La foresterie et la gestion des ressources naturelles dans les zones arides
Depuis quelques années, l'intérêt porté aux menaces contre les forêts tropicales s'est accentué de manière spectaculaire. Toutefois, la quasi-totalité de cette attention est dirigée vers les forêts de la zone tropicale humide. On prête en fait une attention bien moindre à vrai dire presque négligeable - aux défis que pose la gestion des ressources forestières dans les zones arides et semi-arides.
Pourtant, la dégradation des zones arides est l'un des plus graves problèmes de gestion des ressources auxquels le monde soit confronté aujourd'hui. Alors qu'elles occupent un tiers environ de la surface terrestre et entretiennent une population de plus de 850 millions de personnes - soit près de 20 pour cent de la population mondiale -, les terres arides se dégradent rapidement du fait de la croissance démographique, du surpâturage, de la mise en culture des terres marginales, d'une irrigation inappropriée et du déboisement. En 1983, l'évaluation par le Programme des Nations Unies pour l'environnement de l'exécution du Plan d'action des Nations Unies pour lutter contre la désertification a révélé qu'au moins 75 pour cent des terres productives des zones arides et semi-arides étaient déjà au moins légèrement désertifiées (ayant perdu plus de 25 pour cent de leur productivité originelle). Le problème est particulièrement grave dans les régions en développement, où la dégradation des parcours et des zones limitrophes des zones de culture semi-arides continue à s'accélérer. Le déboisement est intimement lié à la dégradation des terres arides puisque la destruction de la végétation ligneuse pour la production de bois de feu et à d'autres fins est beaucoup plus rapide que le reboisement et la repousse.
Les arbres et la végétation ligneuse ont un rôle capital à jouer dans la gestion durable des zones arides et semi-arides. Toutefois, l'utilisation polyvalente des formations forestières par la population locale au fil des siècles, voire des millénaires amplement documentée dans un article sur l'aménagement des terres boisées par les pasteurs nomades, paru dans Unasylva, 41(160) -, est une notion qui a été mal comprise et insuffisamment étudiée tant par les forestiers que par les gestionnaires des ressources naturelles en général.
A la fin des années 70 et au début des années 80, la foresterie dans les zones arides a eu tendance à se résumer à la création de vastes plantations d'espèces exotiques dans le but exclusif de produire du bois de construction ou de feu. A cette fin, on a défriché d'importantes superficies de «broussailles inutiles» qui fournissaient à la population locale du bois de feu, des aliments et du fourrage. L'exécution de projets agricoles ou de projets d'irrigation a souvent entraîné l'élimination de formations arbustives naturelles, ce qui a accentué l'érosion et entraîné des pertes de productivité et le raccourcissement de la durabilité des nappes aquifères. Toutefois, bien que la tendance générale soit encore peu satisfaisante, un changement de mentalité se fait jour parmi les forestiers et les responsables de l'utilisation du sol dans les zones arides. Le présent numéro d'Unasylva contient des articles témoignant de ce changement de perspective et des résultats positifs qu'il est permis d'en augurer.
J. Fries et J. Heermans examinent quelques-unes des principales questions liées à la gestion des forêts naturelles en Afrique aride et semi-aride et mettent en relief trois actions prometteuses: l'une au Niger et deux au Burkina Faso. S. Guinko et L.J. Pasgo démontrent l'importance économique des produits forestiers comestibles dans un village du Burkina Faso, tandis que F. Murindagomo examine le programme CAMPFIRE du Zimbabwe, qui est un programme de gestion de la faune sauvage fondé sur la participation populaire.
F.R. Bach décrit l'état d'avancement du projet à long terme de la FAO intitulé «Ressources génétiques d'essences arborées des zones arides et semi-arides en vue de l'amélioration des conditions de vie rurale»; ce projet illustre une approche systématique de la conservation et de l'amélioration des ressources génétiques forestières. R.J. Vandenbeldt met en relief les possibilités offertes par les systèmes d'agroforesterie dans les zones tropicales semi-arides, tout en recommandant de ne pas appliquer sans discernement les techniques mises au point pour des zones plus humides. Le présent numéro d'Unasylva contient en outre deux articles tirés de documents pertinents préparés pour le 10é Congrès forestier mondial. A. Kowsar décrit les bons résultats obtenus grâce à un système simple et à bon marché de gestion de l'eau en Iran, reposant sur l'étalement des eaux de crue; A. Babaev et N. Kharin examinent le rôle des arbres et des formations ligneuses dans la lutte contre la désertification en URSS.
Avec le présent numéro, Unasylva entame son deuxième cycle de publications de deux ans depuis qu'il a recommencé à paraître en janvier 1990. Les nombreuses réactions positives aux huit numéros d'Unasylva «nouvelle formule» sont bien réconfortantes. Nous souhaitons néanmoins saisir cette occasion pour inviter de nouveau nos lecteurs à participer encore plus activement au dialogue permanent entamé. Les perspectives, observations et suggestions des responsables de la foresterie et des ressources naturelles dans le monde entier sont indispensables pour compléter le travail du Comité consultatif de rédaction en vue d'assurer la qualité et la pertinence du journal.