SYNTHÈSE DES ÉTUDES THÉMATIQUES ET SECTORIELLES
LA FORMATION EN COMMUNICATION
POUR LE DÉVELOPPEMENT
La formation en matière de communication de développement est restée longtemps ignorée des pouvoirs publics et des centres de formation professionnelle.
La préoccupation, dès l'accession du pays à l'Indépendance, a été de former des animateurs de la presse écrite et parlée dans l'optique du journalisme d'information, souvent dans les écoles étrangères.
Ainsi, avant l'existence des établissement locaux au milieu des années 1970, les premières générations de journalistes et hommes de médias ont été surtout initiés au métier dans les écoles africaines et des universités françaises et canadiennes. Les nationaux pionniers du métier se sont, pour la plupart, formés sur le tas.
Parmi les établissements qui ont livré les premiers communicateurs formés au Burkina, on peut retenir:
- Le Centre d'études supérieures des sciences et techniques de l'information de Dakar au Sénégal (CESTI) et ce, jusqu'à la fin des années 80.
- L'Ecole de journalisme du Conseil de l'Entente (à Lomé au Togo).
- L'Ecole supérieure de journalisme de Yaoundé (Cameroun).
Hors du continent, on peut citer l'Office de coopération en radiodiffusion (OCORA) et l'Institut national de l'audiovisuel (INA) qui ont formé les premiers animateurs de l'audiovisuel.
Au nombre des Universités, on peut citer celles de Strasbourg, de Bordeaux III, de Lille, l'Institut français de presse (IFP) et le Centre de formation et de perfectionnement des journalistes (CEPJ) de Paris qui ont fourni, de la fin des années 1970 à la fin des années 1980, le gros contingent des cadres supérieurs formés aux métiers de l'information et de la communication.
Le contenu de ces formations dispensées ne prenait pas en compte de façon spécifique toutes les préoccupations du monde rural.
A partir des années 1970, le Burkina Faso se dote de centres de formation professionnelle dans le domaine de la communication, notamment:
- Le Centre de formation professionnelle de l'information (CFPI) dont l'objectif prioritaire est de former des agents d'exécution et de maîtrise capables d'animer les structures de production et de diffusion de l'information.
- Le Département des arts et communication de l'Université de Ouagadougou dont la mission est de former des cadres de conception et de gestion dans les domaines de l'information et de la communication, l'ambition étant de concilier la formation universitaire et celle professionnelle dans trois options; le journalisme, la communication d'entreprise et la communication pour le développement.
- Le Centre interafricain d'études en radio rurale de Ouagadougou (CIERRO) qui a pour vocation la formation et le perfectionnement en radio et en TV. Cependant, la formation ne prend pas en compte la gestion et l'animation des radios associatives, communautaires et commerciales privées alors que l'on assiste de plus en plus à la prolifération de ces nouvelles radios.
- Les structures de formation dans les associations et ONG qui assurent plusieurs types de formation destinés à des groupes spécifiques; c'est le cas de la Fédération nationale des groupements NAAM qui a identifié des compétences paysannes dans plusieurs domaines.
- Le Centre d'études et d'expérimentations économiques et sociales pour l'Afrique de l'Ouest (CESAO) qui est une association internationale à caractère non gouvernemental assurant des programmes de formation dans divers domaines: animation des organisations paysannes, appui organisationnel, planification et programmation des activités des unions et fédérations... Toutefois, le volet communication demeure relativement faible dans ses programmes d'intervention.
- L'Institut panafricain pour le développement (IPD/AOS), association internationale non gouvernementale qui a une antenne régionale à Ouagadougou depuis 1977. Il dispense des formations dans des domaines aussi divers que techniques: planification régionale, techniques documentaires, gestion des terroirs, communication sociale et médias axés sur des équipements et supports audiovisuels et destinés principalement aux encadreurs et animateurs ruraux. Toutefois, les coûts de la formation y sont relativement élevés.
