Perspectives de l'alimentation 01/96

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RAPPORT SPECIAL: SITUATION DES DISPONIBILITES ALIMENTAIRES EN AFRIQUE SUBSAHARIENNE 1/

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VUE D'ENSEMBLE

Les toutes dernières informations semblent indiquer que la production céréalière de l'Afrique subsaharienne a diminué d'une dizaine de millions de tonnes en 1995 et se situe au-dessous de la tendance. Cela est dû en grande partie à la sécheresse en Afrique australe et aux mauvaises récoltes en certains endroits d'Afrique de l'Est. La production vivrière continue d'être sapée par les effets persistants des troubles civils dans plusieurs pays de

la région. Cette chute de la production survient à un moment particulièrement inopportun. Le marché céréalier mondial est tendu: les prix à l'exportation sont élevés et devraient le rester pendant une bonnepartie de 1996. De ce fait, il sera plus difficile de compenser le recul par une augmentation des importations commerciales


Les faibles stocks détenus dans les principaux pays donateurs laissent présager un recul brutal des disponibilités mondiales d'aide alimentaire en 1996. Etant donné la forte concurrence exercée par l'Europe de l'Est et la Communauté des Etats indépendants, il apparaît peu probable que la part allouée à l'Afrique subsaharienne augmente. En 1994/95, quelque 29 pour cent des besoins de la région n'ont pas été satisfaits. Cela montre bien qu'il est dangereux de dépendre de l'aide alimentaire pour stabiliser les disponibilités au niveau national, et qu'il faut accroître la production vivrière intérieure. Le Secrétariat de la FAO est convaincu que le transfert et la diffusion de techniques appropriées dans nombre de pays à faible revenu et à déficit vivrier de la région permettront d'accomplir de grands progrès dans la réduction de cette dépendance. A court terme, cependant, l'aide alimentaire reste évidemment nécessaire; un grand nombre de réfugiés, de personnes déplacées dans le pays et de victimes de la guerre continueront de dépendre de l'aide alimentaire d'urgence tout au long de 1996. Etant donné que les disponibilités mondiales d'aide alimentaire ne sont pas garanties, les achats locaux et les opérations triangulaires devraient devenir des sources toujours plus importantes pour les secours alimentaires d'urgence cette année.

Dans l'ensemble, il apparaît que les disponibilités alimentaires seront à nouveau tendues cette année en Afrique subsaharienne. On constate cependant certains signes positifs. Dans les zones sahéliennes et côtières d'Afrique de l'Ouest, certaines récoltes ont été bonnes ou records. L'Ethiopie, très dépendante de l'aide alimentaire au cours de la dernière décennie, a enregistré une récolte exceptionnelle et n'aura pas besoin d'une aide alimentaire internationale à grande échelle en 1996. Le rétablissement de la stabilité politique dans une grande partie de l'Afrique subsaharienne déchirée par la guerre constitue un autre pas essentiel vers la sécurité alimentaire. L'Angola, le Mozambique et le Rwanda commencent petit à petit à recueillir les bienfaits de la paix. L'accord de paix au Libéria fait naître l'espoir d'une reprise partielle de la production alimentaire et des activités commerciales en 1996, après six années de troubles civils qui ont pratiquement paralysé le secteur agricole.

1/ Sur la base du numéro de janvier 1996 du Rapport spécial préparé par la FAO/SMIAR “Situation des disponibilités alimentaires et perspectives des récoltes en Afrique subsaha-rienne actuelles, être superieurs aux prévisions précédentes, des mesures ayant été prises pour limiter les présentant la situation dans tous les pays en développement d’Afrique subsaha-rienne.

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UNE ANNEE DIFFICILE EN PERSPECTIVE DANS LA CORNE DE L'AFRIQUE

Une série de missions FAO/PAM d'évaluation des récoltes et des disponibilités alimentaires a donné des rapports mitigés concernant les récoltes de la campagne principale 1995 et les perspectives des disponibilités alimentaires pour 1996. La production céréalière totale est proche de la normale, mais elle a accusé une chute significative au Soudan et au Kenya, où la faiblesse des prix sortie exploitation par rapport au coût des intrants a découragé les producteurs. En Erythrée et en Somalie, la production a été touchée par des précipitations irrégulières et des infestations de ravageurs. Du fait de la mauvaise récolte et des faibles réserves de produits alimentaires, l'Erythrée voit considérablement augmenter ses besoins d'aide alimentaire d'urgence et programme pour 1996. En Somalie, l'insécurité qui règne dans la capitale et dans la région de Bay, au sud, continue de perturber les approvisionnements alimentaires. La fermeture du port et la dévaluation de la monnaie ont entraîné de fortes hausses des prix des produits alimentaires.

