5.1 Fonction de production à court terme
5.2 Notions de base sur les rendements d'échelle
5.3 Notions de base sur les fonctions de coûts
5.4 Courbes de coût moyen à long terme
5.5 Approche micro-économique appliquée à une pêcherie entière
La fonction de production représente dans l'analyse micro-économique l'un des deux facteurs déterminants de la pérennité économique de l'entreprise. Un responsable d'entreprise qui recherche une situation d'équilibre dans ses activités et qui vise à optimiser ses profits à court terme doit prendre en considération à la fois les caractéristiques technologiques de ses moyens de production et la manière de les mettre en uvre. Il doit aussi tenir compte du coût du procédé de fabrication.
Le premier point est formellement représenté sous la forme d'une fonction de production. Dans tous les pays, on trouve une fonction de production particulière, qui s'appuie sur les installations de production existants dans les divers secteurs productifs, sur divers procédés de fabrication, et sur différentes formes d'organisation, de gestion d'entreprise et de division du travail. On peut représenter cette situation par une fonction de relation entre la valeur ajoutée relative à cette production, ou produit interne, et les volumes utilisés pour les divers facteurs entrant dans cette production. Ces concepts constituent la fonction de production générale de chaque secteur, par exemple la fonction générale du secteur de la congélation de poisson.
La connaissance de la fonction de production de chaque secteur de l'industrie des pêches permet de répondre aux questions relatives aux changements potentiels à venir, tels que: diminution de la main-d'uvre, raréfaction d'une espèce particulière, innovations technologiques. Elle peut être utilisée pour déterminer dans quelle mesure il est possible de substituer un intrant à un autre. Elle peut aussi être utilisée pour déterminer le niveau d'activité qui correspond à la productivité optimale.
La fonction de production générale peut également être un instrument pour comparer les productivités au niveau international et les structures de prix relatives de certains produits dans différents pays. Cette dernière approche s'intéresse à diverses caractéristiques du procédé de fabrication de l'entreprise et fait intervenir des facteurs concernant la sélection des technologies de production. Les types de procédé de fabrication et les caractéristiques des fonctions de production de l'entreprise font l'objet d'un examen particulier ultérieur.
On doit apporter une attention particulière au rôle de la technologie et des avances techniques dans les changements de capacité dans l'entreprise, dans la production de biens ou de services, et à la pression qui peut s'exercer sur elle pour adopter les nouvelles technologies. La production consiste en une série d'activités au cours desquelles les intrants ou les facteurs de production utilisés (matières premières, main-d'uvre, capital, terrain et compétences de gestion) sont transformés en produits (biens ou services) sur une période de temps donnée. Les économistes utilisent le terme fonction de production pour caractériser la relation physique entre les intrants utilisés dans l'activité et cette production (biens et services) par unité de temps (Henderson et Quandt, 1971). Cette relation peut prendre la forme symbolique:
Q = f (Xa, Xb, Xc, ...., Xn)..........(5.1)
où Xa, Xb,....., Xn représentent les volumes de divers intrants et Q le volume total de produits par unité de temps au travers de combinaisons spécifiques de ces intrants. Chaque méthodologie a sa propre fonction de production. Une entreprise peut modifier le volume de la production en changeant le volume des intrants qu'elle utilise au travers de la combinaison particulière correspondant au procédé de production, ou en passant d'une technologie à une autre, ou encore en associant les deux approches. On suppose que les entreprises utilisent les technologies les plus efficaces de façon à obtenir la production maximum pour chaque combinaison d'intrants envisagée.
Dans l'analyse micro-économique de la fonction de production, un certain nombre de paramètres interviennent, avec les définitions suivantes:
Un intrant (ou facteur) fixe (IF) est un intrant dont le volume ne peut être modifié rapidement à court terme pour répondre au souhait de l'entreprise de changer son niveau de production. Les intrants ne sont pas fixes dans l'absolu, même à court terme. Cependant, en pratique les coûts de mise en uvre des modifications pour l'intrant fixe peuvent être prohibitifs. A titre d'exemple, les machines ou équipements de production, l'espace disponible pour la production, le personnel de direction, sont des intrants fixes.
Par contre les intrants (ou facteurs) variables (IV) sont les intrants dont le volume peut facilement être modifié pour répondre à une augmentation ou à une réduction de production, par exemple l'électricité, les matières premières, la main-d'uvre directe. Quelquefois, les fluctuations des intrants variables sont limitées par des contrats (approvisionnement fixe en matières premières) ou par la loi (réglementation sur l'emploi); dans ces cas on peut parler d'intrants (ou facteurs) semi-variables (ISV).
Le court terme (CT) est la période de temps pendant laquelle l'entreprise ne peut pas modifier ses intrants fixes. Néanmoins, le court terme est suffisamment long pour permettre les changements des intrants variables. Le long terme (LT) est défini comme la période de temps suffisamment longue pour permettre des modifications de tous les intrants, aucun d'entre eux n'étant plus fixe, même pour la technologie. Par exemple, alors qu'à court terme une entreprise peut décider d'accroître sa production en faisant travailler en heures supplémentaires, à long terme elle peut décider d'augmenter sa surface de production en construisant de nouveaux bâtiments et en installant un nouveau matériel, c'est-à-dire de faire de nouveaux investissements, évitant ainsi les heures supplémentaires.
Le volume d'investissements fixes est le facteur déterminant pour l'échelle de production d'une entreprise. L'échelle des installations détermine quant à elle le niveau maximum de production par unité de temps que l'entreprise peut assurer à court terme. La production peut varier à court terme en diminuant ou en augmentant l'utilisation d'intrants variables dans le cadre des intrants fixes disponibles. A long terme, la production peut être augmentée ou diminuée en changeant l'échelle de production de l'entreprise, la technologie mise en uvre ou l'utilisation de tous les intrants ou de quelques-uns d'entre eux seulement. Pour analyser la fonction de production à court terme, il faut définir les notions suivantes:
La productivité moyenne (PMo) est la production totale par unité d'intrant (ou facteur) utilisé, et la productivité marginale (PMa) est le supplément de production par unité de temps résultant de l'utilisation d'une unité supplémentaire du facteur variable. Les formes respectives des courbes de PMo et de PMa déterminent celle de la fonction de production correspondante ou produit total (PT).
La loi de décroissance de la productivité marginale concerne la quantité de produit que l'on peut obtenir en augmentant le volume des facteurs variables par unité de temps tout en conservant un volume donné de facteurs fixes dans le procédé de fabrication. La loi exprime qu'à partir d'un certain point, la productivité marginale d'un facteur décroît lorsque la quantité utilisée de ce facteur augmente. Quand le produit moyen augmente, la productivité marginale est supérieure à la moyenne. A son niveau maximum, la productivité moyenne est égale à la productivité marginale.
Avant d'atteindre le point inévitable de diminution de productivité marginale, la quantité de produit fini obtenue peut augmenter à un taux croissant, comme le montre la Figure 5.1. Au-dessus du point d'inflexion de la fonction de production, une augmentation dans l'utilisation du facteur variable entraîne une diminution de productivité. La fonction de production et les courbes associées PMo et PMa présentent trois phases comme le montre la Figure 5.1.
La phase 1 va de zéro unité de facteurs variables (IV) jusqu'au point où la PMoIV est à son maximum (point PMo). La phase 2 va du point PMo jusqu'au point où la production est maximum et la productivité marginale est nulle (point PT). Dans la phase 3, au-delà du point PT, la production est décroissante et la productivité marginale est négative.
Ces phases ont une grande importance pour l'analyse de l'efficacité d'utilisation des facteurs de production. Le maximum de la courbe, représentant la (PMa) en fonction de (xVI), définit le point PMa, à partir duquel une augmentation de (IV) entraîne une diminution de (PMa). La première phase correspond à la situation où une augmentation de l'utilisation de facteurs variables (matière première, main-d'uvre, etc.) entraîne une augmentation de la PMo.
Un producteur avisé n'envisagerait pas d'opérer dans cette situation, car les (IF) (équipements) sont alors sous-utilisés. Cela veut dire, par exemple, que la production résultant de l'augmentation du temps de main-d'uvre progresse dans cette phase 1, ce qui indique que la même production pourrait être obtenue avec un volume d'intrants fixes inférieur. La production n'est également pas obtenue dans de bonnes conditions au cours de la phase 3. L'augmentation de IV entraîne en fait une diminution de la production totale.
Si l'on mesure l'efficacité du procédé de production par la productivité moyenne, c'est-à-dire le volume de produit fini obtenu par unité de facteur, la discussion précédente montre que la phase 2 est la plus favorable. Dans la phase 1, une très faible proportion de (IV) est utilisée en regard des (IF). Les considérations sur l'efficacité conduisent à choisir pour la production une zone à la frontière des phases 1 et 2.
La fonction de production d'une entreprise a été analysée à court terme, alors qu'une partie des facteurs est fixe. La notion de rendement d'échelle intervient lorsque la production est considérée sur une période suffisamment longue pour permettre des changements de toutes les quantités de facteurs dans la même proportion, en particulier de ceux considérés comme fixes à court terme.
