Page précédente Table des matières Page suivante


3 - Les pratiques d’approvisionnement des consommateurs en céréales, viandes et poissons


3.1 - L’importance relative des acquisitions des différents types de produits
3.2 - La part des acquisitions marchandes et non marchandes dans les approvisionnements alimentaires
3.3 - La répartition des achats entre demi-gros et détail
3.4 La gestion des budgets alimentaires
3.5 Les lieux d’achat des aliments
3.6 Les unités d’achat
3.7 La fidélisation aux vendeurs

3.1 - L’importance relative des acquisitions des différents types de produits


3.1.1 - L’acquisition des céréales
3.1.2 - Les achats de viandes
3.1.3 - Les achats de poissons

Résumé

Les produits céréaliers (à l’exception du riz) sont en grande majorité acquis sous forme brute, les ménagères assurant elles-mêmes leur transformation avec l’aide des ateliers artisanaux de décorticage et mouture fonctionnant en prestation de service. Les farines (industrielles et commerciales) ont encore peu de succès et sont acquises en petites quantités. Sur l’ensemble des ménages, les achats de riz en termes de quantités sont deux fois moins importants que les achats de maïs et sorgho confondus. Par contre, la dépense en riz de l’ensemble des ménages est supérieure à celle des maïs et sorgho. Ceci montre que les consommateurs ne privilégient pas uniquement les produits les moins coûteux au sein d’une même catégorie d’aliments. En ce qui concerne les produits animaux, la viande est essentiellement acquise sous forme fraîche, les poissons sous formes séchées ou fumées (poissons en grande partie importés). Cela dit, on constate que ce n’est pas parce que des aliments peuvent être classés dans la même catégorie du point de vue agro-nutritionnel qu’ils sont pour autant considérés par les consommateurs comme substituables.


3.1.1 - L’acquisition des céréales

Par acquisition, on entend ici les achats, les dons, le troc et les auto-productions des ménages. L’importance relative des acquisitions des différents types de produits peut être déterminée de plusieurs façons. Le tableau 11 présente la répartition du nombre d’acquisitions faites par les ménages durant la période de l’enquête.

Tableau 11. Répartition du nombre d’acquisitions de céréales par type de produits

Type de produit

Nombre d’acquisitions

Part relative des acquisitions (en %)

Grains de maïs blanc non décortiqué

81

80

Farine artisanale de maïs

16

16

Farine de maïs GMB

2

2

Semoule jaune de maïs Cathwell

2

2

TOTAL maïs

101

100

Grains de sorgho blanc non décortiqué

33

59

Grains de sorgho rouge non décortiqué

1

2

Mélange sorgho blanc et rouge en grains

1

2

Grains de mil non décortiqué

21

37

TOTAL sorgho et mil en grains

56

100

Riz ordinaire

101

90

Riz parfumé

6

5

Brisures de riz ou riz étuvé artisanal

5

5

TOTAL riz

112

100


Source: nos enquêtes réalisées en septembre 1994

Ces données montrent que la majorité des acquisitions de maïs, de sorgho et de mil s’effectuent sous forme de grains entiers. Ces céréales sont toutes destinées à être réduites en farine ou semoule pour la préparation des plats. Pourtant, les achats de céréales à l’état de farines sont relativement rares. La transformation du grain en farine reste sous le contrôle direct des ménagères. Celles-ci s’approvisionnent en grains, puis portent ou font porter la céréale au meunier de quartier qui réalise mécaniquement le décorticage et la mouture. Les opérations de trempage, séchage et vannage sont réalisées au domicile du ménage. Il apparaît ainsi que peu de ménages acceptent de payer la différence entre le coût de revient du produit brut (en grains) transformé au niveau domestique et le prix du produit transformé (en farine ou semoule) pour s’épargner le travail de transformation. De même, très peu de ménages s’avèrent prêts à payer la différence de prix entre les farines artisanales humides et les farines industrielles ou semi-industrielles sèches et conditionnées en sachets de plastique afin de bénéficier du caractère plus stable et apparemment plus hygiénique du produit.

Le faible marché que représente les céréales transformées ne s’explique pas seulement par le faible pouvoir d’achat des consommateurs. Comme on le verra ultérieurement, un des facteurs explicatifs de l’importance de la transformation domestique et de l’artisanat de transformation à façon est la volonté des ménagères de conserver un contrôle de la qualité du produit fini. Ceci est d’autant plus marqué pour les produits fortement ancrés dans les traditions culinaires, comme les céréales sèches.

Pour le riz, la quasi-totalité des achats observés sont des achats de riz ordinaire national ou importé. Les acquisitions de riz parfumé et de riz étuvé sont plutôt occasionnelles. Aucun achat de riz de montagne, de riz de luxe ou de brisures n’a été relevé dans l’échantillon.

En reprenant la classification des produits céréaliers (voir paragraphe 2.2.1) on constate que ce sont les produits du groupe 1 qui sont les plus achetés. Les produits du groupe 2 sont peu achetés mais apparaissent quand même dans les enregistrements sur les quatre jours de l’enquête. Les produits du groupe 3 n’apparaissent pas du tout dans l’échantillon. Ils sont consommés par une petite partie de la population, mais surtout de façon occasionnelle.

Pour avoir une estimation plus précise de l’importance relative de ces acquisitions, on a calculé pour l’ensemble des ménages interrogés durant l’enquête la répartition des quantités et des dépenses effectuées pour les quatre principales céréales. La méthode de calcul a consisté à ramener la dépense sur quatre jours à une dépense mensuelle. En ce qui concerne les achats en demi-gros, la dépense mensuelle est calculée à partir de la valeur du stock et de la durée estimée de ce stock par le ménage. Les résultats sont présentés au tableau 12. Ces données ont été enregistrées au mois de septembre 1995.

Tableau 12. Répartition des achats par céréale en quantité et dépense pour l’ensemble des ménages interrogés

Céréale

Quantité achetée

Dépense en FCFA

en kg

en %

en FCFA

en %

Maïs

4 534

48

336 705

30

Sorgho

1 399

15

115 044

10

Mil

494

5

43 773

4

Riz

2 993

32

637 291

56

TOTAL

9 420

100

1 132 813

100


Source: nos enquêtes réalisées en septembre 1994

Alors que les céréales sèches (maïs, sorgho, mil) représentent environ les deux tiers des quantités achetées, elles ne totalisent que moins de la moitié des dépenses céréalières. Sur la base de ces données, on peut calculer le prix d’achat moyen de chaque céréale au kg: le maïs revient à FCFA 74/kg, le sorgho à FCFA 82/kg, le mil à FCFA 89/kg et le riz à FCFA 213/kg. L’ensemble des céréales revient à FCFA 120/kg.

3.1.2 - Les achats de viandes

Les acquisitions de viandes par le biais de relations non marchandes n’ayant pas été enregistrées durant l’enquête, les données présentées ci-après ne concernent que les achats. A noter que 76 pour cent des ménages interrogés avaient de la viande en stock ou en avaient acquis durant les quatre jours sur lesquels a porté l’enquête. Le tableau 13 présente la répartition des achats par type de viande pour ces seuls ménages.

Tableau 13. Répartition du nombre d’achats de viande par type de produit

Type de produit

Nombre d’achats

Part relative des achats (en %)

Viande de boeuf fraîche

107

41

Viande de mouton fraîche

113

43

Viande de chèvre fraîche

9

3

Viande de mouton ou chèvre fraîche*

19

7

Viande de porc fraîche

4

2

Viande de poulet

10

4

TOTAL

262

100


* Il s’agit des achats de petits ruminants que les personnes enquêtées n’ont pu préciser
Source: nos enquêtes réalisées en septembre 1994

Les viandes de boeuf et de petits ruminants (mouton et chèvre) sont les plus souvent achetées puisqu’elles représentent au total 94 pour cent du nombre d’achats. Les viandes de porc et de poulet sont des viandes d’exception dans l’alimentation du ménage. Ces viandes sont surtout consommées à l’extérieur du domicile, en restauration ou en grignotage.

