La première publication parue au Niger, «Cahiers nigériens», date de 1933. Elle était destinée aux cadres et auxiliaires de ladministration coloniale.
«Niger information» sera publié plus tard en 1955 mais, comme le premier, il appartenait à ladministration coloniale et ne livrait que des informations lintéressant ou la concernant.
En 1963, parut «Labari» qui deviendra peu de temps après «Temps du Niger». Ce dernier prendra le titre de «Le Sahel» alors que naissait «Sahel Hebdo» qui deviendra, en 1985, «Sahel Dimanche».
Mais il ne faut pas croire que la lecture des nigériens «instruits» de lépoque coloniale se limitait aux feuilles administratives. Plusieurs dentre eux étaient abonnés aux journaux paraissant notamment à Dakar et à Paris. Il y avait aussi des publications de corporations et dassociations qui participaient à linformation et même à la formation du cercle restreint de lecteurs.
Cest en mai 1992 que fut publié le premier vrai journal dinformation et dinvestigation privé «Haské».
Depuis, plus dune vingtaine de titres parurent, de qualités diverses et de vie ou de survie toujours difficile et incertaine.
La presse écrite en langue nationale occupe également une place non négligeable dans lhistoire générale de la presse au Niger.
Cest surtout dans le secteur rural quelle a tiré ses lettres de noblesse en soutenant laction dalphabétisation fonctionnelle. Mais, en 1974, lEtat a procédé à une réorientation des missions de la presse rurale en élargissant son champ daction. Cette réorientation visait à faire de la presse rurale de véritables organes pour informer les populations rurales sur les événements locaux, régionaux, nationaux et internationaux, assurer le dialogue à tous les niveaux, susciter et renforcer les connaissances intellectuelles des populations rurales, les aider à améliorer leurs conditions de vie et à mieux participer aux projets de développement.
Mais quil sagisse de la presse rurale, des publications régionales ou même nationales, les journaux en langues nationales, cessaient toujours de paraître dès que le sponsor se retirait.
Sur près de 60 titres recensés en 1985 dans les départements de Maradi et Zinder, seul «Haské Maganin Duhu» continue à paraître car il bénéficie de lappui du Projet de développement rural de larrondissement (PDRA/FIDA).
LES MÉDIAS PUBLICS EN FRANÇAIS
Les médias publics en français sont édités par lOffice national dédition et de presse (ONEP). Il sagit du «Sahel» et de «Sahel dimanche».
LOffice est composé de quatre directions:
LES MÉDIAS PRIVÉS EN FRANÇAIS
Les médias privés en français nont pas de siège et ne sont que laffaire de leur directeur de publication.
LA PRESSE RURALE
Létude de lorganisation et du fonctionnement de la presse rurale paraît plus intéressante, surtout lorganisation de la rédaction qui varie selon les niveaux.
Au niveau sous-régional
Conformément à sa mission qui est celle de permettre aux populations alphabétisées de «prendre en main leur propre information et éducation permanente en vue dun développement global du monde rural», la presse villageoise est installée en un lieu stratégique dans un centre dalphabétisation (marché, carrefour fréquenté).
La presse villageoise peut regrouper des rédacteurs de plusieurs localités environnantes.
Chaque village désigne un Comité de rédaction de cinq membres comprenant un représentant de lautorité, linstructeur du Centre dalphabétisation et des adultes alphabétisés. Cette équipe est chargée de collecter, de sélectionner et de rédiger les articles qui alimenteront le journal, composé et réalisé au niveau village/ Centre, par des représentants des Comité villageois de rédaction.
Des articles tirés des différents journaux des villages/Centres alimenteront le journal régional.
Au niveau régional
La presse régionale a pour mission dassurer la coordination du travail de collecte de linformation, de recherche et de création au niveau des villages.
Elle est aussi chargée de réaliser techniquement des journaux et brochures à partir des matériaux élaborés à la base.
A cet effet, la presse régionale est animée par deux équipes (permanente et associée):
· Léquipe permanente
Elle comprend un responsable de rédaction, un journaliste, un graphiste, un spécialiste en formation, des techniciens dimprimerie.
· Léquipe associée
Le noyau permanent peut périodiquement solliciter le groupe associé des représentants des services dalphabétisation et de vulgarisation (santé, agriculture, élevage, etc.).
Au niveau national
Le rôle du niveau national est dassurer la formation, la recherche, la coordination et le contrôle. Il a aussi la charge de la réalisation du journal national «GANGA».
