2.3 Situation en matière de nutrition: progrès accomplis au regard des cibles mondiales

MESSAGES CLÉS
  • Le monde a fait des progrès en matière de réduction du retard de croissance chez l’enfant depuis 2012, l’année de référence. La prévalence est passée de 26,4 pour cent en 2012 à 23,2 pour cent en 2024, la majeure partie de cette amélioration étant attribuable à l’Asie. Le monde n’est toutefois toujours pas en bonne voie pour atteindre la cible de 14 pour cent fixée à l’horizon 2030, et il est donc nécessaire d’accélérer les progrès.
  • Plus de la moitié des pays publiant des données sur les progrès accomplis étaient sur la bonne voie pour réaliser l’objectif défini concernant l’émaciation chez l’enfant d’ici à 2030, mais, à l’échelle mondiale, la prévalence n’a guère évolué, et des progrès plus rapides sont nécessaires si l’on veut atteindre la cible mondiale de 3 pour cent établie pour 2030.
  • La prévalence de l’excès pondéral chez l’enfant est restée globalement stable (5,5 pour cent en 2024 contre 5,3 pour cent en 2012). Les actions destinées à prévenir l’excès pondéral chez l’enfant doivent être transposées à plus grande échelle pour parvenir au niveau de 3 pour cent visé en 2030.
  • Le pourcentage de nourrissons de moins de 6 mois bénéficiant des avantages importants de l’allaitement maternel exclusif a notablement augmenté pour passer de 37,0 pour cent en 2012 à 47,8 pour cent en 2023. Une poursuite et une accélération des progrès aideraient à atteindre la cible fixée à l’horizon 2030. Les mesures visant à promouvoir l’allaitement maternel exclusif peuvent contribuer à une amélioration de l’état nutritionnel tout au long de la vie.
  • Les toutes dernières estimations disponibles relatives à l’insuffisance pondérale à la naissance indiquent une prévalence de 14,7 pour cent en 2020, ce qui constitue une évolution mineure depuis 2012 et confirme qu’il faut déployer des efforts supplémentaires si l’on veut atteindre la cible mondiale de 10,5 pour cent fixée pour 2030.
  • La prévalence de l’obésité chez l’adulte a augmenté: de 12,1 pour cent en 2012, elle est passée à 15,8 pour cent en 2022. Presque tous les pays sont en retard s’agissant de la cible fixée pour 2030, et des efforts doivent être déployés d’urgence pour inverser cette tendance.
  • Les nouveaux chiffres relatifs à l’anémie chez les femmes âgées de 15 à 49 ans font apparaître soit une absence d’amélioration, soit une augmentation de la prévalence dans presque toutes les régions de 2012 à 2023, ainsi qu’un accroissement de la prévalence mondiale, qui est passée de 27,6 pour cent à 30,7 pour cent. Il est nécessaire de mener des actions concertées sur différents fronts pour s’attaquer à ce grave problème de santé qui touche les femmes ainsi que leurs nouveau-nés.
  • En 2025, un nouvel indicateur nutritionnel mondial a été approuvé pour le suivi de la cible 2.2 des ODD: la diversité alimentaire minimale. Dans le monde, d’après les dernières estimations, environ un tiers des enfants âgés de 6 à 23 mois et deux tiers des femmes âgées de 15 à 49 ans atteignaient le seuil de diversité alimentaire minimale. Des mesures doivent être prises pour permettre aux femmes et aux enfants d’avoir une alimentation diversifiée.

Tous les experts s’accordent à dire que la réduction de la malnutrition chez l’enfant est l’un des objectifs de développement les plus judicieux sur lesquels les pays peuvent mettre l’accent, car cet investissement est très rentable, son rendement s’élevant en moyenne à 23 USD pour chaque USD dépensé12. Dans certains pays, le rendement pourrait atteindre 160 fois le montant investi13. La malnutrition chez l’enfant a des effets à long terme pour l’individu, notamment des revenus inférieurs et l’augmentation du risque de maladie chronique à l’âge adulte. La taille à l’âge de 2 ans a été décrite comme étant l’une des meilleures variables explicatives du capital humain14, étant entendu que l’élimination de la malnutrition est l’un des piliers sur lesquels repose la réalisation de la quasi-totalité des objectifs de développement durable. Les effets négatifs de la malnutrition font que la nutrition doit être une pierre angulaire des progrès accomplis à l’échelle nationale et une priorité des investissements à consentir dans le cadre du programme d’action mondial en faveur de la santé et du développement.

