Les vitamines sont un groupe - hétérogène sur le plan chimique - de molécules organiques nécessaires en petites quantités dans le régime alimentaire des animaux supérieurs. Ces molécules ont des fonctions à peu près identiques dans toutes les formes de vie, mais les animaux supérieurs semblent avoir perdu la capacité de synthétiser la plupart dentre elles. On distingue les vitamines solubles dans leau et les vitamines solubles dans les lipides. Ces vitamines liposolubles peuvent, dans une certaine mesure, être stockées dans lorganisme; normalement, elles ne sont pas excrétées dans lurine. Par contre, les vitamines hydrosolubles sont excrétées dans une large mesure, et lorganisme nen retient que très peu pour les utiliser immédiatement. Il est donc souhaitable den assurer un apport alimentaire journalier.
On compte actuellement 13 vitamines: les vitamines A, C, D, E, K, B12 (cyanocobalamine) et les 7 vitamines du complexe vitaminique B. Les vitamines incluses dans le complexe vitaminique B sont hydrosolubles et sont presque toutes des composantes de co-enzymes qui catalysent, avec les enzymes, divers processus physiologiques. Ces vitamines comprennent la thiamine (B1), la riboflavine (B2), la niacine (ou acide nicotinique), la pyridoxine (B6), lacide pantothénique, lacide folique (appelé aussi folate ou folacine) et la biotine (appelée quelquefois vitamine H). Les vitamines A, E, K et D sont liposolubles. Chaque vitamine est présente dans un grand nombre daliments différents (tableau 41). La vitamine D est produite dans la peau quand celle-ci est exposée au soleil; la niacine est fabriquée par lorganisme à partir du tryptophane, un des acides aminés essentiels.
TABLEAU 41 |
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Vitamines et leurs principales sources alimentaires |
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Vitamines |
Bonnes sources |
Liposolubles |
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Vitamine A |
Foie, huiles de foie de poisson, jaune doeuf, lait et produits laitiers, euilles vert ticulier chou frisé, feuilles damarante, de patate douce, de dolique et de manioc), fruits et légumes de couleur jaune et orangée (carotte, citrouille, mangue, papaye, orange), patate douce orangée, huile de palme |
Vitamine D |
Huile de foie de morue, huile de poisson, foie, jaune doeuf |
Vitamine E |
Huiles végétales (de maïs, soja, tournesol), noix, soja, céréales, jaune doeuf |
Vitamine K volaille |
Légumes à feuilles vertes, huiles végétales, jaune doeuf, boeuf, mouton, |
Hydrosolubles |
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Thiamine (vitamine B1) |
Mils, sorgho, blé, maïs, haricots secs, riz, foie, rognons, boeuf, noix |
Riboflavine (vitamine B2) |
Légumes à feuilles vertes, foie, rognons, lait, fromage, oeufs, grains entiers |
Niacine (acide nicotinique et amide nicotinique) |
Viande maigre, poulet, poisson, arachides, haricots secs, blé, igname, pomme de terre |
Acide pantothénique |
Rognons, poisson, jaune doeuf, la plupart des légumes et des céréales |
Pyridoxine (vitamine B6) |
Viande, volaille, poisson, jaune doeuf, grains entiers, banane, pomme de terre, haricots secs, lentilles, pois chiches |
Biotine (vitamine H) |
Arachides, haricots secs, jaune doeuf, champignons, banane, pamplemousse, pastèque |
Acide folique |
Légumes à feuilles vertes (les pertes à la cuisson peuvent être élevées), fruits frais (surtout jus dorange), haricots secs, pois, noix, jaune doeuf, champignons, banane, foie |
Vitamine B12 (cyanocobalamine) |
Foie, rognons, poulet, boeuf, poisson, oeufs, lait, fromage |
Vitamine C |
Agrumes, goyave, kiwi, fruit du baobab, papaye, mangue, légumes à feuilles vertes, piment vert, pomme de terre, poivron vert, tomate |
Les vitamines présentes dans les aliments ne sont pas toutes disponibles sous une forme absorbable. Par exemple, la plus grande partie de la niacine des céréales est liée de manière telle quelle nest pas absorbée par lintestin. De même, les vitamines liposolubles ne sont pas absorbées si la digestion des lipides ne se fait pas bien. Par exemple, les enfants souffrant de diarrhée ou dautres affections intestinales absorbent moins de vitamine A que normalement.
Les minéraux forment un autre groupe de composés chimiques dorigine alimentaire que lorganisme utilise. Les minéraux se rencontrent en quantités variables dans le système alimentaire. Certains dentre eux, comme le calcium et le fer, se trouvent souvent, à linstar des vitamines, sous forme liée et ne sont donc pas facilement absorbés à travers la paroi intestinale. La plupart des minéraux sont nécessaires en quantités modestes et jouent des rôles très spécifiques dans lorganisme humain. Les minéraux dont la carence entraîne une maladie sont étudiés ci-après.
La vitamine A dans les aliments et son rôle dans lorganisme
Lactivité vitaminique A dans les aliments se présente sous lune des deux formes: le rétinol (vitamine A déjà formée), qui est incolore et ne se trouve que dans les produits animaux; le carotène (provitamine A), qui est un pigment orange présent dans de nombreux aliments: huile de palme rouge, carottes, patate douce, tomate, orange, mangue, papaye et légumes à feuilles vert sombre (par exemple, chou frisé, feuilles de manioc, de patate douce et damarante). Le carotène est converti en rétinol dans la paroi intestinale. Il existe diverses formes de carotène, mais la plus importante est le bêta-carotène. Six molécules de carotène fournissent léquivalent nutritionnel dune molécule de rétinol. Les lipides, les protéines, le zinc et la vitamine E facilitent labsorption et lutilisation de la vitamine A par lorganisme.
La concentration de la vitamine A dans les aliments se mesure en microgrammes (µg) déquivalents de rétinol (ER), à raison de 1 ER = 1 µg de rétinol ou 6 µg de bêta-carotène. Les unités internationales (UI) sont parfois utilisées pour exprimer la concentration en vitamine A; 1 µg = 3,3 UI. Quand on emploie des tables de composition des aliments pour calculer les valeurs déquivalent de rétinol, il convient de se rappeler que la vitamine A et le carotène sont fréquemment surestimés, car leurs valeurs sont souvent déterminées par des méthodes qui ne distinguent pas les bêta-carotènes des autres caroténoïdes biologiquement moins actifs ou inactifs.
