1. Lapproche de précaution et la charge de la preuve
2. Définitions
3. Lapproche de précaution appliquée a laménagement des pèches
4. Lapproche de précaution appliquée a la recherche halieutique
5. Lapproche de précaution appliquée a la technologie de la pèche
6. Lapproche de précaution appliquée aux introductions despèces
1. Dans le cadre de son action en faveur de la conservation de lenvironnement et de lutilisation durable des ressources naturelles, le Gouvernement de la Suède (par le truchement de son Ministère de lagriculture) a décidé dorganiser, en étroite coopération avec la FAO, une Consultation technique sur lapproche de précaution appliquée aux pêches de capture (et aux introductions despèces). La réunion, qui sest tenue à linvitation de lOffice national suédois des pêches, a été accueillie par lInstitut de recherche marine de Lysekil (Suède) et a été officiellement ouverte par S.E. le Ministre de lagriculture, Mme Margareta Winberg.
2. La consultation a été présidée par M. Per Wramner (Office national suédois des pêches), aidé de M. Armin Lindquist (Office national suédois des pêches) et de M. Serge Garcia (FAO, Vice-Président). Les participants, invités en leur capacité personnelle, ont été choisis sur la base de leurs compétences techniques et de leur niveau dexpertise. Leurs délibérations se sont appuyées sur sept documents de travail préparés spécialement pour loccasion, ainsi que sur un certain nombre dautres documents jugés pertinents. Quatre Groupes de travail ont été formés pour examiner et rédiger des projets de Principes directeurs touchant: la recherche, laménagement, la technologie et les introductions despèces.
3. Le rapport administratif de la réunion, qui comprend également lordre du jour, la liste des participants, la documentation, le discours douverture du Ministre suédois de lagriculture, et la composition des Groupes de travail, a été publié dans les Rapports FAO sur les pêches, (527), 1995.
4. Dans le présent document, on commencera par expliquer ce quest le concept de précaution, puis on donnera la définition de certains termes importants utilisés dans les principes directeurs ainsi que des indications précises concernant laménagement, la recherche, la mise au point et le transfert de technologies, et les introductions despèces. Pour chacune de ces rubriques, on analysera les aspects particuliers de la question, et fournira enfin des indications spécifiques pour la mise en oeuvre.
5. Dans le cadre ébauché par lArticle 15 de la Déclaration de Rio de la CNUED, lapproche de précaution appliquée aux pêches découle du principe que les modifications affectant les systèmes halieutiques ne sont que lentement réversibles, quelles sont difficilement maîtrisables, pas très bien comprises et soumises à lévolution de lenvironnement et des valeurs humaines.
6. Lapproche de précaution implique une vision prudente. Compte tenu des incertitudes des systèmes halieutiques et de la nécessité davoir à prendre des initiatives avec des connaissances incomplètes, il faut, entre autres:
a. prendre en compte les besoins des générations futures et éviter toutes modifications qui ne soient pas potentiellement réversibles;7. Les points essentiels des discussions qui ont été jusquici consacrées à lapproche de précaution ont été la charge de la preuve et la qualité de la preuve (cest-à-dire la responsabilité dapporter les preuves pertinentes et les critères à employer pour juger desdites preuves). On a souvent considéré que lapproche de précaution partait du principe que les interventions humaines sont nuisibles à moins que lon ne puisse démontrer le contraire (renversement de la charge de la preuve). Eu égard à ces concepts, on sait que:b. identifier préalablement les effets indésirables et les mesures qui permettront de les éviter ou de les corriger rapidement;
c. lancer sans tarder toutes mesures correctives nécessaires et faire en sorte quelles atteignent rapidement leur but, dans un laps de temps qui ne dépasse pas deux ou trois décennies.
d. si lon nest pas sûr de limpact probable quaura lutilisation des ressources, donner la priorité à la conservation de la capacité productive de la ressource;
e. veiller à ce que la capacité de récolte et de transformation soit à la mesure des niveaux durables estimés de la ressource et limiter tous autres accroissements de la capacité quand la productivité de la ressource est extrêmement incertaine;
f. subordonner toutes les activités de pêche à lautorisation préalable des organes de gestion et les soumettre à un examen périodique;
g. instituer, pour la gestion des pêcheries, un cadre juridique et institutionnel officiel à lintérieur duquel des plans daménagement mettant en application les principes ci-dessus seront dressés pour chaque pêcherie; et
h. prévoir une attribution appropriée de la charge de la preuve en appliquant les critères ci-dessus.
a. toutes les activités halieutiques ont des effets sur lenvironnement et il nest pas juste de présumer que ces effets sont négligeables tant quon ne peut pas prouver le contraire;b. même si lapproche de précaution appliquée aux pêches peut nécessiter la cessation dactivités halieutiques qui ont des effets dommageables potentiellement graves, cela ne veut pas dire que la pêche est interdite en attendant que tous les impacts potentiels aient été évalués et considérés comme négligeables;
c. lapproche de précaution en matière de pêches suppose que toutes les activités halieutiques sont soumises à un examen et à une autorisation préalables; quun plan daménagement existe, qui spécifie clairement les objectifs de laménagement et la manière dont les effets de la pêche doivent être évalués, suivis et traités; et que toutes les activités de pêche sont soumises à des mesures provisoires daménagement bien précises en attendant que le plan daménagement ait été mis en place;
d. la norme de qualité de la preuve à utiliser dans les décisions concernant lautorisation des activités de pêche doit être à la mesure du risque potentiel que court la ressource, sans toutefois négliger les avantages escomptés desdites activités.
8. Règle de décision: Spécification de la manière dont des mesures daménagement préalablement agréées répondront à des états établis ou perçus du système.
9. Technologie de la pêche: Désigne léquipement et les pratiques utilisés pour repérer, récolter, manipuler, transformer et distribuer les ressources aquatiques et les produits quon en tire.
10. Organisme génétiquement modifié: Organisme dans lequel le matériel génétique a été modifié par lhomme au moyen de techniques génétiques ou cellulaires.
11. Organisme génétiquement sélectionné: Organisme obtenu par reproduction sélective.
12. Espèces introduites: Toute espèce transportée et relâchée, intentionnellement ou accidentellement, par lhomme dans un environnement où elle nétait jusquici pas présente.
13. Procédure daménagement: Description des données à rassembler, de la manière de les analyser et de traduire cette analyse en interventions.
14. Risque: Probabilité que quelque chose dindésirable arrive (noter que, si lon a besoin dune définition technique dans le cadre de la théorie de décision, il convient dutiliser non pas le terme risque, mais espérance de perte ou perte moyenne prévisible).
15. Etats du système: Description de la condition et de la dynamique de la ressource et de la pêcherie, notamment au moyen de paramètres tels que labondance du stock, la structure dâge, la mortalité par pêche, la situation économique du secteur et létat de lenvironnement.
16. Incertitude statistique: Variabilité ou erreur dorigines diverses, mesurée à des méthodes statistiques.
17. Espèces transférées: Toute espèce transportée et relâchée, intentionnellement ou accidentellement, par lhomme dans un environnement situé dans son aire de distribution actuelle.
18. Incertitude: Incomplétude des connaissances relatives à létat du système ou aux phénomènes naturels.
3.1 Introduction
19. Laménagement, conçu selon lapproche de précaution, consiste à user de prévoyance et de prudence pour éviter que des situations inacceptables ou indésirables ne se produisent, compte tenu du fait que les modifications des systèmes halieutiques ne sont que lentement réversibles, quelles sont difficilement maîtrisables, ne sont pas très bien comprises et sont soumises aux fluctuations de lenvironnement et des valeurs humaines.
20. Un aspect important de lapproche de précaution consiste à mettre en place un cadre daménagement juridique ou social pour toutes les formes de pêche, ce qui nest actuellement pas le cas. Des cadres de ce genre devraient, à tout le moins, établir des règles concernant laccès aux pêcheries (par exemple, tous les bateaux doivent être munis dune licence), les conditions de déclaration des données, et les méthodes de planification et de mise en oeuvre dun aménagement plus complet des pêcheries. Les plans daménagement institutionnalisent un mode de prévision qui tient compte des conséquences possibles de la mise en valeur dune pêcherie et des événements qui laffectent. Il faut parfois beaucoup de temps pour mettre au point une planification complète des pêcheries. Cest pourquoi, le cadre daménagement juridique ou social doit inclure des mesures intérimaires visant à sauvegarder les ressources en attendant que de tels plans soient adoptés.
21. Lors de la détermination des objectifs de laménagement et de lélaboration des cadres, procédures et mesures daménagement, lapproche de précaution accorde limportance voulue aux effets à long terme. Il faut évaluer les conséquences de laménagement et du développement des pêcheries pour limiter le risque déventuelles modifications potentiellement non réversibles dans un laps de temps égal à deux ou trois décennies. A lappui de lapproche de précaution, on utilisera des méthodes qui permettent de déterminer quelles sont les modifications et les impacts acceptables. Cest ainsi que dans une approche de précaution, laménagement des pêches et laménagement général de lenvironnement seront intimement liés.
22. Une gestion fondée sur la précaution exige que lon tienne explicitement compte des effets indésirables et potentiellement inacceptables et elle saccompagne de plans durgence et autres plans, à mettre en oeuvre, pour éviter ou atténuer de tels effets. Parmi les effets indésirables ou inacceptables, on peut citer la surexploitation des ressources, le développement excessif de la capacité de capture, la perte de la diversité biologique, de profondes perturbations physiques de biotopes sensibles, ou des désagrégations sociales ou économiques. Des conditions indésirables peuvent aussi surgir quand une pêcherie est négativement influencée par dautres pêcheries ou par dautres activités et quand ses gestionnaires, face à des modifications des conditions extérieures touchant par exemple la productivité des stocks de poissons, ninterviennent pas.
23. Sur le plan opérationnel, lapproche de précaution de laménagement pourra sinterpréter de diverses manières suivant le contexte. Différentes interprétations peuvent être appropriées suivant léchelle des opérations de pêche (pêche artisanale ou aux petits métiers par opposition à pêche fortement capitalisée et technologiquement avancée) ainsi que suivant létat du système exploité (système aux premiers états dexploitation ou systèmes en surexploitation évidente).
24. Lapproche de précaution intervient à tous les stades de laménagement. Ainsi, il faut pouvoir identifier les précautions à prendre à tous les stades de laménagement, depuis la planification jusquà la réévaluation en passant par la mise en oeuvre, lapplication et la surveillance. Ces différentes questions sont traitées dans les paragraphes ci-après dans lordre de succession des étapes daménagement.
