Pour ce qui est de lAccord sur lagriculture, limportant est de savoir sil a eu réellement une incidence sur les flux commerciaux. Est-ce que les instruments daccès au marché, les disciplines sur les exportations, les subventions dans le pays et la tentative de parvenir à une plus grande précision et transparence dans le fonctionnement des règles SPS ont permis un accroissement des exportations pour les pays en développement. Est-ce que les engagements pris par les pays en développement sur les consolidations tarifaires et le soutien national ont conduit à accroître les importations alimentaires de ces pays. La libéralisation effective devrait conduire à laccroissement des exportations et à laccroissement des importations. Il est donc important de vérifier les effets sur la balance globale des paiements agricoles dans les pays en développement du fait de lAccord. La situation sest-elle améliorée ou au contraire dégradée? Si certains de ces effets ont été relevés, quelles sont les répercussions sur la sécurité alimentaire à léchelle du pays et au plan des ménages?
Alors quils est possible de quantifier la position des flux commerciaux agricoles avant et après lAccord, il est beaucoup plus difficile de déterminer lincidence de lAccord sur ces flux. Le problème méthodologique a déjà été examiné dans lintroduction. Il est nécessaire de disposer de certains moyens permettant disoler les effets de lAccord de lagriculture de divers autres éléments relatifs aux flux commerciaux, qui ont eu lieu simultanément. Il sagit dun exercice complexe dont la portée va au-delà des études de cas de ce volume. La présente étude et les études de cas ont adopté la démarche simple utilisée dans la précédente étude de la FAO. La valeur moyenne des échanges alimentaires et agricoles au cours de la période 1995-2000 est comparée avec celle de la période 1990-1994, pour voir simplement si les échanges ont progressé ou non. Toutes les études de cas ont examiné les expériences du pays de manière plus subdivisée, en mettant laccent sur cinq ou six produits principaux dexportation et dimportation et en identifiant en outre la source de la modification en termes de volume et deffets sur les prix. Dans certaines études on a aussi essayé dattribuer les modifications enregistrées à certains facteurs particuliers, par exemple laccès aux marchés préférentiels, aux modifications tarifaires, aux mesures SPS/OTC et à la croissance de la productivité dans le pays.
La présente section examine les exportations agricoles totales, les importations alimentaires totales et le rapport exportations agricoles/ importations alimentaires. Les études de cas par pays fourniront davantage de détails.
Le tableau 5 montre que la valeur des exportations agricoles, en 1995-2000, était plus élevée quen 1990-1994 pour 20 des 23 pays étudiés, la hausse allant de 4 pour cent à 185 pour cent. Pour sept de ces pays (Ouganda, Pérou, Costa Rica, Inde, Sri Lanka, Indonésie et Côte dIvoire), les exportations ont augmenté de 50 pour cent ou davantage. Sur les trois pays qui nont pas enregistré daugmentation, les exportations sont restées stables au Bangladesh et au Honduras, alors que le Sénégal a été le seul à enregistrer une chute significative de la valeur des exportations (de 18 pour cent).
Au cours des dix années qui ont précédé lAccord sur lagriculture, les exportations ont augmenté dans 16 des 23 pays examinés et ont diminué dans sept dentre eux. Pendant la période successive, les exportations ont été plus élevées que prévues, sur la base de la tendance 1985-1994 dans 18 pays, et inférieure dans quatre pays seulement (Fidji -14 pour cent; Jamaïque -5 pour cent; Sénégal -21 pour cent; et Thaïlande - 5 pour cent). La déviation négative de la tendance na été relativement significative que dans un pays. Toutefois, de ces chiffres qui ne permettent de tirer aucune conclusion sur lincidence directe de lAccord sur lagriculture, pour les raisons susmentionnées. De même, lutilisation des moyennes sur cinq ans (1990-94) et sur six ans (1995-2000) est nécessaire pour obtenir une quantité importante de données, mais elle peut occulter des points dinflexion. Dans certains pays, par exemple au Pérou, au Malawi et au Costa Rica, la tendance à la hausse a atteint le point maximum autour de 1997-1998, du fait de la crise asiatique ou pour dautres motifs.
