Previous Page Table of Contents Next Page


Etude comparative de rentabilité de la culture manuelle et de la culture attelée au Togo

par

Koffi Nénonéné Amegbeto

Ingénieur Agronome, Projet de Promotion de la Traction Animale (PROPTA), Atakpamé, Togo

Résumé

Le Projet de Promotion de la Traction Animale (PROPTA) a procédé, en collaboration avec l'Ecole Supérieure d'Agronomie de l'Université du Bénin à Lomé, à une étude comparative de la culture manuelle et de la culture attelée. Cette étude étalée sur neuf mois et portant sur deux zones, a été effectuée après une tournée technique d'un mois dans les cinq régions économiques du pays. Elle s'appuie sur une analyse de la main-d'œuvre, du capital foncier, du capital d'exploitation et des revenus. Après analyse, ces données chiffrées servent à la comparaison des deux systèmes de culture en fonction de la taille des exploitations, des rendements, des productions moyennes, des coûts de production, de la main-d'œuvre agricole résidente ou extérieure à l'exploitation, de la répartition des tâches, de la durée des travaux, des niveaux d'investissement, des charges fixes et variables, et de la profitabilité des cultures. Ce dernier aspect est analysé en détail par la présentation en tableau" des comptes d'exploitation des cultures du coton, du mais, de l'arachide, du niébé et du sorgho en culture manuelle et en culture attelée. Au vu des profits réalisés, il apparaît que les cultures de coton, de mais et d'arachide sont plus rentables en culture attelée, mais le niébé et le sorgho sont d'un rapport plus favorable en culture manuelle. Par rapport à la culture manuelle, la culture attelée a entraîné une augmentation du revenu monétaire brut de 37% et occasionné des charges variables et fixes 1,2 fois et 3,6 fois plus importantes, respectivement. La traction animale a permis une augmentation de 33% des revenus, qui s'élèvent à 534.329 FCFA en culture attelée et à 380.418 FCFA en culture manuelle. L'augmentation des revenus est de 40% lorsque l'exploitant offre des prestations de service à l'extérieur. Le revenu net annuel par actif a augmenté de 29% sur les exploitations en culture attelée. Non seulement la traction animale entraîne une augmentation de la rentabilité, mais elle contribue aussi à améliorer les conditions de vie des paysans.

Contexte et base de l'étude

Le secteur agricole constitue le fer de lance du développement économique et social du Togo. La population rurale (65% de la population active) réalise 25% du produit intérieur brut. Dans le même temps, elle arrive à peine à couvrir ses besoins et à dégager des excédents. Selon certains, la culture manuelle peut encore satisfaire les besoins des cultivateurs. Pour d'autres, la traction animale (TA) doit être le cheval de bataille de l'autosuffisance alimentaire. Devant cette diversité d'opinions, le Projet de Promotion de la Traction Animale (PROPTA) a décidé de procéder, en collaboration avec l'Ecole Supérieure d'Agronomie de l'Université du Bénin à Lomé, à une étude sur la rentabilité comparée des deux systèmes de production. Cette étude a duré neuf mois et porte sur deux zones. Elle a été précédée d'une enquête technique d'un mois dans les cinq régions économiques du pays. Les deux zones de l'étude sont assez représentatives du territoire togolais. L'une, Broukou, est située dans la zone du projet d'Aménagement de la Vallée de la Kara (connu sous le nom de projet FED/Kara). L'autre, Kambolé, est à l'extrême est de la DRDR/GTZ Centrale (voir carte). Ces deux zones sont actuellement dans une période de transition entre la culture manuelle et la culture attelée.