La répartition des dépenses en viandes selon les types de produits est présentée au tableau 14:

Tableau 14. Répartition des dépenses en viandes par type de produit

Type de produit

Dépenses en FCFA

Dépenses (en %)

Boeuf

237 642

41

Mouton

245 717

42

Chèvre

7 000

1

Mouton ou chèvre*

20 250

3

Porc

10 825

2

Poulet

65 375

11

TOTAL

586 809

100


* Il s’agit des achats de petits ruminants que les personnes enquêtées n’ont pu préciser
Source: nos enquêtes réalisées en septembre 1994

Ces données confirment les résultats du tableau 13: les viandes de boeuf et de petits ruminants représentent la très grande majorité des achats de viandes (87 pour cent des dépenses de ce poste).

3.1.3 - Les achats de poissons

Le tableau 15 présente la répartition du nombre d’achats de poissons par type de produits pour les seuls ménages qui en avaient en stock, ou en avaient acquis durant les quatre jours sur lesquels a porté l’enquête. Ces ménages représentent 80 pour cent de l’échantillon pour le poisson transformé et seulement 14 pour cent pour le poisson frais.

Tableau 15. Répartition du nombre d’achats de poissons par type de produits

Type de produit

Nombre d’achats

Part relative des achats (en %)


Poisson transformé:





poisson de Dakar*

36

17

15


poisson d’Abidjan*

146

68

62


carpes

19

9

8


autres (dont silures et capitaines)

13

6

5

TOTAL poisson transformé

214

100

90

Poisson frais:





poisson d’Abidjan

4

17

2


carpes

10

44

4


autres (dont silures et capitaines)

9

39

4

TOTAL poisson frais

23

100

10

TOTAL POISSON

237


100


* La répartition entre poisson de Dakar et poisson d’Abidjan est peu fiable étant donné la grande confusion qui existe entre ces deux poissons chez les consommateurs

Source: nos enquêtes réalisées en septembre 1994

La très grande majorité des achats de poissons concerne les poissons transformés et, en particulier, le poisson séché/fumé d’Abidjan et/ou de Dakar. La part des dépenses consacrées aux achats de poissons frais est cependant nettement supérieure (40 pour cent des dépenses en poissons) à la fréquence des achats pour ce type de produits.

La dépense totale en poisson pour l’ensemble de l’échantillon s’élève à FCFA 275 912, ce qui représente moins de la moitié de la dépense en viande. Bien que le prix au kg du poisson frais soit nettement inférieur à celui de la viande, ce produit est considéré en fait par le consommateur comme revenant nettement plus cher. Cela est lié à l’utilisation du produit dans les plats: FCFA 200 de viande peuvent être suffisants d’un point de vue culinaire pour un ménage d’une dizaine de personnes parce que la viande est découpée en petits morceaux et ajoutée à la sauce comme les autres condiments. Mais FCFA 200 de poisson frais suffisent à peine pour trois personnes parce que le poisson frais sera préparé et consommé à part entière, en-dehors de la sauce.

Là encore, cette remarque montre la nécessaire prudence des comparaisons de prix des produits. Ce n’est pas parce que des aliments peuvent être classés dans la même catégorie du point de vue agro-nutritionnel, qu’ils sont pour autant considérés par les consommateurs comme substituables.

3.2 - La part des acquisitions marchandes et non marchandes dans les approvisionnements alimentaires


3.2.1 - L’auto-production des ménages de Ouagadougou
3.2.2 - La part des dons dans les acquisitions des ménages

Résumé

Dans la moitié des ménages enquêtés à Ouagadougou, on constate l’auto-production de certains aliments. La production de légumes et de feuilles de sauce dans la cour des maisons et, dans une moindre mesure de céréales dans des champs périphériques de la ville ou au village, est la plus courante.

Interrogés sur l’origine générale de leurs aliments, 82 pour cent des ménages ont répondu qu’ils s’approvisionnaient exclusivement en céréales par le biais du marché. Les 18 pour cent restants reçoivent plus ou moins régulièrement ou produisent eux-mêmes des céréales pour leur consommation. Plus de la moitié des ménages ont cependant indiqué recevoir régulièrement ou occasionnellement d’autres produits que les céréales ou les produits animaux sous forme de dons. Il s’agit essentiellement de feuilles pour la préparation de sauce (oseille, baobab, bulvanka) et de soumbala.


L’estimation de la part relative des acquisitions marchandes et non marchandes a été faite à deux niveaux: le premier concerne l’auto-production des ménages; le second concerne les dons reçus par les ménages.

3.2.1 - L’auto-production des ménages de Ouagadougou

Près de la moitié des ménages urbains interrogés pratique une production agricole domestique (tableau 16).

Tableau 16. Part des ménages de l’échantillon pratiquant une activité d’auto-production (en pourcentage de l’ensemble des ménages)

Type de produit

Part des ménages

Céréales et/ou légumineuses

20

Elevage

12

Maraîchage

31

Auto-production agricole et/ou élevage*

47


* Ce taux est inférieur à la somme des trois taux précédents car certains ménages pratiquent une auto-production de plusieurs types de produits

Source: nos enquêtes réalisées en septembre 1994

En ce qui concerne la production de grains (céréales ou légumineuses), dans un ménage sur cinq, au moins une personne pratique l’agriculture, et dans 13 pour cent des ménages, le chef de ménage a pour activité principale l’agriculture. Cette agriculture est pratiquée soit au village, en général dans la région d’origine du chef de ménage, soit dans des champs situés à la périphérie de la ville. Au moment de l’enquête, seulement 5,4 pour cent des ménages avaient en stock, ou avaient récolté durant les quatre jours sur lesquels portait le questionnaire, des céréales provenant de l’auto-production. Cette faible proportion s’explique par la période d’enquête (septembre) durant laquelle les céréales n’étaient pas encore arrivées à maturité. On peut penser que cette proportion est nettement plus élevée à partir de la période des récoltes.

En ce qui concerne l’élevage, un ménage sur huit interrogés a son propre élevage d’animaux. Il s’agit essentiellement d’élevage de volaille ou de petits ruminants dans la cour même de la maison, mais on rencontre parfois quelques grands ruminants pour le lait.

L’auto-production en maraîchage est l’activité la plus fréquente. Un tiers des ménages possède dans la cour, au moment du passage d’enquête, une production de légumes sur pied dont une partie, voire la totalité, est consommée par le ménage. Les légumes les plus couramment cultivés sont: l’oseille, le gombo, le bulvanka et les haricots (feuilles utilisées pour la sauce). D’autres légumes tels que les épinards, le kinebdo, les aubergines, les tomates, les piments, ou les feuilles de courge sont aussi produits.

3.2.2 - La part des dons dans les acquisitions des ménages

Sur la base d’un enregistrement de l’origine des acquisitions des stocks en cours, et durant les quatre jours sur lesquels a porté l’enquête, on trouve que un ménage sur dix a reçu des dons de céréales. Pour les mêmes raisons que dans le cas de l’auto-production, cette proportion serait sans doute plus élevée à partir de la période des récoltes. Interrogés sur l’origine générale de leurs aliments, 82 pour cent des ménages ont répondu qu’ils s’approvisionnaient exclusivement en céréales par le biais du marché. Les 18 pour cent restants reçoivent plus ou moins régulièrement, ou produisent eux-mêmes, des céréales pour leur consommation.

Toujours durant la période de l’enquête, 5,4 pour cent des ménages avaient en stock ou venaient de recevoir d’autres produits sous forme de dons. D’une façon plus générale, 57 pour cent des ménages ont indiqué recevoir régulièrement ou occasionnellement d’autres produits que les céréales ou les produits animaux sous forme de dons. Il s’agit essentiellement de feuilles pour la préparation de sauce (oseille, baobab, bulvanka) et de soumbala. Ce dernier produit est le plus souvent cité comme faisant l’objet d’envoi par les ruraux à leurs parents urbains.

