1.1Il est n�cessaire, si l�on veut trouver des solutions efficaces et �conomiques � l�am�lioration du bien-�tre nutritionnel, d�envisager un �ventail complet de politiques et de mesures visant � r�soudre, par des voies directes et indirectes, des probl�mes qui se posent sous des formes et dans des circonstances extr�mement vari�es. Le pr�sent document met l�accent sur les politiques li�es � la nutrition, en adoptant cependant une perspective large, destin�e � souligner la compl�mentarit� des �l�ments suivants: les politiques indirectes touchant, par exemple, aux domaines social, �conomique, agricole et alimentaire; et les politiques et les programmes d�intervention directe, tels que la prise en consid�ration des param�tres nutritionnels en agriculture, les programmes cibl�s, la nutrition int�gr�e et les programmes de sant�1.
1.2 Nous nous efforcerons donc de donner une expression conceptuelle et d�explorer les relations entre la s�curit� alimentaire, l�agriculture et la nutrition; de mettre en relief les cons�quences, en mati�re de s�curit� alimentaire et de nutrition, de certains choix en mati�re de politiques de d�veloppement alimentaire et agricole et de politiques nutritionnelles; et de formuler des recommandations en vue d�am�liorer les avantages nutritionnels d�coulant du d�veloppement social, �conomique et agricole, de m�me que des politiques et des programmes directement tourn�s vers la nutrition. Ce document a pour th�me principal les probl�mes nutritionnels des populations pauvres dans les pays � faible revenu. Il traite �galement, dans une moindre mesure, les probl�mes nutritionnels et les possibilit�s d�action qui se pr�sentent dans les �conomies en transition, de m�me que dans les pays � revenu �lev�.
1.3 Si l'on veut parvenir � la s�curit� alimentaire et au bien-�tre nutritionnel pour tous, il importe que les responsables de la planification et les preneurs de d�cisions de chaque secteur soient conscients de l'incidence pr�visible, sur la nutrition, des mesures qu'ils auront adopt�es. Il faut, parall�lement, pr�ciser les probl�matiques essentielles de la nutrition. On peut, en effet, consid�rer la malnutrition sous trois angles diff�rents: premi�rement, la non-satisfaction d'un droit fondamental de la personne; deuxi�mement, un sympt�me des probl�mes plus larges li�s � la pauvret� et au d�veloppement; et, troisi�mement, l'une des causes des probl�mes susmentionn�s.
1.4 Si l�on consid�re le bien-�tre nutritionnel comme un droit fondamental de tout un chacun, il faut en d�duire, en principe, qu�aucun compromis n�est acceptable, s�agissant du droit � l�alimentation. Le Pacte international relatif aux droits �conomiques, sociaux et culturels adopt� par l�Assembl�e g�n�rale des Nations Unies en 1966 d�finit et formalise le droit � l�alimentation en tant que droit fondamental de la personne, d�j� mentionn� dans la D�claration universelle des droits de l�homme des Nations Unies, en 1948. En 1989, 85 Etats avaient sign� le Pacte. Cependant, m�me si les Etats continuent de souscrire au droit � l�alimentation, ils ne l�ont pas consacr� sous la forme d�obligation l�gale sp�cifique, et aucun m�canisme n�a �t� cr��, � l��chelle nationale ou internationale, pour superviser la mise en �uvre de ce droit2.
1.5 Cette absence de formalisation ne signifie pas que le droit en question soit d�nu� de signification. Le consensus en la mati�re et sa codification fournissent un point d�appui pour sa d�fense et pour l�application de pressions, au niveau politique, dans les pays qui ont sign� le Pacte ou les d�clarations connexes.
1.6 Si l�on consid�re la sous-alimentation comme un sympt�me des probl�mes li�s � la pauvret� et au d�veloppement, c�est-�-dire comme une cons�quence, il en d�coule que la disponibilit� de nourriture et l�acc�s � cette derni�re, qui sont principalement fonction de conditions structurelles et de l��volution des revenus, de la production agricole et des �changes auxquels elle donne lieu, ont une incidence sur les mesures sanitaires et sur le contexte de sant� en g�n�ral, de m�me que sur le comportement et les connaissances de la population, dont l�ensemble produit une condition nutritionnelle donn�e. Il est donc n�cessaire d�intervenir pour rectifier les contraintes qui se font jour dans l�un ou l�autre de ces domaines.
1.7 Alors que la disponibilit� alimentaire peut constituer un probl�me pour une partie importante de la population lorsque cette disponibilit� d�cline et que les prix augmentent, c�est surtout pour les populations pauvres que ce probl�me tourne � la crise. C�est pourquoi il faut appr�cier la disponibilit� de nourriture dans le contexte de la pauvret�, au moment o� les probl�mes de disponibilit� se transforment en probl�mes d�acc�s (avec l�augmentation des prix), que ce soit au niveau national ou au niveau du m�nage.
1.8Il est possible, en augmentant les revenus des m�nages touch�s par la malnutrition, d�am�liorer leur acc�s � la nourriture. En effet, il existe une forte corr�lation entre l�augmentation des revenus et l�accroissement de la consommation de produits autres que les aliments de base, et notamment de la viande3.
1.9 Si l�on adopte le point de vue que le bien-�tre nutritionnel est une condition pr�alable du d�veloppement, on est �galement amen� � faire valoir que la r�duction de productivit� � au sens large � est en partie un r�sultat de la malnutrition. Ainsi, le bien-�tre nutritionnel des populations pauvres ne doit pas simplement �tre vu comme une cons�quence du d�veloppement, mais comme l�une de ses conditions pr�alables. La corr�lation entre ces deux �l�ments est � la fois directe et � court terme, mais �galement indirecte et � long terme; dans le deuxi�me cas, il existe �galement un lien �troit avec la croissance d�mographique.
1.10L�am�lioration de la nutrition des adultes entra�ne une am�lioration de la productivit� physique et une meilleure productivit� sur le march� du travail4. La sous-nutrition entra�ne des pertes substantielles de productivit�, soit en raison des taux �lev�s de morbidit� ou d�une insuffisance du d�veloppement cognitif (Masson, Jonsson et Csete, 1995; Scrimshaw, 1994)5.
1.11Etant donn� que les m�nages pauvres, en sus de leurs liquidit�s habituelles, constituent leur base patrimoniale � partir des tranches suppl�mentaires de revenu, ce ph�nom�ne constitue l�une des relations essentielles entre la s�curit� alimentaire � court et � long termes et donc la nutrition. En effet, les m�nages qui ont pu acqu�rir quelques biens sont moins vuln�rables aux brusques d�clins de leurs revenus; du fait qu�ils peuvent liquider une partie de leur patrimoine en p�riode d�adversit�, ils peuvent ainsi pr�server, du moins en partie, leur niveau de s�curit� alimentaire6.
1.12 Les efforts d�ploy�s par les m�nages atteints par l�ins�curit� alimentaire pour se procurer de quoi manger peuvent �galement avoir des r�percussions importantes pour le milieu naturel et pour l�utilisation des ressources naturelles. En effet, de nombreux m�nages souffrant de pr�carit� mat�rielle et alimentaire vivent dans des zones vuln�rables au plan �cologique (Leonard, 1989), en employant de surcro�t des pratiques non appropri�es, voire d�sesp�r�es d�utilisation des terres, qui peuvent entra�ner des d�gradations environnementales mettant encore plus en p�ril leurs moyens de survie et ceux des g�n�rations futures.
1.13 La qu�te du bien-�tre nutritionnel peut �galement avoir une incidence marqu�e sur la situation d�mographique d�une r�gion, en particulier lorsqu�elle entra�ne des migrations � court ou � long terme vers d�autres r�gions, en vue de trouver un emploi ou une source de revenu ou encore, dans les cas extr�mes, pour trouver tout simplement de quoi manger. De telles migrations risquent d�entra�ner une augmentation du nombre des m�nages dirig�s par une femme, un taux de d�pendance plus �lev� dans la r�gion d�origine, et une alt�ration de la dynamique du march� du travail. Les zones d�accueil, le plus souvent des bidonvilles urbains, subissent en outre, en raison de l�afflux de migrants, des pressions consid�rables au plan de la s�curit� alimentaire.
1.14 Il existe, depuis longtemps, une relation complexe entre la nutrition et la croissance d�mographique. C�est seulement � moyen terme que l�on observe un lien antagonique entre la disponibilit� alimentaire et la croissance d�mographique. A long terme, en effet, l�am�lioration de la nutrition faisant partie du bien-�tre humain, elle peut contribuer � ralentir la croissance d�mographique. Il existe donc, � l��vidence, un faisceau de relations fortement positives entre, d�une part, l�am�lioration de la nutrition et le d�veloppement �conomique (Fogel, 1994) et, d�autre part, entre le d�veloppement �conomique et le passage de la population d�un taux de natalit� �lev� associ� � une faible esp�rance de vie � un allongement de l�esp�rance de vie conjugu�, dans une phase ult�rieure, � un abaissement de la natalit�. C�est pourquoi, dans la mesure o� l�am�lioration de la nutrition encourage le d�veloppement �conomique, elle constitue �galement un levier fondamental dans la lutte contre le probl�me toujours plus s�rieux de la croissance d�mographique.
1.15 Les auteurs de ce document acceptent les trois perspectives �voqu�es, � savoir celles des droits de la personne, du sympt�me de pauvret� et, enfin, de la condition pr�alable au d�veloppement, en leur accordant une validit� �gale, plut�t que de les opposer entre elles. Une telle d�marche encouragera peut-�tre la constitution de coalitions plus larges et plus influentes, � l��chelle internationale comme � l��chelon national, des coalitions de forces capables d�am�liorer rapidement les conditions de la nutrition.
2.1 Le probl�me de la nutrition pr�sente de nombreuses facettes, dont certaines se chevauchent ou font partie de probl�mes plus vastes li�s � la nutrition et � l�alimentation. Dans ce chapitre, nous nous penchons sur les questions suivantes:
2.2 Compte tenu des probl�mes pos�s par les d�finitions, par le d�nombrement et par l'insuffisance de donn�es, il est difficile de recenser avec pr�cision les personnes souffrant de probl�mes nutritionnels. Les difficult�s li�es au d�nombrement d�coulent d'in�galit�s qui se manifestent au niveau de la r�gion, de la communaut�, du m�nage et de ses membres, de m�me que de certaines dynamiques difficiles � quantifier. De nombreuses r�gions du monde n'ont jamais �t� en mesure de proc�der aux investissements substantiels que suppose la mise en place de syst�mes de recueil de donn�es capables d'appr�hender de fa�on globale la malnutrition chronique. De plus, le bien-�tre nutritionnel d'une population peut conna�tre des modifications rapides, alors que le suivi de l'ins�curit� alimentaire et de la malnutrition dans les zones sinistr�es et dans celles ravag�es par des conflits arm�s demeure, pour des raisons �videntes, tr�s limit�. Cependant, l'absence de chiffres pr�cis ne devrait pas entraver les efforts visant � concevoir et � mettre en �uvre des initiatives d'am�lioration de la nutrition et de la s�curit� alimentaire.
2.3 Plut�t que de s�appuyer sur des approximations g�n�rales, nous devons nous efforcer d�obtenir une mesure aussi pr�cise que possible de la situation nutritionnelle r�elle des populations. Les mesures anthropom�triques sont, � ce propos, un instrument utile (encadr� 1). Certes, l�emploi de tels d�tours pour appr�cier la situation nutritionnelle ne permet pas d��tablir des distinctions entre les diff�rents risques nutritionnels, tels que les carences li�es au r�gime alimentaire et aux nutriments; il faut donc employer des sources d�information et des approches diverses, afin de retracer les causes de la sous-alimentation. Quoiqu�il en soit, la pr�dominance du ph�nom�ne du d�ficit pond�ral est consid�r�e comme un indicateur important de nombreux probl�mes li�s � la nutrition, au niveau individuel comme au niveau d�une population (Mason, Jonsson et Csete, 1995; FAO/OMS, 1992e).
Encadr� 1 Mesurer la situation nutritionnelle |
On peut
�valuer la situation nutritionnelle d�une personne en se livrant � une ou
plusieurs mesures anthropom�triques visant � d�terminer si, en toute
probabilit�, cette personne est bien nourrie, sous-aliment�e ou
suraliment�e. Cette m�thode permet d�obtenir des mesures objectives des
mensurations et de la composition corporelle, qui sont des indicateurs
indirects de la situation nutritionnelle. |
2.4 On d�finit la s�curit� alimentaire sous sa forme la plus �l�mentaire comme l�acc�s de tous � la nourriture dont ils ont besoin pour vivre, en tout temps, en bonne sant� (FAO/OMS, 1992b). L�ins�curit� alimentaire est l�une des causes principales de la sous-alimentation. Compte tenu des dimensions multiples (chroniques, transitoires, � court terme et � long terme) de l�ins�curit� alimentaire, il ne saurait y avoir d�indicateur unique pour la mesurer (Maxwell et Frankenberger, 1992). En r�alit�, les indicateurs propos�s se rattachent de diff�rentes fa�ons � la s�curit� alimentaire des m�nages. La relation peut �tre temporelle (indicateurs pr�curseurs, concomitants ou cons�cutifs), conceptuelle (consommation, nutrition, strat�gie permettant de faire face, prise en compte des ressources et mesures ext�rieures aux m�nages), et/ou fond�e sur la d�finition (acc�s, suffisance, vuln�rabilit� et durabilit�) (Csete et Maxwell, 1995).
2.5 Toute description g�n�rale des principaux probl�mes nutritionnels doit mettre en relief les �l�ments suivants:
2.6La carence en vitamine A repr�sente un probl�me de sant� publique dans une soixantaine de pays (OMS/UNICEF, 1995), et elle touche quelque 40 millions d�enfants, environ 251 millions d�enfants pr�sentent des carences graves ou mod�r�es asymptomatiques (Comit� administratif sur la coordination/Sous-Comit� sur la nutrition ONU,1989)9. Pr�s de 1,6 milliard de personnes (soit 29 pour cent de la population mondiale) sont expos�es � une carence en iode (OMS/UNICEF/ICCIDD, 1993). Pr�s de deux milliards d��tres humains souffrent de carence en fer, ph�nom�ne auquel sont particuli�rement expos�s les femmes et les enfants d��ge pr�scolaire.
2.7 Au probl�me de la sous-alimentation s�ajoute celui du surpoids et de l�ob�sit� dont les proportions croissantes affectent la sant� publique, non seulement dans les pays riches, mais �galement dans les pays � revenus faible et moyen, tout particuli�rement dans les zones urbaines.
2.8 Le tableau 2 illustre le ph�nom�ne du d�ficit pond�ral parmi les enfants de moins de cinq ans dans les pays en d�veloppement, en 1990. Depuis, c�est-�-dire au cours de la premi�re moiti� de la d�cennie, on a enregistr�, dans un certain nombre de pays d�Afrique (Ethiopie, Kenya, Madagascar et Rwanda), une augmentation pr�occupante de la malnutrition chez les enfants d��ge pr�scolaire. L�Inde fait �galement �tat d�une l�g�re augmentation (1989-1992); en revanche, des am�liorations ont r�cemment �t� annonc�es pour le Bangladesh, la Chine et le Br�sil (CAC/SCN ONU, 1994).
2.9 Outre les facteurs expos�s plus haut, la situation nutritionnelle est d�termin�e par la qualit� et la s�curit� des aliments consomm�s. Ce dernier crit�re a une influence particuli�rement d�terminante pour l�ad�quation de la nutrition dans les pays en d�veloppement, mais les pays industrialis�s ne sont pas � l�abri des risques de contamination alimentaire (salmonellose). Dans les pays en d�veloppement, l�acc�s � une alimentation de qualit� et saine est �troitement li� aux facteurs socio�conomiques, qui vont des conditions d�entreposage et de transformation des aliments aux structures sanitaires, en passant par la qualit� de l�eau et les services de contr�le des aliments. Il est difficile d�appr�cier l�importance des maladies caus�es par l�alimentation, car la plupart des cas ne sont pas signal�s ou on n��tablit pas le rapport avec la mauvaise alimentation. On estime n�anmoins que jusqu�� 70 pour cent des quelque 1,5 milliard de cas de diarrh�e, qui affecte les enfants de moins de cinq ans entra�nant la mort de 3 millions d�entre eux, sont caus�s par une alimentation malsaine (FAO/OMS, 1992c).
