FAO/SMIAR - Perspectives de l'Alimentation No.5 novembre 2000 - P. 10

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Manioc

La production de manioc progresse en 2000

La production mondiale de manioc pour l'année 2000 devrait poursuivre sa hausse jusqu'à 175 millions de tonnes, gagnant ainsi presque 2 pour cent par rapport à 1999, grâce aux meilleurs résultats obtenus en Afrique, en Amérique latine et dans les Caraïbes. À l'heure actuelle, on prévoit peu de changement en Asie. L'estimation de la production mondiale de manioc en 1999 a été revue à la hausse depuis le dernier rapport paru en avril 2000, et est arrêtée maintenant à 172 millions de tonnes de racines fraîches, ce qui représente une augmentation de 6 pour cent par rapport à 1998.

En Afrique, la production de manioc devrait se chiffrer à 93 millions de tonnes cette année, progressant de 1 pour cent par rapport à 1999. Ce modeste accroissement reflète les augmentations de production prévues au Nigeria, en Angola et au Malawi, qui devraient plus que compenser le recul de la production de plusieurs autres pays. Au Nigeria, on estime que la production de manioc, favorisée par les politiques d'accroissement des disponibilités alimentaires suivies par le gouvernement, augmentera jusqu'à quelque 34 millions de tonnes, contre 32,7 millions de tonnes en 1999. Au Malawi, le secteur du manioc a aussi bénéficié de plusieurs programmes destinés à promouvoir la culture de plantes résistantes à la sécheresse. Par contre, on s'attend à des récoltes de manioc médiocres à Madagascar, au Mozambique, dans la République démocratique du Congo et la République du Congo, au Burundi, en Sierra Leone, en Ouganda et au Zimbabwe, où les déplacements de population et les troubles civils ont perturbé les activités agricoles. En outre, une sécheresse prolongée a porté sévèrement atteinte aux cultures de manioc au Burundi et à Madagascar, et les graves inondations qui ont submergé le Mozambique auraient fait régresser la production de 15 pour cent.

En Amérique latine et dans les Caraïbes, la production de manioc devrait atteindre 30,9 millions de tonnes, soit 1,5 million de tonnes de plus qu'en 1999. Au Brésil, le plus gros producteur de la région, on prévoit actuellement que la production de manioc augmentera de 6 pour cent jusqu'à 22,2 millions de tonnes, celle-ci étant tirée à la hausse par les récoltes relativement abondantes enregistrées dans les États centro-méridionaux et du Nord-Est. Néanmoins, en dépit de cet accroissement, la production demeurera inférieure de 15 pour cent au niveau exceptionnel de 25,6 millions de tonnes qu'elle avait atteint en 1996. Un accroissement substantiel de la production (10 pour cent) est aussi prévu en Colombie. Dans ce pays, les producteurs ont réagi positivement aux incitations introduites par le gouvernement, qui, en collaboration avec le Centre international d'agriculture tropicale (CIAT) et le secteur privé, a commencé à exécuter le plan stratégique "PROAGRO". Ce plan, qui vise à mettre en évidence les possibilités de développement des différentes cultures, a notamment pour objectif de promouvoir le manioc en tant qu'ingrédient de base des aliments composés pour la volaille et les porcs en remplacement des produits d'alimentation animale importés. La production du manioc devrait aussi augmenter dans la République Dominicaine, au Salvador et au Pérou. Dans le reste de la région, il devrait y avoir peu de changements.

Production mondiale du manioc 1/

 
1998
1999
2000 prélim.
 
(. . . millions de tonnes . . .)
Total mondial
162,7
172,1
174,9
Afrique
90,2
91,7
92,7
Congo. Rép. dem.
17,1
16,0
16,0
Ghana
7,2
7,8
7,8
Madagascar
2,4
2,5
2,3
Mozambique
5,6
5,4
4,6
Nigéria
32,7
32,7
33,9
Ouganda
3,2
3,0
3,0
Tanzanie
6,1
7,2
7,2
Asie
44,9
50,9
51,1
Chine
3,4
3,6
3,6
Inde
6,1
6,1
6,2
Indonésie
14,7
16,5
16,5
Philippines
1,7
1,8
1,8
Thaïlande
16,4
20,3
20,2
Viet Nam
1,8
1,8
1,8
Amérique latine
     
et les Caraïbes
27,3
29,4
30,9
Brésil
19,7
20,9
22,2
Colombie
1,6
1,8
1,9
Paraguay
3,3
3,5
3,5