Tableau 1: Caractéristiques économiques des exploitations et caractéristiques matrimoniales des exploitants

Exploitations en culture manuelle

Exploitations en culture attelée

Caractéristiques économiques

Equipements peu onéreux


Equipements assez coûteux


Utilisation de matériels de fabrication locale


Matériel de travail spécifique à chaque opération culturale


Moyens financiers extérieurs réduits ou inexistants


Obtention de crédits financiers: conditions de crédit 1/6 du total investi et 5 ha de terres minimum. Remboursement du crédit en cinq annuités


Un matériel de culture par exploitant


Engagement à faire une culture de rente


Caractéristiques matrimoniales des exploitants

Mariés

98%

Mariés

100%

Une épouse

60%

Une épouse

57%

Deux épouses

29%

Deux épouses

31%

Trois épouses

10%

Trois épouses

2%

Quatre épouses

0%

Quatre épouses

10%

L'objectif de cette étude était de recueillir des données et des expériences sur le terrain afin de répondre aux questions des protagonistes des deux systèmes de production. La culture attelée est-elle rentable? Dans quel domaine est-elle la plus fiable? Pour répondre à la question de la rentabilité, trois facteurs principaux ont été pris en considération.

Carte du Togo

La main-d'œuvre

Il a été tenu compte des facteurs suivants:

· nombre d'actifs résidant sur l'unité de production;
· effectif des actifs agricoles travaillant en permanence sur l'exploitation;
· journée de travail: nombre d'heures consacrées à l'activité agricole;
· temps de travail effectif: déduction des temps de déplacement et de repos.

Le capital foncier

· statut du chef d'exploitation;
· superficie totale de l'exploitation: superficie totale cultivée et sa répartition par cultures.

Le capital d'exploitation

· inventaire des matériels, outils de traction et installations (nombre, prix unitaire, valeur totale, vie utile).

Ces éléments ont permis de déterminer le revenu de l'exploitation. Des facteurs non négligeables comme les critères sociaux, les contraintes générales à l'utilisation de l'une ou l'autre technique, ont été pris en compte. Les valeurs monétaires ont été déterminées partir des prix pratiqués par les exploitants, tant pour l'achat que pour la vente des produits et des services. En matière d'investissement, les matériels, les outils de traction et les installations sont considérés comme des biens amortissables. La chaîne d'attelage, par exemple, dure entre huit et dix ans. La paire de boeufs est un capital qui, en principe, ne se dévalorise pas car son utilisation s'accompagne d'une augmentation de poids. Mais au vu des risques impliqués (mortalité, vol, disparition, insuffisance de travail), un taux forfaitaire de 10% de la valeur d'acquisition est amorti sur six ans, durée qui correspond au temps moyen de rendement maximum des animaux.

Dans les frais généraux, l'étude inclut le coût d'opportunité du capital investi, calculé au taux de 8% correspondant au taux d'intérêt subventionné sur compte d'épargne à la Caisse Nationale de Crédit Agricole (CNCA). Comme élément de calcul et de comparaison, les auteurs ont utilisé le salaire minimum agricole de première classe (SMAG), soit 499 FCFA pour une journée de travail.

Caractéristiques des deux types d'exploitation

En culture manuelle, 17% des exploitants ont moins de 30 ans, 26% ont de 30 à 45 ans, 57% ont plus de 45 ans. En culture attelée, 14% des exploitants ont moins de 30 ans, 41% ont de 30 à 45 ans, 45% ont plus de 45 ans. Actuellement, les contraintes à l'adoption de la culture attelée sont diverses et spécifiques aux exploitations. Dans 50% des cas, ces contraintes sont d'ordre financier; pour 36% des exploitants interrogés l'inadaptation à cette technique résulte du manque de main-d'œuvre, des connaissances insuffisantes, du manque d'intérêt ou enfin de la crainte de dépendre financièrement d'un organisme administratif. Parmi les chefs d'exploitation en culture manuelle, 12% déclarent avoir pitié des animaux de trait, en avoir peur ou être méfiants, ou encore jugent que la culture manuelle a satisfait aux besoins de leurs parents et qu'elle continue à satisfaire à leurs propres besoins.

