A. E. SQUILLACE
A.E. SQUILLACE est phytogénéticien en chef à la station d'expérimentation forestière du sud-est, Naval Stores and Timber Production Laboratory, USDA, Olustee, Floride.
Si l'amélioration des arbres forestiers est relativement récente, les techniques se sont développées à tel point que toutes les organisations forestières peuvent produire des semences améliorées et des propagules végétatives pour les plantations forestières. On dispose maintenant de nombreuses méthodes permettant d'obtenir des plants améliorés. Certaines méthodes sont coûteuses, d'autres non. Une entreprise forestière peut choisir celle qui convient à ses moyens et à ses besoins en étant pratiquement sûre d'obtenir un gain génétique non négligeable.
Le présent article étudie d'une part les facteurs à considérer dans le choix d'un programme d'amélioration des arbres; d'autre part les techniques et l'orientation à suivre dans l'élaboration d'un tel programme; et enfin les moyens de mettre en uvre des programmes d'action. On s'adresse surtout aux organisations qui ne sont pas encore engagées dans la voie de l'amélioration des arbres et qui n'ont que des moyens limités pour se lancer dans un programme pratique. C'est pourquoi on insiste sur les méthodes relativement simples et peu coûteuses et sur le court terme.
Lors du choix d'une méthode d'amélioration des arbres, il faut connaître les réponses à plusieurs questions qui peuvent être déterminantes, à savoir:
1. Besoins. Quels sont les principaux produits vendus ou que l'on espère vendre?2. Essences, disponibles. Les essences indigènes conviennent-elles aux besoins? Des exotiques seraient-ils plus appropriés?
3. Caractères biologiques des essences choisies. Existe-t-il une variation raciale sensible? Les habitats indigènes sont-ils extrêmement variables? La variation intraspécifique est-elle suffisante pour permettre la sélection? La multiplication végétative est-elle facile?
4. Nature des caractères recherchés. Quels sont les principaux caractères recherchés? Ces caractères importants, peut-on les évaluer tôt? Sont-ils fortement héréditaires? Existe-t-il une forte corrélation entre eux?
5. Ordre de grandeur des gains génétiques recherchés. Un fort gain génétique est-il nécessaire pour que le produit trouve des débouchés?
6. Besoins de semences et plants. Quelle est l'importance des plantations et a-t-on un besoin urgent de semences?
7. Résultats de la recherche et méthodes de recherche. Dispose-t-on des résultats d'essais d'essences et de provenance? Y a-t-il des techniques de multiplication végétative et de pollinisation contrôlée?
8. Ressources financières, laboratoires et personnel. De quelle somme et de quels moyens matériels dispose-t-on pour le programme? Est-il possible de s'engager dans des programmes à long terme? Y a-t-il du personnel pour faire le travail? S'il a besoin d'une formation, où et quand celle-ci peut-elle être assurée?
Il serait impossible ici de recommander, pour toutes les situations, un programme d'amélioration spécifique. Des études spéciales de Burley (1969), Steenackers (1969) et Thulin (1969), présentées à la consultation de Washington, recommandent certaines espèces ou certains groupes d'espèces tandis que Greathouse (1969) traite de quelques principes généraux. De nombreux facteurs entrent en jeu dans le choix d'un programme; le sélectionneur devra donc mettre sur pied son propre programme et rechercher autant que possible des avis compétents.
Certaines directives générales valent pour des situations diverses. On fera suivre les considérations relatives à chaque stade des activités par de telles directives.
DÉLIMITATION DES ZONES DE PLANTATION
Lorsque le climat, la topographie et d'autres facteurs du milieu varient sensiblement dans une région donnée, il est peu probable qu'une même lignée soit supérieure dans toute la région. En effet, on peut prévoir des interactions milieu/génotype. Pour cette raison, on délimite en général des zones de plantation dans lesquelles on cultivera des lignées distinctes. Dans les régions de montagne plusieurs zones peuvent être nécessaires, tandis que sur un terrain plat une seule zone peut être suffisante. En général, plus le zonage est intensif, plus les gains génétiques sont importants. Mais plus le nombre des zones est grand, plus le coût de la recherche ou de l'approvisionnement en graines sera onéreux, surtout si l'on des lignées supérieures.