3.2 Planification de laménagement
25. Si lon veut gérer une pêcherie selon une approche de précaution, il faut, à lintérieur des stratégies et plans daménagement, étudier explicitement les mesures de précaution quil faudra prendre pour éviter des effets indésirables bien précis. Comme le surdéveloppement de la capacité dexploitation est une cause fréquente de résultats indésirables, il faudra que le plan daménagement comprenne des mécanismes permettant de suivre et de contrôler ladite capacité. Il faut se demander comment les incertitudes et le manque de connaissances seront pris en compte pour élaborer et moduler les mesures daménagement. Pour toutes les pêcheries, il faudrait élaborer ou revoir les plans de manière à y introduire des éléments de précaution. Les plans, même dans les cas où aucune mesure supplémentaire de précaution nest jugée nécessaire, devraient être réévalués en fonction du processus décrit ci-après. Dans le cas de pêcheries multispécifiques, il faudra aussi dresser des plans considérant avec précaution limpact global sur lenvironnement marin. Les plans doivent sinscrire dans une dimension temporelle portant sur deux ou trois décennies au moins, voire plus dans le cas despèces à vie longue.
26. Pour sassurer une large acceptation, il faudra, à tous les stades de la planification, consulter lindustrie de la pêche, les groupes de conservation et autres parties intéressées. Les plans concernant la pêche doivent aussi être coordonnés avec les plans daménagement intégré des zones côtières. Pour mettre au point un plan daménagement qui soit largement accepté, il est préférable denvisager toute une série de solutions différentes, dont chacune aura été élaborée et évaluée au moyen des composantes décrites ci-après. Les solutions envisagées peuvent différer soit dans leur fondement, soit dans leurs détails. Par exemple, une approche de base utilisant les captures totales autorisées (TAC) pourrait être opposée à une autre approche faisant intervenir des contrôles de leffort. Les variantes de détail de deux approches fondées sur les TACs pourraient porter sur lutilisation de règles de décision différentes pour la détermination de ces TACs.
Identification des objectifs de laménagement
27. La première étape consiste à identifier les grands objectifs de laménagement. Ceux-ci doivent tenir compte tant de la manière dont on va tirer profit de la pêcherie que des éventuels effets indésirables quil convient déviter. Parmi les objectifs généraux, il faudra prendre en considération les intérêts à long terme et la nécessité déviter des modifications irréversibles ou lentement réversibles. Normalement, les captures doivent être aussi importantes que possible, pour autant que la probabilité dune diminution appréciable du stock reste en dessous dun niveau acceptable et que les captures puissent être maintenues raisonnablement stables.
28. Les objectifs généraux peuvent être pris comme point de départ pour établir les objectifs plus particuliers dune pêcherie déterminée. Dans une optique de précaution, on accordera la priorité à la reconstitution des stocks déjà surexploités, à la nécessité déviter la surpêche et la création dune capacité excessive dexploitation. Les objectifs doivent aussi viser à contenir les effets de la pêche sur lenvironnement dans des limites acceptables. On peut par exemple limiter ou supprimer les captures accessoires et la mortalité accidentelle des espèces non visées, et contenir les effets éventuels de certains types dengins de pêche sur les communautés benthiques.
Identifications des valeurs cibles et des contraintes opérationnelles
29. Les valeurs cibles correspondent aux résultats que lon attend de la pêcherie. Par exemple, on peut se fixer une valeur cible en matière de mortalité par pêche, ou correspondant à une abondance relative moyenne du stock par rapport à labondance du stock non exploité. Dans certains cas, ces valeurs cibles seront probablement identiques que laménagement de la pêche se fonde sur une approche de précaution ou pas. Dans dautres cas, les valeurs cibles devront peut-être être ajustées par mesure de précaution, en fixant par exemple comme cible une mortalité par pêche inférieure à FMSY.
30. Par contraintes opérationnelles on entend très précisément les résultats non désirables quil convient déviter. Par exemple, pour éviter le risque de voir baisser le recrutement, on peut se fixer une valeur minimale de la biomasse du stock reproducteur, une fourchette dâges ou une aire géographique qui constitueront les limites de sécurité à lintérieur desquelles le stock devrait être maintenu avec un degré élevé de probabilité. Des limites particulières peuvent aussi être nécessaires pour tenir compte des effets sur les écosystèmes, des captures accessoires et autres incidences secondaires de la pêcherie.
31. Les cibles et contraintes opérationnelles doivent être exprimées en valeurs mesurables, sous forme par exemple de niveaux cibles et des niveaux limites de référence (en anglais: Target reforme and limit reference points) limites (expression utilisée dans les documents de la FAO). Dans le détail, les paramètres qui peuvent être mesurés varieront le plus souvent suivant les espèces et les pêcheries, de sorte que les cibles et contraintes opérationnelles devront être exprimées en tenant compte de ces particularités. Létablissement des cibles et contraintes opérationnelles ne peut être dissocié des types de données et des méthodes qui peuvent être utilisées pour évaluer létat des stocks. En tout état de cause, il faudra prêter attention à la rapidité avec laquelle on approche des niveaux cibles de manière à ne pas les outrepasser, et violer ainsi les contraintes.
Définition de la procédure dapplication et dajustement des mesures daménagement
32. Un plan daménagement doit indiquer quelles sont les mesures daménagement à appliquer et dans quelles circonstances elles doivent être modifiées. Il faut pour cela formuler des règles de décision, qui spécifient par avance les mesures à prendre quand on observera des déviations déterminées à lavance par rapport aux cibles et contraintes opérationnelles. La spécification doit inclure la liste des données minimales nécessaires suivant le type dévaluation utilisé en appui à la prise de décisions.
33. Les mesures de précaution énumérées ci-après dans les exemples de mesures de précaution pourraient être mentionnées dans le plan. Pour instaurer la précaution, il faut des règles de décision permettant de réagir, dans un minimum de temps, à des événements inattendus ou imprévisibles. Tous les imprévus envisageables doivent être pris en compte quand on élabore le plan. Il faut, par exemple, y inclure les mesures explicites de réduction de leffort à prendre en cas de baisse marquée et inattendue du recrutement.
34. Il est extrêmement souhaitable que la procédure prévoie de petits ajustements périodiques des mesures daménagement de manière à maintenir dans des limites acceptables la probabilité que les contraintes soient violées. Il nest pas toujours possible datteindre simultanément une cible (résultat souhaité) assignée à une pêcherie et de respecter les contraintes imposées pour prévenir des effets indésirables. Par exemple, un objectif tel que FMSY fixé pour la mortalité par pêche peut impliquer de réduire la biomasse du stock reproducteur à un niveau auquel une contrainte de précaution serait nécessaire pour éviter léventualité dune baisse du recrutement. Si, par exemple, la contrainte consiste à maintenir, avec une probabilité élevée, la biomasse du stock reproducteur au-dessus de 30 pour cent du niveau moyen du stock non exploité, alors une cible FMSY qui ramènerait la biomasse du stock reproducteur à 35 pour cent du niveau du stock non exploité pourrait comporter une probabilité trop élevée que la contrainte soit violée. Laménagement de précaution doit ajuster les cibles de manière quelles soient compatibles avec les contraintes.
Evaluation prospective
35. Si lon veut adopter une approche de précaution, il faut évaluer la faisabilité et la fiabilité des options daménagement. Un plan daménagement ne doit pas être accepté tant quil naura pas été démontré quil fonctionne convenablement du point de vue de son aptitude à éviter des effets indésirables. Lévaluation peut servir à déterminer si les données et les méthodes dévaluation utilisables aux fins daménagement suffisent pour atteindre les objectifs de laménagement. Lévaluation doit viser à vérifier si le plan daménagement résiste tant à lincertitude statistique quà une connaissance incomplète de facteurs tels que lidentité et labondance du stock, sa dynamique, ainsi que les effets de la variabilité et des tendances de lenvironnement. De même, les évaluations doivent tenir compte du comportement dynamique du secteur de production et de laptitude des gestionnaires à modifier les volumes de récolte.
36. Dans le cas de pêcheries de grande valeur économique pour lesquelles on dispose de solides connaissances scientifiques, on aura généralement tout avantage à recourir à des techniques dévaluation puissantes telles que les modèles de simulation. Ce genre danalyses mettra souvent en évidence les sources dincertitude qui conditionnent de manière cruciale les résultats que lon pourra obtenir eu égard aux divers objectifs. Lévaluation devra aussi tenir compte des possibilités concrètes de mise en oeuvre et dapplication de toute la série des mesures daménagement incluses dans le plan.
37. Pour la petite pêche et la pêche artisanale, il nest souvent ni possible ni rentable deffectuer des analyses intensives exigeant de nombreux calculs. Dans de tels cas, les mesures daménagement ne dépendront probablement pas danalyses quantitatives mais plutôt dune estimation des conditions pratiques dans lesquelles il sera possible de faire accepter et observer des mesures de précaution par lensemble des pêcheurs. Une mesure pourrait consister, par exemple, à fermer à la pêche des zones déterminées pour protéger une proportion suffisante du stock. Un autre exemple serait de mettre sur pied un système daménagement de type communautaire. La responsabilité de laménagement serait décentralisée au niveau des utilisateurs des ressources, ce qui pourrait abaisser le coût de laménagement et des mesures dapplication. Dautres exemples de mesures simples de précaution applicables à ces types de pêche sont donnés plus loin dans la section intitulée Exemples de mesures de précaution.
38. Si lon saperçoit que des options daménagement ne sont pas satisfaisantes du point de vue de la précaution, on peut en modifier un ou plusieurs aspects, puis les réévaluer jusquà ce que le système daménagement soit jugé satisfaisant. Les aspects en question pourraient être les suivants:
a. modification des cibles et contraintes opérationnelles;3.3 Mise en oeuvre, suivi et application
b. respécification de la procédure envisagée pour appliquer des mesures daménagement;
c. nouvelles recherches pour diminuer les incertitudes critiques, ou
d. prise en considération de méthodes plus puissantes dévaluation et de suivi.