La vitamine A est impliquée dans la vision, car elle aide à maintenir lavant de loeil (conjonctive et cornée) solide, clair et humide. Elle est également impliquée dans la différenciation cellulaire, la reproduction, la croissance et la réponse immunitaire. Elle aide à maintenir toutes les cellules de la superficie du corps (cellules épithéliales) assez saines pour que les micro-organismes ne pénètrent que difficilement dans le corps. Ces superficies corporelles comprennent la peau, la surface de loeil, lintérieur de la bouche, les cellules qui tapissent les appareils digestif et respiratoire. Sil y a carence en vitamine A dans lorganisme, les symptômes apparaissent au niveau de loeil et des surfaces tissulaires.
La xérophtalmie est un état de loeil où la conjonctive et la cornée sont anormalement sèches. Sans traitement, la xérophtalmie peut évoluer vers la kératomalacie, un état de loeil caractérisée par de sérieux dégâts au niveau de la cornée, qui devient opaque et ulcérée. La cécité peut sensuivre; en outre, de 50 à 80 pour cent des enfants non traités et devenus aveugles par manque de vitamine A meurent au cours des quelques premiers mois de leur cécité. Le facteur déterminant principal de la mortalité de ces enfants doit être recherché dans leur état nutritionnel initial.
La vitamine A joue également un rôle important dans la réduction de la pathologie et de la mortalité liées aux maladies respiratoires et diarrhéiques, surtout chez les jeunes enfants. Leffet de la vitamine est particulièrement décisif sur les cas de rougeole, maladie de lenfance très commune mais encore mal contrôlée en Afrique.
Les besoins journaliers en vitamine A, selon le sexe et lâge, sont indiqués au tableau 42. Les quantités de divers aliments qui contiennent environ 500 ER de vitamine A, quantité proche de lapport journalier recommandé pour ladulte, sont indiquées à la figure 29. Lhuile de palme rouge fraîche est une des sources les plus riches en vitamine A des régimes alimentaires africains.
Dans de nombreux pays, les états de carence en vitamine A constituent un sérieux problème de santé publique, et leur contrôle représente une haute priorité pour beaucoup de gouvernements et dorganisations internationales. A cet égard, limportance du secteur agricole - pêches et forêts comprises - est capitale. Il est généralement admis que les stratégies alimentaires offrent la seule approche sûre et durable pour éradiquer les maladies de carence en vitamine A (ou en tout autre micronutriment, à lexception de liode). Dans les pays ou les régions où se pose le problème de la déficience en vitamine A, il faut développer des politiques agricoles qui favorisent laugmentation de la production, de la transformation, de la commercialisation et de la consommation daliments riches en vitamine A. Il convient également daccorder plus dattention à la production des jardins potagers et des vergers domestiques, des jardins scolaires et communautaires et des grandes unités de production commerciale de légumes et de fruits riches en micronutriments (voir aussi le chapitre 5).
TABLEAU 42 |
||||||
Estimation des besoins journaliers en certaines vitamines |
||||||
Group/age |
Vitamine A |
Thiamine |
Riboflavine |
Niacine |
Folate |
Vitamine C |
(ans) |
(µg ER) |
(mg) |
(mg) |
(mg) |
(µg) |
(mg) |
Enfants (garçons et filles) |
|
|
|
|
|
|
0-6 mois |
350 |
-a |
- |
- |
19 |
20 |
6-12 mois |
350 |
0,3 |
0,5 |
5,4 |
32 |
20 |
1-3 ans |
400 |
0,5 |
0,8 |
9,0 |
40 |
20 |
3-5 |
400 |
0,7 |
1,0 |
10,5 |
53 |
20 |
5-7 |
400 |
0,8 |
1,1 |
12,1 |
65 |
20 |
7-10 |
400 |
0,9 |
1,3 |
14,5 |
85 |
20 |
Garçons |
|
|
|
|
|
|
10-12 |
500 |
1,0 |
1,6 |
17,2 |
110 |
20 |
12-14 |
600 |
1,2 |
1,7 |
19,1 |
140 |
30 |
14-16 |
600 |
1,2 |
1,8 |
19,7 |
180 |
30 |
16-18 |
600 |
1,2 |
1,8 |
20,3 |
200 |
30 |
Filles |
|
|
|
|
|
|
10-12 |
500 |
0,9 |
1,4 |
15,5 |
120 |
20 |
12-14 |
600 |
1,0 |
1,5 |
16,4 |
150 |
30 |
14-16 |
550 |
1,0 |
1,5 |
15,8 |
170 |
30 |
16-18 |
500 |
0,9 |
1,4 |
15,2 |
170 |
30 |
Enceintes |
600 |
1,0 |
1,6 |
17,5 |
400 |
50 |
Hommes, actifs |
|
|
|
|
|
|
18-60 |
600 |
1,2 |
1,8 |
19,8 |
200 |
30 |
>60 |
600 |
1,2 |
1,8 |
19,8 |
200 |
30 |
Femmes, actives |
|
|
|
|
|
|
En âge de procréer |
500 |
0,9 |
1,3 |
14,5 |
170 |
30 |
Enceintes |
600 |
1,0 |
1,5 |
16,8 |
400 |
50 |
Allaitantes |
850 |
1,1 |
1,7 |
18,2 |
270 |
50 |
>60 |
500 |
0,9 |
1,3 |
14,5 |
170 |
30 |
a (-) pas de valeur disponible; on estime que le lait maternel couvre les besoins.
Source: FAO, 1989a; FAO/OMS, 1974.
FIGURE 29 |
Source: King et Burgess, 1993. |
La vitamine D et sa fonction dans le métabolisme
La vitamine D joue un rôle essentiel dans la régulation du métabolisme du calcium et du phosphore. Elle contribue à maintenir le taux calcique du sang, en contrôlant les quantités de calcium alimentaire absorbées, les quantités déposées dans le tissu osseux et les quantités excrétées par les reins. Un déficit de vitamine D entraîne des déformations osseuses appelées rachitisme chez lenfant, ostéomalacie chez ladulte. La vitamine D est dérivée du cholestérol sous laction de la lumière solaire.