Il ne faut pas confondre le terme de «zone de plantation» employé ici avec celui de «zone de récolte de semences», expression qui désigne généralement des zones à l'intérieur desquelles les semences peuvent être déplacées sans danger. Malheureusement, ce concept peut laisser entendre que des semences d'origine locale sont toujours préférables et risque de décourager les tentatives d'utiliser un matériel meilleur. Par exemple, d'après les essais, les semences de Pinus elliottii Engelm. peuvent sans danger être transportées dans toute la partie septentrionale de l'habitat de cette espèce (de la Floride septentrionale vers le nord). Mais les semences provenant du sud-ouest de la Georgie donnent généralement de meilleurs résultats que les autres provenances partout dans l'habitat en question. Namkoong (1969) cite d'autres exemples d'un tel phénomène. Le sélectionneur devra donc choisir la meilleure origine de semences à planter dans chaque zone ou produire lui-même une lignée appropriée à chaque cas. Les zones de récolte de semences ou la population de référence à partir de laquelle seront produites des lignées supérieures peuvent souvent coïncider avec les zones de plantation, mais ce n'est pas nécessairement le cas.
Directives
Dès le début d'un programme d'amélioration des arbres, le sélectionneur délimitera provisoirement des zones de plantation dans la région dont il est chargé. Pour cela, il utilisera le cas échéant les renseignements obtenus dans les plantations d'essais de semences des provenances envisagées ou dans les essais de provenance répétés dans diverses stations. Il faudra aussi tenir compte des données sur le climat, la topographie et les autres facteurs du milieu qui peuvent influer sur le rendement. Il faudra choisir le nombre de zones de façon rationnelle pour maximiser le gain rapporté au coût unitaire tout en restant dans la limite des moyens disponibles. Si le coût des graines est relativement bas comme dans le cas où l'on utilise des graines sauvages spécialement choisies, l'intensité du zonage peut être assez forte. Mais si les graines sont coûteuses, comme lorsqu'elles proviennent de lignées supérieures sélectionnées, on prendra de préférence un nombre relativement restreint de zones, du moins au départ. On pourra apporter des modifications au fur et à mesure que les travaux avanceront et que l'on disposera de renseignements sur les essais de plantation. Ces modifications pourraient être fécondes pour des gains génétiques ultérieurs.
SÉLECTION DES ESPÈCES
La sélection des espèces offre des possibilités certaines pour améliorer le matériel de plantation forestière, de nombreuses plantations d'exotiques attestent ce fait (MacDonald et al., 1957; Fielding, 1960; Streets, 1962; Morandini, 1964). Ceux qui travaillent à l'amélioration des arbres peuvent facilement négliger ces occasions, trompés pal l'impression que la nature a déjà sélectionné les espèces et que, de ce fait, les plantes exotiques n'ont guère de chances. C'est généralement vrai, mais il faut noter que, dans la plupart des cas, les plantes exotiques n'ont jamais eu l'occasion d'être «expérimentées par la nature» dans un nouvel emplacement, à cause de leur isolement. En fait, on est, porté à croire que, dans un milieu analogue, plus une espèce est géographiquement lointaine, plus elle a, de chances de s'adapter à un emplacement donné. Les exotiques proches de la station ont eu l'occasion de l'envahir mais en ont été empêchés parce qu'ils n'y étaient pas adaptés. Par contre un exotique plus lointain n'en a peut-être jamais eu l'occasion et a donc une chance de succès.
De plus, il ne faut pas oublier que les conditions dans lesquelles l'homme cultive les arbres peuvent être différentes de celles de la nature. Par exemple, il est possible que la station d'introduction ne soit pas favorable à la germination naturelle et à l'ensemencement en place; mais si l'on cultive les jeunes plants dans une pépinière pour ensuite les repiquer, on peut surmonter cet obstacle. Ainsi, un exotique qui échoue dans des conditions naturelles peut réussir avec des méthodes artificielles.
Directives
Si les essences locales ne conviennent pas, il faut envisager d'utiliser une espèce exotique appropriée qui aurait été révélée par des essais. En l'absence d'essais d'exotiques, il y a lieu d'en entreprendre tout en s'efforçant d'améliorer les essences indigènes.