Le rendement d'échelle s'applique à des cas où tous les facteurs sont augmentés dans la même proportion. Dans le cas d'une entreprise utilisant X1, unités du facteur 1 en même temps que X2 unités du facteur 2, et obtenant Q unités de produit fini, la relation peut s'écrire:
X1 + X2® Q..........(5.2)
Maintenant supposons que les quantités de facteurs X1 et X2 varient dans une proportion arbitraire g . La production totale va bien évidemment changer. La question est de savoir dans quelle proportion elle va évoluer? Si la proportion est appelée p , le résultat est:
g X1+g X2® p Q..........(5.3)1. Si l'augmentation de production est plus que proportionnelle à la variation des facteurs (p > g), on dira que le rendement d'échelle est croissant
2. Si p = g, on dira que le rendement d'échelle est constant
3. Si p < g, on dira que le rendement d'échelle est décroissant
Pour une technologie donnée, il est en général certain qu'en augmentant son échelle de production, une entreprise verra:
1. Une courte période de rendement d'échelle croissant
2. Une longue période de rendement d'échelle constant et,
3. Une période de rendement d'échelle décroissant
Une entreprise peut augmenter l'utilisation de ses facteurs jusqu'au point de production maximale. Au-delà, l'augmentation des facteurs peut provoquer une phase de rendement négatif, pendant laquelle la production décroît pratiquement. Cependant, lorsque la notion de rendement d'échelle est utilisée pour permettre des changements de capacité technologique dans l'entreprise, et que sa taille augmente, les entreprises peuvent être capables (et elles le sont certainement) d'utiliser tous leurs moyens et leurs nouvelles technologies pour étendre leur échelle d'opération sans jamais atteindre le point de rendement négatif.
Les entreprises présentant une période de rendement d'échelle constant sont communes dans les industries alimentaires, notamment dans les industries de transformation des produits de la pêche.
5.3.1 Coûts totaux et coûts unitaires
5.3.2 Courbes de coûts à court terme dans l'industrie des produits de la pêche
La relation fonctionnelle entre les coûts et la production pendant une période de temps est un aspect fondamental de l'analyse des coûts. Une fonction de coût présente des résultats différents lorsque l'usine fonctionne avec des pourcentages d'utilisation différents. Mais, comme nous l'avons indiqué précédemment, la production est fonction de la manière dont les ressources sont utilisées.
Ainsi, tandis que la fonction de production établit la relation entre les intrants et le produit, une fois que les prix des intrants sont connus, les coûts d'une production donnée peuvent être calculés. Il en résulte que le niveau et la performance des coûts d'une usine, lorsque le niveau de production varie sont directement reliés à 2 paramètres:
1. Les caractéristiques de sa propre fonction de production
2. Les prix d'achat des intrants
Trois concepts de coûts totaux sont importants pour analyser la structure des coûts à court terme: les coûts totaux fixes, les coûts totaux variables et les coûts totaux.
Les Coûts Totaux Fixes (CTF) peuvent être définis comme la somme totale des coûts de tous les intrants fixes associés à la production. Etant donné que les intrants fixes pour une firme ne peuvent être modifiés à court terme, les CTF sont constants, sauf lorsque les prix des intrants fixes varient (taxes plus élevées sur la propriété, augmentation des primes d'assurance, etc.). Les CTF continuent également à exister lorsque la production est arrêtée.
De même, les Coûts Totaux Variables (CTV) représentent le total de toutes les dépenses en intrants variables utilisés dans la production. Lorsque l'entreprise modifie son niveau de production à court terme, les coûts variables dépendent de la quantité produite. Le CTV est de zéro lorsque la production est de zéro en ce que les intrants variables ne sont pas nécessaires à ce niveau. Ainsi:
CT = CTF + CTV.........(5.4)
Cette expression indique que les coûts totaux pour une production donnée à court terme, sont la somme des coûts totaux fixes et des coûts totaux variables. Les quatre coûts unitaires suivants sont importants: coût fixe moyen (CFM), coût variable moyen (CVM), coût total moyen (CTM) et coût marginal (CM). Le coût fixe moyen (CFM) est défini par le quotient entre le coût fixe et les unités de production:
CFM=CTF/Q.........(5.5)
Etant donné que les coûts fixes totaux sont constants, les coûts fixes moyens diminuent lorsque la production augmente; les mêmes coûts fixes sont distribués sur plus d'unités produites. Les CFM peuvent également être calculés de la manière suivante: les CFT sont le produit du nombre d'unités d'intrants fixes (EF) par le prix de ces intrants (PEF). En remplaçant ceci dans l'expression 5.5 on obtient:
AFC = CFT/Q = (PEF) × (FI)/Q = PEF × (FI/Q) .........(5.6)
Etant donné que le produit moyen des intrants fixes a été défini comme la quantité totale produite (Q) divisée par le nombre d'unités d'intrants fixes (EF), il s'en suit que EF/Q est l'inverse de APEF.
AFC = PEF × (1/APEF) .........(5.7)
Les coûts variables moyens sont les CTV divisés par le nombre correspondant d'unités produites, ou:
CVM = CTV/Q.........(5.8)
Les CVM peuvent également être exprimés comme une fonction inverse de AEF
CVM = CTV/Q = PEF × (FI/Q) = PVI × (1/APVI) .........(5.9)
Les coûts totaux moyens sont définis comme les coûts totaux divisés par le nombre correspondant d'unités de Q:
CTM = CT/Q.........(5.10)
Cependant, avec l'équation 5.4:
CTM = CT/Q = (CTF + CTV)/Q = CFT/Q + CTV/Q = CFM + CFV
Le coût marginal est la variation des coûts totaux provoquée par une variation de la quantité de produit par unité de temps. Comme précédemment, on peut distinguer entre coût marginal discret et continu.
Le CMD est la variation du coût total reliée à un changement d'unité de la quantité de produit. Le coût marginal continu est le taux de variation du coût total lorsque la production varie, et peut être calculé comme la dérivée première de la fonction du coût total:
MC = dTC/dQ (coût marginal continu) .........(5.11)
Cependant, étant donné qu'à court terme, la variation de production ne peut être attribuée qu'aux variations des intrants variables, il en va de même en mesurant la variation du coût marginal discret par la variation observée dans les coûts totaux ou dans le coût variable total. Ainsi:
MC = dTVC/dQ (coût marginal continu à court terme) .........(5.12)
Le CM est également relié à la fonction de production. Etant donné que les variations de production à court terme sont produites par des augmentations ou des diminutions dans les intrants variables (EV), les variations de CTV(D CTV) peuvent être calculées en multipliant le prix de l'intrant variable par la variation produite dans l'intrant variable (D EV). Ainsi:
D CTV = PEV × (D EV) .........(5.13)
En substituant ceci dans 5.12 et par la définition du produit marginal on a:
MC = PEV × (1/MP) .........(5.14)
Les coûts marginaux sont d'un intérêt fondamental étant donné qu'ils reflètent les coûts sur lesquels l'entreprise a le plus de contrôle direct à court terme. Ils indiquent le coût devant être économisé si la production est réduite d'une unité ou, à l'inverse, les coûts supplémentaires si la production est augmentée d'une unité.
Les données de coûts moyens ne révèlent pas cette information importante. Toutes ces notions peuvent être appliquées à l'analyse des performances d'une entreprise et à ses différentes fonction de production. Cependant, il est nécessaire d'analyser en particulier les fonctions de coût total, moyen et marginal pour la fonction de production à court terme, tout en augmentant et diminuant les retours en fonction des intrants variables. L'expression mathématique est dans ce cas:
Q = a + b × (VI) + c × (VI)2 - d × (VI)3.........(5.15)
dans laquelle Q est la quantité de produit et (VI) les unités d'intrants variables, a, b, c et d étant des constantes. Les résultats sont présentés à la Figure 5.2. Notez la forme caractéristique en 'S' de la courbe de coût total.
L'application de ces critères aux usines agro-alimentaires (Figure 5.3) donne une réponse non-linéaire pour les courbes de coûts semi-variables (Zugarramurdi et Parin, 1987b).
Le coût semi-variable total (CSVT) est défini comme le coût variable qui n'est pas directement proportionnel aux extrants tels que les services administratifs, la maintenance et la surveillance.
Notes:
· Long terme, économies accrues dans les usines agro-alimentaires: haricots verts, petits pois et légumes à feuilles en conserve; potiron et pois, jus de fruits en conserve; conserves de poisson.O Long terme, usines de congélation: légumes, fraises.
D Long terme, production agricole: poires, citrons.
* Court terme, conserves de poisson.
Le coût de fonctionnement d'une usine à une capacité inférieure peut être facilement estimé si l'on connaît la structure du coût d'une usine fonctionnant à pleine capacité. Le Tableau 5.1 montre le calcul de la relation entre le coût unitaire de la production pour une usine fonctionnant à pleine capacité pour différentes structures de coût. Les valeurs sont données dans la partie inférieure du Tableau 5.1 pour les conserveries de poisson, en accord avec les structures de coût du Tableau 4.16 (Chapitre 4).
Les coûts variables fluctuent considérablement selon les unités de transformation des produits de la pêche. Ce sont des matières brutes spécifiques et une main-d'uvre intensive. Ce traitement simplifié relate la variation de tous les coûts variables et semi-variables avec l'utilisation de l'usine, bien que, comme établi précédemment, les coûts semi-variables ne varient pas nécessairement en mode linéaire avec la production à court terme. Cependant, la faible proportion de ces coûts comparée au coût total permet cette estimation (Zugarramurdi 1981a).
Les valeurs sont données à la Figure 5.4 dans laquelle les courbes pour les structures de coût A et 1 ont été dessinées en lignes pointillées et celles pour les unités de transformation du poisson en lignes continues.
