. Des valeurs de référence sont souvent utilisées pour déterminer si un produit alimentaire contient une quantité notable d'un élément nutritif, autrement dit, si, pour une unité désignée, le produit contient XX pour cent de la valeur de référence pour cet élément nutritif et si on peut donc considérer qu'il remplit les conditions requises pour revendiquer la présence d'un élément nutritif particulier.

30. Les allégations relatives à la teneur en éléments nutritifs des produits alimentaires sont un aspect nouveau et important de la protection du consommateur. Si elles sont jugées utiles pour sensibiliser le consommateur à des caractéristiques importantes des aliments - et d'après l'expérience acquise aux États-Unis, il semble qu'il en soit ainsi - elles tirent parti de l'intérêt existant pour la coordination des informations fournies sur l'étiquette avec des recommandations pour la santé et l'éducation du consommateur. De même, il y a d'autres types de revendications nutritionnelles à envisager à l'échelle internationale. Plus précisément, on commence à s'intéresser à la possibilité de formuler des allégations axées soit sur la réduction d'un risque de maladie, soit sur l'amélioration d'une fonction. Les allégations de ce genre en sont encore, pour la plupart, aux premiers stades de la définition dans les instances internationales mais, pour ce type de travail, il ne faut pas oublier qu'il est sage d'harmoniser tôt.

C. TRANSFORMATION/TRAITEMENT DES PRODUITS

Activités d'harmonisation
Science, éducation du consommateur, échanges de vues, patience

31. Le principe de la fourniture de renseignements sur l'étiquette pour ce qui concerne la transformation/traitement d'un produit alimentaire est habituellement défini en deux stades: en premier lieu, savoir si la transformation/traitement sont facilement identifiables par le consommateur sans que des informations lui soient fournies sur l'étiquette; et, si ce n'est pas le cas, savoir si la transformation/traitement ont entraîné une modification ou différence importante dans le produit alimentaire considéré. Le second aspect de cette détermination est axé sur le principe de l'"équivalence substantielle" ou peut-être le terme nouvellement préféré d'"équivalence". Toutefois, quoi qu'il en soit, le processus de transformation/traitement doit en premier lieu être jugé sans danger.

32. Tous les aspects de l'étiquetage d'un produit alimentaire ont été controversés à un moment ou à un autre. Cela a contraint les organes de réglementation et les administrations nationales à examiner le rôle de l'étiquette des aliments et la nature du choix du consommateur, ainsi que la science de la sécurité et le rôle de la nutrition dans la santé. Ces questions ont toujours été associées à celles que posent le libre-échange et à la tâche qui incombe aux fabricants de produits alimentaires. A l'heure actuelle, l'étiquetage axé sur la transformation/traitement des produits est celui qui vient au premier plan des controverses. Beaucoup de problèmes actuels découlent des préoccupations inspirées par les nouvelles données scientifiques et les nouvelles technologies, avec une optique changeante de la protection du consommateur. On discute les possibilités d'utilisation de l'étiquette des produits alimentaires pour informer les consommateurs sur des modes de production et des méthodes de transformation qui sont controversés pour diverses raisons ou qui ne sont peut-être pas universellement acceptés dans une optique scientifique. La question du droit de savoir et celle du désir de savoir continuent de se poser.

33. Cette manière de voir est peut-être optimiste, mais il est probable que beaucoup de débats seront résolus en utilisant les données scientifiques parallèlement à l'éducation du consommateur et à l'évolution de son mode d'acceptation avec le passage du temps. Il en a été ainsi, en partie au moins, avec la fourniture sur l'étiquette de données d'identification de base et avec l'étiquetage nutritionnel. Mais il apparaît aussi que les consommateurs d'aujourd'hui sont davantage susceptibles d'exiger d'être eux-mêmes les arbitres des types de choix qu'ils sont autorisés à effectuer, plutôt que le gouvernement ou autres organes de réglementation. En outre, certains consommateurs préfèrent effectuer des choix alimentaires conformes à certaines croyances philosophiques, modes de vie ou valeurs personnelles. Cet intérêt pour un choix individuel est observable même lorsque l'aspect en cause fait l'objet d'un débat scientifique très compliqué.

34. Cette évolution dans l'attitude du consommateur - et la raison pour laquelle elle se répercute à longue échéance sur l'harmonisation de l'étiquette des produits alimentaires - s'explique en partie par le fait que, pour certains consommateurs le monde d'aujourd'hui se caractérise par la crainte que les scientifiques ne "jouent avec la nature". Peut-être accepte-t-on mal l'adéquation des principes scientifiques. Dans d'autres cas, les consommateurs sont généralement préoccupés par l'inconnu ou par des développements qui, de par leur nature, n'ont pas encore un historique suffisant De plus, il peut y avoir méfiance ou désaffiliation des organismes administratifs responsables ainsi que des fabricants de produits alimentaires.