SÉLECTION DES SOURCES DE SEMENCES
Une variation raciale sensible intervient dans presque toutes les espèces et cette variation permet d'obtenir de meilleures semences pour les plantations forestières (Callaham, 1964). Selon Wettstein-Westersheim et Hufnagl (1960), on peut obtenir en Europe une augmentation moyenne du volume de production annuelle de 1 mètre cube par hectare en faisant porter tous les efforts sur la variation raciale. Cela vaut pour les espèces indigènes ou exotiques.
La variation raciale peut prendre de nombreuses formes. La variation génétique peut être graduelle (clinale) ou discontinue (écotypique). Cependant, en général, les deux types coexistent. La nature de la variation dépend généralement de l'existence d'une solution de continuité dans l'habitat ou de brusques modifications du milieu. Si l'habitat comprend des îles, il peut y avoir des écotypes. Il en serait de même pour des peuplements très isolés, ce qui se produit pour certaines essences. Dans ces deux cas, cependant, il peut y avoir des variations clinales dans une parcelle ou sur une île, en fonction de modifications graduelles de la latitude, de la température, de la pluviométrie et d'autres facteurs. Dans les régions montagneuses, il y a en général des clines en fonction de l'altitude, souvent avec des modifications brutales aux crêtes des montagnes et au fond des vallées, cela accompagné de changements d'aspects.
Selon Squillace (1966), pour la plupart des espèces l'aptitude génétique à la croissance est la plus élevée là où les conditions du milieu sont les plus favorables à une croissance rapide. C est là que les arbres ont une supériorité phénotypique et génétique du point de vue du taux de croissance. Dans les régions où le milieu est rude (souvent aux limites de l'habitat), le potentiel génétique de croissance baisse graduellement.
On doit s'attendre à des interactions source de semences/station quand les semences sont transportées trop loin de leur milieu indigène. Il se peut que tel soit souvent le cas pour des traits économiquement importants, en particulier la survie. Il faut donc déterminer la source de semences qui convient le mieux à la région de plantation; des essais de descendance sont le meilleur moyen d'y parvenir.
Directives
En récoltant les graines commerciales et en choisissant une population pour les travaux d'amélioration des essences forestières, on cherche à déterminer la meilleure source pour chaque zone de plantation. On utilise les renseignements disponibles sur les races, les interactions avec le lieu de plantation et sur les facteurs mésologiques. Si cela implique trop de conjectures, on fera des essais locaux de provenance, dans lesquels on inclura des graines provenant de régions accusant les meilleures performances phénotypiques (ordinairement le milieu optimal) ainsi que d'autres sources prometteuses. Tant qu'on ne disposera pas de renseignements sûrs, on choisira de préférence des peuplements locaux si on utilise une essence indigène; on récoltera des semences de races locales (de Vecchi Pellati, 1969), ou on les obtiendra dans la région qui correspond le plus au milieu de la zone de plantation si on utilise une essence exotique.
PEUPLEMENTS DE SEMENCIERS
Les peuplements de semenciers constituent un moyen relativement peu coûteux d'obtenir presque immédiatement des graines d'origine connue avec la possibilité d'une amélioration génétique modeste. Les bons peuplements sont sélectionnés et élagués en vue de favoriser les meilleurs arbres (Andersson, 1963; Matthews, 1964). On peut appliquer les méthodes culturales pour stimuler la production de graines.
Les gains génétiques seront probablement modestes, en particulier si les zones d'arbres porte-graines font partie de peuplements naturels où l'âge, l'espacement et le microsite accusent une différence notable entre les arbres. Les gains seront probablement plus importants si les porte-graines se trouvent dans des plantations, à condition que les semences originales proviennent d'un certain nombre d'arbres et de localités appropriés du point de vue de l'adaptabilité.