En 2008 et 2013, la communauté scientifique mondiale a consacré des travaux aux interventions qui étaient efficaces en matière de nutrition, et mis en évidence qu’il était important d’agir tôt (pendant la grossesse et au cours des deux premières années de la vie de l’enfant) dans une série de la revue The Lancet portant sur la dénutrition maternelle et infantile15, 16. En 2022, dans un numéro spécial de l’American Journal of Public Health, des chercheurs ont rappelé l’importance des interventions nutritionnelles à un stade précoce pour parvenir à un développement optimal des individus et des pays17. L’ONU a fait la preuve de sa volonté de donner la priorité à la nutrition à travers la proclamation de la Décennie de la nutrition (2016-2025). Cette année, pour maintenir la dynamique et se conformer au Programme de développement durable à l’horizon 2030, l’ONU a prolongé jusqu’en 2030 la période au cours de laquelle il convient de mettre l’accent sur l’action en faveur de la nutrition18.

Dans la présente section, on trouvera des estimations ainsi que les évolutions observées aux niveaux mondial et régional pour sept indicateurs relatifs à la nutrition associés aux cibles mondiales fixées pour 2030: insuffisance pondérale à la naissance, allaitement maternel exclusif, retard de croissance chez l’enfant, excès pondéral chez l’enfant, anémie chez les femmes âgées de 15 à 49 ans et obésité chez l’adulte. L’Assemblée mondiale de la Santé a approuvé six cibles en matière de nutrition en 2012; ces cibles étaient à l’origine fixées à l’horizon 2025, mais il a ensuite été proposé que leur date de réalisation soit repoussée à 203019. Tout dernièrement, l’Assemblée a entériné des cibles révisées (encadré 2.3). En 2013, elle a intégré l’obésité chez l’adulte (18 ans et plus) dans le Plan d’action mondial pour la lutte contre les maladies non transmissibles20. Toutes les cibles sont associées à des indicateurs qui portent sur l’état nutritionnel, sauf dans le cas de l’allaitement maternel exclusif des nourrissons de moins de 6 mois, qui mesure un résultat comportemental. Quatre des sept indicateurs ont en outre été retenus pour suivre les progrès accomplis au regard de la cible 2.2 des ODD: le retard de croissance, l’émaciation et l’excès pondéral chez les enfants de moins de 5 ans, et l’anémie chez les femmes âgées de 15 à 49 ans.

ENCADRÉ 2.3NOUVELLES CIBLES ASSOCIÉES AUX INDICATEURS NUTRITIONNELS MONDIAUX

Les cibles à l’horizon 2030 utilisées dans la présente édition du rapport ainsi que dans les éditions précédentes depuis 2018 ont été proposées à l’origine dans un document de travail conjoint de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) qui date de 201819. De nouvelles cibles officielles fixées pour 2030 ont été approuvées dernièrement lors de la 78e Assemblée mondiale de la Santé21 (tableau A). Il sera rendu compte des progrès accomplis au regard de ces nouvelles cibles dans l’édition 2026 du présent rapport.

TABLEAU A NOUVELLES CIBLES NUTRITIONNELLES MONDIALES (À PARTIR D’UNE BASE DE RÉFÉRENCE DE 2012)

NOTE: * Identique aux cibles fixées pour 2025; ** cibles fixées pour 2025 = aucune augmentation; *** cibles fixées pour 2025 = au moins 50 pour cent.
SOURCE: OMS. 2024. 2025-2030 World Health Assembly global maternal, infant and young child nutrition targets and proposal for process indicators – Results of the online consultation and way forward. Genève (Suisse). https://cdn.who.int/media/docs/default-source/breastfeeding/online-consultation-cip-discussion-paper-responses-2024.pdf?sfvrsn=f0fa14e7_3

On trouvera dans la présente section un résumé des progrès accomplis par les pays au regard des cibles mondiales fixées en matière de nutrition, ainsi que des informations portant spécifiquement sur la diversité alimentaire minimale, laquelle a été dernièrement ajoutée aux indicateurs utilisés pour effectuer le suivi de la cible 2.2 des ODD à l’échelle mondiale. Ces informations offrent une vue d’ensemble de la diversité alimentaire minimale et fournissent les estimations mondiales et régionales les plus récentes sur le sujet.

2.3.1 Évolutions observées à l’échelle mondiale et régionale

Les tendances qui se dégagent à l’échelle mondiale entre les données de référence et l’estimation la plus récente pour sept indicateurs de nutrition associés à des cibles mondiales sont indiquées à la figure 2.9. Parmi les indicateurs relatifs à l’état nutritionnel des enfants, seul le retard de croissance a connu une évolution importante depuis l’année de référence, étant passé de 26,4 pour cent en 2012 à 23,2 pour cent en 2024. Les autres indicateurs relatifs à l’état nutritionnel des enfants (insuffisance pondérale à la naissance, émaciation et excès pondéral) n’ont guère changé depuis l’année de référence à l’échelle mondiale. Tous les indicateurs en rapport avec l’état nutritionnel des enfants, y compris le retard de croissance, doivent progresser plus rapidement pour atteindre les cibles établies à l’horizon 2030.

