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COLLOQUE DE LA FAO
SUR
L'AGRICULTURE, LE COMMERCE ET LA S�CURIT� ALIMENTAIRE:
QUESTIONS ET ALTERNATIVES CONCERNANT LES PROCHAINES N�GOCIATIONS
DE L'ORGANISATION MONDIALE DU COMMERCE DANS LA PERSPECTIVE
DES PAYS EN D�VELOPPEMENT
Gen�ve, 23-24 septembre 1999
SESSION IV:Possibilit�s d'accro�tre la production et le commerce international de denr�es agricoles et de renforcer la s�curit� alimentaire des pays en d�veloppement dans le contexte des prochaines n�gociations de l'OMC sur l'agriculture |
Document No. 6
Mesures pour am�liorer la production et le commerce et la s�curit� alimentaire des pays en d�veloppement dans le contexte des prochaines n�gociations de l'OMC
Service des politiques et des projections concernant les produits
Division des produits et du commerce international
1. Les r�gles et disciplines introduites par l'Accord sur l'agriculture du Cycle d'Uruguay tendent � limiter l'utilisation par les pays de mesures d'intervention qui sont de nature � fausser les �changes sur les march�s agricoles. N�anmoins, l'Accord sur l'agriculture autorise les �tats � user d'une large gamme d'options politiques pour r�aliser les objectifs de leurs politiques agricoles nationales. Pour chaque pays, la flexibilit� autoris�e est d�termin�e par les engagements sp�cifiques en mati�re d'acc�s aux march�s, de soutien de la production nationale et de subvention des exportations. Au moment o� la prochaine s�rie de n�gociations est sur le point de s'engager, nombre de pays en d�veloppement se sont dits pr�occup�s par le fait que les options politiques qui s'offriront � eux � l'avenir risquent d'�tre limit�es par les dispositions g�n�rales de l'Accord sur l'agriculture ainsi que par les engagements sp�cifiques qu'ils ont pris. Les pr�occupations exprim�es par ces pays au sujet des questions qui seront trait�es lors des prochaines n�gociations ont �t� examin�es dans le document 4. Le pr�sent document (No.6) poursuit ce d�bat et identifie les mesures que les pays en d�veloppement pourraient rechercher lors de la prochaine s�rie de n�gociations sur l'agriculture pour s'assurer d'une marge de man_uvre suffisante pour r�aliser leurs objectifs en mati�re de production agricole, de commerce et de s�curit� alimentaire.1
2. Dans le contexte de l'Accord sur l'agriculture, deux grandes options politiques, essentiellement, s'offrent aux �tats qui souhaitent soutenir la production nationale et promouvoir le d�veloppement agricole: des mesures � la fronti�re, c'est-�-dire des droits de douane, pour autant qu'ils soient conformes aux engagements pris dans le cadre de l'OMC, et des mesures nationales de soutien de l'agriculture, notamment au niveau des prix et d'autres types de soutiens aux agriculteurs. Ces mesures doivent, dans ce cas �galement, �tre conformes aux r�gles et engagements de l'OMC.
3. S'agissant des mesures � la fronti�re, les droits consolid�s sur les produits agricoles des pays en d�veloppement sont g�n�ralement fix�s � un niveau suffisamment �lev� pour leur laisser une flexibilit� consid�rable pour stabiliser les march�s int�rieurs ou prot�ger les producteurs.2 N�anmoins, certains probl�mes se posent: par exemple, tr�s peu de pays en d�veloppement ont rationalis� leurs droits consolid�s et, de ce fait, un certain nombre d'anomalies ont �t� relev�es dans leurs engagements.3 Pour nombre de pays en d�veloppement importateurs nets de produits alimentaires ayant un grand nombre de m�nages � faible revenu, des consid�rations d'�conomie politique limitent �galement les possibilit�s de relever les droits.4
4. S'agissant des mesures nationales de soutien de l'agriculture, l'Accord sur l'agriculture �tablit une distinction entre plusieurs cat�gories de mesures: les mesures "jaunes" (portant ou non sur des produits sp�cifiques) et les mesures "vertes" et "bleues" et, pour les pays en d�veloppement, une cat�gorie sp�ciale de mesures de d�veloppement agricole. Des limites quantitatives n'ont �t� fix�es que pour les mesures jaunes par le biais de la Mesure globale du soutien (MGS), cette limite pr�cise d�pendant de la MGS proclam�e par chaque pays pour la p�riode de r�f�rence (1986-88). Nombre de pays en d�veloppement ont d�clar� un niveau z�ro pour la MGS de leur p�riode de r�f�rence. Aucune limite n'a �t� impos�e � la valeur des autres mesures, mais leur d�finition n'est pas toujours claire. Comme dans le cas des droits consolid�s, la flexibilit� autoris�e en mati�re de soutien de l'agriculture d�pend par cons�quent des engagements pris lors du Cycle d'Uruguay.