En Afrique, où la peau jouit normalement dune forte exposition au soleil, la carence en vitamine D nest pas fréquente. Les sources alimentaires de cette vitamine sont rares, et leurs contenus variables. La vitamine D est présente dans le lait entier, la crème, le beurre et le fromage. On en trouve un peu dans la chair des poissons gras et dans les oeufs, mais ces aliments sont périssables et coûteux. La plupart des enfants trouvent la vitamine D dont ils ont besoin dans laction du soleil sur leur peau, mais les femmes qui vivent cloîtrées et qui couvrent complètement leur corps quand elles sortent de chez elles peuvent avoir besoin dun apport alimentaire supplémentaire.
Les autres vitamines liposolubles et leurs fonctions
Les autres vitamines liposolubles sont les vitamines E et K. La vitamine E est présente dans toutes les membranes cellulaires de lorganisme où lon pense quelle empêche loxydation, par loxygène moléculaire, des acides gras polyinsaturés. Cette action est similaire à celle des nombreux anti-oxydants utilisés dans lindustrie alimentaire pour protéger les corps gras du rancissement. La vitamine E est indispensable également à la structuration normale des cellules, au maintien des activités de certaines enzymes ainsi quà la formation des hématies. Cette vitamine protège aussi les poumons, le coeur et dautres tissus de la dégradation et contribue à empêcher la destruction des hématies. En outre, elle a la réputation de réduire le rythme du vieillissement cellulaire. Un déficit de vitamine E rend stérile le rat de laboratoire et peut provoquer lavortement spontané chez la femme enceinte.
Les principales sources alimentaires de vitamine E sont les huiles végétales, les noix, la viande, les légumes à feuilles vertes, les céréales, le germe de blé et le jaune doeuf. Comme cette vitamine est largement distribuée dans les aliments, la probabilité dun déficit dorigine alimentaire est mince. Dordinaire, un état de carence ne survient quen raison dune mauvaise absorption intestinale et se manifeste cliniquement en anémie. Néanmoins, la cause la plus probable dune anémie dorigine alimentaire reste le déficit en fer.
La vitamine K, comme la vitamine A, existe sous deux formes. La vitamine K1 est présente dans les végétaux, tandis que la vitamine K2 est produite par de nombreuses espèces de bactéries, dont Escherichia coli qui habite dans le gros intestin chez les êtres humains. Il est communément admis que cette biosynthèse intestinale couvre les besoins de lorganisme; cela expliquerait pourquoi les êtres humains, à lexception des nouveau-nés, semblent ne pas dépendre de lalimentation pour leur vitamine K. La vitamine K est présente dans les légumes à feuilles vertes, le jaune doeuf, les huiles végétales, le fromage et le foie. Le déficit alimentaire est rare, mais un manque peut se produire pour cause de malabsorption au cours de certaines maladies du foie ou dune diarrhée chronique. Une des fonctions de la vitamine K consiste à favoriser la coagulation du sang dans les plaies ouvertes.
Les vitamines hydrosolubles
Les vitamines hydrosolubles comprennent les vitamines C et B12 et les sept vitamines du complexe vitaminique B.
La vitamine C est également connue par son nom chimique dacide ascorbique. Elle fut la première vitamine à être isolée et synthétisée. Sur le plan de la chimie, cette vitamine est un sucre simple; dailleurs, elle est le plus puissant des agents réducteurs naturellement présents dans les tissus vivants. Néanmoins, son action biologique exacte dans lorganisme nest pas encore bien comprise.
La vitamine C est importante pour la croissance et le maintien en bon état des os, des dents, des gencives, des ligaments et des vaisseaux sanguins. Elle contribue à la production des substances responsables de la transmission de linflux nerveux dune cellule nerveuse à lautre (les neurotransmetteurs), ainsi quà la production des hormones des glandes surrénales, corticostéroïdes compris. Lhydrocortisone, qui est le corticostéroïde le plus important de lorganisme humain, régule lutilisation physiologique des lipides, des protéines et des glucides.
La vitamine C est impliquée dans la réponse du système immunitaire à linfection et à la cicatrisation des plaies. Elle contribue à labsorption par lorganisme du fer non hématique, forme du fer alimentaire présent dans les végétaux, les oeufs et le lait, mais que la paroi intestinale absorbe difficilement. Les agrumes, par exemple, qui contiennent de la vitamine C et de lacide citrique, augmentent le pourcentage du fer non hématique absorbé à partir dun plat de maïs et de haricots secs ou dune autre céréale et dun mélange de légumes secs, à condition que ces ingrédients soient consommés ensemble.
Une alimentation longtemps carencée en vitamine C conduit au scorbut, une maladie dans laquelle le système immunitaire de lorganisme est déprimé. Les cellules épithéliales perdent leur capacité de liaison, ce qui rend la cicatrisation plus difficile et favorise les ecchymoses.
Les principales sources alimentaires de vitamine C sont les légumes et les fruits frais, spécialement les agrumes, la goyave, le fruit du baobab, la papaye, la mangue, la tomate, le poivron et le piment, le lait frais des animaux et le lait maternel. La vitamine C est très labile et facilement détruite par la chaleur et lair. Cest pourquoi des quantités considérables de vitamine C sont perdues, si les fruits et les légumes sont transformés ou sils sont gardés chauds après la cuisson. Les fruits et les légumes peuvent également perdre une bonne part de leur vitamine C au séchage (voir au chapitre 6 la section sur le stockage et la transformation des aliments).
Les vitamines les plus importantes du complexe vitaminique B sont la thiamine, la riboflavine et la niacine. Les fonctions principales de ces vitamines hydrosolubles concernent le métabolisme des glucides au cours de la production dénergie et dans la régulation de lutilisation physiologique des protéines.
La carence en thiamine entraîne le béribéri, rare de nos jours. Cétait une maladie associée à certains régimes alimentaires où la majeure partie de lénergie provenait du riz poli ou de farines très raffinées, et qui comportaient très peu dautres aliments. Elle affectait surtout les femmes en âge de procréer et leurs enfants. La thiamine, la riboflavine et la niacine sont généralement présentes ensemble dans les aliments, mais en proportions différentes selon laliment. Les sources les plus riches sont les viandes, le poisson, les oeufs et le lait; on en trouve aussi de bonnes quantités dans les légumes secs, les arachides et les grains entiers de céréales. Les graines oléagineuses en contiennent des quantités appréciables, et on peut en obtenir de petites quantités en consommant de façon régulière des fruits et des légumes à feuilles vertes.