FIGURE 2.9 Il est nécessaire d’accélérer les progrès si l’on veut atteindre les cibles mondiales fixées en matière de nutrition pour 2030

NOTE: ODD = objectif de développement durable.
SOURCES: Les données relatives au retard de croissance, à l’émaciation et à l’excès pondéral sont basées sur Banque mondiale, Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) et Organisation mondiale de la Santé (OMS). 2025. Levels and trends in child malnutrition: UNICEF/WHO/World Bank Group Joint Child Malnutrition Estimates. Key findings of the 2025 edition. New York (États-Unis d’Amérique) et Genève (Suisse). [Consulté le 4 avril 2025]. https://data.unicef.org/resources/JME, https://www.who.int/teams/nutrition-and-food-safety/monitoring-nutritional-status-and-food-safety-and-events/joint-child-malnutrition-estimates/latest-estimates, https://datatopics.worldbank.org/child-malnutrition; les données relatives à l’allaitement maternel exclusif sont basées sur UNICEF. 2024. Infant and young child feeding. Dans: UNICEF. [Consulté le 30 avril 2025]. https://data.unicef.org/topic/nutrition/infant-and-young-child-feeding; les données relatives à l’insuffisance pondérale à la naissance sont tirées d’OMS et UNICEF. 2023. Low birthweight joint estimates 2023 edition. [Consulté le 28 avril 2025]. https://data.unicef.org/topic/nutrition/low-birthweight; www.who.int/teams/nutrition-and-food-safety/monitoring-nutritional-status-and-food-safety-and-events/joint-low-birthweight-estimates; les données relatives à l’anémie sont tirées d’OMS. 2025. WHO Global Anaemia estimates, 2025 edition. [Consulté le 8 mai 2025]. https://www.who.int/data/gho/data/themes/topics/anaemia_in_women_and_children; les données relatives à l’obésité des adultes sont tirées d’OMS. 2024. Observatoire de la santé mondiale: Prevalence of obesity among adults, BMI >= 30 (age-standardized estimate) (%). Estimates by country. [Consulté le 24 juillet 2024]. https://www.who.int/data/gho/data/indicators/indicator-details/GHO/prevalence-of-obesity-among-adults-bmi-=-30-(age-standardized-estimate)-(-). Licence: CC-BY-4.0. Les cibles ont été reprises de: OMS et UNICEF. 2017. Methodology for monitoring progress towards the global nutrition targets for 2025 – technical report. New York (États-Unis d’Amérique) et Genève (Suisse). https://data.unicef.org/resources/methodology-for-monitoring-progress-towards-the-global-nutrition-targets-for-2025; et OMS et UNICEF. 2018. The Extension of the 2025 Maternal, Infant and Young Child Nutrition Targets to 2030 – WHO/UNICEF discussion paper. New York (États-Unis d’Amérique) et Genève (Suisse). https://data.unicef.org/resources/extension-of-2025-maternal-infant-young-child-nutrition-targets-2030

Concernant l’excès pondéral chez l’enfant, la dernière estimation en date ne fait apparaître aucune évolution nette par rapport à la valeur de référence (5,5 pour cent en 2024 contre 5,3 pour cent en 2012). Ces progrès sont suffisants pour atteindre la cible fixée pour 2025, à savoir aucune augmentation, mais la cible établie à l’horizon 2030 impose d’abaisser cette valeur sous la barre des 3 pour cent; il est donc nécessaire d’améliorer la situation au cours des cinq prochaines années pour l’atteindre.

La proportion d’enfants bénéficiant d’un allaitement maternel exclusif a très nettement augmenté, pour passer de 37,0 pour cent en 2012 à 47,8 pour cent en 2023. La cible établie pour 2025 consiste à porter la proportion d’enfants exclusivement nourris au sein à plus de 50 pour cent. Elle pourrait être atteinte d’ici à la fin de l’année et les progrès doivent être salués, mais il est aussi important de noter que la cible de 70 pour cent à l’horizon 2030 nécessite de passer à la vitesse supérieure.