2.10 On observe un d�clin des cas d�ins�curit� alimentaire assez graves pour d�g�n�rer en famine. Aujourd�hui, contrairement aux ann�es 60 et au d�but des ann�es 70, voire des ann�es 80, les sympt�mes �vidents de famine sont limit�s � quelques pays africains, tels que l�Ethiopie, le Soudan et le Mozambique, dans des zones de conflit arm�. Cependant, le risque de famine continue d�exister, en raison des perturbations d�origines politique, �conomique et environnementale, mais aussi de l�inad�quate pr�paration face � ces perturbations, surtout au niveau national (Dr�ze et Sen, 1989; Teklu, von Braun et Zaki, 1991; Webb et von Braun, 1994).
2.11 Bien que l�on observe une augmentation de la disponibilit� d��nergie, de prot�ines et de mati�res grasses � l��chelle mondiale, l�offre de ces deux derniers n�a pas augment� dans les pays les moins d�velopp�s (tableaux 3 � 5). Ce constat traduit une certaine am�lioration de la disponibilit� mondiale de nourriture, mais pas forc�ment de la consommation alimentaire des populations pauvres. On peut dire, tout au moins, que la proportion des personnes dont la consommation d��nergie alimentaire est insuffisante a diminu� dans toutes les r�gions, � l�exception de l�Afrique subsaharienne (tableau 1).
2.12Ces estimations donnent une id�e approximative du ph�nom�ne de la carence alimentaire qui affecte les populations pauvres, mais ne pr�cisent pas le tableau de l�ins�curit� alimentaire telle que d�finie plus haut. Ces estimations ne tiennent pas compte des fluctuations et des risques qui affectent l�offre de denr�es alimentaires et l�acc�s � la nourriture. Les estimations concernant les carences alimentaires pour une p�riode donn�e � disons, telle ou telle ann�e � tendent � minimiser le ph�nom�ne de l�ins�curit� alimentaire10, mais il reste difficile d�appr�cier la marge d�impr�cision.
2.13 Au cours de la derni�re d�cennie, l�affinement des m�thodes permettant de mesurer la teneur en nutriments ainsi que la propagation de ces m�thodes, la multiplication et l�am�lioration des �tudes �pid�miologiques, ainsi que les progr�s accomplis, entre autres sciences, en biochimie et en immunologie, ont permis de mieux prendre conscience de l�importance cruciale des micronutriments � � savoir, les ingr�dients alimentaires autres que les prot�ines, les sources d��nergie, les mati�res grasses et les fibres. Ainsi, l�importance de micronutriments tels que la vitamine A, le fer, l�iode, le zinc, le cuivre et le s�l�nium pour l�accomplissement de tout un �ventail de fonctions vitales est � pr�sent bien comprise, et l�on a une meilleure id�e de l�incidence r�elle des carences marginales. L�importance d�un tel constat ne se limite pas aux pays � faible revenu.
2.14 A l��chelle internationale, la vitamine A a fait l�objet, ces derni�res ann�es, d�une attention particuli�re. Il est � pr�sent admis que la pr�sence de quantit�s ad�quates de cette vitamine est essentielle � tous les stades du d�veloppement corporel et du fonctionnement organique, qu�il s�agisse notamment de la diff�renciation cellulaire, du fonctionnement du syst�me immunitaire ou de l�acuit� visuelle. Les populations des pays en d�veloppement tirent la majeure partie de leur vitamine A des carot�no�des d�origine v�g�tale, dont l�absorption et l�utilisation d�pendent d�un r�gime alimentaire suffisant en mati�res grasses, prot�ines, fer et zinc. Les causes des carences en vitamine A sont li�es � toute une s�rie de facteurs: facteurs �cologiques tels que le manque d�eau pour cultiver des v�g�taux riches en vitamine A; les pratiques alimentaires, privil�giant par exemple des denr�es � teneur insuffisante en vitamine A, ou quantit� insuffisante de nourriture absorb�e, m�me lorsqu�elle est riche en vitamine A; les facteurs �tiologiques � on a observ�, par exemple, que la carence en vitamine A s�accentue apr�s des acc�s de diarrh�e ou des maladies respiratoires (OMS/UNICEF, 1995).
2.15 Les troubles de carence en iode (IDD) repr�sentent, � l��chelle mondiale, la cause la plus importante de l�sions c�r�brales et d�arri�ration mentale, m�me s�il est possible de la pr�venir. Une carence en iode au cours de la grossesse risque de cr�er des dommages irr�versibles au cerveau du foetus. Les enfants n�s avec une telle carence sont expos�s � une d�ficience de la capacit� d�apprentissage et � des retards psychomoteurs. La carence en iode chez la femme enceinte, notamment au cours du premier trimestre, risque d�augmenter la proportion d�enfants mort-n�s, ainsi que les fausses-couches spontan�es et les anomalies cong�nitales (OMS/UNICEF/ICCIDD, 1993; Sullivan et al., 1995; Mannar et Dunn, 1995). Le probl�me de l�IDD n�est d�ailleurs pas limit� au monde en d�veloppement, puisqu�il se manifeste �galement dans plusieurs pays d�Europe. Les d�ficiences en iode des terres cultiv�es se r�percutent sur les cultures. Il est en g�n�ral possible de pr�venir l�IDD gr�ce � la consommation d�aliments ayant une teneur suffisante en iode (notamment les produits de la mer) ou de sel fortifi�, m�me dans les r�gions dont les terres n�ont plus la teneur en iode n�cessaire.
2.16 La carence en fer peut avoir comme origine une absorption insuffisante de ce nutriment, mais elle est �galement li�e � des facteurs tenant au r�gime alimentaire, tels que la vitamine C, qui potentialise l�utilisation du fer non-h�minique. A l��chelle plan�taire, plus de 2 milliards de personnes sont affect�es par la carence en fer. Les femmes et les enfants d��ge pr�scolaire sont particuli�rement expos�s � cette carence et, dans certaines zones, plus de 50 pour cent des femmes et des enfants souffrent d�an�mie. Chez les enfants et les nouveau-n�s, l�an�mie conduit � des retards dans le d�veloppement physique et cognitif, de m�me qu�elle r�duit la r�sistance aux infections. Chez les adultes, la carence en fer peut �tre cause de fatigue ou de moindre capacit� au travail, de m�me qu�elle risque d�affecter gravement les fonctions reproductives. Chez les femmes, l�an�mie est la cause d�environ 20 pour cent des d�c�s p�rinataux, car elle pr�dispose le corps aux h�morragies et aux infections avant, pendant et apr�s la naissance. Enfin, l�an�mie durant la grossesse risque d�entra�ner un retard dans la croissance du foetus, un poids � la naissance trop faible et une mortalit� p�rinatale accrue (FAO/OMS, 1992f).
2.17 Les r�centes observations confirment l�existence de carences g�n�ralis�es en zinc dans les pays en d�veloppement, de m�me que l�incidence importante de cette carence sur les troubles de la croissance, la r�sistance insuffisante aux maladies infectieuses, l�augmentation du taux de mortinatalit� et peut-�tre m�me les atteintes au d�veloppement cognitif. La distribution de zinc sous forme de compl�ment nutritif a donn�, de fa�on ind�niable, dans plusieurs pays, des r�sultats positifs. La carence en zinc est li�e � une consommation insuffisante de produits d�origine animale, qui repr�sentent la meilleure source naturelle d�apport en zinc. De meilleures techniques de transformation des aliments pourrait am�liorer l�absorption du zinc se trouvant dans les c�r�ales et les l�gumes. Enfin, ce nutriment a �t� quelque peu n�glig� du fait que l�on ne disposait pas de m�thodes pr�cises permettant de mesurer son absorption par les populations (D. Alnwick, communication personnelle).
2.18 Les observateurs sont pratiquement unanimes pour d�signer l�Asie m�ridionale, et en particulier l�Inde et le Bangladesh, comme les r�gions o� se trouve la plus grande proportion d�enfants pr�sentant un d�ficit pond�ral dans le monde en d�veloppement, l�Afrique subsaharienne se trouvant au deuxi�me rang (tableau 2). L�incidence des carences alimentaires, exprim�e sous forme d�estimation des d�ficiences �nerg�tiques, est la plus �lev�e en Afrique et en Asie m�ridionale et beaucoup plus faible en Asie orientale, en Am�rique latine et dans les Cara�bes. Alors que le pourcentage de personnes souffrant de d�ficiences �nerg�tiques a diminu� dans les populations d�Asie m�ridionale, leur nombre absolu a augment� dans les populations d�Asie m�ridionale et d�Afrique subsaharienne (tableau 1).
2.19 S�agissant de la localisation des zones agro�cologiques o� sont situ�es les populations souffrant de d�ficience �nerg�tique alimentaire, on a observ� que ces d�ficiences sont g�n�ralement moins marqu�es dans les zones bien arros�es, et plus importantes dans les zones arides (Broca et Oram, 1991). Ainsi, la plupart des populations pauvres de l�Afrique subsaharienne sont situ�es dans la zone aride et, dans la plupart des cas, la r�partition des populations pauvres est calqu�e sur la d�limitation des diff�rentes zones agro�cologiques (Garcia et al., 1995).
2.20D�une r�gion � l�autre, on observe que les m�nages atteints par l�ins�curit� alimentaire peuvent appartenir � diff�rents groupes socio�conomiques et d�mographiques en fonction de facteurs tels que les param�tres agro�cologiques, l�acc�s � la terre, la diversit� des sources de revenus et le degr� de d�veloppement de l��conomie. Les familles mal nourries sont g�n�ralement nombreuses, avec un nombre plus �lev� de personnes � charge et une moyenne d��ge plus basse (von Braun et Pandya-Lorch, 1991)11. L�ins�curit� alimentaire frappe davantage les m�nages sans terre ou pratiquement d�pourvus de terre, lesquels d�pendent beaucoup plus de sources de revenu moins fiables que le revenu agricole et doivent compter sur la diversification de l��conomie rurale12.
2.21 Dans les zones urbaines, la s�curit� alimentaire des m�nages est principalement fonction du taux r�el de r�mun�ration, c�est-�-dire du rapport entre les salaires et le prix des denr�es alimentaires ainsi que du niveau de l�emploi. Les carences alimentaires et la malnutrition tendent � avoir une moindre incidence dans les zones urbaines que dans les zones rurales. Cependant, les conditions sanitaires d�plorables des quartiers pauvres, et certains aspects du mode de vie urbain entra�nent parfois une diff�rence qualitative de la situation nutritionnelle des villes par rapport aux campagnes. Dans l�avenir, le probl�me de l�ins�curit� alimentaire et de la malnutrition en milieu urbain est destin� � s�aggraver, ainsi que les difficult�s li�es aux structures sanitaires, � la qualit� de l�alimentation et � la salubrit� des aliments, � mesure que s�accentuera le ph�nom�ne d�urbanisation (von Braun et al., 1992; UNICEF, 1994b). Ainsi, d�ici l�an 2025, 57 pour cent de la population africaine pourrait �tre urbanis�e contre seulement 34 pour cent en 1990. Ce chiffre pourrait �tre de 52 pour cent pour l�Asie m�ridionale; en Am�rique latine, il avait d�j� atteint 72 pour cent en 1990 (ONU, 1990).
2.22 Incapables de gagner leur vie ou de s�alimenter convenablement, souvent � cause de conflits arm�s ou parce qu�elles sont victimes de discriminations, d�importantes populations frapp�es par la pauvret� cherchent � migrer vers des r�gions plus pacifiques, que ce soit dans leur propre pays ou dans des pays voisins. On estime aujourd�hui � 20 millions le nombre de r�fugi�s, auxquels il faut ajouter 30 millions de personnes d�plac�es dites internes, soit un total de 50 millions de personnes (PAM, 1995). En outre, 35 millions de personnes vivent, hors de leur pays, � la recherche d�un emploi (Chen, 1992; Russell, Jacobsen et Stanley, 1990). Ces d�placements sont accompagn�s de difficult�s li�es � l�ins�curit� alimentaire croissante parmi les r�fugi�s et les populations d�plac�es pauvres, de m�me que par des probl�mes nutritionnels sp�cifiques (CAC/SCN ONU, 1994).
2.23 Au d�but des ann�es 90, le mauvais fonctionnement des march�s, l�absence de s�curit� sociale et le sous-emploi ont entra�n� une augmentation substantielle des groupes de population souffrant de pr�carit� alimentaire dans certaines des �conomies en transition. Le ph�nom�ne de la pauvret� absolue s�est accentu�, et les sympt�mes de carence nutritionnelle sont particuli�rement r�pandus dans les pays d�Asie centrale et dans certaines r�gions de la F�d�ration de Russie. Dans la F�d�ration de Russie, selon des estimations pr�liminaires de 1993, 3,6 pour cent des enfants �g�s de moins de deux ans �taient en d�ficit pond�ral, et 21 pour cent d�entre eux souffraient d�un retard de croissance. Au cours de la m�me p�riode, on a observ� une forte incidence de l�ob�sit� parmi les Russes adultes, soit 20 pour cent des personnes �g�es de 30 � 59 ans (Mroz et Popkin, 1995). On a �galement vu augmenter l�importance de l�acc�s aux terres cultivables pour la s�curit� alimentaire des m�nages. Ainsi, dans la F�d�ration de Russie, 25 millions de m�nages obtiennent une bonne partie de leur alimentation de base gr�ce aux parcelles familiales. Le revenu tir� en nature et en esp�ces des parcelles familiales est, par exemple, de quelque 26 pour cent dans la F�d�ration de Russie occidentale et leur contribution � la ration calorique des m�nages est grande. Contrairement � ce que l�on pourrait croire, les 25 pour cent les plus pauvres des m�nages tirent moins de nourriture et un moindre revenu � non seulement en termes absolus mais aussi en termes relatifs � de leurs parcelles familiales (8 pour cent du revenu) que les 25 pour cent de t�te dans la r�partition du revenu (32 pour cent de leur revenu) (von Braun et al., 1996).
2.24 Dans les pays � revenu �lev� et parmi les cat�gories favoris�es des pays � revenu faible et moyen, les causes principales de r�gimes alimentaires malsains sont li�es aux modes de comportement et de vie choisis, � la stratification sociale et au d�faut de connaissances (FAO/OMS, 1992d). Dans les pays industrialis�s en particulier, on a constat� de plus en plus, au cours des 40 derni�res ann�es, que certaines maladies chroniques et non contagieuses �taient �troitement li�es � l�alimentation et � certains aspects du mode de vie, tels que le stress, l�insuffisance d�activit� physique et le tabagisme. On a observ� que ces facteurs �taient particuli�rement d�cisifs pour ce qui est de l�ob�sit�, des maladies cardio-vasculaires, de l�hypertension, de l�embolie c�r�brale, du diab�te mellitus (ind�pendant de l�insuline), de diverses formes de cancer et des maladies h�patiques et gastro-intestinales. Ces maladies sont la cause de plus de 70 pour cent des d�c�s survenant dans les pays d�velopp�s (FAO/OMS, 1992f). Les probl�mes li�s � l�alimentation et leurs cons�quences pour la sant� entra�nent des co�ts substantiels pour la soci�t�, co�ts qui ont �t� estim�s, en Allemagne, � 50 milliards de dollars EU par an (Kohlmeier et al., 1993). Au cours des d�cennies 80 et 90, � mesure que s�aggravaient les distorsions dans la distribution des revenus des pays industrialis�s d�Am�rique du Nord et d�Europe et que l�on r�duisait les prestations sociales parall�lement � la mont�e du ch�mage, on a vu s�accentuer les besoins d�une assistance alimentaire pour les groupes � faible revenu (Feichtinger, 1995). Les personnes sans domicile fixe sont particuli�rement vuln�rables � l�ins�curit� alimentaire.