Tableau 5. Exportations totales de produits agricoles, au cours des périodes 1990-1994 et 1995-2000
Pays |
Tendance décennale (1985-94)a |
Valeur annuelle moyenne (en prix courants) (millions de dollars E.-U.) |
Variation en pourcentage |
||||
1990-94 |
1995-2000 |
Tendance extrapolée 1995-2000b |
(b-a)/(a) prix courants |
(b-a)/(a) prix de la période 1989-91 |
(b-c)/(c) prix courants |
||
Bangladesh |
- |
134 |
131 |
75 |
-2,6 |
28,3 |
75,3 |
Botswana |
+ |
91 |
120 |
105 |
33 |
10,8 |
14,8 |
Brésil |
+ |
9 614 |
14 244 |
11 188 |
48,2 |
55,7 |
27,3 |
Costa Rica |
+ |
1 022 |
1 822 |
1 342 |
78,3 |
42,4 |
35,8 |
Côte dIvoire |
- |
1 548 |
2 336 |
1 068 |
50,9 |
27 |
118,6 |
Égypte |
- |
426 |
526 |
277 |
23,4 |
17,5 |
90 |
Fidji |
+ |
194 |
202 |
236 |
4,4 |
-15,8 |
-14,3 |
Guyana |
+ |
152 |
219 |
208 |
44,8 |
65,2 |
5,7 |
Honduras |
- |
526 |
519 |
412 |
-1,4 |
-24,9 |
25,8 |
Inde |
+ |
3 083 |
5 303 |
3 739 |
72 |
56,2 |
41,8 |
Indonésie |
+ |
3 558 |
5 437 |
4 704 |
52,8 |
22,8 |
15,6 |
Jamaïque |
+ |
242 |
293 |
307 |
21,2 |
8,9 |
-4 |
Kenya |
+ |
832 |
1 151 |
983 |
38,4 |
-18,9 |
17,2 |
Malawi |
+ |
357 |
447 |
407 |
25,5 |
27,2 |
9,8 |
Maroc |
+ |
601 |
821 |
708 |
36,6 |
15,1 |
15,9 |
Pakistan |
- |
962 |
1 110 |
975 |
15,4 |
57,1 |
13,9 |
Pérou |
+ |
332 |
675 |
376 |
103,1 |
58,7 |
79,6 |
Philippines |
+ |
1 334 |
1 676 |
1 511 |
25,6 |
7,6 |
10,9 |
Sénégal |
+ |
140 |
115 |
144 |
-17,8 |
-29,1 |
-20,5 |
Sri Lanka |
- |
572 |
940 |
426 |
64,5 |
-8,1 |
120,7 |
Thaïlande |
+ |
6 210 |
8 127 |
8 559 |
30,9 |
-2,5 |
-5 |
Ouganda |
- |
146 |
416 |
- |
184,9 |
24,5 |
- |
Zimbabwe |
+ |
764 |
1 025 |
1 014 |
34,1 |
5 |
1,1 |
a Les signes plus et moins, indiquent le sens dune tendance linéaire ajustée au cours de la période 1985-1994
b Moyenne des valeurs extrapolées, de 1995 à 2000, sur la base de la tendance linéaire ajustée avec les données relatives à la période 1985-94.
Source: Élaboré à partir des données de FAOSTAT.
On peut obtenir des renseignements complémentaires sur les résultats des exportations des pays en développement, en examinant les modifications des valeurs dexportation en prix constant. On obtient alors une image moins favorable. Dans six des 23 pays, le volume des exportations a baissé après lAccord sur lagriculture. Lamélioration des valeurs dexportation en prix courants, au cours de la période qui a suivi lAccord sur lagriculture, était dû, dans une certaine mesure, à lamélioration des termes de léchange, plutôt quà laccroissement des volumes. Les prix du marché mondial de nombreux produits agricoles ont été plus élevés en 1995-2000 quen 1990-1994. Dans cinq cas (Bangladesh, Brésil, Guyana, Malawi et Pakistan) les termes de léchange ont eu un effet négatif, bien que dans le cas du Brésil et du Malawi, les différences soient comprises dans la marge derreur de la comparaison. Ces modifications sont décrites de manière plus approfondie dans les diverses études de cas.[7]
Ces chiffres masquent un aspect qui ressort par contre clairement des diverses études de cas, à savoir lincroyable diversification des produits agricoles dexportation obtenues dans de nombreux pays, au cours des dix dernières années. En Égypte, la part du coton, qui représentait 60 pour cent des exportations agricoles au cours de la période 1985-1989, noccupait plus que 30 pour cent, au cours de la période qui a suivi lAccord sur lagriculture. Au Pérou, la valeur des exportations non traditionnelles, a dépassé celle des exportations traditionnelles pour la première fois en 1996, et leur part continue daugmenter. Le Sénégal a abandonné la culture exclusive des arachides pour sorienter vers le coton, les fruits et légumes, les cuirs et peaux. Au Zimbabwe, les exportations auparavant axées sur les céréales sont orientées maintenant vers les cultures commerciales, notamment le tabac et les produits horticoles. En Ouganda, la diversification des nouvelles exportations a bénéficié dune dévaluation monétaire et de la libéralisation des échanges régionaux par le biais du Marché commun de lAfrique de lEst et de lAfrique australe (COMESA). Les fruits et légumes, la floriculture, le poisson et les crustacés délevage sont parmi les secteurs les plus dynamiques, dans ce processus de diversification. Dans dautres pays, comme le Costa Rica, la diversification sest exercée de manière verticale, afin daller vers laval sur léchelle de la valeur ajoutée. Les tentatives de diversification horizontale et verticale, toutefois, doivent encore se confronter à de nombreux obstacles, pour laccès des marchés des pays importateurs.