3.3 - La répartition des achats entre demi-gros et détail


3.3.1 - La constitution de stocks et les achats au détail des céréales
3.3.2 - La constitution de stocks et les achats au détail de viandes et poissons
3.3.3 - La constitution de stocks d’autres produits alimentaires

Résumé

Presque tous les ménages achètent une partie des céréales en demi-gros, de façon à constituer un stock (généralement d’un à deux mois). L’analyse de la nature de leurs stocks céréaliers permet d’établir une typologie des ménages selon l’importance qu’ils accordent à chaque type de céréale pour assurer leur sécurité alimentaire en achetant les produits en demi-gros pour le stockage: les ménages qui privilégient les céréales sèches pour leur stock représentent environ le quart de l’échantillon; les ménages qui privilégient le riz pour leur stock représentent également environ le quart de l’échantillon; les ménages qui acquièrent des céréales sèches et du riz pour constituer leur stock représentent 40 pour cent de l’échantillon; les ménages qui ne pratiquent aucun stock et achètent leurs céréales au détail représentent moins d’un dixième de l’échantillon. Il faut cependant noter que les volumes de stocks présents dans les ménages au moment de l’enquête sont nettement plus importants pour les céréales sèches que pour le riz.

Par contre les approvisionnements en viandes, en poissons et autres condiments de sauce sont le plus souvent acquis au jour le jour. Les condiments qui font parfois l’objet de stocks sont les feuilles et légumes séchés, les poissons séchés/fumés, le soumbala, le sel, le cube maggi, l’huile, les épices et le concentré de tomate. Il s’agit de produits de grande utilisation, et qui se conservent en l’absence de moyen de réfrigération.

Ces résultats révèlent l’existence d’un double budget alimentaire: l’un est consacré à des achats en demi-gros de produits considérés comme suffisamment importants pour que le ménage immobilise des ressources monétaires sous forme de stocks, afin d’être assuré d’en avoir toujours à sa disposition; l’autre budget est consacré à des achats au détail de produits plus complémentaires, destinés davantage à préparer la sauce des plats. L’affectation d’un produit donné sur l’un ou l’autre de ces deux budgets est révélatrice du statut que le ménage lui accorde dans son alimentation, pas seulement du point de vue quantitatif, mais aussi du point de vue qualitatif.


La répartition des achats entre demi-gros et détail est une caractéristique importante des pratiques d’approvisionnement. Elle permet, d’une part, de préciser l’importance relative des différents produits dans la sécurité alimentaire des ménages. L’achat de produits en demi-gros afin de constituer un stock représente en effet un effort financier pour les ménages, notamment lorsque leurs revenus sont faibles et fractionnés. Il conduit à immobiliser des ressources monétaires sous forme de stocks et à diminuer par conséquent la part du budget disponible pour d’autres besoins qui peuvent subvenir pendant la période de stockage (événements imprévus, obligations sociales, dépenses de santé, etc.). D’autre part, cette répartition détermine le coût d’accès à l’alimentation. Les achats en plus grande quantité reviennent généralement moins chers que ceux effectués au micro-détail. Enfin, cette répartition conditionne l’organisation de la distribution alimentaire. Les achats pour une utilisation immédiate sont faits auprès de vendeuses détaillantes qui adaptent la présentation et le conditionnement des produits qu’elles proposent à la demande de leur clientèle.

3.3.1 - La constitution de stocks et les achats au détail des céréales

La répartition entre l’achat en demi-gros destiné au stockage à domicile et l’achat au détail apparaît variable selon les produits comme le montre le tableau 17. Ces données sont relatives à l’enregistrement des acquisitions des ménages durant la période sur laquelle a porté l’enquête.

Tableau 17. Répartition du nombre d’acquisitions de céréales entre demi-gros et détail par type de produits

Type de produit

Acquisitions en nombre

Acquisitions en %*

demi-gros

détail

détail

demi-gros

Grain de maïs blanc non décortiqué

80

1

99

1

Farine artisanale de maïs

4

12

25

75

Farine de maïs GMB et semoule Cathwell

3

1

75

25

TOTAL maïs

87

14

86

14

Grain de sorgho blanc non décortiqué

21

12

64

36

Grain de sorgho rouge ou blanc

2

0

100

0

Grains de mil non décortiqué

14

7

67

33

TOTAL sorgho et mil en grains

37

19

66

34

Riz ordinaire

72

29

71

29

Riz parfumé

5

1

83

17

Brisures de riz ou riz étuvé artisanal

1

4

20

80

TOTAL riz

78

34

70

30


* Il s’agit de pourcentages en ligne

Source: nos enquêtes réalisées en septembre 1994

Ces données montrent que les achats de céréales sont le plus souvent réalisés en demi-gros sauf pour certains produits, soit parce que leur durée de conservation est moindre que les céréales en grains (farines artisanales de maïs), soit parce que leur utilisation est occasionnelle (brisures de riz et riz étuvé artisanal). Ces produits reviennent nettement plus chers que les produits en grain ou les produits standards.

L’importance des achats en demi-gros est confirmée par l’examen de la répartition des quantités et dépenses en céréales comme le montre le tableau 18. Là encore, la méthode de calcul a consisté à ramener la dépense sur quatre jours à une dépense mensuelle. En ce qui concerne les achats en demi-gros, la dépense mensuelle est calculée à partir de la valeur du stock et de la durée estimée de ce stock par le ménage. Ces données ont été enregistrées au mois de septembre 1995.

Tableau 18. Répartition des achats en demi-gros et détail par céréale en quantités et dépenses pour l’ensemble des ménages interrogés

Céréale

Achats en quantités

Achats en dépenses

demi-gros

détail

demi-gros

détail

en kg et %*

en kg et %*

en FCFA et %*

en FCFA et %*

Maïs

4 443

97

111

3

313 730

93

22 975

7

Sorgho

1 137

81

262

9

94 044

82

21 000

8

Mil

354

72

140

28

30 416

69

13 357

31

Riz

2 592

87

401

13

554 116

87

83 175

13

TOTAL

8 526

90

914

10

992 306

88

140 507

12


* Les pourcentages sont donnés en ligne

Source: nos enquêtes réalisées en septembre 1994

Que ce soit en quantité ou en valeur, environ les neuf dixièmes des achats de céréales sont effectuées en demi-gros. Ces données permettent de calculer le prix moyen au kg des céréales selon leur volume d’achat. Les résultats sont donnés au tableau 19:

Tableau S. Prix moyen des céréales selon leur achat en demi-gros ou détail

Céréale en FCFA/kg

Prix en demi-gros en % du prix 1/2 gros

Prix au détail

Surcoût du détail en FCFA/kg

Maïs

71

207

191

Sorgho

70

80

14

Mil

86

95

10

Riz

214

507

137


Source: nos enquêtes réalisées en septembre 1994

Ces données montrent que lorsqu’il s’agit de produits comparables, ce qui est le cas des sorgho et mil achetés essentiellement en grain que ce soit en demi-gros ou au détail, le surcoût de l’achat au détail reste limité (10 % pour le sorgho et 14 % pour le mil). Les différences de prix importantes que l’on note pour le maïs et le riz tiennent au fait que les achats en demi-gros et au détail pour ces céréales ne portent pas sur les mêmes produits comme il a été montré au tableau 17.

La dépense pour chaque acquisition de stock est variable d’un ménage à l’autre. Elle est en moyenne (obtenue après suppression des valeurs extrêmes) de 5 300 FCFA pour le maïs, la durée moyenne de stockage étant alors de 59 jours soit l’équivalent d’une dépense de 110 FCFA/j/ménage. Elle est de 5 600 FCFA pour le sorgho pour une durée de 48 jours soit l’équivalent de 117 FCFA/j/ménage et de 9 900 FCFA pour le riz pour une durée de 55 jours soit l’équivalent de 180 FCFA/j/ménage.

Pour compléter les informations obtenues par l’enregistrement des acquisitions de céréales par les ménages, l’examen des stocks de chacun des ménages a été réalisé. Il révèle que 90 pour cent des ménages avaient des stocks de céréales au moment de l’enquête (septembre 1995). La nature de ces stocks apparaît cependant différente d’un ménage à l’autre comme le montre le tableau 20.