2.25 Selon des projections r�alistes concernant la malnutrition, les approches actuellement retenues ainsi que les engagements qui ont �t� pris ne devraient pas permettre d'atteindre les objectifs adopt�s lors du Sommet mondial pour l'enfance et de la Conf�rence internationale sur la nutrition (CIN), � savoir parvenir � �r�duire de fa�on substantielle la malnutrition des enfants d'ici l'an 2000� (FAO/OMS, 1992a). Selon un sc�nario optimiste, il restera encore, en l'an 2020, une centaine de millions d'enfants d'�ge pr�scolaire mal nourris. Selon une hypoth�se pessimiste, ce chiffre devrait atteindre 200 millions d'enfants d'ici l'an 2000 et demeurer � ce niveau jusqu'� l'an 2020 (Garcia, 1994). En revanche, selon l'hypoth�se optimiste, le nombre absolu d'enfants d'�ge pr�scolaire en d�ficit pond�ral conna�tra une r�duction dans toutes les r�gions en d�veloppement, � l'exception de l'Afrique subsaharienne. Dans cette r�gion, le nombre des enfants mal nourris devrait atteindre 34 millions d'ici l'an 2020, m�me si l'incidence du ph�nom�ne ne change pas, en raison principalement de la croissance d�mographique. S'agissant de la Chine et de l'Asie du Sud-Est, on s'attend au contraire � une am�lioration, puisque le nombre d'enfants en d�ficit pond�ral devrait y tomber de 44 millions en 1990 � 6 millions en 2020 (Garcia, 1994). Ainsi, pour ces r�gions et pour quelques autres, les buts fix�s pourraient bien �tre atteints.
2.26 Dans un monde de plus en plus int�gr� du fait des �changes commerciaux et des liens politico-�conomiques entre les pays, la disponibilit� d�une alimentation suffisante rev�t une importance croissante pour la s�curit� alimentaire et la nutrition des m�nages. Jusqu�ici, la production alimentaire mondiale a suivi la croissance d�mographique (FAO, 1996). Cependant, � long terme, on ne saurait consid�rer la disponibilit� de nourriture � l��chelle mondiale comme garantie, compte tenu de la croissance d�mographique, de la p�nurie toujours plus aigu� de terres arables, et des difficult�s que pose de plus en plus la recherche d�augmentation durable du rendement des r�coltes (Pinstrup-Andersen, 1994). On pr�voit que, d�ici l�an 2025, la population de la plan�te sera de 8,47 milliards d�habitants, dont 61 pour cent vivront dans les grandes agglom�rations (Bongaarts, 1995), une bonne partie des populations rurales se trouvant rel�gu�e sur des terres marginales � faible productivit�.
2.27Les projections dont on dispose indiquent que, jusqu�� l�an 2010 (FAO, 1995c), la croissance d�mographique absorbera environ 90 pour cent de l�augmentation que conna�tra la demande mondiale de nourriture (c�r�ales). Cependant, comme l�expliquent d�autres documents d�information techniques13 dans de nombreux pays en d�veloppement, la modification des habitudes alimentaires aura une incidence marqu�e sur la progression de la demande. L�augmentation des revenus, l�urbanisation, le meilleur fonctionnement des circuits de distribution, la comp�titivit� des prix et l�offre d�un plus grand �ventail de denr�es, entra�neront une diversification des habitudes alimentaires et une moindre d�pendance � l��gard de quelques denr�es de base. On estime que, pour ces pays en d�veloppement, la consommation par habitant augmentera de 2,2 � 2,4 pour cent par an au cours de la p�riode 1990-2010. La consommation annuelle de c�r�ales passera ainsi � 250-255 kg par habitant, alors qu�elle �tait de 237 kg pour la p�riode 1989-1991; on estime, par ailleurs, que cette augmentation sera principalement attribuable � la demande indirecte, c�est-�-dire � la consommation sous forme d�alimentation animale. La consommation humaine de c�r�ales, quant � elle, devrait demeurer relativement stable.
2.28 Les projections FAO des disponibilit�s alimentaires par r�gion sugg�rent que dans l�avenir les probl�mes alimentaires se concentreront en Afrique subsaharienne et en Asie m�ridionale; les disponibilit�s dans toutes les autres r�gions devraient �tre suffisantes en l�an 2010 car la croissance de la production agricole devrait suivre celle des besoins alimentaires. Selon les projections de la FAO reproduites au tableau 6, en l�an 2010 (FAO, 1995c), les pays en d�veloppement auront une disponibilit� moyenne de 2 730 Calories par habitant et par jour. Dans ces pays, la sous-alimentation chronique affectera pr�s de 11 pour cent de la population, soit quelque 637 millions de personnes. Ce chiffre mondial escamote cependant d�importantes disparit�s r�gionales. Ainsi, dans trois r�gions (le Moyen-Orient et l�Afrique du Nord, l�Asie de l�est et l�Am�rique latine et les Cara�bes), on pr�voit un apport quotidien de 3 000 Calories, la sous-alimentation chronique affectant entre 4 et 6 pour cent de la population. Quant � l�Asie m�ridionale, avec 2 450 Calories par jour, et surtout l�Afrique subsaharienne, avec 2 170 Calories par jour, c�est dans ces deux r�gions que, d�ici l�an 2010, la disponibilit� �nerg�tique par habitant devrait �tre la plus basse.
2.29 La situation alimentaire et nutritionnelle de l�avenir n�a rien d�un destin in�luctable; au contraire, elle est fonction des mesures qui seront prises. Ce constat se trouve ais�ment confirm� lorsqu�on tire les cons�quences, au plan de la disponibilit� alimentaire, de diff�rentes hypoth�ses mettant en jeu une diversit� de politiques de population et d�investissement. Les tableaux 7 et 8 illustrent les sc�narios �tablis par l�Institut international de recherche sur les politiques alimentaires (IFPRI) concernant les pr�visions de disponibilit� alimentaire et de malnutrition pour les enfants d��ge pr�scolaire. Selon un sc�nario de r�f�rence, l�offre alimentaire augmentera dans toutes les r�gions en d�veloppement, � l�exception de l�Afrique subsaharienne. Cette plus grande disponibilit� pourrait entra�ner une r�duction du pourcentage d�enfants en d�ficit pond�ral. D�o� l�importance d�cisive des investissements sous-tendant une productivit� agricole durable, question sur laquelle nous reviendrons plus loin. Par ailleurs, les effets positifs d�une telle politique devraient se faire sentir d�ici environ 25 ans, sous forme de ralentissement de la croissance d�mographique (Rosegrant, Agcaoili-Sombilla et Perez, 1995).
3.1 Dans la pr�sente section, nous nous proposons de tracer un vaste cadre des causes de la malnutrition, avant de passer � un examen plus sp�cifique des relations entre l'agriculture, la s�curit� alimentaire et la nutrition. La pauvret�, avec la vuln�rabilit� qu'elle entra�ne � l'�gard des perturbations naturelles ou de celles provoqu�es par l'homme, est l'une des causes essentielles de la faim et de la malnutrition. On peut cependant consid�rer la pauvret� et sa dynamique comme un r�sultat endog�ne li� � l'insuffisance des ressources humaines et naturelles et � un choix de politiques erron�es (voir plus haut). En effet, si les causes profondes de la malnutrition, telles que les politiques inadapt�es, la pauvret� et la croissance d�mographique demeurent sans r�ponse, alors les programmes adopt�s par les pouvoirs publics comme les initiatives priv�es (telles que les strat�gies concernant les m�nages) ne r�ussiront que tr�s partiellement � am�liorer la nutrition de mani�re durable.
3.2 Dans la figure, la ligne sup�rieure repr�sente les principales causes des difficult�s: des strat�gies et des politiques �conomiques se heurtant � la discrimination et aux conflits sociaux; des ressources naturelles tributaires du climat et vuln�rables aux catastrophes, avec des r�percussions in�vitables sur les niveaux de pauvret� et sur la disponibilit� alimentaire; enfin, la croissance d�mographique. Ces facteurs affectent directement le succ�s de tout programme d�action, comme les subventions et les distributions de biens d�actif. Cette figure vise � illustrer � quel point il importe d�attaquer les probl�mes nutritionnels � la racine, en raison de la pr�dominance des relations en aval. Faute d�une telle approche, les mesures d�ordre public figurant dans la deuxi�me ligne (services, transferts, etc.) sont destin�es � rester des rem�des partiels.
3.3 Les politiques (en mati�re de salaires, par exemple) et les interventions telles que les programmes d�emploi destin�s � r�duire la pauvret� pr�sentent une interaction au niveau du capital, de la main-d��uvre et des march�s de produits. Ces relations d�terminent les prix et les termes de l��change impos�s aux populations pauvres et, partant, leur pouvoir d�achat r�el.
3.4 Le bien-�tre nutritionnel est li� au march� de la main-d��uvre et � la productivit� de cette derni�re, ainsi qu�� la population par le biais de la mortalit�, de la f�condit� et des migrations; il peut �tre influenc� par des interventions directes, sous forme de services, notamment m�dicaux, sociaux ou �ducatifs et sous forme de transferts et de subventions. Nous �voquerons bri�vement, ci-apr�s, ces relations et leurs r�percussions au plan de la politique de d�veloppement. Nous voyons donc que le bien-�tre nutritionnel est d�termin� par plusieurs facteurs interd�pendants, au niveau micro, comme l�illustre la partie inf�rieure de la figure:
Figure LA (MAL)NUTRITION VUE DANS UN CONTEXTE LARGE: CAUSES ET RELATIONS FONDAMENTALES ![]() |
3.5 Parmi les facteurs de bien-�tre nutritionnel les plus directement li�s � l�alimentation, il faut mettre en relief la quantit� et la qualit� du r�gime alimentaire, sa vari�t� et sa composition et en particulier, la pr�sence de produits d�origine animale et d�autres aliments riches en micronutriments et en �nergie, de m�me que le mode de transformation et de pr�paration des aliments, la fr�quence des repas et, pour les nourrissons, le r�le jou� par l�allaitement. Au nombre des facteurs moins directement li�s � l�alimentation, il faut inscrire, par exemple, la mani�re dont sont employ�s le temps et les connaissances des femmes, avec les r�percussions au plan nutritionnel, notamment sur l�incidence de l�allaitement, des soins prodigu�s aux enfants et des facteurs m�dicaux sanitaires.
3.6 L�augmentation du revenu du m�nage, si elle am�liore l�acc�s � la nourriture, ne contribue pas toujours directement � am�liorer le bien-�tre nutritionnel de tous les membres de la famille. En effet, les d�cisions prises � l�int�rieur du m�nage ont une incidence sur ce bien-�tre (Alderman et al., 1995), tout comme les connaissances et le degr� de responsabilit�. La fa�on dont le budget familial r�partit les d�penses n�est pas forc�ment optimale au plan nutritionnel, alors qu�elle peut sembler parfaitement rationnelle au responsable de la famille. La nutrition n�est que l�une des nombreuses consid�rations prises en compte lorsque sont �tablies les priorit�s de d�penses et de consommation. Par manque de connaissances � l��gard des besoins nutritionnels des membres de la famille, on risque de ne pas se procurer les aliments n�cessaires, m�me lorsqu�ils sont disponibles. Ce probl�me peut �tre aggrav� par des informations erron�es provenant de l�ext�rieur et par la promotion d�aliments inappropri�s. De plus, l��tat de sant� et la situation nutritionnelle des enfants sont directement affect�s par la qualit� des soins (UNICEF, 1995b).
3.7 Les femmes, alors m�me qu�elles jouent un r�le �minent en tant que gardiennes de la s�curit� alimentaire du foyer et de la nutrition des enfants, outre de nombreuses autres responsabilit�s, li�es � la nourriture mais �galement � l��conomie et � la procr�ation au sein de la famille, ne disposent souvent pas d�une ma�trise correspondante des ressources ou d�un pouvoir de d�cision. Ce ph�nom�ne est l�une des causes de la vuln�rabilit� accrue des femmes pauvres aux risques nutritionnels.
3.8 Le lien le plus �vident entre l'agriculture et la nutrition tient au fait que l'agriculture (y compris l'aquaculture) fournit la quasi-totalit� de la nourriture consomm�e par l'humanit�. Un r�gime sain exige une production locale diversifi�e d'articles p�rissables (par exemple, l�gumes frais provenant de march�s ou de parcelles familiales) et l'accessibilit� d'articles commercialis�s � l'�chelle r�gionale ou internationale. Les besoins alimentaires doivent donc �tre pris en consid�ration pour la promotion de la production, de la technologie et des �changes commerciaux. La promotion de la technologie doit �tre focalis�e non seulement sur la quantit� d'aliments de base � produire mais aussi, par exemple, sur les besoins alimentaires diff�rents des pauvres (ainsi, il faut assurer la disponibilit� de l�gumineuses dans les r�gions o� elles sont un �l�ment important du r�gime). Nous chercherons ici � mettre l'accent sur les relations moins �videntes entre l'agriculture et la nutrition, celles qui d�coulent de la fa�on dont la technologie est utilis�e en agriculture. Nous examinerons ces relations entre agriculture et nutrition dans deux ensembles de conditions diff�rentes: en pr�sence et en l'absence de nouvelles technologies agricoles. La premi�re condition met en valeur les technologies de contr�le de l'eau, des semences, de nutrition et de protection des plantes, tandis que la deuxi�me privil�gie l'expansion agricole dans les zones marginales.
3.9 Dans le premier cas, c�est-�-dire lorsque de nouvelles technologies agricoles sont disponibles,l�expansion de l�agriculture gr�ce au recours � des technologies appropri�es s�accompagne habituellement d�une progression du revenu et des d�penses consacr�es � l�achat de biens et services, y compris dans des secteurs non agricoles, si bien que les effets b�n�fiques de la croissance de la branche agricole se font sentir dans toute l��conomie. Il importe de souligner � nouveau les effets favorables de cette consommation pour les producteurs et les consommateurs des pays � faible revenu. En effet, la cr�ation et la divulgation de technologies agricoles propres � am�liorer la nutrition continuent de repr�senter un d�fi; nous analysons, dans le chapitre 4 ci-apr�s, les mesures visant � r�pondre aux besoins de consommation actuels et futurs.
3.10 Cependant, en dehors des effets li�s � la consommation, notre connaissance des liens entre la nutrition et la sant�, d�une part, et la technologie agricole, d�autre part, est incompl�te. Il y a lieu de se pr�occuper, dans ce domaine, des r�percussions indirectes que peuvent avoir les variations de revenu et du taux d�emploi sur la consommation (par exemple, lorsque les populations pauvres ne peuvent pas b�n�ficier de la technologie agricole) ainsi que des effets de la technologie sur la sant�. Ainsi, la question des maladies � vecteur hydrique et celle des pesticides figurent au premier plan des pr�occupations de sant� lorsqu�on examine l�ensemble technologique destin� � combiner le contr�le de l�eau, des semences, de la nutrition des plantes et leur protection (tableau 9).
3.11 Dans la deuxi�me hypoth�se, la croissance agricole sans am�lioration technique n�est possible que pendant une p�riode limit�e, par le biais d�une surexploitation des ressources et d�une expansion des terres cultiv�es � lorsqu�on dispose de terres exc�dentaires et de la main-d��uvre n�cessaire. Une telle croissance n�augmente pas les revenus et elle n�est pas durable. En outre, elle conduit g�n�ralement � une d�t�rioration des ressources. Cependant, les m�nages dont l�approvisionnement alimentaire est pr�caire ne se livrent pas de gaiet� de c�ur � de telles d�gradations; bien au contraire, ils sont en g�n�ral pleinement conscients du risque que fait peser la d�gradation de l�environnement sur leur s�curit� alimentaire (Davies, Leach et David, 1991). Une bonne part des destructions inflig�es � l�environnement, telles que le d�boisement et l��rosion des sols, peut �tre attribu�e � la lutte des populations pauvres pour se nourrir (Vosti et Scherr, 1994). On a estim� que la moiti� des agriculteurs pauvres du continent africain vivent dans un environnement dont la base de ressources naturelles est extr�mement vuln�rable. En Am�rique latine, ce chiffre est de l�ordre de 80 pour cent (Leonard, 1989). Par ailleurs, dans les zones marginales, une technologie agricole appropri�e peut contribuer consid�rablement � stabiliser la disponibilit� de nourriture et � faciliter l�acc�s des populations pauvres � cette nourriture. Lorsque l�agriculture s��tend aux zones marginales ou lorsqu�on surexploite les ressources, il faut craindre une d�gradation environnementale de niveaux primaire et secondaire (tableau 10).