Au contraire, une récolte meher (campagne principale) exceptionnelle a été rentrée en Ethiopie, du fait de conditions météorologiques favorables dans nombre des grandes régions productrices et à des infestations de ravageurs plus rares que d'habitude. Les agriculteurs ont profité de l'augmentation des disponibilités d'intrants et des débouchés commerciaux. De ce fait, des quantités relativement faibles d'aide alimentaire devront être importées en 1996, mais la situation de la sécurité alimentaire au niveau sous-national demeure précaire, avec de nombreuses populations vulnérables dans les zones traditionnellement déficitaires.

Erythrée: La production de céréales et de légumineuses de 1995 est estimée à environ 42 pour cent de moins qu'en 1994. Cela s'explique principalement par les faibles rendements dus aux précipitations défavorables et aux graves dégâts causés par les ravageurs. Du fait de la mauvaise récolte céréalière de cette année, la situation générale des disponibilités alimentaires devrait être tendue en 1996, comme le montre déjà la hausse des prix des céréales immédiatement après la récolte. On prévoit des difficultés d'approvisionnements alimentaires, avec de graves implications pour la population vulnérable, très nombreuse, qui dispose de ressources limitées et est fortement touchée par lamalnutrition. En outre, de grands groupes de pasteurs dans les provinces de Dankalia, de Barka et du Sahel seront touchés si la hausse des prix des céréales se poursuit dans les prochains mois. Une aide alimentaire sera nécessaire en 1996 dans les régions où la production a accusé un recul significatif, notamment en certains endroits de la province de Seraye, voisine de Gash-Setit (Shomboko), aux alentours de Dekamahare et des basses terres avoisinant les plaines de Hozomo (province d'Akele Guzay), à Keren dans la province de Senhit et en certains endroits de la province de Barka limitrophes de Senhit. Des interventions d'aide alimentaire resteront également nécessaires pour la population touchée par les troubles civils passés, en particulier les handicapés, les orphelins et les ménages dirigés par une femme, ainsi que pour les personnes rapatriées récemment qui ont des difficultés pour trouver des terres et/ou un emploi décent. Dans l'ensemble, on estime que 750 000 personnes auront besoin de secours en 1996.

Ethiopie: Le pays a rentré une récolte exceptionnelle, nettement supérieure au volume de l'année précédente. Les précipitations tombées en temps voulu et bien réparties ont encouragé les semis et favorisé le développement satisfaisant des cultures dans la plupart des régions. La libéralisation du commerce des céréales a entraîné une augmentation des superficies ensemencées (5 pour cent), tandis que l'amélioration de la distribution d'engrais, qui s'est accrue de 16 pour cent, et la quasi-inexistence des attaques de ravageurs migrateurs ont constitué les conditions les plus favorables depuis de nombreuses années. Toutefois, malgré une production dans l'ensemble favorable, certaines régions, notamment dans les hauts plateaux, ont accusé des pertes de récolte et de mauvais résultats.

Malgré une situation des disponibilités généralement confortable, une partie significative de la population connaîtra des déficits alimentaires du fait des déplacements, de la sous-production ou du manque d'accès/de droit à la nourriture. D'après les estimations, 3 millions de personnes auront besoin d'une aide alimentaire d'urgence en 1996. La situation est particulièrement préoccupante dans les régions traditionnellement déficitaires du Tigré et du Wollo, où même les années normales, les secours alimentaires assurent jusqu'à 30 pour cent de la sécurité alimentaire des foyers les plus démunis. La situation dans ces régions est aggravée par la conjugaison de facteurs défavorables, à savoir une deuxième mauvaise récolte consécutive en 1995, et des livraisons parfois inadéquates d'aide alimentaire, notamment dans le nord Wollo, ce qui a accentué la vulnérabilité d'une grande partie de la population. Parmi les autres régions à déficit vivrier chronique qui auront besoin de secours en 1996, figurent Walaita et certains endroits de l'ouest Hararghe. Des pénuries alimentaires localisées affectent E9‚galement d'autres endroits d'Amhara, d'Oromia et la zone méridionale (SEPAR).