39. La mise en oeuvre dun plan daménagement consiste à mettre en place toutes les règles de décision prévues. Cela suppose linterprétation, sur le plan concret, des objectifs et des procédures, à lexécution dinstructions détaillées concernant lapplication, le suivi de la pêcherie et la tactique dapplication. Les éléments de cette phase mise en oeuvre comprennent: des évaluations des stocks, létablissement de règles, des évaluations économiques et la communication au grand public et à lindustrie de la pêche des décisions prises et de leur raison dêtre. Comme le public et lindustrie sont plus enclins à comprendre et à appuyer des mesures à propos desquelles ils ont été consultés, il importe de les faire participer à la phase de mise en oeuvre. Lexamen critique des évaluations des stocks et la transparence des opérations contribuent à prévenir des erreurs, ce qui est indispensable à une application efficace des mesures envisagées. La vérification indépendante des procédures de suivi devrait aussi être un aspect courant du système daménagement. Leffet des mesures sur le degré dapplication devrait être spécifiquement étudié.
40. Le suivi dune pêcherie nécessite la collecte de toutes les informations dont on a besoin pour sassurer que le plan est bien exécuté et quil donne les résultats souhaités. En particulier, il faut des données pour vérifier si des règles de décision ayant un caractère de précaution sont violées. Une approche de précaution appliquée à des activités de suivi utilisera un grand nombre de sources dinformations différentes, et notamment des données écologiques et socio-économiques.
41. Un suivi de la pêche fondé sur la précaution doit avoir pour objet de déceler et dobserver toute une gamme deffets secondaires, comme les modifications de lenvironnement, la dégradation de lhabitat des poissons et les effets sur les oiseaux, les mammifères et autres êtres vivants. Cette fonction de suivi peut faire usage de renseignements fournis par les participants à la pêche, les communautés indigènes et autres groupes officiels, ainsi que des procédures appropriées servant à traiter et analyser cette information.
42. Dans un système daménagement fondé sur la précaution, des règles durgence doivent être adoptées pour veiller à ce que les valeurs cibles et contraintes opérationnelles soient respectées en cas de catastrophes, même peu probables. Il doit aussi comporter des mécanismes permettant de réviser les valeurs cibles et les contraintes à la lumière dévénements inattendus.
43. Le système dapplication (de mise en oeuvre) fondé sur la précaution, ainsi que les pénalités sanctionnant les infractions doivent être suffisamment souples pour quil soit possible de redéployer rapidement les ressources disponibles pour le suivi et lapplication. Par exemple, les premiers signes de problèmes liés aux captures accessoires pourraient conduire à un échantillonnage plus intensif des zones touchées par le problème, selon une procédure préétablie, ou à un renforcement de la surveillance de la pêcherie. En cas durgence, il devrait être possible de modifier rapidement les réglementations.
3.4 Réévaluation des systèmes daménagement
44. Le niveau de précaution atteint dans le système daménagement doit être périodiquement réévalué du point de vue: 1) du degré de précaution reflété par les objectifs, les valeurs cibles et les contraintes opérationnelles par rapport aux modifications observées dans la pêcherie et dans lenvironnement, 2) de lutilisation de linformation scientifique et autres renseignements dans le processus daménagement, 3) de lapplicabilité des plans durgence dans des situations inattendues et 4) de la vérification de toutes les procédures intervenant dans le système daménagement de la pêcherie. Des réévaluations spéciales devraient être entreprises dès quil apparaît manifeste que la pêcherie viole sans le vouloir les niveaux de référence limites établis dans le plan.
3.5 Modalités dapplication
45. Plusieurs mesures de précaution pourraient être prises par les organes daménagement pour éviter les effets indésirables ou inacceptables du développement des pêches. Certaines de ces mesures sont applicables à tous les types de pêcheries; dautres ne sont utiles que dans des situations particulières, par exemple dans le cas de pêcheries surexploitées. A titre dexemple, nous indiquerons les mesures de précaution qui sappliquent à quatre situations types: 1) les pêcheries nouvelles ou en développement; 2) les pêcheries surexploitées; 3) les pêcheries pleinement exploitées et 4) les pêcheries traditionnelles ou artisanales.
46. Les mesures indiquées pourraient figurer dans des plans exhaustifs daménagement des pêches, mais elles peuvent être aussi utilisées comme mesures intérimaires pour des interventions de précaution dans lattente de lélaboration de tels plans. Une mesure intérimaire type sappliquant à de nouvelles pêcheries consisterait à fixer un plafond conservatoire à leffort de pêche. Sur une pêcherie surexploitée, une mesure intérimaire viserait à abaisser rapidement la mortalité due à la pêche. Dès que les divers plans daménagement proposés ont été évalués au moyen des méthodes examinées plus haut, le plan approuvé peut remplacer les mesures intérimaires.
Pêcheries nouvelles ou en développement
47. Certaines des mesures de précaution, énumérées ci-après pour des pêcheries nouvelles ou en développement, pourront aussi sappliquer à des pêcheries pleinement exploitées, surexploitées ou artisanales, comme on le verra plus loin. La plupart de ces recommandations valent aussi pour des pêcheries existantes mais non encore aménagées:
a. réglementer toujours très tôt laccès à la pêcherie, avant que des problèmes ne se posent. Une pêcherie à accès libre est contraire à lapproche de précaution;Pêcheries surexploitéesb. fixer immédiatement un plafond conservatoire (ou un niveau par défaut) tant sur la puissance de pêche que sur le taux de mortalité totale due à la pêche. On peut pour cela limiter soit leffort soit la capture totale admissible. Il faut, de même, prévenir tout investissement excessif dans le secteur de transformation. Les plafonds conservatoires doivent rester en place jusquà ce que des analyses des données justifient un relèvement de leffort de pêche ou du taux de mortalité par pêche. Le but visé est déviter que le développement de la puissance et de la capacité de pêche de ces flottilles aille plus vite que ce que le gestionnaire est à même de comprendre des effets de leffort de pêche existant;
c. introduire la souplesse permettant lélimination progressive de certains navires de la flottille, si cela savérait nécessaire. Pour éviter de nouveaux investissements en capacité de pêche, accorder des licences temporaires à des navires venant dune autre pêcherie;
d. pour limiter les risques auxquels sont exposés la ressource et lenvironnement, établir des cantonnements, mesure relativement rapide à mettre en oeuvre et facile à faire respecter. Ces cantonnements fournissent des refuges aux stocks de poissons, et ils permettent de protéger lhabitat et de conserver des points de comparaison avec les zones exploitées;
e. fixer préalablement des niveaux limites de référence biologiques ayant un caractère de précaution (par exemple, une biomasse reproductrice du stock inférieure à 50 pour cent de la biomasse reproductrice initiale) dès le stade de la planification (voir plus haut);
f. encourager une conduite responsable de la pêche pour assurer la pérennité dun stock productif ou dautres éléments de lécosystème. Par exemple, encourager des accords volontaires pour une conduite responsable de la pêcherie à trouver de formes de cogestion, de gestion communautaire, ou de quelque forme de propriété ou de droits de pêche;
g. encourager le développement de pêcheries qui soient économiquement viables sans avoir besoin de subventions à long terme;
h. créer, pour les nouvelles pêcheries, un système de collecte et de déclaration des données dès le début de leur développement;
i. entreprendre immédiatement un programme de recherche sur le stock et la pêcherie, notamment sur le comportement de chaque navire à légard des réglementations. Lors de loctroi dune licence de pêche, exiger de chaque navire la fourniture dinformations détaillées, notamment de données biologiques normalisées et des renseignements dordre économique;
j. profiter de toutes les occasions qui se présentent pour réaliser des expérimentations permettant dobtenir des renseignements sur les ressources, par exemple, en confrontant différentes stratégies dexploitation appliquées à des sous-populations.
48. La plupart des recommandations décrites ci-dessus sont également valables pour des stocks de poisson déjà surexploités mais il faut, à légard de tels stocks, prendre en outre des mesures de précaution spéciales, à savoir:
a. restreindre immédiatement laccès à la pêcherie et plafonner tout accroissement ultérieur de la capacité de pêche et du taux de mortalité par pêche;Pêcheries pleinement exploitéesb. dresser un plan de rétablissement qui permettra, avec une certitude raisonnable, de reconstituer le stock dans un laps de temps déterminé. Ce plan devra comporter plusieurs des éléments ci-après:
c. abaisser les taux de mortalité par pêche pendant un temps suffisamment long pour que le stock reproducteur puisse se reconstituer. Si possible, prendre immédiatement des mesures à court terme, même si lefficacité dune mesure particulière nest quinsuffisamment démontrée. Dans certains cas, le résultat pourrait être obtenu en fermant entièrement certaines zones à la pêche;
d. lorsquune bonne classe dâge se présente, réserver les recrues en priorité pour reconstituer le stock, plutôt que permettre daccroître la capture autorisée;
e. réduire la capacité de pêche pour éviter la surexploitation chronique. Supprimer la capacité de pêche excédentaire; ne pas accorder de subventions ou dallègements fiscaux pour maintenir la capacité de pêche. Si nécessaire, mettre sur pied des dispositifs permettant déliminer une partie de leffort de pêche;
f. on peut aussi autoriser certains navires à quitter une pêcherie surexploitée pour se transférer sur une autre pêcherie, si la pression résultant de ce redéploiement ne met pas cette dernière en péril;
g. ne pas recourir à la reproduction artificielle comme stratégie de remplacement des mesures de précaution indiquées ci-dessus;
h. dans le plan daménagement, établir des niveaux de référence biologiques définissant la reconstitution du stock, utilisant des mesures de létat du stock, telles que la biomasse reproductrice du stock, sa répartition spatiale, sa structure dâges ou le niveau de recrutement; et
i. pour les espèces qui sy prêtent, surveiller de près la productivité et la superficie totale de lhabitat nécessaire, pour disposer dun autre indicateur permettant de savoir quand une mesure daménagement est nécessaire.
49. Certaines pêcheries sont fortement exploitées, sans être encore surexploitées. Les institutions chargées de les réglementer doivent guetter tout particulièrement lapparition des signes éventuels de surexploitation. Si certaines des mesures de précaution décrites ci-dessus leur sont applicables, il en est dautres qui simposent ici, à savoir:
a. assurer les moyens de maintenir effectivement le taux de mortalité par pêche et la capacité de pêche au niveau existant;Pêcheries traditionnelles ou artisanalesb. il existe de nombreux signes précurseurs de la mise en surexploitation (par exemple un glissement de la structure dâge des reproducteurs vers une proportion inhabituellement élevée dindividus jeunes; un rétrécissement de la répartition spatiale du stock ou un changement de la la composition spécifique de la capture). Ces signes précurseurs devraient déclencher des mesures dinvestigation, suivant des procédures préétablies, en même temps que sont prises des mesures intérimaires daménagement, notamment:
c. quand on approche de près des niveaux limites de référence (ou niveaux de précaution), des mesures préétablies doivent être immédiatement appliquées pour éviter que ces niveaux de référence ne soient dépassés (cela signifie, quil ne faut pas attendre que la violation dun niveau limite de référence soit imminente pour commencer à décider de ce qui va être fait);
d. si des niveaux limites de référence sont dépassés, il faut immédiatement mettre en oeuvre des plans de rétablissement pour permettre la régénération du stock. Les recommandations décrites plus haut pour les stocks surexploités doivent alors être appliquées;
e. pour prévenir une réduction excessive de la capacité de reproduction dune population, éviter la capture dindividus immatures, à moins que le stock reproducteur ne soit fortement protégé. Par exemple, si la proportion de poissons immatures dans les captures dépasse un pourcentage prédéterminé, fermer la zone à la pêche.