3.12 D�importantes �tendues de la zone aride sont menac�es de d�sertification. Les zones susceptibles de s�cheresse situ�es en lisi�re des d�serts sont traditionnellement utilis�es par des populations de pasteurs; cependant, cette utilisation traditionnelle entra�ne toute une s�rie de risques environnementaux li�s, notamment, aux syst�mes d�utilisation des sols. Au cours des derni�res d�cennies, ces populations se sont trouv�es de plus en plus prises dans l��tau form� par une agriculture vivri�re plus extensive et, d�autre part, l�empi�tement du d�sert. De ce fait, la vuln�rabilit� nutritionnelle de ces populations pastorales s�est accrue (Webb et Reardon, 1992).
3.13 Bon nombre de r�gions situ�es � flanc de colline, dans les pays � faible revenu, ont une forte densit� de pr�sence humaine par rapport aux surfaces cultiv�es et sont contraintes � la subsistance en raison des carences de l�infrastructure et des march�s, mais aussi de l�ins�curit� alimentaire. Malgr� cela, la culture des collines repr�sente un apport majeur � l�agriculture tropicale. Quant aux relations entre agriculture, s�curit� alimentaire et nutrition au plan local, elles sont fortement influenc�es par le temps consacr� � l�acquisition d��l�ments touchant � la sant� et � la nutrition, et particuli�rement de l�eau et du combustible. Ainsi, le manque de combustible ou la r�duction du temps consacr� � la cuisson risquent d�entra�ner une consommation accrue d�aliments non cuits ou r�chauff�s, avec une augmentation correspondante des risques nutritionnels.
3.14 La pression exerc�e par l�expansion de l�agriculture dans la for�t tropicale peut prendre plusieurs formes: le d�gagement de p�turages, la sylviculture, la culture semi-nomade ou la rotation des terres par des fermiers install�s. Quelle que soit sa forme, l�expansion de l�agriculture dans la for�t tropicale peut affecter la sant� et la nutrition des nouveaux venus comme des indig�nes. La malnutrition qui frappe les communaut�s vivant dans la for�t tropicale est tr�s �troitement li�e aux maladies infectieuses ou transport�es par un vecteur. Ainsi, les fermiers qui viennent s�installer dans la r�gion de l�Amazone accusent une incidence disproportionn�e de malaria, car ils n�ont pas d�velopp� l�immunisation naturelle des populations install�es dans cette r�gion depuis longtemps (Vosti et Loker, 1990).
3.15 En r�sum�, les risques nutritionnels affectent de fa�on multiple les diff�rents groupes de m�nages et leurs membres (tableau 11). On observe les carences nutritionnelles les plus graves lorsque les membres particuli�rement vuln�rables du m�nage sont frapp�s par la mat�rialisation simultan�e de deux ou plusieurs risques, pouvant se conjuguer de bien des mani�res. Si l�on veut am�liorer la nutrition, il faut identifier les risques sp�cifiques � une situation et mettre au point des moyens efficaces pour les r�duire.
4.1 C'est le constat d'une situation nutritionnelle insatisfaisante et des risques que r�serve l'avenir qui ont incit� � la convocation du Sommet mondial de l'alimentation de 1996. Il para�t donc naturel de se demander quelles ont �t� les initiatives internationales prises, dans le pass�, en faveur de la s�curit� alimentaire et du bien-�tre nutritionnel, et quels enseignements en ont �t� tir�s. Cette approche nous permet de fonder les nouvelles initiatives sur un acquis de savoir-faire, de mettre � profit l'exp�rience institutionnelle en mati�re d'am�lioration de la nutrition, et de nous assurer que les engagements pris ant�rieurement dans ce domaine sont respect�s et prolong�s.
4.2 L�importance de l��limination de la faim et de la malnutrition, et la n�cessit� d�am�liorer la s�curit� alimentaire de tous, ont �t� proclam�es � l�occasion de nombreuses conf�rences et initiatives. Au cours des 50 derni�res ann�es, ces initiatives internationales ont pris la forme d�un ensemble coh�rent de propositions de mesures � l��chelle internationale. Nous donnons en annexe un bref aper�u des principaux objectifs touchant � la nutrition retenus dans le cadre d�importantes conf�rences et initiatives.
4.3 Alors que nombre d�initiatives ant�rieures avaient pour th�mes la faim et la malnutrition, le souci d�am�liorer la situation ne se traduisait pas toujours par des mesures concr�tes. De plus, toutes ces initiatives �taient capables de mobiliser l�attention lors de leur lancement, mais, bien trop souvent, il n�y avait gu�re de liens entre les engagements pris en mati�re d�am�lioration nutritionnelle et les m�canismes garantissant un suivi efficace. C�est ainsi que le Sommet mondial pour l�enfance et la CIN ont incit� � l�adoption de m�canismes de suivi des objectifs nutritionnels contenus dans certains plans d�action ant�rieurs. M�me s�il demeure possible de renforcer encore de tels m�canismes, il est int�ressant de remarquer que, de mani�re g�n�rale, les organisations internationales concern�es, et en particulier l�UNICEF (1994a), la FAO (1995a) et l�OMS (1995b), ainsi que les organisations non gouvernementales (ONG), tendent aujourd�hui � adopter des processus de suivi plus concrets en ce qui concerne les initiatives internationales tourn�es vers la nutrition.
4.4 Au cours des cinq derni�res d�cennies, un certain nombre de conf�rences scientifiques et orient�es vers l�action que nous ne mentionnons pas ici, ont, sans aucun doute, influenc� les principes et l�orientation technique des manifestations majeures d�crites plus haut. Il faut �galement citer, en rapport avec la pauvret� et la nutrition, les initiatives internationales portant sur les aspects sociaux (Sommet social de 1995, Copenhague, Danemark), sur les droits de la femme (Conf�rence mondiale sur les femmes de 1995, Beijing, Chine) et le Programme Action 21 de la Conf�rence des Nations Unies sur l�environnement et le d�veloppement (Rio de Janeiro, Br�sil, 1992).
4.5 A l��vidence, la masse de connaissances � mettre au service de mesures appropri�es destin�es � �liminer la faim et la malnutrition a consid�rablement augment� au cours des cinq derni�res d�cennies. En outre, l�attention se concentre aujourd�hui davantage sur le bien-�tre nutritionnel des g�n�rations futures, les besoins alimentaires d�une population mondiale croissante et les solutions aux probl�mes alimentaires respectueuses de l�environnement. On comprend mieux aujourd�hui l�importance de l��laboration d�un cadre appropri� de politiques, le r�le essentiel des ressources humaines et le r�le jou� par les droits de la personne humaine dans l�am�lioration nutritionnelle, mais il reste � int�grer ces �l�ments aux priorit�s adopt�es � l��chelle mondiale. Cependant, m�me si l�on reconna�t, de mani�re g�n�rale, la complexit� des probl�mes de nutrition, il importe que soit renouvel� l�engagement de prendre des mesures pr�sentant l�envergure requise.
4.6 Il n'existe pas un ensemble g�n�ral de politiques repr�sentant une solution optimale et incontest�e au probl�me du bien-�tre nutritionnel de tous, mais plut�t un vaste �ventail d'options parmi lesquelles choisir, une fois que l'on aura satisfait � un certain nombre de pr�alables. Les politiques et les programmes propos�s ci-dessous sont structur�s en fonction de la description, propos�e pr�c�demment, des principales causes de la malnutrition.
4.7 Il est n�cessaire, lorsqu�on op�re des choix de garder � l�esprit les caract�ristiques suivantes du probl�me de la nutrition: son incidence et sa gravit�, sa dur�e, � court ou � long terme, son lien �ventuel avec une carence sp�cifique ou sa nature g�n�rale, sa r�partition, afin de d�terminer si elle frappe un groupe sp�cifique de population ou si elle se propage plus largement, ainsi que l�importance relative des diff�rents facteurs d�terminants. Semblables informations sont n�cessaires pour guider les responsables politiques et �valuer les actions entreprises pour lesquelles des syst�mes courants de surveillance de l�alimentation et de la nutrition doivent �tre mis au point. Il faut �galement tenir compte des capacit�s institutionnelles des pays impliqu�s et des co�ts �conomiques, politiques et budg�taires des diff�rentes options.
4.8 Les participants � la CIN ont d�battu de ces questions dans le cadre des th�mes �int�grer dans les politiques et programmes de d�veloppement des objectifs, des consid�rations et des �l�ments d�ordre nutritionnel�, ��valuer, analyser et suivre les interventions nutritionnelles�, et �am�liorer la s�curit� alimentaire des m�nages�, lors de l�examen des strat�gies et des mesures g�n�ralement adopt�es pour am�liorer la nutrition. Les mesures d�battues allaient des politiques macro�conomiques, c�est-�-dire la correction de politiques erron�es, jusqu�aux politiques agricoles ou celles concernant le revenu, en passant par des interventions nutritionnelles sp�cifiques. Certaines de ces mesures ne sont pas des options mais des pr�alables � un d�veloppement destin� � r�duire la pauvret�. Elles constituent le cadre macro�conomique appropri� et, dans les pays � faible revenu, elles supposent une prise en compte ad�quate du r�le de l�agriculture.
4.9 Les effets, sur la longue dur�e, des strat�gies alternatives de d�veloppement en mati�re de croissance et de r�duction de la pauvret� ont d�montr� le r�le d�terminant des choix strat�giques. Parall�lement, les effets � court terme, sur les populations pauvres, des ajustements structurels malheureux op�r�s au cours des ann�es 80 dans des pays � faible revenu, ont mis en relief la pertinence des politiques macro�conomiques en mati�re de nutrition (Pinstrup-Andersen, 1990). C�est pourquoi il y a lieu de consid�rer non seulement les effets des politiques alimentaires et agricoles, mais aussi les initiatives non agricoles et celles int�ressant l�ensemble de l��conomie et leurs r�percussions sur les besoins nutritionnels.
4.10 Ainsi que l�ont d�montr� les exp�riences de pays et d�Etats comme la Chine, Sri Lanka, le Costa Rica et l�Etat de K�rala en Inde (Dr�ze et Sen, 1989), entre autres, des mesures d�envergure nationale adopt�es par les pouvoirs publics peuvent contribuer de fa�on consid�rable � r�duire la malnutrition, m�me dans les pays dont le revenu par habitant est faible. Nous pr�cisons cependant que la durabilit� des mesures d�ordre public est tributaire d�un contexte macro�conomique et commercial favorable � la croissance. M�me si le financement public est justifi�, il n�est pas toujours n�cessaire de faire appel � des organismes publics pour la fourniture de biens et de services li�s � la nutrition. Il importe que soit fix�e une division appropri�e des responsabilit�s et des fonctions entre les diff�rents niveaux de gouvernement, les ONG et le march� (Streeten, 1994), et que soit aussi bien d�finie la compl�mentarit� entre les forces du march� et les interventions d�coulant de la planification nationale. On ne manquera pas, tout au long du processus, d�encourager la coop�ration entre secteur public et secteur priv�. Pour atteindre ces objectifs nutritionnels, il importe de ne pas n�gliger ces consid�rations strat�giques.
4.11 La disponibilit� de nourriture � l��chelle r�gionale, nationale ou locale est essentiellement d�termin�e par la production alimentaire, le stockage et les �changes � chacun de ces niveaux. Des fluctuations atteignant l�un quelconque de ces param�tres risquent de contribuer � l�ins�curit� alimentaire. A titre d�exemple, on a d�montr� que lorsque la production c�r�ali�re fluctue de mani�re plus marqu�e aux niveaux r�gional et national, la consommation alimentaire s�en trouve sensiblement affect�e. Les pouvoirs publics peuvent att�nuer ces fluctuations, mais leur capacit� d�intervention d�pend du degr� de d�veloppement des pays concern�s (Sahn et von Braun, 1989). A court terme, tout au moins, les augmentations que l�on observe actuellement (1995-1996) dans les prix des denr�es alimentaires ont des effets n�gatifs sur des populations pauvres des pays � faible revenu et � d�ficit vivrier. Compte tenu de l��volution rapide des contextes commerciaux aux niveaux international et r�gional, les mesures concernant l�entreposage et le commerce des denr�es alimentaires n�cessitent une attention renouvel�e. Bien souvent, les responsables sont fermement convaincus que, pour garantir la s�curit� alimentaire, il faut organiser un certain entreposage sous le contr�le des pouvoirs publics. Si l�on veut parvenir � la stabilisation souhait�e en mati�re de disponibilit� et de prix des aliments, il faut tenir compte de param�tres importants pour la d�finition des besoins en entreposage d�un pays, tels que les fluctuations de la production, l�infrastructure, l�emplacement et la diversification sectorielle. Il faut aussi que les efforts de stabilisation soient en harmonie avec les risques sp�cifiques � un pays en mati�re de production (par exemple, vuln�rabilit� des zones agricoles aux s�cheresses et aux inondations) et en mati�re d��changes commerciaux (pays enclav�s, par exemple) (Sarris,1985). Il faut �galement tenir compte des co�ts administratifs et d�opportunit� des ressources investies dans la stabilisation14. Les avantages se manifestent sous forme de stabilisation du climat des investissements et d�une att�nuation des difficult�s d�adaptation � court terme des m�nages15. Cependant certaines observations militent en faveur d�une approche minimaliste en mati�re de stabilisation des prix (Knudsen et Nash, 1990).
4.12 Les fluctuations du potentiel d�importation de denr�es alimentaires d�un pays � lequel d�pend des recettes d�exportation, des prix mondiaux, mais aussi, entre autres variables, des obligations li�es au service de la dette � contribuent �galement � l�ins�curit� alimentaire. Pour bon nombre de pays, d�ficitaires au plan vivrier comme au plan des devises, le recours au march� international reste limit�, et l�aide alimentaire repr�sente une forme importante d�acc�s � la nourriture. En outre, les variations saisonni�res de la production et l�augmentation, �galement saisonni�re, des prix des denr�es alimentaires, peuvent entra�ner une d�gradation de la situation nutritionnelle (Sahn, 1989). Cette question rel�ve de la politique nationale.
4.13 L�offre et la demande d�aide alimentaire au niveau mondial, de m�me que l�allocation de cette aide entre les pays, sont r�gies par des facteurs complexes, qui ne comprennent pas seulement les forces du march� et les efforts caritatifs, mais �galement les facteurs politiques. Bien qu�ayant jou� un r�le critique pour certains pays en p�riode de crise, l�aide alimentaire n�est pas une source fiable de nourriture pour les pays � faible revenu et � d�ficit vivrier; on a observ�, en effet, qu�en p�riode d�augmentation des prix mondiaux, la fourniture d�aide alimentaire par des donateurs diminue g�n�ralement. Cette corr�lation a �t� confirm�e une fois de plus au milieu des ann�es 90, lorsque les politiques des pays industrialis�s ont chang� de cap alors m�me que la demande augmentait (en Asie orientale, par exemple) et que l�offre baissait (Europe orientale, notamment); les prix des c�r�ales sur les march�s internationaux enregistr�rent alors une augmentation de 30 � 40 pour cent, et en 1995, les livraisons d�aide alimentaire n�atteignaient plus que la moiti� des niveaux record de 1992-1993 (FAO,1995b)16.