35. Pour qu'une étiquette soit basée sur des données scientifiques valables, les suggestions selon lesquelles la science n'est pas la réponse ne font que prêter à confusion. Il n'y a pas de solution facile lorsque l'étiquetage d'un produit alimentaire doit prendre en considération de telles controverses. Le processus accepté semble être de continuer à travailler à l'établissement de solides bases scientifiques et à s'en remettre à une science rigoureuse comme arbitre final. Mais le progrès est forcément lent et les points de vue sont nombreux. Parmi les exemples d'étiquetage concernant la transformation et le traitement des produits alimentaires que nous pouvons fournir pour illustrer notre examen figurent le recours à l'irradiation, l'emploi du terme "biologique", et la présence ou l'utilisation d'organismes génétiquement modifiés (OGM). Ces exemples permettent de se rendre compte de diverses voies que peut suivre l'évolution de l'étiquetage, et ils font apparaître combien il importe d'établir des principes et des critères pour formuler des décisions en matière d'étiquetage des produits alimentaires.

36. L'irradiation, même avec toutes les controverses qu'elle suscite, a suivi un chemin classique pour atteindre un objectif donné en matière d'étiquetage. Comme pour tous les éléments de l'étiquette d'un produit alimentaire, la sécurité du procédé/traitement est indiquée en premier lieu par les données scientifiques fournies à l'appui; cet aspect est pris en considération avant que les questions d'étiquetage ne soient elles-mêmes examinées. Si, pour certains, l'innocuité de l'irradiation continue à être douteuse, beaucoup ont accepté que ce processus permet l'obtention de produits alimentaires sans danger. Il importe toutefois de corriger un malentendu commun. L'irradiation est comprise de manière erronée, par certains, comme une sorte d'additif alimentaire, alors qu'il s'agit en fait d'un processus et non d'un additif 1. Elle est donc candidate à l'étiquetage si le processus a déterminé des changements importants dans le produit, c'est-à-dire si le produit irradié n'est plus équivalent au produit non irradié.

37. Une fois la sécurité démontrée, la question est de savoir si les consommateurs peuvent identifier facilement un produit qui a été traité - par exemple reconnaître la différence entre des légumes en conserve et des légumes congelés - puis de savoir si la transformation a apporté une différence au produit alimentaire. Au cas où il existe effectivement des différences, les informations de ce genre peuvent être un "fait matériel" que les consommateurs doivent connaître et dont il faut par conséquent leur donner connaissance sur l'étiquette. Lorsqu'il est recouru à l'irradiation, il n'y a guère de chances que les consommateurs puissent déterminer sur la base de l'étiquetage standard que le produit alimentaire a été traité par ce moyen. La possibilité d'une telle observation est toutefois une condition nécessaire, mais non suffisante, de la décision relative à la mention sur l'étiquette. L'évaluation aux fins du contrôle alimentaire doit être poursuivie pour déterminer si le processus/traitement a déterminé une modification importante dans le produit alimentaire. S'il n'y a plus équivalence entre les produits traités et non traités, alors les consommateurs doivent être informés.

38. Dans le cas de l'irradiation, il existe des preuves de modification des propriétés organoleptiques des produits ainsi traités. De ce fait, la déclaration du traitement par irradiation sur l'étiquette est conforme aux principes d'étiquetage existants sous la rubrique transformation/traitement. Mais, comme on peut s'y attendre, une fois qu'une série particulière de problèmes semble sur le point d'être résolue, d'autres se font jour. Le débat actuel au sujet de l'étiquetage en matière d'irradiation est axé sur les différences entre le produit fini et les ingrédients.

39. Un deuxième exemple, à savoir la nature biologique des produits alimentaires, concerne une question de transformation/traitement qui a été résolue dans l'optique de la sécurité. L'équivalence a été démontrée et, de ce fait, la mention obligatoire du terme "biologique" n'a pas été prise en considération. La question est toutefois revenue sous une autre forme dans la discussion sur l'étiquetage.

40. Plus précisément, à mesure que les données scientifiques s'accumulaient, de nombreuses administrations responsables du contrôle des denrées alimentaires semblent être convenues que, dans l'optique de la sécurité, il n'existait pas de différence significative entre les aliments biologiques et les autres. Il est impossible de déterminer que les aliments traditionnels soient moins sains que les aliments biologiques et l'équivalence semblait être évidente. De ce fait, le recours à des procédés biologiques n'a pas semblé justifier la fourniture d'informations spéciales sur l'étiquette, puisqu'il n'y avait aucune nécessité de protection du consommateur et que l'utilisation de méthodes de production apparemment biologiques ne modifiait pas le produit. Toutefois, malgré les données scientifiques existantes, les consommateurs ont continué à s'intéresser aux produits biologiques. Cette attention peut être due à des choix personnels quant au style de vie, à des incertitudes suscitées par les méthodes plus nouvelles de transformation des denrées alimentaires, ou à l'intérêt que suscitent les stratégies de retour à la nature dans notre société.