Malgré la croissance générale des exportations agricoles dans la plupart des pays, rares sont les études de cas dans lesquelles il a été possible détablir un lien avec lamélioration de laccès aux marchés, au titre de lAccord sur lagriculture. Dans certains pays, lamélioration des exportations, au cours de la période postérieure à lAccord sur lagriculture est imputable à lamélioration des conditions internes ou à celles des marchés mondiaux, indépendamment de lAccord sur lagriculture. Le Brésil a supprimé les taxes dexportation sur le soja en 1996, ce qui sest traduit par des répercussions importantes sur ses exportations de soja, sans effet négatif significatif sur les exportations de farine ou dhuile, du fait apparemment de laccroissement significatif de la productivité dans le secteur. Les exportations de lOuganda ont augmenté en raison de laccroissement des cours internationaux du café (environ 70 pour cent des exportations agricoles du pays) et de la reprise du secteur après les ravages provoqués par la maladie du flétrissement. Certains pays ont bénéficié de la dévaluation (Brésil après 1999) dautres de lamélioration des conditions météorologiques. En Inde, des réformes unilatérales qui ont réduit la protection du secteur manufacturier ont introduit la convertibilité de la roupie sur le compte des opérations commerciales et permis une politique des exportations relativement plus ouverte qui a eu des effets beaucoup plus marqués sur les exportations de produits agricoles, que lAccord sur lagriculture.
Lorsque laccès aux marchés sest amélioré, cela semble avoir été dû à des accords régionaux de commerce ou à des aménagements préférentiels (comme la croissance des exportations horticoles du Zimbabwe) plutôt quau Cycle dUruguay. Certaines études ont cherché à mettre en valeur la diversification des marchés découlant des nouvelles possibilités daccès mais aucune preuve tangible nest apparue. Au contraire, létude de cas du Brésil a relevé que lUnion européenne est encore le plus gros marché pour les exportations brésiliennes (54 pour cent en 2001) mais que les exportations progressaient plus rapidement dans dautres régions du monde probablement du fait de la protection élevée sur les marchés traditionnels.
Un certain nombre détudes ont mis laccent sur limplication des réductions tarifaires NPF pour les pays recevant des préférences commerciales au titre du Système généralisé de préférences ou dautres aménagements commerciaux préférentiels (Égypte, Jamaïque, Fidji, Malawi). Ces problèmes sont accusés avec acuité lorsque les pays dépendent fortement de lun ou de plusieurs produits qui bénéficient du traitement préférentiel. Leffet inverse a été relevé par dautres pays en développement qui ont indiqué les problèmes que les attributions préférentielles de contingents tarifaires ont soulevé pour laccès aux marchés (Inde) ou la mesure dans laquelle lattribution de préférences à des groupes particuliers de pays en développement a réduit leur compétitivité et accru la concurrence pour les exportations sur certains marchés (Thaïlande).
Des restrictions constantes de laccès aux marchés et une concurrence subventionnée ont été constatées dans diverses études. Les subventions aux exportations permettent une concurrence déloyale dans certains pays (en Inde pour les céréales, surtout le blé, les produits laitiers et dans une certaine mesure les exportations de sucre). Un ultérieur encouragement est donné aux exportations concurrentielles par les importantes subventions internes données dans les pays développés. Au Sénégal, lhuile darachide doit affronter la concurrence dautres huiles dont certaines sont subventionnées. Létude relative au Brésil souligne les effets négatifs qui peuvent découler de la législation agricole américaine qui a renforcé les soutiens internes, notamment pour des produits importants pour le Brésil comme le soja, les céréales et le coton.
Limportance des obstacles traditionnels à laccès aux marchés a été soulignée notamment dans létude de cas relative à lInde. Il sagit de problèmes constants, de crêtes tarifaires et de progressivité des droits, notamment dans le cas des exportations non traditionnelles comme les produits laitiers, les fruits et les légumes et leurs préparations, la viande et les produits transformés. Il convient de noter toutefois, que létude de cas relative à lIndonésie, sur la base dune étude précédente de la FAO, a indiqué que le Cycle dUruguay a entraîné une baisse de la progressivité des droits pour presque tous les produits agricoles, sur les marchés de lUnion européenne, du Japon et des États-Unis, bien que la réduction pour ces produits dexportation importants pour lIndonésie aient été inférieure à celle touchant en général les produits agricoles.
