FO:AFWC/2004/2 |
COMMISSION DES FORÊTS ET DE LA FAUNE
SAUVAGE
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Note du Secrétariat
INTRODUCTION
1. Les ressources forestières d’Afrique comptent parmi les plus riches et les plus variées du monde. Elles sont indispensables non seulement au bien-être des êtres humains, mais également à la biodiversité et à la régulation du climat. Et pourtant, malgré les efforts déployés dans le domaine de la conservation, la destruction des forêts, des bois et des espèces sauvages se poursuit au même rythme, alimentée principalement par des facteurs extérieurs au secteur forestier.
2. Le présent document est fondé sur les conclusions de l’Étude prospective du secteur forestier en Afrique (FOSA), auxquelles ont été ajoutées des informations issues des rapports nationaux. Les caractéristiques des secteurs des forêts et des espèces sauvages des cinq sous-régions y sont présentées, en vue de stimuler les débats et de formuler des recommandations sur les mesures à prendre.
FORÊTS ET ESPÈCES SAUVAGES: PRINCIPAUX DÉFIS
DU CONTINENT AFRICAIN
3. D’après les analyses, si les tendances actuelles se maintiennent et si rien n’est fait pour remédier à la situation, le secteur forestier devrait connaître les évolutions suivantes au cours des vingt prochaines années:
• la croissance démographique, les migrations et l’urbanisation se poursuivront; la croissance économique léthargique et la répartition inégale des revenus pourraient faire le jeu de la pauvreté, qui sera exacerbée par des facteurs tels que le VIH/SIDA et les catastrophes naturelles (sécheresse, etc.);
• dans la plupart des cas, il est peu probable que l’économie enregistre des changements structurels profonds et la dépendance vis-à-vis des terres ne faiblira pas; en ce qui concerne les systèmes fonciers traditionnels, la croissance se poursuivra; l’augmentation de la productivité agricole sera lente et la hausse de la production s’effectuera surtout sous forme d’expansion horizontale, ce qui sera synonyme de déboisement;
• bien que des réformes soient en cours dans le domaine des politiques et des institutions, l’évolution est lente dans la plupart des pays, ce qui pourrait se traduire par un environnement institutionnel présentant les caractéristiques suivantes:
• un secteur public déprimé, ne disposant pas des capacités nécessaires pour mettre en œuvre et pour faciliter une gestion durable des forêts;
• un mécanisme de marché peu développé, incapable de créer un environnement équilibré pour les différents intervenants;
• un secteur informel en expansion, mais ne disposant que de capacités restreintes pour gérer les ressources de manière durable;
• l’absence de moyens et de capacités d’intervention pour la plupart des parties prenantes.
4. La tendance à l'expansion horizontale du secteur de l’agriculture et la hausse de la demande en produits forestiers devraient entraîner une perte du couvert forestier et la dégradation de celui-ci, plus au moins au rythme actuel, ce qui pourrait avoir des répercussions sur des fonctions essentielles de l'environnement, telles que la protection des bassins versants et la conservation de la biodiversité, et accélérer la désertification et la dégradation des terres. Cette diminution des services environnementaux s’accompagnera du rétrécissement de l’habitat d’espèces sauvages, ainsi que de l’érosion de la biodiversité et de la diminution des produits forestiers ligneux et non ligneux, dont la viande de brousse, qui représente la principale source de protéines animales pour de nombreuses personnes, notamment dans les régions rurales du continent africain.
5. De plus, l’intensification des conflits relatifs à l’utilisation des ressources peut également minimiser les bénéfices économiques tirés du tourisme axé sur la nature. Or si un climat peu sûr s’installe, les investisseurs potentiels hésiteront à investir dans la transformation industrielle, ce qui risque de compromettre les perspectives de hausse de l'emploi et des revenus.
6. Outre la description de l’évolution envisageable en cas d’immobilisme, l'Étude prospective du secteur forestier en Afrique présente également d’autres scénarios décrivant des propositions de politique et des stratégies d’investissement, au moyen desquelles la foresterie pourrait jouer un rôle en matière de lutte contre la pauvreté, de sécurité alimentaire et de développement durable.
