7.1 Quotas de prise ou limitation de leffort
7.2 Changement de la maille des chaluts
7.3 Réglementation de la pêche artisanale sur les juvéniles
7.4 Saisons de fermeture de la pêche en mer
7.5 Priorités en matière daménagement
Une étude des possibilités daménagement des pêcheries de P. duorarum de la côte ouest-africaine a été faite par Garcia et Lhomme (1977). Les conclusions les plus générales seront reprises ici. Les principales mesures daménagement envisageables comprennent:
- le
contrôle du niveau global dexploitation (quotas de prise ou
limitation de leffort);
- le changement de la maille des chaluts;
- le contrôle de la pêche des juvéniles en
lagune;
- la fermeture de la pêche en mer pendant certaines
saisons.
Les quotas annuels de capture ne sont pas utilisables dans le cas danimaux à vie courte. Leffort de pêche tendra à se concentrer sur les mois qui suivent le recrutement et la mortalité par pêche et donc la production du stock seront affectés en fonction de la concentration dans le temps de leffort total. De plus, la modification de la mortalité par classe dâge selon le succès du recrutement augmente le risque de surexploitation si un mauvais quota a été fixé. Un quota saisonnier portant sur 2 à 3 mois sera plus logique, mais sa mise en oeuvre se révélera plus ardue.
Une limitation de leffort de pêche total présente des avantages certains de simplicité dapplication. Elle permet aussi en principe de maintenir le taux dexploitation stable lorsque le recrutement annuel varie de façon appréciable. Il faudrait, pour lappliquer, établir un système de licences et suivre lévolution de lefficacité des bateaux de façon à être en mesure de maintenir la puissance de pêche totale à un niveau correspondant au taux dexploitation désiré. Une telle réglementation permettrait dutiliser au mieux les variations interannuelles dabondance dues aux variations du recrutement. Dautre part, en cas de surestimation de leffort correspondant au maximum de capture, cette réglementation nentraînerait pas les dommages qui résulteraient dune réglementation par quota de capture au cas où la prise maximale moyenne aurait été surestimée.
Une telle réglementation est, a priori, intéressante pour plusieurs raisons:
- les crevettes ayant une vie courte et une croissance rapide, le gain annuel (éventuel) serait obtenu dès lapplication dune telle mesure, avant la fin du premier cycle annuel;
- laugmentation de la taille de la maille entraînant une augmentation de lâge et du poids moyen individuel et le prix au kilogramme dépendant du poids individuel, le gain en valeur serait proportionnellement plus important que le gain en tonnage;
- la maille actuellement utilisée par tous les
crevettiers de la côte dAfrique (40 à 50 mm douverture)
entraîne la capture de grandes quantités de petit poisson non
commercialisables qui sont actuellement rejetées (plusieurs tonnes par
jour et par bateau). Ces poissons sont le plus souvent des juvéniles et
leur destruction intensive risque daffecter sérieusement le
recrutement despèces exploitées par dautres
pêcheries (Brachydeuterus auritus, Pseudotolithus
spp., Galeoïdes sp., etc.). Un accroissement
même limité de la maille (dont le bénéfice en terme
de production de crevettes doit être évalué), devrait donc
être bénéfique pour les pêcheries chalutières
côtières portant sur le poisson.
Les maillages envisageables pour la crevette étant de
toute manière inférieurs à ceux qui conviennent pour la
plupart des espèces de poisson commercialisées, il faudrait, pour
une exploitation optimale des deux types de ressources, étudier les
possibilités dutilisation de filets sélectifs à
crevette permettant léchappement des poissons de taille
inférieure à une limite donnée.
Quelles que soient les méthodes de pêche actuellement utilisées dans les différents pays, la pêche artisanale en lagune provoque une réduction sensible du recrutement du stock marin. On peut supposer quà lâge où ces crevettes sont capturées, la mortalité la plus importante a déjà eu lieu (au stade larvaire en particulier) et que la réduction du recrutement potentiel (en novembre) produira une réduction identique (en pourcentage) du potentiel total de capture en mer (en poids). Il est donc clair que la prise maximale moyenne en mer serait obtenue en supprimant totalement la pêche artisanale. Etant donné limportance sociale de la pêche artisanale, il est non moins évident que son élimination complète ne peut être que difficilement retenue. Dun point de vue purement économique, il faut noter que laccroissement de la pression de pêche sur les juvéniles entraîne une diminution de la valeur globale des captures (constituées alors de crevettes plus petites) et que la petite taille des crevettes pêchées en lagune en général les met sur le marché mondial en compétition directe avec les caridés des mers froides que leur prix rend plus compétitifs.
Plusieurs possibilités de réglementation des prises lagunaires existent:
- laugmentation de la maille des filets fixes, permettant à un plus grand nombre de crevettes de séchapper vers la mer;
- la limitation ou linterdiction des fileta traînants qui capturent de petits individus de faible valeur commerciale et des poissons juvéniles;
- la limitation du nombre de filets fixes et la fixation dun intervalle minimal entre eux dans les portions étroites du trajet migratoire (ponts, goulets et passes);
- ladoption de saisons de fermeture et de cantonnements
pour protéger les individus de petite taille pendant les périodes
de migration intense.
La pêche en mer pourrait être fermée au moment où le recrutement est le plus intense. On éviterait ainsi lexploitation de concentrations de juvéniles à croissance rapide et nayant pas atteint la maturité sexuelle, laquelle a lieu vers 6-7 mois en Côte dIvoire (Garcia, 1976). Cette fermeture pourrait être coordonnée avec celle de la pêche artisanale. Le bénéfice à espérer dune telle réglementation dépend beaucoup du schéma saisonnier de capturabilité.
Compte tenu de létat actuel de développement des pêcheries, il importe de prendre dores et déjà des mesures susceptibles dassurer leur avenir. Ces mesures dépendront des options retenues par chaque pays pour leur développement. Une expansion de la pêche artisanale permet, au moins à court terme, une plus grande utilisation de la main - doeuvre - notamment en zone rurale - et probablement une meilleure répartition des revenus. Les investissements nécessaires - notamment on devises fortes - sont faibles par comparaison à ceux que demande le développement de la pêche en mer. Ce type dexploitation provoque en revanche une diminution de la valeur globale des captures, de leur compétitivité sur les marchés dexportation, et pourrait théoriquement mettre en danger la survie même du stock si ce développement ne saccompagnait pas dun contrôle rigoureux, souvent difficile à exercer. Quel que soit le choix retenu, des mesures sont nécessaires, en particulier en ce qui concerne:
- le
contrôle da la pêche artisanale afin de la maintenir à son
niveau actuel tant que son taux dexploitation na pas
été évalué et que les objectifs
daménagement nont pas été
fixés.
-
le contrôle dès maintenant de la pêche industrielle, de
façon à profiter de ce que le maximum de production na pas
été atteint ou dépassé pour établir un
système de licences sur la pêche en mer, limitant dans un premier
temps la taille des flottilles au niveau actuel. Pour les quelques secteurs
où une expansion est possible, leffort ne devrait être
augmenté quavec prudence, après avoir démontré
que lexpansion envisagée est compatible avec la productivité
du stock.
Ces recommandations peuvent paraître
élémentaires mais elles sont les seules possibles actuellement,
compte tenu du niveau des statistiques disponibles et des évaluations
réalisées.