On constate avec ces données que 66 pour cent des ménages ont au moins un stock de céréales sèches et 64 pour cent ont au moins un stock de riz soit des proportions équivalentes, mais seulement 40 pour cent des ménages possèdent des stocks de ces deux types de céréales. On peut ainsi établir une typologie des ménages selon l’importance qu’ils accordent à chaque type de céréale pour assurer leur sécurité alimentaire en achetant les produits en demi-gros pour le stockage:

- Les ménages qui privilégient les céréales sèches pour leur stock. Ils représentent environ le quart de l’échantillon (26 %).

- Les ménages qui privilégient le riz pour leur stock. Ils représentent également environ le quart de l’échantillon (24 %).

- Les ménages qui acquièrent des céréales sèches et du riz pour constituer leur stock. Ils représentent 40 pour cent de l’échantillon.

- Les ménages qui ne pratiquent aucun stock et achètent leurs céréales au détail. Ils représentent moins d’un dixième de l’échantillon (8 %).

Tableau T. Répartition des ménages selon leur mode d’approvisionnement en céréales (en pourcentage de l’ensemble des ménages)

Céréales sèches*

Riz

Proportion de ménages

en stock

aucun achat

16

en stock

achat au détail

10

en stock

en stock

40

aucun achat

en stock

14

achat au détail

en stock

10

achat au détail

achat au détail

8

aucun achat ni stock

aucun achat ni stock

2

TOTAL


100


* Céréales sèches = maïs, sorgho, mil

Source: nos enquêtes réalisées en septembre 1994

Il faut cependant noter que les volumes de stocks présents dans les ménages au moment de l’enquête sont nettement plus importants pour les céréales sèches que pour le riz. Ils représentent en moyenne 135 kg par ménage pour les premières contre 33 kg par ménage pour le second. La majorité des achats destinés à être stockés a une valeur comprise entre 5 000 et 11 000 FCFA (60 % des achats). Le stock de maïs a le plus souvent une valeur comprise entre 5 000 et 8 500 FCFA (51 % des cas) correspondant à un sac de 100 kg, celui de riz a une valeur le plus souvent située entre 9 500 à 10 500 FCFA correspondant à un sac de 50 kg (70 % des cas).

Le maïs et le sorgho, et dans une moindre mesure le mil, apparaissent ainsi les principales céréales de sécurité alimentaire des ménages de Ouagadougou. Le riz joue également un tel rôle majoritaire mais pour seulement un quart des ménages.

3.3.2 - La constitution de stocks et les achats au détail de viandes et poissons

Les achats de viande et poissons sont en majorité effectués au détail. Sur 263 acquisitions de viande fraîche enregistrées pour l’ensemble de l’échantillon, 244 (soit 93 %) sont faites au détail. Ce type d’achats représente 81 pour cent des dépenses en viande fraîche. Seuls 10 pour cent des ménages interrogés avaient un stock de viande au moment de l’enquête. Les achats de viande de boeuf ou mouton au détail sont au minimum de 100 FCFA par achat, les achats pour des montants inférieurs à cette somme étant très rares. Environ les deux tiers des ménages achètent pour 200 FCFA ou moins à chaque fois, la valeur moyenne de chaque achat étant de 261 FCFA pour la viande de boeuf et 243 FCFA pour la viande de mouton. Lorsque la viande est achetée en demi-gros, l’équivalent par jour de la valeur du stock constitué est de 206 FCFA/ménage.

Pour les poissons transformés, 88 pour cent des achats sont faits au détail mais ne représentent que 57 pour cent des dépenses. Les achats destinés à constituer un stock ont, dans la moitié des cas, une valeur comprise entre 800 et 1 400 FCFA soit l’équivalent d’environ un kg de produit. Leur durée de stockage est d’environ un mois ce qui représente un équivalent de dépense par jour d’environ 41 FCFA/ménage. Pour les acquisitions au détail, les trois quarts des ménages achètent pour moins de 50 FCFA à chaque fois, la valeur moyenne de chaque achat est cependant de 62 FCFA/j/ménage soit sensiblement plus que l’équivalent de dépense par jour du stock.

Pour les poissons frais, 82 pour cent des achats sont faits au détail et représentent 86 pour cent des dépenses de ce poste. La dépense par achat au détail est par contre beaucoup plus élevée que pour le poisson transformé: elle varie de 200 à 2 000 FCFA selon les ménages et elle est en moyenne de 730 FCFA. Il peut s’agir de l’achat d’un morceau de poisson frais, vendu à l’unité à 100 ou 200 FCFA, ou de l’achat au kg de poisson frais.

Globalement, pour tous types de poissons, 22 pour cent des ménages interrogés possédaient un stock de poisson. Cette plus grande proportion que pour la viande peut s’expliquer par le fait que pour les poissons frais, ces produits étant coûteux, ce sont probablement surtout des ménages riches qui en acquièrent et qu’ils disposent alors de moyen de les conserver (réfrigérateur ou congélateur); pour le poisson transformé, d’un moindre coût et plus accessible pour des ménages modestes, la durée relativement longue de conservation de ces produits à température ambiante permet à certains ménages d’en acquérir en plus grande quantité pour les stocks, même sans moyen de réfrigération.

3.3.3 - La constitution de stocks d’autres produits alimentaires

L’analyse du contenu des stocks alimentaires des ménages interrogés lors de l’enquête a révélé l’existence d’achats en demi-gros d’autres produits que les céréales ou les viandes et poissons, en particulier des ingrédients de sauce. Le tableau 21 indique la proportion de ménages ayant en stock ces produits et donne des indications sur leur importance en terme de valeur monétaire. L’équivalent de la dépense moyenne par jour du stock a été calculé en divisant le montant des achats pour la constitution du stock par le nombre de jours de ce stock estimé par le ménage.

Tableau U. Fréquence et valeur des stocks de produits de sauce

Produit

Part des ménages ayant le produit en stock en %

Valeur du stock en FCFA/ménage

Durée moyenne du stock en jours

Valeur du stock en FCFA/j

Feuilles

26

n.d.*

n.d.*

n.d.*

Légumes

33

n.d.*

n.d.*

n.d.*

Concentré de tomate

16

1 000

24

42

Cube maggi

18

1 300

24

54

Soumbala

22

500

17

29

Huile

17

1 700

28

61

Pâte d’arachide

12

1 100

31

35

Epices

16

n.d.*

n.d.*

n.d.*

Sel

21

150

30

5


* n.d. = non disponible

Source: nos enquêtes réalisées en septembre 1994

On constate que la proportion de ménages pratiquant des stocks d’ingrédients de sauce autres que les viandes et poissons reste limitée bien que la plupart de ces ingrédients soit destinée à une utilisation quasi quotidienne même pour ceux pouvant se conserver quelques jours (concentré de tomate, cube Maggi, soumbala, huile, épices, sel).

Les résultats qui précèdent, tant concernant les céréales que les autres produits, sont importants à retenir car ils révèlent l’existence d’un double budget alimentaire: l’un est consacré à des achats en demi-gros de produits considérés comme suffisamment importants pour que le ménage immobilise des ressources monétaires sous forme de stocks afin d’être assuré d’en avoir toujours à sa disposition; l’autre budget est consacré à des achats au détail de produits plus complémentaires, destinés davantage à préparer la sauce des plats. L’affectation d’un produit donné sur l’un ou l’autre de ces deux budgets est révélatrice du statut que le ménage lui accorde dans son alimentation, pas seulement du point de vue quantitatif mais aussi du point de vue qualitatif. A ce double budget alimentaire correspond-il une double responsabilité de leur gestion? Cette question fait l’objet du chapitre suivant.

3.4 La gestion des budgets alimentaires


3.4.1 - L’origine du budget alimentaire du ménage
3.4.2 - La réalisation des achats

Résumé

Le système de gestion des budgets alimentaires le plus couramment adopté est celui où le chef de ménage finance seul l’ensemble des dépenses. Cependant, l’épouse est souvent amenée à compléter cette somme en participant à la dépense en condiments de façon à améliorer le repas quotidien. En effet, la somme allouée par le mari à la dépense des condiments est souvent, selon les ménagères, «insuffisante» pour faire une sauce acceptable.

