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5.4 La CIV est surtout nécessaire aux petits exploitants agricoles aux ressources limitées

De nombreuses études portant sur la diffusion de l'innovation (Rogers, 1981) ont largement propagé l'idée selon laquelle une «nouvelle technologie», y compris dans le domaine agricole, dans la mesure où elle offre des avantages tangibles ou une amélioration par rapport aux pratiques antérieures, se diffusera avec une relative facilité, même sans l'aide d'un service de vulgarisation. Il faut toutefois observer que, dans ce genre de cas, c'est le groupe socioéconomique le plus élevé de la collectivité concernée qui présente la meilleure probabilité de mise en pratique de la nouvelle technologie recommandée (Rogers et Adhikarya, 1979). Pour les membres moins privilégiés de ce groupe, le processus d'adoption et de mise en pratique adéquate de la technologie recommandée ne se limite pas à la prise d'une décision rationnelle fondée sur l'analyse des risques et des avantages économiques ou d'autres formes d'incitation. D'autres facteurs, tels que l'accessibilité de l'information, les carences en savoir-faire technique pertinent, les préjugés sociaux et culturels ou encore le manque de ressources, constituent autant de facteurs supplémentaires risquant d'entraver l'adoption des technologies agricoles recommandées par les groupes désavantagés du point de vue socioéconomique tels que, notamment, les petits exploitants agricoles aux ressources limitées (Adhikarya et Rogers, 1978).

Comme l'a indiqué, lors de la Consultation globale de la FAO sur la vulgarisation agricole, la plupart des services de vulgarisation, tant dans les pays développés que dans les pays en développement, apportent une aide aux gros exploitants agricoles, notamment pour les cultures commerciales. Une enquête parrainée par la FAO et portant sur 207 organismes de vulgarisation agricole opérant dans 113 pays a révélé qu'en 1988, environ 58 pour cent des ressources de vulgarisation disponibles dans le monde étaient dirigés vers les exploitations agricoles à vocation commerciale, y compris les producteurs spécialisés de cultures commerciales et de produits de base destinés à l'exportation. En d'autres termes, 22 pour cent seulement des ressources consacrées à la vulgarisation étaient canalisés vers l'agriculture de subsistance ou les petites exploitations (Swanson et al., 1990), avec comme corollaire l'élargissement du fossé qui sépare les grands et les petits exploitants du point de vue des connaissances comme des avantages en général. La CIV, qui est centrée sur la solution des problèmes, met précisément l'accent sur l'aide aux petits exploitants ne disposant que de maigres ressources et elle semble assez efficace comme méthode de mise en œuvre des programmes d'intervention visant à réduire ce fossé.

Par ailleurs, les programmes de vulgarisation n'ont pas nécessairement besoin de s'appuyer sur la recherche agricole comme fournisseur de «nouveaux» ensembles technologiques. Ils ne manquent pas, généralement, de techniques agricoles ou de procédés culturaux «anciens» qui n'ont pas été adéquatement mis en pratique par la majorité des agriculteurs, notamment les petits exploitants aux faibles moyens. De nombreuses enquêtes CAP conduites dans des pays en développement ont d'ailleurs révélé l'existence d'une foule de méthodes culturales «anciennes» qu'une forte proportion des petits exploitants ignorent, rejettent ou n'appliquent pas convenablement. C'est précisément pour ce genre de bénéficiaires que des programmes spécialisés d'interventions de type CIV, axés sur l'adoption de procédés techniques «anciens/existants», sont particulièrement utiles afin de combler l'écart de connaissances et d'avantages économiques entre les gros et les petits exploitants (Adhikarya et Rogers, 1978).


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