Tableau 5.1 Coûts de production en tant que pourcentage de la capacité de fonctionnement
% structure des à 100% de coûts annuels capacité |
Relation entre le indiquée en fonction coût unitaire relatif et la capacité du coût unitaire à capacité maximale |
||||||
% capacité de fonctionnement |
|||||||
Type d'unité |
Variables |
Fixes |
20 |
40 |
60 |
80 |
100 |
A |
90 |
10 |
1,40 |
1,15 |
1,07 |
1,03 |
1,00 |
B |
80 |
20 |
1,80 |
1,30 |
1,13 |
1,05 |
1,00 |
C |
70 |
30 |
2,20 |
1,45 |
1,20 |
1,08 |
1,00 |
D |
60 |
40 |
2,60 |
1,60 |
1,27 |
1,11 |
1,00 |
E |
50 |
50 |
3,00 |
1,75 |
1,34 |
1,14 |
1,00 |
F |
40 |
60 |
3,40 |
1,90 |
1,41 |
1,17 |
1,00 |
G |
30 |
70 |
3,80 |
2,05 |
1,48 |
1,20 |
1,00 |
H |
20 |
80 |
4,20 |
2,20 |
1,56 |
1,23 |
1,00 |
I |
10 |
90 |
4,60 |
2,35 |
1,63 |
1,26 |
1,00 |
PRODUITS DE LA PECHE |
|||||||
Conserves |
78,0 |
22,0 |
1,89 |
1,33 |
1,15 |
1,06 |
1,00 |
Produits salés |
81,5 |
18,5 |
1,74 |
1,28 |
1,12 |
1,05 |
1,00 |
Produits congelés |
82,0 |
18,0 |
1,72 |
1,27 |
1,12 |
1,04 |
1,00 |
Farine de poisson |
86,0 |
14,0 |
1,56 |
1,21 |
1,09 |
1,03 |
1,00 |
5.4.1 Courbes de coût à long terme pour les usines actuelles
Etant donné qu'il n'y a pas d'intrants fixes à long terme, la distinction entre intrants fixes et variables disparaît et il n'y a pas de courbes TFC ou TVC. Il suffit de regarder la forme de la courbe de coût moyen à long terme. Supposons que les restrictions technologiques permettent à une entreprise de choisir entre la construction de trois usines de taille différente: petite, moyenne et grande. Les parties des trois courbes de coût moyen à court terme qui identifient la dimension optimale de l'usine pour un niveau de production donné sont indiquées en lignes continues sur la Figure 5.5.
La ligne continue de la Figure 5.5 est appelée courbe de coût moyen à long terme (CMLT) et montre le coût unitaire minimal pour toute production lorsque tous les intrants sont variables et que l'on peut construire n'importe quelle dimension d'usine. Les lignes pointillées de la courbe de coût moyen à court terme (CMCT) indiquent toujours des coûts plus importants à chaque production que ceux obtenus avec des usines de dimensions différentes.
La sélection finale va dépendre étroitement de la demande du marché et des tendances de la demande du consommateur, ce qui favorise en général les usines de grandes dimensions lorsque l'on planifie pour l'avenir. D'un autre côté, une usine de dimension moyenne peut être plus intéressante du fait d'exigences moindres en investissement en capital. Habituellement, l'entreprise aura plus de trois dimensions parmi lesquelles choisir. Lorsque le nombre d'options est important, la courbe CMLT est tangente aux courbes CMCT (voir Figure 5.6).
La plus efficace de toutes les usines possibles est celle dont la courbe CMCT est tangente à la courbe CMLT au point le plus bas. La Figure 5.6 donne la dimension d'usine optimale sur la courbe CMCT4.
Figure 5.6 Courbes de coût moyen à long terme pour usines de toutes dimensions
Il existe en pratique différentes formes de CMLT et les raisons de cette pluralité, de même que leur relation avec la capacité de l'usine, doivent être analysées. La première possibilité à analyser est celle des industries dans lesquelles CM diminue régulièrement avec Q.
Il est clair qu'avec des volumes de production importants, il existe une grande subdivision du procédé de production et une spécialisation dans l'utilisation des intrants tels que les matières premières, le travail et la surveillance.
Une conséquence directe de ceci est une augmentation de l'efficacité et une réduction des coûts. Les usines importantes, en raison de leur volume d'affaires, obtiennent également des rabais importants sur les prix des matières premières et offrent ainsi à leurs clients de meilleures conditions de vente, pénétrant ainsi le marché.
Il existe aussi des avantages au niveau de l'organisation de l'entreprise, étant donné que le personnel administratif et celui de l'encadrement sont partagés par différentes unités de production. Une entreprise importante, soit par intégration verticale, soit par diversification, peut faire face aux modifications du marché telles qu'une forte augmentation des prix, la raréfaction des matières premières ou l'innovation technologique. Ces économies d'échelle sont extrêmement importantes et peuvent faire diminuer la courbe CMCT pour l'intervalle de grande production. Les exemples en sont les usines d'automobiles, d'aluminium, d'acier, de papier, d'avions et de machines agricoles. Dans l'industrie agro-alimentaire, certaines conserveries de légumes, unités de production de jus et conserveries de poisson sont un cas d'espèce (Figure 5.7).
Dans certaines industries, l'augmentation de taille tend à créer des problèmes. Ceci est dû à la création de non-économies d'échelle par des difficultés croissantes au niveau de l'encadrement, qui consomme plus de temps et d'argent et crée des problèmes au niveau des intrants et de leurs approvisionnements.
La Figure 5.8 montre une courbe CMLT pour trois affaires lorsqu'apparaîssent des déséconomies d'échelle à des niveaux de production bas; par exemple l'agriculture, l'imprimerie, la boulangerie, les instruments électroniques et l'embouteillage de boissons non alcoolisées. Les exemples dans le secteur alimentaire où les petites entreprises ont des avantages par rapport aux grosses entreprises incluent les usines de traitement de légumes congelés.
La Figure 5.9 montre une courbe CMLT aplatie qui implique des retours constants à l'échelle sur une gamme étendue de capacités. Exemples: appareils ménagers, meubles, textiles, industries chimiques et emballage de la viande, des fruits et des légumes.
Exemple 5.1 Coûts de production à court et long termes pour les unités industrielles et artisanales de farine de poisson
Calculez et comparez les coûts de production à court et long termes pour les unités de farine de poisson: unités artisanales en Afrique et unités industrielles en Europe.
Une petite usine fonctionne en Afrique avec une capacité de seulement 100 kg de matières premières/jour (avec un rendement de 20%). Cette usine utilise une technologie simple afin de s'adapter aux caractéristiques de la région dans laquelle elle se trouve. La cuisson est effectuée à l'intérieur et le séchage utilise l'énergie solaire (Mlay and Mkwizu, 1982). D'un autre côté, des usines à grande échelle fonctionnent dans les pays européens, produisant efficacement avec des capacités importantes, utilisant des technologies incluant des unités pour concentrer les eaux résiduaires (Atlas, 1975).
Réponse:
En général, lorsque l'on analyse les coûts de production, le concept d'économie d'échelle semble indiquer que l'usine ayant le niveau de production le plus élevé est la plus adaptée. Cependant, des études économiques (Cerbini et Zugarramurdi, 1981b) montrent que dans les pays en développement, le niveau de productivité qui est la norme dans les pays plus industrialisés, peut être atteint même si une seule usine fournit la totalité du marché.
Ces circonstances indiquent l'existence d'un problème technique particulier aux pays en développement, qui est l'application de procédés permettant l'amélioration de la productivité pour un fonctionnement à plus petite échelle.
L'application de ces procédures, qui sont classiques dans les pays développés, entraîne des coûts de fonctionnement excessifs et une diminution de l'efficacité de production dans les pays ayant un marché réduit. La Figure 5.10 montre les coûts à court et long termes pour les deux types d'économie.
Il est clair que l'utilisation d'une technologie appropriée à chaque pays ou région permet des coûts de production inférieurs et une utilisation efficace des intrants locaux Les coûts se comportent de manière cohérente avec le concept d'économie d'échelle.
Les usines artisanales peuvent être installées avec la technologie la mieux adaptée à un pays donné en adéquation avec la disponibilité des intrants. Il en résulte des coûts de production considérables diminués. Cependant, en fonction du type de produit et de procédé, il peut y avoir des raisons techniques et économiques qui rendent ces alternatives non viables lorque la capacité de production doit être augmentée.
Par exemple, les coûts de main-d'oeuvre augmentent considérablement lorsqu'il faut traiter des volumes importants, comme c'est le cas dans le séchage naturel. Il n'est pas possible de contrôler efficacement l'infestation par les insectes, et la matière première est perdue avec une augmentation conséquente dans le coût total de production. Lorsque tous ces facteurs sont quantifiés, la courbe de coût réel pour la production artisanale et industrielle de farine de poisson aura une allure identique à celle indiquée en ligne brisée à la Figure 5.11.
Dans cette situation, les deux types de production - artisanale et industrielle - peuvent même coexister, comme c'est le cas en Tanzanie avec la production de farine de poisson à partir d'Haplochromis spp. dans le Lac Victoria au cours des années 70 et 80 (la production industrielle de farine de poisson a cessé lorsque les pêcheries d'Haplochromis ont fait faillite après l'introduction de la perche du Nil dans le Lac Victoria).