Les problèmes liés à laccès aux contingents tarifaires ont aussi été soulignés dans un certain nombre détudes de cas. On ne dispose malheureusement que dinformations très limitées sur les expériences des pays en développement, pour ce qui est des contingents tarifaires ouverts par dautres pays, notamment les pays développés. Il est difficile davoir des statistiques sur la question, puisque ce sont les négociants qui passent les accords. Toutefois, à en juger par lunanimité avec laquelle, dans les études de cas, les pays demandent un accès plus transparent et non discriminatoire aux contingents tarifaires, il semblerait que les exportateurs des pays en développement ont des difficultés pour accéder aux contingents tarifaires et que les autres exportateurs sont favorisés. Cela nest pas surprenant compte tenu du fait quun certain nombre de pays développés ont transformé les contingents daccès préférentiels précédents en contingents tarifaires, sans aucune promesse daccès élargi aux marchés.
On a enregistré peu de cas de mesures anti-dumping prises contre les exportations agricoles des pays en développement sélectionnés. LIndonésie a dû faire face à des actions anti-dumping sur les exportations de concentré de tomates en Australie, de sorbitol dans lUnion européenne et de champignons en boîte aux États-Unis. Des actions ultérieures ont été prises contre les produits transformés en aval, à partir du cuir et des fibres naturelles.
Obstacles dus aux mesures sanitaires et phytosanitaires
La plupart des études de cas effectuées en 2002 signalent que les mesures sanitaires et phytosanitaires prises sur les marchés des pays importateurs ont affecté de manière négative leurs exportations. Dans un certain nombre détudes de cas, il a été aussi indiqué que ces mesures étaient devenues plus nombreuses au fil des ans (ainsi, dans le cas de lIndonésie, moins de dix ordre de détention pour des exportations de denrées transformées à destination de lAustralie pour la période 1993-1995, mais 40 en 2001). Dans un certain nombre de cas, ces mesures étaient justifiées. Des mesures internes ont été prises, et dans certains cas il a été nécessaire de fournir une assistance technique pour régler le problème. En Ouganda, par exemple, le sous-secteur des pêches a connu un recul en 1999, du fait du poisson contaminé et du non respect des règles dhygiène sur les sites de débarquement signalé dans les rapports, qui a conduit à une interdiction des exportations de poissons vers lUnion européenne de 18 mois. Des vétérinaires de lUnion européenne ont travaillé avec les autorités ougandaises pour modifier la manutention du poisson, lors des prises dans les lacs, dans les usines de transformation du poisson et avant les exportations. Une aide a aussi été octroyée au Ministère des pêches pour améliorer linspection et la surveillance dans le secteur. La Thaïlande avait un problème dentérocoque résistant à la vancomycine, pour le poulet congelé exporté vers la République tchèque. Les exportations ont repris une fois que le problème a été résolu. Dans ces cas les problèmes sont variés: contrôles défectueux dans le pays; manque de connaissance des conditions requises par les pays importateurs de la part des exportateurs; nécessité dharmoniser les normes sanitaires et phytosanitaires avec celles des pays importateurs. Létude du Costa Rica a relevé la synergie qui existe entre un système national de mesures sanitaires et phytosanitaires satisfaisant et les résultats obtenus sur les marchés dexportation. Du fait dune mise en place rigoureuse des normes dans le pays, les exportations des produits du Costa Rica sur les marchés étrangers, sont très rarement repoussées pour des raisons phytosanitaires.
Les pays ont en général des règles différentes pour ce qui est des restrictions sanitaires et phytosanitaires (inspection des produits importés, traitement spécifique ou transformation des produits, fixation des niveaux maximum autorisés pour les résidus de pesticides ou de lutilisation permise de certains additifs spécifiques dans lalimentation. Ces modalités dapplication de lAccord SPS laissent une marge discrétionnaire importante. En outre, les normes SPS deviennent de plus en plus complexes. De ce fait, les produits ne sont pas traités de manière homogène sur les différents marchés. LInde a dû faire face à une interdiction des produits marins vers lUnion européenne en 1997 à la suite de la contamination de certaines livraisons par des bactéries (Salmonella et Vibrio cholera). Pendant ce temps toutefois, ces produits étaient exportés vers les États-Unis. Dans certains cas, ces problèmes sont dus au manque de reconnaissance réciproque des inspections et des normes (plusieurs gros pays importateurs exigeant souvent «des produits identiques» au lieu de «produits équivalents»). Ainsi, les bananes des Philippines qui sont acceptées au Japon, au titre du principe déquivalence substantielle, sont refusées en Australie. Pour persuader lAustralie dentamer des discussions sur les exportations de bananes et dananas, les Philippines ont suspendu la délivrance de certificats de quarantaine vétérinaire en 1999 pour les exportations australienne de bétail sur pied. A ce jour, une solution na pas encore été trouvée et lon attend la vérification de lévaluation du risque par les autorités australiennes, pour les exportations de bananes.