En Asie, la production totale de manioc en 2000 ne devrait guère s'écarter de 51 millions de tonnes. La Thaïlande et l'Indonésie, les deux plus gros producteurs de la région, n'ont pas signalé de changement par rapport à l'année dernière. En Thaïlande, les prix intérieurs sont très bas depuis l'année dernière, ce qui a conduit le gouvernement à consentir des prêts sans intérêt pour l'achat et le stockage des granulés et de la farine de manioc. Dans le reste de la région, on prévoit une certaine augmentation en Inde, aux Philippines, au Viet Nam et au Cambodge. En Inde, on estime que la superficie des cultures et la production se sont accrues dans l'Andhra Pradesh et au Tamil Nadu, les deux principaux États producteurs, grâce à des conditions météorologiques généralement favorables, mais que la production a fléchi au Kerala, où les agriculteurs se sont tournés vers des cultures plus rentables. Aux Philippines, la production de manioc ne devrait accuser qu'une légère progression par rapport à 1999, malgré les efforts consacrés par le gouvernement au développement de cette culture. Le manioc figure parmi les denrées prioritaires couvertes par le programme pour les cultures commerciales de haute valeur. Au Viet Nam, la production de manioc devrait gagner 5 pour cent en 2000, en conséquence de l'adoption plus fréquente des variétés à haut rendement, estimée actuellement à un quart de la superficie cultivée. Le Cambodge a fait état d'une augmentation substantielle de sa production de manioc. Le reste de la région ne devrait pas connaître beaucoup de changements.

L'utilisation du manioc augmente en 2000

En 2000, l'utilisation mondiale du manioc en alimentation humaine devrait atteindre 100 millions de tonnes, en équivalent de racines fraîches, accusant une hausse de 2 pour cent par rapport à 1999. Sur l'ensemble, 63 millions de tonnes devraient être consommées en Afrique, sous la forme de racines fraîches et de produits transformés (gari, foufou, attieké, kokonte, kondowole, etc.). L'utilisation mondiale du manioc en alimentation animale ne devrait guère s'éloigner des 32 millions de tonnes enregistrés l'an passé et se concentrer en Amérique latine, dans les Caraïbes et, pour ce qui est des pays développés, surtout dans la CE. En Afrique, la réduction de la production dans les pays affectés par des troubles civils et des conditions climatiques défavorables entraînera une diminution de la consommation alimentaire humaine. Cette contraction touchera principalement les populations rurales qui dépendent davantage du manioc pour leur subsistance. Cependant, la consommation devrait aussi reculer dans les zones urbaines de plusieurs pays, où le prix de vente au détail du manioc est monté en flèche. Au Ghana, par exemple, les prix de détail du manioc et du gari ont augmenté respectivement de 15 et de 20 pour cent par rapport à l'année dernière. Au Nigeria, les hausses respectives de ces produits se sont chiffrées à 4 et 21 pour cent. En Amérique latine et aux Caraïbes, l'accroissement de la production en 2000 devrait favoriser l'augmentation de l'utilisation du manioc dans l'alimentation humaine et animale, surtout au Brésil et en Colombie. Dans plusieurs pays, l'utilisation industrielle du manioc serait aussi en hausse, confirmant ainsi l'évolution du manioc de la culture de subsistance vers la culture commerciale. En Asie, on estime que l'utilisation du manioc a stagné étant donné que la production et le commerce ont peu évolué par rapport à l'année précédente. La consommation en Indonésie (essentiellement alimentaire) et en Thaïlande (surtout industrielle), notamment, devrait demeurer comparable à celle de l'année précédente. En revanche, l'utilisation du manioc devrait progresser dans la République populaire démocratique de Corée, aux Philippines, au Japon, en Israël et en Turquie, compte tenu de l'accroissement des importations. Il est intéressant de constater que les nouveaux produits à base de manioc remportent un succès croissant dans la région depuis la mise au point de nouvelles technologies pour produire de la farine, de la fécule et de l'alcool à partir de la racine. On a même découvert que les déchets de manioc traités peuvent entrer dans l'alimentation animale, tandis que les feuilles sont de plus en plus utilisées dans les élevages de vers à soie, en aquaculture et dans les champignonnières.

Léger fléchissement des échanges de manioc en prévision

Le commerce mondial des produits à base de manioc en 2000 est estimé provisoirement à 5,7 millions de tonnes (14,5 millions de tonnes en équivalent de racines fraîches), volume un peu inférieur à l'estimation revue pour 1999. Sur la totalité, 4,7 millions de tonnes devraient être échangées sous la forme de cossettes et de granulés et environ 1,0 million de tonnes sous la forme de fécule et de farine pour des usages alimentaires et industriels.