Figure 5.11 Courbes de coûts moyens à long terme pour des unités artisanales et industrielles de production de farine de poisson
Exemple 5.2 Analyse des courbes de coûts à long terme pour les petits bateaux de pêche en Afrique occidentale
Analyse des économies d'échelle pour les petits bateaux de pêche de la côte occidentale de l'Afrique: a) Ghana; b) Côte d'Ivoire; et c) Sénégal selon les données fournies par Frielink, 1987.
a) Ghana. Les pêcheries de sardine (Sardinella spp.)
Deux types de bateaux de pêche sont utilisés pour l'exploitation de la sardine dans cette région; certains font moins de 12 m et d'autres ont entre 12 et 22 m de long. L'étude a porté sur 32 bateaux, représentant approximativement 10% de la flotte totale immatriculée en 1983. Ils ont été classés en catégories selon trois différents groupes de taille: 0 - 9,9 m; 10,0 - 18,3 m et 18,4 - 30,5 m. Les groupes comportaient respectivement 7, 14 et 11 bateaux. Les coûts variables représentent approximativement 75% des coûts totaux; un résultat valable pour beaucoup d'autres pêcheries. Le carburant représente environ 30% du coût total.
Réponse: Il apparaît clairement que les gros bateaux (C) sont les moins rentables. Le revenu brut, qui est de 13,5% supérieur pour les bateaux (C) lorsqu'on les compare aux bateaux (B) ne compense pas les 19,6% d'augmentation des coûts de production.
Tableau 5.2 Prises, revenus, coûts et rentabilité des bateaux de pêche au Ghana
Navires |
Petits (A) |
Moyens(B) |
Grands (C) |
Prises (tonnes/an) |
178 |
208 |
236 |
Revenus bruts ($EU/an) |
33 820 |
39 520 |
44 840 |
Investissements ($EU) |
47 150 |
58 720 |
65 675 |
Coûts totaux ($EU/an) |
29 455 |
34 742 |
41 546 |
Coûts moyens ($EU/an) |
165 |
167 |
176 |
Taux de rentabilité (%) |
5,67 |
4,77 |
1,6 |
Les valeurs de coût moyen ont été portées sur la Figure 5.12. Remarquez l'apparition de déséconomies d'échelle précoces.
Figure 5.12 Courbe de coûts moyens à long terme pour les bateaux de pêche au Ghana
b) Côte d'Ivoire. La pêcherie de sardine à Abidjan
Seize bateaux entre 18,4 et 28,8 m de long ont opéré en Côte d'Ivoire en 1983. Il s'agissait de bateaux en bois à moteur construits à Abidjan, sans système de réfrigération. Ils ont été répartis en deux catégories pour les besoins de cette étude: petits bateaux, environ 240 CV et grands bateaux 450 CV.
Etant donné qu'on observait des différences importantes entre les bateaux à l'intérieur d'un même groupe, des valeurs moyennes ont été sélectionnées, au lieu d'utiliser des bateaux-types. Le nombre total de sorties en 1983 était de 110 et 122 respectivement, avec un total de prises s'élevant à 1 425 et 1 723 tonnes. Les coûts et profits de ces pêcheries sont indiqués au Tableau 5.3.
La différence entre les tailles (A) et (B) n'est pas importante en termes de rentabilité, mais le bateau de taille moyenne est probablement un meilleur investissement qu'on ne le suppose car il aura plus de possibilités et un rayon d'action plus important (Frielink, 1987).
Tableau 5.3 Prises, revenus, coûts et rentabilité des bateaux de pêche en Côte d'Ivoire
|
Petits bateaux |
Grands bateaux |
Captures (tonnes/an) |
1 425 |
1 723 |
Revenus bruts ($EU/an) |
422 716 |
513 853 |
Coûts moyens ($EU/tonne) |
229,5 |
256,2 |
Taux de rentabilité (%) |
15,8 |
7,4 |
Réponse: La Figure 5.13 montre que les coûts moyens présentent des déséconomies précoces, et démontre que le profit généré par les grands bateaux est inférieur de 35% à celui des petits bateaux.
Comme dans les autres pêcheries, les coûts variables représentent environ les trois-quarts du total. Il n'y a pas de grandes différences dans la structure de coût d'une quelconque classe de bateaux, à l'exception du carburant et des lubrifiants ainsi que des intérêts. Dans les grands bateaux, les coûts en carburant sont relativement élevés et, du fait d'un investissement plus important, doivent supporter des paiements d'intérêts plus élevés.
Historiquement, les coûts des grands bateaux ont été presque le double de ceux des petits. La production et le revenu par pêcheur sont de 10% inférieurs pour les gros bateaux, indiquant une baisse de productivité en fonction de l'augmentation - commune dans cette activité - de la puissance motrice. La valeur par agrégat pour chaque bateau de pêche est également plus élevée pour les gros bateaux, principalement à cause des intérêts élevés à payer. Le retour sur investissement est acceptable pour les petits bateaux et s'avère plus élevé que les intérêts bancaires. Ceci est également vrai pour les gros bateaux de pêche, bien que 7,4% soit un pourcentage trop faible pour le risque encouru dans cette activité (Frielink, 1987).
c) Sénégal. La petite pêcherie pélagique de Dakar
Les senneurs de la flotte de Dakar comprennent différents types et différentes tailles de bateaux de pêche. Les tailles varient de 22 à 256 tonnes de poids brut, avec des puissances de moteur allant de 110 à 600 CV. Les bateaux de pêche anciens sont construits en bois et les plus récents en fibre de verre. Le Tableau 5.4 montre la composition de la flotte, les bateaux étant groupés en quatre classes.
Le Tableau 5.5 montre les coûts et les revenus des quatre types de bateaux pour 1983.
Tableau 5.4 Caractéristiques de la flotte de senneurs de Dakar (Sénégal)
Classe |
Matériau de construction |
Prises en 1983 |
Prises par sortie |
Nombre de sorties/an |
Membres d'équipage |
Investissement ($EU) |
C1 |
Fibre de verre |
392 |
3,0 |
140 |
10 |
157 480 |
C2 |
Fibre de verre |
1 370 |
5,5 |
249 |
16 |
289 000 |
C3 |
Bois |
1 159 |
6,1 |
190 |
20 |
525 000 |
C4 |
Bois/Acier |
2 200 |
11.0 |
200 |
24 |
630 000 |
Tableau 5.5 Prises, revenus, coûts et rentabilité des bateaux de pêche au Sénégal
Type de bateau |
C1 |
C2 |
C3 |
C4 |
Prises (tonnes/an) |
392,0 |
1 370,0 |
1 159,0 |
2 200,0 |
Revenus bruts ($EU/an) |
55 559,0 |
194 173,0 |
164 268,0 |
311 811,0 |
Coûts moyens ($EU/tonne) |
169,4 |
117,0 |
188,6 |
141,9 |
Taux de rentabilité (%) |
- |
8,4 |
- |
- |
Réponse: La structure de coût est quelque peu différente de celle des autres pêcheries. Les coûts variables totaux sont inférieurs à 75% du total. La raison principale en est que l'effort de pêche est inhabituellement faible. Les bateaux de pêche doivent sortir 250-280 jours/an. Du fait des courts trajets, les coûts en carburant en pourcentage du total sont de 11-18% au lieu des 25-30% observés dans les autres pêcheries. Les salaires sont relativement élevés et ils sont partiellement fixes. Une analyse du tableau 5.5 montre que seuls les bateaux C2 ont opéré de manière rentable en 1983. Les autres bateaux, (e.g. C3) ont enregistré des pertes significatives.
La principale cause de la forte rentabilité des bateaux C2 par rapport aux autres types de bateaux serait le nombre de sorties effectuées. Les bateaux C4 ont subi des pertes malgré leurs prises importantes, probablement à cause de leur coût élevé de dépréciation. La Figure 5.14 montre le coût moyen pour les quatre types de bateaux. Observez que les bateaux moyens en fibre de verre sont les plus adaptés.
Figure 5.14 Courbe de coûts moyens de production à long terme pour des bateaux de pêche au Sénégal
Exemple 5.3 Analyse des économies d'échelle dans la production de farine et d'huile de poisson à Oman (Arnesen and Scharf, 1986)
Une ressource importante de poissons pélagiques avec une productivité élevée a été découverte dans le Golfe d'Oman. Chaque chalutier peut pêcher en moyenne 60 tonnes de poisson/jour, 250 jours par an, pour une utilisation possible comme matière première dans une usine de production de farine. Ces chiffres sont prudents car un chalutier peut dépasser les prises moyennes lorsque le poisson est abondant. Analysez et choisissez la meilleure capacité journalière en matière première entre deux usines dont les capacités nominales sont de 250 et 500 tonnes/jour.
Réponse: Une étude a été réalisée sur des usines de réduction ayant des capacités de 250 et 500 tonnes de matière première par jour. Pour cette étude, après le choix du procédé de production, les coûts d'investissement et de production ont été calculés pour différentes capacités à court et long termes, comme indiqué au Tableau 5.6.