· L'Institut africain pour le développement économique et social-Centre africain de formation (INADES-Formation) qui est un réseau international implanté dans dix pays africains, dont le Burkina Faso.
- Cet intitut travaille à la promotion économique et sociale des populations rurales en accordant une attention particulière à leur participation libre et responsable pour la transformation de leurs sociétés. Elle développe les techniques d'animation et de communication rurale (TACR) et dispose d'une unité audiovisuelle et d'un service de production de matériels pédagogiques.
D'une manière générale, toutes les structures formelles de formation ont besoin de renforcer leurs programmes de formation en matière de communication pour le développement. En particulier:
- Les établissements devraient initier les formateurs à la production de supports de communication de proximité, aux techniques de la vulgarisation scientifique, à l'animation de groupe.
- Les techniciens et encadreurs intervenant en milieu rural ont besoin de parfaire leurs expériences par des recyclages appropriés en communication pour le développement.
- Les animateurs des médias doivent être initiés aux objectifs de la communication pour le développement afin qu'ils accordent plus de place et de temps aux préoccupations du monde rural.
Ce diagnostic d'ensemble a donné lieu aux recommandationssuivantes:
RECOMMANDATIONS AUX POUVOIRS PUBLICS
- Le Gouvernement du Burkina Faso opte pour une politique nationale de communication pour le développement. C'est le premier pas. Il devra cependant franchir le second pas qui consiste à dégager les moyens nécessaires à la mise en uvre de cette politique, car il ressort que de nombreux services n'ont pas le minimum d'équipements nécessaires à la formation, à la réalisation et à la diffusion des informations pour le développement.
- Dans de nombreuses structures de formation, les programmes sont muets en ce qui concerne la formation en matière de communication pour le développement. Il est une nécessité de premier ordre que les programmes de formation des écoles comme l'Ecole nationale des eaux et forêts (ENEF) de Dindéresso, le Centre agricole polyvalent (CAP) de Matourkou, consacrent une large part de leurs activités à la communication pour le développement, notamment aux techniques d'animation, de vulgarisation, de conception, de réalisation et d'exploitation des outils de communication de proximité.
- Tout au long des enquêtes, on a pu constater l'insuffisance de personnel qualifié pour concevoir et réaliser des supports indispensables à une bonne communication. Il appartiendra à l'Etat de former ses agents dans ce domaine. L'adoption d'une politique ministérielle en Conseil des ministres peut favoriser la matérialisation au plan national de cet objectif global.
- En février 99, le Programme spécial de sécurité alimentaire (PSSA) a formé ses agents de terrain en communication pour le développement courant . Ce type de formation devra être étendu à tous les acteurs du milieu rural: agents de l'agriculture, de l'élevage, de l'environnement, de l'éducation, etc. Un accent particulier devra être mis sur le personnel (journalistes et animateurs) des radios publiques comme privées.
- La mise en uvre de telles recommandations présuppose l'existence de formateurs et de chercheurs universitaires éprouvés. Une coopération doit s'instaurer entre les ministères en charge de la fonction publique, des enseignements et de la recherche et le Ministère de la communication en faveur de la conception d'une politique de formation de formateurs et de chercheurs à l'Université de Ouagadougou. Par exemple, des fonctionnaires de catégorie A2 ou A1 pourraient y être admis en position de stage en vue de faire un troisième cycle, tout en conservant leur salaire.
- Pour des raisons de coûts et d'inadéquation des contenus des formations, l'envoi de nos étudiants et stagiaires à l'extérieur devrait être le dernier recours. Il est souhaitable que les formations, perfectionnements et recyclages soient faits sur place au Burkina. D'où, pour le pays et l'ensemble des acteurs, la nécessité d'envisager des concertations en vue d'une politique nationale de formation en communication. Cette politique pourrait s'orienter vers une spécialisation des établissements qui existent déjà au Burkina.