Les autorités chargées des mesures sanitaires et phytosanitaires dans les pays importateurs approuvent souvent avec une certaine réticence les installations de transformation des produits destinés aux exportations, ce qui aggrave encore la situation. Létude de cas sur la Thaïlande signale que les exportations de volailles vers les Philippines et lAustralie ont été impossibles, les autorités nayant pas présenté en temps voulu les rapports nécessaires. Fidji a perdu ses marchés horticoles lorsque le dibromure déthylène a été refusé pour les traitements de quarantaine, en 1990. Fidji a alors dû se doter dinstallations à air pulsé à haute température, à cet effet. Actuellement Fidji dispose dinstallations de traitement de quarantaine fonctionnelles et dun secteur dexportation florissant dans le secteur des produits susceptibles dêtre attaqués par la mouche du fruit. Les démarches effectuées nont pas trouvé décho auprès des autorités de réglementation des pays importateurs, qui nont pas encore octroyé les autorisations indispensables aux exportations de fruits de Fidji.
On peut également citer divers cas dans lesquels les mesures sanitaires et phytosanitaires ont paru arbitraires et non justifiées. Le Brésil, par exemple, est frappé de restrictions sur les exportations de fruits tropicaux principalement par les États-Unis et le Japon du fait de lexistence de la mouche du fruit. Des procédures coûteuses sont actuellement mises en place pour que des fruits comme les mangues et les papayes puissent satisfaire aux conditions exigées dans ces pays. Il existe des cas dans lesquels les coûts sont gonflés de manière excessive, des conditions exorbitantes étant requises (par exemple la présence dun employé du Département de lagriculture des États-Unis pour contrôler la production sur place, aux frais des producteurs locaux ou des négociants). Ce sont les exportations thaïlandaises de produits alimentaires vers les États-Unis qui sont frappées du plus grand nombre dimmobilisations par rapport à leur volume, exception faite de lInde. Létude signale quil est difficile détablir si les mobilisations et les plaintes contre les importations alimentaires des pays en développement, reflètent réellement des problèmes sanitaires ou phytosanitaires ou sil sagit tout simplement dobstacles non tarifaires dissimulés sous la forme de mesures sanitaires et phytosanitaires ou dobstacles techniques au commerce (OTC).
Dans un certain nombre de cas, le manque de ressources et les compétences techniques limitées des responsables des mesures sanitaires et phytosanitaires, dans les pays en développement constituent un problème pour les mesures sanitaires et phytosanitaires des pays importateurs. La plupart des pays en développement ne disposent pas des technologies nécessaires pour effectuer les tests de base et la certification. Pour ce qui est des exportations horticoles, Fidji déplore que les autorités chargées de la quarantaine naient pas fourni les données nécessaires aux pays importateurs en temps voulu et selon les modalités requises. Toutefois, même lorsque la pertinence des mesures a été reconnue, les pays en développement ont dû faire face à des problèmes liés au changement de la réglementation, du fait des investissements. La recherche mentionnée dans létude de cas relative à la Thaïlande a montré que léquivalent tarifaire des obstacles sanitaires et phytosanitaires pour les exportations thaïlandaises étaient en moyenne de 29 pour cent (de 4 à 55 pour cent). Une aide technique accrue et des programmes de formation accompagnés dun support financier sont requis pour que les structures puissent être mises en place.
Aux obstacles constants aux échanges, sont venus sajouter dans certains pays des contraintes nationales qui ont empêche dexploiter les possibilités daccès aux marchés. Parmi les contraintes des exportateurs égyptiens tentant daccroître les ventes à létranger, on peut citer divers facteurs (intrants nationaux de qualité médiocre; lourdeur des drawbacks des droits de douane et des régimes dadmission temporaire; formalités excessives, droits et retards des douanes et inspections au cours des exportations et des importations; travailleurs mal formés; incitations insuffisantes à lexportation, et manque dinformations sur les marchés étrangers et les normes relatives aux produits). Létude de cas du Malawi a mis laccent sur les contraintes liées au manque dinfrastructures matérielles et de marchés ainsi que sur le risque lié aux investissements et aux difficultés daccès au crédit et aux services de vulgarisation qui expliquent les mauvais résultats commerciaux du pays. Les résultats des exportations en Indonésie ont été décevants, notamment à la suite de la forte dévaluation de la roupie, après 1997. La diminution des cours des produits internationaux et leffondrement structurel du système financier indonésien, en sont en partie responsables. Au Honduras, divers phénomènes (ouragan Mitch, taux dintérêt élevés et faibles niveaux des prix agricoles dus aux cours mondiaux très bas et exacerbés par un taux de change surévalué) se sont traduits par une crise financière de grande ampleur dans le secteur agricole. Aux Philippines, les investissements dans le secteur agricole ont été limités au cours des dernières années du fait des répercussions de la crise financière de 1997 et des ajustements structurels politiques et économiques qui ont eu lieu. Ces expériences, citées dans les études de cas, ont nettement mis laccent sur limportance de politiques nationales appropriées, si les exportateurs veulent tenir compte de nouvelles possibilités commerciales.