5. Ind�pendamment des pays qui sont actuellement membres de l'OMC, les pays en d�veloppement qui n�gocient leur entr�e � l'Organisation ont �galement besoin d'une marge de man_uvre en mati�re de soutien local � l'agriculture, compte tenu en particulier de leurs pr�occupations en mati�re de d�veloppement et de s�curit� alimentaire.
6. Qu'il s'agisse de la protection � la fronti�re ou du soutien national, il se peut que les pays en d�veloppement doivent suivre une double strat�gie: d'abord �liminer certains des d�s�quilibres qui caract�risent les dispositions existantes de l'Accord sur l'agriculture qui ont permis aux pays ayant les moyens de le faire, d'adopter des mesures de soutien qui faussent consid�rablement la production et les �changes. � cet �gard, les r�formes ci-apr�s pourraient �tre envisag�es: 5
� r�ductions significatives des MGS totales �tant donn� que celles-ci n'ont absolument pas �t� contraignantes;
� restrictions plus strictes concernant le transfert du soutien d'un produit � un autre de pr�f�rence en rendant les engagements de r�duction de MGS sp�cifiques aux produits;
� �limination ou r�duction des autorisations de minimis pour les pays ayant des MGS importantes;
� resserrement des crit�res de classification des mesures vertes, notamment au moyen d'un concept plus concis et mesurable de ce qu'il faut entendre par "effet minime" sur la production et le commerce;
� reconnaissance du fait que les mesures bleues faussent les �changes, et inclusion de ces mesures dans la MGS totale actuelle en vue de les r�duire;
� limitation de l'applicabilit� de l'Article 13 ("Clause de paix");
� r�duction substantielle ou �limination des subventions � l'exportation qui d�placent la production nationale, compte d�ment tenu des effets n�gatifs que pourraient avoir de telles mesures (par exemple - renforcement de la D�cision de Marrakech) afin d'aider les importateurs de produits alimentaires � s'adapter au changement.
7. Le deuxi�me �l�ment de cette strat�gie consisterait � faire en sorte que les
pays en d�veloppement disposent de la marge de man_uvre n�cessaire pour poursuivre leurs
politiques de d�veloppement agricole et de renforcement de la s�curit� alimentaire.
Cela pourrait exiger d'apporter les �claircissements, interpr�tations et ajustements
ci-apr�s aux dispositions de l'Accord sur l'agriculture.6
� option de recalculer leur MGS et de r�viser leur listes lorsqu'il y a lieu;
� rel�vement des autorisations de minimis pour les MGS ne concernant pas des produits sp�cifiques, sp�cialement lorsque les MGS portant sur des produits sp�cifiques sont importantes et n�gatives;
� obtention d'un "cr�dit" pour les MGS n�gatives concernant sp�cifiquement des produits gr�ce � leur exclusion du calcul de la MGS concernant les d�penses de s�curit� alimentaire;
� inclusion dans la cat�gorie verte des mesures de renforcement de la s�curit� alimentaire, dans le cas particulier des pays en d�veloppement sur une base TSD;
� �claircissement des d�finitions et des probl�mes m�thodologiques, par exemple pour ce qui est de la production �ligible, de l'inflation excessive, d'expressions comme "� faible revenu" et "agriculteurs pauvres en ressources", etc.;
� option de mieux rationaliser les engagements tarifaires concernant les produits agricoles et r��quilibrer les droits (en relevant certains, par exemple sur les produits sensibles, et en r�duisant d'autres);
� extension � tous les pays en d�veloppement adh�rant � l'Accord de la flexibilit� actuellement pr�vue en mati�re de traitement sp�cial diff�renci� concernant le soutien national;
� fourniture d'une assistance financi�re et technique accrue (par le biais des institutions internationales et des institutions sp�cialis�es) pour aider ces pays � mettre en valeur leurs ressources humaines, � r�pondre aux normes SPS et � renforcer leurs capacit�s juridiques et administratives en mati�re de commerce international.