4.14 Les programmes dont l�objet est d�augmenter la production et la productivit� agricole vivri�re et non vivri�re ont des effets favorables sur la nutrition lorsqu�ils r�ussissent, de fa�on directe ou indirecte, � accro�tre ou � stabiliser les revenus r�els ainsi que la consommation alimentaire des personnes confront�es � l�ins�curit� alimentaire. L�incidence de ces programmes est m�diatis�e par l��volution des prix et des revenus li�e � la production alimentaire, et elle est influenc�e par les politiques commerciales, analys�es dans d�autres documents techniques du SMA17. En stimulant la production agricole, on stimule la croissance �conomique globale et le d�veloppement, en particulier dans les pays dont l��conomie est fortement tributaire de l�agriculture. Dans ces pays, le d�veloppement agricole et rural est un propulseur du d�veloppement �conomique durable et de la r�duction de la pauvret�. Mais cela ne veut pas forc�ment dire qu�une plus grande autosuffisance alimentaire devrait �tre le but, quoique l�on reconnaisse que l�augmentation de l�offre a un double effet sur la s�curit� alimentaire, gr�ce � la r�duction des prix: les m�nages ruraux et urbains peuvent mieux se nourrir; le nombre des emplois augmente.
4.15 Les innovations techniques appropri�es, dans le domaine agricole, r�duisent le co�t unitaire de production et de commercialisation et entra�nent des gains �conomiques gr�ce � une stimulation de la croissance �conomique, une am�lioration des perspectives d�emploi, et un accroissement de l�offre de denr�es alimentaires; tous ces facteurs profitent aux producteurs comme aux consommateurs des cat�gories pauvres et contribuent � r�duire l�ins�curit� alimentaire. La r�volution verte, � savoir l�ensemble de techniques appliqu�es � la culture du riz et du bl� et qui portent sur l�irrigation, les semences, les engrais et la lutte contre les ravageurs, a notamment entra�n� une augmentation de la production, non seulement au niveau des exploitations agricoles mais �galement des autres entreprises, tout en stimulant l�emploi et les salaires, contribuant ainsi � la s�curit� alimentaire (Hazell et Ramasamy, 1991)18. Ce sont les organisations et les r�seaux de recherche, aux niveaux national et international, qui repr�sentent les �l�ments moteurs des innovations techniques n�cessaires � une croissance agricole durable permettant de mettre les quantit�s de nourriture n�cessaires � la disposition d�une population mondiale en expansion. Si l�on veut atteindre, de fa�on indirecte, les objectifs nutritionnels fix�s, il est n�cessaire de relancer les actions entreprises afin d�acc�l�rer l�innovation technologique dans de nombreuses r�gions � pr�dominance de petites exploitations19.
4.16 La prise en consid�ration des aspects nutritionnels lors de l��laboration des politiques et programmes visant � encourager la production peut permettre d��viter les effets n�gatifs �voqu�s plus haut tout en favorisant le bien-�tre nutritionnel. Ainsi, la recherche portant sur les esp�ces et vari�t�s v�g�tales peut avoir des effets favorables sur la qualit� de l�alimentation, notamment lorsqu�on arrive � incorporer des micronutriments faisant d�faut � certaines cultures de base (Bouis, 1995), ou lorsqu�on am�liore l�aptitude � l�entreposage de certains produits. La recherche agricole � l��chelle internationale joue �galement un r�le clef dans ce domaine et son financement, dans des proportions ad�quates, doit constituer une priorit� des efforts consentis pour la s�curit� alimentaire et l�am�lioration nutritionnelle. Pendant des d�cennies encore, l��laboration et la mise � l��preuve de technologies adapt�es aux diverses situations agro�cologiques repr�senteront une t�che majeure. Il importe, en effet, d�att�nuer les risques que repr�sentent l��volution technologique pour la sant� et la nutrition, et cet objectif ouvre de larges perspectives de collaboration entre les sp�cialistes et les chercheurs en mati�re d�agriculture, de sant� publique et de nutrition, afin d�am�liorer la conception des programmes agricoles.
4.17 La commercialisation des produits agricoles contribue fr�quemment � am�liorer la s�curit� alimentaire car elle permet d�accro�tre les revenus et de cr�er des emplois. En r�gle g�n�rale, les augmentations de revenus r�els provenant de cette commercialisation se traduisent par une am�lioration de la consommation alimentaire et par un plus grand bien-�tre nutritionnel. Les b�n�ficiaires peuvent acheter davantage de nourriture tout en travaillant moins, ce qui leur permet de mieux s�occuper de leurs enfants, d�am�liorer les conditions sanitaires de leurs logements et de leurs quartiers, r�duisant ainsi leur vuln�rabilit� aux maladies infectieuses, d�am�liorer leur approvisionnement en eau du point de vue quantitatif et qualitatif, et de renforcer la demande effective de soins pr�ventifs et curatifs. De plus, lorsque les ressources du m�nage sont moins pr�caires, ses membres sont mieux plac�s pour mettre en �uvre un savoir-faire pr�existant ou fra�chement acquis en mati�re d�am�lioration nutritionnelle. On observe, en tout cas, une corr�lation, entre l�augmentation du revenu et une am�lioration sensible de la nutrition20.
4.18 Il est fr�quent que les petits exploitants s�efforcent de maintenir, parall�lement � leur nouvelle production commerciale, une certaine production vivri�re de subsistance, et cela en d�pit des rendements sup�rieurs que permettent les cultures de rente. Les plus pauvres sont contraints, plus que tous les autres, � une telle strat�gie. Compte tenu de leur situation �conomique pr�caire et de l�inexistence d�un march� de l�assurance, le maintien d�une production alimentaire pour satisfaire leurs propres besoins peut �tre une strat�gie judicieuse. La politique agricole peut leur venir en aide en encourageant des am�liorations technologiques de la production et de la manutention des aliments de subsistance, par exemple en am�liorant la transformation aux fins de la conservation des produits, en particulier ceux qui ne sont que saisonni�rement disponibles. En outre, une telle politique donne de nouvelles perspectives de sp�cialisation au niveau de l�exploitation, mais aussi de gains suppl�mentaires pour les petits exploitants d�sireux de s�int�grer au circuit des �changes commerciaux.
4.19 Le d�veloppement des march�s financiers et des assurances repr�senterait un volet compl�mentaire, dont la rentabilit� serait garantie par les gains provenant de la commercialisation. Il est essentiel d�appliquer des politiques tourn�es vers la recherche et la divulgation, et s�appuyant sur l�offre d�intrants tels que les semences et les fertilisants destin�s aux cultures de subsistance, si l�on veut mettre sur pied une strat�gie de commercialisation viable et r�pondant aux besoins des petits exploitants. Les services de divulgation des programmes de commercialisation visant notamment � promouvoir de nouvelles esp�ces de cultures ou de b�tail, peuvent �viter aux exploitants certaines erreurs de gestion. Il faudra, � ce propos, mettre en relief de fa�on explicite l�importance des femmes, car celles-ci ne participent g�n�ralement pas aux initiatives li�es � la commercialisation lorsque ces derni�res ne sont pas sp�cialement am�nag�es � cet effet.
4.20 Dans certains cas, cependant, les cat�gories pauvres n�ont pas tir� avantage de l��volution technologique ou de la commercialisation, et en ont m�me p�ti. Ces cons�quences n�gatives �taient alors, en g�n�ral, attribuables � des politiques erron�es telles que l��viction des fermiers locataires21, la production forc�e, ou l�achat impos�. Il demeure important, en g�n�ral, de rectifier ces politiques; mais il ne s�agit pas d�un probl�me sp�cifique � la commercialisation dans le secteur agricole.
4.21 Alors que les m�nages propri�taires terriens sont souvent les principaux b�n�ficiaires des effets directs de la croissance agricole sur les revenus, les petits exploitants ou m�me les paysans sans terre en situation de pr�carit� alimentaire sont souvent les mieux plac�s pour tirer profit des effets indirects sur la cr�ation d�emplois ext�rieurs � la ferme. De tels effets sont encourag�s par le d�veloppement des infrastructures (Ahmed et Hossain, 1990). Le d�veloppement de l�infrastructure rurale repr�sente �galement une priorit� pour la s�curit� alimentaire ou la nutrition, car il constitue une contribution pr�alable � un fonctionnement efficace des services ruraux. Il para�t donc n�cessaire de chercher � r�duire les co�ts �lev�s de commercialisation gr�ce � une am�lioration de l�infrastructure (comme dans la majeure partie de l�Afrique subsaharienne).
4.22 La malnutrition peut �tre combattue non seulement au moyen de politiques et de programmes visant � am�liorer la quantit� et la qualit� de la production agricole, mais �galement par des programmes tendant � cr�er et � diversifier l�emploi et les revenus, ainsi qu�� r�duire la pauvret�. Ces programmes, qui stimulent ou stabilisent la demande alimentaire, ne contribuent pas n�cessairement de fa�on directe � l�augmentation de l�offre dans ce domaine. A ce propos, deux types d�initiatives m�ritent d��tre soulign�s: les programmes d�emploi visant � renforcer la s�curit� alimentaire, et les cr�dits aux populations pauvres destin�s � stabiliser la consommation et � favoriser le travail ind�pendant. On peut �galement citer, dans la m�me veine, la promotion des cultures vivri�res et de l��levage de b�tail � l��chelon domestique.
4.23 Les programmes d�emplois tourn�s vers la s�curit� alimentaire permettent de traiter en parall�le trois probl�mes centraux auxquels sont confront�s de nombreux pays � faible revenu: l�ins�curit� alimentaire, la croissance du ch�mage et les carences en mati�re de l�infrastructure (von Braun, 1995). Il convient de donner la priorit� aux investissements publics qui promeuvent le d�veloppement par le biais de programmes d�emploi et, partant, la cr�ation d�actifs productifs tels que les r�seaux routiers et l�am�lioration des ressources en terre et en eau. Les programmes d�emplois peuvent �galement jouer un r�le utile dans la pr�vention de la famine, comme l�a d�montr� le Programme de garantie de l�emploi (EGS) du Maharashtra, en Inde22. Le m�canisme de l�EGS d�clenche �galement la mise en �uvre, au niveau local, de �travaux de secours en cas de n�cessit�; il s�agit de chantiers d�j� existants, qui peuvent �tre relanc�s rapidement au lieu de devoir �tre mis sur pied de toutes pi�ces en cas de crise. Cette m�thode permet �galement de r�agir � des urgences locales, dont l��chelle, trop modeste, n�est pas de nature � d�clencher une action gouvernementale � le�on � garder � l�esprit face aux famines localis�es d�Afrique. Le groupe cibl� par les programmes d�emploi, c�est-�-dire les personnes confront�es � l�ins�curit� alimentaire, est atteint au moyen de plusieurs proc�d�s tels que la politique de fixation des salaires, le ciblage r�gional et la s�lection de cat�gories sp�cifiques de m�nages, par exemple les m�nages d�plac�s, ou de membres des m�nages, par exemple les femmes. Ces derni�res participent fr�quemment et dans une forte proportion aux programmes de travaux publics, qui am�liorent de fa�on sensible la nutrition. Il importe d�attirer l�attention de la communaut� internationale sur le potentiel que repr�sente ce type de programme et sur la possibilit� de profiter du savoir-faire acquis dans ce domaine par de nombreux pays au cours des ann�es 80 et 90.
4.24 L�octroi de cr�dits destin�s � stabiliser la consommation et � favoriser le travail ind�pendant est �galement un m�canisme de plus en plus utilis� pour l�am�lioration de la nutrition dans les �conomies rurales en cours de diversification de nombreux pays � faible et � moyen revenu. Face � ce double objectif, les programmes qui ont rencontr� le plus de succ�s sont ceux qui conjuguent les cr�dits sur petite �chelle avec une campagne de motivation du groupe, des conseils techniques et une assistance dans la formation d�institutions, � l�exemple de la Grameen Bank du Bangladesh23. L�exp�rience tir�e de programmes analogues dans plusieurs pays a d�montr�, entre temps, qu�un meilleur acc�s des populations pauvres aux services financiers est de nature � stabiliser de fa�on substantielle la consommation alimentaire � � l��chelon saisonnier ou sur plusieurs ann�es � am�liorant ainsi la nutrition. Cette derni�re se trouve �galement am�lior�e du fait que les cat�gories pauvres peuvent davantage b�n�ficier, lorsque le besoin s�en pr�sente (Zeller, 1995), de services pr�sentant un lien avec la nutrition, tels que les services de sant� et les m�dicaments. Il faudra toutefois travailler davantage � mettre au point des filets de s�curit� pour le remboursement du cr�dit, sp�cialement � l�intention des agriculteurs les plus pauvres. Cela parce que les mauvaises r�coltes imputables � la s�cheresse ou � l�irr�gularit� des pluies ne sont pas rares dans certaines parties de l�Afrique, le r�sultat final �tant que les agriculteurs les plus pauvres ne sont pas en mesure de rembourser les pr�ts qui leur ont �t� faits et qu�ils peuvent se retrouver dans une plus grande ins�curit� alimentaire qu�auparavant. Il y a lieu de mentionner, entre autres initiatives, celle de la Banque mondiale visant � renforcer, � l��chelle internationale, les r�seaux de cr�dit destin�s aux populations pauvres (Binswanger et Landell-Mills, 1995).
4.25 Les transferts de revenu li�s � l�alimentation repr�sentent un moyen largement utilis� pour am�liorer la nutrition. Nous examinerons ici deux types de programmes: les subventions visant � r�duire les prix des aliments et la distribution de rations, et les bons d�alimentation.
4.26 Il n�est pas possible de proc�der � une �valuation pr�cise, au plan �conomique, des syst�mes de distribution de denr�es alimentaires en s�appuyant sur des donn�es provenant des co�ts et des avantages observ�s durant les ann�es normales. Dans les pays et dans les r�gions expos�s � des p�nuries graves et fr�quentes, la pr�sence d�un r�seau public de distribution permet d�acheminer des approvisionnements d�urgence vers les r�gions et les m�nages en difficult�, afin d�am�liorer la s�curit� alimentaire des groupes les plus d�munis. On consid�re que c�est gr�ce � la pr�sence de tels r�seaux de distribution de denr�es alimentaires que l�on a r�ussi, en Inde, � pr�server la s�curit� alimentaire et les niveaux nutritionnels des personnes les plus pauvres en p�riode de s�cheresse (Dr�ze, 1988). Or, il n�est pas facile de remobiliser de tels r�seaux une fois qu�ils ont �t� d�mantel�s. Il existe cependant une solution de rechange, �conomiquement rentable mais plus exigeante au plan de l�organisation: un syst�me de programmes de cr�ation d�emplois et d�aide directe � la nutrition, tel que nous le d�crivons ci-dessous.
4.27 C�est lorsqu�ils sont organis�s de mani�re � faire appel � la participation active des personnes les plus touch�es que les programmes d�aide directe � la nutrition, tourn�s vers les probl�mes imm�diats, donnent leurs meilleurs r�sultats. Ces mesures visent � combler les lacunes en mati�re d�acc�s � la nourriture, par le biais, notamment, de compl�ments alimentaires ou de programmes cibl�s d�alimentation, mais ils cherchent aussi � combattre certaines carences nutritives sp�cifiques, dans le domaine des micronutriments par exemple, � diffuser des connaissances en mati�re de nutrition et de comportement, � renforcer les liens d�ficients entre la nutrition et la sant�, par la promotion des programmes de soins et d�hygi�ne ou � associer tous ces �l�ments au sein de programmes int�gr�s de nutrition. Au cours de la derni�re d�cennie, on a am�lior� de fa�on consid�rable l�efficacit� des interventions directes en mati�re nutritionnelle. Il faut �galement souligner les perspectives prometteuses d�un renforcement suppl�mentaire des meilleures m�thodes mises en �uvre par ces programmes, et leur potentiel d�am�lioration rapide de la situation nutritionnelle.
4.28 Ces programmes sont g�n�ralement destin�s aux personnes particuli�rement vuln�rables sur le plan nutritionnel, en g�n�ral les enfants ou les femmes en �ge de procr�er, appartenant aux cat�gories d�favoris�es. Le ciblage des programmes d�alimentation et de distribution d�aliments se fait selon diff�rentes m�thodes, parmi lesquelles les tests de moyens et les tests de vuln�rabilit�24. Les programmes d�alimentation sont souvent mieux accept�s, aux plans politique et social, s�agissant de mise en �uvre de programmes cibl�s de transferts de revenus. Les r�sultats obtenus avec de tels programmes pour ce qui est de l�am�lioration de la nutrition sont toutefois divers.