41. Par conséquent, en l'absence de lignes d'orientations clairement définies pour l'utilisation du terme biologique avec, parallèlement, une attention constante des consommateurs et une référence constante à cette caractéristique par certains fabricants de produits alimentaires, la question qui était précédemment une question de sécurité alimentaire est devenue une question de fraude économique. Des lignes d'orientation se sont imposées en sorte que la déclaration "biologique" sur l'étiquette puisse reposer sur un critère approprié et mesurable. Il est certain que les lignes d'orientation pour l'emploi du terme "biologique" continuent d'intéresser la transformation/traitement, mais cela non pas dans l'optique de l'équivalence, mais plutôt dans celle des préoccupations suscitées par la fraude. Ses efforts ont donc été entrepris à l'échelle internationale pour harmoniser la signification du terme biologique. Cette expérience pourrait suggérer que la solution scientifique de ce problème ne permettra peut-être pas d'y mettre fin et que quelque autre type de protection du consommateur pourrait rester nécessaire.

42. En troisième lieu, les OGM donnent un exemple de problème lié à la transformation/traitement qui, à première vue, pourrait peut-être être résolu de la même façon que celui de l'irradiation. Autrement dit, les questions examinées cesseraient d'être axées sur la sécurité pour intéresser plutôt l'équivalence. Toutefois, dans le monde actuel, le débat sur les OGM a pris une dimension supplémentaire, à savoir qu'il intervient à un moment où les préoccupations du consommateur s'accroissent, de même que ses incertitudes quant à l'adéquation de la science. Dans un monde idéal, le débat progresserait par étapes allant de la sécurité fondamentale des OGM aux questions en rapport avec l'équivalence. Mais le problème des OGM est devenu partie intégrante de celui de l'évaluation de l'équivalence aux fins de l'étiquetage pour certains groupes qui ne sont pas tout à fait rassurés par les résultats de la science.

43. Cela n'est pas surprenant puisqu'un accord quel qu'il soit est généralement un processus graduel et que les parties intéressées ne parviennent pas toutes à la même conclusion au même moment même lorsqu'on leur présente les mêmes données. Toutefois, les très nombreuses parties intéressées qui ont participé à la discussion au sujet des OGM ont placé l'étiquette du produit alimentaire dans une position controversée. Les malaises ou malentendus suscités par les OGM sur le plan scientifique, et le débat sur leur raison d'être, ont conduit certaines parties intéressées à suggérer que, indépendamment de la question de savoir s'il y a équivalence ou pas, il n'en reste pas moins nécessaire de faire une déclaration sur l'étiquette. Si la question est quelquefois présentée par des parties intéressées comme celle du droit des consommateurs à être informés, il y a d'autres parties qui suggèrent que les exigences formulées en la matière vont au-delà des principes établis actuels en ce qui concerne la déclaration sur l'étiquette de la transformation/traitement. La question fondamentale est de savoir comment "d'autres facteurs légitimes" - habituellement considérés comme des facteurs autres que des résultats scientifiques et quelquefois identifiés comme incluant des principes de précaution - sont pris en considération aux fins de l'étiquetage d'un produit alimentaire. On peut considérer que ces facteurs sont introduits en conséquence d'échanges de vues sur l'environnement et le développement durable, et trouvent maintenant leur place dans les discussions au sujet des pratiques agricoles. Il faut reconnaître que le moment est venu d'engager le débat sur les "autres facteurs légitimes" à considérer en ce qui concerne le rôle des systèmes de contrôle alimentaire et, par suite, l'étiquetage des produits alimentaires. Ce sera un débat difficile parce que certains suggèrent que les systèmes de contrôle alimentaire ne méritent guère d'être pris en considération dans le débat sur l'environnement et les modes de vie et le débat philosophique, tandis que d'autres leur accordent une place essentielle. En tout état de cause, la question devra être pleinement éclaircie avant que l'on puisse envisager spécifiquement la prise en considération d'"autres facteurs légitimes" dans l'étiquetage relatif aux OGM ou à toute autre caractéristique des produits alimentaires.

44. Peut-être la discussion actuelle sur l'étiquetage en ce qui concerne les OGM semble-t-elle susciter beaucoup de controverses, mais cela seulement parce qu'elle est si courante. Peut-être le passage du temps permettra-t-il des échanges de vues suffisants pour que des compromis soient possibles et que des principes acceptables puissent être appliqués ou formulés. Ou bien, il pourrait se faire que nous soyons entrés dans une ère nouvelle où le nombre d'aspects qui doivent être pris en considération pour décider ce qu'il faut indiquer sur une étiquette aura considérablement augmenté. Il nous faut surveiller de près ce qui se passe. Globalement, nous devons tenir présent à l'esprit que l'étiquette d'un produit alimentaire est de petite dimension et que, si on lui fait porter trop d'informations, elle risque de s'effondrer sous son propre poids.