7. Le Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD) appuie les réformes politiques et institutionnelles résolument axées sur des processus démocratiques, la résolution pacifique des conflits, une transparence accrue, une meilleure gouvernance, la lutte contre la pauvreté et l’investissement dans les individus. Le renforcement de la collaboration entre pays, appuyée par des organismes économiques régionaux et sous-régionaux, offrirait de nouveaux débouchés au secteur forestier, en particulier en matière d’intensification du commerce entre différentes régions, de coopération dans le cadre de la lutte contre l’exploitation forestière illégale, de gestion des parcs transfrontaliers, etc.
8. Plusieurs pays africains s’orientent vers des systèmes d’administration décentralisés et, de plus en plus, des approches participatives sont appliquées à la gestion des forêts. On assiste à la naissance d’une société civile dynamique et les principaux intervenants du secteur forestier disposent progressivement de meilleures capacités d’intervention. Ces évolutions positives créent de nouveaux débouchés permettant d'utiliser la gestion durable des forêts pour lutter contre la pauvreté et d’intégrer la foresterie et la protection de l’environnement dans d’autres utilisations des terres, en particulier dans le cadre des programmes forestiers nationaux.
DIMENSION SOUS-RÉGIONALE
9. Comme les priorités et les stratégies doivent tenir compte de l’environnement écologique, économique et institutionnel, une approche sous-régionale divisant l’Afrique en cinq sous-régions a été adoptée dans le cadre de l’Étude prospective du secteur forestier en Afrique. Un aperçu général de la situation propre à chaque sous-région, soulignant les principales priorités du secteur forestier, est présenté dans les paragraphes ci-après.
Afrique du Nord
10. L’Afrique du Nord est particulièrement aride et la productivité des forêts et des zones boisées y est très faible. Les forêts ouvertes composées d’un nombre limité d’espèces ne couvrent que 7 pour cent du territoire. Les forêts et les zones boisées se trouvent principalement sur la côte méditerranéenne et dans les régions centrale et méridionale du Soudan. La pression démographique et la sécheresse ont des répercussions catastrophiques sur la stabilité de l’écosystème et sur la régénération des arbres et des arbustes. En dépit des efforts considérables déployés par la plupart des pays en matière de boisement/reboisement, le couvert forestier a considérablement diminué et la dégradation des terres et la désertification s’intensifient.
11. En raison du revenu relativement élevé des pays d’Afrique du Nord et des ressources forestières peu abondantes, la sous-région est particulièrement tributaire des importations. Bien que n’abritant que 21 pour cent de la population africaine, la région représentait 62 pour cent de la valeur des produits forestiers importés par l’Afrique en 2001. Malgré la rareté des ressources ligneuses, l’Afrique du Nord bénéficie d’une industrie forestière dynamique, composée notamment de petites entreprises familiales privées et de grands complexes industriels nationaux. En raison de la pénurie de matières premières et d’autres problèmes, l’utilisation de la capacité installée est faible.
12. Plusieurs pays ont diversifié leur économie, principalement grâce à la production pétrolière, au tourisme et aux industries de transformation. Cependant, la plupart des pays sont confrontés à des problèmes comme la détérioration du tissu urbain et le sous-développement rural. Ces problèmes, exacerbés par la marginalisation de certains segments de la population, influent directement sur la dégradation des terres, le stress hydrique et la désertification et sont responsables de la hausse du chômage chez les jeunes et chez les personnes ayant fait des études.
13. Aux vues de ce qui précède, le principal rôle des forêts sera la protection de l'environnement et la lutte contre la pauvreté, une attention particulière devant être accordée aux éléments suivants: i) juguler la désertification et la dégradation des terres, protéger les bassins versants et améliorer l’environnement urbain; ii) augmenter la disponibilité des produits ligneux et du fourrage au bénéfice des communautés locales; iii) améliorer la production et la transformation des produits forestiers non ligneux et iv) favoriser le développement des petites et moyennes entreprises œuvrant dans des créneaux spécifiques.
14. Pour ce faire, il convient d’entreprendre des changements de nature politique et institutionnel favorisant une approche intégrée de l’utilisation des terres, en assurant une meilleure intégration des forêts et des arbres à tous les niveaux d’utilisation des terres. Les améliorations devraient être axées sur le renforcement de la participation des intervenants et sur la définition précise de leur rôle et de leurs responsabilités.
