Par SIR JOHN BOYD ORR
Directeur général de l'Organisation des Nations Unies pour l'Alimentation et l'Agriculture
L'HISTOIRE tout entière dit le lieu intime entre la forêt et les biens de ce monde.
«La gloire du Liban sera tienne,» écrivait le prophète Isaïe, «avec ses sapins, ses pins et ses buis.» Le Roi Salomon a chanté «la fontaine des jardins, le puits d'eaux vives et les ruisseaux du Liban». Et l'on trouve dans la Bible plus de cent références aux cèdres du Liban, et combien d'autres aux richesses de la terre qu'ils protégeaient!
Aujourd'hui ces forêts n'existent plus, et la terre autrefois fertile est un désert aride. On a dit l'étonnement et la surprise du Président Roosevelt survolant ces régions pour se rendre à Téhéran et constatant que ces rochers nus au-dessous de lui étaient tout ce qui restait des cèdres du Liban et de ce que la Bible avait appelé la terre du miel et du lait. L'impression reçue fut profonde et peut-être une raison supplémentaire de l'insistance des Etats-Unis à inclure dans l'Organisation pour l'Alimentation et l'Agriculture une importante division forestière.
Au cours des récents mois, ma propre expérience m'a montré à quel point sont liés la forêt et le bien-être de l'homme. Lors de mes deux derniers voyages cri Europe, j'ai Vu ce que la guerre avait, fait presque partout des maisons. Je fus bientôt convaincu qu'aussitôt après le grand problème de la nourriture, celui du logement est le plus vaste et le plus pressant pour les cités et les villes du continent et des îles Britanniques. Et pour résoudre de problème, il faut du bois.
La récente conférence du bois de construction en Tchécoslovaquie, avait pour but d'accélérer et de stimuler la grande tâche de la, reconstruction à, laquelle il nous faut faire face. Je suis heureux que les délégués y aient pu tomber d'accord sur des plans constructifs de coopération entre gouvernements pour alléger le déficit du bois, d'oeuvre sans perdre de vue les problèmes à, plus lointaine échéance de la conservation et de la restauration des forêts.
Ces deux exemples - on en pourrait citer beaucoup d'autres - montrent la place que tient la forêt dans les travaux de la FAO. Dans la longue marche de la civilisation, l'homme s'est toujours tourné vers la forêt pour lui demander un grand nombre des biens qui lui étaient nécessaires. Dans la complexité de notre inonde moderne, le bois est toujours le premier des matériaux de construction, constitue un combustible indispensable et fournit pratiquement tout le papier utilisé, sans compter nombre d'autres matériaux essentiels à, l'industrie. Le récentes découvertes concernant l'utilisation et le traitement du bois nous amènent peut-être au seuil d'une ère nouvelle. En outre, chacun reconnaît maintenant la forêt comme la gardienne du sol et de l'eau et la protectrice des terres agricoles sur le globe tout entier.
AINSI la forêt et les produits forestiers font partie intégrante de l'oeuvre de la FAO. Les buts fondamentaux de cette Organisation sont, clairement exposes au préambule de son Acte constitutif. Ils sont: premièrement, d'élever le niveau des régimes et du standard de vie de tous les peuples; deuxièmement, d'assurer une plus grande efficacité de la production et de la distribution de tous les produits agricoles et alimentaires; troisièmement, d'améliorer la condition des populations rurales; quatrièmement enfin, et comme résultat de ces trois grands efforts, de contribuer à, l'expansion de l'économie mondiale. Dans aucun de ces champs d'activité la FAO ne petit atteindre au succès sans accorder aux forêts et à leurs problèmes une attentive considération.
Du point de vite de forêt et des produits forestiers; les quarante-huit Etats Membres suivent une politique mondiale visant trois objectifs principaux: la conservation de toutes les forêts qui jouent - un rôle de protection où d'utilité sociale; l'utilisation mesurée des sols forestiers en vite d'une production suffisante et continue de matière première; enfin la mise en oeuvre de procédés de fabrication et d'utilisation plus efficaces des produits de la forêt en vite d'améliorer les standards de vie.
En matière de forêts, comme en matière d'agriculture, ce n'est pas la résolution pour elle-même de problèmes techniques qui intéresse la FAO. Notre tâche dans ce domaine est nue partie dut vaste champ que l'Organisation a pour devoir de faire fructifier. La Mission de la FAO en Pologne, par exemple, examinera les ressources et les possibilités forestières de ce pays.
ENVISAGÉS sur une base mondiale, les problèmes de la forêt et des produits forestiers présentent une grave difficulté. D'un côté il s'agit de remédier aux besoins urgents de l'heure actuelle, dus aux dégats et aux dévastations de la guerre. Mais ait moment même où les besoins de bois se font le plus sentir pour la réparation des dommages de la guerre et pour la construction de millions de nouvelles maisons et d'autres bâtiments, la capacité des forêts normalement accessibles est devenue insuffisante pour faire face à ces besoins. Pendant les quelques années qui viennent, les coupes sur les forêts actuellement exploitables, ne peuvent être augmentées qu'avec la plus grande prudence, car il faut veiller à assurer dans toute la mesure possible leur future conservation, et, pendant ce temps, de nouvelles surfaces forestières encore vierges doivent être ouvertes aux exploitations.
A long terme, il faudra satisfaire la demande toujours croissante de bois et de produits forestiers et cependant il faudra maintenir aussi la forêt en bonne condition de production continue. Le monde n'a déjà que trop fait l'expérience de la dévastation et de l'abus des forêts. Les larges zones déboisées des deux hémisphères suffisent a montrer quels maux physiques et sociaux en sont la conséquence inéluctable.
Mais à courte comme à longue échéance, la solution de, ces problèmes nécessite nu effort mondial. La tâche est trop grande pour un on quelques hommes, pour un ou quelques nations. Déjà les événements d'Europe font sentir leurs effets sur les forêts de la Sibérie et sur celles des deux Amériques. Tout comme il apparaît que les peuples et les pays divers de notre anxieuse planète ne forment qu'un seul monde, ainsi il devient clair que toutes les forêts du monde sont en réalité qu'une seule forêt. Le rôle de la FAO dans la tâche à accomplir est de coordonner, de stimuler et de guider les efforts des institutions publiques et privées. A son tour elle ne sera que l'un des nombreux organismes coopérant a, ce travail.
Le nom de ce nouveau périodique de la FAO est bien choisi: Unasylva - un monde, une forêt. Cette nouvelle revue s'efforcera de faire la lumière sur les problèmes de la forêt et des produits forestiers, de comparer les méthodes utilisées dans les différents pays et de présenter les opinions et les suggestions des, experts dans les domaines les plus variés. J'espère et je crois fermement qu'elle sera, dans la bataille qui livre le monde pour se libérer de la disette, une arme de bon acier.