Pratiquement aucun des pays sélectionnés na établi un lien entre lamélioration des résultats obtenus par les exportations et lAccord sur lagriculture. Il est indiqué à plusieurs reprises, explicitement, que ni la composition ni le volume des échanges de produits agricoles, nont été influencés de manière significative, par la mise en place de lAccord sur lagriculture. Cela ne signifie pas forcément que les engagements obtenus par les pays en développement, de la part de leurs partenaires commerciaux, dans le cadre du Cycle dUruguay soient dénués de valeur. Il a été difficile destimer lincidence des réductions tarifaires ainsi que la stabilité et la transparence accrus dans laccès aux marchés, comme facteurs favorables à la croissance. Avec laugmentation du volume des exportations, les dispositions de lAccord sur lagriculture renforcent la sécurité daccès à ces marchés, notamment pour les produits dexportations plus récents, introduits avec la diversification, pour lesquels la concurrence des producteurs des pays développés est souvent plus forte que pour les produits traditionnels dexportation des pays en développement.
Les dépenses consacrées aux importations alimentaires (à lexclusion des produits halieutiques) ont augmenté considérablement dans presque tous les pays sélectionnés, par rapport aux périodes qui ont précédé lAccord sur lagriculture (Malawi et Zimbabwe exceptés, voir tableau 6). Les importations alimentaires ont plus que doublé en valeur entre 1990-1994 et 1995-2000 dans sept pays (Bangladesh, Costa Rica, Honduras, Inde, Indonésie, Philippines et Ouganda). Pour ce qui est de lOuganda, elles ont même plus que triplé. Comme pour les exportations agricoles, il est possible de distinguer la part de laugmentation des quantités importés et la part de la hausse des prix, dans les hausses des dépenses. A lexception de quatre pays (Côte dIvoire, Fidji, Malawi et Thaïlande) où la croissance du volume des importations a été plus forte que la croissance des dépenses dimportation alimentaires, les pays ont en général payé davantage pour leurs importations alimentaires en 1995-2000 quen 1990-1994. De nombreuses études de cas fournissent des informations ultérieures, en ventilant les hausses des dépenses alimentaires par produit et en distinguant entre les variations de volume et de prix.
Les dépenses pour les importations alimentaires ont augmenté dans tous les pays au cours de la décennie 1985-1994 (sauf au Bangladesh, en Égypte et en Inde). Dans la plupart des pays où la croissance des importations au cours de la période qui a suivi lAccord sur lagriculture na fait que confirmer une tendance précédente, la question est de savoir si les dépenses dimportation, au cours de la période postérieure à lAccord sur lagriculture, ont été inférieures ou non à la tendance. Au cours de la période postérieure à lAccord sur lagriculture, les importations ont été plus élevées que celles projetées sur la base de la tendance 1985-94 dans 16 pays, et inférieure dans sept pays. Comme dans le cas des exportations agricoles, ces chiffres ne permettent pas de tirer des conclusions sur lincidence directe de lAccord de lagriculture. Comme indiqué à la section 2, la libéralisation des importations était déjà engagée dans de nombreux pays pour dautres raisons.
Les répercussions de cette croissance sur les importations alimentaires peuvent être positives ou négatives. Si les importations alimentaires viennent compléter la production nationale et la disponibilité nationale des denrées alimentaires, leffet peut être bénéfique pour la sécurité alimentaire. Les conséquences peuvent aussi être positives lorsque les importations alimentaires ont un effet sur la production interne, pourvu que la main duvre libérée du secteur de la production alimentaire soit absorbée dans des emplois plus productifs, dans le secteur non agricole. On peut sattendre à des effets négatifs lorsque les importations alimentaires ont une incidence sur le volume de la main duvre employée dans le secteur qui se retrouve ensuite au chômage ou sous-employée. Cette question est examinée dans la section suivante qui étudie plus en détail lincidence de lAccord sur lagriculture pour la sécurité alimentaire.