Afrique de l'Est et îles de l'océan Indien
15. Exception faite de l’Ouganda, l’Afrique de l’Est est constituée de grandes zones arides et semi-arides, caractérisées par de longues saisons sèches et une pluviométrie annuelle inférieure à 500 mm. En raison de ces caractéristiques, les terres sont peu productives et, comme les possibilités de diversification économique sont rares, leur utilisation n’est pas durable. La majeure partie de la population se concentre dans quelques hauts plateaux à productivité élevée situés en Érythrée, en Éthiopie et au Kenya. L’utilisation intensive des terres en résultant s’accompagne d’une forte dégradation des terres, elle-même synonyme de baisse de productivité et de problèmes en aval, tels que l’envasement.
16. Le couvert forestier de la sous-région représente au total 85,6 millions d’hectares, dont 69,6 millions se trouvent sur le continent. Selon les estimations, le taux de déboisement annuel était de 0,51 million d’hectares de 1990 à 2000, soit 10 pour cent du taux annuel de l’ensemble du continent. Les forêts naturelles représentent 99 pour cent du couvert forestier, mais la superficie faisant l’objet d’une gestion durable est minime. Les plantations forestières couvrent environ 1 million d’hectares et pâtissent d’une mauvaise gestion, des coupes illégales et de l’empiètement. Au Kenya, en Tanzanie et en Ouganda, l’agroforesterie devient une source toujours plus importante de bois.
17. À l’exception de Maurice et des Seychelles, États insulaires à économie diversifiée, la plupart des pays sont tributaires de l’agriculture et des utilisations des terres y afférentes. Il va sans dire que la croissance démographique et l’accroissement du cheptel augmentent la pression sur les forêts et les terrains de parcours.
18. On trouve dans la région les produits forestiers suivants: combustible ligneux, bois rond industriel et produits forestiers non ligneux, notamment les espèces sauvages intéressant le tourisme et, dans une moindre mesure, sources de protéines. Les services environnementaux, tels que la protection des bassins versants, la préservation de la biodiversité et l'appui aux mesures de lutte contre la désertification et la dégradation des terres, jouent également un rôle essentiel.
19. Maurice dépend des services financiers et commerciaux, ainsi que du tourisme, alors que les Seychelles ont axé leur économie sur le tourisme et sur la pêche. La diversification a permis à ces États insulaires de réduire considérablement la pression sur les forêts et de se concentrer sur la protection de l’environnement, en particulier les approvisionnements en eau et la mise en valeur de leur patrimoine touristique.
20. Le secteur forestier d’Afrique de l’Est est surtout confronté aux problèmes suivants:
• changements politiques et institutionnels liés à la décentralisation des administrations chargées des forêts;
• croissance démographique élevée;
• dans la plupart des pays, mauvaises performances économiques entraînant une dépendance vis-à-vis des terres, qui sont la principale source de subsistance;
• faiblesse des capacités institutionnelles en matière de développement scientifique et technologique;
• épuisement des ressources hydriques, désertification et dégradation des terres.
21. Les stratégies devraient tenir compte de l’importance des forêts en matière de lutte contre la pauvreté et de protection de l’environnement et devraient associer les moyens de produire des biens et services abordables et des politiques visant la protection et la régénération des bassins versants en zone montagneuse. Les réformes institutionnelles devraient contribuer à renforcer le rôle d’intermédiaire joué par les organismes publics, à réorienter une plus grande partie du secteur informel vers l’économie officielle et à améliorer les performances de cette dernière. Il faudrait également inclure des politiques foncières répondant aux attentes et augmenter les investissements dans les sciences, les technologies et l’information, notamment à l’échelle régionale.