Tableau 5.6 Revenu et coûts pour les usines de farine de poisson
Capacité |
250 tonnes/jour |
500 tonnes/jour | ||||||
Matière première (tonnes/24h) |
100 |
175 |
250 |
|
200 |
250 |
350 |
500 |
Ventes farine et huile de poisson ('000 $EU) |
3 025 |
5 294 |
7 562 |
6 |
050 |
7 562 |
10 587 |
15 125 |
Coûts variables: usine et bateaux ('000 $EU) |
799 |
1 224 |
1 647 |
1 |
405 |
1 688 |
2 252 |
3 100 |
Coûts fixes: usine et bateaux ('000 $EU) |
3 663 |
3 663 |
3 663 |
4 |
855 |
4 855 |
4 855 |
4 855 |
Coût moyen ($EU/tonne) |
850 |
532 |
399 |
|
596 |
498 |
387 |
303 |
Une usine ayant une capacité de 500 tonnes/jour est plus flexible qu'une autre ayant une capacité de 250 tonnes/jour, mais les coûts d'une usine de 250 tonnes ne sont pas très différents de ceux d'une usine ayant une capacité de 500 tonnes/jour. Construire une usine surdimensionnée est une mesure de précaution qui permet, lorsque les chalutiers fournissent jusqu'à 90 tonnes/jour pendant les périodes de prises importantes, d'effectuer le traitement dans la journées. Une usine produisant à capacité réduite peut produire des farines avec des teneurs inférieures en graisses et supérieures en protéines.
Avec deux équipes de 8 heures, l'usine peut consommer jusqu'à 240 tonnes de poisson, la production étant interrompue un jour par semaine afin de permettre un programme de nettoyage et de maintenance correct. Il est cependant impossible qu'une usine ayant une capacité nominale de 250 tonnes/jour puisse absorber cette quantité sur une moyenne de 250 jours/an, même avec des ouvriers très bien formés. L'expérience a permis de démontrer que 70% de la capacité nominale peuvent être utilisés sur 250 jours/an. Cela représente une production moyenne de 175 tonnes de poisson/jour. Les raisons de la réduction de la capacité réelle sont:
- La capacité réelle de l'usine et la qualité de la farine de poisson sont étroitement dépendantes de la fraîcheur de la matière première. Si la matière première est trop ancienne, il en résulte une augmentation des pertes et une diminution de la qualité de la farine de poisson. Si le poisson est trop frais (par exemple rigor mortis) il y a des problèmes pour concasser et transporter la matière première et la qualité de la farine qui en résulte peut être inacceptable pour le consommateur.- Il y a des variations importantes des prises quotidiennes, environ 60 tonnes/jour et par chalutier. Les prises inférieures à la moyenne ne peuvent être compensées par des prises supérieures à la moyenne à une date ultérieure.
- Une usine bien menée arrête habituellement sa production un jour par semaine pour le nettoyage et la maintenance. Une interruption de la production peut survenir même dans la meilleure usine. Les arrêts réduisent la moyenne de production nominale journalière.
- Une production moyenne de 175 tonnes/jour de matière première est équivalente à 58,3 tonnes/jour et par chalutier, une valeur proche de la capacité de conception (avec un profit de $EU 400 000/an). Cependant, si l'usine doit être approvisionnée par 4 chalutiers, les prises par chalutier doivent être limitées à 43,75 tonnes/jour, et une production de 250 jours entraînera une perte de $EU 530 000.
La Figure 5.15 donne une représentation des résultats pour les coûts unitaires.
Figure 5.15 Coûts moyens CM de producion à long terme pour les usines de farine de poisson
Si des prises de 60 000 tonnes de poisson sont prévues, la moyenne sera de 60 tonnes par bateau, lorsque quatre chalutiers sont utilisés pendant 250 journées de pêche/an. Ces prises doivent être traitées par une usine ayant une capacité nominale supérieure à 250 tonnes/jour. L'usine de 500 tonnes/jour a été choisie pour cette raison (Arnesen et Scharfe, 1986).
5.5.1 Modèles mathématiques pour l'évaluation des ressources en poisson
L'application de l'approche micro-économique à la pêche et à la transformation du poisson a été discutée ci-dessus d'une manière que l'on qualifierait de point de vue individuel de l'entrepreneur ou de l'entreprise. En particulier, dans le cas de la pêche, aucune considération biologique n'était imposée dans les calculs, par exemple la disponibilité des ressources, bien qu'en pratique elles affectent les estimations. Cependant, étant donné que le poisson est une ressource renouvelable dépendante de conditions physiques et biologiques définies, elles peuvent être prises en considération afin de déterminer la manière de faire fonctionner globalement une pêcherie de manière continue (pas seulement un type donné d'unité de transformation du poisson ou un bateau de pêche).
L'approche micro-économique appliquée aux pêcheries est maintenant une branche bien développée de la biologie moderne des poissons, dans laquelle les interactions de la connaissance biologique et de l'approche micro-économique ont conduit au développement de modèles mathématiques décrivant les aspects économiques et de durabilité d'une pêcherie dans sa totalité. Cette approche permet la définition des limites et conditions utiles dans l'exploitation d'une ressource de poisson donnée, simple ou multi-espèces et l'établissement d'une politique générale de pêche (devant être soutenue par les gouvernements et/ou auto-soutenue par les pêcheurs et l'industrie de la pêche). Il s'agit pour un pêcheur ou une entreprise d'ajuster sa propre analyse micro-économique à l'analyse micro-économique générale de la ressource pour son exploitation (et l'exploitation globale) pour être continue et durable. En pratique, c'est l'un des problèmes principaux des pêcheries actuelles.
La fonction de production a été définie comme la relation entre la quantité d'intrants utilisée et la quantité résultante de produit. Dans le cas d'une pêcherie, la fonction de production exprime la relation entre l'effort de pêche fourni et la quantité de poisson capturé. Une pêcherie est considérée ici comme étant un stock d'espèces exploité par un groupe de pêcheurs, de bateaux ou d'unités de pêche. En pratique, les conditions sont aussi complexes que les pêcheries sont diverses. La fonction de production dans une pêcherie dépend de la biologie de reproduction du stock de poisson. Des traitements plus théoriques des aspects économiques des pêcheries utilisent les analyses définies à l'origine par Schaefer (1954) dans lesquelles la croissance d'un stock de poisson est considérée comme étant une fonction du volume exprimé en unités de poids.
La biomasse d'une ressource marine va croître à des vitesses différentes selon sa taille, et va augmenter jusqu'à un point maximum qui, une fois atteint, va demeurer constant. Cette taille de population est appelée taille de population à l'état vierge (Anderson, 1974). Les paramètres physiques et chimiques influençant la taille de la population et la vitesse à laquelle la ressource atteint son point maximum, comprennent la salinité, la température, les courants dominants, les habitudes alimentaires des autres espèces, le taux de photosynthèse, la quantité d'énergie des radiations solaires et la vitesse à laquelle les éléments minéraux sont remplacés.
Si ces paramètres sont supposés constants, les trois composantes de la population qui déterminent la croissance de la ressource sont: le recrutement (la biomasse de poisson qui entre dans la population pouvant être capturée pendant une période), la croissance individuelle (la biomasse de chaque poisson individuel pendant cette période) et la mortalité naturelle (le poids de la biomasse de poisson de la population, perdue par mort naturelle et prédation pendant cette période); la période est normalement d'une année.
L'analyse de Schaefer suppose que l'augmentation de la biomasse d'une pêcherie soit fonction de la population. Elle peut être représentée par une courbe en cloche comme indiqué sur la Figure 5.16(a). L'axe horizontal mesure la taille de la population et l'axe vertical la croissance par période; les deux sont donnés en termes de poids.
Par exemple, lorsque la population a une valeur P3, l'augmentation nette en taille ou croissance sera V3. Pour des stocks de petite taille, l'effet net de recrutement et de croissance individuelle est plus important que la mortalité naturelle. La croissance naturelle est positive et augmente avec la taille du stock. Un point va finalement être atteint où le recrutement et la croissance individuelle vont égaler la mortalité naturelle et la croissance du stock va cesser. Cette opposition entre différentes forces peut varier avec différentes espèces, mais en général la courbe de croissance conserve sa forme en cloche. Dans certains cas, la partie droite de la courbe peut tendre de façon asymptotique vers l'axe horizontal d'une manière plus ou moins prononcée.
D'après la Figure 5.16, P* est la taille du stock dans lequel le recrutement et la croissance naturelle sont compensés par la mortalité naturelle. En conséquence, la population ne va pas augmenter au-delà de cette taille. Ce point sera l'équilibre naturel de la population. Pour toute population de taille inférieure, la croissance va continuer jusqu'à atteindre la taille P*.
Lorsqu'une pêcherie commence à être exploitée par l'homme, celui-ci devient un prédateur qui perturbe l'équilibre de la population. Un nouveau point d'équilibre va donc être atteint, pour lequel l'augmentation nette en poids due aux facteurs naturels va égaler la diminution nette due à la mortalité par pêche. A n'importe quel moment, la mortalité due à la pêche sera fonction de la taille du stock et de l'importance de l'effort de pêche appliqué à la pêcherie. Quelle que soit la taille de la population, plus l'effort de pêche sera important, plus nombreuses seront les prises. La mortalité due à la pêche peut être représentée sur un graphe comme une fonction de l'effort de pêche si la population demeure constante ou comme une fonction de la population si l'effort demeure constant.
En supposant que les prises varient avec l'importance de l'effort, la taille d'équilibre de la population va être différente pour chaque niveau d'effort (Figure 5.16.b). Ceci est important étant donné que l'effort de pêche est une variable définie par l'homme, qui se doit de la contrôler. Les prises sont une fonction de la taille du stock et du degré d'effort, mais comme la taille du stock à l'équilibre est une fonction de l'effort, le rendement en poisson à l'équilibre (V) est une fonction de l'effort seulement. Sur la Figure 5.16, quatre courbes en pointillé ont été tracées pour montrer la mortalité des poissons en poids (prises) qui intervient pendant une période pour différentes tailles de population, chacune exploitée avec un effort de pêche différent.