Tableau 2: Contraintes à l'utilisation des attelages

Types de contraintes

Exploitants

Effectifs

%

Gardiennage des boeufs

36

86

Travaux d'ouverture de terrain

29

69

Construction d'étables

32

76

Suivi sanitaire des boeufs

19

45

Entretien et réparation du matériel

14

33

Alimentation des boeufs

12

29

Insuffisance de la main-d'œuvre

6

14

Insuffisance de travail

4

10

Tableau 3: Superficies moyennes cultivées (ha)

Cultures

Exploitations manuelles

Exploitations en culture attelée

%

ha

%

ha

Coton

76

0,9

88

1,4

Mais

95

0,9

93

1,6

Igname

81

0,6

76

0,5

Sorgho

71

1,0

60

0,9

Arachide

45

0,4

66

0,4

Niché

45

0,6

69

0,8

Autres (toutes cultures secondaires)

100

1,1

100

1,0

Moyenne des superficies cultivées


4,3


5,4

Tableau 4: comparaison des rendements moyens (kg ha-l)

 

Culture manuelle

Culture attelée

Indice*

ha

kg ha-l

ha

kg ha-l

Coton

29

953

52

1195

125

Maïs

36

1188

63

1182

150

Arachide

8

881

11

1359

154

Sorgho

31

706

23

799

113

Niébé

12

485

23

504

104

Igname

20

10000

16

10000

-

*Indice simple de variation sur base 100 des rendements en culture manuelle.

Taille des exploitations

Dans la zone de Broukou, la taille de chaque unité est de 5 ha, en accord avec le programme national d'aménagement de la Vallée de la Kara. A Kambolé, par contre, la répartition des terres est moins précise. Les exploitants obéissent partout au principe du régime foncier traditionnel autorisant le travail et les récoltes sur un champ libre ne leur appartenant pas.

Sur ces deux types d'exploitation deux cultures se concurrencent: les cultures dites "sécurisantes" qui dépendent des habitudes alimentaires et garantissent des revenus monétaires non négligeables. Leur mise en valeur demeure tributaire des pratiques traditionnelles d'association des cultures. Sur ces parcelles, l'igname, le manioc, la patate douce, le voandzou, et le fonio se côtoient. Sur les parcelles où le coton, le mais, le niébé, et/ou l'arachide prédominent, les thèmes proposés par les services de vulgarisation interviennent. En culture attelée, les superficies varient entre 1 et 18 hectares. En culture manuelle, les extrêmes enregistrés sont de 1 et de 11 ha.

Rendements des principales cultures

Ils varient d'une exploitation à l'autre selon les variétés sélectionnées et les apports d'engrais. Le tableau 4 indique les rendements moyens des principales cultures calculés sur la base des productions brutes des parcelles recensées.

L'emploi des équipements de culture attelée n'a pas à lui seul une incidence directe sur l'amélioration des rendements. Le coton étant généralement cultivé avec les mêmes doses d'engrais, la différence de rendement est essentiellement due au mode de préparation du sol. Pour les autres cultures, des doses plus élevées d'engrais chimiques s'ajoutent au mode de préparation du sol et à la densité du semis. Les rendements de niébé sont plus étroitement liés au succès des traitements chimiques; l'indice correspondant montre qu'il n'y a pas de différence entre les exploitations à ce niveau. La pratique de l'épandage des bouses de boeufs non préparées en un véritable fumier sur toutes les cultures proches des concessions constitue un facteur de rendement. Les exploitants en culture attelée produisent plus de coton, de maïs, de niébé, et d'arachide. Par contre les exploitants en culture manuelle produisent davantage de sorgho et d'igname.

Tableau 5: comparaison des productions moyennes par exploitation (kg)

 

Culture manuelle

Culture attelée

Effectifs

Production totale

Production moyenne

Effectifs

Production totale

Production moyenne

Coton

32

28

858

37

62166

1674

Maïs

40

42916

1069

39

111795

2851

Arachide

19

6828

352

28

15289

544

Sorgho

30

21898

706

25

18173

719

Niébé

19

5694

291

29

11725

403

Igname

34

205000

6000

32

162500

5000

Tableau 6: comparaison des charges fixes

Charges

Culture manuelle

Culture attelée

Moyenne

Moyenne ha-1

Moyenne

Moyenne ha-1

Amortissement

7297

1697

22090

4091

Intérêts (8% du capital)