Directives
Si l'on a un besoin urgent de semences, on aura recours aux peuplements porte-graines. On choisira de préférence une plantation appropriée ou un peuplement naturel aménagé plutôt qu'un peuplement non aménagé. Par plantation appropriée, on entend une plantation convenant à la zone ou issue de semences dont on sait qu'elles conviennent à cette zone, et qui est constituée par un mélange de semences de nombreux arbres. S'il n'y a pas de plantations appropriées ou de peuplements aménagés, on choisira les zones de semenciers dans les meilleurs peuplements naturels non aménagés.
On établira au moins un peuplement de semenciers pour chaque zone de plantation. Ces peuplements devront être assez grands pour que le risque de perte de vigueur due à la consanguinité soit réduit au minimum (Langner, 1960). Si l'on utilise une essence exotique, on établira des peuplements de semenciers dans chacune des meilleures sources des essais de plantation. Mais dans ce cas, il faudra veiller au risque d'hybridation. Il pourra être nécessaire de prendre des mesures pour assurer l'isolement par rapport aux pollens indésirables.
SÉLECTION DES SUJETS
La sélection phénotypique de sujets supérieurs constitue une partie essentielle de la plupart des programmes actuels d'amélioration des essences forestières. En multipliant les individus sélectionnés, on espère réaliser un gain génétique. Le gain génétique procuré par la sélection massale dépend fortement de la variation génétique dans la population, de l'uniformité des conditions du milieu environnant de la population, et de l'intensité de la sélection. Le sélectionneur ne peut guère intervenir sur les différences génétiques; mais cela ne présente ordinairement pas de problème pour les essences forestières. Par contre, on peut faire beaucoup pour augmenter l'efficacité de la sélection phénotypique en faisant varier l'intensité de sélection et l'uniformité du milieu ambiant (Squillace, 1967).
Directives
S'il existe des plantations appropriées (telles qu'elles sont définies plus haut) ou des peuplements naturels aménagés, les choisir de préférence comme population de base pour la sélection plutôt que des peuplements naturels non aménagés. Eviter toutefois de limiter la sélection à un seul peuplement. Faire tous les ajustements possibles pour tenir compte de l'influence du milieu. Si l'on utilise des plants de provenance et que l'on récolte les graines pollinisées par le vent pour faire des essais de descendance, prendre garde à la possibilité d'hybridation.
En établissant les plans de sélection, on pèsera la valeur comparative des caractères désirés, faute de quoi on risque de chercher à améliorer trop de caractères à la fois, en accordant à chacun la même importance. On préparera un indice de sélection si l'on dispose des données nécessaires (van Buijtenen, 1960). Autrement, on élaborera un système de notation (Comité de coordination pour l'amélioration des arbres et la génétique forestière, 1964). Si l'objectif principal visé est un rendement élevé en poids par hectare et par an, on affectera d'un coefficient élevé la croissance rapide et la résistance aux parasites et aux maladies. Peuvent être classées ensuite dans la plupart des programmes la rectitude du fût et les caractéristiques des branches (qui doivent être petites et horizontales), surtout lorsque les principaux produits sont les grumes de sciage et de placage.
En principe, ne pas sélectionner spécialement en vue d'une fructification abondante. Certes, les sélections doivent être capables de fleurir, et une production abondante de cônes est désirable dans les vergers à graines. Toutefois, on ne recherche pas une fructification abondante dans les plantations commerciales car cela nuirait à la production de bois. Des méthodes culturales pourront être bientôt utilisées pour stimuler la floraison dans les vergers à graines (Matthews, 1964). En outre, la production totale de fruits peut être relevée en augmentant la dimension du verger.
En règle générale, lorsque l'héritabilité est faible, sélectionner plus de sujets que lorsqu'elle est élevée, même si cela implique ordinairement une réduction de l'intensité de sélection. En outre, lorsque l'héritabilité est faible, attacher plus d'importance aux essais de provenance.
VERGERS A GRAINES
Afin de tirer le plus grand profit possible des sélections supérieures pour les essais de descendance et la production de graines, la plupart des pépiniéristes emploient la méthode du verger à graines (Andersson, 1963; Matthews, 1964). La multiplication massale par voie asexuée sera examinée plus loin. Les lignes sélectionnées pour les vergers à graines peuvent consister soit en propagules végétatives (vergers à graines issus de clones) ou en semences (vergers à graines issus de semis) obtenues à partir des sélections. De nombreux auteurs ont comparé les vergers à graines issus de clones aux vergers à graines issus de semis (Barber et Dorman, 1964; Johnson, 1964; Libby, 1964; Stern et Hattemer, 1964; Toda, 1964; Wright, 1964a; Zobel et McElwee, 1964; et Nawkoong et al., 1966).