Les deux indicateurs nutritionnels relatifs aux tranches d’âge supérieures (obésité chez l’adulte etanémie chez les femmes âgées de 15 à 49 ans) ont reculé. Concernant l’obésité chez l’adulte, la prévalence est passée de 12,1 pour cent en 2012 à 15,8 pour cent en 2022. Pour l’anémie, les nouvelles données actualisées ne font apparaître aucune amélioration ou indiquent une augmentation de la prévalence dans presque toutes les régions de 2012 à 2023, et la prévalence mondiale est passée de 27,6 pour cent à 30,7 pour cent. Étant donné que les deux indicateurs se sont aggravés, il est peu probable que les cibles mondiales relatives à la nutrition seront atteintes d’ici à 2030 si l’on n’apporte pas des changements d’ampleur aux politiques et aux programmes pour stimuler les progrès. L’encadré 2.4 décrit certaines des difficultés spécifiques rencontrées dans la lutte contre l’anémie chez les femmes âgées de 15 à 49 ans.

ENCADRÉ 2.4INFORMATIONS CONTEXTUELLES SUR LES PROGRÈS AU REGARD DE L’ANÉMIE CHEZ LES FEMMES ÂGÉES DE 15 À 49 ANS

L’anémie (faible concentration en hémoglobine dans le sang)* est un problème de santé très grave, car elle peut altérer les fonctions physiques et cognitives. Une anémie sévère augmente le risque d’hémorragie post-partum chez les femmes enceintes et peut entraîner une insuffisance pondérale à la naissance. Les nourrissons nés de mères anémiées sont eux aussi exposés à un risque supérieur d’anémie, laquelle peut entraver leur développement cognitif26, 27. La réduction de l’anémie chez les femmes en âge de procréer est par conséquent un objectif essentiel, pour leur propre santé et pour celle de la génération suivante.

Les nouvelles estimations exposées dans le présent rapport permettent d’établir un constat très clair: aucun progrès n’a été enregistré à l’échelle mondiale dans la réduction de la prévalence de l’anémie chez les femmes âgées de 15 à 49 ans entre 2012 et 2023. Les données montrent même une récente hausse de la prévalence, ce qui devrait motiver un appel pressant à l’action.

L’une des explications possibles de l’augmentation de l’anémie qui a été observée est d’ordre biologique. L’anémie peut avoir des causes multiples, notamment un apport insuffisant en nutriments, une infection, une inflammation ou une perte excessive de sang28. De plus en plus d’éléments probants indiquent que l’inflammation associée à l’obésité et aux maladies non transmissibles connexes peut augmenter le risque d’anémie ferriprive29-31. Il est par conséquent indispensable, compte tenu de la forte augmentation de l’obésité à l’échelle de la planète, de mieux comprendre comment l’inflammation associée à l’obésité peut contribuer à l’accroissement de l’anémie chez les femmes âgées de 15 à 49 ans que l’on observe dans le monde.

Cependant, il convient également d’interpréter avec prudence l’augmentation de l’anémie révélée par les données communiquées, car certains problèmes de mesure doivent être pris en compte. La moitié environ des enquêtes dont proviennent les données mondiales sur l’anémie reposent sur des échantillons de sang capillaire obtenus par une ponction au niveau du doigt, méthode privilégiée sur le terrain. Des éléments indiquent toutefois que cette méthode pourrait entraîner une surestimation de la prévalence de l’anémie par rapport aux estimations réalisées à partir de sang veineux – la mesure étalon32, 33. L’étendue variable de ces erreurs selon les enquêtes est susceptible de fausser les tendances réelles de la prévalence de l’anémie. Il convient néanmoins de noter que le risque d’erreur de mesure le plus important concerne l’anémie légère (concentration en hémoglobine proche du seuil définissant l’anémie)32. Un examen plus approfondi des données disponibles montre que, si l’anémie légère ne cesse d’augmenter, la hausse la plus importante est celle de l’anémie modérée, moins sujette à ce type d’erreur (figure A).

Figure A PRÉVALENCE MONDIALE DE L’ANÉMIE CHEZ LES FEMMES ÂGÉES DE 15 À 49 ANS, PAR NIVEAU DE GRAVITÉ (2012-2023)

SOURCES: Les données relatives à l’anémie totale sont basées sur OMS. 2025. WHO Global Anaemia estimates, 2025 edition. [Consulté le 8 mai 2025]. https://www.who.int/data/gho/data/themes/topics/anaemia_in_women_and_children; les données relatives à l’anémie sévère, légère et modérée ne sont pas publiées.

Il est également important de souligner qu’il faudrait davantage d’enquêtes nationales pour améliorer l’exactitude des estimations mondiales de l’anémie et de son évolution chez les femmes âgées de 15 à 49 ans. Les estimations mondiales reposent sur 85 enquêtes pour la période 2015-2019 et sur seulement 41 enquêtes pour la période 2020-2023 – une disparité qui pourrait nuire à la précision des estimations de l’anémie en 2023 comparées aux estimations de référence de 2012, et en accroître le niveau d’incertitude (figure A).

