ANALYSE COMPARATIVE
Ces accords qui établissent une ou plusieurs limites maritimes (voir Section 2.5 ci-dessus) définissent en premier la position de la limite. Lemplacement de toute zone spéciale est établi en relation avec les limites de la juridiction de pêche qui est aussi définie. Par exemple, le Traité de River Plate définit sa zone de pêche commune sous forme dun arc de circonférence à rayon donné avec des positions centrales à des points spécifiques, pendant que lAccord Féroé/UK définit les limites de sa «Région Spéciale» en utilisant de simples coordonnées.
Quand la zone est superposée sur une frontière établie et que la frontière avait une position reconnue à lorigine (par exemple la zone de la pêche commune du Traité de la Plaque de la Rivière), laccord peut continuer en faisant référence aux eaux de chaque partie dans la zone. Cependant, quand la zone a été définie en dépit dincertitudes sur la position de la frontière et quune telle frontière nétait pas en place à lorigine (par exemple, lAccord sur la «Région Spéciale» Féroé/UK), laccord fera référence à la zone par son nom mais évitera des références aux eaux des parties dans la zone.
Ces accords qui ne délimitent aucune frontière maritime mais en fait identifient des zones spéciales, comme toujours, non délimitées entre les parties (voir plus haut Section 2.5), prennent diverses approches pour identifier la zone. LAccord Japon/Chine et lAccord Trinité-et-Tobago/Venezuela identifient tous les deux la zone concernée avec une liste de coordonnées. En revanche, la Convention du flétan fait référence aux «régions frontalières» mais ne fait aucune tentative pour définir celles-ci à lavance. Dans tous les cas, parce quil ny a aucune frontière en place à lorigine, chaque accord fait référence à la zone par son nom mais évite des références aux eaux des parties dans la zone.
Plusieurs accords utilisent une clause pour définir leur compétence en terme de caractéristiques géographiques, ou coordonnées, ou lignes de latitude/longitude, ou une combinaison de ceux-ci [Convention CPANE; Convention de la mer Baltique; Accord méditerranéen; Accord du Golfe]. Une formule consacrée est alors utilisée pour faire référence à cette zone. Les Conventions CPANE et de la mer Baltique se reportent à «la Convention de la région», la Convention Méditerranéenne et la Convention africaine de lAtlantique à «la Région» et lAccord du Golfe à «la Zone». LAccord de 1975 Norvège/Russie se réfère à «la région couverte par la [Convention CPANE].»
Plusieurs accords utilisent une clause pour définir leur compétence comme étant les eaux des parties [Accord Japon/Chine; Accord Japon/Corée; Convention du flétan; Accord Micronésie]. LAccord Micronésie utilise la formule consacrée de «Accord Zone» pour faire référence à ces eaux. Dans les autres accords, il est évident que laccord est restreint à létendue des eaux des parties, et pourtant cela nest pas affirmé dans aucune clause [Traité du saumon du Pacifique; Convention FFA; Accord Nauru; Accord Nioué; Convention sur les Droits dAccès de la CSRP; Convention sur le Droit de Poursuite de la CSRP; Convention Mauritanie/Sénégal]. Un accord [Convention africaine de lAtlantique] prend une approche hybride entre faire référence aux traits géographiques et juridictionnels, en faisant allusion à la zone comprenant les États spécifiés.
Dans quelques cas, une majorité des dispositions sappliquent aux eaux des parties mais il y a aussi des dispositions applicables plus loin [Système de gestion du hareng; Le Système de gestion du maquereau; Accord de 1976 Norvège/Russie; Accord Loophole]. La Convention de la mer Noire aspire à une application couvrant lensemble de la mer Noire. Cependant, quand il sagit de parties concernant seulement trois États, la compétence géographique va concerner les eaux des parties et toutes les eaux au-delà, en évitant de causer préjudice aux droits légitimes des parties non contractantes de laccord.
LAccord Australie/Indonésie ne fait aucune formulation exacte au sujet de son étendue géographique. Cependant: a) son préambule rappelle plusieurs instruments bilatéraux concernant les limites maritimes entre les deux parties; b) il fait référence à «stocks partagés, stocks chevauchants et espèces hautement migratrices» et aux parties qui coopèrent «directement ou à travers des organisations internationales pour assurer la conservation et laménagement des ressources marines vivantes de la haute mer»; il fait référence aux eaux des deux parties; et il affirme que les parties ont à «interpréter et mettre en uvre cet Accord conformément aux accords existants sur la délimitation des frontières maritimes entre les parties et le ME de 1981 Australie/Indonésie».[37]
LAccord dapplication Canada/Etats-Unis ne fait aucune déclaration concernant sa compétence géographique; il est supposé que laccord sapplique à toute pêche illégale des bateaux dune partie dans les eaux de lautre partie.