Les exportations agricoles et les importations alimentaires ont augmenté parallèlement dans la plupart des pays examinés au cours de la période qui a suivi lAccord sur lagriculture. Il est donc important dexaminer les résultats des échanges commerciaux dans ces pays. Comme dans les études précédentes de la FAO, il est possible de répondre à cette question en examinant la tendance des importations alimentaires totales par rapport aux exportations agricoles totales. Une hausse du rapport indique que les importations alimentaires progressent plus rapidement que les exportations agricoles, et vice-versa. Ce rapport sert à synthétiser le rapport entre les deux variables le plus couramment étudiées dans le cadre de lAccord sur lagriculture. Il ne sert pas à indiquer la capacité dimportation des denrées du pays, qui est souvent cernée en comparant les importations alimentaires aux exportations totales, services inclus.[8]
Tableau 6. Valeur des importations de produits alimentaires au cours des périodes 1990-1994 et 1995-2000
Pays |
Tendance décennale (1985-94)a |
Valeur moyenne annuelle (en prix courants) (millions de dollars E.-U.) |
Variation en pourcentage |
||||
1990-94 |
1995-2000 |
Tendance extrapolée 1995-2000b |
(b-a)/(a) prix courants |
(b-a)/(a) prix de 1989-91 |
(b-c)/(c) prix courants |
||
Bangladesh |
- |
549 |
1 132 |
479 |
106,1 |
98,5 |
136,4 |
Botswana |
+ |
211 |
299 |
310 |
41,9 |
32,9 |
-3,7 |
Brésil |
+ |
2 304 |
4 283 |
3 230 |
85,9 |
50,3 |
32,6 |
Costa Rica |
+ |
167 |
355 |
264 |
111,8 |
90 |
34,3 |
Côte dIvoire |
+ |
357 |
474 |
363 |
32,5 |
50,3 |
30,6 |
Egypte |
- |
2 086 |
2 852 |
1 611 |
36,7 |
26,3 |
77 |
Fidji |
+ |
88 |
109 |
116 |
23,1 |
26,1 |
-6,3 |
Guyana |
+ |
35 |
47 |
52 |
34,3 |
9,2 |
-9,3 |
Honduras |
+ |
110 |
267 |
161 |
142 |
64,9 |
65,5 |
Inde |
- |
883 |
2 245 |
705 |
154,1 |
134,5 |
218,2 |
Indonésie |
+ |
1 310 |
3 070 |
2 050 |
134,3 |
110,3 |
49,8 |
Jamaïque |
+ |
222 |
336 |
270 |
51,7 |
7 |
24,6 |
Kenya |
+ |
250 |
371 |
397 |
48,5 |
26,7 |
-6,5 |
Malawi |
+ |
123 |
69 |
226 |
-44,1 |
-45 |
-69,6 |
Maroc |
+ |
699 |
1 197 |
932 |
71,4 |
58,8 |
28,5 |
Pakistan |
+ |
999 |
1 483 |
1 204 |
48,4 |
22,5 |
23,2 |
Pérou |
+ |
737 |
1 029 |
1 037 |
39,7 |
26,8 |
-0,7 |
Philippines |
+ |
965 |
2 069 |
1 466 |
114,4 |
87 |
41,2 |
Sénégal |
+ |
322 |
412 |
408 |
27,9 |
21,2 |
0,9 |
Sri Lanka |
+ |
429 |
644 |
505 |
50,2 |
44,8 |
27,4 |
Thaïlande |
+ |
639 |
1 164 |
1 050 |
82,1 |
109,9 |
10,8 |
Ouganda |
+ |
42 |
148 |
72 |
251,8 |
208,1 |
105,7 |
Zimbabwe |
+ |
140 |
138 |
245 |
-1,1 |
-35,4 |
-43,6 |
a Les signes plus ou moins indiquent lorientation dune tendance linéaire ajustée, pour la période 1985-1994.
b Moyenne des valeurs extrapolées pour la période de 1995 à 2000, sur la base dune tendance linéaire ajustée aux données de 1985-94.
Source: Élaboré à partir des données de FAOSTAT.