Nonobstant les problèmes méthodologiques et le manque de données, l’absence de progrès et la possible augmentation de l’anémie ne sont pas surprenantes. Peu de pays ont réussi à porter à plus grande échelle les mesures réputées efficaces en matière de prévention de l’anémie nutritionnelle (supplémentation en micronutriments durant la grossesse et l’allaitement, enrichissement des aliments et accroissement de l’accessibilité et de la consommation d’aliments sains, par exemple). Des éléments probants plus fiables, et tenant compte du contexte, en ce qui concerne l’anémie chez les femmes âgées de 15 à 49 ans devront être produits et exploités si l’on veut concevoir des programmes efficaces pour lutter contre les causes multiples et interdépendantes de cette affection, notamment l’inflammation. Pour réaliser des progrès au regard de cet indicateur important des objectifs de développement durable, il faudra des mesures assorties de ressources adéquates, qui soient étroitement coordonnées et suivies de façon à obtenir des effets durables.

NOTES: * L’anémie correspond à une concentration en hémoglobine dans le sang inférieure aux seuils définis (en fonction de l’âge, du sexe et de l’état de grossesse ou d’allaitement). De nombreux facteurs influent sur la concentration en hémoglobine, notamment l’altitude du lieu de résidence par rapport au niveau de la mer et le tabagisme34.

Le tableau 2.7 présente l’évolution de la prévalence d’une sélection d’indicateurs aux niveaux mondial et régional. La prévalence de l’émaciation chez l’enfant n’a guère évolué à l’échelle mondiale (6,6 pour cent en 2024 contre 7,4 pour cent en 2012), mais certaines régions ont enregistré des améliorations. De 2012 à 2024, la diminution la plus prononcée s’est produite en Afrique de l’Ouest (de 8,2 pour cent à 6,5 pour cent) et en Asie centrale (de 3,8 pour cent à 2,1 pour cent). Il est encourageant de constater qu’aucune région n’a connu une aggravation de cette prévalence.

TABLEAU 2.7ÉVOLUTION DE LA PRÉVALENCE MONDIALE ET RÉGIONALE DE SEPT INDICATEURS NUTRITIONNELS ASSOCIÉS À DES CIBLES MONDIALES

NOTE: n.d. = estimations non disponibles.
SOURCES: Voir les sources indiquées sous la figure 2.9.

Le tableau 2.8 présente l’évolution des valeurs de sept cibles nutritionnelles mondiales aux niveaux mondial et régional. Les valeurs sont calculées à partir de la prévalence et ne doivent pas être confondues avec la charge annuelle, en particulier s’agissant des indicateurs pour lesquels plusieurs événements peuvent se répéter pendant l’année. Un enfant peut, par exemple, traverser plusieurs épisodes d’émaciation au cours de l’année, et il faut donc prendre en considération l’incidence pour déterminer la charge annuelle relative à cet indicateur. Pour interpréter les chiffres indiqués au fil du temps, il est également important de tenir compte du fait qu’ils sont influencés aussi bien par la prévalence que par le taux de natalité. De 2012 à 2024, le nombre d’enfants de moins de 5 ans dans le monde est passé de 683,5 millions à 647,3 millions, soit un recul de 5,3 pour cent. Le taux de natalité a toutefois varié selon les régions, et il est à noter que le nombre d’enfants a fortement augmenté en Afrique au cours de cette période (de 181,4 millions à 214,1 millions, soit une progression de 18,1 pour cent).

TABLEAU 2.8ÉVOLUTION MONDIALE ET RÉGIONALE DES VALEURS DE SEPT INDICATEURS NUTRITIONNELS ASSOCIÉS À DES CIBLES MONDIALES

NOTE: n.d. = estimations non disponibles.
SOURCES: Voir les sources indiquées sous la figure 2.9.

La cible relative au retard de croissance chez l’enfant est la seule cible nutritionnelle mondiale qui renvoie au nombre d’enfants et non à la prévalence. Les cibles fixées pour 2025 et 2030 consistent à réduire le nombre d’enfants présentant un retard de croissance respectivement de 40 pour cent et de 50 pour cent par rapport à la valeur de référence. À l’échelle mondiale, le nombre d’enfants accusant un retard de croissance est passé de 180,4 millions à 150,2 millions de 2012 à 2024, soit un recul de 16,8 pour cent. Les sous-régions où la diminution a été la plus marquée sur cette période sont les suivantes: Asie du Sud (−20,6 millions), Asie du Sud-Est (−6,1 millions) et Asie de l’Est (−4,6 millions).