Comme au niveau régional, deux équipes rédactionnelles existent à ce niveau:
· Léquipe permanente
Elle comprend un ou deux journalistes, un graphiste, un ou deux spécialistes en formation, des techniciens de limprimerie.
· Léquipe associée
Elle se compose dagents dalphabétisation et des autres secteurs; elle intervient en cas de besoin.
Dune manière générale, la présentation de la presse écrite en français et en langues nationales reste approximative: textes touffus, peu dillustrations et de photos expressives, autant déléments qui rendent les journaux peu attrayants et ne facilitent pas la lisibilité.
Au niveau du contenu, on relève des insuffisances limitant la portée informative des articles.
LES MÉDIAS PUBLICS EN FRANÇAIS
Ils privilégient les informations officielles et institutionnelles, sans éclairage et mise en perspective nécessaires à une meilleure compréhension, et ce malgré les efforts fournis dans le cadre dinformations générales relatives à la santé, léducation, lenvironnement.
LES MÉDIAS PRIVÉS
Ils présentent lavantage doffrir dautres points de vue; ils sont cependant trop partisans pour laisser une marge aux lecteurs afin quils se fassent leur propre opinion par rapport aux informations reçues.
LA PRESSE RURALE
Quasi inexistante aujourdhui, elle accordait plus dimportance aux informations de proximité et fonctionnelles, en dépit de ses insuffisances techniques.
En définitive, la presse écrite ne sintéresse véritablement aux questions de développement que lors des événements spéciaux; rarement, des articles de fonds accessibles sont réalisés et un espace de dialogues et déchanges accordé aux acteurs de développement.
Le coût dimpression de 1 500 exemplaires de six pages est de 300 000 francs CFA (FCFA) pour une vente au prix maximum de 300 FCFA lexemplaire. Certains journaux ont des installations qui leur permettent de réaliser la saisie et la mise en page, réduisant le coût de limpression de 10 à 25 pour cent.
· LOffice national dédition et de presse (ONEP) dispose de sa propre imprimerie pour limpression du journal «le Sahel» et «Sahel Dimanche». Mais la situation de tous les journaux se caractérise par dimportants problèmes de moyens: diminution des subventions de lEtat, matériel roulant régulièrement immobilisé, difficultés dapprovisionnements en intrants de fongibles, équipements obsolètes, accumulations des impayés, créances non recouvrées, sécheresse financière chronique, etc. Les médias connaissent de sérieuses difficultés de fonctionnement. A telle enseigne que lONEP est obligé de réduire ses tirages (de 3 000 exemplaires au lendemain de lindépendance, il a régressé à moins de 1 000 en lan 2000 pour le «Sahel») et de faire limpasse sur les reportages et enquêtes dans le Niger profond (produits prisés de ses lecteurs).
· LAgence nigérienne de presse (ANP) a généré, elle, 23,5 millions de FCFA de recettes propres et/ou a bénéficié dune subvention de lEtat dun montant de 60 millions de FCFA alors même que, à son lancement, lAgence devrait générer des recettes de 190 millions de FCFA.
· La presse privée réalise lessentiel de son chiffre daffaires dans la vente à la criée. Ce créneau comporte cependant des risques de mévente.
De plus en plus, les éditeurs mesurent limportance de la publicité dans la vie dun journal. A titre illustratif, une page de publicité dans le «Sahel Dimanche» vaut 300 000 FCFA. Pour encaisser le même montant, le journal doit écouler 1 500 exemplaires, soit la totalité de sa production actuelle.
Mieux, la plupart des journaux privés attendent de trouver de la publicité pour passer à limprimerie, bradant ainsi souvent les espaces. Annonceurs et hommes politiques nhésitent pas à exploiter cette faiblesse; ils mettent sous embargo tous les titres qui refusent «les échanges de services». A cette situation déjà difficile viennent se greffer les coûts dimpression très élevés et une messagerie informelle.
Un des points faibles de la presse écrite nigérienne, la messagerie, a les possibilités de saméliorer. Le premier effort sera laugmentation des abonnements, qui présente plusieurs avantages:
largent frais est payé à lavance et aucun numéro ne peut être refusé alors que la vente à la criée se fait le plus souvent en fonction du contenu;
elle possède un lectorat fidèle qui peut servir de baromètre à travers un dialogue permanent;
limportance de labonnement donne une indication sur le nombre de lecteurs et pourrait intéresser les annonceurs.
Pour pallier léventuel problème dacheminement qui pourrait contrarier laugmentation des abonnements, on pourrait envisager le portage. Offrant les mêmes avantages que labonnement, le portage fonctionne sur le principe de la proximité, les journaux, livrés directement à temps, facilitant ainsi la lecture.