Pour les cas où les vergers à graines sont destinés essentiellement à faciliter les essais de descendance, Sweet (1969) décrit une méthode économique et rapide d'utilisation de greffons portant des bourgeons de fleurs pour faciliter et simplifier la production de descendance à pedigree.
Directives
Des vergers à graines ne doivent être créés dans les programmes d'amélioration des arbres que s'ils permettent d'économiser du temps et de l'argent par rapport à la pollinisation contrôlée à partir des sélections primitives. L'établissement de vergers à graines issus de semis peut être envisagé dans les cas où a) il est possible d'évaluer les descendances convenablement dès les premières années de vie; b) les vergers peuvent être établis dans des sites de plantation à peu près normaux; c) il est possible d'obtenir un approvisionnement suffisant de semences provenant d'arbres issus de semis; d) la multiplication végétative est difficile. Dans ces conditions on pourra pratiquer une épuration efficace des familles et des sujets au sein des familles sur la base des résultats obtenus dans le verger à graines. S'il est possible de pratiquer la pollinisation contrôlée à partir des sélections primitives, il vaut mieux produire des graines à pollinisation contrôlée. Dans ce cas, appliquer un système de polycroisement en préparant un mélange de pollen provenant d'un grand nombre de sélections et utiliser ce mélange pour la pollinisation contrôlée des sélections. Si la pollinisation contrôlée n'est pas possible, utiliser des semences pollinisées par le vent provenant des vergers. Wright (1961), Goddard et Brown (1961) et Goddard (1964) décrivent les techniques applicables aux vergers à graines issus de semis.
Etablir de préférence des vergers à graines issus de clones si les conditions nécessaires à une évaluation et une épuration précoces ne sont pas satisfaites et si la multiplication végétative ne pose pas de problèmes particuliers.
Chaque fois que cela est possible, adopter pour les vergers un dispositif qui permette une épuration après les essais de descendance. Cela peut être impossible du fait que l'on a un besoin urgent de semences ou pour d'autres raisons. Mais il faut se rendre compte que dans les vergers mis en place avant les essais de descendance, les graines ne bénéficieront pas de l'amélioration génétique maximale. Après les essais de descendance et l'épuration pour éliminer les parents génétiquement inférieurs, les vergers peuvent ne plus se prêter à une production maximale de semences génétiquement supérieures. Il faudra donc probablement établir de nouveaux vergers ne contenant que des porte-graines d'élite éprouvés.
ESSAIS DE DESCENDANCE ET ÉPURATION
Les essais de descendance permettent au sélectionneur d'obtenir un gain génétique supérieur à celui que donne la sélection massale. Il existe de nombreuses variantes de la méthode. Chaque variante a des avantages ou des inconvénients selon l'essence, les caractères recherchés et d'autres facteurs (Langner, 1960; Andersson, 1963; Johnson, 1964; Namkoong et al., 1966). Les essais de descendance peuvent être mis en place avant, pendant ou après l'établissement des vergers à graines. Ils peuvent se faire à partir de semences pollinisées par le vent ou à pollinisation contrôlée; on peut choisir entre plusieurs systèmes de croisements. Les essais de descendance peuvent servir de base pour déterminer les sélections à utiliser dans le verger. Ils fournissent les critères d'épuration des vergers déjà établis.
Directives
Lorsque l'héritabilité est relativement faible, on insistera sur les essais de descendance pour obtenir des gains appréciables. Dans ce cas, on commencera de préférence avec un grand nombre de sélections. Les essais seront entrepris le plus tôt possible pour permettre un renouvellement rapide des cycles de sélection et d'essai. Si l'héritabilité est relativement élevée, les descendants seront très ressemblants aux parents sélectionnés et les essais de descendance peuvent être réduits ou omis.
