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Evaluation des performances de reproduction de la chèvre du Drâ au Maroc - Evaluation of the reproductive performance of Dra goats in Morocco

R. Boukhliq et A. Lablou-Kassi

Département de Reproduction Animale et d'Inséminations Artificielle
Institut Agronomique et Vétérinaire Hassan II
B.P. 6202
Rabat-Instituts
Maroc


Resume
Summary
Introduction
Variations saisonnières de l'activité reproductrice
L'âge et le poids vif a la puberté
Reprise de l'activité sexuelle postpartum
Fertilité, prolificité et fécondité
Conclusions
Remerciements
Références


Resume

Les premiers prospects de la population caprine dans la vallée du Drâ (sud-est du Maroc) ont permis de distinguer un type de chèvre dont les performances semblent prometteuses. Les observations faites sur ces chèvres en station indiquent une prolificité moyenne de 158 p.cent avec 7 p.cent de naissances triples, une fertilité élevée (89 p.cent), une puberté précoce (5-10 mois) et une aptitude à se reproduire 2 fois par an (33 p.cent des femelles ont un intervalle entre 2 mises bas successives inférieur à 8 mois). Un programme est envisagé sur ces chèvres pour évaluer les performances de reproduction, de la croissance et de la production laitière afin d'évaluer le potentiel génétique et l'influence des facteurs de l'environnement. Des enquêtes seront menées dans le berceau pour caractériser les systèmes de production traditionnels.

Summary

Preliminary surveys of the goat population in the Drâ valley of south-east Morocco have indicated the presence of a type with useful performance characteristics. Results from goats under station conditions indicate a prolificacy of 158% with 7% triplet births, good fertility (89%), early puberty (5-10 mo) and an ability to produce 2 kid crops per year (33% of goats having an interval between successive parturitions of less than 8 mo). A programme is proposed to evaluate the genetic potential of reproductive, growth and milk production characteristics of the Drâ goat and to study the effects of environmental variables. Field studies will be undertaken in the area where the goat is found to characterize the traditional production systems.

Introduction

Il est estimé qu'actuellement le Maroc possède entre 5 et 6 millions de caprins (DPAE, 1987). Les connaissances pathologiques, nutritionnelles, génétiques et socio-économiques que l'on peut obtenir sur le caprin marocain vent fragmentaires et partielles. Dans ce sens, l'Office Régional de Mise en Valeur de Ouarzazate (sud-est du Maroc) a mis en place une station où fut introduit en 1982 un troupeau de 17 femelles pleines et 2 boucs d'une population locale appelée "Hourra", "Beldia" ou chèvre de Drâ. Cette chèvre, dont les performances de reproduction semblent être prometteuses, fournit une part croissante dans l'approvisionnement en lait et en viande le long de la vallée du Drâ (Ezzahiri et Benlakhal, 1984). Ses effectifs importants (@ 20 000 têtes) en font une espèce de choix pour tout projet de développement de l'approvisionnement en protéines animales dans cette zone. Le programme que l'on envisage consiste en la mise en place d'un contrôle de performances de reproduction sur le terrain à travers des enquêtes auprès des éleveurs, et en station à travers un système d'accouplements raisonnés sur un noyau de ces animaux. Les éléments de ce contrôle seront présentés sous forme d'hypothèses basées sur les informations disponibles avec une présentation du plan de travail adopté pour tester chaque hypothèse.