En attendant la reprise économique pour augmenter la manne publicitaire, les pouvoirs doivent trouver un mécanisme pour répartir le peu qui existe. Par exemple, en adoptant des mesures incitatives pour les annonceurs, en encourageant la création des agences de conception, de collecte et de distribution de publicités.
Ces agences développeront une stratégie pour convaincre les entreprises, sociétés, ONG sur limportance de la publicité et la complémentarité des médias audiovisuels et écrits.
Par ailleurs, les directions commerciales de journaux doivent être dynamisées et le personnel formé.
Hormis la subvention de lEtat pour les médias publics, quelques «généreux donateurs» pour certains titres de la presse privée et le soutien occasionnel des partenaires au développement, il nexiste pas de source de financement pour le développement de la presse écrite au Niger.
Les institutions bancaires refusent doctroyer des crédits pour un secteur dominé par linformel, sans projets financièrement rentables.
Les opérateurs économiques, friands des marchés juteux de lEtat, considèrent les journaux comme des moyens potentiellement nuisibles à leurs affaires ou pour les tenants du pouvoir. Par conséquent, tout investissement dans ce secteur équivaudrait à une condamnation.
Un des freins à lessor de la presse écrite réside dans le coût dimpression tributaire, entre autres, des intrants et des équipements. Dailleurs, la presse rurale ny a pas survécu.
Les éditeurs, les organisations socioprofessionnelles de linformation et de la communication ont toujours revendiqué des pouvoirs publics lapplication de la Convention de Florence. Cette convention, initiative de lUNESCO, demande lexonération du papier et de lencre destinés aux uvres culturelles.
Or, aujourdhui, on se rend compte que les plaques qui nétaient pas concernées par cette convention pèsent lourdement sur le coût dimpression. De même, les ordinateurs, les imprimantes et leurs consommables ne sont pas visés par cette convention.
Cependant, lexpérience au niveau de la sous-région (Sénégal, Bénin) relativement à lexonération du papier, na pas apporté lamélioration souhaitée, les commandes se faisant en petites quantités; la marge nest donc pas importante.
Le rôle de service public joué par la presse écrite dans la quête de transparence, de la démocratie et de la bonne gouvernance, doit amener les pouvoirs publics à concrétiser laide à la presse. Cet appui se justifie aussi par les effets induits bénéfiques de la presse écrite:
cest lun des secteurs qui a créé le plus demplois ces dernières années en absorbant des jeunes diplômés sans emploi, des chômeurs de longue durée et en facilitant linsertion des jeunes désuvrés dans son circuit de distribution;
cest un secteur qui a apporté une plus-value à limprimerie et au commerce du papier, de lencre, des plaques et des équipements.
Cependant, même si lEtat décide doctroyer cette aide, le statut flou des entreprises de presse risquerait de poser des problèmes de répartition et dimpact.
Il faut souligner que des pays comme le Burkina Faso, le Bénin ou le Mali, qui ont expérimenté laide à la presse, commencent à percevoir une amélioration dans le domaine de la presse écrite.
De droit, la publication a toujours été libre au Niger. Cest ainsi que lOrdonnance n° 59-135 du 21 juillet 1959 portant sur la liberté de la presse, reprise de la loi française, modifiée par la loi n°74-24 du 26 avril 1974, stipule en son Article 3 que «Tout journal et périodique peut être publié sans autorisation préalable et sans dépôt de cautionnement, avec la réserve de la notifier au procureur de la République et au Ministère de la Justice».
De plus, tout journal ou périodique doit avoir un directeur de publication. Linnovation suivante sera introduite par lOrdonnance n° 93-029 du 30 mars 1993 pour tenir compte des propriétaires: «Toute personne, quelle soit ou non associée, actionnaire, commanditaire ou bailleur de fonds, peut créer et publier des organes de communication à la condition que les journalistes y travaillant soient des nigériens dans leur majorité».
Cependant, pour limiter la concentration des titres aux mains dun groupe dintérêt, dangereuse pour la démocratie, une disposition a été retenue: «Aucune personne physique ou morale de nationalité nigérienne ne peut être propriétaire de plus de quatre (4) organes de presse en même temps. Ces dispositions ne sappliquent pas aux services publics... Lorsque ces personnes sont de nationalité étrangère, la limitation est portée à deux (2)». Le souci de professionnalisme a prévalu aussi dans la démarche du législateur qui indique que «Tout organe dinformation générale doit avoir un directeur de publication, journaliste professionnel nigérien».