Somalie: Les prix des produits alimentaires ont fortement augmenté ces trois derniers mois après la mauvaise récolte céréalière "gu" (campagne principale) de 1995 (quelque 65 pour cent de moins), le maintien de la fermeture du port de Mogadiscio, la dévaluation vertigineuse de la monnaie nationale et l'insécurité persistante en certains endroits du pays. En conséquence, la situation alimentaire déjà précaire de la population vulnérable dans les zones urbaines, qui comprend quelque 240 000 personnes déplacées, 600 000 rapatriés et un grand nombre de chômeurs, s'est encore dégradée. Dans les zones rurales, on estime que même si la récolte secondaire "der", qui est actuellement moissonnée, est normale, une aide alimentaire substantielle sera nécessaire à partir de mars 1996, quand les stocks vivriers seront épuisés. Les besoins d'aide alimentaire pourraient augmenter si la récolte "der" est réduite. Les zones les plus touchées par la réduction de la récolte principale sont les régions productrices de sorgho de Bay, Bakool et Hiraan, la région nord-ouest de Galbeed et certains endroits du Shabelle inférieur. En particulier, dans les districts de Baidoa, Bardheere, Saakow et Wanalweyne, près de 90 pour cent des agriculteurs ont perdu une grande partie ou la totalité de leur récolte. On a signalé également de graves dégâts des cultures de maïs dans les districts de Jamaame et Mahdday.

Soudan: La réduction des superficies ensemencées due à des facteurs économiques, aux pluies insuffisantes au début de la campagne et aux dégâts causés par les sauteriaux et les rongeurs, a entraîné une chute (26 pour cent) de la récolte de sorgho et de mil en 1995. Du fait de la récolte réduite attendue, les disponibilités seront tendues en 1996. Cela se reflète déjà dans la hausse des prix des céréales, qui ont atteint des niveaux records juste avant la récolte, en octobre 1995. D'après les estimations, la récolte céréalière est moyenne, mais une aide alimentaire est nécessaire pour les victimes des troubles civils persistants dans le sud du pays, où la production agricole et les activités commerciales ont été gravement perturbées. Parmi les personnes ayant besoin d'une aide alimentaire figurent les personnes déplacées et les groupes vulnérables. En outre, la situation des disponibilités alimentaires devrait être tendue dans les Etats qui ont traditionnellement un déficit vivrier du nord et de l'ouest Kordofan et du nord Darfour - au nord-ouest du pays - du fait de la chute de la production céréalière. Le cheptel est nombreux et les prix du bétail stables, ce qui semble indiquer que la population touchée dans ces trois Etats pourra acheter des céréales, il faudra surveiller étroitement la situation. Si les termes de l'échange entre le bétail et les céréales se dégradent, ces populations pourraient nécessiter une aide pour atteindre des niveaux de consommation normaux.

Ailleurs en Afrique orientale, la production a baissé au Kenya en 1995, mais elle a été supérieure à la moyenne en Tanzanie et en Ouganda.

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LES BESOINS D'AIDE ALIMENTAIRE D'URGENCE DEVRAIENT RESTER ELEVES DANS LA REGION DES GRANDS LACS EN 1996

La production alimentaire reste nettement inférieure aux niveaux d'avant la guerre au Rwanda, d'après une récente mission FAO/PAM d'évaluation des récoltes et des disponibilités alimentaires, bien que l'afflux de rapatriés ait stimulé la production agricole et permis une reprise partielle. La mission a souligné qu'une aide alimentaire d'urgence ciblée resterait nécessaire en 1996, particulièrement pour les rapatriés récents et les groupes vulnérables, mais aussi à l'appui de programmes de remise en état. La situation des disponibilités alimentaires demeurera précaire en certains endroits des préfectures de Kibungo, Gikongoro et Butare - voisines du Burundi - et dans certaines zones de Cyangugu, Kibuye et Gitarama, à la frontière avec le Zaïre. Ailleurs dans le pays, la situation est satisfaisante et les marchés sont bien approvisionnés, mais du fait de leur faible pouvoir d'achat dans une économie d'après-guerre, de vastes sections de la population n'ont pas un accès adéquat à la nourriture. D'après les estimations, environ un million de personnes, dont 596 000 personnes particulièrement vulnérables, nécessiteront une aide alimentaire pendant le premier semestre 1996. En outre, les besoins alimentaires des rapatriés attendus devront être couverts par l'aide alimentaire, car ils arriveront pour la plupart après la période des semis. La situation des communautés de réfugiés rwandais au Zaïre est incertaine. D'après le HCR, les rapatriements se font au rythme de jusqu'à 2 000 personnes par semaine. La livraison d'aide alimentaire dans les camps de Goma et Bukavu s'est améliorée, mais des problèmes de sécurité sont toujours signalés à Uvira. L'insécurité sporadique dans les régions nord-ouest du Burundi a entravé les activités agricoles et les populations dans les zones touchées auront besoin d'une aide alimentaire. Le pays reste au bord d'une grave crise alimentaire. On ne peut exclure l'éventualité d'interventions d'aide alimentaire d'urgence à grande échelle en 1996.

