CARACTÉRISTIQUES DU SYSTÈME
Ce système se rencontre dans la plupart des pays de la région. Sa population totale est estimée à huit millions de personnes (voir encadré 3.11). Il couvre une superficie de 250 millions dhectares, soit approximativement un quart de la région. Certains éleveurs cultivent de petites surfaces lorsque leau est disponible. Cependant, la pluviométrie annuelle de ce système est inférieure à 150 mm, aussi les possibilités sont-elles limitées. Les éleveurs ont surtout des moutons, toutefois ils sont nombreux à posséder aussi des chèvres, des ânes et des chameaux. On estime à 60 millions le nombre de moutons et de chèvres et à trois millions le nombre de bovins de ce système.
Encadré 3.11 Données de base: le système dexploitation pastoral |
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Population totale (m) |
30 |
Population agricole (m) |
8 |
Superficie totale (m ha) |
250 |
Zone agroécologique |
Aride semi-aride |
Superficie cultivée (m ha) |
3 |
Superficie irriguée (m ha) |
3 |
Population animale (m) |
3 |
Le système dexploitation pastoral est basé sur la mobilité des troupeaux qui se déplacent selon les disponibilités en pâturages - en liaison avec la distribution saisonnière de la pluie - et en points deau. Ce mouvement peut avoir lieu entre zones plus humides et zones sèches des basses terres, ou entre les plaines et les hautes terres. Dans le passé, leau nétait disponible quà partir de systèmes fixes de stockage, mais lusage de tankers deau mobiles a permis aux propriétaires danimaux de parcourir de plus grandes distances saisonnières. Les résidus de récolte, les céréales subventionnées et lachat de fourrage constituent le reste de lalimentation animale. Les éleveurs sont souvent partiellement financés par le capital urbain ou bien ils gèrent des danimaux appartenant à des urbains. La technologie associée à la gestion des systèmes pastoraux modernes a conduit à une forte pression sur les pâturages de la steppe. Lencadré 3.12 décrit brièvement un ménage typique de ce système agricole.
TENDANCES ET PROBLÈMES DU SYSTEME PASTORAL
Les éleveurs demeurent un groupe important ayant des liens avec les principaux systèmes dexploitation agricole de la région. Face à la croissance des feedlots pour lengraissement du bétail en zone urbaine, les systèmes pastoraux continueront à jouer un rôle important en raison de la demande croissante de viande, venant en particulier des zones urbaines.
Encadré 3.12 Ménage du système dexploitation pastoral Un ménage typique déleveurs a accès à une très petite surface de terre cultivée (1 à 2 ha) souvent cultivée selon les possibilités qui se présentent. La famille a accès à environ 100 ha de pâturages, parfois de plus grandes surfaces grâce à des arrangements coutumiers ou de location, afin délever un nombre variable de moutons, chèvres, et bovins. Ce ménage peut soccuper dun certain nombre danimaux appartenant à des habitants des villes, soit dune manière saisonnière, soit avec des arrangements à long terme. |
La désertification est, à long terme, le principal problème des éleveurs. La dégradation des ressources est la raison de la baisse constante des revenus pastoraux, qui entraîne des changements démographiques, économiques et sociaux complexes. La pluviométrie totale est le principal facteur limitant des pâturages des zones sèches. La sécheresse diminue la productivité des pâturages et affecte la qualité de lalimentation animale et la diversité des espèces. Elle entraîne aussi des changements dans la composition et la taille des troupeaux. Les éleveurs abandonnent la zone lorsquelle va jusquà la dessiccation des pâturages.
Cependant, le surpâturage est considéré comme la principale cause de dégradation de la végétation et des sols. Dans les zones particulièrement arides, à certaines périodes les animaux survivent en consommant des buissons xérophytiques et des herbes éphémères; lorsque ces plantes ont été pâturées les animaux doivent se déplacer ailleurs. Ainsi sétablit dans ces zones un équilibre entre la charge potentielle et les animaux. Dans les zones arides et semi-arides, la charge animale est, la plupart du temps, au-dessus de la charge potentielle, entraînant ainsi les plus fortes désertifications.
Le pâturage intensif autour des habitations est souvent associé à la sédentarisation des éleveurs nomades. La sédentarisation des anciens nomades implique la concentration de leurs troupeaux sur des pâturages autour de leurs nouvelles habitations. En cas de sécheresse, ces éleveurs sont forcés de faire pâturer leurs animaux dans les endroits où lon trouve la plus grande partie de leau potable. Cela peut entraîner la disparition complète de la meilleure couverture herbacée, particulièrement autour des forages qui fournissent toute lannée leau potable pour les humains et les animaux.
La disponibilité en points deau plus sûrs entraîne laugmentation du nombre de moutons dans les troupeaux, qui à son tour augmente la charge danimaux autour des points deau. Bien que laugmentation du nombre des points deau soit nécessaire à lutilisation correcte des ressources naturelles des terres arides et à lamélioration des conditions de vie, elle entraîne, presque inévitablement, une concentration de la population et des animaux autour de ces points deau, avec de graves conséquences pour cet écosystème fragile.