La prise obtenue avec un niveau d'effort et son équilibre de population correspondant est appelée rendement Soutenu ou Soutenable. Il est soutenable car la taille de la population n'est pas affectée par la pêche étant donné que les prises sont compensées par l'augmentation naturelle du stock. En conséquence, le même niveau d'effort va fournir le même niveau de prises au cours de la période suivante. La série de points qui représente les prises d'un rendement soutenable pour chaque niveau d'effort est appelée courbe de rendement soutenable.
La Figure 5.17 a été obtenue pour la pêcherie hypothétique de la Figure 5.16. L'axe vertical mesure les prises en poids et l'axe horizontal l'effort, l'un et l'autre étant nécessaires comme pour une fonction de production typique à court terme, avec l'effort comme entrée variable.
Les concepts de rendement soutenable moyen et marginal, dont les courbes sont représentées à la Figure 5.17b sont également importants. Ces concepts sont aussi comparables aux produits moyens et marginaux. Le rendement soutenable moyen, le rendement soutenable par unité d'effort de pêche, Y/E, diminue continuellement jusqu'à atteindre la valeur zéro, au même point pour lequel le rendement total est égal à zéro.
Le rendement soutenable marginal, la variation du rendement soutenable due à une modification de l'effort de pêche, ou (D Y/D E) est positif, mais décline et atteint zéro au niveau pour lequel le rendement maximum soutenable (MSY) est obtenu. Il devient ensuite négatif. Ceci implique que les niveaux d'effort supplémentaires au-delà du point MSY vont en fait réduire les prises.
La courbe de rendement soutenable peut être considérée comme la fonction de production d'une pêcherie à long terme; c'est-à-dire qu'elle va montrer la quantité de ressources qui peut être «produite» sur une base soutenue à différents niveaux d'effort de pêche. Les variations de l'effort de pêche vont produire une variation dans la taille d'équilibre de la population, mais il va s'écouler du temps avant que le nouvel équilibre ne puisse être atteint.
Figure 5.17 Courbes de rendement soutenable marginal et moyen
Dans les cas où ce délai est important, les courbes de rendement pour des tailles spécifiques de population peuvent être utilisées comme fonctions de production à court terme, telles que celles indiquées en pointillé à la Figure 5.17 (a) (elles sont les inverses des courbes de prises et de population représentées à la Figure 5.16 (a). Une courbe différente est nécessaire pour chaque taille de population. Des deux courbes représentées, la plus haute correspond a la population la plus importante (P2 et P3 sont les mêmes qu'à la Figure 5.16).
Afin d'évaluer l'état d'une ressource marine, on détermine le volume de prises qui peut être obtenu et on estime les effets des différentes alternatives de pêche, les effets de la pêche sur la ressource doivent être quantifiés mathématiquement, montrant les possibles variations de population pouvant intervenir comme le résultat de différentes alternatives d'exploitation (Csirke, 1988).
Le concept général utilisé pour développer les modèles de dynamique des populations servant à évaluer les ressources marines et à recommander les mesures de gestion peut être simplifié par la formule de Russell:
F2 = F1 + (R + G) - (M + C)
dans laquelle F1 et F2 représentent respectivement la biomasse de la population au début et à la fin d'une période donnée; R est la quantité du recrutement ou des nouveaux individus qui ont intégré la population; G est l'augmentation en poids provoquée par la croissance des poissons existant dans la population; M est la quantité de poisson mort de causes naturelles; et C est la quantité de poisson capturé ou tué dans le cadre d'activités de pêche pendant la même période de temps.
D'après ce modèle, la population est maintenue en équilibre lorsque l'augmentation naturelle de la population (R + G) reste égale à sa diminution (M + C) comme résultat des causes naturelles et de la pêche. En d'autres termes, la population tend à augmenter ou à diminuer au rhytme des accroissements ou des diminutions.
Parmi tous ces paramètres, le seul pouvant être contrôlé par l'homme est la prise (C), par lequel il peut modifier la taille de la population pendant des périodes successives (F2, F3,... Fn). L'une des préoccupations de chaque communauté de pêche est la détermination du niveau maximum de prises (C) et la taille de la population (St) qui une fois maintenue en équilibre (c'est-à-dire dans laquelle M+C = G+R) va permettre le maximum de prises.
Les méthodes sont en général appliquées pour estimer la taille d'une population et la relation possible entre la vitesse de l'accroissement naturel et l'intensité, et les conditions d'exploitation (par exemple vitesse d'exploitation, âge de la première capture, etc.) peuvent être regroupées en méthodes analytiques ou structurales et méthodes synthétiques ou globales.
Les méthodes analytiques ou structurales sont utilisées pour étudier la taille et la dynamique des populations en examinant ses principales composantes et les variations qu'elles subissent. D'un autre côté, les méthodes synthétiques, mieux représentées par les modèles de production globale, sont celles qui traitent la population comme une entité fermée dans laquelle il n'est pas tenu compte des modifications qui interviennent à l'intérieur. Seules sont analysées la relation entre le stimulus, habituellement représenté par l'intensité (l'effort de pêche), ainsi que la prise totale et la prise par unité d'effort (réponse) obtenues.
Les méthodes analytiques suivantes vont maintenant être examinées:
- Rendement par modèle de recrutement
Dans l'application du rendement par modèle de recrutement (Ricker, 1975; Gulland, 1969; Csirke, 1980, Pauly, 1980 ou 1982), l'information, les données et les échantillons collectés dans les pêcheries commerciales aussi bien que de la pêche exploratoire, étaient disponibles et ont été utilisés pour estimer les paramètres de la population. De tous les paramètres, les seuls qui peuvent être contrôlés volontairement par l'homme sont la mortalité due à la pêche, qui est supposée être proportionnelle à l'effort de pêche (nombre de bateaux, de pêcheurs, etc.) et la taille ou l'âge auquel le poisson peut être capturé (ce qui peut être modifié en changeant la taille des filets, en évitant les zones de frai, etc.).
Si ces paramètres sont connus, une équation assez complexe proposée par Beverton et Holt (1957) ou une version légèrement modifiée proposée par d'autres auteurs, peuvent être utilisées pour estimer la prise moyenne que chaque recrutement peut donner, pour une certaine combinaison de valeurs de mortalité due à la pêche et d'âge de première capture. Si le recrutement est connu, il sera également possible d'estimer le potentiel de captures total de la classe d'âge entière et de la population.
- Analyse de population virtuelle (APV)
La méthode d'analyse d'une population virtuelle permet de reconstruire l'historique d'une classe d'âge entière (qui lorsqu'elle est ajoutée à d'autres classes d'âge permet de reconstruire l'historique de la population entière) à partir des captures et de la mortalité naturelle estimée de cette classe d'âge pendant la période où elle a été exploitée ainsi que la mortalité due à la pêche et l'abondance durant la saison de pêche de l'année précédente. De cette façon, avec une analyse rétrospective des prises de chaque classe d'âge par rapport au temps, il est possible de faire une estimation du nombre de poissons individuels qui étaient présents dans la population dans le passé.
Pour appliquer cette méthode, il est nécessaire de connaître les prises totales et la mortalité naturelle de chaque année pour chaque groupe d'un certain âge, outre la mortalité due à la pêche ou l'abondance de la dernière saison de pêche. On applique ensuite une série d'équations (présentées et discutées en détail dans les travaux de Gullang, 1971; Pope, 1972; et Cadima, 1978) pour estimer la taille de chaque classe d'âge et la population existante dans le passé. D'autres méthodes sont utilisées lorsque les séries de valeurs de temps pour les prises et l'effort de pêche ne sont pas disponibles (Garcia et al., 1989).
L'analyse est effectuée avec la méthode globale de production basée sur la loi de croissance de la population à l'état naturel et qui suit une courbe d'allure sigmoïde. Schaefer (1954) a proposé une méthode pour estimer les prises potentielles d'une population de poissons, reliant le surplus de production ou le rendement soutenable à une mesure de l'abondance de la population ou de la mortalité due à la pêche.
Ce modèle rejette la supposition qui stipule que dans les conditions d'équilibre, l'abondance ou la prise par unité d'effort (Ut) diminue de façon linéaire avec l'augmentation de l'effort de pêche (E). Cette relation peut être représentée par l'équation:
Ut = U00 - b × Et.........(5.17)
dans laquelle: Ut est l'abondance; Et est l'effort de pêche à un moment donné; U00 est l'indice de la capacité de capture ou la taille de la population à l'état vierge, et b est une constante.
En utilisant cette équation, et en définissant l'abondance comme proportionnelle à la capture par unité d'effort (U = V/E), il est possible de tirer la relation suivante entre la capture (V) et l'effort de pêche:
Yt=U00 × Et - b × Et2.........(5.18)
qui décrit une parabole, dans laquelle chaque point de la courbe correspond à un niveau de capture ou de rendement à l'équilibre (V) selon le niveau donné de l'effort de pêche (Et). Le point le plus élevé de la parabole est la production maximale soutenue.
La simplicité des théories fondamentales et le fait que seules les données sur les prises et l'effort de pêche sont nécessaires (données statistiques facilement acquises qui sont également utilisées pour d'autres applications et par d'autres utilisateurs), permettent des modèles de production et l'acquisition de données sur les prises et l'effort de pêche, devenant la méthode standard pour l'analyse et l'évaluation de la plupart des pêcheries. Dans de nombreux cas, cela conduit à des conclusions erronées, du fait du manque d'informations complémentaires.