Afrique de l’Ouest
22. L’Afrique de l’Ouest est la sous-région la plus peuplée d’Afrique, puisqu’elle abrite 29 pour cent de la population du continent. Au rythme de croissance actuel, la population devrait atteindre 344 millions d’habitants en 2020, soit une hausse de 110 millions par rapport à 2000. La croissance économique de la plupart des pays s’est montrée plutôt apathique ces vingt dernières années. Souvent, les gouvernements ne disposent que de choix limités en raison des revenus en perte de vitesse, d’une dette extérieure élevée et d’un service de la dette particulièrement lourd et, en règle générale, les forêts ne pèsent pas lourd lors des décisions relatives aux investissements. L’accroissement démographique, associé à un nombre restreint de possibilités de diversification, augmente la pression exercée sur les terres forestières. Dans de nombreuses parties de la sous-région, la situation est exacerbée par des tensions civiles. En raison de tous ces éléments, le couvert forestier pourrait continuer à diminuer au rythme de 1,2 million d’hectares par an.
23. Cependant, en Afrique de l’Ouest, les interventions dans le secteur forestier doivent tenir compte de la diversité des conditions écologiques et économiques de la sous-région. Il est possible de diviser l’Afrique de l’Ouest en deux grandes zones: une zone sèche et une zone humide. La zone sèche est composée d’une végétation de steppe, d’épineux et de savane boisée ouverte. La zone humide, plus productive, est caractérisée par la savane boisée, des forêts tropicales semi-décidues et des forêts pluviales tropicales. Chacune de ces zones a ses propres caractéristiques démographiques et économiques, qui influent sur l’utilisation des terres et sur les activités y afférentes.
24. Étant donné le rythme soutenu de la croissance démographique, la faiblesse des revenus, la hausse du chômage et la dépendance chronique vis-à-vis des terres, le secteur des forêts et des espèces sauvages devra respecter les objectifs de lutte contre la pauvreté et de protection de l’environnement. En particulier, les objectifs suivants devraient être fixés en matière de foresterie:
• renforcer le rôle de filet de sécurité des forêts, en garantissant un meilleur accès à une vaste gamme de produits dérivés des forêts, notamment ceux intervenant dans la nutrition;
• améliorer la durabilité et la viabilité économique des nombreuses activités informelles liées aux forêts;
• appuyer la création d’entreprises axées sur les forêts, en vue de stimuler l'emploi et les revenus tirés des activités du secteur officiel, en accordant une attention particulière à la main-d’œuvre et aux activités à forte intensité de qualification, mais à coefficient de capital moins élevé;
• redoubler d’efforts en matière de protection et de gestion des bassins versants, grâce à des pratiques adéquates et en assurant que la protection des bassins versants et que la lutte contre la dégradation des terres et la désertification fassent partie intégrante de tous les types d’utilisation des terres.
25. L’essentiel des efforts portera sur la mise en œuvre de changements institutionnels, visant en particulier à donner les moyens d’agir aux différents intervenants. Il est indispensable d’agir dans les domaines suivants :
• relance du secteur public, avec redéfinition des fonctions et des responsabilités, changements structurels et organisationnels et mise en valeur des compétences;
• dynamisation des initiatives communautaires, en faisant fond sur les succès et en renforçant progressivement les capacités locales de gestion des ressources forestières;
• renforcement des capacités d’intervention des petits producteurs, notamment en levant les obstacles, juridiques et autres, minant leur efficacité, en renforçant l’accès à l’information, notamment concernant les technologies et les marchés, et en améliorant l'accès au crédit;
• facilitation de la mise en place de marchés concurrentiels, en renforçant le cadre juridique et institutionnel et en faisant en sorte que les politiques soient claires;
• renforcement de la collaboration régionale et sous-régionale, notamment en vue de faire face aux problèmes d'intérêt commun et en partageant l'expertise dans les domaines de la recherche, de l’éducation et de la formation.
Afrique centrale
26. L’Afrique centrale est la sous-région la plus boisée du continent, 46 pour cent de sa superficie étant recouverte de forêts. Les forêts pluviales y prédominent, mais la sous-région est également caractérisée par d’autres types de couverts: nombreuses mangroves sur le littoral gabonais et camerounais, forêts de montagne au Rwanda, au Burundi, au Cameroun et en République démocratique du Congo, savane arborée au Cameroun, en République centrafricaine et au Tchad et brousse subdésertique au Tchad.