La carence en riboflavine risque davantage de se produire que la carence en thiamine parce que les sources de riboflavinesont moins nombreuses. Le foie, le lait, les oeufs, les grains entiers et la levure de bière sont de bonnes sources. Une carence prolongée en riboflavine entraîne une irritation de la langue, des fissures aux lèvres et aux commissures de la bouche et certains troubles oculaires, tels quune sensibilité excessive à la lumière vive (photophobie).
La niacine, qui consiste en acide nicotinique et nicotinamide, est impliquée dans la production des hormones sexuelles et dans le maintien dune peau saine. La niacine est présente dans les céréales sous une forme chimiquement liée qui nest pas absorbée par lorganisme. La niacine est libérée en partie et devient alors disponible lors de la cuisson des céréales. La niacine peut être produite dans lorganisme à partir du tryptophane, un des acides aminés essentiels des protéines. Cette synthèse ne peut sopérer quen présence dun excès de tryptophane; 60 mg de tryptophane équivalent à 1 mg de niacine. Les principales sources alimentaires de niacine comprennent le foie, la viande maigre, la volaille, le poisson, les arachides et les haricots secs. Des carences saisonnières se produisent chez ladulte dont le régime alimentaire est surtout fait de maïs ou de sorgho, mais il faut savoir que les adultes peuvent trouver un complément de niacine dans les boissons fermentées à base de céréales, comme la bière. Un déficit prolongé de niacine entraîne la pellagre, maladie où les superficies de peau exposées au soleil se couvrent dune éruption noirâtre et squameuse. Certaines personnes atteintes de pellagre souffrent aussi de diarrhée et de troubles mentaux.
Une alimentation variée fournit la meilleure des protections contre les déficits en vitamines du groupe B.
Lacide folique et la vitamine B12
Lacide folique et la vitamine B12 sont mises dans un même groupe parce quelles sont toutes deux essentielles à la formation normale du sang. Les hématies se forment dans la moelle osseuse; leur formation requiert la fourniture de quantités suffisantes de nutriments tels que le fer, les acides aminés, la vitamine B12 et lacide folique.
Lacide folique, ou folate, est présent dans différents aliments, en particulier dans le foie et les légumes à feuilles vert sombre. Pendant la grossesse, lacide folique joue un rôle important dans la croissance du foetus: il contribue au développement du système nerveux ainsi quà la formation des globules sanguins. Lorganisme ne stocke quune faible quantité de folate dans le foie, et le folate, contrairement au fer, ne peut pas resservir après destruction des hématies. Un apport alimentaire journalier simpose donc. Lacide folique est stable en milieu acide, mais il est assez rapidement détruit au chauffage en milieu neutre ou alcalin. Les opérations de cuisine peuvent entraîner de sérieuses pertes dacide folique, surtout lorsque des feuilles vertes sont traitées à la soude alcaline et bouillies longtemps pour être adoucies avant dêtre consommées, comme cest lhabitude dans certaines communautés. Lorganisme absorbe plus aisément le type dacide folique contenu dans le foie des animaux. Dans dautres aliments, le folate se présente surtout sous forme de polyglutamates, qui constituent des sources alimentaires moins fiables. La proportion de folate libre est relativement élevée dans les lentilles, les haricots secs et le jus dorange.
Un régime alimentaire varié comprenant des légumes et des fruits frais fournit généralement assez dacide folique pour couvrir les besoins de lorganisme. Les déficits légers que lon observe couramment peuvent être corrigés en augmentant la consommation quotidienne daliments riches en folate. Des déficits plus sévères peuvent se produire pendant la grossesse et lallaitement, chez les prématurés et les autres bébés de faible poids à la naissance, de même que chez les personnes qui prennent certains médicaments, notamment certains anti-paludiques.
La vitamine B12 est exclusivement présente dans des aliments dorigine animale comme la viande, le poisson et les produits laitiers. Elle est absorbée par lintestin grêle après sêtre liée à la substance appelée «facteur intrinsèque», produite dans la paroi de lestomac. La plupart des régimes alimentaires apportent plus de vitamine B12 quil nen faut, mais lexcédent est stocké dans le foie et peut y persister pendant plusieurs années. Une carence en vitamine B12 vérifiée chez une personne qui se nourrit normalement résulte vraisemblablement moins dun manque de vitamine que dune incapacité de labsorber; il sagit le plus souvent dune incapacité de la paroi gastrique à produire du facteur intrinsèque. Cette déficience conduit à lanémie pernicieuse, qui ne peut pas être corrigée par une simple amélioration du régime alimentaire.
Le fer et lanémie nutritionnelle
Le fer est un nutriment minéral indispensable à la formation de lhémoglobine et de certains enzymes de lorganisme. Lhémoglobine est le pigment rouge des hématies; elle transporte loxygène. Le fer est également impliqué dans la formation de la myoglobine, qui est le pigment transporteur de loxygène dans les cellules musculaires. Le fer est présent dans différents aliments comme le foie, la viande, les céréales et particulièrement les grains entiers, le poisson, les légumes à feuilles vertes, les noix et les haricots secs.
Les hématies nont quune durée de vie denviron quatre mois, de sorte que lorganisme doit les remplacer durant toute sa vie. Les nutriments nécessaires au remplacement des hématies comprennent le fer pour la production de lhémoglobine, le folate et les protéines. Lorganisme est en mesure de stocker un peu de fer dans les tissus et peut en recycler une certaine quantité quand les hématies sont détruites. Cependant, il doit constamment absorber du fer apporté par le régime alimentaire pour se maintenir en bonne santé.
Deux types de fer se retrouvent dans les aliments: le fer hématique et le fer non hématique. Le fer hématique est présent dans le sang et dans la chair des mammifères, de la volaille et du poisson. Cependant, la quantité de fer attribuée à la forme sèche de ces aliments dans les tables de composition des aliments peut prêter à confusion. Bien que le fer hématique soit relativement accessible, pas plus de 15 à 35 pour cent de tout le fer hématique consommé ne sont finalement absorbés à travers la paroi intestinale.