Variations saisonnières de l'activité reproductrice

Malgré la petite taille de cette chèvre qui lui confère des besoins alimentaires réduits, la taille du troupeau (2-12 têtes) est toujours modulée en fonction des disponibilités alimentaires. La présence permanente des mâles avec les femelles donne lieu à des accouplements toute l'année. Une enquête faite en 1982 sur 37 exploitations comprenant 349 caprins montre des chevrettages étalés sur toute l'année avec une faible incidence en automne correspondant à des saillies de printemps (35 p.cent des mises bas en jan-mars, 31 p.cent en avr-juin, 24 p.cent en juil-sep et 10 p.cent en oct-déc). L'analyse des résultats de mises bas à la station de Tinzouline durant 6 années montre des taux de fertilité supérieurs à 80 p.cent pour les luttes d'hiver, de printemps et d'été. Ces observations indiquent une race désaisonnée comme la race ovine D'man (Lahlou-Kassi, 1982; Boukhliq, 1986). L'absence d'une saison sexuelle déterminée pourrait offrir des perspectives intéressantes à toute technique moderne de conduite de troupeau et de lutte programmée. Pour déterminer la part de la génétique et de l'environnement dans le déterminisme de la saison sexuelle, un protocole a été retenu.

Le protocole prévoit, sur un groupe de 15-20 femelles de 2-5 ans gardées vides pendant une année, la détection biquotidienne des femelles en chaleur à l'aide d'un bouc vasectomisé et le contrôle chaque semaine de la progestéronémise à travers des prises de sang et dosage. Des contrôles du taux d'ovulation peuvent éventuellement avoir lieu tous les mois. Egalement, sur un groupe de 510 mâles de 2-5 ans, contrôlés tous les 15 j et entraînés à éjaculer dans un vagin artificiel et suivis pendant au moins 1 an, on déterminera l'intéressement sexuel, le nombre et le volume d'éjaculats ainsi que les caractéristiques macroscopiques (couleur, densité, homogénéité) et microscopiques (mobilité massale et individuelle, pourcentage des spermatozoïdes vivants, mobiles, déformés). Aussi tous les 15 j (mais de façon alternée) la mesure de la circonférence scrotale et la récolte jusqu'à épuisement seront faites accompagnées d'examens macroscopiques et microscopiques du sperme.

L'âge et le poids vif a la puberté

Les éleveurs enquêtés s'accordent pour comparer la précocité de la chevrette du Drâ à celle de l'agnelle D'man qui est pubère aux alentours de 230 j. L'âge à la puberté chez la D'man semble être influencé par la saison de naissance, puisque les agnelles nées en avr/mai sont pubères à 200 j alors que celles nées en nov/déc le sont à 260 j (Boukhliq, 1986). D'après l'enquête, l'âge à la première saillie se situe autour de 9 mois et varie de 5 mois à 12 mois (Ezzahiri et Benlakhal, 1984). Ceci place la chèvre du Drâ parmi les chèvres précoces si on la compare à la chèvre du Haut Atlas qui met bas à l'âge de 2 ans au minimum si elle est née au printemps (Bourbouze et al, 1976).

Cependant, c'est le poids qui est plus important pour déterminer le moment de la première saillie. Pour éviter les répercussions sur la taille et la carrière reproductrice de la femelle et parce que la saison de naissance est susceptible d'avancer ou de retarder l'apparition des premières manifestations sexuelles, on se propose de déterminer l'âge et le poids à la puberté pour des groupes de femelles nées à différents moments de l'année à travers des contrôles de l'oestrus et de l'ovulation. Sur des lots de 20 femelles groupées selon la saison de naissance, et du sevrage (2-3 mois) jusqu'à l'apparition du premier oestrus, seront faites la détection biquotidienne des chaleurs par un bouc vasectomisé, une pesée chaque 7 j et une prise de sang pour contrôle du niveau de progestérone (première ovulation) chaque 15 j.

Reprise de l'activité sexuelle postpartum

L'intervalle entre 2 mises bas successives conditionne largement la productivité annuelle du troupeau. L'absence d'anoestrus saisonnier marqué permet à cette espèce un rythme de mises bas accéléré pouvant aller à 2 mises bas par an.

Les résultats de l'enquête montrent que 20 p.cent au moins des chèvres du Drâ mettent bas 2 fois au cours d'une même année. Les résultats de l'enquête relatent que 33 p.cent de femelles ont moins de 8 mois d'intervalle entre naissances. Une étude détaillée du comportement en terme d'anoestrus postpartum et en fonction du rang de mise bas, de la taille de la portée et de la saison de mise bas permettrait de savoir jusqu'à quel rythme de mise bas on peut aller sans perdre sur la productivité annuelle en tenant compte des différentes composantes de l'élevage.