8. Pour les pays qui sont tributaires des exportations agricoles, il est essentiel d'accro�tre leurs recettes d'exportation pour promouvoir leur d�veloppement �conomique et renforcer leur s�curit� alimentaire. Cela est particuli�rement vrai des pays en d�veloppement dans la mesure o� leur part globale des exportations agricoles non seulement est faible (environ 30 pour cent du total mondial), mais encore a stagn�, d'autant que nombre de ces pays d�pendent des march�s mondiaux pour une bonne part de leurs approvisionnements alimentaires. Si les r�sultats du Cycle d'Uruguay ont contribu� � am�liorer l'acc�s aux march�s des produits dont l'exportation pr�sente un int�r�t pour les pays en d�veloppement, il reste beaucoup � faire, notamment pour continuer � r�duire le niveau et l'escalade des tarifs, am�liorer l'acc�s au contingent tarifaire, limiter l'utilisation des clauses sp�ciales de sauvegarde dans l'agriculture et r�duire l'adoption de nouvelles mesures non tarifaires. Certaines des r�formes pouvant �tre envisag�es sont notamment les suivantes:7
� r�ductions des cr�tes tarifaires sur les produits dont l'exportation pr�sente de l'int�r�t pour les pays en d�veloppement, ce qui pourra exiger l'application d'une formule d'harmonisation pour les r�ductions tarifaires;
� �limination de l'utilisation des droits complexes (et notamment l'interdiction de droits sp�cifiques qui procurent plus de protection aux importations ayant des prix r�duits);
� expansion des contingents tarifaires et fixation d'une r�gle concernant la d�termination du taux tarifaire applicable dans le cadre du quota allou�;
� acc�s des pays en d�veloppement aux nouveaux contingents tarifaires, compte tenu aussi des int�r�ts particuliers des pays en d�veloppement qui b�n�ficient actuellement d'un acc�s pr�f�rentiel aux march�s des pays d�velopp�s;
� �tude de moyens permettant d'indemniser les pays qui b�n�ficient de pr�f�rences pendant la phase d'ajustement;
� administration plus transparente des contingents tarifaires de sorte que les exportateurs des pays en d�veloppement puissent profiter des nouvelles possibilit�s d'�changes;
� adjonction d'une sp�cificit� par produit aux engagements d'acc�s minimums gr�ce � une d�composition plus pouss�e des contingents tarifaires.
9. Les r�formes mentionn�es ci-dessus, qui tendent � promouvoir le d�veloppement des capacit�s nationales de production, devraient permettre d'accro�tre consid�rablement la production vivri�re nationale. Un meilleur acc�s aux march�s et les autres r�formes connexes devraient contribuer � accro�tre les recettes d'exportation, ce qui rev�t une importance capitale pour am�liorer la capacit� d'importation alimentaire des pays en d�veloppement, en particulier les pays les moins avanc�s et les pays en d�veloppement importateurs nets de denr�es alimentaires. En outre, des mesures compl�mentaires pourront s'imposer dans diff�rents domaines.
Stabilit� des march�s nationaux
10. Bien que le processus de r�forme dans l'agriculture, et sp�cialement la r�duction des mesures faussant la production et les �changes qui sont appliqu�s par les principaux pays commer�ants, devrait contribuer dans une certaine mesure � stabiliser les march�s agricoles mondiaux, ces derniers sont par nature instables. L'OMC a introduit des dispositions g�n�rales pour promouvoir la stabilisation des march�s nationaux (par exemple mesures antidumping et mesures de sauvegarde), mais ces dispositions ne pr�sentent gu�re d'utilit� pour nombre de pays en d�veloppement. Ces derniers ont plut�t besoin d'instruments plus accessibles et plus simples. En cons�quence, les r�formes suivantes pourraient �tre recherch�es:8
� faire des clauses de sauvegarde sp�ciales (SGS) un instrument permanent que puissent utiliser les membres mais pour un nombre limit� de produits alimentaires de base sensibles et peut-�tre avec un certain resserrement des "niveaux de d�clenchement" de sorte que les SGS ne fassent pas l'objet de trop d'abus;
� utilisation des fourchettes de prix comme instrument juridique visant � att�nuer l'impact de l'instabilit� des march�s mondiaux sur les march�s nationaux, c'est-�-dire � des fins de stabilisation et non de protection;
� exemption de la discipline de la MGS pour les d�penses d'acquisition et d'administration visant � garantir stocks la s�curit� alimentaire;
� renforcement de l'Article 12 de l'Accord sur l'agriculture gr�ce � l'interdiction des taxes � l'exportation, ind�pendamment des interdictions d'exportation.