AINSI:
- L'Université de Ouagadougou, à travers le Département des arts et communication, se consacrerait à la formation des cadres supérieurs de conception, des formateurs, des chercheurs.
· Le Centre de formation professionnelle de l'information (CFPI) du Ministère prendrait en charge le perfectionnement dans les métiers de la communication. Ses prestation s'adresseraient aux médias burkinabé et de la sous-région et il dispenserait davantage de formations à la carte, à côté des programmes de type grande école.
- Le Centre interafricain d'études en radio rurale de Ouagadougou (CIERRO) répondra à l'attente des radios associatives, communautaires, locales, rurales des pays membres avec l'avantage de disposer d'un statut interafricain et, surtout, d'une grande expérience de formation à la carte dans ce domaine. Le marché est exponentiel grâce au développement fulgurant de ce type de médias à la faveur de la démocratisation politique en Afrique.
Le Ministère du commerce et le Ministère de l'économie et des finances, en relation avec le Ministère de la communication et de la culture sont interpellés pour l'adoption d'une fiscalité douce en ce qui concerne l'importation des équipements et matériels destinés à la formation au sein des ministères, des ONG et des établissements d'enseignement.
La bonne connaissance des réalités de la communication au sens large au Burkina est indispensable à l'optimisation des résultats de toute politique sectorielle. Il est donc indispensable que les ministères chargés des statistiques nationales, des enseignements et de la recherche, ainsi que de la communication coopèrent à la tenue à jour de données fiables sur le secteur de la communication. En l'absence de ces statistiques, on prive toute démarche à vocation scientifique de support argumentaire pour créditer les analyses et les recommandations attendues pour optimiser la contribution du secteur au développement. Ces données accroîtront la compétitivité du secteur dans la perspective de l'intégration sous-régionale.
Il revient aux mêmes ministères de travailler à l'émergence de sociétés de sondage, d'études de la perception des médias par l'opinion et d'études d'impacts, notamment des campagnes IEC, de vulgarisation de thèmes techniques (agriculture, élevage, etc.) de promotion de l'image politique (management politique), de commercialisation (impact publicitaire), etc.
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RECOMMANDATIONS AUX STRUCTURES D'ENSEIGNEMENT
- La première recommandation est, d'une part, la redéfinition des programmes afin qu'ils soient plus proches des préoccupations du développement rural et, d'autre part, un produit fini qui soit immédiatement utilisable et efficace pour les structures demandeuses.
- La science et la technique évoluent très rapidement. C'est pourquoi les établissements d'enseignement doivent impérativement établir entre eux une coopération dynamique: utilisation réciproque des équipements, échanges d'expériences et d'enseignements et, surtout, participation de chaque établissement à la définition réciproque des programmes pour une plus grande complémentarité - plutôt qu'une concurrence - dans les objectifs nationaux.
RECOMMANDATIONS AUX INSTITUTIONS ET ONG
- Toutes les structures de formation n'arrivent pas à faire un suivi et une évaluation. La raison invoquée est le manque de moyens. Nous recommandons donc à ces institutions de prendre des mesures appropriées pour assurer le suivi de la performance de leur produit sur le terrain pour déceler les insuffisances et l'adapter régulièrement aux exigences du contexte.
- Les institutions et les ONG luttent toutes pour un développement durable, pour la promotion du monde rural. Il s'avère alors indispensable qu'elles instaurent entre elles d'une part, puis entre elles et leurs clients d'autre part, des concertations périodiques en vue d'harmoniser le contenu des formations et d'échanger leurs expériences dans l'intérêt des populations.
RECOMMANDATION COMMUNE
- Considérant que l'extrême mobilité des personnels formés à leur poste de spécialisation annihile tout impact attendu à la suite des formations reçues, nous invitons tous les employeurs (institutions publiques comme associations privées) à éviter les mutations fréquentes des communicateurs recyclés, perfectionnés ou tout simplement ayant reçu une formation dans un établissement professionnel.