Grâce à la récolte exceptionnelle de la campagne principale 1995, la situation nationale des disponibilités alimentaires est satisfaisante en Ouganda. Toutefois, les approvisionnements alimentaires restent précaires dans certaines régions au nord, au nord-est et à l'est, où la production agricole a été réduite pour la deuxième année consécutive, du fait des pénuries de semences et des pluies tardives. Une campagne généralement bonne en Tanzanie a permis de rentrer une récolte supérieure à la moyenne, mais certaines poches du pays ont été touchées par la sécheresse et une aide alimentaire localisée est nécessaire pour les populations dans ces zones. Un grand nombre de réfugiés dans la région de Kagera continue de dépendre de l'aide alimentaire d'urgence. Leur nombre commence à baisser à mesure que les rapatriements s'accélèrent. Au Zaïre, malgré de bonnes conditions météorologiques et le fort potentiel de production, la situation des approvisionnements alimentaires reste précaire dans les zones urbaines. L'inflation, le chômage et les difficultés économiques touchent gravement la population. Quelque 15 pour cent de la consommation vivrière du pays doivent être importés, car les infrastructures de transport et de commercialisation qui relient les zones rurales et les zones urbaines sont inadéquates.

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ESPOIRS PRUDENTS DE REDRESSEMENT DE LA PRODUCTION AGRICOLE EN AFRIQUE AUSTRALE

Après les précipitations irrégulières et les sécheresses localisées qui ont marqué la campagne 1994/95, les premières perspectives sont plus optimistes pour la récolte de céréales secondaires de 1995/96, dont les semis sont en cours dans la sous-région. Un temps sec a régné dans la plus grande partie du Malawi et du Mozambique en octobre et au début novembre, mais des pluies éparses sont tombées en certains endroits du Botswana, du Lesotho, de Madagascar, de Namibie, d'Afrique du Sud, de Zambie et du Zimbabwe. En décembre, les pluies se sont étendues à toute la sous-région, et ont été abondantes en Afrique du Sud, en Zambie et au Zimbabwe. D'après les premières indications, la superficie sous maïs en Afrique du Sud - de loin le plus grand producteur de céréales secondaires et de blé de la sous-région - sera nettement supérieure à celle réduite par la sécheresse de l'an dernier, tout en restant au-dessous de la moyenne.

Etant donné que la production céréalière totale est inférieure à la moyenne (14,6 millions de tonnes, soit seulement 76 pour cent de la moyenne sur cinq ans), les besoins d'importation pour la campagne commerciale 1995/96 sont estimés à 5 millions de tonnes, contre 4 millions de tonnes en 1994/95. On estime les besoins d'aide alimentaire à 1 million de tonnes. Les annonces de contribution couvrent la plupart de ces besoins, mais environ 60 pour cent seulement des quantités nécessaires ont été réellement livrés. Il faut accélérer les livraisons d'aide alimentaire, notamment en Angola, au Lesotho, au Malawi, au Mozambique et en Zambie. Les importations commerciales de la sous-région ont été lentes, et l'Afrique du Sud, qui exporte normalement des quantités significatives de maïs dans les pays déficitaires, n'a rien exporté cette année. La période de soudure approche, et on craint une forte augmentation des prix des principaux produits alimentaires, notamment en Zambie, où la production de maïs a chuté pendant la campagne 1994/95.