Pella et Tomlinson (1969) et Fox (1970) ont proposé des versions modifiées de ce modèle afin de l'adapter à des applications spécifiques et d'améliorer les adaptations aux cas particuliers. Csirke et Caddy (1983) ont proposé une version modifiée qui permet d'appliquer ce type de modèle aux pêcheries pour lesquelles ne sont considérées que les données sur les prises ou les indices d'abondance, et les estimations sur la mortalité totale. Ceci est particulièrement utile dans les cas où les données adéquates n'existent pas.
Les conclusions tirées d'une analyse des caractéristiques des dynamiques des populations de poisson doivent être exprimées en termes qui peuvent être utilisés par des non-biologistes qui ont la responsabilité de la planification et de la gestion du développement des pêcheries. Des modèles ont donc été formulés de façon à ce que les résultats puissent être exprimés en reliant les prises à l'équilibre aux différentes valeurs de mortalité due à la pêche qui, pour des raisons pratiques, sont normalement montrées par leur valeur correspondante de l'effort de pêche (par exemple, nombre de bateaux, heures de pêche, nombre de pêcheurs) (Csirke, 1985).
L'avantage de l'expression des résultats en termes de prises et d'effort de pêche est évident, étant donné que ce sont précisément ces unités que manipulent en permanence les personnes responsables de la gestion des pêcheries. La forme exacte des courbes qui relient les prises à l'effort et les prises par unité d'effort (abondance apparente) à l'effort peuvent varier selon le modèle particulier utilisé et le type de pêcherie analysé. Cependant, ces deux courbes ont habituellement le même aspect que celles de la Figure 5.17.
La conclusion générale que l'on peut tirer concernant la relation entre les prises et l'effort de pêche est que, en prenant zéro comme point de départ, de petites augmentations de l'effort vont être suivies par une augmentation presque proportionnelle des prises. Cependant, le taux d'augmentation des prises commence à baisser pour des valeurs élevées d'effort (les prises par unité d'effort diminuent également), atteint zéro, et devient ensuite négatif sur la partie droite de la courbe, pénétrant dans ce que l'on appelle un niveau de surexploitation.
Le point pour lequel le niveau des prises par rapport à l'augmentation de l'effort est zéro correspond au niveau de prises ou de rendement maximum soutenable (RMS), qui sera le niveau d'exploitation optimal si l'objectif de la pêcherie est d'obtenir la plus grande capture soutenable possible.
La durabilité économique et les considérations sociales retiennent actuellement plus d'attention et les implications de ces aspects sont montrées à la Figure 5.18. La Figure 5.18 (a) donne la relation entre les valeurs brutes de prises (axe-X) et le coût total d'exploitation (axe-Y).
La valeur brute des prises est plus élevée au point B. Au point A, la valeur brute des prises est égale aux coûts de fonctionnement pour lesquels la profitabilité est égale à zéro. La profitabilité économique maximale (rendement économique net maximum) est au point C. Du point de vue économique, il s'agit du niveau de prises optimal mais si d'autres considérations entrent en ligne de compte (par exemple maximaliser les prises totales) l'entrée de nouvelles unités de pêche peut être autorisée jusqu'au point B. Egalement, en l'absence d'une bonne politique de gestion des pêcheries, un point d'équilibre peut être atteint là ou la valeur des prises est égale aux coûts totaux (point A). Dans des cas extrêmes, la pêcherie peut également se stabiliser à un niveau de prises plus bas (point D) pour lequel la valeur des prises compense à peine les charges courantes (coûts de carburant, salaires, assurances, maintenance des bateaux et de l'équipement de pêche, etc.) et du fait d'un manque d'amortissement et de réinvestissement, la pêcherie court le risque d'entrer dans un processus de dégradation progressive.
La Figure 5.18 (b) montre d'autres indices économiques. La pente de la ligne continue montre le rendement économique marginal ou la valeur d'agrégat nette ajoutée aux prises totales avec l'entrée de chaque nouvelle unité de pêche (et l'augmentation correspondante dans les coûts totaux de pêche). Le rendement marginal montre la valeur d'agrégat pour la pêcherie entière par addition d'une unité de pêche (par exemple l'entrée d'un nouveau bateau). Le rendement marginal augmente vite mais commence à décliner rapidement en même temps que l'intensité de pêche augmente. A un certain point, le rendement marginal va être égal aux coûts de la nouvelle unité de pêche (point C); c'est-à-dire le niveau auquel le rendement économique net est le plus élevé.
Figure 5.18 Courbes de revenus et coûts marginal et moyen
C'est probablement le point auquel la pêche doit être maintenue si le rendement économique net doit être maximalisé, étant donné que toute augmentation de l'effort de pêche va coûter plus que l'augmentation correspondante de la valeur totale produite par la pêche et serait manifestement non profitable si la pêcherie était considérée dans son ensemble. Cependant, le critère utilisé pour déterminer si un bateau doit être construit ou si un nouveau peut être autorisé à pêcher est normalement la prise potentielle de ce bateau et non l'augmentation du total des prises pour la flotte toute entière. Les prises par une nouvelle unité de pêche peuvent en fait être inférieures étant donné que l'activité d'un nouveau bateau va diminuer l'abondance de la population exploitée et donc réduire les prises des autres bateaux. C'est un aspect important à considérer lorsque l'on propose une augmentation de l'effort de pêche et le développement d'une pêcherie donnée (Csirke, 1985).
De même qu'il est possible d'incorporer les critères économiques en modèles de dynamique des populations, les critères sociaux qui tendent à maximaliser le nombre de postes de travail, le nombre d'unités de pêche, etc., peuvent également être incorporés. Les modèles de dynamique des populations fournissent des informations utiles sur les limites du développement d'une pêcherie et les conséquences pour la population de poissons et pour l'homme lui-même, si le nombre d'unités de pêche est augmenté ou diminué.
Dans une pêcherie non régulée, le niveau d'effort de pêche pour l'équilibre de la pêcherie sera E3, là où le revenu total est égal au coût total. C'est également le point où le revenu moyen par unité d'effort est égal au coût moyen par unité d'effort. En ce point, le revenu total pour la pêcherie à la gauche de E3 est supérieur au coût total. Ainsi, chaque bateau réalise des profits, c'est-à-dire que le revenu moyen par unité d'effort de pêche est supérieur au coût moyen par unité d'effort de pêche. Cette situation ne va pas seulement encourager les bateaux existants à augmenter leurs efforts, mais elle va également motiver de nouvelles unités à entrer dans la pêcherie. Le cas opposé est représenté à la droite de E3. Etant donné que l'effort de pêche tend à augmenter en dessous de E3 et à diminuer au-dessus de ce point, le niveau d'équilibre de l'effort de pêche dans une pêcherie d'accès libre va se stabiliser en ce point.
Ceci peut également être appelé point d'équilibre bio-économique. Le niveau de l'effort de pêche ne va pas être modifié à moins que les prix et les coûts ne varient. La population de poisson va également rester constante. L'utilisation adéquate d'une ressource nécessite la maximalisation de son rendement net. Ceci garantit une maximalisation de la production. Sur la Figure 5.18 cette situation est montrée au point E, lorsque le profit annuel de la pêcherie dans sa globalité (différence entre les recettes et les coûts) est à son maximum. Toute augmentation de l'effort au-dessus de E1 réduira les profits annuels étant donné que les coûts augmenteront plus que les recettes.
Les recettes mesurent ce que la population est prête à payer pour le poisson et les coûts représentent la valeur des coûts d'opportunité des intrants nécessaires pour produire l'effort mis en oeuvre pour capturer le poisson. Ainsi, lorsque le coût marginal de l'effort est supérieur au revenu marginal, l'entreprise subit des pertes, puisqu'elle obtient du poisson supplémentaire à un coût supérieur à ce qui est acceptable pour les consommateurs. En d'autres termes, lorsque l'effort de pêche augmente, les intrants sont détournés de la production d'autres marchandises plus intéressantes pour l'entreprise.
D'un autre côté, si l'effort a été réduit, le profit va également diminuer impliquant que les recettes diminuent plus vite que les coûts. Ainsi, bien que les ressources puissent être utilisées dans d'autres types de production, les marchandises résultantes auront une valeur inférieure à celle du poisson qui aurait pu être capturé avec E1. Ceci est appelé rendement économique maximum (REM) de la pêcherie. Ce qui est important au point REM, n'est pas tellement la maximalisation des profits de la pêcherie dans son ensemble, mais que les intrants de l'entreprise ne soient pas utilisés pour exploiter la pêcherie, à moins qu'ils ne puissent être utilisés plus avantageusement ailleurs.
La majorité de la ressource d'une petite pêcherie peut être exploitée par quiconque s'en donne la peine. Cet accès naturel libre, au niveau de la pêcherie, tend à conduire à une surpêche biologique (au-delà du rendement soutenable maximal RSM) et à la surpêche économique (au-delà du REM), jusqu'au point où le coût total de la pêche est égal aux recettes totales obtenues de la pêche. Alors que le REM peut, dans de rares cas, se trouver à la droite du RSM, le profit économique maximal pour le pays, résultant de l'activité de pêche, se trouve en général à droite de MSY. Un point de la courbe qui relie le rendement à la taille de la ressource et à la quantité de l'effort de pêche qui est trouvé à la droite de RSM, indique un effort de pêche additionnel et une taille de population plus réduite; un point à gauche du REM indique un effort de pêche inférieur et une plus grande taille de population.