L’intervention du chef de ménage pour effectuer les achats alimentaires se porte sur des achats de demi-gros destinés au stock, essentiellement les céréales sous forme de sacs. La ménagère se charge généralement des achats de condiments ou de céréales si elles sont acquises au détail mais peut également faire des achats pour la constitution de stocks. Elle peut confier ces achats à une aide familiale en ce qui concerne les achats du jour acquis au détail, mais continue alors généralement à se charger de certains achats en demi-gros.


La gestion du budget alimentaire peut être caractérisée à deux niveaux: d’une part au niveau de l’origine du budget du ménage, d’autre part au niveau de la réalisation des achats.

3.4.1 - L’origine du budget alimentaire du ménage

Au cours de l’enquête auprès des ménages, la liste des produits financés pour leur acquisition par chaque membre du ménage a été dressée. Les résultats synthétiques de cette identification sont présentés au tableau 22. Dans celui-ci, la distinction a été faite entre le «chef de ménage», généralement mais pas forcément un homme, la ménagère qui correspond dans ce cas à l’épouse ou la co-épouse interrogée lors de l’enquête lorsque le chef de ménage était un homme, et les autres membres du ménage ayant un lien de parenté ou non avec le chef de ménage ou son épouse.

Tableau V. Répartition des ménages en fonction de la participation de leurs membres à la dépense alimentaire en fonction du type de produit (en pourcentage de l’ensemble des ménages)

Participation à la dépense en:

Chef de ménage

Epouse

Autres membres

Céréales uniquement

7

0

4

Condiments uniquement

6

39

0

Céréales et condiments

84

13

6

Ni céréale ni condiment

3

48

90

TOTAL

100

100

100


Source: nos enquêtes réalisées en septembre 1994

Pour 84 pour cent des ménages, la participation du chef de ménage aux dépenses alimentaires concerne les céréales et les condiments de sauces (viande et poisson inclus). La participation de la ménagère aux dépenses alimentaires est un fait dans la moitié des ménages: il s’agit souvent d’une participation à la dépense de condiments, en général un complément à la somme allouée par le chef de ménage.

Les autres membres du ménage ne participent pratiquement pas à la dépense en céréales ou condiments. En fait, leur participation alimentaire est souvent occasionnelle, et plus portée sur des produits qui sortent de l’ordinaire. Quand la participation d’autres membres que le chef de ménage est régulière, c’est lorsque le chef de ménage ne peut assurer matériellement la ration alimentaire, par exemple s’il est absent ou qu’il n’a pas d’activité rémunérée.

La répartition des dépenses alimentaires entre le chef de ménage et l’épouse relève de plusieurs cas de figure comme l’indique le tableau 23.

Tableau W. Gestion du financement des dépenses alimentaires entre le chef de ménage et la ménagère (en pourcentage de l’ensemble des ménages)

Modes de gestion

Part des ménages concernés

Financement commun (chef de ménage et ménagère) de l’ensemble

5

Financement séparé: chef de ménage = céréales; ménagère = condiments

6

Financement complémentaire de la femme à la somme allouée aux condiments

25

Financement de l’ensemble par le chef de ménage uniquement

44

Ménages célibataire, veuf ou séparé.

11

Autres cas (notamment financements par d’autres membres)

9

TOTAL

100


Source: nos enquêtes réalisées en septembre 1994

Le système le plus couramment adopté est celui où le chef de ménage finance seul l’ensemble des dépenses (44 % des ménages). Cependant, l’épouse est souvent amenée à compléter cette somme en participant à la dépense de condiments, de façon à améliorer le repas quotidien (25 %). En effet, la somme allouée par le mari à la dépense des condiments est souvent, selon les ménagères, «insuffisante» pour faire une sauce acceptable. De plus quand la somme est fixe, elle ne tient pas toujours compte des fluctuations saisonnières de prix. Quand la somme allouée est dépendante des revenus du jour du chef de ménage, ce qui est fréquent chez les commerçants par exemple, elle peut certains jours être très insuffisante. Beaucoup de ménagères contribuent ou assurent ainsi l’ensemble des dépenses de condiments par le biais de leurs activités rémunératrices (petit commerce, revente de produits en micro-détail, transformation ou vente de produits alimentaires). Ces contributions aux dépenses alimentaires permettent d’améliorer la sauce. La femme doit aussi gérer au quotidien les fluctuations: subvenir aux besoins quand le chef de ménage est défaillant, gérer de façon précise l’argent des condiments en fonction des fluctuations de prix sur les marchés, ou de la taille du ménage.

Enfin, on observe un type de gestion nouveau en ville: des couples (salariés ou fonctionnaires) mettent en commun leurs revenus et répartissent ensuite l’ensemble du budget en grands postes (santé, éducation, alimentation...). Ils ne représentent cependant que 5 pour cent des ménages.

3.4.2 - La réalisation des achats

Le tableau 24 présente non pas la répartition des ménages en fonction de la personne qui finance les achats mais en fonction de celle qui les réalise selon le type de produit.

Tableau X. Répartition des ménages en fonction de la personne qui réalise les achats selon le type de produit (en pourcentage de l’ensemble des ménages)


Céréales

Céréales

Viande

Poisson

Achat en demi-gros

Achat au détail

Achat au détail

Achat au détail

Chef de ménage

62

6

3

1

Ménagère

34

81

65

80

Parents, enfants ou aides

3

10

23

16

Autres

1

3

9

3

TOTAL

100

100

100

100

Effectif des enregistrements

170

86

240

229


Source: nos enquêtes réalisées en septembre 1994

Les achats de céréales sont réalisés en majorité par le chef de ménage lorsqu’il s’agit d’achat en demi-gros (62 %) et par la ménagère en ce qui concerne les achats au détail (81 %). Mais l’intervention du chef de ménage dans les achats de céréales en demi-gros ne concerne que les achats de sacs. Quand la constitution du stock de céréales est inférieure au sac (inférieure à 50 ou 100 kg), c’est la ménagère qui se charge de l’achat du stock, en s’approvisionnant sur le marché en tine ou en yoruba. Les achats de détail correspondent, comme on l’a vu précédemment, en grande partie à des achats de farine de maïs et de riz.

Les achats au détail de viande et poisson sont réalisés par la ménagère, ou éventuellement les enfants ou parents du ménage. Les achats en viande et poisson en demi-gros sont relativement peu fréquents dans notre échantillon (16 achats pour la viande et 32 pour le poisson), c’est pourquoi ils n’apparaissent pas au tableau. Malgré le peu d’observation, on note que pour ces produits, comme pour les céréales, les achats qu’effectuent les chefs de ménage sont principalement des achats de demi-gros: plus de 75 pour cent des achats des chefs de ménage en viande ou poisson (et presque la totalité des achats de céréales) sont des achats de demi-gros.

Dans la plupart des cas où la ménagère est occupée par une activité salariée ou fonctionnaire voire par une activité de petit commerce, ce sont des parents ou enfants non scolarisés du ménage ou des employés de maison qui font les achats du jour au marché. De son côté, la ménagère continue à faire certains achats le week-end ou le matin très tôt et, si c’est possible, tente de constituer des stocks de façon à réduire les achats que doivent faire les aides pendant la semaine. Les stocks en demi-gros (céréales, viandes et poissons) sont très rarement réalisés par les parents, enfants ou employés de maison; leur intervention est seulement fréquente dans les achats de détail.

Les résultats précédants tendent à confirmer des conclusions déjà citées dans d’autres études sur Ouagadougou qui montrent que le chef de ménage est celui qui achète les céréales, et la ménagère (et éventuellement ses co-épouses ou des parentes) les condiments de sauce. Il convient cependant de préciser deux aspects pour nuancer cette affirmation.

D’une part, dans le cas des céréales, le chef de ménage achète celles qui sont destinées à être stockées. D’autre part, il intervient surtout pour les achats de céréales vendues par les commerçants en sacs.

D’autre part, il arrive que le chef de ménage fasse des achats de condiments tels que viandes et poissons: ce sont alors essentiellement des achats de demi-gros, destinés à constituer un stock.

