Annexe I: Plan d'action international - Requins
Annexe II: Contenu suggéré d'un plan - Requins
Annexe III: Contenu suggéré d'un rapport d'évaluation des stocks de requins
Annexe IV: Classification des types de pêche au requin
Introduction
1. Pendant des siècles, les pêcheurs artisanaux ont pratiqué une pêche durable des requins dans les eaux côtières et certains le font encore. Toutefois, au cours des dernières décennies, l'avènement de techniques modernes conjugué à l'accès à des marchés éloignés a entraîné une augmentation de l'effort et du rendement de la pêche au requin ainsi qu'une expansion des zones exploitées.
2. L'expansion des captures de requins et ses conséquences pour les populations de certaines espèces vivant dans plusieurs zones des océans de la planète sont jugées préoccupantes. En effet, les requins présentent souvent un rapport stock-recrutement étroit, des temps de récupération longs en réaction à la surpêche (faible productivité biologique en raison d'une maturité sexuelle tardive; progéniture peu abondante même si elle se caractérise par une mortalité naturelle faible) et des structures spatiales complexes (ségrégation par taille/sexe et migrations saisonnières).
3. L'état actuel des connaissances sur les requins et les pratiques utilisées dans la pêche au requin compliquent la conservation et la gestion; on manque en effet de données sur les captures, l'effort de pêche, les débarquements et le commerce et on ne dispose que de données limitées sur les paramètres biologiques de nombreuses espèces et leur identification. Si l'on veut en savoir plus sur la situation des stocks de requins et faciliter la collecte des données nécessaires, il faut réunir des ressources suffisantes pour financer la recherche et la gestion.
4. L'opinion qui prévaut actuellement est qu'il convient de mieux gérer la pêche au requin et certaines pêcheries multispécifiques dans lesquelles les requins constituent une capture accessoire non négligeable. Dans certains cas, une meilleure gestion s'impose de toute urgence.
5. Un petit nombre de pays disposent de plans de gestion axés spécifiquement sur leur pêche au requin, qui prévoient un accès contrôlé, des mesures techniques, notamment des stratégies destinées à réduire les prises accessoires de requins et des dispositions visant à favoriser l'utilisation intégrale du requin. Toutefois, compte tenu de l'étendue des aires de distribution des requins, notamment en haute mer, et des longues migrations effectuées par de nombreuses espèces, il devient de plus en plus nécessaire d'instaurer une coopération et une coordination internationales pour les plans de gestion des requins. À l'heure actuelle, il n'existe que peu de mécanismes internationaux de gestion qui traitent efficacement la question de la capture des requins.
6. La Commission interaméricaine du thon tropical, le Conseil international pour l'exploration de la mer, la Commission internationale pour la conservation des thonidés de l'Atlantique, l'Organisation des pêches de l'Atlantique Nord-Ouest, la Commission sous-régionale des pêches des États d'Afrique de l'Ouest, l'Organisation latino-américaine de développement halieutique, la Commission des thons de l'océan Indien, la Commission pour la conservation du thon rouge du Sud et le Programme des pêches océaniques de la Communauté du Pacifique encouragent leurs pays membres à recueillir des données sur les requins et, dans certains cas, ont mis sur pied des bases de données régionales pour l'évaluation des stocks.
7. Notant les préoccupations croissantes causées par l'expansion des captures de requins et son impact négatif potentiel sur les populations de requins, le Comité des pêches de la FAO (COFI) a proposé, à sa vingt-deuxième session, en mars 1997, que la FAO organise, en se servant de fonds extrabudgétaires, une consultation d'experts chargée d'élaborer des directives qui déboucheraient sur un Plan d'action visant à améliorer la conservation et la gestion des requins, dont le Comité des pêches serait saisi à sa session suivante.
8. Ce Plan d'Action International pour la conservation et la gestion des requins (PAI-requins) a été élaboré par le Groupe de travail technique sur la conservation et la gestion des requins, réuni à Tokyo du 23 au 27 avril 1998, et par la Consultation sur la gestion des capacités de pêche, l'aménagement des pêcheries de requins et la capture accessoire d'oiseaux de mer dans les pêches à la palangre, tenue à Rome du 26 au 30 octobre 1998, y compris la réunion préparatoire de la Consultation qui s'est déroulée à Rome du 22 au 24 juillet 1998.