5523

1285

24607

4557

Autres

8495

1976

30570

5661

Total

21315

4958

77267

14309

Analyse des coûts de production

La main-d'œuvre agricole

La main-d'œuvre agricole se constitue des membres de la famille et de l'embauche temporaire extérieure à l'exploitation. La main-d'œuvre familiale est en moyenne de neuf personnes sur l'exploitation en culture manuelle contre dix sur l'exploitation en culture attelée. Les besoins en main-d'œuvre pour le gardiennage et la conduite des boeufs ont favorisé l'embauche des membres de la famille au sens large (cousins, neveux, beaux-frères, etc.). Le nombre moyen des actifs est de 3,7 en TA et de 3,4 en culture manuelle.

Répartition des tâches sur l'exploitation

L'organisation du travail est très variable selon les exploitations et les périodes de l'année. L'attribution des fonctions n'a pas été modifiée par la pratique de la TA. Les travaux physiques demeurent essentiellement masculins. Néanmoins, les exploitations en culture attelée sollicitent davantage les femmes et les enfants pour le labour et le billonnage, qui sont des fonctions masculines sur les exploitations en culture manuelle.

La traction animale permet une meilleure utilisation de la main-d'œuvre familiale et une réduction des besoins en main-d'œuvre extérieure pour le labour, le sarclage et le buttage.

La main-d'œuvre extérieure

Son emploi résulte des difficultés de gestion de la main-d'œuvre familiale, elles-mêmes lices au caractère saisonnier des travaux agricoles. Sur les deux types d'exploitations, elle prend la forme d'une entraide et d'un salariat occasionnel. Le salariat agricole permanent est quasiment inexistant dans les deux zones.

Durée des travaux

Les exploitants, indépendamment du type de culture, vivent sous la même contrainte de temps disponible et travaillent en moyenne six jours par semaine. La journée de travail en culture attelée est légèrement plus longue: 11,1 heures contre 10,6 en culture manuelle. Par contre, le temps de travail effectif est en moyenne de six heures par jour avec les boeufs et de huit heures en culture manuelle. Cette différence est causée par les soins aux animaux et l'entretien du matériel.

Investissement et charges fixes

Investissement

A ce niveau, la différence entre les deux types d'exploitation s'accentue. Deux catégories émergent de l'analyse des unités de production. En TA, le capital investi se situe entre 50.000 et 150.000 FCFA. Cette somme varie selon les exploitations, le nombre d'outils, l'évolution annuelle des coûts des attelages.

Charges fixes

Ces charges incluent:

· les amortissements;
· le coût d'opportunité;
· les annuités et intérêts des crédits;
· les frais d'assurance, de stockage et de participation à la constitution de fonds de solidarité villageois, etc.

Tableau 7: Comparaison des charges variables par hectare cultivé (FCFA ha-1)

 

Culture manuelle

Culture attelée

Charge moyenne

Superficie moyenne

Charge ha-1

Charge moyenne

Superficie moyenne

Charge ha-1

Main-d'œuvre

37150

4,3

8640

29320

5,4

5430

Autres, réparations etc.

560

4,3

130

11637

5,4

2155

Semences







Coton

-

0,9

-

-

1,4

-

Mars

1815

0,9

2016

5059

1,6

3162

Arachide

2924

0,4

7310

4376

0,4

10940

Sorgho

585

1,0

585

702

0,9

780

Niébé

1764

0,6

2940

3648

0,8

4560

Igname

52359

0,6

87265

43632

0,5

87264

Engrais







Coton

20700

0,9

23000

32200

1,4

23000

Mars

6625

0,9

7361

14547

1,6

9092

Arachide

2500

0,4

6250

2583

0,4

6458

Sorgho

6650

1,0

6650

5850

0,9

6500

Traitements







Coton

540

0,9

600

840

1,4

600

Niébé

4410

0,6

7350

5416

0,8

6770

Total

138582

4,3

-

159810

5,4

-

La moyenne des charges fixes à l'hectare est presque trois fois supérieure en traction animale.