27. L’Afrique centrale est le principal producteur et exportateur de bois tropicaux d'Afrique. En 2000, les exportations de bois rond industriel et de bois débité de la sous-région représentaient 76,8 pour cent de la totalité des exportations africaines. Mais la gestion des forêts naturelles d’Afrique centrale est entravée par plusieurs contraintes. Ces dernières années, l’exploitation forestière s’est intensifiée à un rythme soutenu, alors que la capacité des gouvernements à la réglementer et à faire appliquer une gestion durable des forêts est loin d’être suffisante. Dernièrement cependant, l’obligation d’élaborer des plans de gestion pour obtenir des concessions forestières et la promotion de systèmes de certification ont suscité l’intérêt de l’industrie forestière vis-à-vis de la gestion durable des forêts du bassin du Congo.
28. Malgré la richesse de leurs ressources, la plupart des pays d’Afrique centrale souffrent d’une extrême pauvreté. À cela s’ajoute la répartition inéquitable des revenus. Dans plusieurs pays, le taux de croissance des revenus est nettement inférieur au taux de croissance démographique. De plus, la situation est exacerbée par le fardeau de la dette, car une grande partie des recettes tirées des exportations sert à assurer le service de la dette.
29. Dans la plupart des pays, la diversification de l’économie a été négligeable. Lorsqu’il y a eu diversification, les pays sont à la merci de l’épuisement des ressources et de l’évolution du marché mondial, en raison de leur dépendance excessive vis-à-vis des ressources d’extraction.
30. Étant donné ces différentes caractéristiques, notamment la croissance démographique et la frilosité des efforts visant la diversification économique, l’expansion de l’agriculture devrait se poursuivre dans de nombreux pays. L’Afrique centrale devrait devenir un important front pionnier pour l’expansion de l’agriculture. Associé à la hausse de la demande en bois et en produits ligneux, cette caractéristique pourrait avoir des répercussions considérables sur les ressources forestières. Tout indique que le taux de déperdition du couvert forestier se maintiendra au niveau des années 1990, voire au-delà. La hausse de la demande en produits forestiers non ligneux, notamment la viande de brousse, aurait des répercussions négatives considérables sur la préservation des espèces animales et végétales. Plusieurs initiatives visant à remédier à la situation ont été amorcées, mais les résultats dépendront de l’intensité des efforts déployés et du degré d'adoption des propositions.
31. En matière de développement, pour la plupart des pays d’Afrique centrale, les principales priorités seront la lutte contre la pauvreté et la protection de l’environnement, en garantissant notamment que la gestion des forêts permet la production durable de tous les biens et services. Compte tenu de la richesse des ressources de la sous-région, la gestion durable des ressources conforme aux principes d’équité jouera un rôle important dans la lutte contre la pauvreté. Il convient notamment d’agir dans les domaines suivants:
• redoubler d’efforts pour mettre en œuvre une gestion durable des forêts, en particulier en vue de réguler l’envergure des opérations, en tenant compte de la capacité à contrôler efficacement l’exploitation forestière et améliorer l’efficacité du recouvrement des recettes et l’application d’un code de conduite strict pour les sociétés forestières, afin de garantir le respect des normes sociales, environnementales et éthiques;
• augmenter les investissements dans les infrastructures sociales dans les zones boisées, en vue d’appuyer la mise en valeur des communautés locales;
• appuyer le secteur informel traditionnel, qui joue un rôle essentiel dans la subsistance des communautés locales;
• renforcer les capacités institutionnelles, notamment la capacité des organismes forestiers à s’acquitter efficacement de leur rôle de réglementation, tout en renforçant le rôle des organisations de la société civile, afin d'assurer qu’elles participent activement aux questions liées aux forêts;
• intensification de la coopération régionale et sous-régionale, notamment en vue d'élaborer un cadre commun pour lutter contre les activités illégales et afin de réaliser des économies d’échelle dans des domaines fondamentaux, tels que la recherche, l’éducation et la formation.
Afrique australe
32. En Afrique australe, la foresterie est caractérisée par des éléments contradictoires, qui témoignent des différents degrés de développement socio-économique des pays. Dans certains cas, comme en Afrique du Sud, au Swaziland et au Zimbabwe, l’industrie du bois est bien développée, grâce à des plantations de qualité supérieure, alors que dans la plupart des autres pays, l’industrie forestière est peu développée. Les forêts naturelles sont mal gérées et surexploitées. Dans la plupart des pays, à l’exception de l’Afrique du Sud et du Swaziland, le couvert forestier disparaît très rapidement, en raison de l’expansion de l’agriculture.