Le fer est présent dans les végétaux, les oeufs et le lait sous une forme appelée non hématique, généralement composée dun ensemble de sels ferriques inorganiques. Au cours de la digestion, ce fer inorganique est réduit partiellement en sa forme ferreuse, plus absorbable. Cette conversion est remarquablement aidée par la présence de vitamine C. Néanmoins, le corps humain nabsorbe souvent pas plus de 5 pour cent du fer non hématique consommé. Le fer du lait de vache est absorbé à raison denviron 10 pour cent. Quant au fer contenu dans le lait maternel, les bébés en absorbent à peu près 50 pour cent, alors quil sagit de fer non hématique, peut-être parce que les nourrissons disposent vraisemblablement dun mécanisme dabsorption plus efficace pour le lait maternel. Les suppléments de fer incorporés à certains aliments transformés sont dordinaire très bien absorbés. Les besoins en fer de lhomme, de la femme, de lenfant et du nourrisson, selon le régime alimentaire, sont indiqués au tableau 43.
Labsorption du fer non hématique peut être influencée par certains autres composants des repas. Labsorption et lassimilation du fer non hématique est augmentée par laddition daliments riches en vitamine C, notamment les fruits qui contiennent aussi de lacide citrique. Les sources de fer hématique, comme le foie, la viande des mammifères et de la volaille ou le poisson consommés au cours du même repas, peuvent également influencer labsorption du fer non hématique. Le café et le thé contiennent des tannins qui peuvent réduire labsorption du fer, si ces boissons sont prises avec les repas; il vaut donc mieux en boire entre les repas.
TABLEAU 43 |
|||
Estimation des besoins en fer selon le régime alimentaire (mg/jour) |
|||
Group/age (ans) |
Disponibilité en fer du régime alimentairea |
||
Elevée |
Moyenne |
Faible |
|
Enfants (garçons et filles) |
|
|
|
6-12 mois |
7 |
11 |
21 |
1-3 ans |
5 |
7 |
13 |
3-5 |
5 |
7 |
14 |
5-7 |
7 |
10 |
19 |
7-10 |
8 |
12 |
23 |
Garçons |
|
|
|
10-12 |
8 |
12 |
23 |
12-14 |
12 |
18 |
36 |
14-16 |
12 |
18 |
36 |
16-18 |
8 |
11 |
23 |
Filles |
|
|
|
10-12 |
8 |
11 |
23 |
12-14 |
13 |
20 |
40 |
14-16 |
13 |
20 |
40 |
16-18 |
16 |
24 |
48 |
Enceintes |
26 |
38b |
76b |
Hommes, actifs |
|
|
|
18-60 |
8 |
11 |
23 |
>60 |
8 |
11 |
23 |
Femmes, actives |
|
|
|
En âge de procréer |
16 |
24 |
48 |
Enceintesb |
26 |
38c |
76b |
Allaitantes |
9 |
13 |
26 |
>60 |
6 |
9 |
19 |
a Elevée: le régime contient du fer non hématique et du fer hématique, par exemple. riz et pois + poisson; labsorption de fer est denviron 15 pour cent. Moyenne: le régime contient du fer non hématique + de la vitamine C, par exemple riz et pois + citrouille; labsorption en fer est denviron 10 pour cent. Faible: le régime contient seulement du fer non hématique, par exemple riz et pois; labsorption de fer est de lordre de 5 pour cent.
b Besoins en fer durant la grossesse: il sagit dune estimation des besoins minimaux pendant toute la période des neuf mois.
c Des suppléments sont généralement nécessaires pour couvrir les besoins en fer.
Source: FAO, 1989a.
TABLEAU 44 |
||
Teneur en folate des grains de céréales germés |
||
Période de germination (heures) |
Teneur en folate (µg par 100g) |
|
Pois chiche |
Eleusine cultivée |
|
0 |
213 |
14 |
24 |
306 |
16 |
48 |
344 |
63 |
72 |
374 |
84 |
Source: Babu, 1976.
La fermentation et la germination des grains de céréales, des fèves et des pois contribue aussi à augmenter la disponibilité en fer non hématique. La germination peut en outre augmenter le niveau du folate des céréales (tableau 44). Au cours de la germination, des facteurs antinutritionnels comme les phytates, les inhibiteurs de trypsine et les hémagglutinines peuvent se dégrader partiellement et rendre ainsi le fer non hématique plus disponible. Normalement, la disponibilité en phosphore et en fer augmente, et la synthèse de la lysine et du tryptophane devient possible.
La carence en fer ou en folate, qui conduit à lanémie, est exacerbée par tout état responsable de pertes répétées dhématies. Les parasites du paludisme, protozoaires connus sous le nom de plasmodium, détruisent les hématies et peuvent ainsi provoquer une anémie hémolytique. Une partie du fer libéré par les cellules détruites peut être réutilisé, mais lorganisme doit remplacer les hématies à un rythme plus rapide que dordinaire. Lapport alimentaire de folate doit alors être augmenté. Les parasites internes et externes, comme les vers, les douves, les sangsues, les poux, les tiques et les mites, couvrent leurs besoins nutritionnels à partir du sang, des tissus ou du bol alimentaire de lhomme et réduisent dautant les nutriments utilisables par lorganisme. Lankylostome, le ver de Guinée, la bilharzie responsable de la schistosomiase et les filaires peuvent également contribuer à détruire les hématies et à développer lanémie qui sensuit.
Liode et ses fonctions physiologiques
Liode est un des minéraux du corps humain qui doivent être rangés parmi les oligoéléments ou micronutriments. Lorganisme de ladulte contient de 20 à 50 mg diode; de cette quantité totale, 8 mg sont concentrés dans la glande thyroïde, comme constituant des hormones T3 (tri-iodothyronine) et T4 (thyroxine) qui contiennent 64 pour cent diode. Les sécrétions thyroïdiennes déterminent le niveau du métabolisme de nombreuses cellules. Si la sécrétion est déficiente, comme dans lhypothyroïdie, le métabolisme de base baisse, la circulation ralentit et tout le rythme de la vie est freiné. Le manque diode dans la nourriture peut conduire à lhypertrophie de la glande thyroïde, cest-à-dire au goitre. La carence en iode chez le nouveau-né peut entraîner le crétinisme, état caractérisé par un visage aux traits grossiers, larriération mentale et un retard de croissance.