Lorsque les moyens sont limités, on commencera les essais de descendance en même temps que la plantation des vergers à graines en se servant de semences pollinisées par le vent provenant des sujets sélectionnés. Dès que les caractéristiques à améliorer peuvent être évaluées de façon valable, on peut éliminer les parents inférieurs des vergers existants et mettre en place les parents d'élite dans de nouveaux vergers à graines. Il faudra, dans les plans, prévoir une sélection de deuxième génération. Bien que l'on puisse se servir des essais de descendance pour la sélection de deuxième génération, il faudra envisager la possibilité d'utiliser les graines pollinisées par le vent provenant des vergers à graines, après épuration, pour établir des plantations spéciales.
Lorsque les moyens le permettent, la pollinisation contrôlée est préférable. Dans ca cas, on peut choisir entre les croisements individuels d'une part (en employant des testeurs ou systèmes de croisements diallèles ou partiellement diallèles) et le polycroisement d'autre part. Les croisements individuels permettent de mesurer l'aptitude générale au croisement et d'exploiter l'aptitude spécifique au croisement. La consanguinité peut être maintenue à un niveau minimal. Mais pour assurer un maximum de recombinaisons, il faudra de nombreux croisements, ce qui est coûteux. Si l'on prend en considération tous les facteurs, le système du polycroisement est probablement le meilleur. Avec ce système, il devrait y avoir de nombreuses sélections (au moins une cinquantaine). On prendra un mélange de pollen provenant de toutes ou de la plupart des sélections pour assurer un degré suffisant d'aptitude générale au croisement et une recombinaison maximale. Dans ces conditions, on peut maintenir à un minimum la consanguinité dans les vergers à graines de deuxième génération.
Prendre de préférence pour les essais de provenance des dispositifs simples. Utiliser de petits placeaux (1 à 10 arbres) avec répétitions (10 au moins), plutôt que des placeaux plus grands avec moins de répétitions.
MÉTHODES DE MULTIPLICATION VÉGÉTATIVE
Pour les essences qui peuvent être multipliées facilement par voie asexuée, il existe des méthodes spéciales. Celles-ci peuvent comporter la sélection phénotypique, des essais de clones, une nouvelle sélection des meilleurs sujets d'après le rendement des clones et une multiplication en masse par voie végétative des sélections définitives à utiliser dans les plantations commerciales. Une sélection complémentaire et l'installation de vergers à graines peuvent renforcer le programme de différentes manières.
La probabilité d'un gain génétique immédiat plus important présente un immense avantage par rapport à la conception traditionnelle du verger à graines. C'est que la ressemblance entre remets et ortets peut être plus grande qu'entre descendances et parents. Cette technique offre également des possibilités pour la multiplication en masse d'hybrides prometteurs qui normalement peuvent être difficiles à produire par voie sexuée (Schreiner, 1963).
De telles méthodes ont été employées avec succès pour l'amélioration du peuplier (Giordano, 1960; Schreiner, 1963; Steenackers, 1969), et pour Pinus radiata (Fielding, 1963; Thulin, 1969). L'application à la plupart des pins est actuellement limitée par la difficulté et le coût relatifs de la multiplication par voie asexuée. Il faut reconnaître le risque d'une perte de vigueur par suite du vieillissement physiologique (Sweet, 1964; Franklin, 1969).
Directives
Si l'espèce employée peut être multipliée par voie végétative sans difficulté et permet un boisement clonal, on accordera une haute priorité aux méthodes de contrôle, de resélection et de multiplication massive des clones. Pour établir les bases de gains génétiques futurs, on poursuivra le travail d'amélioration et d'établissement de descendances.
CRÉATION DE NOUVELLES VARIATIONS
Dans certaines situations, l'hybridation interspécifique et interraciale offre des possibilités très nettes pour l'amélioration des arbres (Wright, 1964b). Un exemple frappant de réussite est l'hybride Pinus taeda L. × P. rigida Mill. (Hyun, 1960). Righter (1960) examine les possibilités qu'offre l'endogamie suivie d'hybridation, qui a réussi avec diverses cultures agricoles.