9. Le PAI-requins comprend un cadre général, les principes, l'objectif et les procédures de mise en uvre (dont les annexes) énoncés dans le présent document.
Nature et portée
10. La participation au PAI-requins est facultative. Le PAI-requins a été élaboré dans le cadre du Code de conduite pour une pêche responsable, conformément à l'Article 2(d). Les dispositions de l'Article 3 du Code s'appliquent à l'interprétation et à l'application de ce document et à son rapport avec d'autres instruments internationaux. Tous les États intéressés sont encouragés à l'appliquer.
11. Aux fins du présent document, le terme requin vise toutes les espèces de requins, raies et chimères (classe des chondrichtyens). Le terme capture de requins inclut les captures visant les requins ainsi que les captures accessoires de requins, la pêche commerciale, la pêche de loisir et d'autres formes de pêche dans lesquelles des requins sont capturés.
12. Le PAI-requins couvre toutes les captures de requins, qu'elles soient ciblées ou non sur ces espèces.
Principes directeurs
13. Participation. Les États contribuant par leurs activités de pêche à la mortalité d'une espèce ou d'un stock devraient participer à la gestion de cette espèce ou de ce stock.
14. Maintien des stocks. Les stratégies de gestion et de conservation devraient viser à maintenir les taux de mortalité liés à la pêche à un niveau viable pour chaque stock en appliquant l'approche de précaution.
15. Considérations nutritionnelles et socio-économiques. Les objectifs et stratégies de gestion et de conservation devraient tenir compte du fait que, dans certaines régions et/ou pays à faible revenu et déficit vivrier, les captures de requins représentent une source traditionnelle et importante de nourriture, d'emploi et/ou de revenu. Ces pêcheries devraient être gérées dans une perspective durable pour continuer à assurer nourriture, emploi et revenus aux communautés locales.
Objectif
16. Le Plan d'action international a pour but d'assurer la conservation et la gestion des requins et leur utilisation durable à long terme.
Mise en uvre
17. Le PAI-requins s'applique aux États dans les eaux desquels des requins sont capturés par leurs propres navires ou par des navires étrangers ainsi qu'aux pays dont les navires pratiquent la capture de requins en haute mer.
18. Les États devraient adopter un plan d'action national pour la conservation et la gestion des stocks de requins (Plan-requins) si leurs navires visent directement les requins ou s'ils capturent régulièrement des requins comme prises accessoires. L'annexe II reproduit le contenu proposé du Plan-requins. Lors de l'élaboration d'un Plan-requins, il conviendra de tenir compte, le cas échéant, de l'expérience acquise par les organisations régionales et sous-régionales d'aménagement des pêcheries.
19. Chaque État est responsable de l'élaboration, de la mise en uvre et du suivi de son Plan-requins national.
20. Les États s'efforceront d'établir un Plan-requins au plus tard pour la session de 2001 du Comité des pêches.
21. Les États entreprendront une évaluation périodique de l'état des stocks de requins faisant l'objet d'opérations de pêche, afin d'apprécier la nécessité de mettre au point un Plan-requins. Cette évaluation se conformera aux dispositions de l'Article 6.13 du Code de conduite pour une pêche responsable. Elle sera notifiée dans le cadre du Plan-requins de chaque État. Le contenu suggéré d'un rapport d'évaluation des stocks de requins est repris à l'annexe III. Il faudra, pour ce faire, rassembler régulièrement des informations, notamment des informations commerciales et des données permettant de mieux identifier les espèces et, par la suite, d'établir des indices d'abondance. Les données rassemblées par les États doivent, s'il y a lieu, être mises à la disposition des organisations régionales et sous-régionales des pêches concernées et de la FAO et examinées au sein de ces mêmes instances. La collaboration internationale sur les systèmes de collecte et de mise en commun des données aux fins de l'évaluation des stocks est particulièrement importante dans le cas des stocks chevauchants de requins et des stocks de requins grands migrateurs.
22. Le Plan-requins visera à:
23. Les États qui appliquent le Plan-requins évalueront régulièrement, au moins tous les quatre ans, sa mise en uvre, afin de dégager des stratégies d'un bon rapport coût-performance permettant d'améliorer son efficacité.