Le goitre endémique est ordinairement lié à la situation géographique et rencontré dans les régions au sol pauvre en iode. Les végétaux comestibles qui poussent sur ces sols sont également pauvres en iode. Des états de carence sont observés dans les zones montagneuses calcaires, les plaines inondables et les régions où le régime alimentaire des habitants ne comporte pas de bonnes sources diode. Le contenu iodé dun aliment dépend de la quantité présente dans la nourriture des animaux et de la disponibilité en iode du sol. Les aliments riches en iode comprennent les mollusques, le poisson, les crustacés et les algues. Laddition diode au sel de cuisine (ou iodation) peut contribuer à augmenter les apports. Les besoins journaliers en iode sont indiqués au tableau 45.
TABLEAU 45 |
|
Apport journalier diode recommandé |
|
Groupe dâge |
Apport diode |
(µg) |
|
0-6 mois |
40 |
6-12 mois |
50 |
1-3 ans |
70 |
3-7 ans |
90 |
7-10 ans |
120 |
10 ans et plus |
150 |
Femme enceinte |
175 |
Femme allaitante |
200 |
Source: OMS/UNICEF/ICCIDD, 1993.
La quantité diode alimentaire disponible pour le métabolisme peut se trouver réduite si le régime alimentaire contient des agents goitrigènes qui interfèrent avec le métabolisme de liode et, par conséquent, avec la formation des hormones thyroïdiennes. Ces agents goitrigènes peuvent constituer une cause secondaire des troubles dus à une carence en iode dans les zones où lapport diode est faible ou marginal. Un agent goitrigène important est la toxine des tubercules de manioc amer insuffisamment traité et de ses feuilles. Quand un dérivé du manioc contient une quantité appréciable de cyanure résiduel, ce cyanure peut réagir, pendant la digestion, avec les acides aminés soufrés et produire du thiocyanate. Les thiocyanates ont une activité anti-thyroïdienne prononcée. Les résultats dexpériences sur des animaux montrent que des agents goitrigènes existent dans nombre dautres aliments, par exemple les mils, le soja, les légumes du genre Brassica comme le chou et le navet, et dautres végétaux de la famille des crucifères. Toutefois, on observe quune consommation modérée de ces aliments ne contribue guère au développement des troubles dus à une carence en iode, car ces aliments sont habituellement assez cuits pour inactiver leurs composants goitrigènes.
Les autres nutriments minéraux
Les autres nutriments minéraux comprennent le sodium, le potassium, le calcium, le magnésium, le phosphore, le soufre, le zinc, le sélénium et le molybdène. Les sels de sodium et de potassium sont très communs dans les aliments et sont facilement absorbés par le tube digestif et par les principaux cations des liquides organiques.
Le calcium, le magnésium, le phosphore et le soufre sont des composants importants de los et des autres tissus de soutien. Le contenu calcique du régime alimentaire calculé à partir des tables de composition des aliments ne reflète pas exactement la quantité finalement utilisée par le consommateur, car le calcium alimentaire est excrété dans les fèces à raison de 70 à 80 pour cent. Labsorption est favorisée par la présence de vitamine D. De plus, cette vitamine est indispensable à lutilisation du calcium. Le niveau du calcium dans lorganisme se maintient en une proportion de 2 à 1 avec le phosphore; ces deux minéraux agissent et se rencontrent généralement ensemble dans lorganisme. Labsorption du calcium est favorisée par la sécrétion normale de lhormone parathyroïdienne, ainsi que par un apport suffisant - mais pas excessif - de protéines dans le régime alimentaire. Un excès dapport protéique peut interférer avec le bilan du calcium. Le lactose améliore aussi la digestion du calcium chez lanimal. Il semble que chez lêtre humain cet effet doit être mis en relation avec lhydrolyse de lenzyme lactase. Les acides phytique et oxalique et leurs sels ont tendance à inhiber la captation du calcium. Les enfants en croissance, les femmes enceintes et les nourrices ont besoin de trouver des suppléments de calcium dans leur alimentation, car il leur faut absorber et retenir plus de calcium que dordinaire pour la formation du nouveau tissu osseux.
Les problèmes relatifs au déficit permanent en calcium dans lalimentation, par exemple lostéoporose qui se caractérise par une perte minérale osseuse, sont de mieux en mieux reconnus en Amérique du Nord et en Europe comme une cause secondaire importante des fractures du grand âge, particulièrement chez les femmes. Aujourdhui, linformation scientifique sur lincidence des fractures dans certaines régions du globe, dont lAfrique, est encore insuffisante. Il est possible que beaucoup de femmes âgées des pays en développement aient consommé toute leur vie un régime alimentaire carencé en composants nécessaires à la formation et à la protection des os; une telle insuffisance, sajoutant à une vie de travail physique pénible, risque probablement plus dendommager les tissus musculaires et squelettiques que de les protéger. Un apport calcique suffisant tout au long de la vie, combiné avec une activité physique régulière, contribue certainement à prévenir lostéoporose. Les bonnes sources alimentaires de calcium comprennent tous les laits, dont le lait maternel, le fromage, les petits poissons avec arêtes comestibles, les haricots secs et les petits pois, léleusine cultivée et les feuilles vert sombre.
Comme les phosphates sont un composant majeur de toutes les cellules animales et végétales, le phosphore est présent dans tous les aliments naturels; donc, une carence alimentaire primaire en phosphore risque peu de se produire chez lêtre humain. De même, le magnésium étant un composant de la chlorophylle, il est présent dans la plupart des aliments, surtout dorigine végétale, et les carences alimentaires sont rares. Quant au soufre, ses sources alimentaires principales sont les acides aminés soufrés cystéine et méthionine. Limportance des acides aminés dans lalimentation a été analysée dans la section sur les protéines. Les vitamines thiamine et biotine (vitamine H) contiennent également du soufre.
Le zinc, le sélénium et le molybdène sont des oligo-éléments qui retiennent lattention depuis quelques années, mais leur fonction nest pas encore entièrement connue. On sait que le zinc est indispensable à la croissance et que des carences existent dans les pays en développement. La carence en zinc contribue également à ralentir la croissance, à réduire la résistance aux infections, à augmenter lincidence des avortements et peut-être à compromettre le développement mental. La viande constitue la source alimentaire principale de zinc bio-utilisable. Les personnes qui ont surtout une alimentation à base de farines complètes, comme cest souvent le cas en Afrique, risquent de développer une carence en zinc, non seulement parce que leur régime alimentaire est pauvre en zinc, mais aussi parce que leur consommation importante de phytates tend à inhiber labsorption intestinale du zinc. A lavenir, les techniques améliorées de transformation des aliments permettront daugmenter la biodisponibilité du zinc des céréales et des légumineuses.