Ainsi, l’intervention du chef de ménage dans les achats alimentaires est bien sûr très liée au type de produit: achats des céréales, mais aussi au fait de constituer des stocks, et dans ce cas il intervient pour d’autres produits que les céréales.

3.5 Les lieux d’achat des aliments


3.5.1 - Les lieux d’achat par type de produit
3.5.2 - La fréquentation des lieux d’achat par les ménages

Résumé

Ouagadougou compte plus de cinquante marchés assez bien répartis dans la ville. Tous les marchés sont bien approvisionnés, exceptés certains marchés périphériques où la diversité de la nature et de l’origine des produits est moins grande.

Si la majorité des achats au détail ont lieu sur le marché, et notamment le marché du quartier de résidence, la moitié des achats de demi-gros sont effectués dans d’autres lieux ou sur des marchés éloignés du lieu de résidence. Ces autres lieux sont les boutiques, le lieu de travail et les zones rurales pour les céréales; l’abattoir et les zones rurales pour la viande; les poissonneries, les zones rurales et les marchés spécialisés pour le poisson; le domicile de la préparatrice ou les zones rurales pour le soumbala. Le grand marché est aussi un lieu privilégié pour les achats en demi-gros (il regroupe beaucoup de semi-grossistes).

Ainsi, les ménages préfèrent s’approvisionner dans des lieux spécialisés concernant les achats en demi-gros (poissonneries, marchés aux poissons ou aux volailles, domicile de la préparatrice, achat direct au producteur, etc.). De même, ils engagent un trajet plus long pour ces achats. La préoccupation d’obtenir un produit à moindre coût et de bonne qualité (étant donné la durée d’utilisation d’un même produit stocké), semble à l’origine de ces achats hors des marchés de secteur pour les achats de demi-gros.


3.5.1 - Les lieux d’achat par type de produit

- Les marchés de secteur: sur les marchés, on rencontre deux types de commerçants qui opèrent différemment. D’une part des commerçants (hommes) qui sont regroupés dans un endroit précis du marché: ils vendent les céréales brutes surtout en sacs, mais éventuellement aussi en tine ou en yoruba. D’autre part des commerçantes (femmes), qui sont aussi regroupées dans un ou plusieurs lieux du marché différents de celui des hommes. Elles vendent des céréales en grain mais aussi en farine, et uniquement à la tine ou en yoruba. Les vendeuses de farines sont généralement elles-mêmes transformatrices.

- Le grand marché: c’est le même type de vente que dans les marchés de secteurs, mais les ventes au détail (tine et yoruba) et en farine sont plus rares.

- Les boutiques: ce sont des commerces spécialisés en céréales et autres produits non périssables tels que: sucre, concentré de tomate, lait concentré ou en poudre, spaghettis, sel, savon, allumettes, biscuits importés, etc. Il est en principe possible d’y trouver du riz ordinaire (national ou importé) et parfois du riz parfumé et des céréales sèches (maïs, mil, sorgho). La vente des céréales s’y effectue en demi-gros (sacs), ou au détail pour le riz uniquement (au kg).

Ces boutiques sont des constructions en dur (ciment) dans la ville, souvent situées aux abords du marché. Elles peuvent aussi être situées à l’intérieur du marché (dans ce cas, les constructions sont plus sommaires: généralement en bois).

- Les magasins d’alimentation: la vente des céréales dans les magasins d’alimentation est tournée vers des produits très spécifiques: farines infantiles, riz Uncle Bens, spaghettis («Burkina pat», marques italiennes et françaises), «couscous arabe», farine de blé, fonio en sachet, farine de maïs GMB, gritz, Cribsy, brisures de riz en sachet, etc. Tous ces produits sont vendus dans des conditionnements de petites tailles. Toutefois, il est parfois possible d’y trouver des sacs de 50 kg de riz ordinaire, et des sacs de riz parfumé (25 kg).

- Le lieu de travail: les fonctionnaires peuvent acheter sur leur lieu de travail (au «service») des céréales en sacs de 50 et 100 kg. Généralement le paiement du sac est directement prélevé sur le salaire.

- Le domicile de la transformatrice: certaines transformatrices de grains en farines vendent tout ou une partie de leur production chez elles. Les clientes se déplacent pour acheter.

La viande fraîche et crue est vendue au consommateur dans différents lieux de la ville.

- Les marchés de secteur: des bouchers sont présents dans tous les marchés de secteur. Ils sont tous installés au même endroit dans le marché. On peut distinguer deux types d’installations qui regroupent les bouchers: d’une part des installations en ciment (murs et toiture) avec un découpage interne de façon à former des boxes; d’autre part des installations individuelles en bois et en paille (toit). La vente s’y effectue le plus souvent au tas: des tas prédécoupés et à somme fixe sont disposés sur les étals. Il est aussi possible de demander des morceaux à la découpe, le boucher coupe alors la viande devant son client.

La viande n’est pas pesée: l’estimation du rapport prix du tas/poids ou volume est possible par l’expérience du boucher, et soumis au regard critique des clients.

Les différentes viandes sont distinguées (boeuf, mouton, chèvre). Les bouchers disposent généralement d’une partie de carcasse, voire d’une carcasse entière. Celles-ci sont débitées en tas ou morceaux de façon totalement indépendante de la classification de boucherie occidentale. Les principales parties qui sont distinguées sont les viandes avec os, les viandes sans os, le filet, la tête et les pattes, et les abats.

- Le grand marché: l’organisation de la vente de viande au grand marché est la même que dans les marchés de secteurs, à ceci près que les quantités vendues sont plus importantes. La vente au tas de 100 FCFA et 200 FCFA y est plus rare. Les bouchers préfèrent vendre des morceaux de plus de 300 FCFA. Ils disposent moins systématiquement les tas et vendent plutôt à la découpe.

- Les magasins d’alimentation: dans plusieurs de ces magasins, un coin est réservé à la vente de viande. Celle-ci est disposée derrière une vitrine réfrigérée. La viande y est vendue au kg, par type de morceaux qui reprennent une classification de boucherie occidentale: gigot, steak, épaule, rôti, entrecôte, etc. Chaque type de morceau à un prix au kg spécifique. Le prix de la viande dans ces lieux est deux à trois fois plus cher que sur les marchés de secteur.

- Les boucheries “modernes”: l’organisation de la vente dans les boucheries modernes est la même que dans les magasins d’alimentation mais elles n’assurent qu’une vente de viande, de charcuteries et de plats cuisinés. Il en existe deux à Ouagadougou («SIPAL», et «Boucherie-charcuterie du Faso» ouverte en février 1995: annexe 4).

- L’abattoir: la viande vendue à l’abattoir est normalement réservée aux bouchers détaillants ou semi-grossistes. Toutefois, il n’est pas rare d’y rencontrer quelques particuliers venus acheter leur viande très tôt le matin, directement après la découpe de la carcasse. Les particuliers qui achètent de la viande à l’abattoir constituent leur stock (achats de carcasses ou demies-carcasses de mouton par exemple).

- Les vendeurs ambulants: ils se déplacent aux alentours du marché ou à domicile, avec un plateau où sont disposés des tas de viande. Ces vendeurs sont souvent ouvriers des bouchers détaillants, et aident à écouler les stocks. La qualité de leur viande est très souvent jugée mauvaise par les ménagères.

Mise à part la viande fraîche, il est possible de s’approvisionner à Ouagadougou en animaux vivants: dans les marchés au petit bétail (chèvre, mouton), dans certains marchés de secteur pour les poulets.

Enfin, il faut signaler l’existence de nombreux points de grillade où s’effectuent la cuisson et la vente de poulets grillés ou rôtis, mouton grillé, porc au four, etc., au bord des routes, dans de petits restaurants spécialisés, ou dans les bars et maquis.

- Les poissonneries: on y trouve uniquement le poisson frais. On peut distinguer les poissonneries de poisson de mer importé («chinchard») et celles du poisson d’eau douce national (capitaine, carpes, silures...). Ce sont des constructions en dur, qui disposent de congélateurs. Ceux-ci sont très rarement réellement fonctionnels: ils servent plutôt de glacière pour maintenir le poisson au frais dans la glace. Le poisson est vendu au kg. Certaines de ces poissonneries sont situées à l’intérieur des marchés (constructions mobiles).