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RECOLTES SUPERIEURES A LA MOYENNE EN AFRIQUE DE L'OUEST, MAIS AU LIBERIA ET EN SIERRA LEONE LA SITUATION ALIMENTAIRE RESTE CRITIQUE

Des pluies relativement abondantes et régulières tombées dans la plupart des pays du Sahel en 1995 et une faible incidence des infestations de ravageurs ont permis d'obtenir de bonnes récoltes dans tous les Etats Membres du CILSS, à l'exception du Cap-Vert. La Gambie et la Guinée-Bissau ont engrangé des récoltes records, tandis que la production atteignait presque les records antérieurs de 1994 en Mauritanie et de 1993 au Sénégal. La production a baissé tout en restant supérieure à la moyenne au Mali, au Niger et au Tchad. Au Burkina Faso, après de mauvaises récoltes dans certaines provinces, surtout dans le nord, plusieurs populations sont considérées comme étant à risque. Début décembre, le gouvernement a lancé un appel pour une aide alimentaire. Il a estimé les besoins à 24 000 tonnes de céréales qui peuvent être achetées sur place dans les zones excédentaires ou empruntées au stock national de sécurité. Dans d'autres pays, quelques difficultés pourraient apparaître dans les zones à déficit structurel. L'aide des donateurs pourrait être nécessaire pour acheter des céréales dans les zones excédentaires et les acheminer dans les régions déficitaires. Il s'agit de la seconde bonne récolte successive dans le Sahel et les marchés semblent bien approvisionnés. Les récoltes s'annoncent bonnes aussi dans la plupart des pays côtiers d'Afrique de l'Ouest à l'exception du

Libéria (voir encadré ci-dessous) et de la Sierra Leone. En Sierra Leone, de vastes étendues ont été dépeuplées par la guerre civile, ce qui a des conséquences néfastes sur la production et la commercialisation alimentaires. On signale que les décès par famine sont en hausse dans les zones inaccessibles du pays. Le Nigéria, le Cameroun et le Ghana ont eu des récoltes records.

Une récente mission de la FAO chargée d'évaluer les récoltes au Libéria a constaté que les déplacements massifs de population avaient réduit la production de riz à environ un quart du niveau d'avant guerre. L'accord de paix d'août 1995 est venu trop tard pour permettre un grand retour à la terre pour la campagne agricole, mais il a été bénéfique pour la commercialisation des denrées et la distribution des secours alimentaires. Les derniers rapports signalent une baisse des taux de malnutrition, bien que la situation alimentaire reste précaire pour une grande partie de la population, et plus spécialement pour les réfugiés qui viennent de rentrer.

Même selon les hypothèses les plus optimistes, en 1995, la production de riz a baissé d'environ 77 pour cent par rapport au niveau d'avant la guerre civile. La production de manioc a été touchée aussi, reculant de 50 pour cent. Les déplacements de population massifs et continus ont laissé à l'abandon de grandes étendues de terres agricoles. L'insécurité, qui règne dans les régions colonisées autour de la zone contrôlée par l'ECOMOG, empêche les agriculteurs de stocker des semences pour leurs plantations et beaucoup d'entre eux sont tributaires des programmes de distribution d'urgence de semences. L'insécurité freine aussi les travaux de sarclage et de protection des cultures dans plusieurs zones colonisées à fort potentiel. Le manioc a mieux résisté aux déplacements de population de brève durée et à la négligence des cultures qui en a résulté. Les estimations de la mission sont tout à fait provisoires: comme aucune enquête systématique sur la production alimentaire n'a eu lieu depuis 1989, ces hypothèses pourraient être erronées.

L'accord de paix d'Abuja, signé le 19 août 1995, a été largement respecté par les principales factions. L'ECOMOG, force de paix ouest-africaine, est à présent déployée dans tout le Libéria. Avec l'ouverture des routes menant à l'intérieur du pays, les populations souffrant le plus d'insécurité alimentaire auront accès aux marchés et aux secours alimentaires et trouveront des débouchés pour leurs produits. On constate déjà des signes prometteurs de croissance des activités commerciales et des échanges de produits alimentaires par delà la ligne de démarcation entre les factions. Cependant, le secteur officiel des exportations est paralysé et la dette extérieure nationale est lourde. Il est peu probable que les importations du secteur public soient importantes en 1996. Les importations commerciales privées de riz et de farine devraient augmenter en 1996, mais un minimum de 163 000 tonnes d'aide alimentaire sous forme de céréales sera nécessaire. Certains pays voisins signalent que les réfugiés sont maintenant impatients de rentrer. Comme ces réfugiés de retour ne pourront avoir de récolte de riz avant 11 mois et de manioc avant 5 mois au moins, une arrivée massive de réfugiés entraînerait inévitablement un accroissement des besoins d'aide alimentaire. Sur la base d'une hypothèse optimiste concernant le taux de retour des réfugiés, on calcule qu'un volume maximal de 179 000 tonnes d'aide alimentaire serait nécessaire.