4.29 Les programmes de distribution d�aliments dans les �coles ont un double objet, la participation scolaire et les probl�mes nutritionnels des �coliers. De nombreux pays ont des programmes efficaces dans ce domaine, qu�ils associent � l��ducation nutritionnelle et � l�enseignement du jardinage � l��cole. Dans les pays � faible revenu, o� l�on ne r�ussit pas � scolariser tous les enfants, ces programmes d�alimentation en milieu scolaire risquent de ne pas atteindre les plus n�cessiteux. Il demeure que le Food for Education Programme du Bangladesh, par exemple, avait montr� que de telles initiatives contribuaient grandement � renforcer le taux d�inscription scolaire, � promouvoir l�assiduit� et � r�duire les taux d�abandon, contribuant ainsi, par le biais de l��ducation, � l�obtention d�effets nutritionnels � long terme; en outre, ces programmes peuvent constituer un m�canisme extr�mement �conomique de transferts cibl�s ax�s sur l�alimentation (Ahmed et Billah, 1994).
4.30 Au cours de la derni�re d�cennie, des mesures de grande envergure ont �t� prises, avec succ�s, afin de pallier les carences en micronutriments. Les initiatives coordonn�es � l��chelle internationale qui ont �t� prises dans ce domaine ont consid�rablement modifi� la situation. Il demeure toutefois n�cessaire d�intensifier les efforts pour surmonter les carences en micronutriments et leurs effets nuisibles. Il faut, pour cela, entreprendre une s�rie d�actions concert�es pour garantir la disponibilit� d�aliments riches en micronutriments, la promotion de techniques ad�quates de transformation et de pr�servation, la divulgation de connaissances en mati�re d�alimentation et de nutrition, la diversification des r�gimes alimentaires par la production et la consommation d�aliments riches en micronutriments, l�adoption de mesures l�gislatives pour la fortification des aliments et l�incorporation de compl�ments et appliquer des mesures appropri�es de sant� publique (FAO/OMS, 1992a). M�me si l�on tend � se laisser convaincre, par exemple, que les carences en vitamine A doivent �tre combattues, � court terme, par la fortification et, � long terme, par une am�lioration du r�gime alimentaire, le choix effectif des options et de leur calendrier d�application d�pend �troitement de la situation de la population, de m�me que du potentiel d�organisation et des caract�ristiques des circuits �conomiques de l�alimentation. Une initiative tr�s largement couronn�e de succ�s a �t� mise � l��chelle mondiale pour r�duire la carence en iode par l�iodation du sel.
4.31 Dans le domaine des micronutriments, plusieurs organismes ont fix� des objectifs sp�cifiques. Pour atteindre ces derniers, il faut insister sur les �l�ments suivants. En premier lieu, entreprendre des campagnes de persuasion au niveau des politiques, mais aussi du milieu social, et lancer des campagnes publicitaires commerciales afin d�augmenter la demande des consommateurs � l��gard des aliments riches en micronutriments ou fortifi�s. S�agissant de la fortification des aliments, il faut encourager le secteur priv� � s�y conformer au moyen d�incitations suppl�mentaires, tout en �difiant un cadre r�glementaire garant de la mise en vigueur. Il faut �galement, en coop�ration avec l�industrie pharmaceutique, am�liorer l�efficacit� et le champ d�action des livraisons dans ce secteur. Enfin, il importe d��laborer et de g�rer des programmes d�centralis�s et durables tout en renfor�ant la capacit� institutionnelle et les ressources humaines. De tels efforts devront �tre suivis au moyen de syst�mes d�information de gestion (Banque mondiale, 1994).
4.32 La promotion de meilleures habitudes alimentaires et une attitude positive � l��gard de la sant� repr�sentent l�une des t�ches essentielles de l�effort global entrepris pour am�liorer la nutrition. Les populations doivent non seulement avoir acc�s � un large �ventail de nourriture saine et accessible; mais il faut �galement les informer avec pr�cision sur ce qui constitue un r�gime sain et sur la fa�on de satisfaire les besoins nutritionnels. Au-del� de l��ducation proprement dite, les strat�gies de promotion de r�gimes alimentaires sains doivent cr�er les motivations n�cessaires et offrir aux populations la possibilit� de modifier leur comportement, tout en tenant compte des pr�f�rences, du mode de vie et des contraintes de temps propres � chacun (FAO/OMS, 1992d).
4.33 Dans certains pays, des lignes directrices concernant le r�gime alimentaire ont �t� �mises par les pouvoirs publics et des organismes priv�s. En outre, des �tablissements scientifiques ont fix� des normes alimentaires � l�intention de la population. En r�gle g�n�rale, ces normes visent � aider � �duquer la population en mati�re de bonnes pratiques alimentaires, et � pr�ciser la quantit� et la nature d�une alimentation destin�e � �viter les carences et � r�pondre aux besoins de la quasi-totalit� de la population. Ces param�tres ont �t� largement utilis�s pour la planification et l�acquisition des stocks d�aliments n�cessaires aux sous-groupes de populations, mais aussi pour pr�ciser les normes r�gissant les programmes d�alimentation et pour servir de base � l��tiquetage des produits alimentaires. Plus r�cemment, les pouvoirs publics et les organismes priv�s ont �mis des lignes directrices inspir�es par une pr�occupation croissante � l��gard des maladies non contagieuses li�es � l�alimentation. On y trouve des conseils, adapt�s � la population du pays, sur la fa�on de s�lectionner un r�gime �quilibr� et on y encourage un mode de vie propice � une bonne sant�, y compris l�allaitement. Ces lignes directrices di�t�tiques atteignent leur utilit� maximale lorsqu�elles servent de base et fournissent les principes directeurs � l�ensemble des messages �ducatifs ayant pour th�me la nutrition et largement diffus�s � travers le public.
4.34 L��tiquetage des produits alimentaires et les indications nutritionnelles peuvent aider les consommateurs � se nourrir de fa�on saine. Les informations concernant le contenu nutritif figurant sur l��tiquette sont de nature � favoriser l�application des lignes directrices di�t�tiques. La Commission du Codex alimentarius FAO/OMS a �labor�, � l�intention des gouvernements, des lignes directrices concernant l��tiquetage des produits alimentaires qui s�appliquent � tous les aliments pr�emball�s et aux aliments destin�s � la restauration. Le r�le de l�industrie alimentaire, pour ce qui est de la promotion de r�gimes propices � une bonne sant�, r�side principalement dans l��laboration et la commercialisation d�un �ventail de produits sains et de bonne qualit� pouvant contribuer � une saine alimentation (FAO/OMS, 1992f).
4.35 La promotion de l�allaitement et de meilleures pratiques de sevrage rev�t une importance fondamentale. L��ducation alimentaire et nutritionnelle fait partie des initiatives � prendre � cet effet: elle ne se limite pas � divulguer des donn�es, elle doit aussi modifier les comportements (Berg, 1987). Dans certains milieux, les familles sont apparemment bien nourries, mais, � l�examen, des carences individuelles apparaissent. La malnutrition peut alors avoir pour cause la mauvaise r�partition de la nourriture au sein de la famille, des pratiques erron�es en mati�re d�allaitement, la mauvaise alimentation des enfants, la fr�quence insuffisante des prises d�aliments, la diarrh�e ou autres maladies, ainsi que la mani�re dont on s�occupe des enfants; bon nombre de ces facteurs peuvent �tre modifi�s par un changement de comportement. Le Plan d�action pour la nutrition de la CIN (FAO/OMS, 1992a) r�clame la mise en �uvre de programmes d��ducation nutritionnelle ax�s sur la communaut�. Entre temps, de telles initiatives ont d�montr� leur rentabilit� et semblent avoir un impact extr�mement prometteur25. La FAO a lanc� toute une s�rie d�activit�s pour favoriser l��ducation nutritionnelle � tous les niveaux, notamment les mass-m�dias, les �coles primaires et secondaires, les communaut�s dont on encourage la participation, et la formation sup�rieure. L�initiative �Profitons au mieux de notre nourriture� (FAO, 1994b) s�inscrit dans cet effort. Il importe, toutefois, de garder � l�esprit les limites de ces campagnes de sensibilisation. En effet, de nombreux changements de comportement hautement souhaitables n�cessitent, outre le temps, les ressources n�cessaires de la part des m�nages cibl�s. C�est pourquoi l��ducation en mati�re nutritionnelle a toutes les chances d��tre plus efficace si elle est associ�e � des mesures visant � r�duire la pauvret� et � am�liorer la nutrition. Une attention accrue � la nutrition des jeunes enfants est aussi un �l�ment de la Baby-Friendly Hospital Initiative, OMS/UNICEF, � laquelle participent 4 000 h�pitaux du monde entier.
4.36 Une nutrition ad�quate suppose un approvisionnement suffisant en nourriture de m�me qu�en eau saine et de qualit�. La nourriture doit �tre disponible en quantit� suffisante, �tre vari�e et offrir un contenu nutritif appropri�. Elle ne doit pas contenir d�agents chimiques, biologiques et autres risquant de mettre en danger la sant� du consommateur et elle doit �tre pr�sent�e de fa�on honn�te. Le contr�le de la salubrit� et de la qualit� garantit que les caract�ristiques exig�es des aliments sont conserv�es tout au long du cycle de production, manutention, transformation, emballage, distribution et pr�paration. C�est ainsi que l�on obtient des r�gimes alimentaires sains, une r�duction des gaspillages et une promotion des �changes commerciaux int�rieurs et internationaux de denr�es alimentaires. La notion de qualit� englobe les aspects li�s � la composition des aliments et � leur salubrit�. Les consommateurs disposent d�un droit � un approvisionnement en nourriture saine et de bonne qualit� et l�exercice de ce droit suppose, de la part des pouvoirs publics comme de l�industrie alimentaire, que soient prises les mesures n�cessaires. Il importe de mettre sur pied des programmes efficaces de contr�le de la qualit� et de la salubrit� des aliments, pouvant englober toute une s�rie de mesures, telles que les lois, les r�glements et les normes, de m�me que des syst�mes d�inspection efficaces et de surveillance de la conformit� incluant des analyses en laboratoire.
4.37 Etant donn� que la nutrition repr�sente un probl�me multiforme, il semble logique d��laborer des politiques et des programmes �galement polymorphes, de mani�re � atteindre efficacement l�objectif de l�am�lioration nutritionnelle. L�une des m�thodes les plus efficaces, lorsqu�on souhaite identifier et cibler les interventions n�cessaires au plan de la nutrition et de la sant�, consiste � suivre la croissance d�un enfant. C�est pourquoi la CIN a lanc�, en 1992, un appel aux gouvernements pour qu�ils �laborent et qu�ils renforcent les syst�mes de suivi et de promotion de la croissance, ainsi que la surveillance de la nutrition dans les r�seaux de soins m�dicaux primaires. M�me si une telle surveillance, � elle seule, ne modifie pas n�cessairement la situation de sant�, elle permet d�obtenir des informations importantes, pouvant se traduire sur le terrain sous forme de compl�ments nutritifs, de formation nutritionnelle et, au besoin, d�orientation vers les services m�dicaux (UNICEF,1994a; Miller Del Rosso, 1992). C�est ainsi que le Projet de nutrition int�gr�e Tamil Nadu associe la surveillance universelle de la croissance des jeunes enfants et les conseils nutritionnels destin�s � leur m�re, au moyen d�interventions cibl�es (alimentation in situ, bilans m�dicaux, services sanitaires) pour les enfants jug�s � risque au plan nutritionnel26.
4.38 Au cours des ann�es 80, la Tha�lande a r�ussi � r�duire de fa�on spectaculaire l�incidence de la malnutrition (de 15 pour cent � moins de 1 pour cent pour la malnutrition de mod�r�e � s�v�re) gr�ce � l�adoption d�une approche int�gr�e pour r�pondre aux besoins fondamentaux minimaux (Tontisirin, 1994). Ce succ�s est principalement attribuable � des facteurs tels que l�engagement politique, le perfectionnement professionnel du personnel de sant� et la prise de mesures concr�tes visant � cr�er une collaboration et une planification intersectorielles, mais aussi une int�gration de la nutrition aux efforts touchant au domaine social et � la sant�, et la conception de programmes visant � am�liorer la vie des populations en faisant appel aux membres de la collectivit� en tant qu�agents du changement et non pas simplement r�cipiendaires des services gouvernementaux. Il est ind�niable que le succ�s obtenu par la Tha�lande a �galement �t� favoris� par un contexte �conomique propice; il n�en demeure pas moins que l��limination du probl�me pos� par la nutrition �tait consid�r�e comme une condition pr�alable au d�veloppement. Les enseignements tir�s des approches int�gr�es ayant fait leurs preuves en mati�re d�am�lioration nutritionnelle indiquent clairement qu�un traitement efficace du probl�me de la nutrition ne saurait s�accommoder d�approches sectorielles �troites ax�es, de fa�on compartiment�e, sur la sant�, l�agriculture et l��ducation. Parmi les autres enseignements � retenir, il faut citer: la liaison �troite avec les autorit�s locales, qui sont les mieux plac�es pour appr�cier les priorit�s locales et s�y adapter; la planification et la formation int�gr�es des ressources humaines, tout en maintenant une mise en �uvre sectorielle.
4.39 De plus en plus, les situations de crise p�sent sur les ressources allou�es, � l��chelle nationale et internationale, aux actions mentionn�es plus haut en vue d�une s�curit� alimentaire et d�une am�lioration nutritionnelle � caract�re durable. Les crises traduisent souvent un manque de pr�paration et d�engagement politique. Qui dit pr�paration dit engagement des pouvoirs publics � intervenir de fa�on efficace et en temps utile; constitution d�un potentiel institutionnel aux niveaux international, national, r�gional et local; d�tection et diagnostic d�s les premiers signes de malaise; �laboration continue de programmes et de projets; et mise en �uvre d�une intervention de secours en temps de crise. Des progr�s consid�rables ont �t� accomplis depuis les ann�es 70, puisqu�il existe aujourd�hui des syst�mes d�alerte avanc�e efficaces � l��chelle internationale, tels que ceux utilis�s par la FAO, le Comit� permanent inter-Etats de lutte contre la s�cheresse dans le Sahel (CILSS) et l�Agence des Etats-Unis pour le d�veloppement international (USAID).
4.40 Au niveau national, la pr�paration en vue des crises concerne principalement les ph�nom�nes naturels et �conomiques, tandis que pour les conflits arm�s, c�est au niveau international que doivent �tre prises les mesures de pr�vention. Celles �voqu�es plus haut, telles que le stockage, les politiques commerciales et l�allocation de l�aide alimentaire � y compris sous forme de programmes de secours par l�emploi � font partie int�grante des activit�s li�es � l��tat de pr�paration et � la r�action aux crises. Pour �tre efficaces, les secours d�urgence n�cessitent que l�on dispose de nourriture, de capitaux et d�un r�seau institutionnel. Bien souvent, les ONG jouent un r�le essentiel pour combler les lacunes institutionnelles, que ce soit en mettant sur pied des structures parall�les d�intervention d�urgence pour pallier les carences des pouvoirs publics, ou en s�int�grant � l�action des services publics existants.
4.41 Pour �tre efficace, une action de secours n�cessite la cr�ation, par les pouvoirs publics, d�un organisme dot� de pouvoirs ex�cutifs quant aux mesures � prendre en mati�re de manutention et de distribution de la nourriture � y compris l�aide alimentaire d�urgence provenant de donateurs � et op�rant � travers un r�seau ramifi� aux niveaux r�gional, provincial et local. Il importe �galement que soit �tabli un cadre l�gislatif bien structur� pour les op�rations de secours, mettant en �uvre les lignes directrices vis-�-vis desquelles les autorit�s centrales et locales se sont engag�es. Les op�rations de secours pourront s�appuyer sur toutes les activit�s susceptibles de garantir, � court terme, la s�curit� alimentaire des familles, telles que les programmes d�alimentation cibl�s, la distribution d�aliments � l��chelle nationale, l�augmentation des importations de denr�es alimentaires par les circuits commerciaux et l�aide alimentaire, le renforcement des programmes d�emploi et l�acc�s des m�nages au cr�dit. L�exp�rience a d�montr� qu�il est difficile, en situation de crise, de cibler avec pr�cision l�aide octroy�e (Buchanan-Smith, 1990). Or, en l�absence d�une intervention efficace, les crises alimentaires entra�nent, le plus souvent, des probl�mes de sant� et une d�t�rioration au niveau nutritionnel (Dr�ze et Sen, 1989; Webb et von Braun, 1994).