50. Il sagit de pêcheries à faible niveau technologique exploitées par une multitude de petites embarcations, souvent sans intervention dune institution centrale daménagement. Là encore, nombre des recommandations formulées plus haut sont valables. Les mesures de précaution indiquées ci-après peuvent aussi sappliquer à certaines pêcheries de loisir:
a. fermer certaines zones à la pêche afin dobtenir les avantages mentionnés au point d) de la section consacrée aux pêcheries nouvelles ou en développement. De même, veiller à ce que, dans les zones où la pêche est autorisée, leffort de pêche ne devienne pas excessif;b. déléguer certains pouvoirs de décision, en particulier pour ce qui concerne létablissement de cantonnement et la limitation de lentrée dans la pêcherie, aux communautés locales ou aux coopératives;
c. faire en sorte que la pression exercée par dautres secteurs de la pêche (par exemple le secteur industriel) népuisent pas les ressources au point que de sévères mesures correctives ne deviennent nécessaires; et
d. étudier les facteurs qui influent sur le comportement des exploitants pour mettre au point des méthodes propres à maîtriser lintensité de la pêche. Par exemple, lamélioration des revenus des exploitants pourrait atténuer la pression exercée sur les ressources.
51. Lapplication de lapproche de précaution à laménagement dépend de la quantité, du type et de la fiabilité des renseignements dont on dispose concernant les pêches, et de la manière dont cette information est utilisée pour atteindre les objectifs de laménagement. Lapproche de précaution de laménagement dune pêcherie peut sappliquer même quand on a très peu dinformations. Lacquisition, grâce à la recherche, de nouvelles données dinformation concernant une pêcherie contribue généralement à en accroître les bénéfices potentiels tout en réduisant le risque pour la ressource. Les données scientifiques et les apports de la recherche nécessaires pour adopter une approche de précaution pour les pêches sont examinés sous les rubriques ci-après: objectifs de laménagement; observations et bases dinformation, évaluation des stocks et méthodes danalyse et de décision.
4.1 Rôle de la recherche dans létablissement des objectifs daménagement
52. Le rôle des scientifiques est daider les gestionnaires à définir leurs objectifs et de faire en sorte que lapport de la science à lensemble du processus daménagement contribue de manière aussi efficace que possible à la réalisation des intentions de laménagement. Lapproche de précaution exige une évaluation permanente et par anticipation, des conséquences des mesures daménagement en termes de contribution aux objectifs de laménagement. Lévaluation scientifique de ces conséquences suppose létablissement explicite de critères dappréciation quantifiables. La science peut contribuer de manière importante à létablissement des valeurs cibles et des contraintes opérationnelles ainsi que des critères de jugement qui soient à la fois scientifiquement utilisables et pertinents pour laménagement.
53. La recherche est nécessaire pour aider à formuler les objectifs, déterminer les valeurs cibles et contraintes biologiques en liaison avec la protection de lhabitat, la nécessité déviter que la pêche nentame sensiblement la capacité reproductive de la population, et datténuer les effets de la pêche sur dautres espèces (non ciblées par exemple). Associée à la recherche biologique, la recherche sur les caractéristiques socio-économiques et la structure des communautés de pêche est nécessaire pour formuler les objectifs de laménagement.
54. En attendant que des recherches intéressant spécifiquement tel ou tel stock aboutissent à létablissement de valeurs cibles opérationnelles différentes, lapproche de précaution consisterait, sur la base des recherches existantes et dexpériences concrètes, à: a) maintenir la biomasse du stock reproducteur à un niveau prudent, (cest-à-dire supérieur à 50 pour cent de son niveau non exploité), b) garder le taux de mortalité par pêche à un niveau relativement bas (cest-à-dire inférieur au taux de mortalité naturelle), c) éviter la pêche intensive des immatures, d) protéger lhabitat.
4.2 Processus dobservation et base dinformation
55. Pour appliquer une approche de précaution aux pêches il faut définir de manière précise les informations dont on aura besoin pour atteindre les objectifs daménagement compte tenu de la structure daménagement, ainsi que les mécanismes à mettre en oeuvre pour répondre à ces besoins. Il faut évaluer et revoir périodiquement le système de collecte des données.
56. Une approche de précaution doit comporter des mécanismes permettant de sassurer quà tout le moins, les données concernant les rejets, les débarquements, et leffort de pêche sont exactes et complètes. Ces mécanismes peuvent prévoir lutilisation dobservateurs et dincitations visant à sassurer la coopération du secteur.
57. Reconnaissant le fait que les utilisateurs des ressources ont une connaissance approfondie des pêcheries, une approche de précaution fera appel à leur expérience pour acquérir une bonne compréhension de la pêcherie et de ses impacts.
58. Lapproche de précaution devient plus efficace lorsquon comprend quelles sont les sources dincertitude qui entachent les opérations déchantillonnage et quon a rassemblé une quantité suffisante de renseignements pour pouvoir quantifier cette incertitude. Si lon dispose de telles informations, on peut sen servir directement dans la procédure daménagement pour estimer le degré dincertitude qui planera sur les décisions et le risque qui en découlera. Si lon ne dispose pas de telles informations, une approche de précaution à laménagement de la pêcherie tiendra implicitement compte de linconnue incertitude en étant plus conservatoire.
59. Le suivi prudent dune pêcherie est lun des aspects dune recherche fondée sur la précaution. Il comporte la collecte de renseignements permettant de traiter non seulement les problèmes et questions dintérêt immédiat, mais également ceux dont on peut raisonnablement sattendre à ce quils prennent de limportance pour les futures générations, ou en cas de modifications des objectifs. On rassemblera des renseignements sur les espèces cibles, les captures accessoires, la capacité de capture, le comportement du secteur halieutique, les aspects sociaux et économiques de la pêcherie, ainsi que la structure et le fonctionnement de lécosystème. Il est extrêmement souhaitable de disposer aussi de mesures de létat de la ressource qui soient indépendantes des données concernant la pêche.
60. Lapproche de précaution dune pêcherie repose sur lemploi de toute lexpérience acquise au fil du temp concernant les effets de la pêche, dans le cas de la pêcherie considérée et/ou de pêcheries similaires, sur la base de laquelle il est possible de déterminer les conséquences de la pêche et de sen inspirer pour définir un futur aménagement de précaution. Cela exige que tant les données que les méthodes de collecte de ces données soient bien documentées et disponibles.
61. Les méthodes daménagement et les structures de décision utilisées dans le monde sont très nombreuses: organismes régionaux daménagement, pratiques de cogestion daménagement communautaire, et pratiques traditionnelles daménagement. Des recherches doivent être faites pour savoir dans quelle mesure les différentes méthodes daménagement et structures de décision favorisent la précaution.
4.3 Méthodes dévaluation et analyse
62. Lapproche de précaution, comporte la détermination des niveaux de référence biologiques indiquant la surpêche.
63. Une approche de précaution exige spécifiquement un traitement de lincertitude plus complet que ne le prévoient les normes actuelles en matière dévaluation des pêches. Pour cela, il faut admettre que nos connaissances présentent des lacunes, et identifier explicitement létendue des interprétations raisonnables compte tenu de linformation présente.
64. La compilation active et lanalyse scientifique du savoir traditionnel pertinent offriraient une source complémentaire de renseignements sur les pêches. Ce travail devrait être accompagné de la mise au point de méthodes permettant dexploiter cette information et de lutiliser pour élaborer des avis en matière daménagement.
65. Plus précisément, le processus dévaluation devrait inclure:
a. des normes scientifiques concernant les preuves (qui doivent être objectives, vérifiables et potentiellement reproduisibles) qui devraient être appliquées pour évaluer linformation utilisée dans lanalyse;66. Lapplication dune approche de précaution à lévaluation et à lanalyse requiert une appréciation réaliste de tout léventail des effets possibles de la pêche, et de la probabilité que ces effets possibles concrétisent dans le cadre des différentes interventions daménagement envisageables. Lapproche de précaution appliquée à lévaluation passerait par lidentification, en fonction de linformation disponible, des différentes hypothèses ou états du système possibles, et par lexamen des conséquences que pourraient avoir les interventions daménagement proposées sous chacune de ces différentes hypothèses. Ce processus devrait être exactement le même, que les données soient abondantes ou rares. Une évaluation fondée sur la précaution devrait, à tout le moins, prendre en compte: a) les incertitudes que présentent les données; b) les hypothèses alternatives concernant les processus biologiques, économiques et sociaux sous-jacents et c) le calcul de la réaction théorique du système à un éventail dinterventions daménagement possibles. On trouvera, dans les paragraphes ci-après, une liste des questions à examiner sous ces différentes rubriques.b. un processus dévaluation et danalyse transparent; et
c. un examen périodique, indépendant, objectif et approfondi par des pairs, comme contrôle de qualité.
67. Les incertitudes affectant les données peuvent provenir: a) des estimations de labondance; b) de la structure du modèle; c) des valeurs des paramètres utilisés dans les modèles; d) des futures conditions denvironnement; e) de lefficacité de la mise en oeuvre des mesures daménagement; f) des futures conditions économiques et sociales; g) des futurs objectifs daménagement et h) de la capacité et du comportement de la flottille.
68. Les différentes hypothèses à envisager concernant les processus biologiques, économiques et sociaux sous-jacents sont: a) la sous-compensation (depensation en anglais) du recrutement ou autre dynamique entraînant un rapide effondrement; b) les modifications de comportement de lindustrie de la pêche sous loctroi de la réglementation, et notamment les modifications de la structure des communautés côtières; c) des modifications à moyen terme des conditions denvironnement; d) la sous-déclaration systématique des captures; e) des estimations de labondance dépendant de la pêcherie mais dont les variations ne sont pas proportionnelles à celles de labondance; f) des variations des prix ou des coûts pour lindustrie de la pêche; et g) des modifications des écosystèmes entraînées par la pêche.