IV. Conclusions et recommandations

45. L'expérience suggère que le mode d'étiquetage d'un produit alimentaire se justifie au mieux par des décisions fondées sur la science et des principes appliqués de façon systématique. C'est la poursuite sans relâche de la science et le respect de ses principes qui nous permettront d'atteindre le degré maximal d'harmonisation. En outre, les décisions fondées sur la science sont celles qui ont le plus de chances de résister au passage du temps et qui servent donc au mieux l'harmonisation. D'autres facteurs légitimes n'apparaissent pas encore clairement.

46. Les débats sur la situation actuelle en matière d'étiquetage des produits alimentaires suggèrent également quelques observations de type pratique. L'une d'elles est que la participation des consommateurs à l'étiquetage des produits alimentaires s'accroîtra probablement et qu'une éducation des consommateurs s'imposera donc parallèlement. Une autre observation est que si l'étiquette d'un produit alimentaire peut avoir divers besoins à satisfaire, elle n'en est pas moins de très petite dimension et ne peut porter qu'une charge d'informations limitée. Peut-être le fait le plus évident mais le moins bien compris est-il que l'harmonisation doit être envisagée dès le début du processus. Il est certain qu'au stade final, les décisions relatives à l'étiquetage des aliments doivent être respectueuses des dispositions visant à donner à chaque nation le droit de protéger la santé publique à des niveaux que ses autorités jugent appropriés. Mais cette incompatibilité apparente avec le but de l'harmonisation peut souvent être résolue en retenant comme principe la probabilité qu'une compréhension et une information scientifiques accrues sont la clé de l'harmonisation des décisions nationales. Lorsque toutes les nations se trouvent confrontées aux mêmes conclusions scientifiques valables, il ne s'ensuit pas forcément qu'elles prennent les mêmes initiatives en matière de santé publique, mais les chances qu'elles le fassent sont beaucoup plus grandes s'il y a des données scientifiques disponibles que s'il n'y en a pas. Enfin, lorsqu'il y a des controverses, une considération importante est qu'il faut éviter le court-circuit, à savoir le conflit potentiel entre le besoin que les consommateurs ont de savoir et l'intérêt qu'ils ont à savoir, ainsi que l'interaction entre les intérêts des fabricants et ceux du commerce. L'harmonisation ne peut pas être escamotée, il faut qu'elle soit opérée et il faudra pour cela ajuster les lois, règlements, politiques, normes et pratiques entre différents systèmes juridiques de manière à minimiser les désaccords et à faciliter l'activité commerciale.

47. Les recommandations ci-après sont des recommandations générales adressées à la FAO/OMS/OMC et aux gouvernements des pays membres, visant à assurer des bases scientifiques appropriées et acceptables pour l'étiquetage des produits alimentaires et à donner quelques lignes d'orientation pour les cas où les données scientifiques elles-mêmes sont douteuses ou font défaut:

Les documents de référence ci-après ont fourni d'utiles informations:

Commission du Codex Alimentarius, Programme mixte FAO/OMS sur les normes alimentaires (1999). Rapport de la vingt et unième session du Comité du Codex sur l'étiquetage des denrées alimentaires (version préliminaire), ALINORM 99/22A, FAO/OMS, Rome

Commission du Codex Alimentarius, Programme mixte FAO/OMS sur les normes alimentaires (1999). Rapport de la vingt et unième session du Comité du Codex sur la nutrition et les aliments diététiques et de régime, ALINORM 99/26, FAO/OMS, Rome

Gourlie, Katharine. (1995) Food labelling: A Canadian and International Perspective. Nutrition Reviews, 53: 103-105

Horton, Linda R. (1995). International Harmonization and Compliance, in Nutrition Labelling Handbook, Marcel Dekker, New York

Lewis, Christine J., Randell, Alan and Scarborough, F. Edward. (1996) Nutrition Labelling of Foods: Comparisons between U.S. Regulations and Codex Guidelines. Food control, 7: 285-293


1. La confusion pourrait être due en partie au fait qu'aux États-Unis, l'équipement utilisé pour irradier les produits alimentaires est réglementé comme s'il s'agissait d'un additif alimentaire. Cette spécification a été établie à l'origine comme une disposition juridique visant à assurer que le processus soit conduit sans qu'il y ait de danger, mais elle n'a pas d'autre application pratique. Le processus lui-même - irradiation - n'est pas un additif alimentaire conformément au système américain.