- Les voitures ambulantes: ce sont, pour la majorité, des voitures ambulantes qui appartiennent aux poissonneries. Les conditions de vente sont les mêmes.

- Le marché au poisson du barrage: à certaines périodes et certains jours, du poisson frais est vendu, généralement en tas ou à l’unité, au niveau du barrage de Tanghin.

- Les marchés de secteur: ce sont essentiellement des poissons séchés/fumés que l’on trouve dans les marchés de secteur. On distingue deux types de vente de ces poissons: d’une part la vente au détail par des commerçantes souvent non spécialisées en poisson. Le poisson y est vendu en tas pré-définis et à somme fixe, ou à l’unité pour les gros poissons (carpes, silures); d’autre part, la vente en demi-gros par des commerçants spécialisés: le poisson est dans ce cas vendu au kg.

Le poisson frais vendu dans les marchés est plus rare: dans certains cas ce sont des commerçantes qui le vendent en tas ou à l’unité aux premières heures d’ouverture, et qui, passée une certaine heure, font frire le stock restant. Mais on peut aussi trouver les petites poissonneries qui sont installées dans certains marchés.

- Le grand marché: c’est le même type d’organisation que sur les marchés de secteur. Toutefois, la vente de poisson séché/fumé au détail (en tas) est plutôt rare. Les vendeurs de poissons sont essentiellement des semi-grossistes ou des détaillants pour des particuliers qui achètent en demi-gros (au kg).

- Les magasins d’alimentation: dans certains de ces magasins, il est possible de trouver du poisson congelé (carpes généralement). La vente de poisson dans les magasins d’alimentation est plus rare que celle de viande.

- La vente dans la rue: il est possible de trouver du poisson séché/fumé en petits tas, ou à l’unité, chez des femmes qui, installées devant la porte de leur cour, ont un petit commerce (quantités vendues et stockées très limitées).

- Le petit marché de poissons séchés/fumés sur une avenue: quelques vendeurs(ses) de poissons séchés/fumés sont installés sur le trottoir de l’avenue Che Guevara. La diversité et la quantité de poissons sont assez importantes (comparativement aux ventes dans les marchés). Il s’agit essentiellement de vente en gros ou demi-gros, et au kg.

3.5.2 - La fréquentation des lieux d’achat par les ménages

Le tableau 25 présente la répartition des lieux d’achat des céréales, viandes et poissons selon que ces produits sont achetés en demi-gros ou au détail.

Tableau Y. Répartition des lieux d’achat selon les produits et le volume des achats (en pourcentage des lieux d’achat cités pour chaque type d’achat)

Produit

Volume d’achat

Marché

Autres lieux

Total

Effectif enregistré

Céréale*

demi-gros

55

45

100

164 détail

93

7

100

55



Viande

demi-gros

37

63

100

19 détail

98

2

100

234



Poisson

demi-gros

51

49

100

31 détail

93

7

100

213




* Riz - maïs - sorgho uniquement

Source: nos enquêtes réalisées en septembre 1994

Lorsqu’il s’agit de faire des achats pour une consommation du jour, les achats de céréales, de viandes et de poissons sont pratiquement toujours réalisés au marché.

La moitié des achats de stock se font dans d’autres lieux que les marchés.

- Pour les céréales: les boutiques (14 % des achats), le lieu de travail (18 %), les zones rurales (7 %). Ces lieux d’achats sont cependant liés au type de céréale: les achats au village concernent essentiellement le maïs et le sorgho (90 % des achats de céréales au village), les achats dans les boutiques concernent essentiellement le riz (96 % des achats de céréales dans les boutiques), les achats sur le lieu de travail concernent le riz (63 %) et le maïs (37 %).

- Pour la viande: l’abattoir et les marchés ou vendeurs ruraux (à l’occasion d’une mission ou d’un retour du village). Quelques ménages se font aussi livrer leur viande à domicile. La fréquentation de ces lieux reste toutefois marginale par rapport à la totalité des achats de viande.

- Pour le poisson: les poissonneries et voitures ambulantes, les achats en zone rurale, les barrages, le marché situé sur l’avenue Che Guevara.

A noter que lors de l’enquête, les achats dans les magasins d’alimentation ou dans les boucheries modernes n’ont pas été cités par les personnes interrogées. Ce type de lieu de vente n’apparaît fréquenté que par une proportion minime de Ouagalais.

3.6 Les unités d’achat


3.6.1 - Les unités d’achat selon le produit et le volume d’achat
3.6.2 - La pratique du lenga

Résumé

Les unités d’achat varient selon le type de produit et selon le volume d’achat: sac pour les céréales achetées en demi-gros, unités de mesure traditionnelles (yoruba et tine) pour les céréales sèches acquises au détail, kg pour le riz. Les viandes et poissons sont vendus par volumes correspondant à des montants fixes.

Le «lenga» est le terme mooré qui désigne le supplément gratuit accordé par le vendeur. Il est ajouté devant le client à la quantité négociée au moment de l’achat. Son attribution est une pratique courante.

L’unité d’achat des produits (micro-détail, détail ou demi-gros) est liée aux capacités financières des ménages, aux capacités de conservation elles-mêmes liées à l’utilisation plus ou moins fréquente du produit, et au souci d’une utilisation rationnée du produit (éviter les abus de consommation).


3.6.1 - Les unités d’achat selon le produit et le volume d’achat

Les unités d’achat varient selon le type de produit et selon le volume d’achat comme le montre le tableau 26.

Tableau Z. Les unités d’achat selon le type de produit et le volume d’achat (en pourcentage des personnes interrogées)

Produit

Unité d’achat

Achat pour stock

Achat au détail

Maïs


Yoruba (2,6 kg)

12

85

Tine (16 kg)

15

n.d.*

Sac 50 kg

3

n.d.*

Sac 100 kg

63

n.d.*

Autres

7

n.d.*

Total (effectif)

100 (84)

100 (14)

Sorgho

 

Yoruba (2,7 kg)

11

100

Tine (16 kg)

18

0

Sac 100 kg

71

0

Total (effectif)

100(23)

100(12)

Mil


Yoruba (2,7 kg)

67

100

Sac 100 kg

25

0

Autres

8

0

Total (effectif)

100(14)

100(7)

Riz


Sac 50 kg

85

0

Au kg

10

100

Autres

5

0

Total (effectif)

100(78)

100(33)

Viande


Tas

23

91

Morceau à la découpe

23

6

Au kg

18

0

Carcasse

29

3

Autres

7

0

Total (effectif)

100(19)

100(239)

Poisson


Tas

24

76

Unité

3

17

Au kg

73

0

Autres

0

7

Total (effectif)

100(31)

100(223)


* n.d. = non disponible

Source: nos enquêtes réalisées en septembre 1994

Lorsqu’il s’agit de constituer un stock, les achats de céréales se font sous forme de sac de 100 kg pour le maïs et le sorgho, de sac de 50 kg pour le riz et de yoruba pour le mil. Cette dernière céréale sert en effet surtout à la préparation occasionnelle de plats traditionnels. Les achats de céréales au détail s’effectuent avec les unités de mesure traditionnelles (yoruba et tine) pour les céréales sèches alors qu’elles s’effectuent au kg pour le riz. D’après les pesées d’unités de mesure réalisées auprès des commerçants, on constate que la yoruba pour le sorgho et le mil correspond à une quantité légèrement moindre que pour le maïs.