Le tableau 7 indique quau cours de la période 1995-2000, 14 des 23 pays étudiés ont enregistré un ratio alimentaire inférieur à 1, ce qui indique que les recettes dexportation des produits agricoles ont dépassé les dépenses dimportation de produits alimentaires; dans les neuf pays restants, les dépenses dimportations alimentaires ont été supérieures aux recettes dexportations agricoles (le ratio du Pérou chuterait au-dessous de 1 si on englobait les exportations de produits halieutiques). Toutefois, le rapport pour la période 1995-2000 a été plus élevé que pour la période 1990-1994 dans 16 des 23 pays (la Côte dIvoire, le Guyana, le Malawi, le Pérou, Sri Lanka, Ouganda et Zimbabwe sont les pays restants). De nombreux pays ont enregistré un fort pourcentage de hausse dans le rapport mais souvent, à partir dun rapport inférieur à 1. Le Bangladesh se distingue puisquil sagit dun pays où les importations alimentaires ont été quatre fois supérieures à leur valeur, au cours de la première période et huit fois supérieure à leur valeur, au cours de la période postérieure à lAccord sur lagriculture. Le rapport pour le Sénégal égal à 2 à été pratiquement multiplié par quatre. La hausse des rapports (importations alimentaires/recettes agricoles dexportation) dans la plupart des pays a continué sur la tendance préalable à lAccord sur lagriculture. Le rapport a connu une tendance à la hausse, au cours de la décennie 1985-1994, dans tous les pays, à lexception de lInde et de la Jamaïque.
Tableau 7. Rapport de la valeur totale des importations de produits alimentaires à la valeur totale des exportations de produits agricoles
Pays |
Tendance décennale |
Ratio moyen |
Variation entre 1995-2000 et 1990-94 |
||
(1985-94)a |
1990-94 |
1995-2000 |
Valeur absolue |
% |
|
Bangladesh |
+ |
4,12 |
8,92 |
4,80 |
116,4 |
Botswana |
+ |
2,32 |
2,51 |
0,19 |
8,1 |
Brésil |
+ |
0,24 |
0,30 |
0,06 |
25,9 |
Costa Rica |
+ |
0,16 |
0,19 |
0,03 |
20,8 |
Côte dIvoire |
+ |
0,23 |
0,20 |
-0,03 |
-11,5 |
Egypte |
+ |
4,94 |
5,47 |
0,53 |
10,6 |
Fidji |
+ |
0,46 |
0,55 |
0,09 |
19,9 |
Guyana |
+ |
0,24 |
0,22 |
-0,02 |
-8,9 |
Honduras |
+ |
0,22 |
0,55 |
0,33 |
148,7 |
Inde |
- |
0,28 |
0,43 |
0,15 |
52,1 |
Indonésie |
+ |
0,36 |
0,57 |
0,20 |
55,4 |
Jamaïque |
- |
0,92 |
1,15 |
0,23 |
25,6 |
Kenya |
+ |
0,30 |
0,32 |
0,03 |
9,2 |
Malawi |
+ |
0,37 |
0,15 |
-0,22 |
-58,2 |
Maroc |
+ |
1,20 |
1,47 |
0,28 |
23,3 |
Pakistan |
+ |
1,08 |
1,36 |
0,28 |
25,4 |
Pérou |
+ |
2,26 |
1,55 |
-0,71 |
-31,5 |
Philippines |
+ |
0,72 |
1,25 |
0,53 |
74 |
Sénégal |
+ |
2,46 |
3,78 |
1,31 |
53,4 |
Sri Lanka |
+ |
0,78 |
0,69 |
-0,09 |
-11,1 |
Thaïlande |
+ |
0,10 |
0,14 |
0,04 |
41,4 |
Ouganda |
+ |
0,38 |
0,37 |
-0,02 |
-4,0 |
Zimbabwe |
+ |
0,22 |
0,13 |
-0,09 |
-38,9 |
a Les signes plus et moins indiquent lorientation dune tendance linéaire ajustée pour 1985-1994. Le signe plus indique que les importations alimentaires ont progressé plus rapidement que les exportations agricoles.
Source: Élaboré à partir des données FAOSTAT.
Peu détudes de cas ont fait état des expériences relatives à la stabilité des exportations et des importations. De nombreux commentateurs prévoyaient que la mise en place de lAccord de lagriculture et surtout la tarification porteraient à une stabilité accrue des revenus dexportation et des dépenses dimportations alimentaires, bien que des variations de volume contribuent à linstabilité de ces flux. Les données relatives à lInde font état dune plus grande stabilité des exportations et en particulier des importations lorsque lon compare les périodes antérieures et postérieures à lAccord, mais le nombre de pays cités dans les études de cas était insuffisant pour pouvoir tirer des conclusions sur ce point.
[7] Les tendances varient aussi
selon les périodes. Par exemple, lIndonésie a connu une
détérioration des termes de léchange pour les
exportations, entre 1994-1996 et 1998-2000, même si
lexpérience entre 1990-94 et 1995-2000 était
positive. [8] Certaines indications relatives au rapport de la capacité dimportation pour les denrées vivrières, sont tirées des études de cas présentées dans la prochaine section. |