Commerce mondial du manioc 1/

 
1998
1999
2000 prélim.
 
( . . millions de tonnes . . )
Exportations mondiales
4,4
5,8
5,7
Thaïlande
4,0
5,3
5,2
Indonésie
0,2
0,3
0,3
Autres pays
0,2
0,2
0,2
Importations mondiales
4,4
5,8
5,7
CE 2/
2,9
4,3
4,0
Chine 3/
0,5
0,7
0,5
Japon
0,3
0,3
0,3
Corée. Rép. de
0,4
0,1
0,1
Autres pays
0,3
0,4
0,8

En 2000, on prévoit que la CE aura importé 300 000 tonnes de moins qu'en 1999, ce qui représente une baisse de 7 pour cent due, à la diminution du prix intérieur des céréales, à l'augmentation du fret et à la faiblesse de l'euro face au dollar E.-U., ces facteurs ayant contribué à réduire la compétitivité des produits à base de manioc dans la Communauté. En revanche, les importations de cossettes et de granulés de manioc par les pays n'appartenant pas à la CE devraient augmenter de 20 pour cent, car des importateurs traditionnels qui ont été absents du marché en 1999 sont revenus sur le marché des granulés et du tapioca cette année. Par exemple, au cours des neuf premiers mois de l'année 2000, Israël, la Turquie et le Japon ont acheté respectivement 25 000 tonnes, 156 000 tonnes et 20 000 tonnes de granulés de manioc, alors qu'ils n'avaient pas importé cette denrée en 1999. De la même manière, les importations de fécule par l'Indonésie, la Chine, Hongkong, la Malaisie, les Philippines et Singapour devraient s'élever de 50 pour cent par rapport à 1999.

Entre janvier et septembre de cette année, la Thaïlande a expédié 3 millions de tonnes de cossettes et de granulés et plus de 700 000 tonnes de fécule. Quelque 2,8 millions de tonnes de cossettes et de granulés sont allés dans la CE, principalement aux Pays-Bas (69 pour cent), en Belgique, en Allemagne, en Italie, au Portugal (6 pour cent) et en Espagne (22 pour cent). On prévoit que les ventes de produits à base de manioc provenant d'Indonésie stagneront à 340 000 tonnes, tandis que celles de la Chine reculeront de 10 000 tonnes pour répondre à une forte demande nationale.

La pression à la baisse sur les prix mondiaux du manioc se poursuit en 2000

Les prix internationaux du manioc ont poursuivi leur baisse durant la majeure partie de l'année 2000, des disponibilités abondantes ayant coïncidé avec une faible demande dans la CE. Durant les neuf premiers mois de l'année, le prix à l'importation dans la CE des granulés de manioc a atteint en moyenne 87 dollars E.-U. par tonne, soit 15 pour cent de moins que durant la période correspondante en 1999 et le prix le plus bas depuis dix ans. Durant les neuf premiers mois de l'année, le prix de l'orge a atteint en moyenne 141 dollars E.-U. dans la CE, soit 2 pour cent de moins que durant la période correspondante en 1999. En revanche, la farine de soja, en progression de 25 pour cent par rapport à la même période en 1999 a été cotée à 183 dollars E.-U. (c.i.f. Rotterdam). Par conséquent, le prix du mélange manioc-soja est devenu légèrement plus compétitif que celui de l'orge en comparaison avec l'année 1999, ce qui a soutenu l'utilisation du manioc dans la Communauté cette année, mais pas suffisamment pour prévenir un repli des importations. Comme pour les granulés, les prix internationaux de la fécule et de la farine de manioc, qui sont échangés avec l'Asie principalement, ont accusé une tendance à la baisse durant la majeure partie de l'année et ont atteint une moyenne de 150 dollars E.-U. en septembre 2000, ce qui représente un recul de quelque 7 pour cent par rapport au même mois de l'année précédente.

Les incertitudes subsistent quant à la production, au commerce et à l'évolution des prix du manioc en 2001

Les perspectives de la production mondiale de manioc en 2001 sont encore très incertaines. En Afrique, la production pourrait augmenter, sous l'effet de l'augmentation de la demande, en particulier au Nigeria. En Amérique latine et dans les Caraïbes, la situation dépendra beaucoup des résultats du Brésil, lesquels sont fortement tributaires des conditions climatiques. La production pourrait toutefois s'accroître en Asie, surtout grâce aux gains enregistrés aux Philippines, en Inde et au Viet Nam.