33. L’Afrique australe a été en mesure de tirer profit de l’énorme potentiel des espèces sauvages, qui sont l’une des bases de l’industrie florissante qu’est le tourisme. Même si les conflits entre différentes utilisations des terres devraient s’intensifier, l’Afrique australe a pris plusieurs mesures pour remédier à la situation. La participation des communautés locales à la gestion des ressources naturelles, notamment des espèces sauvages, est une option importante. Certaines des initiatives visant à stimuler la collaboration entre les communautés et l'industrie, en particulier concernant la production de bois rond industriel, permettent de tirer des leçons riches en enseignements, dont la pertinence ne manquera pas d'être confirmée.
34. Dans certains pays, on estime que la pénurie d’eau, toujours plus importante, devrait gravement entraver l’expansion des programmes de plantation. Dans plusieurs pays, il faudra améliorer sans délai la gestion des bassins versants, ce qui impliquera de remettre en question le rôle des forêts et des arbres par rapport à la quantité, la qualité et la stabilité des apports d’eau.
35. Bien que la situation économique de l’Afrique australe soit meilleure que celle d’autres sous-régions, la pauvreté et un cortège d’autres problèmes perdurent. Dans tous les pays de la sous-région, le degré élevé de prévalence du VIH/SIDA est un sujet d’inquiétude. Les retombées socio-économiques des forts taux d’infection et le décès d'un grand nombre de personnes actives d'un point de vue économique auront des répercussions directes et indirectes considérables sur la foresterie. Les modalités d’application des réformes foncières et de restitution des terres auront un impact non négligeable sur les forêts et sur les zones boisées.
36. Plusieurs de ces problèmes s’inscrivent sans doute dans la durée, mais de plus en plus, des débouchés s’ouvrent en matière de promotion d’un développement économique et social polyvalent. Des progrès considérables ont été réalisés en matière de démocratisation des gouvernements, notamment grâce à la décentralisation. La participation des communautés a été stimulée par des politiques et des législations. La sous-région s’est vue offrir de nombreuses possibilités de mobilisation d’investissements, que l’intégration économique en cours pourrait intensifier.
37. Au vu de ce qui précède, les stratégies de développement devront à l’avenir faire face aux caractéristiques particulièrement contrastées de la sous-région, où cohabitent des segments économiques modernes très développés et des segments à faible revenu peu développés. Il convient d'accorder la priorité aux domaines suivants :
• améliorer le cadre juridique et institutionnel régissant la gestion communautaire des ressources, en tirant les enseignements des initiatives en cours; il convient d’accorder une attention particulière au renforcement de la transparence, à l’accès à l’information et aux capacités de gestion et aux compétences techniques nécessaires pour gérer des entreprises communautaires;
• renforcer le secteur informel, en améliorant l’accès à l’information, notamment concernant les nouveaux débouchés commerciaux, les circuits commerciaux et les technologies;
• aider les petits exploitants à adopter des régimes intégrés d’utilisation des terres, afin qu’ils soient moins à la merci de l’économie et de l'environnement, en particulier dans le contexte d’une main-d’œuvre disponible réduite en raison du VIH/sida;
• redynamiser le secteur public, qui doit jouer un rôle d’intermédiaire et fournir un environnement équilibré pour tous les intervenants et renforcer le cadre garantissant la transparence des marchés.
