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1.  INTRODUCTION

1.1  Historique et objectifs

Les pressions s' intensifiaient sur la pêche fluviale en zone tropicale et subtropicale, et des auteurs ont récemment suggéré qu'une gestion plus efficace pourrait faire une place accrue aux communautés de pécheurs locales dans les institutions, en améliorant leurs connaissances. La FAO, par ses fonctionnaires du Siège et par l'intermédiaire de consultants, a milité pour ce point de vue depuis 1980, jouant ainsi un rôle essentiel.

Examinant la gestion des pêches en lagunes et en estuaires, Kapetsky fait remarquer que, “en dehors de la réglementation des pêcheries de lagunes et d'estuaires, par intervention des pouvoirs centraux, il reste la possibilité de remettre en honneur ou de renforcer certaines pratiques traditionnelles d'aménagement des pêcheries. Ces pratiques d'aménagement des pêcheries ont pris naissance au fil des siècles, dans le but de conserver les ressources halieutiques tout en assurant une répartition équitable de cette richesse entre les collectivités de pêcheurs” (p. 11). Une fois que ces pratiques sont mieux connues, “le Gouvernement pourrait prendre des dispositions pour donner une forme juridique officielle á ces institutions réglementaires traditionnel les et pour renforcer l'autorité traditionnelle dont elles émanent” (p. 12). De crainte que cette approche ne soit considérée comme étant accidentelle, Kapetsky (biologiste des pêches de formation) affirme á la fin de son exposé que “l'aménagement des pêcheries, tel qu'il se pratique dans les lagunes et les estuaires de nombreux pays en développement, repose autant, sinon plus, sur une bonne compréhension des ramifications socio-économiques de la pêcherie que sur une connaissance de la biologie des ressources et des caractéristiques des captures de la pêcherie (p. 46).

Christy s'est également fait le champion, á la FAO, du recours aux connaissances traditionnelles et aux stratégies de gestion. Dans le document technique sur les pêches No 227 (1983), il note que les droits d'usage territoriaux dans les pêcheries (DUTP) existent depuis des siècles, aussi bien pour la pêche maritime que pour les pêches continentales. A propos de la première il affirme que, “à mesure que l'on s'intéresse davantage aux aspects culturels et à l'organisation des communautés de pêcheurs, on se rend compte que certaines formes de DUTP sont plus répandues qu'on ne le pensait auparavant dans les pêches maritimes… Ces modes d' “occupation des eaux marines” retiennent de plus en plus l'attention et cela pour diverses raisons, dont deux sont particulièrement importantes du point de vue de l'aménagement des pêcheries”. La première, est qu'ils revêtent un intérêt considérable du point de vue de l'efficience des opérations de pêche… La deuxième raison est que les DUTP localisés semblent offrir un bon moyen d'améliorer (ou de maintenir) les conditions de vie des communautés d'artisans-pêcheurs dans les pays en développement” (p. 1).

L' auteur du document technique sur les pêches faisant immédiatement suite á celui de Christy, Panayotou (1982), a un point de vue analogue et lui donne une portée plus générale en affirmant “que la remise en honneur et le rajeunissement des systèmes coutumiers traditionnels, compte tenu des réalités nouvelles et avec une participation limitée mais indispensable du gouvernement, constitue ici l'une des options politiques les plus prometteuses en ce qui concerne le relèvement technologique et l'aménagement des pêcheries artisanales” (p. 55).

Comme dans les cas signalés par Kapetsky, Christy et Panayotou, la plupart des exemples de stratégies d'aménagement traditionnelles dont on a connaissance ont trait aux pêches maritimes, en lagunes et en estuaires. Pour établir la situation de la pêche fluviale, la FAO a demandé á l'Institute for Development Anthropology de réaliser une enquête, qui a servi de base au présent rapport. Le mandat donné á l'institut exposait trois objectifs á savoir: examiner les systèmes traditionnels d'aménagement des pêches dans les lacs, les fleuves et les plaines d'inondation en zone tropicale; analyser les critères reconnus par les administrateurs des pêches ou les tribus de pêcheurs pour aménager leurs fonds de pêche et répartir les ressources ichtyologiques; enfin, déterminer la validité des critères et les systèmes de gestion adoptés pour optimiser les avantages sociaux agrégés découlant de ce secteur économique.

La FAO a pensé á tirer parti des connaissances et pratiques traditionnelles en matière d'aménagement des ressources ichtyologiques, dans la ligne de l'évolution récente de la gestion des forêts et de la faune sauvage. Ici aussi, les experts cherchent á définir comment les communautés locales peuvent être amenées á jouer un rôle majeur dans le maintien et la remise en valeur des ressources naturelles qui leur sont propres et en tirer des avantages économiques accrus. Traditionnellement, les forestiers s'intéressent surtout á l'exploitation commerciale des forêts; cependant, au milieu des années soixante-dix, on a commencé á mettre de plus en plus l'accent sur la foresterie sociale, l'apogée de ce développement étant atteinte en 1978, lorsque le dix-huitième Congrès mondial de la Foresterie a mis l'accent sur le thème de la foresterie pour les peuples. Les gestionnaires de la faune sauvage ont été les derniers á recourir aux communautés locales dans le cadre de leurs stratégies gestionnaires. Cependant, le Zimbabwe fait actuellement oeuvre de pionnier en s'efforçant, dans le cadre du Plan régional du Sebungwe, d'offrir aux communautés riveraines des parcs nationaux des incitations économiques visant á préserver les ressources de la faune sauvage. Les chercheurs aussi s'intéressent davantage aux incidences sur la gestion des connaissances et institutions traditionnelles, ainsi qu'il ressort de la publication sous l'égide de Klee, en 1980, d'un ouvrage intitulé World Systems of Traditional Resource Management, tandis que Morauta, Pernetta et Heaney mettaient l'accent sur une région précise du monde dans leur volume Traditional Conservation in Papua New Guinea; Implications for Today (1982).

Cette tendance á une utilisation accrue des compétences et du potentiel institutionnel disponibles localement est d'une importance capitale, et il convient de l'encourager. Les informations dont on dispose sur la gestion des ressources naturelles sont moins fournies, cependant des études récentes sur le développement agricole montre que la participation locale, en particulier lorsqu'elle s'exerce par le biais d'organisations puissantes d'action engagées, est liée á une productivité accrue et au succès des projets (DAI, 1975; van Heck, 1979; Esman et Uphoff sans date; et Uphoff, 1985).


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