Lune des plus importantes recommandations approuvées par la Conférence des Nations Unies sur la désertification de 1977 concerne la dégradation des terres dans les zones agricoles pluviales. La recommandation lance un appel pour limiter légalement les cultures utilisant le labour à laide de tracteurs dans les terres arides marginales qui conviennent mieux au pâturage. Cette recommandation sappuie sur le fait que ces zones sont particulièrement vulnérables au déboisement et à la culture mécanisée excessive. Cependant, cette recommandation na pas été mise en uvre dans la région. Le labour des zones pluviales marginales, lorsquil est possible, peut produire, à court terme, quelques bonnes récoltes, mais il entraînera de lérosion, à long terme. La végétation naturelle sur de telles terres constitue souvent les pâturages de meilleure qualité pour les éleveurs. Lérosion entraîne la perte des terres, à la fois pour lagriculture et pour lélevage. Les animaux sont alors dirigés vers des pâturages moins productifs, qui sappauvrissent encore plus. Lapplication de cette recommandation serait très bénéfique pour ces zones fragiles.
Les économies à planification centralisée continuent de marginaliser et dexclure les éleveurs de la plupart des formes daide. Cela est regrettable, en effet les systèmes pastoraux avec une gestion équilibrée des pâturages assurent la meilleure durabilité des ressources naturelles des zones à faible pluviométrie.
PRIORITÉS DU SYSTÈME PASTORAL
La pauvreté peut être réduite par: i) lintensification de la productivité animale; ii) la diversification; iii) laccroissement des revenus hors exploitation; et iv) la sortie du secteur agricole. La principale priorité de ce système est de lui assurer une plus grande souplesse et son intégration avec les systèmes agropastoraux. Laugmentation de la capitalisation et la spécialisation ont conduit à la marginalisation et à labandon de nombreux groupes pastoraux; sans attention, ni protection, ni assistance, beaucoup dentre eux vont probablement disparaître. Le maintien à long terme des ressources de base en zone semi-aride ne peut être assuré que par une forte responsabilité collective. Cela nécessitera sans doute des arrangements contractuels entre éleveurs et agriculteurs sur les types dinteraction souhaitables pour une gestion équitable de lenvironnement.
Les zones pastorales (steppe) pourraient être gérées dune façon durable par la réactivation et le support des anciennes institutions de contrôle des zones de pâturages communautaires par les éleveurs eux-mêmes (système Hema).
Cependant, cela ne constituerait quune solution partielle car les propriétaires urbains, dont les priorités sont souvent différentes de celles des éleveurs, financent maintenant de nombreux troupeaux. Une intervention est nécessaire pour suivre la gestion de ces systèmes - comprenant les groupes dintervenants urbains et éleveurs - et pour établir des codes de conduite et de gestion qui assurent la durabilité à long terme des ressources naturelles des pâturages. Cela nécessitera des programmes de formation en suivi et gestion des troupeaux et des pâturages pour les participants urbains et pastoraux. Lencadré 3.13 fournit une description brève dun cas en Syrie où la zone de steppe dégradée a pu être réhabilitée par lintroduction de végétation locale et despèces animales et par la revitalisation des anciens systèmes de gestion communautaire.
Encadré 3.13 Réhabilitation des pâturages dans les systèmes dexploitation pastoraux[90] La zone de steppe dAl Badia en Syrie reçoit moins de 200 mm de pluie par an. Elle a subit une détérioration importante de ses pâturages et une perte des habitats de la faune sauvage (et de la faune sauvage elle-même). Un projet FAO est en cours dexécution dans cette zone depuis 1996. Il couvre 108 000 ha de pâturages et 22 000 ha de réserve de faune sauvage. Ses principaux objectifs étaient de renverser la tendance à la dégradation des pâturages, de réhabiliter les zones avec la participation de la population locale de Bédouins et de réintroduire loryx (Oryx leucoryx) et la gazelle des sables (Gazella subgutturosa marica) dans la réserve de faune sauvage de Talila. A ce jour le projet a: i) réhabilité quelque 10 000 ha à partir de semences despèces locales (Salsola vermiculata et Atriplex leucoclada) et de technologies novatrices, efficaces et bon marché de semis direct; ii) mis en place des stratégies de gestion des pâturages; iii) introduit un système de suivi de lenvironnement; iv) collecté des données sur la production animale; v) identifié et mis en uvre des options de génération de revenu et demploi pour les membres des communautés locales, particulièrement les femmes; vi) amélioré les compétences techniques et les capacités du personnel national du projet en formant des techniciens, des vulgarisateurs et des promoteurs Bédouins; et vii) sensibilisé la communauté des Bédouins. Ses principaux impacts et les leçons tirées de ce projet sont: la faisabilité de la réhabilitation des pâturages par le ressemis despèces locales; limportance de la participation des communautés; la flexibilité dans la mise en uvre du projet; lassistance à long terme pour la durabilité; le besoin de stratégies, à la fois locales et nationales, contre la sécheresse; et la nécessité de se pencher sur les problèmes de la propriété foncière. |
En plus de la revitalisation et du développement des institutions locales, il est nécessaire de mettre en place une législation nouvelle pour protéger lenvironnement de la steppe et pour assurer une bonne gestion à long terme des ressources en sol et en pâturage. Une telle législation est cruciale pour la durabilité du système agricole. Elle devrait renforcer ou créer les conditions qui permettront dassurer que les intérêts à long terme des groupes dépendant des pâturages pour leur subsistance, prévalent sur les intérêts à court terme des individus ou des groupes extérieurs.
Il apparaît aussi nécessaire de renforcer laide aux instituts de recherches soccupant de lintroduction de cultures intercalaires darbustes et de fourrages adaptés aux conditions locales des pâturages (comme le Centre international pour la recherche agricole en zones arides [ICARDA] et ses partenaires nationaux en recherche et vulgarisation). Plusieurs techniques et approches améliorées sont connues mais non diffusées auprès des agriculteurs. Si elle est encouragée et aidée, la recherche adaptative locale, avec les agriculteurs et les éleveurs, devrait pouvoir diffuser leur application.
[90] Batello 2001. |