4.42 Il est certain que l'on ne peut vaincre la malnutrition sans mettre � contribution, de fa�on substantielle, les budgets nationaux. Cependant, en laissant perdurer ce ph�nom�ne, on s'expose � des co�ts �conomiques bien plus importants. En effet, la malnutrition repr�sente, sans conteste possible, le plus grave gaspillage, � l'�chelle plan�taire, de ressources �conomiques potentielles � � savoir les vies de millions de personnes offrant un potentiel de production pour le pr�sent et pour l'avenir � et constitue probablement le plus grave �chec en mati�re de fonctionnement des m�canismes du march�. C'est pourquoi tout examen des d�penses � entreprendre doit �galement tenir compte des avantages auxquels il faudrait renoncer comme cons�quence de l'inaction. De ce fait, un examen qui se contenterait de mettre en relief les d�penses budg�taires, sans faire une place l�gitime aux r�sultats b�n�fiques, ne repr�senterait pas la r�alit�.
4.43 Lorsqu�on �tudie les co�ts li�s � l�am�lioration de la nutrition, il faut adopter comme principe directeur l�obtention rapide et durable de r�sultats pr�cis en mati�re nutritionnelle, au moyen d�une panoplie de mesures aux co�ts aussi modestes que possible. Ce souci d�emploi rationnel des ressources devrait conduire � une utilisation optimale d�ensembles int�gr�s de mesures, plut�t qu�� la s�lection d�une m�thode unique et � un recours excessif aux interventions � court terme. De fait, les approches int�gr�es se sont av�r�es particuli�rement rentables lorsqu�on op�re dans un contexte macro�conomique offrant la croissance n�cessaire. Le succ�s d�une telle d�marche d�pend, dans une grande mesure, des investissements consentis par les pouvoirs publics en vue de cr�er un potentiel de recherche et d�organisation pour la mise en �uvre de politiques et de programmes touchant � l�alimentation et � la nutrition.
4.44 L'�tablissement de priorit�s est une t�che complexe, qui ne se limite pas � fixer une hi�rarchie des probl�mes, mais elle suppose �galement que l'on d�termine la mani�re dont seront poursuivis les objectifs en fonction des contraintes existantes. Bien entendu, ces derni�res, ainsi que les moyens employ�s pour les surmonter ou les contourner, doivent �galement faire l'objet d'une action coordonn�e au niveau international comme au niveau national. Il importe, lorsqu'on cherche � r�soudre la question des modalit�s, d'accorder la priorit� n�cessaire au renforcement du potentiel op�rationnel et organisationnel � tous les niveaux des pouvoirs publics, en pr�voyant une participation � l'�chelon communautaire.
4.45 Nous disposons aujourd�hui d�une connaissance suffisamment approfondie des causes de la pr�carit� alimentaire et des probl�mes nutritionnels auxquels sont confront�es les populations pauvres, ainsi que des instruments permettant de faire face, pour nous fixer des objectifs ambitieux et pr�cis en mati�re d�am�lioration de la s�curit� alimentaire et de la nutrition des m�nages, pour les ann�es 90 et au-del�. Il n�est pas inutile de passer en revue, pour les reprendre parfois � notre compte, les objectifs fix�s lors des consultations internationales pr�c�dentes. Nous retiendrons tout particuli�rement les objectifs fix�s, pour l�an 2000, par le Sommet mondial pour l�enfance (1990) et par la CIN (1992).
4.46 Rappelons toutefois que l�adh�sion � des objectifs ambitieux suppose que l�on ait pris les engagements politiques pertinents et que l�on dispose des ressources n�cessaires, au niveau national comme � l��chelle internationale. Quelques interventions au financement modeste ne sauraient conduire � une am�lioration durable de la s�curit� alimentaire et de la nutrition. C�est pourquoi la cr�ation d�un processus de suivi exhaustif et cr�dible � c�est-�-dire ind�pendant � dans la foul�e du Sommet mondial de l�alimentation, pourrait constituer un compl�ment utile aux engagements qui ont �t� pris. Dans ce contexte, on se doit d�envisager la poursuite d�une surveillance ininterrompue des activit�s de suivi, afin d�atteindre les objectifs fix�s dans les plans/programmes d�action des initiatives �voqu�es au paragraphe 4.45.
4.47 Les dimensions, les causes et les cons�quences de la malnutrition varient d�un pays � l�autre, mais aussi � l�int�rieur d�un m�me pays. Dans tous les pays concern�s, le renforcement des capacit�s de diagnostic du probl�me pos� par la s�curit� alimentaire et la nutrition n�est pas seulement l�une des composantes de la solution, mais bel et bien un pr�alable d�une action efficace. Les petits pays trouveront peut-�tre avantage � s�engager dans la coop�ration r�gionale pour r�unir de telles capacit�s.
4.48 Les m�nages pauvres sont, en r�gle g�n�rale, confront�s � un double probl�me: celui de l�ins�curit� � la fois chronique et temporaire, en mati�re d�alimentation et de nutrition; toute solution devra, par cons�quent, faire appel � un �ventail bien �tudi� de mesures correspondant � la nature de ce probl�me. La constitution d�une panoplie de mesures devra s�appuyer sur l��valuation des probl�mes afin d�en d�terminer la nature et les risques pour l�avenir, et sur les instruments disponibles, li�s aux capacit�s institutionnelles. Lorsqu�on �tablit de nouveaux programmes, il est utile de s�inspirer de l�exp�rience acquise dans d�autres pays. Pour obtenir un rendement optimal, il faut g�n�ralement envisager des actions compl�mentaires aux initiatives � vocation nutritionnelle, et notamment la cr�ation d�une infrastructure et de politiques permettant le fonctionnement ad�quat du march� et les �changes commerciaux. Bien souvent, cependant, les r�formes qui s�imposent n�cessitent des remaniements organisationnels, des privatisations et l��tablissement d�un nouveau cadre juridique, toutes mesures qui ne s�accomplissent pas en un jour, m�me si les calendriers de mise en application peuvent varier en fonction des options.
4.49 Comme nous l�avons d�crit plus haut, la pr�carit� alimentaire et nutritionnelle peut avoir des causes diverses, et l�efficacit� des mesures adopt�es pour y faire face, � court et � long termes, peut �tre variable. Ainsi, un programme ayant pour effet d�augmenter les rendements des cultures vivri�res peut ne pas am�liorer la s�curit� alimentaire des m�nages � court terme; � l�inverse, un programme de distribution de nourriture, agissant � court terme, risque de ne pas am�liorer la situation � plus longue �ch�ance. Le tableau 12 �tablit une corr�lation entre l�ins�curit� alimentaire et nutritionnelle et les politiques et programmes dans ce domaine; il prolonge ainsi les analyses des sections pr�c�dentes et met en relief le temps n�cessaire aux effets recherch�s.
4.50 Les efforts visant � am�liorer la nutrition doivent, d�embl�e, tenir compte des relations n�gatives en se renfor�ant mutuellement entre l�ins�curit� alimentaire, la maladie, les mauvaises conditions d�hygi�ne, les carences �ducatives, le manque de soins et la sous-nutrition. En l�absence de telles relations, les progr�s accomplis dans des domaines sp�cifiquement agricoles ou sanitaires n�auront qu�un effet limit� sur l�am�lioration nutritionnelle. Nous signalons, ci-apr�s, des domaines m�ritant une attention particuli�re.
4.51 Le probl�me majeur que pose la faim au sens large du terme, c�est-�-dire les carences que pr�sente l�alimentation des populations pauvres, tant en macronutriments qu�en micronutriments, dans les zones rurales comme dans les r�gions urbaines, n�cessite une attention sans partage de la part des responsables nationaux et de la communaut� mondiale. Il est important de s�attaquer au probl�me dit de la malnutrition mod�r�e car cette derni�re a une forte incidence sur la mortalit� des nouveau-n�s et des enfants (Pelletier et al., 1995). Il faut, comme pr�alable � une action cibl�e dans ce sens, parvenir � une surveillance participative, au niveau communautaire, des probl�mes de nutrition. Les programmes de nutrition bien appliqu�s et administr�s constituent autant de succ�s que l�on peut reproduire avec plus de facilit�. Il importe, pour cela, de s�lectionner des politiques et des programmes conformes aux circonstances des pays concern�s et � la nature sp�cifique du probl�me. Ainsi, il y a lieu d�envisager des initiatives telles que les subventions cibl�es, les programmes d�alimentation, y compris en milieu scolaire, et les interventions concernant les micronutriments, tels que l�am�lioration di�t�tique, la fortification et les compl�ments alimentaires (tableau 12).
4.52 La protection et la promotion des ressources humaines, qu�il s�agisse de l��ducation et, en particulier, celle des femmes, de l�alphab�tisation et de l�enseignement des bonnes pratiques sanitaires, font partie int�grante de l�am�lioration nutritionnelle. Dans ce contexte, il faut que figure au premier plan des priorit�s � long terme le ralentissement de la croissance d�mographique, afin de parvenir rapidement � une stabilisation de la population gr�ce � des mesures appropri�es dans les domaines social, sanitaire et �ducatif. L�am�lioration nutritionnelle peut contribuer � ce r�sultat, et elle n�est pas uniquement li�e � la solution du probl�me d�mographique. Une am�lioration de la nutrition obtenue aujourd�hui gr�ce aux mesures d�ordre public ne manquera pas d�avoir des effets b�n�fiques � long terme, � mesure que les parents de familles pauvres ne seront plus oblig�s de chercher � assurer leur s�curit� alimentaire pour l�avenir en ayant le plus d�enfants possible dans un contexte de mortalit� infantile �lev�e.
4.53 Il faut admettre, comme pr�alable � la s�curit� alimentaire des m�nages, la relance et l�acc�l�ration d�une croissance fortement cr�atrice d�emplois et dont les effets sont largement diffus�s. En raison des taux �lev�s de croissance d�mographique, de la p�nurie toujours plus aigu� de terres cultivables et de la d�pendance d�une forte proportion des populations rurales, atteintes par l�ins�curit� alimentaire � l��gard des emplois et des revenus d�origine agricole, il est essentiel que soit mise � profit la technologie agricole et que soient appliqu�es des incitations exemptes de distorsions pour l�agriculture. On pourrait compl�ter ces mesures par des programmes d�emploi de grande envergure � l�intention des populations d�favoris�es, pour bon nombre de zones rurales des pays � revenus faible et moyen.
4.54 L�existence de r�seaux de recherche agricole nationaux et internationaux efficaces repr�sente une condition n�cessaire � la prise en compte des consid�rations nutritionnelles par la recherche; elle constitue �galement un m�canisme d�assurance, � l��chelle mondiale, pour la s�curit� alimentaire dans l�avenir. La recherche, la divulgation et les campagnes d�information portant sur les technologies alimentaires appropri�es, telles que la transformation ou la fabrication des aliments de sevrage, n�cessitent de nouvelles formes de coop�ration entre les op�rateurs publics et priv�s, parall�lement � l�apparition de perspectives nouvelles pour la biotechnologie dans le secteur priv�. Les pouvoirs publics peuvent encourager une telle coop�ration.
4.55 En r�gle g�n�rale, les m�nages et les femmes/m�res en particulier, ont le d�sir d�am�liorer la nutrition de leurs membres les plus vuln�rables, et disposent souvent des connaissances n�cessaires. Cependant, cette tendance est entrav�e par le manque de ressources, mais aussi par le fait que ces personnes n�ont pas voix au chapitre dans les d�cisions importantes concernant la communaut�. Il est donc important, pour le succ�s des actions dans le domaine nutritionnel, de donner la parole, ainsi que les responsabilit�s correspondantes, aux personnes vuln�rables et � leurs porte-parole les plus qualifi�s. Cette responsabilisation peut �tre encourag�e, de fa�on directe et indirecte, en affectant des ressources et en confiant des t�ches de direction aux femmes dans le cadre des programmes de nutrition � base communautaire, ou en dispensant une orientation et une aide � la constitution de groupes, le tout associ� � un transfert cibl� de connaissances aux groupes concern�s.
4.56 Les mesures d�ordre public font appel non seulement aux initiatives gouvernementales pour la distribution de ressources aux groupes cibles, mais �galement � la participation active par le public, soit directement, soit par le truchement des ONG. La participation du public peut avoir une incidence positive puissante, sous forme de collaboration, mais aussi de contestation parvenant � infl�chir les politiques gouvernementales. La collaboration est un �l�ment essentiel des campagnes de sant� publique, qu�il s�agisse de l��ducation nutritionnelle ou de l��valuation participative, au niveau de la communaut�, des probl�mes de nutrition pour lesquels la collaboration est une condition de succ�s (Pinstrup-Andersen, Pelletier et Alderman, 1995). En revanche, c�est souvent par la contestation que l�opinion publique parvient � attirer l�attention des autorit�s gouvernementales sur les probl�mes et � exiger des solutions. A ce titre, les revendications sous forme de militantisme politique, de pressions journalistiques et de critiques inform�es, peuvent aider � mettre en lumi�re le risque que repr�sente la faim comme ph�nom�ne persistant. Il n�est d�ailleurs pas fortuit que les pays ayant r�ussi � se pr�munir comme la famine soient les plus avanc�s en mati�re de pluralisme politique et offrent des voies � la communication et � la critique (Dr�ze et Sen, 1989). En Afrique, comme dans d�autres pays, l�absence d�opposition politique et de libert� de parole a largement aggrav� le probl�me de la malnutrition.
4.57 S�agissant de la ma�trise des ressources, l�acc�s � la terre cultivable, m�me sous forme de petits lopins, tels que les jardins potagers cultiv�s par les femmes, demeure un �l�ment important de la s�curit� alimentaire des familles dans de nombreux pays � revenu faible et moyen; ce ph�nom�ne concerne d�ailleurs, dans une proportion croissante, les �conomies en transition d�Europe orientale et d�Asie centrale. Il importe de se pencher � nouveau sur les probl�mes de r�forme fonci�re et sur leurs liens avec la s�curit� alimentaire des m�nages. Il y a lieu d�envisager, tout au moins pour la solution � moyen terme des probl�mes � moyen terme que posent, dans de nombreux pays, l�emploi et le march� du cr�dit, un acc�s plus large aux parcelles individuelles � y compris dans les zones p�riurbaines � accompagn� de services agricoles ad�quats dans ce sous-secteur.
4.58 Le probl�me aigu que pose la pr�vention de la famine dans les pays qui y demeurent expos�s � souvent en relation �troite avec des conflits arm�s � doit �tre abord� � l��chelle internationale puisque, de toute �vidence, les tentatives � l��chelon national continuent d��chouer. Les famines d�coulant de conflits arm�s doivent faire l�objet de mesures au niveau politique supr�me, et demeurer au premier plan des efforts diplomatiques. En outre, il faut que soient largement reconnus les succ�s obtenus en mati�re de pr�vention de la famine dans de nombreux pays depuis les ann�es 60 et 70, dans le Sahel, dans certaines r�gions de l�Afrique australe (Botswana, Zimbabwe) et en Inde, et que soit encourag� le soutien durable � ces efforts. Il ne faut pas non plus n�gliger les m�canismes disposant d�une autorit� d�cisionnelle en mati�re d�action internationale pour pr�venir les famines caus�es par les conflits arm�s et celles entretenues � des fins belliqueuses. Les cons�quences de ce qui s�est pass� en Somalie, au Rwanda, en Sierra Leone et au Soudan au cours des ann�es 90, restent � tirer.