La forte baisse du nombre d’enfants souffrant d’un retard de croissance en Asie tient à la conjugaison du recul de la prévalence de ce retard et de la diminution de la population d’enfants. Cette dynamique apparaît clairement en Asie de l’Est, qui a enregistré une réduction de 36,8 pour cent de la prévalence de 2012 à 2024 (laquelle est passée de 7,6 pour cent à 4,8 pour cent) et un recul encore plus prononcé de 61,1 pour cent du nombre d’enfants présentant un retard de croissance (passé de 7,5 millions à 2,9 millions), deux chiffres supérieurs aux cibles fixées pour 2025 et 2030. Bien que certaines régions soient en bonne voie pour atteindre les cibles relatives au retard de croissance chez l’enfant, d’autres, en particulier celles où la population d’enfants continue de croître, nécessitent des réductions plus importantes pour atteindre les cibles établies à l’horizon 2030. En Afrique, l’accélération de la réduction de la prévalence est nécessaire compte tenu de l’augmentation du nombre d’enfants souffrant d’un retard de croissance de 2012 à 2024 (+3,1 millions), et ce malgré une baisse de la prévalence au cours de la même période (de 34,0 pour cent à 30,3 pour cent).

2.3.2 Progrès par pays

La figure 2.10 présente le nombre de pays qui sont ou non sur la bonne voie pour atteindre les cibles mondiales établies en matière de nutrition à l’horizon 2030. La figure comprend également la catégorie «évaluation impossible», qui indique le nombre de pays pour lesquels on ne dispose pas d’estimations suffisantes pour suivre les progrès accomplis. De nombreux pays ne disposent pas d’estimations suffisantes relatives à l’émaciation chez l’enfant et à l’allaitement maternel exclusif. Concernant l’émaciation chez l’enfant, 32 pour cent des pays (63 sur 195) ne possédaient pas de données suffisantes, et cette proportion était de 43 pour cent (83 pays sur 195) pour l’allaitement maternel exclusif. La forte proportion de pays manquants doit être prise en considération pour interpréter les progrès, en particulier dans le cas de ces deux indicateurs.

FIGURE 2.10 LA PLUPART DES PAYS NE DISPOSENT PAS DE DONNÉES SUFFISANTES OU NE SONT PAS EN BONNE VOIE POUR ATTEINDRE LES CIBLES MONDIALES ÉTABLIES EN MATIÈRE DE NUTRITION À L’HORIZON 2030

SOURCES: Voir les sources indiquées sous la figure 2.9.

Parmi les 132 pays pour lesquels on dispose de données permettant d’évaluer les progrès en matière d’émaciation chez l’enfant, plus de la moitié (74 sur 132) sont sur la bonne voie pour atteindre la cible établie à l’horizon 2030. Les pays en bonne voie sont plus nombreux pour l’émaciation chez l’enfant que pour d’autres indicateurs relatifs à l’état nutritionnel des enfants. L’insuffisance pondérale à la naissance est l’indicateur pour lequel le pourcentage de pays sur la bonne voie est le plus faible, tous indicateurs relatifs à l’état nutritionnel de l’enfant confondus, avec 8 pour cent (12 pays sur 158). En ce qui concerne le retard de croissance chez l’enfant, 35 pour cent des pays (56 sur 160) sont en bonne voie; la proportion est plus faible dans le cas de l’excès pondéral chez l’enfant: seulement 21 pour cent des pays ayant fourni des données sur les progrès accomplis (34 sur 162) devraient pouvoir atteindre les cibles fixées. Malgré le nombre non négligeable de pays en bonne voie, nombreux sont ceux qui doivent accélérer les progrès pour atteindre les cibles établies à l’horizon 2030 qui sont associées aux indicateurs axés sur l’enfant.

Comme nous l’avons mentionné plus haut, le monde est en passe d’atteindre la cible de 2025 pour l’allaitement maternel exclusif, mais des progrès plus rapides sont nécessaires pour atteindre la cible définie à l’horizon 2030. Seulement 19 pour cent des pays disposant de données sur les progrès accomplis (21 sur 112) devraient pouvoir atteindre la cible de 2030 relative à l’allaitement maternel exclusif, signe supplémentaire qu’il est nécessaire d’améliorer encore les résultats concernant cet indicateur relatif à l’alimentation des enfants.

S’agissant des indicateurs consacrés aux tranches d’âge supérieures, très peu de pays sont en bonne voie. Seulement 1 pays sur 194 (< 1 pour cent) disposant de données sur les progrès accomplis est sur la bonne voie pour l’anémie chez les femmes âgées de 15 à 49 ans, et seuls 4 sur 195 (2 pour cent) le sont pour l’obésité chez l’adulte.