Charges variables

En dehors des charges afférentes à l'utilisation de la main-d'œuvre extérieure, les charges variables diffèrent selon le type de culture. En culture attelée, toutes les exploitations supportent une charge moyenne de 11.637 FCFA, alors que seulement 31% des exploitations en culture manuelle paient des charges variables se montant en moyenne à 560 FCFA. La culture attelée occasionne en effet des frais de réparation supplémentaires. De plus, les charges du suivi sanitaire des animaux sont importantes, avec une moyenne de 5.626 FCFA sur 96% des exploitations (le suivi sanitaire n'est pas encore bien organisé dans les deux zones).

Consommations intermédiaires

Elles correspondent à l'utilisation des intrants. La culture du coton se fait dans les mêmes conditions sur les deux types d'exploitation. Le coût à l'hectare est de 23.000 FCFA pour les engrais et de 600 FCFA pour les traitements phytosanitaires. Pour les autres spéculations, les exploitants achètent des intrants en fonction de leur capacité financière. Sur la base des prix d'achat et des quantités moyennes utilisées sur les exploitations, les charges opérationnelles sont résumées dans le tableau 7.

Revenus et rentabilité

Dans le contexte de cette étude, le niveau de rentabilité sera défini par le revenu net monétaire obtenu par telle ou telle technique culturale. Cette rentabilité est ici mesurée en revenu net par hectare, par actif agricole ou par journée de travail familial.

Les critères de "revenu par hectare" et de "revenu par actif" permettent de comparer les types d'exploitation suivant les objectifs nationaux d'accroissement de la production agricole et de l'amélioration des conditions de vie des populations rurales. La rémunération des journées de travail familial n'est acceptable comme indice de comparaison que si l'on admet que sur toutes les exploitations, les opérations ont été effectuées par cette main-d'œuvre et ont effectivement produit les rendements déterminés ici.

Tableau 8: Compte d'exploitation d'un hectare de coton (FCFA)


Culture manuelle

Culture attelée

Rendement (kg ha-1)

953

1195

Prix unitaire

105

105

Revenu monétaire brut

100065

125527

Charges variables

32370

31185

- consommation intermédiaire

23600

23600

- main-d'œuvre extérieure

8640

5430

- autres

130

2155

Charges fixes

4958

14309

Coûts totaux de production

37328

45494

Revenu net

62737

80033

Nombre moyen d'actifs

3,4

3,7

Revenu net par actif

18452

21631

Revenu net sans main d'œuvre extérieure

71377

85463

Nombre de journées par hectare

153

136

Rémunération d'une journée travaillée

467

628

Coût d'opportunité du travail familial

76347

67864

Prix de revient au kilo

110

90

Le coût d'opportunité du travail familial a été évalué d'après le taux du SMAG, soit 499 FCFA par jour travaillé. La formule suivante a servi au calcul du prix de revient au kilo:

CRP=(COTF+CTP-CMOER)/RMC

CRP prix de revient au kilo;
COTF coût d'opportunité du travail familial;
CTP coûts totaux de production;
CMOER frais de main-d'œuvre extérieure;
RMC rendement moyen de la culture.

Tableau 9: Compte d'exploitation d'un hectare de mais (FCFA)


Culture manuelle

Culture attelée

Rendement (kg ha-1)

1188

1782

Prix unitaire

60

60

Revenu monétaire brut

71280

106920

Charges variables

18147

19839

- consommation intermédiaire

9377

12254

- main-d'œuvre extérieure

8640

5430

- autres

130

2155

Charges fixes

4958

14309

Coûts totaux de production

23105

34148

Revenu net

48175

72772

Nombre moyen d'actifs

3,4

3,7

Revenu net par actif

14169

19668

Revenu net sans main d'œuvre extérieure

56815

78202

Nombre de journées par hectare

88

72

Rémunération d'une journée travaillée

646

1086

Coût d'opportunité du travail familial

43912

35928

Prix de revient au kilo

49

36

Rentabilité des cultures

Coton

Le revenu monétaire brut d'un hectare de coton est 1,25 fois plus élevé en culture attelée qu'en culture manuelle grâce à un rendement supérieur, les coûts variables de production étant sensiblement les mêmes. Le coût total de la production est 1,2 fois plus élevé en culture attelée du fait de l'importance des charges fixes. La part de l'actif agricole dans le revenu net de l'exploitation en TA est 1,2 fois supérieure à celle d'un actif en culture manuelle.