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LES BESOINS D'AIDE ALIMENTAIRE DE L'AFRIQUE SUBSAHARIENNE NE SERONT PROBABLEMENT PAS SATISFAITS CAR LES DISPONIBILITES MONDIALES DIMINUENT

En 1994/95, les besoins d'aide alimentaire de l'Afrique subsaharienne sont tombés à 70 pour cent de la moyenne des cinq années précédentes. Les livraisons totales d'aide alimentaire vers cette région ont reculé pour la deuxième année consécutive jusqu'au niveau le plus bas depuis 1989/90. Pour l'ensemble de la région, le déficit brut des livraisons d'aide alimentaire est évalué à 29 pour cent des besoins. Le déficit atteignait 41 pour cent des besoins totaux en Afrique australe, 20 pour cent en Afrique de l'Est et 23 pour cent en Afrique de l'Ouest, tandis que dans presque tous les pays d'Afrique centrale, les besoins étaient entièrement satisfaits. Comment ce déficit a-t-il pu survenir, en dépit de la baisse des besoins? La cause en est la faiblesse des disponibilités mondiales d'aide alimentaire en céréales. En 1994/95, les disponibilités globales d'aide alimentaire en céréales sont provisoirement estimées à 8,7 millions de tonnes, soit le niveau le plus bas depuis 1974/75.

D'après les premières prévisions, en 1995/96, les besoins d'aide alimentaire pourraient chuter à un niveau très inférieur à la moyenne récente. Toutefois, les perspectives des disponibilités d'aide alimentaire mondiales sont particulièrement sombres. La FAO prévoit que les disponibilités d'aide alimentaire en céréales en 1995/96 s'élèveront à 7,6 millions de tonnes. Les expéditions diminuent chaque année depuis quatre ans.

L'analyse des tendances passées montre que les disponibilités alimentaires mondiales sont un facteur déterminant du niveau des livraisons d'aide alimentaire vers l'Afrique subsaharienne, auquel sont attribuables près d'un tiers des variations interannuelles. La concurrence exercée par d'autres régions, en particulier l'Europe de l'Est et la Communauté des Etats indépendants, reste forte. C'est pourquoi, en dépit de la baisse des besoins attendue cette année, il y a de fortes probabilités que plus de 15 pour cent des besoins de la région ne puissent être satisfaits en 1995/96. Les cours mondiaux des céréales sont élevés, il y a eu une réduction des niveaux des exportations alimentaires à des conditions de faveur en provenance des principaux pays exportateurs de la zone tempérée et il n'y a pas d'excédent dans le plus gros pays exportateur de la région, l'Afrique du Sud. C'est pourquoi les pays à faible revenu et à déficit vivrier ayant de graves difficultés de trésorerie, de balance des paiements ou de devises risquent d'enregistrer une baisse de leurs livraisons commerciales. L'aide alimentaire au programme destinée à stabiliser le marché se fait de plus en plus rare. De plus, l'aide alimentaire dans la filière pour les programmes d'urgence en cours peut connaître des interruptions périodiques, comme en 1995. Il est très probable que certains pays à faible revenu et à déficit vivrier de la région subiront d'importantes fluctuations de leurs approvisionnements alimentaires. Les hausses de prix qui en résulteront accroîtront inévitablement la vulnérabilité des ménages à déficit alimentaire face aux chutes de consommation et à la malnutrition.

Il est peu probable que les disponibilités mondiales d'aide alimentaire retrouvent les niveaux élevés des années 80 et du début des années 90. Les stocks excédentaires dans plusieurs pays donateurs, qui leur ont permis de faire des dons généreux d'aide alimentaire, étaient le résultat d'une politique interventionniste dans le domaine des prix et du commerce des céréales aux niveaux national et international. Dans un climat de politique commerciale intérieure et extérieure plus libérale, le coût d'opportunité de la détention de stocks publics et des dons d'aide alimentaire a augmenté.

L'aide alimentaire a rarement été une forme fiable de stabilisation des approvisionnements et qu'elle le sera de moins en moins. Il est donc d'autant plus nécessaire de cibler correctement les ressources de l'aide alimentaire vers les pays qui en ont le plus besoin et de prendre des mesures générales visant à réduire la dépendance de l'Afrique subsaharienne vis-à-vis de l'aide alimentaire. Les mesures envisageables sont les suivantes:


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