69. Pour calculer (simuler) la réaction du système à différentes mesures daménagement, il faut tenir compte de ce qui suit:
a. les projections à court terme (1-2 ans) ne suffisent pas pour effectuer une estimation de précaution; il faudrait utiliser des échelles de temps et les taux dactualisation qui conviennent à lanalyse des problèmes inter-générationnels;70. Les méthodes danalyse et de présentation varieront suivant les circonstances mais, dans une évaluation fondée sur la précaution, il faut que lincertitude soit traitée efficacement et que les résultats soient communiqués. Les approches (voir également lappendice à la fin de la présente section) qui pourraient se révéler utiles sont les suivantes:b. lévaluation scientifique des options daménagement exige lénoncé des valeurs cibles, des contraintes et des règles de décision opérationnelles. Si celles-ci ne sont pas convenablement énoncées par les gestionnaires, il faut alors, pour procéder à une analyse de précaution, formuler des hypothèses les concernant et calculer lincertitude additionnelle résultant de ces hypothèses. Les gestionnaires devraient être informés du fait que pour atténuer cette incertitude, une spécification supplémentaire de valeurs cibles, contraintes et règles de décision est nécessaire.
a. quand il nexiste pas dobservations suffisantes pour assigner des probabilités doccurence aux différents états possibles du système, on peut utiliser des tables de décision pour représenter, au moyen des critères Maximin et Minimax, différents degrés de précautions dans laménagement;71. Pour appliquer une approche de précaution à lanalyse, il faut examiner laptitude du système de collecte des données à déceler les tendances indésirables. Quand laptitude à déceler les tendances est faible, laménagement doit être prudent.b. quand le nombre des différents états possibles du système et le nombre de mesures potentielles daménagement sont peu élevés mais quil est possible de leur assigner des probabilités, on peut utiliser les tables de décision pour faire apparaître les conséquences et les probabilités de toutes les combinaisons possibles;
c. quand il existe un large éventail détats possibles du système, lévaluation des procédures daménagement devient plus complexe, car elle nécessite une intégration des diverses sources dincertitude.
72. Le souci que lon a de la réversibilité des impacts nuisibles de la pêche est une des principales raisons dadopter une approche de précaution, aussi la recherche sur la réversibilité des écosystèmes devrait-elle jouer un rôle important dans la mise au point dapproches de précaution.
4.4 Modalités dapplication
73. Pour appliquer une approche de précaution à la recherche halieutique, on peut envisager les mesures ci-après:
a. tenir compte des meilleures preuves scientifiques disponibles quand on conçoit et adopte des mesures daménagement et de conservation, comme le prévoient les dispositions de la Convention de 1982 de la Conférence des Nations Unies sur le droit de la mer. Dans le contexte dun aménagement de précaution, les meilleures preuves scientifiques sont celles qui sont décrites dans la Section 4.3;Annexeb. exiger quun minimum dinformations soit mis à disposition avant dautoriser toute pêcherie que ce soit à commencer ou à continuer;
c. veiller à ce que labsence de certitude scientifique absolue ne serve pas de prétexte pour remettre à plus tard ladoption de mesures effectives visant à prévenir la dégradation de lenvironnement (Principe 15 de la Déclaration de Rio);
d. réduire les incertitudes critiques affectant le plan daménagement;
e. prendre des mesures visant à éliminer ou réduire les non-déclarations et les déclarations erronées, en veillant entre autres à ce que le secteur des pêches coopère à la collecte des données et que le public soit pleinement informé des résultats et de lincertitude affectant lévaluation;
f. analyser systématiquement les diverses options daménagement possibles en utilisant toute la gamme des modèles disponibles (bioéconomiques, multispécifiques et comportementaux) indiquant: a) lorientation et lampleur probables des conséquences biologiques, sociales et économiques; b) les niveaux connexes dincertitude ainsi que les coûts potentiels des mesures proposées (évaluation du risque) et de labsence essentielle dintervention (scénarios de statu quo);
g. promouvoir des recherches pluridisciplinaires associant notamment: a) les sciences sociales et économiques et les sciences de lenvironnement et b) des recherches sur les institutions daménagement et les processus décisionnels;
h. développer linformation scientifique concernant les processus en jeu dans les pêcheries plurispécifiques et les écosystèmes, comme base de la détérmination des degrés acceptables de perturbation;
i. identifier des niveaux limites de référence biologiques (biological limit reference point) et les niveaux cibles de référence (target reference point) pour les espèces et les stocks concernés, les habitats et lécosystème dans son ensemble;
j. identifier des niveaux de référence bioéconomiques prenant en compte les objectifs du plan daménagement des pêches;
k. améliorer les méthodes de quantification des effets directs et indirects de la pêche;
l. obtenir une meilleure compréhension des performances de différentes structures daménagement en matière de précaution;
m. mettre au point des méthodes permettant doptimiser le système de suivi, et
n. élaborer un programme de recherche-développement visant à améliorer les résultats de la technologie halieutique du point de vue des impacts sur lenvironnement et de laménagement de précaution.
74. LApproche Minimax/Maximin est une manière dexaminer lincertitude et dorienter les décisions qui ne nécessitent pas de déclarations explicites des probabilités concernant les différentes hypothèses (Schmid, A. 1989, Cost-benefit analysis, West View Press). Dans le tableau ci-dessous, S1 et S2 représentent les hypothèses possibles concernant la ressource (parfois appelées les différents états du système). Dans cet exemple, S1 est une hypothèse qui implique une productivité de la ressource et un rendement durable de niveau plus élevé que S2. Dans les colonnes, D1 à D3 représentent différentes décisions possibles. Dans cet exemple, D1, D2 et D3 correspondent approximativement à des niveaux deffort de pêche élevé, moyen et bas. Les valeurs P représentent les probabilités que les hypothèses S1 et S2 soient vérifiées. Les valeurs inscrites dans le tableau représentent la valeur relative du résultat dune décision donnée appliquée à un état du système donné. Dans lexemple, ces valeurs pourraient être considérées comme représentant la capture durable.
Décision |
S1 p=? |
S2 p=? |
D1 |
100 |
5 |
D2 |
50 |
40 |
D3 |
70 |
20 |
Décision |
S1 p=? |
S2 p=? |
Valeur minimum |
D1 |
100 |
5 |
5 |
D2 |
50 |
40 |
40 |
D3 |
70 |
20 |
20 |
Décision |
S1 p=? |
S2 p=? |
Regret maximum |
D1 |
100-100=0 |
40-5=35 |
35 |
D2 |
100-50=50 |
40-40=0 |
50 |
D3 |
100-70=30 |
40-20=20 |
30 |
Décision |
S1 p = 0,7 |
S2 p=0,3 |
Valeur escomptée |
Variance |
D1 |
100 |
5 |
71,5 |
1 895,25 |
D2 |
50 |
40 |
47,0 |
21 |
D3 |
70 |
20 |
55,0 |
525 |
79. Méthodes qui intègrent lincertitude: quand le nombre des états possibles du système est important, comme cest presque toujours le cas, on peut effectuer une opération mathématique équivalente à celle décrite ci-dessus pour une table de décision simple. Ceci permet de calculer, pour chaque décision possible, des probabilités de résultat, par intégration des incertitudes.
5.1 Objectif
80. Compte tenu de ce que beaucoup de ressources aquatiques sont surexploitées et que la capacité de pêche actuellement disponible compromet leur conservation et leur utilisation rationnelle, les nouveautés technologiques qui ne visent quà accroître ultérieurement la capacité de pêche ne seront généralement pas considérées comme souhaitables. Lapproche de précaution appliquée au changement technologique aura, au contraire, pour but:
a. daméliorer la conservation et la durabilité à long terme des ressources aquatiques vivantes;5.2 Introduction
b. de prévenir tout dommage irréversible ou inacceptable à lenvironnement;
c. daccroître les avantages sociaux et économiques tirés de la pêche; et
d. daméliorer la sécurité et les conditions de travail des travailleurs de la pêche.
81. La technologie de la pêche englobe léquipement et les pratiques utilisés pour repérer, récolter, manipuler, transformer et distribuer les ressources aquatiques et leurs produits dérivés.
82. Différentes technologies auront des effets différents sur les écosystèmes, sur la structure sociale des communautés de pêche, sur la sécurité des travailleurs et sur la facilité, lefficacité et lefficience avec lesquelles la pêcherie est gérée. Cest la quantité de technologie et le contexte dans lequel elle est utilisée (quand, où et par qui) et non la technologie en soi, qui font que les objectifs de laménagement des pêches seront ou non atteints. Par exemple, lactuelle surexploitation de beaucoup de ressources halieutiques est le résultat combiné de lefficience des technologies de repérage et de capture actuelles, et de la quantité de technologie mise en oeuvre. De même, la construction dune usine de farine de poisson peut involontairement, mais profondément, modifier la manière dont la pêcherie est conduite, et la structure sociale de la communauté.
83. La technologie de la pêche est en constante évolution et son efficacité sur le plan des captures ne fera que croître avec le temps. Par exemple, un accroissement defficacité de 4 pour cent par an doublera le taux de mortalité par pêche en lespace de 18 ans, si leffort de pêche reste constant. Une approche de précaution appliquée à laménagement devrait tenir compte de tels accroissements.
84. Il faudrait adopter une approche de précaution quand on met au point de nouvelles technologies ou que lon transfère des technologies existantes à dautres pêcheries, si lon veut éviter des modifications brutales et imprévues de la pression exercée par la pêche, ou des structures sociales. Certaines technologies seront considérées comme indésirables si elles entraînent des effets inacceptables (comme le poison ou les explosifs) ou si leur adoption se traduit par un gaspillage (par exemple les machines de triage en mer ont été interdites là où elles pouvaient entraîner une augmentation des rejets).
85. Les techniques halieutiques ont des effets collatéraux sur lenvironnement et sur les espèces non-cibles. Ces effets ont souvent été ignorés mais, dans le contexte dune approche de précaution, il serait peut-être bon de revoir certaines technologies. De même, une approche de précaution devrait encourager un examen attentif des effets secondaires des nouvelles technologies avant quelles ne soient autorisées.