2.3.3 Coup de projecteur sur la diversité alimentaire minimale chez les enfants et les femmes: le nouvel indicateur de l’ODD 2

En mars 2025, la Commission de statistique de l’ONU a approuvé un nouvel indicateur, à savoir la prévalence de la diversité alimentaire minimale, pour le suivi de l’avancement au regard de la cible 2.2 des ODD (élimination de toutes les formes de malnutrition d’ici à 2030)e. Cette décision vise à combler une lacune majeure du cadre des indicateurs relatifs aux ODD, qui ne comportait jusqu’ici aucune mesure de suivi de la qualité de l’alimentation. Elle illustre aussi le consensus auquel les États membres sont parvenus sur la définition d’un indicateur permettant d’assurer le suivi de l’alimentation à l’échelle mondiale dans divers contextes.

Au vu des 2,6 milliards de personnes dans le monde qui n’ont pas les moyens de s’alimenter sainement – et devant la large contribution d’une mauvaise alimentation à la charge que représentent à l’échelle mondiale la malnutrition, les maladies non transmissibles liées à l’alimentation et la mortalité –, le suivi de ce que les gens mangent arrive non seulement à point nommé, mais cette mesure est également indispensable pour éclairer la conception et la mise en œuvre de politiques et de programmes qui visent à combler l’insuffisance des régimes alimentaires et des apports en nutriments. L’accent accru mis partout dans le monde sur les systèmes alimentaires durables susceptibles de déboucher sur une alimentation saine a en outre augmenté la demande d’indicateurs applicables, mais aussi gérables, à utiliser pour le suivi des régimes alimentaires des populations.

Les aliments sains peuvent prendre des formes très différentes selon l’endroit où ils sont consommés dans le monde. Cependant, comme nous l’avons mentionné à la section 2.2, les régimes alimentaires sains possèdent quatre caractéristiques universelles: ils sont diversifiés, c’est-à-dire composés d’une variété d’aliments qui fournissent des nutriments et des composés bioactifs importants pour la santé; ils procurent des nutriments essentiels en quantités suffisantes; ils sont équilibrés sur le plan de l’énergie alimentaire et des différentes sources de cette énergie (protéines, glucides et lipides) et ils comportent des quantités modérées des composés alimentaires qui sont nocifs pour la santé lorsqu’ils sont consommés de manière excessive10, 11.

La diversité alimentaire minimale rend compte de la diversification de l’alimentation de deux populations vulnérables sur le plan nutritionnel, à savoir les enfants âgés de 6 à 23 mois et les femmes âgées de 15 à 49 ans, au moyen d’un simple comptage du nombre de groupes d’aliments différents que ces personnes ont consommés la veille. Huit groupes d’aliments sont utilisés pour calculer la diversité alimentaire des enfants et dix pour celle des femmesf. On considère que les personnes qui ont consommé des aliments ou des boissons appartenant à au moins cinq groupes d’aliments atteignent le seuil de diversité alimentaire minimale, ce qui indique qu’elles ont une probabilité plus grande de satisfaire leurs besoins de vitamines et minéraux essentiels. Pour obtenir des informations supplémentaires sur les méthodes appliquées, veuillez vous reporter aux lignes directrices de l’OMS et de l’UNICEF sur les modes d’alimentation du nourrisson et du jeune enfant23 et au guide de la FAO consacré à l’utilisation et à l’interprétation de la diversité alimentaire minimale chez les femmes (en anglais)24.

Estimations de la diversité alimentaire minimaleà l’échelle mondiale et régionale

Au premier trimestre de 2024, des données d’enquêtes représentatives au niveau national concernant la diversité alimentaire minimale étaient disponibles dans 110 pays pour les enfants et dans 92 pays pour les femmes. À l’échelle mondiale, seulement un tiers (34 pour cent) des enfants âgés de 6 à 23 mois atteignaient le seuil de diversité alimentaire minimale, selon une estimation réalisée à partir de données regroupées datant de 2016 à 2022 (figure 2.11), contre deux tiers (65 pour cent) des femmes âgées de 15 à 49 ans, l’estimation s’appuyant dans ce cas sur des données regroupées remontant à la période 2020-2024 (figure 2.12). En d’autres termes, un tiers des femmes et – ce qui est encore plus inquiétant – deux tiers environ des enfants âgés de 6 à 23 mois dans le monden’ont pas une alimentation suffisamment diversifiée, et risquent ainsi de ne pas avoir un apport adéquat en vitamines et en minéraux essentiels, nécessaires à une bonne nutrition et à une bonne santé.