QUESTIONS PROPOSÉES À LA COMMISSION POUR EXAMEN
38. Au vu de ce qui précède, il apparaît clairement que les forêts et les espèces sauvages devront faire face à des problèmes multiples. Même si les ressources continueront à être entravées par diverses contraintes, le secteur devra jouer un rôle important dans la lutte contre la pauvreté et dans l’amélioration de la stabilité environnementale. L’environnement extérieur devrait connaître des changements rapides et créer de nouveaux débouchés et défis. Par conséquent, il convient que les professionnels du secteur des forêts étudient ensembles les différentes options envisageables, afin de faire face aux nouveaux défis. La Commission pourrait examiner les questions suivantes :
Redynamisation des organismes chargés des forêts
39. À mesure de l’évolution et de la maturation des économies, les organismes chargés des forêts devront, dans la plupart des pays, faire face à de nouveaux défis et assumer les responsabilités ignorées jusqu’alors. Dans la majeure partie des pays africains, les organismes chargés des forêts ont été affaiblis par différents facteurs, notamment les contraintes budgétaires, et, bien souvent, ne sont même pas en mesure de s’acquitter correctement de leur rôle traditionnel. Même si le secteur privé, et donc les agriculteurs et les communautés locales, devrait jouer un rôle plus important en matière de gestion des forêts, il n’en reste pas moins que le secteur public doit fournir un cadre solide sur lequel d’autres intervenants peuvent s’appuyer pour fonctionner efficacement. En conséquence, il est indispensable d’identifier les mesures que l’Afrique doit prendre pour revitaliser les administrations publiques chargées des forêts, afin qu’elles jouent un rôle d’intermédiaire.
Garantir l’efficacité de la décentralisation et de la participation communautaire
40. La plupart des pays procèdent actuellement à la décentralisation des administrations chargées des forêts et s’efforcent de renforcer la participation des communautés à la gestion des ressources forestières. Cette tendance devrait s'accélérer au cours des prochaines années. Plusieurs leçons peuvent être tirées des expériences passées en matière de décentralisation et d’application d'approches participatives. Pour garantir leur efficacité, certaines conditions doivent être réunies et les professionnels de la foresterie doivent travailler en étroite collaboration avec les décideurs, les planificateurs, les organisations non gouvernementales, la recherche et les organismes de vulgarisation et les communautés locales.
Rationaliser le fonctionnement du secteur informel
41. En l’absence de débouchés dans le secteur officiel, le secteur informel connaît une croissance rapide, de nombreuses activités forestières fournissant un emploi et un revenu et permettant à de nombreuses personnes de satisfaire des besoins fondamentaux. Bien que nombre de ces activités informelles soient illégales, elles n’en sont pas moins vitales pour la subsistance. En raison de l’absence de protection juridique, les problèmes de propriété foncière, le mauvais accès à l’information et l’expansion du secteur informel entravent la durabilité à long terme. En conséquence, il est indispensable de bien connaître les options envisageables, afin d’améliorer le rendement du nombre élevé d’activités informelles, en assurant que celles-ci permettent d’améliorer la subsistance, tout en garantissant la durabilité à long terme.
Mobiliser des ressources et renforcer l’efficacité de l’utilisation des ressources
42. En matière de disponibilités des ressources externes, les tendances à long terme tendent à montrer que la dépendance vis-à-vis des ressources internes s'intensifie. Tout semble indiquer que le secteur forestier pourrait continuer à se trouver à l’écart lors de la répartition des ressources nationales. Cela signifierait que le secteur doit mettre au point des approches novatrices pour augmenter la disponibilité des ressources. Plus important encore, il faut renforcer l’efficacité de l’utilisation des ressources. Il convient de confronter les expériences en matière de mobilisation des ressources et de renforcer l'efficacité de l'utilisation des ressources, afin de pouvoir appliquer les enseignements à grande échelle.
Intégrer la foresterie à d’autres utilisations des terres
43. De plus en plus, les produits forestiers, ligneux ou non, seront produits en dehors des forêts, notamment parce que les agriculteurs saisissent les nouveaux débouchés qui s’offrent à eux. Les politiques et les cadres juridiques devront être adaptés, afin de faciliter le processus et les forestiers devront travailler en étroite collaboration avec les agriculteurs. Tout dépendra de la vitesse à laquelle les professionnels profiteront des nouveaux débouchés, intégreront la foresterie dans d’autres utilisations des terres et mettront un terme aux conflits qui opposent traditionnellement la foresterie et l'agriculture. Souvent, il y aurait avantage à disposer d’une politique intégrée d’utilisation des terres, plutôt que d’une politique forestière indépendante. En conclusion, il convient que les professionnels participent activement à la construction de passerelles entre le secteur forestier et les autres secteurs.