86. Chaque technologie a ses avantages et ses inconvénients qui doivent être pesés dans une approche de précaution, et il peut être préférable de disposer dun assortiment de technologies. Quand une nouvelle technologie est introduite, il faut lévaluer soigneusement pour en estimer les effets potentiels directs et indirects. Sil est possible didentifier un mélange de techniques de pêche représentant la meilleure pratique actuelle dans une zone donnée, laménagement de précaution encouragera son adoption, en décourageant par ailleurs celles considérées comme nuisibles. Une technologie responsable est celle qui permet datteindre les objectifs daménagement dune pêcherie particulière avec un minimum deffets secondaires dommageables. Ces concepts (de pêche responsable et de meilleures pratiques actuelles) ont été abordés par lAssemblée générale des Nations Unies1 et dans la Déclaration de Cancùn2.
87. Une approche de précaution devrait mettre en place un processus dexamen initial et permanent des effets des technologies de la pêche, au moment où elles sont introduites ou quand elles évoluent en pratique locale. Toutefois, la mesure dans laquelle il est possible dappliquer une approche de précaution à la gestion du progrès technologique dépend du niveau daménagement existant. Dans certains cas, léducation des pêcheurs et des consommateurs à légard de pratiques responsables sera la seule approche possible. Quand il existe des systèmes élaborés de recherche, daménagement et dapplication, on dispose de toutes sortes de solutions pour appliquer lapproche de précaution. Cela dit, même si certains engins et pratiques sont interdits, ils continueront peut-être à être utilisés. Pour appliquer une approche de précaution à la gestion dune nouvelle technologie de la pêche il faut pouvoir la faire respecter, soit par léducation, soit par la coercition. Dans les sections ci-après, on part du principe que le dispositif institutionnel dapplication existe.
5.3 Evaluer limpact de la technologie
88. Lapplication dune approche de précaution à la mise au point et à la sélection de technologies de pêche responsables suppose une compréhension appropriée des conséquences quentraîneront leur adoption et leur utilisation. Ces conséquences, en particulier sur la faune daccompagnement et sur les écosystèmes, sont parfois hautement aléatoires. Néanmoins, on possède déjà quelques informations et lon peut en obtenir dautres. Le problème des évaluations dimpact se pose aussi bien dans le cas de lemploi de techniques existantes que de la mise au point de techniques nouvelles, ainsi que dans le cas dextension de technologies existantes à de nouvelles zones. La description dune technique donnée devrait indiquer quels en sont les incidences et avantages relatifs pour une espèce donnée dans un environnement déterminé. Quand on évalue limpact de technologies halieutiques, il faut prendre en compte tous les facteurs concernant la pêcherie, lenvironnement et lécosystème ainsi que la situation socio-économique et juridique.
89. Les facteurs à examiner sont, entre autres, les suivants:
a. les facteurs liés à la pêcherie, tels que la sélectivité par taille et par espèce (espèces visées, faune daccompagnement et espèces protégées; rejets; survie des animaux passant au travers des mailles; pêche fantôme; et capacité de capture);90. Ces facteurs peuvent être utilisés pour identifier parmi les nouvelles technologies celles qui seront bénéfiques ou celles qui seront dommageables; apprécier laptitude dune pêcherie à supporter un accroissement du taux dutilisation dune technologie déjà établie, et aider à orienter les procédures de suivi et de communication des données vers la résolution des problèmes importants. Certaines technologies, comme les instruments de navigation, les dispositifs de localisation du poisson, les techniques de transformation et de distribution, pourraient aussi être décrites et évaluées au moyen des critères ci-dessus. Il faudra pour cela une description appropriée des techniques, et de leurs propriétés en rapport avec toute une série dimpacts potentiels. Dautres éléments relevant spécifiquement de la technique ou de la zone particulière en cours dévaluation devront aussi être considérés.b. les facteurs concernant lenvironnement et lécosystème, tels que la diversité biologique; la dégradation de lhabitat; la contamination et la pollution; la production de débris et lévacuation dordures; la mortalité directe; les relations prédateur-proie;
c. les facteurs socio-économiques tels que les risques et les accidents du travail; les besoins de formation; les conflits entre usagers; les performances économiques; lemploi; les besoins en matière de suivi et dapplication et les coûts correspondants; les facteurs technico-économiques (par exemple les besoins en matière dinfrastructures et de services; coût et accessibilité de la technologie; qualité des produits et rendement énergétique);
d. les facteurs juridiques tels que la législation existante; la nécessité de nouveaux textes de lois; les accords internationaux et les libertés civiles.
91. Les approches utilisées pour évaluer les impacts varieront en fonction des ressources humaines et financières dont on dispose pour rassembler des informations. Si ces ressources sont modestes, il sera parfois possible de prendre des décisions en se fondant sur ce que lon sait des effets de techniques similaires dans des environnements similaires. Le suivi des pratiques de pêches existantes (par exemple lenregistrement des captures accessoires) apportera des renseignements supplémentaires.
92. Quand on dispose de ressources financières et humaines insuffisantes, on peut utiliser linformation existante pour effectuer des études sur dossier suivant la méthode dévaluation suggérée ci-dessus. Bien que lon puisse donner des indications générales en se fondant sur les caractéristiques connues des types de ressources visés et des techniques, la combinaison la plus appropriée de technologies à utiliser sur une pêcherie donnée devra être établie cas par cas, après avoir effectué des évaluations aux niveaux régional et national appropriés. De telles évaluations peuvent être affinées à la lumière de lexpérience et pondérées en fonction des paramètres sociaux et économiques locaux.
93. Dans le cas de nouvelles technologies, ou de technologies récemment introduites dans une zone donnée, des études pilotes pourront être dun bon rapport efficacité-coût pour évaluer les impacts et seront utiles pour mettre en évidence les avantages dune nouvelle technologie. Par exemple, lintroduction dans les casiers à langoustes, douvertures permettant aux sujets de petite taille de sen échapper a permis de démontrer aux pêcheurs que les taux de capture de grosses langoustes augmentaient. Cela dit, les études pilotes ne peuvent mettre en évidence certains gains à longue échéance, comme laugmentation du rendement par recrue, alors quelles feront apparaître les pertes à court terme.
94. Les expériences de grande envergure pour mesurer les effets dune technique de pêche sur lenvironnement marin nécessitent des ressources considérables mais, si elles sont bien conçues (soit sous la forme de projets de recherche, ou daménagement expérimental), elles livreront les renseignements les plus utiles pour juger des effets des techniques dans des zones ou habitats particuliers. Ces informations peuvent aussi servir dans des zones et pêcheries autres que celles doù proviennent les données.
95. Les procédures mises au point dans dautres contextes pour protéger lenvironnement3 peuvent aussi convenir quand on évalue les conséquences de lintroduction de nouvelles techniques de pêche ou de profondes modifications de celles qui existent déjà. Cela sera particulièrement nécessaire en présence de ressources vulnérables ou décosystèmes fragiles quil faut protéger. Dans une approche de précaution, les promoteurs dune nouvelle technique de pêche seront invités par lEtat à fournir une évaluation correcte de limpact potentiel des nouvelles techniques avant quune autorisation soit délivrée.
96. Le coût maximum justifiable dune évaluation de nouvelles techniques ou pratiques de pêche doit être en proportion des avantages aux impacts prévisibles.
5.4 Mise en oeuvre
97. Dans une approche de précaution à la gestion de la technologie des pêches, il faudra conférer à une autorité responsable désignée le mandat dévaluer et de décider de lacceptabilité de la nouvelle technologie proposée ou des modifications que lon envisage dapporter à la technologie existante, et de superviser la procédure dévaluation dimpact. Les auteurs de la proposition et autres parties prenantes devront être en mesure de faire appel si la procédure correcte na pas été suivie ou si la décision prise par les autorités ne semble pas concorder avec les conclusions de lexamen.
98. Etant donné que, dans la plupart des cas, les procédures dautorisation ne concerneraient que des améliorations techniques mineures, on pourrait se contenter de procédures simples et limiter les frais dadministration. Cela dit, les effets daméliorations minimes et progressives saccumulent au fil du temps et il faudra périodiquement effectuer des examens des impacts de la technologie existante. La rapide diffusion des technologies modernes de linformation constatée dans la plupart des pêcheries du globe (méthodes acoustiques de détection et didentification du poisson, suivi permanent du fonctionnement des engins et des navires, surveillance de lenvironnement et navigation satellitoire et facilité des communications entre navires) se traduit par des accroissements de lefficacité de capture (catching efficiency). Toutefois, cette information, officiellement destinée à réduire lincertitude peut aussi potentiellement améliorer la sélectivité, la sécurité et la rentabilité des opérations de pêche et avoir ainsi des effets positifs.
99. Les tentatives de restreindre lemploi des nouvelles techniques dinformation seront rarement justifiées ou courronnées de succès et il faut savoir se montrer ouvert au progrès technique dans le domaine des pêches en général, et tout particulièrement pour ce qui affecte la sécurité en mer et la santé des pêcheurs.
100. Pour encourager ladoption des améliorations technologiques, il faut se livrer à un travail approprié de vulgarisation et déducation pour en faire connaître les avantages. Comme le souligne le Programme Action 21 de la CNUED, une meilleure coopération internationale dans le domaine des transferts de technologies contribuerait à promouvoir la technologie la meilleure. Laction internationale menée dans le Pacifique centre-est pour former les équipages et leur apprendre à éviter efficacement les captures accessoires de dauphins grâce à une technologie spécialement conçue a été couronnée de succès, et cest là un bon exemple de ce quil est possible dobtenir dans ce domaine.
5.5 Recherche et développement technologiques
101. Les recherches menées dans le domaine de la technologie halieutique à lappui dune approche de précaution devraient encourager lamélioration des techniques actuellement utilisées et devraient promouvoir la mise au point de nouvelles techniques appropriées. Ce type de recherches ne devrait pas se concentrer uniquement sur les engins utilisés pour la capture; par exemple, des recherches sur des méthodes rentables de purification de lalimentation en eau des fabriques de glace pourraient réduire considérablement les pertes après capture et améliorer la qualité et la salubrité des produits.
102. Certains développements technologiques, comme la localisation par satellite, peuvent aussi contribuer à un aménagement de précaution en améliorant le suivi des opérations commerciales et en permettant à la recherche de réduire lincertitude dans divers aspects importants de la science halieutique.