4.59 C�est seulement lorsque l�urgence et la gravit� de l�ins�curit� alimentaire et nutritionnelle est flagrante que sont prises les mesures n�cessaires, avec le soutien de la communaut� internationale. Il importe que soit mise sur pied une capacit� organisationnelle afin de pouvoir suivre l��volution de la situation nutritionnelle, �valuer les effets des politiques et des programmes dans ce domaine et les adapter en fonction des circonstances. L�approche pragmatique consistant � apprendre �sur le tas� adopt�e avec tant d�efficacit� par certains pays, pourrait constituer une solution de rechange viable au principe de la planification �parfaite� devant pr�c�der toute action.
4.60 La coordination efficace au niveau national des activit�s entreprises par les organismes gouvernementaux en particulier les minist�res, mais aussi les int�r�ts non gouvernementaux participant aux mesures d�am�lioration de la nutrition, repr�sente un imp�ratif. Cette coordination peut �tre stimul�e par les organisations internationales, mais souffre souvent de l�absence d�un cadre bien d�fini. Il importe d��laborer des strat�gies nationales avec la participation de tous les int�r�ts du secteur de l�alimentation et de l�agriculture de mani�re � assurer la durabilit� et la coh�rence des mesures d�am�lioration de la s�curit� alimentaire et de la nutrition. De plus grands progr�s dans l�application de la strat�gie seront accomplis lorsque tous les efforts d�am�lioration de la nutrition seront coordonn�s par une structure de gestion responsable des probl�mes, qui reconnaisse que l�am�lioration et le maintien d�une situation nutritionnelle ad�quate pour tous et � tous moments d�pendent dans une large mesure des acteurs concern�s dans l�ar�ne non gouvernementale et sp�cialement des producteurs alimentaires.
4.61 Le potentiel organisationnel est un �l�ment important d�une application efficace de politiques et programmes nutritionnels. De nombreuses initiatives �chouent, en effet, lors de cette �tape critique, � cause d�une mauvaise conception op�rationnelle, d�une capacit� insuffisante ou de carence de supervision. Il est donc essentiel de s�adjoindre des �l�ments gestionnaires efficaces pour les t�ches d�am�lioration de la nutrition.
4.62 On peut consid�rer le probl�me de la malnutrition sous l�angle des droits de la personne, y voir une n�cessit� humanitaire, ou encore le principal obstacle � surmonter vers le d�veloppement. Il est aujourd�hui largement reconnu que les progr�s accomplis vers une meilleure nutrition contribuent largement au progr�s �conomique et social. Le bien-�tre nutritionnel est g�n�rateur de dividendes � court et � long termes, voire sur plusieurs g�n�rations, car il conduit � une augmentation durable de la productivit� des soci�t�s. Le Sommet mondial de l�alimentation, en contribuant � mettre en relief ces �l�ments fondamentaux, ouvre la voie � un �largissement et � un renforcement des alliances sociales, gouvernementales et non gouvernementales, �uvrant ensemble pour la s�curit� alimentaire et l�am�lioration nutritionnelle, aux niveaux national et international27.
4.63 Les appels en faveur d�une plus grande volont� politique sont vou�s � des r�sultats pour le moins modestes. Plut�t que de s�en remettre � des allocations temporaires de ressources � des programmes sp�cifiques, il vaut peut-�tre mieux s�efforcer de changer les attitudes � l��gard de la nutrition � un niveau plus �lev� de la prise de d�cisions, c�est-�-dire tenter de l�arracher au statut de triste probl�me de condition sociale pour en faire la condition pr�alable du d�veloppement humain et �conomique. Il faut, pour cela, se doter des instruments n�cessaires: un syst�me mondial de surveillance de la nutrition, transparent et respect�, permettant de mesurer les progr�s accomplis par les pays sur la voie du bien-�tre nutritionnel � avec, entre autres indicateurs pertinents, la r�duction de la proportion et du nombre d�enfants sous-aliment�s � , par exemple, contribuerait � donner des impulsions politiques utiles pour la mise en �uvre des actions �num�r�es plus haut. De la sorte, l�opinion publique nationale et les instances internationales seraient bien inform�es et pourraient �riger les progr�s concrets accomplis sur la voie du bien-�tre nutritionnel en condition de leur approbation et de leur soutien. Les m�canismes de suivi des engagements pris ant�rieurement, � savoir le Sommet mondial pour l�enfance et la CIN, ont repr�sent� un pas dans la bonne direction. C�est une d�marche qui m�rite d��tre renforc�e.
1 Ce document doit �tre lu comme faisant partie de l�ensemble de documents d�information techniques du SMA, et notamment les documents suivants: no 2, S�curit� alimentaire: exemples de r�ussite; no 3, Cadre sociopolitique et �conomique pour la s�curit� alimentaire; no 6, Les le�ons de la r�volution verte � vers une nouvelle r�volution verte; no 8, Produits alimentaires destin�s aux consommateurs: commercialisation, transformation et distribution; no 12, L�alimentation et le commerce international; no 13, S�curit� alimentaire et assistance alimentaire; et no 14, Evaluation des progr�s r�alisables en mati�re de s�curit� alimentaire.
2 Il est dit, dans la D�claration universelle pour l��limination d�finitive de la faim et de la malnutrition adopt�e � la Conf�rence mondiale de l�alimentation de 1974: �chaque homme, femme et enfant a le droit inali�nable d��tre lib�r� de la faim et de la malnutrition...� (ONU, 1975).
3 En cons�quence, l�effet du revenu sur la consommation de micronutriments que l�on trouve principalement dans les viandes, tels que le fer, est marqu�, alors que son incidence sur la consommation de micronutriments provenant principalement des l�gumes, tels que la vitamine A, est plus restreinte. Une �tude portant sur les m�nages agricoles philippins montre que l��lasticit� du revenu induite par la consommation de fer est de 0,44, alors que celle induite par la consommation de vitamine A et de vitamine C est voisine de z�ro (Bouis, 1991).
4 Des �tudes sur le terrain ont permis de constater la corr�lation positive entre la situation nutritionnelle et la productivit� de la main-d��uvre, qu�il s�agisse de salari�s ou d�exploitants ind�pendants (Strauss, 1986; Sahn et Alderman, 1988). On peut donc s�attendre, dans les contextes o� la productivit� physique a de l�importance, � une r�duction substantielle de l�esp�rance de vie parmi les adultes dont la croissance a �t� affect�e par des carences nutritionnelles et de mauvaises conditions de sant� durant l�enfance.
5 Une �tude conduite selon des m�thodes novatrices au Guatemala a permis de retracer, apr�s 14 ans, la plupart des �coliers ayant b�n�fici� d�un suppl�ment d�alimentation dans le cadre d�un projet d��tude. On a ainsi constat� qu�en d�pit de l�absence d�interventions suppl�mentaires, les enfants qui avaient re�u ces compl�ments nuitritionnels conservaient leur avantage de croissance et avaient de meilleures performances aux tests de r�sultats (Martorell et al., 1991). On observe �galement que, outre les effets n�gatifs de la carence en iode sur le comportement cognitif, la Malnutrition prot�ino-�nerg�tique (MPE) et les carences en fer ont �galement des effets n�gatifs sur la capacit� d�apprentissage et le comportement cognitif (Scrimshaw, 1994).
6 A titre d�exemple, au cours d�une famine qui a
frapp� l�Ethiopie, les m�nages se situant dans le tercile sup�rieur de revenu de
la population �tudi�e ont r�ussi � obtenir 15 dollars EU de la vente de leurs
biens, alors que les m�nages situ�s dans le tercile inf�rieur n�ont obtenu que
5 dollars EU, la tranche privil�gi�e disposant de
troupeaux plus importants et d�autres biens n�gociables (Webb et Reardon, 1992).
7 On s�attache actuellement � mettre au point un indice de s�curit� alimentaire des m�nages afin de suivre la s�curit� alimentaire � l��chelle internationale. Etant donn� que la s�curit� alimentaire des m�nages est influenc�e par une multitude de facteurs, aucun indicateur ne peut, � lui seul, refl�ter la situation de fa�on pr�cise. C�est pourquoi l�on a propos� le retour � un indice composite, constitu� des disponibilit�s �nerg�tiques alimentaires quotidiennes par habitant (DEA) comme indicateur de la disponibilit� alimentaire globale; du PNB par habitant mesur� en unit�s de parit� de pouvoir d�achat (PPA) afin de mesurer le pouvoir d�achat global r�el; et du coefficient de variation de la distribution du revenu, comme mesure indirecte de l��galit� ou de l�in�galit� de la r�partition des revenus. On a constat� la n�cessit� de recherches plus approfondies concernant les donn�es et la conception de l�indice (FAO, 1993).
8 Une �tude de l�IFPRI propose un ensemble d�indicateurs relativement simples en mati�re de s�curit� alimentaire et nutritionnelle (Haddad, Kennedy et Sullivan, 1994). Les indicateurs soumis � analyse comprennent notamment le nombre d�aliments uniques consomm�s, la r�gion, le taux de d�pendance, la taille du m�nage, le nombre de pi�ces par habitant, l�incidence des maladies, les vaccinations, l�approvisionnement en eau potable, l�infrastructure de sant�, etc. Un indicateur peut �tre utilis� de fa�on isol�e ou en combinaison avec d�autres indicateurs. L��tude a �tabli que ces indicateurs simples �sont efficaces pour la localisation des populations souffrant d�ins�curit� alimentaire et nutritionnelle�. On a observ� que la combinaison id�ale d�indicateurs est fonction des caract�ristiques locales.
9 On notera que ces estimations ne tiennent pas compte d�interventions r�centes sur une vaste �chelle. Plus de 70 pays ajoutent aujourd�hui de l�iode dans plus des trois quarts du sel qu�ils consomment. L�incidence des troubles caus�s par les carences in iode (IDD) conna�t par cons�quent un d�clin, mais on ne l�a pas encore quantifi�e. Parall�lement, plus de 20 pays ont lanc� de vastes programmes de compl�ments vitaminiques.
10 A titre d�exemple, un ensemble de donn�es concernant les Philippines relatent, que, sur 323 m�nages recevant un apport �nerg�tique moyen d�passant 80 pour cent des besoins � c�est-�-dire, ne souffrant pas de carence alimentaire de fa�on chronique � 197 sont pass�s en dessous du seuil des 80 pour cent au moins une fois au cours d�une p�riode d�observation de 16 mois (Haddad, Sullivan et Kennedy, 1991).
11 Ainsi, dans la r�gion sah�lienne du Burkina Faso, les m�nages menac�s par l�ins�curit� alimentaire comptaient en moyenne 11 personnes, avec un taux de personnes � charge de 0,51, alors que les familles bien aliment�es comprenaient, en moyenne, 8 personnes, avec un taux de personnes � charge de 0,40 (Reardon, 1991).
12 A titre d�exemple, durant la s�cheresse de 1982/83, 73 pour cent des m�nages sans terre d�Arcot du Nord, en Inde, ont souffert de p�nurie alimentaire contre 61 pour cent de m�nages agricoles dans la m�me situation (Yohannes, 1991).
13 Voir �galement le document du SMA no 4, Besoins alimentaires et croissance d�mographique.
14 Voir, entre autres, les travaux de Ravallion (1987) sur le Bangladesh, au sujet des exp�riences et des options envisag�es par les pays.
15 Il est essentiel d�amortir les chocs provoqu�s par les fluctuations brutales des prix. Ainsi lorsqu�on a assist� au Soudan, en 1985, � une augmentation de plus du triple du prix r�el des c�r�ales, alors que les termes de l��change c�r�ales/b�tail se trouvaient multipli�s par huit, l�incidence de la malnutrition chez les enfants (c�est-�-dire la proportion des enfants dont le rapport poids-taille �tait inf�rieur � 80 pour cent de la norme) est pass�e de 5 pour cent � 20 pour cent dans la r�gion du Kordofan (Teklu, von Braun et Zaki, 1991).
16 On trouvera une analyse d�taill�e des questions li�es � la politique d�aide alimentaire dans le document du SMA no 13, S�curit� alimentaire et aide alimentaire.
17 Voir, en particulier, les documents du SMA no 7, Production vivri�re: le r�le d�terminant de l�eau et no 10, Investissement dans le secteur agricole: �volution et perspectives.
18 Voir �galement le document du SMA no 6, Les le�ons de la r�volution verte � vers une nouvelle r�volution verte.
19 D�apr�s trois �tudes de cas portant sur la Gambie, le Guatemala et le Rwanda, une augmentation de 10 pour cent d�un revenu de 100 dollars EU par habitant a entra�n� une augmentation allant de 3,5 � 4,9 pour cent de la consommation d��nergie alimentaire du m�nage, et un accroissement de 1,1 � 2,5 pour cent du quotient poids/�ge des enfants (von Braun et Kennedy, 1994). Des donn�es macro�conomiques provenant d�un certain nombre de pays en d�veloppement indiquent qu�un doublement du revenu par habitant, lequel passerait de 300 dollars EU � 600 dollars EU, serait accompagn� d�une r�duction d�environ 40 pour cent de la proportion des enfants pr�sentant un quotient poids/�ge inf�rieur � la normale (von Braun et Pandya-Lorch, 1991).
20 Une augmentation de 10 pour cent du revenu, � partir d�un revenu uniforme de 100 dollars EU par habitant (soit un passage de 100 dollars � 110 dollars) dans des secteurs o� l�agriculture donne lieu � des �changes, a pour effet d�am�liorer de 1 � 4,9 pour cent la nutrition des enfants (von Braun et Kennedy, 1994).
21 A titre d�exemple, dans la r�gion des Philippines o� les contrats de culture de la canne � sucre �taient r�serv�s aux propri�taires, � l�exclusion des locataires, on a observ� une augmentation du nombre de paysans sans terre, accompagn�e d�une d�t�rioration du statut des paysans locataires �tablis aux alentours de la fabrique de sucre (von Braun et Kennedy, 1994).
22 Ce programme offre une garantie illimit�e d�emploi � tous les adultes du Maharashtra rural dispos�s � travailler au taux fix� (pour un examen d�taill�, voir Dev, 1995).
23 La Grameen Bank op�re dans 34 000 villages; elle a 1,7 million d�emprunteurs, dont 94 pour cent sont des femmes. L�accumulation de capital par les cat�gories pauvres a connu une augmentation substantielle. De nouveaux emplois ont �t� cr��s, notamment � l�intention de femmes � faible revenu. Le taux de remboursement est sup�rieur � 98 pour cent (Yunus, 1994).
24 Le test de moyens est g�n�ralement difficile � administrer et fait souvent appel � une d�signation des b�n�ficiaires par la communaut�. Les tests de vuln�rabilit� sont bas�s sur des indicateurs de sant� ou de nutrition, et ils ont �t� utilis�s pour sensibiliser les parents aux avantages que pr�sente l�am�lioration du r�gime alimentaire des femmes et des enfants.
25 En Indon�sie, un projet b�n�ficiant de l�aide de la Banque mondiale, dont l�objet �tait d�am�liorer les pratiques d�allaitement et parall�lement, d�encourager les m�res � ajouter de la verdure � une bouillie � base de riz ordinaire a entra�n� une am�lioration sensible de l��tat nutritionnel de 40 pour cent des enfants au moment o� ils atteignaient l��ge de deux ans. Le co�t annuel par participant a �t� d�environ 4 dollars EU durant la phase de lancement; il a �t� estim� � 2 dollars EU pour la phase ult�rieure d�expansion du programme (Berg, 1993).
26 Le Projet Tamil Nadu organise la formation et la supervision de travailleurs sociaux communautaires, en l�occurrence des m�res d�enfants sains, qui jouissent de ce fait de l�estime des autres femmes de la communaut�, et pr�voit un suivi et une �valuation syst�matiques. Ce projet a permis d�atteindre 2 millions de femmes et d�enfants �g�s de 6 � 36 mois dans 20 000 villages; il a �galement r�duit de 55 pour cent l�incidence de la malnutrition aigu�, � un co�t estim� � 11 dollars EU par enfant (Miller Del Rosso, 1992).
27 Citons, parmi les efforts f�conds dans ce sens, les initiatives non gouvernementales telles que Surmonter la faim dans les ann�es 90 et sa D�claration de Bellagio de d�cembre 1989, avec les suites qu�elle a re�ues.