De la même façon, la théorie du développement soutenu peut être appliquée au cas d'une pêcherie ou à une ressource naturelle renouvelable. Ce nouveau concept de développement aura du succès si les aspects biologique, économique, politique et culturel sont simultanément pris en compte. Il peut être défini comme un ensemble d'objectifs dont la variation avec le temps doit être positive. Certains des objectifs sont une augmentation des recettes réelles per capita, l'amélioration du niveau sanitaire et nutritionnel de la population, l'expansion et l'extension de l'enseignement, l'augmentation des ressources (naturelles ou d'origine humaine), une distribution équitable des revenus, et une augmentation des libertés fondamentales. L'accomplissement de ces objectifs est soumise à la condition que le stock de capital naturel ne diminue pas avec le temps. Une définition complète du capital naturel comprend toutes les ressources naturelles, du pétrole jusqu'à la qualité du sol et des eaux continentales, en passant par les stocks de poisson dans les océans et la capacité de la planète à recycler et absorber le dioxyde de carbone.
Si cette théorie est appliquée au traitement d'une pêcherie, on peut tirer l'équation suivante:
(dR/dX) × (1/p) = P - C(X) .........(5.19)
dans laquelle:
R = [P - C(X)] × Y(t), revenu soutenu ou profit de l'activité
X = croissance du stock
p = taux de remise
P = prix de la ressource naturelle
C = coût unitaire de la capture
Y(t) = capture
Sa déduction et les modifications lorsque le prix des ressources change, sont données dans les références (Pearce et al., 1990). Il n'y a presque pas de données sur les taux de croissance des ressources, ce qui empêche l'analyse du REM. Trois types de données sont nécessaires pour étudier les recettes et les coûts d'une pêcherie: (1) une estimation de la courbe de rendement soutenable, (2) une estimation des coûts moyens de l'effort et (3) une estimation du prix de la ressource.
D'après le modèle de Schaefer, la courbe de rendement soutenable peut être exprimée mathématiquement sous la forme de:
Y = c × E - d × E2.........(5.20)
dans laquelle:
Y = capture; E = effort de pêche; c et t constantes
En utilisant les techniques mathématiques standards, il est possible de montrer que RMS sera égal à c2/4d et sera obtenu lorsque l'effort de pêche sera égal à c/2d.
Afin d'appliquer l'équation modèle à une pêcherie, il sera nécessaire d'obtenir des estimations de c et d. A partir de l'équation pour le rendement soutenable, le rendement soutenable par unité d'effort de pêche peut être exprimé par:
Y/E = c - d × E.........(5.21)
Ainsi, en utilisant les données des prises et de l'effort total sur plusieurs années on peut obtenir des estimations pour c et d en utilisant la technique des moindres carrés.
Exemple 5.4 Pêcherie de homards dans le Nord des USA (1950-66)
Ce type d'analyse a été appliqué à la pêcherie de homards dans le Nord des USA afin d'obtenir une mise au point rudimentaire du fonctionnement des pêcheries d'accès libre et pour recommander une politique de réglementation (Bell et Fullenbaum, 1973; Fullenbaum et Bell, 1974). L'équation suivante a été estimée en utilisant les données acquises pour la capture et l'effort entre 1950 et 1966.
Y/E = - 48,4 - 0,000024 × E + 2,126 × °F.........(5.22)
Selon cette estimation, une augmentation de 100 000 casiers réduirait la prise annuelle par casier de 2,4 livres (lb), et une augmentation de la température de 1°F augmenterait les prises de 2,126 lb. Si l'on utilisait 46°F, qui était la température moyenne pour 1966 et qui est proche de la moyenne des températures pour les 65 dernières années le résultat serait un RSM de 25 459 millions de lb qui auraient été capturées par 1 030 000 casiers. Cela signifie:
Y = 49,4 × E - 0,000024 × E2.........(5.23)
Si les coûts de fonctionnement d'un bateau sont connus, aussi bien que le nombre moyen de casiers que chacun transporte, les coûts totaux (CT) peuvent être exprimés comme une fonction de l'effort de la façon suivante:
CT = 21,43 × E.........(5.24)
et si l'on divise par le rendement total, les coûts moyens (CM) seront:
En résolvant l'équation quadratique (5.23) pour obtenir E = f(y) et en le substituant dans les équations (5.24) ou (5.25), on obtient des équations qui sont uniquement fonction de Y. De la même façon, les coûts marginaux peuvent être estimés en termes de rendement comme la dérivée de l'équation du CT total. Si l'on analyse les résultats, on observe qu'en même temps que l'on augmente le nombre de casiers, le rendement total diminue, mais le coût moyen par livre continue à augmenter, étant donné que l'on dépense plus d'argent pour obtenir un rendement plus faible.
Afin de déterminer le point d'équilibre, il est nécessaire d'effectuer un examen de la courbe de demande suivante en appliquant les techniques standards d'économétrie aux données de prix des homards débarqués, aux revenus des consommateurs, à la population des USA, à l'indice des prix à la consommation, à la consommation totale; aux importations et la production totales de homards aux USA comparées à la production dans le Nord.
Prix = 0,9393 - 0,005705 × Y.........(5.26)
En analysant l'équation de la demande (5.26) on a pu observer que si les prises de homards étaient augmentées de 1 million de lb, le prix ne baissait que de 0,5 cents/lb. Le point d'équilibre est trouvé en égalisant l'équation de la demande à la courbe de CT moyen. On obtenait au point d'intersection un prix de $EU 0,7952 et une masse totale capturée de 25,24 millions de lb. Cette capture était obtenue avec 933 000 casiers. Les chiffres réels pour 1966 étaient: 0,762, 25,6 millions de lb et 947 113 casiers.
Le REM se situait à l'intersection de la courbe de coûts marginaux et de la courbe de demande. Le prix d'équilibre était de $EU 0,833, avec un rendement total de 18,57 millions de lb en utilisant 490 000 casiers. Le CT moyen par lb en fonctionnant à ce niveau de production, était de $EU 0,571. Le revenu total en ce point, qui est égal à la différence entre le prix de vente et le coût, multipliée par le rendement total, était de $EU 4 865 340.
Une autre conclusion serait la suivante: si la production de la pêcherie devait être réduite de 25,24 à 18,57 millions de lb et le nombre de casiers de 933 000 à 490 000, cela entraînerait une diminution du CT moyen par lb de $EU 0,7952 à $EU 0,571, avec une diminution combinée des coûts totaux de $EU 9 467 378. Cette réduction implique, si l'on considère en même temps le concept de coûts d'opportunité, qu'il y a des marchandises de même valeur qui peuvent être produites dans d'autres secteurs de l'économie.
Au même moment, la réduction du rendement total a provoqué une augmentation du prix et une réduction de la consommation de homards, ayant pour conséquence une perte de $EU 4 602 038. En soustrayant ce montant de l'augmentation de la production de biens dans les autres régions, il apparaît que ce mouvement vers le point REM a permis à l'entreprise d'obtenir un profit net de $EU 4 865 340, qui est le même que le profit réalisé par l'entreprise lorsqu'elle fonctionnait au REM (Anderson, 1974).
Les entreprises de pêche doivent avoir une compréhension suffisante de la gestion micro-économique de la pêcherie dans son ensemble, étant donné que leur développement et leur fonctionnement au cours du temps en dépendent. Il est également essentiel que cette connaissance soit accessible aux coopératives de pêcheurs et à l'industrie des pêches en général, étant donné qu'il s'agit d'un problème commun.
Un autre exemple de l'application de ces concepts est celui de la pêcherie de Chypre (Hannesson, 1988), dans laquelle l'effort a été mesuré en unités de jours de pêche. L'effort optimal a été de 105 jours/mi2 pour certaines zones de pêche, et 175 jours de pêche pour d'autres. Ces niveaux sont bien inférieurs aux niveaux actuels d'activité des flottes, 67% des niveaux moyens entre 1983 et 1984 et 58% du niveau en 1984. De façon similaire, les bénéfices économiques ont été calculés en supposant qu'un effort optimal permette un total de prises de 1 360 tonnes. Ceci peut être comparé avec les prises effectives au cours des récentes années à Chypre, qui s'échelonnent entre 1 038 tonnes en 1980 et 1 952 tonnes en 1984.
Ces résultats ont permis d'analyser différentes politiques pouvant être appliquées pour réduire l'effort de pêche à un niveau optimal. L'une de ces méthodes est la réduction graduelle du niveau d'effort, après avoir d'abord arrêté l'augmentation de l'effort. Il faudra évidemment réfléchir à des emplois de substitution pour les employés obligés de quitter le secteur des pêches.
Cette réduction de l'effort de pêche peut être obtenue en divisant les prises totales en quotas individuels, en limitant les licences de pêche, en imposant une taxe de ressource sur la pêche, en interdisant les pêcheurs occasionnels et en assignant des zones spécifiques pour les permis de pêche. Il a été proposé que les licences de pêche ou les quotas soient attribués aux pêcheurs qui étaient déjà activement impliqués dans la pêche lorsque la réglementation a été introduite, et que les quotas ou les licences puissent être rachetés au besoin, jusqu'à ce que l'effort de pêche optimal soit atteint.
Les aspects micro-économiques de la pêche dans son ensemble et les diverses possibilités de sa réglementation ont été étudiés en détail (Csirke, 19895; Doubleday, 1976; Gulland, 1974; Gulland et Boerema, 1973).