5.6 Modalités dapplication
103. Les mesures ci-après pourraient être prises pour mettre en oeuvre une approche de précaution en matière de développement et de transfert de technologie:
Autorité
a. Il conviendrait de mettre en place des mécanismes efficaces pour sassurer que lintroduction de la technologie est soumise à examen et réglementée.Procédures dévaluation
b. La première étape de la procédure dévaluation consiste à réunir une documentation sur les caractéristiques et la quantité de technologie halieutique actuellement utilisée.Mise en oeuvrec. Des procédures dévaluation devraient être établies pour identifier les caractéristiques des nouvelles technologies, de manière à promouvoir lutilisation des techniques bénéfiques et prévenir lemploi de celles qui conduisent à des changements difficiles à renverser.
d. Ces procédures devraient évaluer avec la précision voulue les impacts possibles de la technologie envisagée, afin déviter dinutiles investissements financiers et sociaux.
e. Les autorités concernées devraient sassurer que les promoteurs de technologies et autres parties prenantes connaissent leurs obligations et leurs droits concernant de telles procédures.
f. Le niveau des procédures dévaluation devrait être à la mesure des effets potentiels de la technologie proposée, allant par exemple de la simple étude sur dossier jusquaux études dimpact complètes, comprenant éventuellement des projets pilotes ou y conduisant.
g. Les autorités concernées devraient mettre en oeuvre graduellement la technologie envisagée de manière à minimiser le risque de dommages irréversibles ou de surinvestissement.h. Les technologies existantes et leurs effets sur lenvironnement devraient être examinés périodiquement.
i. Les développements technologiques peuvent conduire à des modifications des pratiques des personnes travaillant dans la pêche. Pour recueillir tous les avantages de la technologie tout en assurant la sécurité des travailleurs, il faut former ces derniers à lutilisation correcte des techniques nouvelles.
j. Dans le cas de pêcheries en cours de réhabilitation, il faudrait saisir loccasion pour examiner le mélange de techniques utilisées.
k. Il faudrait encourager la recherche sur les techniques de pêche responsables.
l. Il faudrait encourager la recherche technologique destinée à réduire le coefficient dincertitude qui apporte lévaluation et le suivi des stocks.
6.1 Introduction
104. Comme il est hautement probable que les introductions despèces aient des effets irréversibles et imprévisibles, bon nombre de celles-ci ne relèvent pas de lapproche de précaution. Une stricte approche de précaution ne permettrait donc pas les introductions délibérées et préconiserait des mesures énergiques pour prévenir les introductions accidentelles. Compte tenu des difficultés que comportent les introductions, les objectifs dune approche de précaution appliquée aux introductions despèces dans le contexte des pêcheries de capture seront de limiter le risque deffets dommageables des introductions sur ces pêcheries, dadopter (par exemple dans un plan durgence) des mesures de correction ou datténuation avant même que les dommages ne se vérifient, et de réduire au minimum les introductions involontaires dans les écosystèmes naturels dans les pêcheries de capture qui leur sont associées.
105. Pour ce qui concerne laquaculture, lexpérience a montré que les animaux arrivent généralement à franchir les limites dune installation aquacole. En conséquence, lintroduction dorganismes aquatiques à des fins aquacoles doit être considérée comme une introduction intentionnelle dans le milieu naturel, même si le dispositif de quarantaine et lécloserie constituent un système fermé.
106. Les introductions et transferts (ci-après désignés par le terme dintroductions) sont un moyen efficace daccroître la production de protéines, dengendrer des revenus et de créer des emplois. Pourtant, certaines introductions volontaires et beaucoup dintroductions involontaires peuvent avoir des incidences importantes et graves sur les pêches de capture. Le nombre dintroductions involontaires, par exemple par lintermédiaire de leau de lest, dépasse de loin celui des introductions effectuées volontairement dans lintérêt des pêches de capture. Dans le cas despèces introduites dans lintérêt de la pêche, il est possible datténuer le risque pour les pêcheries de capture en appliquant les codes internationalement acceptés, comme le Code dusages du CIEM de 1994 (voir annexe A)4. Ce code pose les principes dune approche plus prudente et devrait être largement diffusé et expliqué.
107. Si lon veut appliquer une approche de précaution à laménagement des pêches il faut éviter, en tenant compte du facteur dincertitude, les changements irréversibles à léchelle de générations humaines et autres impacts indésirables. Les introductions despèces, quelles soient volontaires ou accidentelles, peuvent avoir de tels effets indésirables. Une fois quune espèce est introduite elle ne peut généralement pas être éliminée, même sil est parfois possible den atténuer les effets indésirables.
108. La difficulté de renverser une introduction et ses effets néfastes doivent figurer en bonne place dans la réflexion qui précède la décision dautoriser ou non une introduction. Lévaluation des risques liés à des introductions intentionnelles sur des pêcheries est une nécessité de lapproche de précaution; le Code dusages de la CIEM propose une procédure pour ce genre dévaluation.
109. Pour encourager une application plus stricte de lapproche de précaution en matière dintroduction, lactuel Code dusages formulé pour la région du CIEM peut être modifié et adapté pour être plus applicable au niveau national, en simplifiant ses procédures sans en affaiblir la rigueur.
110. Les introductions accidentelles sont, par nature, étrangères à la notion de précaution car elles peuvent rarement être évaluées par avance. Une approche de précaution viserait à atténuer le risque de telles introductions involontaires et à en minimiser les effets.
6.2 Principaux problèmes et objectifs
111. Les introductions sont examinées ici du point de vue du secteur des pêches. Les principales raisons pour lesquelles on procède à des introductions délibérées concernent, entre autres, la production de protéines, lemploi, les recettes en devises, la lutte biologique et les loisirs. Des introductions despèces se sont produites à loccasion dactivités en rapport avec: les transports (par exemple par leau de lest, les salissures des coques de navires et des forages pétroliers), le commerce des organismes vivants, notamment des espèces daquarium, laquaculture et les pêches (commerciales et récréatives; amélioration des stocks; organismes accidentellement transportés avec les engins de pêche, poissons vivants utilisés comme appât). Beaucoup de ces activités se sont intensifiées au cours du siècle écoulé et ne feront probablement que croître à lavenir.
112. Les impacts potentiels de certaines introductions sur le secteur des pêches comprennent des modifications de la distribution et de labondance des ressources halieutiques par le biais de maladies, des modifications des relations prédateur-proie, des modifications de la concurrence, des mélanges de mauvais gènes (mal adaptés) et des modifications de lhabitat. Il peut y avoir aussi des modifications secondaires et tertiaires de lécosystème. Des changements de la stratégie de pêche et de la communauté de pêche peuvent aussi nécessiter des modifications des engins et des saisons de pêche pour permettre à une espèce nouvellement introduite de sinstaller, ou pour éviter que la nouvelle pêcherie ne saccompagne deffets secondaires. Les modifications du climat peuvent aussi avoir des conséquences appréciables et modifier lenvironnement, le rendant plus favorable à lintroduction despèces soit utiles, soit nuisibles.
113. Lutilisation despèces introduites, spécialement dorganismes génétiquement modifiés et génétiquement sélectionnés, peut favoriser une production constante ou accrue à partir dhabitats qui sont désormais si altérés ou dégradés que les pêcheries dorigine ne sont plus viables. Il faut prendre garde de ne pas utiliser cette productivité potentielle des espèces introduites pour justifier dultérieurs abus dans lutilisation de lhabitat ou pour retarder sa remise en état.
6.3 Recherche et technologie
Introductions délibérées
114. Le Code dusages du CIEM (annexe A) décrit comme suit les activités de recherche qui devraient être entreprises avant une introduction: 1) évaluation sur dossier de la biologie et de lécologie de lintroduction envisagée; 2) préparation dune évaluation des risques (analyse détaillée des impacts potentiels sur lenvironnement); 3) examen de lespèce dans son aire de distribution dorigine. Les résultats des recherches ci-dessus devraient être consignés dans un document ou une proposition à soumettre à lautorité compétente pour évaluation et décision.
115. Pendant et après lintroduction, il est possible de recourir à une intervention technologique; par exemple, on peut:
a. utiliser des écloseries ou des dispositifs de quarantaine pour diminuer le risque de propagation de maladies au sein des ressources halieutiques, et contrôler le nombre dorganismes exotiques introduits;116. Des recherches et interventions technologiques continues devraient être faites sur les espèces introduites dans le cadre dun programme de suivi et dévaluation, pour évaluer leur impact, leur état de santé et leurs performances dans le nouvel habitat. Des bases de données ou des registres dintroductions despèces aquatiques, avec leurs incidences écologiques et socio-économiques, ont été créés à cet effet; ils devraient continuer à être tenus par les organisations compétentes, avec la contribution du secteur des pêches.b. utiliser des organismes stériles pour diminuer le risque de croisements avec des stocks naturels de poissons;
c. procéder à une identification génétique du stock pour réduire ou prévenir des modifications génétiques des ressources halieutiques;
d. effectuer des diagnostics médicaux afin de suivre létat de santé des espèces introduites; et
e. développer la pratique des projets de petites dimensions à petite échelle (projets pilotes) pour évaluer les impacts et les performances des introductions.
Introductions accidentelles
117. Les introductions accidentelles peuvent provenir de sources diverses, telles que les salissures des coques, la suppression de barrières naturelles et le commerce des poissons daquarium, mais leau de lest est probablement le facteur le plus appréciable et le plus préoccupant pour le secteur des pêches et cest pourquoi on y insistera ici. Dans le cas de leau et des sédiments de lest, des études sur dossier peuvent être effectuées pour établir: 1) les principales sources de provenance de leau de lest, 2) les volumes de lest introduits et 3) les probables points chauds constituant des sources dintroductions.
118. Des recherches actives devraient être entreprises et régulièrement poursuivies concernant:
a. les moyens pratiques de traiter les organismes contenus dans leau et le sédiment de lest;119. Les recherches sur de nouveaux matériaux anti-salissures non létaux plus efficaces devraient se poursuivre pour diminuer les risques dintroductions par les coques des navires et pour remplacer les applications de produits biocides nocifs pour les pêches. Les agents antisalissures sont conçus pour atténuer leffet de freinage et accroître le rendement du combustible dun navire et son efficacité à long terme, mais ces produits devraient aussi être respectueux de lenvironnement. Il faudrait aussi prêter attention aux agents anti-salissures conçus pour lutter contre des organismes spécialement nuisibles pour les pêches, même ces agents nont pas dinfluence positive sur la performance du navire.b. létude de la dynamique des espèces visées pendant le voyage;
c. létude des kystes algaux présents dans le sédiment de lest des navires et dans les zones portuaires;
d. lefficacité des opérations de renouvellement du lest;
e. les modifications de la conception des réservoirs pour tuer ou contrôler les espèces nuisibles présentes dans leau de lest;
f. la conception de navires facilitant le traitement et la manutention des sédiments et de leau de lest.