FIGURE 2.11 SEULEMENT UN TIERS DES ENFANTS ÂGÉS DE 6 À 23 MOIS DANS LE MONDE ATTEIGNENT LE SEUIL DE DIVERSITÉ ALIMENTAIRE MINIMALE

NOTES: Les calculs ont été effectués sur la base d’enquêtes représentatives au niveau national menées de 2016 à 2022. Des données sont disponibles pour 96 pays représentant environ 82 pour cent de la population mondiale de référence au cours de cette période: 37 en Afrique, 31 en Asie, 16 en Amérique latine et dans les Caraïbes, 5 en Amérique du Nord et en Europe et 7 en Océanie, à l’exclusion de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande. Les estimations de prévalence pour les régions ont été pondérées en fonction de la population d’enfants âgés de 6 à 23 mois (définie comme étant la moitié de la population d’enfants âgés de moins de 1 an plus la population d’enfants âgés de 1 an) des pays pour lesquels on disposait de données (sur la base de la révision de 2022 fournie sur le site World Population Prospects).
SOURCE: UNICEF. 2023. Infant and young child feeding. Dans: UNICEF. [Consulté le 6 avril 2025]. https://data.unicef.org/topic/nutrition/infant-and-young-child-feeding

FIGURE 2.12 DEUX TIERS DES FEMMES ÂGÉES DE 15 À 49 ANS DANS LE MONDE ATTEIGNENT LE SEUIL DE DIVERSITÉ ALIMENTAIRE MINIMALE

NOTES: Les calculs ont été effectués sur la base d’enquêtes représentatives au niveau national menées de 2020 à 2024. Des données sont disponibles pour 92 pays: 39 en Afrique, 30 en Asie, 14 en Amérique latine et dans les Caraïbes, 8 en Amérique du Nord et en Europe et 1 en Océanie. Les informations relatives à l’Océanie n’ont pas été prises en compte dans la présente analyse, car les données n’étaient disponibles que pour un seul pays. Les estimations de prévalence pour les régions ont été pondérées en fonction de la population totale, au 1er juillet 2023, des pays pour lesquels on disposait de données (sur la base des données actualisées de 2024 fournies sur le site World Population Prospects).
SOURCE: FAO. 2025. FAOSTAT: Indicateurs des ODD. [Consulté le 28 juillet 2025]. https://www.fao.org/faostat/fr/#data/SDGB. Licence: CC-BY-4.0.

De nettes différences apparaissent entre les régions: l’Afrique compte la proportion la plus faible de femmes atteignant le seuil de diversité alimentaire minimale (48 pour cent), et l’Amérique du Nord et l’Europe la proportion la plus élevée (79 pour cent); l’Océanie est exclue de l’analyse, car les données n’étaient disponibles que pour un seul pays. L’Afrique présente également la plus faible proportion d’enfants âgés de 6 à 23 mois atteignant le seuil de diversité alimentaire minimale (25 pour cent), suivie de l’Océanie (34 pour cent), de l’Asie (38 pour cent) et de l’Amérique latine et des Caraïbes (62 pour cent). Les données relatives à la diversité alimentaire minimale chez l’enfant ne sont disponibles que pour cinq pays en Amérique du Nord et en Europe, et l’estimation concernant l’Océanie ne comprend pas les informations sur l’Australie et la Nouvelle-Zélande faute de données. Le manque de données entraîne d’importantes lacunes et ne permet pas de se faire une idée précise de la diversité alimentaire dans les différentes régions du monde.

La faible proportion de femmes et d’enfants n’atteignant pas le seuil de diversité alimentaire minimale dans le monde est préoccupante, car cette diversité a non seulement une incidence sur le risque de carences en micronutriments, mais elle peut aussi provoquer d’autres conséquences sur la santé et le développement des individus. Il est également préoccupant de constater que la diversification de l’alimentation des enfants ne s’améliore pas rapidement; la diversité alimentaire minimale chez les enfants n’a progressé que légèrement, pour passer de 28 pour cent en 2015 à 34 pour cent en 202225. L’instauration et le suivi d’une alimentation saine pour les femmes et les enfants sont des priorités mondiales majeures. Or, pour parvenir à une diversité alimentaire minimale, les gouvernements ainsi que d’autres parties prenantes nationales doivent intensifier et pérenniser les actions menées dans le cadre des politiques et des programmes afin d’améliorer l’alimentation des femmes et des enfants, et intégrer les indicateurs relatifs à cette question sur des plateformes de collecte de données telles que les enquêtes auprès de la population. Cela nécessite de sensibiliser différents acteurs à la diversité alimentaire minimale chez les enfants et les femmes et de renforcer leurs capacités en la matière, en particulier aux niveaux national et infranational, et de mobiliser des fonds suffisants pour aider les pays à collecter des données, les analyser, les utiliser et rendre compte des progrès accomplis au regard de ces indicateurs.

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