Pour leurs achats de viande chez les bouchers du marché, les consommateurs ont le choix entre prendre des tas prédisposés sur les étals par les bouchers[10], ou demander au boucher qu’il découpe la quantité de viande souhaitée dans une partie de carcasse exposée (par exemple, 400 FCFA de viande sans os, découpée dans l’épaule). La pratique la plus courante pour l’achat de détail est de se servir dans les tas prédisposés à l’avance (91 % des achats de détail). Les préférences exprimées par les ménagères sont pourtant l’achat de viande à la découpe. Elles mettent en avant plusieurs raisons de ce choix. La fraîcheur car la découpe devant la ménagère garantie que les morceaux de viande n’ont pas été exposés longuement sur l’étal; l’hygiène car l’achat à la découpe permet d’éviter que la viande n’ait été touchée par d’autres mains de ménagères lorsqu’elles choisissent leur tas; la qualité sanitaire car la découpe étant faite sur une carcasse, la ménagère peut ainsi vérifier que celle-ci porte bien le tampon bleu de l’abattoir. Les raisons qui expliqueraient que les ménagères achètent malgré tout la viande en tas sont, selon leurs dires, d’une part que les bouchers refusent de donner de la viande à la découpe pour une somme inférieure à 300 FCFA et d’autre part, que la viande servie à la découpe serait moins volumineuse que celle servie en tas pour un même montant d’achat.

L’achat de poisson au détail est le plus souvent un achat de tas prédisposés par les commerçantes. C’est l’unité de vente des poissons de Dakar et d’Abidjan séchés/fumés. Par contre, les silures ou carpes séchées/fumées, poissons plus volumineux, sont souvent vendus à l’unité.

Comme on l’a vu précédemment (§ 2.3.1.), d’une manière générale la vente au détail revient souvent plus cher que l’achat en demi-gros. Toutefois, la vente des produits au détail, et notamment la parcellisation des produits en petits tas (tas de 25 FCFA de poisson séchés, tas de 100 FCFA de viande) permet une meilleure accessibilité des produits aux populations défavorisées. Le poisson séché d’Abidjan ou de Dakar est vendu au détail bien plus cher que les autres poissons séchés ou fumés. Pourtant, c’est ce poisson qui est le plus acheté, et pratiquement le seul accessible aux populations défavorisées. L’unité de vente, ici la vente en tas de 10, 25, 50 FCFA, le rend plus accessible que les silures ou carpes qui, vendues à l’unité ont souvent des premiers prix de 100 FCFA. On peut aussi souligner que certains ménages font le choix de ne pas acheter certains produits en demi-gros pour éviter, à la maison, les abus et gaspillages ou que le stock finisse trop vite.

3.6.2 - La pratique du lenga

Le lenga est le terme mooré qui désigne le supplément gratuit accordé par le vendeur. Il est ajouté devant le client à la quantité négociée au moment de l’achat.

L’attribution du lenga est une pratique courante mais n’est pas liée au hasard. Elle dépend largement du produit et de l’unité de vente comme le montrent les tableaux 27 et 28.

Tableau AA. Fréquence d’attribution du lenga selon le volume d’achat (en pourcentage des achats effectués)

Produit

Demi-gros

Détail

Maïs

18

92

Sorgho

7

33

Riz

4

16

Mil

33

-

Viande

45

48

Poisson

52

14


Source: nos enquêtes réalisées en septembre 1994

La pratique du lenga apparaît plus fréquente pour les achats de céréales au détail que pour les achats en demi-gros. De plus, les ventes avec les unités de mesure traditionnelles (yoruba et tine) semblent plus souvent associées à cette pratique que les ventes au kg.

Le lenga est plus courant pour les achats de viande que de poisson sauf lorsque ce dernier est acheté en demi-gros au kg ce qui reste relativement peu fréquent comme on l’a vu précédemment.

Tableau BB. Fréquence d’attribution du lenga selon l’unité d’achat (en pourcentage des achats effectués)

Produit

Unité d’achat

Fréquence du lenga

Céréales

 

Vente en tine

54

Vente en yoruba

53

Vente en sacs (50 ou 100 kg)

0

Vente au kg

18

Viande

 

Vente en tas

48

Morceaux à la découpe

72

Carcasse

0

Poisson

 

Vente en tas

21

Vente au kg

53

Vente à l’unité

0


Source: nos enquêtes réalisées en septembre 1994

3.7 La fidélisation aux vendeurs

Résumé

La fidélisation des clientes auprès d’un vendeur est une pratique courante à Ouagadougou. Elle est particulièrement marquée concernant les achats de viande et de produits locaux transformés (soumbala, farines). Outre les avantages économiques (crédits accordés, rabais ajouté...), c’est aussi la recherche de garantie sur la qualité qui en est la cause.


La fidélisation des consommateurs auprès de vendeurs spécifiques est une pratique courante à Ouagadougou. Elle possède même une appellation en langue mooré où le raadanga désigne le vendeur auprès duquel on a l’habitude d’acheter.

Les entretiens qualitatifs menés auprès des ménagères précisent que cette pratique dépend cependant du produit concerné. Une part importante des ménagères est ainsi fidélisée auprès d’un raadanga pour les achats de viande, de farine de céréale, et de soumbala. Par contre, ces mêmes ménagères sont rarement fidélisées pour les achats de poissons séchés/fumés.[11]

Les ménagères qui s’approvisionnent en viande chez un raadanga en expliquent les raisons de différentes façons:

- Si occasionnellement le boucher n’a pas la viande souhaitée par la ménagère, ou si sa viande le jour de l’achat n’est pas «bien», ce boucher peut acheter chez un collègue voisin pour la ménagère le morceau souhaité ou un morceau de meilleure qualité.

- Les ménagères peuvent se permettre d’être plus exigeantes auprès de leur raadanga en demandant par exemple un autre morceau que celui proposé, ou en demandant pour une quantité équivalente à 150 FCFA alors que normalement les tas proposés sont de 100 ou 200 FCFA.

- Le boucher peut réserver une partie de sa viande pour ses clientes régulières.

- Les ménagères sont plus tranquilles pour choisir leur tas, le boucher ne les «presse pas».

- Le lenga est plus souvent accordé, ou plus volumineux. Cette idée est cependant controversée par les ménagères qui ne se fidélisent pas. Celles-ci pensent qu’il vaut mieux changer régulièrement de boucher, le lenga est alors plus volumineux car chaque boucher cherche à fidéliser les clientes potentielles et attirent de cette façon les ménagères.

La fidélisation apparaît très liée au professionnalisme du vendeur et au savoir-faire requis pour la transformation et la vente du produit.

La profession de boucher est une des plus vieilles professions au Burkina. Leur compétence est reconnue et n’importe qui ne peut pas être boucher. La profession est organisée de telle façon que les entrées dans ce commerce sont contrôlées et nécessitent une période d’apprentissage longue. Le boucher débute jeune, en tant qu’apprenti, et n’acquiert le statut de boucher que plusieurs années après. Du moins, l’organisation était telle sous sa forme traditionnelle.

La préparation de produits tels que le soumbala ou les farines de céréales nécessite un savoir-faire de l’artisane qui conditionne la qualité du produit. Du fait du caractère transformé du produit, son simple examen ne rend pas facile l’évaluation de ce savoir-faire. Dans ce contexte, la ménagère cherche à réduire son incertitude par l’établissement d’une relation de confiance avec le vendeur dont la fidélisation en constitue le résultat.

Par contre, concernant la vente de certains produits bruts ou importés, qui ne dépendent pas d’un savoir-faire du commerçant, les ménagères peuvent, à chaque achat, choisir un vendeur différent, selon la qualité de ses produits.

Questions

Sous quelle forme les céréales sont-elles principalement acquises par les ménages de Ouagadougou?

Quels sont les principaux aliments qui font l’objet d’une auto-production par les ménages de Ouagadougou?

Quelle typologie des ménages peut-on établir sur la base de l’identification de la composition de leurs stocks de céréales?

Comment s’organise la répartition des budgets et des achats alimentaires au sein des ménages?

Quelles relations y a-t-il entre les lieux et les volumes d’achat des aliments?

Quelle est la principale caractéristique des unités de vente des aliments au détail?

Quels sont les avantages et inconvénients pour les consommateurs de se fidéliser à un même vendeur?


[10] On peut distinguer les “ tas composés “: mélange de morceaux de chair, d’os et éventuellement de cinquième quartier; et les tas de chair seulement (viande sans os).
[11] Seuls les achats au détail sont concernés par cette étude

Page précédente Début de page Page suivante