Souvent ambigus, faits dantagonismes ou de complicités, de connivence, les rapports presse-pouvoirs ont souvent pris en otage le droit du public à linformation et empêché la démocratie de se nourrir de débats riches et variés.
PRESSE-POUVOIR POLITIQUE
De tout temps, la majorité politique contrôle les médias du secteur public. Malgré lexistence dune instance de régulation (le Conseil supérieur de la communication), les partis dopposition et la société civile ont du mal à y accéder et les débats contradictoires à sy installer. Sagissant du secteur privé, deux tendances se dégagent: lune proche de la mouvance présidentielle, lautre de lopposition.
La presse, dite réellement indépendante, ne parvient toujours pas à émerger et à saffirmer.
Il faut noter que si la presse publique reste soumise à lautocensure, à la censure directe ou indirecte, les journalistes du privé, sils ne sont pas envoyés en prison en violation des dispositions légales, sont traînés devant les juridictions. Il est arrivé que des journalistes soient enlevés et torturés.
PRESSE-POUVOIR ÉCONOMIQUE
Malgré la similitude de certaines de leurs activités, les rapports entre la presse et le pouvoir économique se limitent à:
PRESSE-POUVOIR RELIGIEUX
Les relations ne sont pas très actives.
PRESSE-POUVOIR JUDICIAIRE
Si à lépoque des régimes dexception, les journalistes se retrouvent sans forme de procès en prison, avec le processus démocratique, les journalistes sont devenus, à tort ou à raison, les abonnés des juridictions. La cinquantaine de procès enregistrés depuis 1993 concernent essentiellement la diffamation et linjure (on verra au Chapitre consacré au cadre juridique et institutionnel quil reste un grand effort à faire en matière de législation et de réglementation).
PRESSE ÉCRITE:
élaborer un statut particulier de lentreprise de presse;
doter les centres régionaux de lONEP et de lANP de matériels de communication modernes, de moyens de fonctionnement et des conditions dune synergie entre ces deux structures;
créer, former et équiper un réseau de correspondants de lANP au niveau sous-régional;
former et recycler les journalistes dans le domaine des nouvelles technologies de linformation et de la communication;
réaliser une étude de lectorat au niveau national.
PRESSE RURALE:
réhabiliter les structures de production de la presse rurale (comités de rédaction à différents niveaux);
recentrer les activités de production de la presse rurale au niveau des cantons;
doter les centres de presse rurale en moyens dimpression modernes, simples et utilisant lénergie alternative;
élargir le cadre de conception et de réalisation de la presse rurale, jusque-là essentiellement assuré par les cadres de lalphabétisation, aux autres structures techniques;
former les rédacteurs de la presse rurale aux techniques rédactionnelles et à la réalisation dun journal, et les responsables à la gestion dune entreprise de presse rurale;
intégrer la presse rurale dans les activités communautaires de développement et prévoir les moyens de son fonctionnement.
MESSAGERIE:
encourager et appuyer les promoteurs privés et les jeunes diplômés sans emploi à sintéresser au secteur de la messagerie;
soutenir les initiatives de création de messageries fiables couvrant au moins le niveau sous-régional.
LIMPRIMERIE:
renforcer les compétences techniques et artistiques aux niveaux régional et sous-régional;
renouveler et/ou équiper les imprimeries régionales afin quelles puissent assurer efficacement les activités décentralisées dimpression.
MÉDIAS IMPRIMÉS:
améliorer le processus délaboration et de réalisation des médias imprimés en associant davantage les cadres de terrain et les communautés de base;
produire des versions en langues nationales pour tout média imprimé, destinées aux communautés rurales;
décentraliser et harmoniser les activités de conception et dimpression des médias imprimés pour minimiser le coût et éviter les doublons.
À LÉTAT:
mettre en place laide à la presse;
veiller au respect de la dimension de service public tant au niveau des médias dEtat quau niveau de la presse privée;
appliquer et élargir la Convention de Florence sur les intrants et équipements.
AUX PARTENAIRES:
appuyer les actions de développement et de la décentralisation de la presse écrite, de limprimerie, de lagence de presse et des média imprimés;
créer un cadre de concertation dappui à la presse écrite.
AUX ÉDITEURS DE PRESSE:
développer une politique commerciale active en faveur de la promotion de la lecture des journaux;
accorder plus despace aux questions relatives au développement.
AUX CHERCHEURS:
explorer dans la tradition orale nigérienne, des éléments susceptibles daider à écrire des articles en langues nationales plus pertinents.