Finalement, quelques accords dans les deux catégories précitées excluent expressément lapplication à certaines eaux bien identifiées. La Convention de la mer Baltique et lAccord du Golfe excluent lapplication aux eaux intérieures des parties. Quelques accords, particulièrement ceux concernant les droits daccès, expressément ou indirectement excluent lapplication dans les zones des 12 milles nautiques des parties [Accord Japon/Chine; Accord Japon/Corée; Accord de 1976 Norvège/Russie; Accord de Loophole; Accord Nauru; Accord Micronésie]. Le Traité de River Plate adopte la même approche en relation avec la zone de pêche commune.
LAccord Micronésie exclut «les eaux fermées pour la pêche en accord avec le Programme 2 de lAnnexe V». LAccord Japon/Chine exclut deux zones spécifiques délimitées respectivement par les lignes de latitude et longitude; Hee Kwon suggère que lune de ces exclusions est due à la présence dîles politiquement sensibles. La Convention CPANE prévoit un système à deux niveaux, par lequel a) lensemble de la convention sapplique à la région définie dans la clause (comprenant les eaux des États côtiers et la haute mer) et puis b) les eaux des États côtiers sont sujettes à exclusion spécifique dans plusieurs cas. LAccord méditerranéen exige des États, quand laccord est accepté, à «affirmer explicitement les territoires concernés».[38]
COMMENTAIRES
Pour les accords portant sur laccès des navires étrangers aux eaux des parties respectives, une limitation de compétence concernant ces eaux est réellement légitime. Dans les accords analysés ci-dessus, les États ont eu tendance à ne concéder des droits daccès aux autres États quau-delà de leurs mers territoriales; cependant, si cette limitation est appropriée dans un cas particulier, en général, elle dépend des circonstances des États intéressés.
Pour les accords concernant la coopération en matière de conservation et daménagement des stocks, les impératifs légaux peuvent en partie dicter létendue géographique de laccord. Si une espèce grande migratrice ou un stock chevauchant est impliqué, les devoirs de coopération sappliquent conformément aux Articles 64 ou 63(2) du Droit de la Mer. Aussi, les devoirs de coopération en matière daccord sur les stocks de poissons (stocks chevauchants et stocks grands migrateurs) seront aussi gardés à lesprit. De tels devoirs de coopération pourraient permettre délargir la compétence géographique de laccord à la haute mer. Dans ce sens, le Système de gestion du hareng et le Système de gestion du maquereau ont élargi indirectement leur compétence à la haute mer, en établissant des liens formels avec la Convention CPANE.
Sil ny a pas de stocks chevauchants ou de stocks ou espèces grands migrateurs qui sont impliqués, les États côtiers peuvent légitimement confiner leur accord à la coopération sur la conservation et laménagement de leurs propres eaux. En cas daccord, les États peuvent décider dexclure certaines zones (par exemple eaux intérieures ou eaux territoriales). Dans ce cas, il y a une flexibilité dans le choix des possibilités. Par exemple, les eaux intérieures pourraient être incluses pour la forme par exemple pour déterminer le TAC, mais en réalité certaines catégories de bateaux seront exclues dans la zone.
Dans les exemples analysés dans ce rapport, la compétence géographique dun accord a été définie soit directement en référence aux caractéristiques géographiques, ou coordonnées, ou lignes de latitude/longitude, ou indirectement par référence à des zones juridictionnelles. Les références aux caractéristiques géographiques, coordonnées ou lignes, ont été utilisées par les accords concernant des mers spécifiques (c.-à-d. Baltique, Méditerranée et Golfe) ou par la Convention CPANE qui couvre la haute mer et ainsi a besoin de tels points de référence. Là où il nexiste aucune mer spécifique ou zones de la haute mer impliquée, la définition de la compétence en référence aux zones juridictionnelles pourrait être plus appropriée. Lapproche adoptée par la Convention africaine de lAtlantique qui fait référence à la zone comprenant des États spécifiés peut créer une certaine confusion du fait de labsence dindications sur la partie des eaux des États incluse. En général, ladoption tout au début dans laccord dune clause sur la compétence claire et spécifique est préférable.
Lorsque les parties contractantes font un accord créant une zone spéciale en rapportant à une limite maritime contentieuse, la tendance générale est de définir lemplacement de cette zone. Lalternative est de faire référence simplement à la zone en utilisant le libellé «les eaux frontalières»; toutefois, cette formule peut apporter plus tard des problèmes dinterprétation. Normalement un nom est donné à la zone spéciale pour faciliter la référence, et dans ce contexte, éviter le besoin de se référer aux eaux respectives des parties.
[37] Article 11. [38] Article XV. |