La D�cision de Marrakech
11. La D�cision sur les mesures concernant les effets n�gatifs possibles du programme de r�forme sur les pays les moins avanc�s et les pays en d�veloppement importateurs nets de produits alimentaires pr�voit qu'une assistance soit accord�e � ces pays si le processus de r�forme de l'Accord sur l'agriculture affecte leur situation. Jusqu'� pr�sent, cette D�cision n'a g�n�r� aucun b�n�fice concret. Cela �tant, les pays les moins avanc�s et les pays en d�veloppement importateurs nets de produits alimentaires pourraient essayer de faire inclure dans une D�cision r�vis�e, des dispositions qui la rendraient plus efficace et correspondent mieux � leurs besoins:9
� faire de la D�cision un instrument juridiquement contraignant, sur un pied
d'�galit� avec les autres engagements pris dans le contexte de l'Accord sur
l'agriculture;
� �tablir des m�canismes qui permettraient aux pays les moins avanc�s et aux pays en
d�veloppement importateurs nets de pouvoir automatiquement pr�tendre � une assistance
lorsque les prix sur les march�s mondiaux d�passent un certain niveau;
� chercher � mettre en place un programme continu ou un fonds pour la fourniture d'une
assistance financi�re et technique aux pays les moins avanc�s et aux pays importateurs
nets afin de promouvoir la productivit� et l'infrastructure et r�duire leur d�pendance
� l'�gard des importations de produits alimentaires;
� chercher � �claircir le r�le de l'OMC dans la mise en _uvre et la surveillance des
mesures d'indemnisation, par exemple, gr�ce � la cr�ation de m�canismes
institutionnels, � l'imposition de r�gles de notification, etc.
Renforcement des capacit�s
12. En d�finitive, malgr� des am�liorations dans les ann�es r�centes, la participation de beaucoup de pays en d�veloppement dans le processus des n�gociations multilat�rales commerciales reste faible et leur capacit� � mettre en _uvre les diff�rents accords et � utiliser les opportunit�s du commerce international reste limit�. En clair, il reste beaucoup � faire dans ce domaine pour am�liorer la situation. La fourniture d'assistance technique et financi�re dans le cadre du renforcement des capacit�s est � ce titre essentiel. Quelques-unes des actions prioritaires sont les suivantes:10
� renforcement de la capacit� des pays en d�veloppement dans les n�gociations internationales, en les aidant � r�gler les probl�mes auxquels ils sont confront�s dans les efforts qu'ils d�ploient pour honorer les engagements pris dans le contexte de l'OMC et � saisir les opportunit�s offertes par le commerce international;
� aider les pays non membres de l'OMC et � adh�rer � des conditions conformes � leurs besoins en mati�re de d�veloppement et de s�curit� alimentaire;
� appui au renforcement et � la mise en _uvre du Cadre int�gr� pour l'assistance technique li�e au commerce aux pays les moins avanc�s, comme pr�vu dans le Plan d'action pour les pays les moins avanc�s �labor� par l'OMC en 1996.
1 Nombre des suggestions reproduites dans le pr�sent document ont �t� exprim�es par des participants de pays en d�veloppement lors d'une s�rie de s�minaires r�gionaux et d'autres s�minaires organis�s par la FAO en 1998 et 1999.
2 Des droits de douane �lev�s ne sont pas le propre des pays en d�veloppement: les droits appliqu�s par les pays d�velopp�s sur nombre de produits provenant de zones temp�r�es sont encore plus �lev�s.
3 Par exemple, plusieurs d'entre eux se sont engag�s � appliquer un droit g�n�ral, souvent assez �lev�, par exemple 100 pour cent. Si des droits plus �lev�s peuvent �tre utiles pour certains produits sensibles, ils ne pr�sentent aucun int�r�t pour nombre d'autres produits. De m�me, quelques pays ont consolid� leurs droits � des niveaux tr�s faibles de sorte que les mesures � la fronti�re n'offrent gu�re de possibilit�s de stabilisation et/ou de protection les ann�es o� les march�s mondiaux sont d�prim�s.
4 Des droits plus �lev�s impliquent des prix plus �lev�s non seulement pour les producteurs nationaux mais aussi pour les consommateurs. D'aucuns font valoir qu'une solution possible � ce dilemme consiste � utiliser les recettes produites par les droits de douane pour fournir une assistance cibl�e aux m�nages qui vivent dans l'ins�curit� alimentaire tout en permettant aux producteurs de b�n�ficier de prix internes plus �lev�s. Une telle option, toutefois, exige de solides capacit�s administratives pour pouvoir identifier les m�nages dans le besoin et minimiser les fuites ainsi qu'une structure suffisante pour leur transf�rer des ressources efficacement et �conomiquement.