Prix du manioc, de la farine de soja et de l'orge dans la CE

 
Granulés de
manioc 1/
Farine de soja 2/
Mélange manioc farine de soja 3/
Orge 4/
Mélange orge/manioc
 
( . . . . . . . . . . . . . . dollars E.-U./ tonne . . . . . . . . . . . . . . )
(. . rapport. . )
1991
178
197
186
222
1,19
1992
183
204
187
235
1,26
1993
137
208
151
197
1,30
1994
144
192
154
182
1,18
1995
177
197
181
209
1,15
1996
152
268
175
194
1,11
1997
108
276
142
161
1,13
1998
107
170
120
145
1,21
1999
102
152
112
143
1,28
2000 5/
87
183
106
142
1.34

Les résultats d'une étude récente montrent que la production en Thaïlande ne subirait qu'une très faible contraction durant la prochaine campagne, en dépit du fait que les prix perçus par les producteurs sont extrêmement faibles cette année.

Graphique

Les prospections anticipées relatives au commerce du manioc en 2001 indiquent qu'un repli est possible compte tenu de la baisse probable des importations par la CE. En effet, le blé fourrager pourrait concurrencer davantage les granulés de manioc sur ce marché à cause de la mauvaise qualité de la dernière récolte. En outre, les prix d'intervention de la CE pour les céréales seront à nouveau réduits de 7,5 pour cent d'ici à juillet 2001, dans le cadre de la deuxième phase de la réforme politique de l'Agenda 2000, ce qui pourrait accroître la pression à la baisse qui s'exerce déjà sur les prix des granulés de manioc.

Prix du manioc et des produits dérivés en Thaïlande

   
Farine/éculents de tapioca,
qualité super, fob Bangkok
Prix intérieurs
Racines
Granulés
 
(. . dollars E.-U.tonne . .)
1988
166
47
136
1995
358
65
127
1996
289
49
113
1997
244
34
72
1998
276
44
75
1999
172
26
66
2000 - janv.-mars
160
23
57
- avr.-juin
164
21
55
- juil.-sept.
156
22
47

Stratégie mondiale de mise en valeur du manioc

En avril 2000, la FAO a organisé un Forum international sur le manioc au siège de l'Organisation, à Rome, sous le parrainage de diverses organisations, en particulier le FIDA. Les participants au Forum étaient issus de 22 pays et représentaient le secteur public et le secteur privé, des associations d'agriculteurs, des organisations non gouvernementales, des instituts de recherche internationaux et leurs réseaux.

Les participants s'étaient réunis pour adopter une Stratégie mondiale de mise en valeur du manioc (SMMVM)1/, élaborée entre 1996 et 1999 au cours d'une série de consultations régionales et de réunions destinées à faire le point sur les progrès accomplis, et établir un plan d'action pour sa mise en oeuvre.

La SMMVM permet de rechercher de façon systématique les possibilités et les obstacles qui existent à chaque stade du cycle du manioc, de la production à la consommation. Elle est aussi considérée comme un outil pour la mise au point d'un cadre de coopération technique dans les domaines de la recherche et du transfert de technologies au niveau international, qui refléterait les priorités régionales et nationales pour les débats futurs sur les aspects mondiaux du manioc. La Stratégie attribue au manioc la capacité de stimuler le développement industriel rural et d'augmenter les revenus des producteurs, des transformateurs et des commerçants, tout en contribuant à la sécurité alimentaire, à la génération de revenus et à l'allègement de la pauvreté. Le principe de la SMMVM consiste à "suivre une démarche guidée par la demande pour promouvoir et développer des industries qui utilisent le manioc, avec un ensemble de groupes et de personnes soucieux de développer l'industrie du manioc".

Les participants 2/ au Forum sur la validation ont adopté un plan de mise en oeuvre, qui s'appuie sur les principes énoncés dans les documents de la Stratégie et tient compte des priorités arrêtées aux différentes réunions de consultation. De plus, il a été convenu que la FAO assumerait un rôle majeur dans la mise en oeuvre de la stratégie. Tout d'abord, la FAO publiera le rapport du Forum sur la validation et sera chargée de tenir, mettre à jour et améliorer le site Internet de la SMMVM. Il est déjà accessible à l'adresse suivante de la FAO <www.globalcassavastrategy.net>. Ce site comporte des liens vers d'autres sites susceptibles de présenter un intérêt pour le secteur du manioc. Toutes les parties concernées sont invitées à y participer en fournissant des informations et des liens utiles.


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