La carence en sélénium se produit surtout dans les zones où le sol est pauvre en cet oligo-élément. On attribue au sélénium un rôle important dans la prévention des cancers et autres maladies dégénératives. Selon certaines observations récentes, la carence en sélénium jouerait un rôle pathogène dans le crétinisme endémique.
Le molybdène est aisément absorbé par lintestin. Les sources alimentaires riches en molybdène comprennent le lait et les produits laitiers, les légumes secs, les céréales et la viande rouge, spécialement le foie et le rognon. Un manque de molybdène dans lalimentation des femmes enceintes et des nourrices pourrait contribuer à compromettre la croissance et le développement cérébral du foetus et du nourrisson.
Normes et critères
Une alimentation suffisante et bien équilibrée sur le plan nutritionnel est indispensable pour mener une vie saine et active. Les paramètres principaux dune alimentation suffisante ont été analysés au chapitre 3. De nombreuses tables reprenant les besoins alimentaires normatifs ont été préparées par les organismes officiels; en outre, certains pays ont élaboré leurs propres normes nationales de besoins en nutriments aux différents âges de la vie.
Ces normes ont un triple usage. Tout dabord, elles permettent de vérifier si les apports alimentaires des différents groupes dune communauté sont suffisants et didentifier ainsi les groupes vulnérables à la malnutrition. Ensuite, les normes servent de guide aux personnes qui planifient les vastes programmes alimentaires, par exemple ceux des cantines scolaires ou des camps de réfugiés. Enfin, elles sont indispensables à la planification des politiques alimentaires et nutritionnelles au niveau national ou international.
Quand il sagit délaborer des plans, les besoins alimentaires sont souvent assimilés aux besoins en énergie pour préparer des bilans alimentaires nationaux (voir le chapitre 2). Lapport de nutriments spécifiques est souvent calculé à partir des valeurs chimiques indiquées dans les tables de composition des aliments. Des exemples tirés de telles tables figurent aux tableaux 26 et 40 et à lannexe 4.
Les experts et les planificateurs en nutrition se fondent sur les besoins en aliments et en nutriments pour définir les objectifs alimentaires dun pays et ceux de sa population. En revanche, celle-ci ne perçoit pas son alimentation en termes de nutriments mais comme un ensemble de mets préparés. Lencadré 54 indique quels sont les besoins alimentaires en termes de repas. En effet, la fréquence de consommation est un facteur important en nutrition, surtout pour les enfants dont la capacité stomacale est limitée.
Les limites des tables de composition des aliments
Une planification alimentaire qui vise à satisfaire les besoins nutritionnels de la communauté comporte nécessairement la revue de la structure de la consommation couplée avec lemploi de données récentes et précises sur la composition des aliments. Ces données de composition servent, par exemple, à vérifier si les régimes alimentaires et les approvisionnements sont suffisants sur le plan nutritionnel et à interpréter les bilans alimentaires et les enquêtes de consommation. De plus, les considérations nutritionnelles reçoivent une attention de plus en plus grande dans la planification de la production agricole. Les tables de composition des aliments fournissent des informations utiles pour la sélection des cultures, le développement des nouvelles variétés et la promotion commerciale des produits traditionnels. Cependant, les tables actuellement en circulation ont de sérieuses limitations quil faut reconnaître si lon veut les utiliser à bon escient.
Le calcul du contenu nutritionnel des aliments ne saurait être uniquement basé sur des échantillons représentatifs des disponibilités; il doit porter sur les aliments effectivement consommés par les gens. Cependant, les erreurs déchantillonnage sont fréquentes, car la composition nutritionnelle peut varier énormément selon la souche ou lespèce dune source alimentaire, le mode de culture ou délevage, la maturité ou la fraîcheur (celle-ci peut, par exemple, influencer la teneur en eau de laliment). Des erreurs résultent aussi du choix de la méthode danalyse des nutriments, faute de normes internationales agréées.
ENCADRÉ 54 |
Les hommes ont besoin dau moins deux repas variés par jour et de quelques en-cas. Des aliments consistants et des repas copieux peuvent leur procurer assez dénergie. Les femmes ont besoin dau moins deux repas variés par jour et de quelques en-cas. Si elles sont enceintes ou si elles allaitent leur enfant, elles ont besoin de presque autant daliments que les hommes, surtout si elles font un travail pénible. Elles ont besoin de beaucoup plus de fer et de folate que les hommes, en particulier quand elles sont enceintes. Les personnes âgées ont besoin dau moins deux repas par jour. Elles ont besoin de moins dénergie que les jeunes, mais dautant de protéines et dautres nutriments. Les femmes ménopausées ont besoin de moins de fer que les femmes en âge davoir des enfants. Les adolescents ont besoin dau moins deux gros repas variés par jour et de quelques en-cas. Ils peuvent manger des aliments volumineux. Les garçons ont besoin de beaucoup dénergie et les filles de fer. Les jeunes adolescentes enceintes ont besoin de manger davantage que les femmes enceintes. Les enfants dâge scolaire ont besoin de deux ou trois repas et de quelques en-cas chaque jour. Les enfants de un à cinq ans ont besoin de lait maternel au moins jusquà lâge de deux ans. Ils ont besoin dau moins trois repas variés et de deux goûters par jour. Ils ne peuvent pas faire de gros repas. Leur nourriture doit être parfaitement propre, sans parasites ni micro-organismes qui pourraient causer des diarrhées et dautres infections. Les nourrissons de 6 à 12 mois doivent téter huit à dix fois par jour et même davantage. Ils ont besoin de trois à cinq petits repas légers par jour. Les nourrissons de moins de 6 mois nont besoin que de lait maternel, au moins dix fois par jour. |
Source: King et Burgess, 1993. |
Les chiffres relatifs à la composition des aliments riches en eau sont toujours sujets à caution. Les grains de céréales contiennent assez peu deau, de sorte que les tables donnent des valeurs fiables pour la plupart dentre eux. Le contenu vitaminique et minéral des aliments est en général plus variable que leur contenu énergétique et protéique. Les différences sont surtout marquées pour les fruits et légumes, notamment en ce qui concerne la vitamine A, lacide ascorbique et les minéraux.