6.4 Aménagement
120. La première chose à faire en matière dintroductions est de créer un organe daménagement qui ait la responsabilité dévaluer les introductions proposées, de les approuver en se conformant aux présentes directives et de suivre en permanence les effets de lintroduction. La gestion des introductions despèces comprendra une évaluation comparée des risques et des choix entre les diverses options qui soffrent pour accroître la productivité. Les options daménagement considérées ici ne concernent que le secteur aquatique, mais les pays peuvent être sensibles à des problèmes plus vastes, en liaison avec le développement dautres secteurs (par exemple lagriculture). Les codes dusages internationaux, comme le Code dusages du CIEM, offrent un bon cadre pour laménagement des introductions volontaires despèces. Ces codes ne devraient pas être considérés comme une entrave au développement mais plutôt comme un outil qui permet aux importateurs deffectuer les bons choix en matière dintroductions. Lapplication du code devrait accroître les probabilités de succès dune introduction appropriée.
Introductions délibérées
121. Les introductions intentionnelles doivent être contrôlées; en conséquence, ceux qui procèdent à une introduction doivent suivre, selon le cas, le Code dusages du CIEM ou tout autre code similaire et, pour démontrer quils font preuve de prudence, sont censés présenter une proposition indiquant: 1) le but et les objectifs de lintroduction préalablement à cette introduction, 2) toutes les données biologiques, écolologiques et génétiques pertinentes concernant lespèce et la zone susceptible dêtre affectée, 3) lanalyse des impacts potentiels sur les lieux de lintroduction, notamment les impacts écologiques, génétiques et pathogènes potentiels et les conséquences éventuelles de sa propagation et 4) une évaluation qualitative et, si possible, quantitative des risques.
122. Si cette proposition est approuvée, il faudra: 1) créer un stock de géniteurs dans un dispositif de quarantaine approprié, 2) stériliser de manière appropriée tous les effluents de linstallation, 3) relâcher en petit nombre des individus isolés de la première génération, exempts de maladies, et 4) poursuivre létude de lintroduction dans le nouvel environnement.
123. Un plan durgence peut être établi pour prendre en compte des effets négatifs, si ceux-ci se manifestent et justifient une intervention.
124. Le code devrait aussi couvrir les introductions qui font partie de la pratique commerciale courante (commerce de poissons et de coquillages vivants) et recommander: a) une inspection périodique avant exportation; b) des inspections régulières et c) des mesures de quarantaine et de lutte, si nécessaire.
125. Les préoccupations exprimées à propos de lintroduction despèces à des fins halieutiques suivant le Code du CIEM, devraient sappliquer aux espèces que lon envisage dintroduire pour la lutte biologique et qui peuvent avoir des implications pour la pêche. Il faudrait comparer attentivement les programmes de lutte biologique et dautres méthodes de contrôle, comme les techniques physiques et chimiques ou la pêche intensive. Il faudra probablement plusieurs années pour évaluer les techniques de lutte biologique, en recourant à des essais in situ. Il y a beaucoup à apprendre des études faites sur la lutte biologique dans dautres disciplines, comme lentomologie.
126. La proposition soumise par limportateur potentiel dune espèce exotique et son examen par lautorité compétente servent de mesures de précaution pour réduire le risque dune introduction nuisible. Les gouvernements souhaiteront peut-être inclure dans la législation nationale la possibilité pour limportateur dune espèce exotique qui naurait pas respecté les principes du code dêtre tenu pour financièrement et pénalement responsable si des dégâts importants se produisent.
127. Il faudrait veiller à ce que la population introduite ait une base génétique satisfaisante - à savoir diversité génétique, faible consanguinité, etc. - cela pour ne pas avoir à procéder à des introductions supplémentaires qui, si non, pourraient se révéler nécessaires pour accroître la base des ressources génétiques. En outre, il faudrait envisager la possibilité dimporter des gamètes - par exemple oeufs, sperme cryoconservé - ou bien dorganismes entiers, pour réduire le risque dintroduire des maladies ou des organismes non désirés.
Introductions non intentionnelles
128. Lintroduction despèces indésirables par lintermédiaire de leau de lest pose, dans le monde entier, des problèmes pour les pêches. Mais à côté des introductions involontaires par le biais de leau de lest, il existe beaucoup dautres véhicules dintroductions, dont la pêche et le commerce des poissons vivants. La pêche peut être une occasion dintroductions quand elle transporte dun écosystème à un autre, des appâts vivants ou frais ou des engins de pêche biologiquement contaminés. Ce commerce des organismes vivants quand il a lieu (pour des aquariums ou pour la consommation humaine), comprend des risques de fuites.
129. Les autorités chargées de réglementer la pêche et le commerce des produits de la pêche devraient, pour limiter ces risques, élaborer des réglementations dont la sécurité devrait être en relation avec la gravité des impacts nuisibles potentiels. Mais les autorités nationales et internationales qui ont compétence pour soccuper des questions de lest sont rarement celles qui sont aussi chargées des questions daménagement des pêches. La coopération entre ces différentes instances faciliterait grandement la gestion de ce problème.
130. Pour limiter le risque créé par lintroduction des organismes contenus dans leau de lest pour les pêcheries de capture, dans les zones de délestage ou à proximité de celles-ci, lOMI a recommandé (1994, annexe B) les méthodes de prévention ci-après: a) sabstenir de délester; b) renouveler leau de lest en des points approuvés ou à proximité; c) prévenir ou minimiser le prélèvement deau ou de sédiments contaminés (en eau peu profonde, à proximité dopérations de dragage, pendant des périodes de proliférations dalgues); d) prévoir des installations spéciales de délestage à terre; e) former les équipages aux procédures de gestion de leau de lest et f) traiter leau de lest, notamment en modifiant la température et la salinité et grâce à lemploi de biocides (produits chimiques).
131. Les questions relatives au transport de leau de lest, aux organismes salisseurs et autres introductions involontaires ne relèvent pas toujours du mandat des ministères des pêches, mais le secteur de la pêche pourrait contribuer à la gestion de ce type dintroductions susceptibles davoir un retentissement sur lindustrie elle-même. Pour cela, on pourrait promouvoir la création et lentretien, auprès de linstitution appropriée, dune base de données accessible sur les questions de lest ou les organismes salisseurs ayant un effet démontré sur les pêches; promouvoir la constitution dun réseau dexperts qui identifierait les problèmes, participerait à lidentification despèces et délimiterait les zones dimpact. Le secteur des pêches serait peut-être bien placé pour détecter la propagation dorganismes nuisibles provenant de salissures ou de lest, et devrait par conséquent apporter sa contribution à ces bases de données et à ces réseaux quand ils auront été créés; il pourrait aussi prendre des initiatives en matière de gestion de lenvironnement.
132. Les organismes introduits peuvent entraîner de profondes modifications des écosystèmes, spécialement dans les zones portuaires et connexes, les zones confinées ou partiellement confinées comme les lagunes. De telles introductions peuvent modifier la productivité des espèces exploitées localement. Le suivi des organismes introduits et des pêcheries de ces zones pourrait apporter des informations utiles qui serviraient à modifier les techniques et politiques daménagement concernant les ressources exploitées.
6.5 Modalités dapplication
133. Ceux qui procèdent à des introductions devraient considérer le Code dusages du CIEM comme un moyen de limiter les introductions despèces nuisibles, ainsi que de parasites et de maladies qui peuvent avoir un impact dommageable sur les pêches de capture.
134. Pour encourager une approche plus prudente, les gouvernements nappartenant pas à la région du CIEM devraient appliquer les principes ou recommandations du code en fonction de leur situation particulière. Les éléments critiques à prendre en considération sont la proposition, lexamen indépendant par un organe scientifique et les protocoles à élaborer par la suite si une introduction est approuvée.
135. Outre les codes publiés par le CIEM et lOMI, il pourrait être bon, dans le cadre dune approche de précaution à légard des espèces introduites:
a. délaborer des procédures et protocoles clairs et sans ambiguïté concernant la mise en place, pour la gestion des espèces introduites, de mécanismes opérant sous la responsabilité des services publics compétents et habilités à traiter des questions dapplication, de responsabilité et dobligations;136. Il est suggéré de créer et dentretenir des bases de données sur les espèces délibérément introduites aux fins de pêche. Des données sur limpact de ces introductions devraient y figurer. Les importateurs ou les gestionnaires des pêches souhaiteront peut-être consulter ces bases de données pour faciliter la formulation de propositions et leur évaluation.b. de promouvoir la coopération entre le secteur des pêches et les autres secteurs qui soccupent du milieu aquatique afin de coordonner la politique et la réglementation des espèces introduites; il sagit spécialement des autorités nationales qui soccupent des ports et du transport maritime, et des organisations internationales comme le CIEM, la FAO, lOMI et lICLARM, qui disposent de lexpertise nécessaire;
c. dencourager les groupes pertinents (importateurs et organes de réglementation) à étudier un plan durgence à mettre en oeuvre au cas où lespèce introduite ne répondrait pas à ce que lon en attend ou aurait des effets nuisibles;
d. de promouvoir léducation, la formation et une prise de conscience à légard de lintroduction despèces nuisibles, diffuser aussi largement que possible les codes du CIEM et de lOMI et de dispenser des avis aux autorités compétentes, du secteur des pêches et dautres secteurs, concernant les procédures contenues dans ces codes;
e. de créer, auprès dinstitutions appropriées, un système international dinformation sur les organismes présents dans leau de lest ou organismes salisseurs ayant un impact démontré sur les pêches, en encourageant la constitution dun réseau dexperts chargé de définir les problèmes, didentifier les espèces et les zones dimpact, dorganiser la normalisation des méthodes déchantillonnage (inter-étalonnage) et de mettre au point un système de suivi qui permette dévaluer les changements dans les zones à haut risque. Si des espèces non désirées devaient être repérées, il faudrait envisager un programme déradication;
f. dencourager lapplication du code par lindustrie de la pêche et par les autres utilisateurs des ressources aquatiques; les gouvernements pourraient encourager lindustrie de la pêche et les autres utilisateurs de la ressource à une autosurveillance et à une application volontaire du Code en vue de minimiser les effets des espèces introduites par des moyens non autorisés; et
g. de conduire des recherches sur lapplicabilité des conclusions tirées dintroductions portant sur un nombre limité dindividus (introductions pilotes ou expérimentales).
137. La mise au point de méthodes anti-salissures non biocides et efficaces pour réduire le risque dintroductions lié aux salissures des navires est encouragée.