24. Les États qui estiment qu'un Plan-requins n'est pas nécessaire en ce qui les concerne reverront régulièrement cette décision, à la lumière de l'évolution de leurs pêcheries, mais devront, au minimum, rassembler des données sur les captures, les débarquements et le commerce.
25. Les États, dans le cadre de leurs compétences respectives et le respect du droit international, s'efforceront de coopérer par le truchement d'organisations ou d'arrangements régionaux ou sous-régionaux de gestion des pêches, ou d'autres formes de coopération, afin de garantir la durabilité des stocks de requins, y compris le cas échéant, en mettant au point des Plans-requins sous-régionaux ou régionaux.
26. Lorsque des stocks chevauchants de requins et des stocks de requins grands migrateurs sont exploités par deux ou plusieurs États, ceux-ci s'efforceront de garantir l'efficacité de la conservation et de la gestion des stocks.
27. Les États s'efforceront de collaborer, par l'intermédiaire de la FAO et d'arrangements internationaux, dans le domaine de la recherche, de la formation et de la production d'information et de matériel didactique.
28. Dans le cadre du rapport biennal prévu par le Code de conduite, les États qui appliquent le Plan-requins feront rapport sur les progrès réalisés dans sa mise en uvre, alors que les États qui n'appliquent pas de Plan-requins feront état de l'évaluation qui a abouti à la conclusion qu'un Plan-requins n'était pas nécessaire.
Rôle de la FAO
29. Conformément aux instructions données par la Conférence et dans le cadre de ses activités du Programme ordinaire, la FAO fournira un appui aux pays pour l'application du PAI-requins, y compris pour la préparation des Plans-requins.
30. Conformément aux instructions données par la Conférence, la FAO aidera les pays à élaborer et à mettre en uvre leurs Plans-requins, par le biais de projets d'assistance technique conçus spécifiquement pour chaque pays, financés par les crédits du Programme ordinaire et des fonds extrabudgétaires mis à la disposition de l'Organisation à cette fin. La FAO fournira aux pays une liste d'experts et un mécanisme d'assistance technique pour l'élaboration des Plans-requins.
31. La FAO, par l'intermédiaire de son Comité des pêches, fera rapport tous les deux ans sur les progrès réalisés dans la mise en application du PAI-requins.
Généralités
Dans la gestion de la pêche au requin, il importe de voir que l'état des connaissances sur les requins et les pratiques employées lors de la capture des requins peuvent compliquer la conservation et la gestion, notamment en raison des problèmes suivants:
Contenu du Plan-requins
Les Directives techniques pour la mise en uvre du Plan d'action international pour la conservation et la gestion des requins, auxquelles est jointe cette annexe, apportent des orientations techniques détaillées, tant pour l'élaboration que pour la mise en uvre du Plan-requins. Les orientations portent sur les aspects suivants:
Le Plan-requins devrait contenir les éléments suivants:
A. Description de la situation en vigueur concernant:
B. Objectif du Plan-requins
C. Stratégies permettant de réaliser les objectifs. Voici quelques exemples pratiques de mesures envisageables:
Le rapport d'évaluation des stocks de requins devrait contenir, entre autres informations, les renseignements suivants:
- l'effort de pêche: pêche visant ou non les requins; tous les types de pêche; et
- le rendement: physique et économique.
- contrôle de l'accès aux fonds de pêche;- mesures techniques (y compris des mesures de réduction des prises accessoires, l'existence de sanctuaires et de périodes de fermeture de la pêche); et
- observation, contrôle et surveillance.
Pêche côtière au hameçon et au filet maillant: Quelle que soit la région, les méthodes de pêche dépendent de la topographie des fonds de pêche et de la composition des espèces disponibles (mélange requins/téléostéens). Dans les régions dotées d'un large plateau continental, la plupart des captures artisanales sont prises à l'aide de filets maillants démersaux, formés pour la plupart d'une nappe monofilament et, pour certains d'entre eux, d'une nappe multifilament, et de palangres démersales. Ces engins ramènent une grande diversité d'espèces de requins et de téléostéens. Dans les régions à plateau continental étroit, où l'on accède rapidement aux eaux profondes situées au-delà du plateau continental, ou dans des régions à plateau continental plus large, les flottilles artisanales utilisent des palangres pélagiques et des filets dérivants pour capturer les requins pélagiques.