La reprise de l'activité ovarienne et oestrale après la parturition sera étudiée sur 20 femelles ayant eu les mises bas rapprochées, à travers un contrôle du premier oestrus postpartum par détection biquotidienne des chaleurs commençant le jour de la mise bas et un contrôle de la première augmentation de la progestérone plasmatique (> 1 ng/ml), témoin de la présence d'un corps jaune consécutif à une ovulation.

Fertilité, prolificité et fécondité

Dans l'évaluation des performances de reproduction, la fertilité se rapporte au nombre annuel de parturitions, la prolificité au nombre de jeunes par portée et la fécondité au nombre de jeunes produits par an. Les renseignements disponibles sur la chèvre du Drâ sont limités. Il semble que certains cas de stérilité soient liés à des déficiences nutritionnelles. Ces animaux, aussitôt identifiés, sont écartés de l'élevage. Sur l'ensemble des naissances enregistrées au cours des 3 premières périodes de mises bas à Tinzouline, 59 p.cent étaient simples, 35 p.cent gémellaires et 6 p.cent triples, soit un taux de prolificité de 158. Les taux de prolificité enregistrés chez des chèvres Murciana (importées d'Espagne) et Fnideq (originaires du nord du Maroc, constituées par un mélange de races caprines espagnoles) élevées dans les mêmes conditions sont de 123 et de 141. Pour la chèvre du Drâ, le taux de mortalité chez les jeunes, de la naissance à 90 j. est de 17,5 p.cent, comparé à des taux de 62 p.cent pour la Murciana et de 54 p.cent pour la Fnideq, qui témoigne de l'adaptation de la chèvre du Drâ aux conditions difficiles d'élevage.

Parallèlement à ce programme en station pour évaluer la performance de reproduction, des contrôles de la croissance et de production laitière seront mis en place. Un programme de suivi sur le terrain (50 éleveurs) sera monté pour établir le mode de conduite traditionnel, noter le mode d'alimentation au cours de l'année et apprécier les performances de reproduction, de croissance et de survie dans le milieu réel.

Conclusions

Cette étude permettra d'apprécier les performances de reproduction et les capacités spécifiques d'adaptation de la chèvre du Drâ aux contraintes de l'environnement. Les résultats pourraient servir de base pour toute intervention visant à accroître la productivité de cette chèvre.

Remerciements

La Fondation Internationale pour la Science (Projet B/1330-1) a contribué A cette recherche.

Références

Boukhliq R. 1986. Variations saisonnières de l'âge à la puberté, de la cyclicité sexuelle et de l'anoestrus post partum chez des brebis de race D'man, Sardi et leurs produits de croisement. Thèse Doctorat Vétérinaire. Institut Agronomique et Vétérinaire Hassan II, Rabat, Maroc.

Bourbouze A, Donadieu P et Hammoudi A. 1976. L'unité montagnarde de développement intégré de la vallée de l'Azzaden du Haut Atlas Central. Institut Agronomique et Vétérinaire Hassan II, Rabat, Maroc (miméo).

DPAE 1987. Enquête d'élevage. Production ovine et caprine, nombre de toisons et de cise-lages, année 1986. Direction de la Planification et des Affaires Economiques, Rabat, Maroc.

Ezzahiri A et Benlakhal M. 1984. La chèvre laitière D'man. Office Régional de la Mise en Valeur Agricole de Ouarzazate, Ouarzazate, Maroc (mimeo).

Lahlou-Kassi A. 1982. Etude comparée de la dynamique folliculaire cyclique chez des brebis à haut et à bas taux d'ovulation: Races D'man et Timahdite. Thèse Doctorat-es-Sciences Agricoles. Institut Agronomique et Vétérinaire Hassan II, Rabat, Maroc.


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