Les apports de nutriments calculés à partir des données de composition ne représentent pas forcément les quantités de nutriments réellement absorbés par lintestin. Les tables de composition nincluent pas destimation de la biodisponibilité nette des vitamines et des minéraux, car de trop nombreux composants alimentaires favorisent ou compromettent labsorption de ces nutriments. La plupart des tables en circulation contiennent aussi des informations quantitatives douteuses sur les fibres, les oligo-éléments, les acides gras spécifiques, les caroténoïdes, les tocophérols et les polluants, qui soulèvent actuellement lintérêt le plus vif. Lévaluation de létat nutritionnel des individus et la définition du traitement qui convient à chaque cas exigent encore que lon mette en oeuvre un ensemble danalyses alimentaires, biochimiques, cliniques et anthropométriques. Toutefois, le perfectionnement des données de composition à léchelle mondiale et leur harmonisation entre les différents pays sont en cours dans le cadre dun effort concerté entre la FAO, lUniversité des Nations Unies et dautres organisations internationales et nationales (FAO, 1994d).
Les besoins en énergie et nutriments varient au cours de la vie, de la petite enfance à la vieillesse. Les facteurs qui déterminent ces besoins comprennent lâge, le poids corporel, le sexe, le métabolisme de base, lactivité physique, létat physiologique (par exemple, selon quune femme est réglée ou ménopausée, enceinte ou allaitante), létat de santé (par exemple, selon que lindividu est en pleine forme physique ou malade, parasité, ou malingre à cause dun faible poids de naissance) et la présence ou labsence de certaines associations alimentaires dans le régime.
Près de la moitié de lénergie requise par lorganisme est destinée à lactivation des muscles mobilisés dans la vie courante. Le reste est utilisé pour la croissance, la rénovation et lentretien du corps humain. Les besoins énergétiques diffèrent considérablement dun individu à lautre. Certains consomment trois fois plus dénergie par jour que dautres. La majeure partie de ces écarts est due aux différences dactivité physique, mais aussi aux différences individuelles de rapidité dans la libération et lutilisation de lénergie. Le métabolisme de base (voir définition au bas de la page 20) varie dune personne à lautre et dépend des paramètres individuels dactivité, de poids corporel, dâge et de sexe (tableau 46).
TABLEAU 46 |
||||||
Métabolisme basal dhommes et de femmes de différents poids corporels |
||||||
Poids (kg) |
Hommes, âgés de: |
Femmes, âgées de: |
||||
18-<30 |
30-<60 |
>60 |
18-<30 |
30-<60 |
>60 |
|
40 |
1 291 |
1 343 |
1 027 |
1 084 |
1 177 |
1 016 |
45 |
1 368 |
1 401 |
1 095 |
1 158 |
1 221 |
1 067 |
50 |
1 444 |
1 459 |
1 162 |
1 231 |
1 264 |
1 121 |
55 |
1 521 |
1 517 |
1 230 |
1 305 |
1 308 |
1 174 |
60 |
1 597 |
1 575 |
1 297 |
1 378 |
1 351 |
1 226 |
65 |
1 674 |
1 633 |
1 365 |
1 452 |
1 395 |
1 279 |
70 |
1 750 |
1 691 |
1 432 |
1 525 |
1 438 |
1 331 |
75 |
1 827 |
1 749 |
1 500 |
- |
- |
- |
80 |
1 903 |
1 807 |
1 567 |
- |
- |
- |
Source: OMS, 1985.
Linteraction de la santé avec la nutrition revêt une importance particulière dans les nombreux pays africains où les infestations parasitaires et les maladies de lenfance comme la rougeole et la diarrhée, outre la malnutrition protéinoénergétique, sont les causes majeures de la mortalité infantile (tableau 47). Cette pathologie de lenfance peut être suivie, au début de lâge adulte, par des épisodes répétés de fièvre et de malaises associés au paludisme, à la schistosomiase et aux filarioses, qui diminuent lappétit et gênent labsorption des nutriments.
Chez la femme, les grossesses précoces et fréquentes peuvent contribuer à expliquer un état nutritionnel peu satisfaisant, caractérisé notamment par de faibles taux de fer et de folate conduisant à lanémie.
Les pénuries alimentaires saisonnières coïncident souvent avec le moment des travaux agricoles les plus exigeants. Les enfants et les adultes sous-alimentés et anémiques manquent dénergie et dinitiative et sont dans lincapacité détudier ou de travailler intensément. Ils narrivent plus à mobiliser toute leur énergie et pas même à produire, à transformer et à consommer plus daliments. Cest ainsi que se referme le cercle vicieux de la malnutrition qui entraîne une baisse de production, elle-même suivie dune aggravation de la malnutrition, et ainsi de suite.
TABLEAU 47 |
||
Les dix premières causes de décès dans les services de pédiatrie de lhôpital de Mbeya Referral, en Tanzanie, 1985 |
||
Maladie |
Nombre de cas |
Pourcentage de tous les décès |
Toutes les formes de MPE |
117 |
48 |
Pneumopathies |
32 |
13 |
Diarrhée |
21 |
9 |
Rougeole |
17 |
7 |
Paludisme cérébral |
16 |
7 |
Anémie |
11 |
5 |
Bactéries, méningite |
10 |
4 |
Septicémie |
9 |
4 |
Empoisonnements, surdoses |
2 |
1 |
Malformations congénitales |
2 |
1 |
Autres |
7 |
3 |
Total |
244 |
100 |
Source: Mduma, 1987.
La FAO a développé une méthodologie et un logiciel pour le calcul des besoins énergétiques de la population: ENREQ2. Cette méthodologie prend en compte les apports recommandés pour les enfants et les femmes enceintes ou allaitantes, les différents niveaux dactivité physique des adolescents et des adultes, les niveaux dinfection et le métabolisme de base. ENREQ2 inclut aussi des bases de données démographiques et anthropométriques couvrant les pays membres de la FAO de plus de 300 000 habitants, ce qui permet de calculer des besoins énergétiques de la population selon différents scénarios. Ce logiciel est un instrument souple mis à la disposition des décideurs qui veulent calculer les besoins énergétiques des populations dont la composition est connue ou qui présentent des caractères spéciaux, comme les populations de réfugiés comportant une forte proportion de femmes et denfants et qui ont besoin dune aide alimentaire.