Chalutage démersal ramenant des captures accessoires: Le chalutage démersal a des répercussions sur les stocks de squales (Squalidae), d'anges de mer (Squatina spp.), de batoïdes et de chimères. Comme dans les pêcheries en haute mer, une grande partie des prises accessoires de requins et de batoïdes par les chaluts sont rejetées à l'état mort et ne sont souvent pas notifiées. Des campagnes menées indépendamment de la pêche dans plusieurs parties du monde ont montré que les effectifs de ces groupes accusent un déclin marqué.
Captures accessoires en eau profonde: À l'instar de nombreuses espèces de téléostéens étudiées dans les eaux plus profondes et plus froides des pentes continentales, les petits requins d'eau profonde (en particulier les genres Centrophorus, Centroscymnus, Etmopterus, Dalatias et Deania) semblent avoir une productivité particulièrement faible. Les pentes continentales sont généralement raides et la superficie totale du fonds marin qui leur est associée est petite comparée aux superficies couvrant le sommet des plateaux continentaux et les plaines abyssales des océans. Comme certaines espèces de petits requins restent confinées à l'intérieur d'un étage de profondeur assez étroit sur ces pentes, la superficie totale qu'elles occupent est faible. L'expansion progressive du chalutage démersal dans des eaux de plus en plus profondes, à la recherche de téléostéens très estimés, sur les pentes continentales de certaines régions du monde, expose plusieurs espèces à un risque élevé de raréfaction poussée. Le chalutage démersal des plaines abyssales se pratique déjà à des profondeurs dépassant 1 000 mètres. Certaines de ces captures sont visées tandis que d'autres sont prises accidentellement par des filets maillants et des hameçons.
Capture accessoire de requins pélagiques: Les pêches au thon et aux thonidés effectuées à la palangre, à la senne tournante, et au filet dérivant en haute mer dans les ZEE, moyennant des accords d'accès bilatéraux ramènent une quantité importante de captures accessoires. Bien que la plupart des nations ne soient pas tenues d'enregistrer les prises de requins ou de notifier la composition spécifique des captures réalisées dans ces pêcheries, les navires de recherche et les programmes d'observation exécutés par des observateurs montés à bord des palangriers indiquent que le peau bleue (Prionace glauca) est la principale espèce capturée. D'autres espèces sont fréquemment ramenées, mais en quantités moindres: Isurus oxyrinchus, Alopias supercilious, Carcharhinus longimanus et Lamna nasus.
Pêcheries dulçaquicoles: Certaines des espèces de requins les plus menacées vivent dans des habitats d'eau douce. Plusieurs raisons font que ces espèces sont plus vulnérables que celles qui vivent en milieu marin. La quantité d'eau douce contenue dans les cours d'eau et les lacs est faible par rapport à la quantité d'eau de mer présente à la surface du globe. Les lacs et les cours d'eau tropicaux, où vivent les espèces dulçaquicoles, se situent, pour la plupart, dans des pays en développement caractérisés par une population humaine dense et en croissance. Ces zones sont beaucoup plus accessibles à l'exploitation que les eaux marines. Les habitats d'eau douce fluctuent aussi davantage que les habitats marins quant à la température de l'eau, la concentration d'oxygène dissous, la limpidité et le courant; et ces paramètres changent progressivement à cause de la déforestation. La contamination de l'eau par des toxiques provenant de l'exploitation minière et de l'agriculture, le réaménagement des voies d'eau associé à la construction de barrages et à l'irrigation, et la modification inévitable de la flore et de la faune des habitats d'eau douce risquent d'altérer ces derniers au-delà de la tolérance de certaines espèces de requins. Au moins trois espèces de requins de rivière sont déjà extrêmement rares. Le requin du Gange (Glyphis gangeticus) n'a été observé que dans le bassin du Gange-Hooghly sur le sous-continent indien, bien que la présence de plusieurs espèces du genre Glyphis dans la région de Bornéo, en Australie septentrionale et en Nouvelle-Guinée ne soit pas à exclure.