Les nouvelles technologies de la communica-tion multiplient de façon exponentielle la masse d'informations disponibles. On constate cependant que les informations sur les femmes diffusées par les médias sont, le plus souvent, ponctuelles, au contenu partiel et au message peu ciblé, dénotant une certaine superficialité. Quant aux informations sur les femmes rurales, qui se sont également multipliées ces dernières années, elles sont aussi peu ou mal diffusées parmi le grand public. Les médias ne mettent pas suffisamment en évidence la contribution réelle des femmes à la vie économique, sociale et politique.
Ce manque d'attention vis-à-vis des femmes s'explique, en partie, par la surabondance des informations qui conduit les médias à procéder à une sélection des sujets traités.
Les matières premières et les ressources financières étaient des ressources stratégiques pour les sociétés préindustrielles; dans la société postindustrielle, la ressource stratégique, c'est l'information. Déléguée du Malawi |
Seules les informations exploitables et susceptibles de retenir l'attention du «client», tout en étant porteuses de messages clairs et mobilisateurs, passent au travers de ce tri. Les questions relatives aux femmes rurales sont rarement «un sujet médiatique», car elles sont trop ancrées dans la quotidienneté de la société et, de plus, les questions de développement ne représentent plus un thème suscitant l'intérêt du public. Il conviendrait donc, pour ébranler les convictions et provoquer les remises en cause, de fournir aux médias des informations conditionnées de façon originale et attrayante, tout en gardant leur intégrité.
Déjà, en de grandes occasions, à des dates particulières ou lors d'événements marquants, les médias ont su s'intéresser aux questions de société que pose la situation des femmes. C'est ainsi qu'ils ont contribué à alerter l'opinion publique et à sensibiliser les dirigeants à l'urgence de reconnaître les femmes comme des acteurs économiques, sociaux et politiques à part entière.
Les médias peuvent en effet exercer une influence sur l'opinion publique et induire des pressions sociales qui ont des répercussions sur l'orientation des politiques. Les dirigeants le savent et n'ignorent pas cette force que représentent les médias. Ces derniers peuvent être un puissant vecteur pour rendre publics les apports des femmes rurales à la sécurité alimentaire et à l'économie, mettre en évidence leurs contraintes et guider la formulation de mesures sociales et économiques.
Parallèlement, la parité reste à conquérir dans les médias comme dans les autres sphères de la société. Non seulement, les médias parlent d'un monde où les femmes sont souvent peu visibles, mais en plus, ils ont peu de postes clés occupés par des femmes. Les conséquences sont importantes à la fois sur le contenu des informations et sur le public. Tant que la parité dans les médias ne sera pas obtenue, la réflexion des femmes aura moins de chances d'être traduite en paroles et encore moins d'être prise en compte. En plus de la réorientation du contenu des informations, un des moyens pour remédier au déséquilibre existant au sein des médias est de mettre enoeuvre des politiques volontaristes de gestion du personnel.
En matière d'information sur le développement, pour que les médias contribuent à favoriser la reconnaissance de la contribution des populations rurales, en particulier des femmes, à la sécurité alimentaire, les mesures suivantes devraient être prises.
COMMENT COMBLER LES LACUNES D'INFORMATION? En Zambie, les cours du marché sont diffusés dans les journaux locaux - FAO/17821/A. CONTI En 1993, dans une province du nord de la Zambie, une pièce de théâtre fut jouée par les villageois à l'ouverture d'un atelier de trois jours sur la sécurité alimentaire et ses problèmes. Elle commençait par un chant «Les personnes pour qui je produis ont des vêtements, alors que moi, le seul qui travaille dur, je me retrouve nu» («Abo ndimina balafwala ne mwine pamputi tutu»). Mise en scène au village, avec des personnages reconnaissables par tous, la pièce montrait, avec force, l'impact des institutions et des individus contribuant aux situations d'exploitation subies par les agriculteurs pauvres. La pièce de théâtre eut un résultat édifiant sur les discussions qui ont suivi. L'expérience a en effet démontré que le théâtre peut être un moyen efficace pour mieux comprendre les perceptions locales en matière de sécurité alimentaire, perceptions rarement statiques et souvent difficiles à appréhender. Dans l'exemple cité, la pièce de théâtre a mis clairement en évidence la nature «intégrée» des nombreuses décisions liées à la sécurité alimentaire et a permis l'obtention d'informations sur les solutions «maison» (ces dernières sont habituellement bien cachées à tout regard extérieur). Si nous pouvons mieux saisir ces solutions «maison», celles-ci pourront être sans aucun doute renforcées par des politiques. Le théâtre présente également l'avantage de pouvoir être enregistré, diffusé sur les ondes et distribué. La pièce de théâtre de Kapatu a été filmée et diffusée à la télévision zambienne, mais d'autres modes de diffusion peuvent être envisagés. Source: Extrait de Johan Pottier. 1999. Food security and gender: information gaps and how to plug them. Communication présentée lors du panel intitulé Politiques et planification paritaires: nature et portée. |
Favoriser des campagnes d'information donnant une image positive et réelle des rôles, des responsabilités et des potentialités d'innovation des femmes rurales.
Identifier les médias - au sens large du terme - qui diffusent des informations sur les femmes rurales (ou qui sont prêts à le faire) et leur accorder des facilités pour développer des programmes portant sur la contribution des agricultrices à la sécurité alimentaire et au développement rural.
Collaborer avec les médias pour analyser le contenu et la présentation de l'information sur les femmes rurales, et pour identifier les modes de diffusion les plus appropriés permettant de mobiliser l'opinion publique sur des thèmes tels que le respect des droits des femmes.
Utiliser davantage les moyens traditionnels et modernes de communication employés en milieu rural, notamment la radio, pour mettre enoeuvre des programmes servant les intérêts des femmes.
Stimuler l'organisation de débats, au niveau national, entre les spécialistes des médias, les femmes rurales et les responsables de l'agriculture et de la promotion des femmes rurales en vue de changer les attitudes et les mentalités et d'influer sur le contenu de l'information.
Organiser des événements spéciaux et célébrer les journées consacrées aux femmes rurales pour mettre en évidence leurs compétences, leurs capacités et leurs potentialités.
FIGURE 4: Postes occupés par des femmes à la radiotélévision et dans la presse
Promouvoir le recrutement de femmes dans les médias et dans les établissements de formation aux professions de la communication et de l'information, dans les pays où un déséquilibre à cet égard existe.
Collaborer avec les instituts de formation aux techniques de la communication et de l'information pour organiser des ateliers sur des thèmes relatifs à la contribution des agricultrices à l'économie nationale et à la sécurité alimentaire.
Évaluer l'efficacité et l'impact des médias par une analyse comparative coût-bénéfice en vue d'améliorer leur couverture et la capacité d'interactions entre responsables politiques et populations rurales.
Passer des accords avec les médias pour qu'ils diffusent régulièrement des programmes portant sur la multiplicité, la complémentarité et la différenciation des rôles et des responsabilités des agriculteurs et des agricultrices.
Un groupe local féminin d'épargne et de crédit en Éthiopie
- FAO/20023/R. JONES
Faire entendre la voix de la population rurale à Madagascar
- FAO/17494