Les mutations et polyploïdies induites offrent également des possibilités pour l'amélioration (Gustafsson, 1960). La création de polyploïdes de Populus tremula (L.) supérieurs est un exemple de succès obtenu par polyploïdie. Ces méthodes joueront certainement un rôle important à long terme dans l'amélioration des arbres. Toutefois, pour la plupart des organisations pratiques, les possibilités de tirer parti de ces méthodes sont assez limitées pour le moment.
Directives
Employer de préférence les méthodes qui tirent un parti maximal de la variation naturelle. Tirer avantage des hybrides infra et interspécifiques des mutants ou des polyploïdes à mesure qu'ils sont mis au point par la recherche.
Le problème le plus important que le sélectionneur doit surmonter est peut-être celui de s'assurer et de convaincre ceux dont dépendent les crédits, de la possibilité et de la rentabilité d'un projet. En premier lieu, il convient d'élaborer un plan de travail général et sommaire. Une analyse économique devrait faire partie du plan, même s'il y a des lacunes dans les données et qu'il faille se livrer à de nombreuses conjectures. Dans la mesure du possible, le plan indiquera les prévisions de dépenses et de rentabilité. Les analyses ou études économiques de Perry et Wang (1958), Barber (1963), Cole (1963), Marler (1963), Davis (1967a et 1967b), Laffers (1967) et Swofford (1968) seront utiles à cet égard.
Il s'agit ensuite de mettre au point un plan plus détaillé. A cet égard, il conviendra, bien entendu, de demander conseil à des experts. Des visites sur le terrain où sont réalisés des programmes d'action vigoureux et fructueux présenteraient un intérêt certain. Le plan de travail indiquera les détails de la marche à suivre pendant les premières années d'activité mais sera très souple en ce qui concerne les années ultérieures. Il devra prévoir la possibilité d'un changement dans le financement du programme, des nouveaux résultats des recherches et de l'évolution du marché des produits forestiers.
Le responsable d'un programme d'amélioration des arbres devra utiliser l'assistance technique que fournissent les organisations internationales. Divers groupes de travail de la section 22 de l'Union internationale des instituts de recherches forestières (IUFRO) pourront être utiles. Le groupe de travail sur les recherches et essais de provenance a récemment élaboré une normalisation des méthodes de recherche et d'essai de semences (Lires, 1967). Cette publication contient des instructions pour le ramassage des graines, l'implantation des expériences sur le terrain et l'évaluation des résultats. Le groupe de travail des graines pour les essais de provenance récolte actuellement des graines de Pseudotsuga menziesii (Mirb.) Franco, de Pinus contorta Dougl. et d'autres résineux de l'ouest de l'Amérique du Nord. Le groupe des essais internationaux de clones prépare une normalisation des méthodes de recherche et d'essai de clones. Le groupe des essais internationaux de provenance organisera des échanges de renseignements entre les coopérateurs, ainsi que la coordination des essais et des comptes rendus.
L'Organisation de coopération et de développement économiques vient d'établir un système pour le contrôle de matériels forestiers de reproduction destinés au commerce international. Lorsque ce système sera généralement adopté, il permettra aux sélectionneurs de recevoir plus facilement le matériel de la qualité voulue.
La FAO fournit une assistance technique sous diverses formes. Elle sert de centre de renseignements sur les sources de semences; elle patronne des cours de formation et des voyages d'étude consacrés à l'amélioration des arbres; enfin, elle aide à obtenir des avis d'experts sur la science et la pratique de l'amélioration des arbres forestiers.
Le sélectionneur devra étudier les possibilités de constituer un programme d'action coopératif local ou de s'associer à un programme existant. De tels programmes coopératifs unissent des organisations forestières rapprochées dans l'espace et poursuivant des objectifs analogues à un organisme chargé de donner des directives. Ce dernier fournit une direction technique par le moyen de services consultatifs et statistiques. Le North Carolina State/Industry Cooperative Forest Tree Improvement Program et le Cooperative Forest Genetics Research Program de l'université de Floride sont d'excellents exemples de tels programmes coopératifs. Ces coopératives permettent aussi des échanges de matériel de reproduction. Sindelar et Zavadil (1969) étudient plus en détail la coopération entre les chercheurs et les praticiens.
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