En culture attelée, l'actif est 1,3 fois mieux rémunéré, dépassant de 26% le SMAG (499 FCFA). En culture manuelle, cette rémunération est inférieure au SMAG (467 FCFA). Par rapport au prix d'achat au producteur, le coton est produit à perte en culture manuelle, avec une marge bénéficaire négative de -5 FCFA.

Tableau 10: Compte d'exploitation d'un hectare d'arachide (FCFA)


Culture manuelle

Culture attelée

Rendement (kg ha-1)

881

1359

Prix unitaire

150

150

Revenu monétaire brut

132150

203850

Charges variables

22330

24983

- consommation intermédiaire

13560

17398

- main-d'œuvre extérieure

8640

5430

- autres

130

2155

Charges fixes

4958

14309

Coûts totaux de production

27288

39292

Revenu net

104862

164558

Nombre moyen d'actifs

3,4

3,7

Revenu net par actif

30842

44475

Revenu net sans main-d'œuvre extérieure

113502

169988

Nombre de journées par hectare

131

121

Rémunération d'une journée travaillée

866

1405

Coût d'opportunité du travail familial

65369

60379

Prix de revient au kilo

95

69

Maïs

Le revenu monétaire brut et le coût de production du mais sont plus élevés (1,5 fois) en culture attelée qu'en culture manuelle. Le revenu net par actif en culture attelée est de 19.668 FCFA. La journée de travail vaut 1.086 FCFA, soit plus de deux fois le SMAG. En culture manuelle, le revenu net par actif est de 14.169 FCFA et la journée de travail est rémunérée à 646 FCFA, soit 1,3 fois le SMAG. Dans les deux cas, les exploitants ont plus intérêt à produire du maïs qu'à se faire embaucher comme ouvrier agricole. La culture du mais en culture attelée est plus rentable qu'en culture manuelle.

Arachide

Le revenu en TA est 1,6 fois supérieur et les parts des actifs culture attelée et culture manuelle sont respectivement de 44.474 FCFA et de 30.842 FCFA. Dans les deux cas la rémunération de la journée de travail dépasse de loin le SMAG avec un écart de 74% en culture manuelle et de 182% en culture attelée. La production d'arachide est 1,4 fois plus chère en culture manuelle. La culture attelée est très intéressant pour la culture des arachides.

Tableau 11: Compte d'exploitation d'on hectare de niébé (FCFA)


Culture manuelle

Culture attelée

Rendement (kg ha-1)

485

504

Prix unitaire

175

175

Revenu monétaire brut

84875

88200

Charges variables

19060

18915

- consommation intermédiaire

10290

11330

- main-d'œuvre extérieure

8640

5430

- autres

130

2155

Charges fixes

4958

14309

Coûts totaux de production

24018

33224

Revenu net

60857

54976

Nombre moyen d'actifs

3,4

3,7

Revenu net par actif

17900

14858

Revenu net sans main d'œuvre extérieure

69497

60406

Nombre de journées par hectare

92

83

Rémunération d'une journée travaillée

755

728

Coût d'opportunité du travail familial

45908

41417

Prix de revient au kilo

126

137

Niébé

Les revenus monétaires paraissent identiques, du fait de la variabilité des rendements affectés par les attaques parasitaires. Les coûts de production de la TA sont 1,4 fois plus élevés et n'assurent qu'un revenu net 1,1 fois inférieur à celui de la culture manuelle. Les rémunérations de la journée de travail en culture manuelle dépassent le SMAG de 51%, mais seulement de 46% en culture attelée. Le prix à la production d'un kilo de niébé est 1,1 fois plus cher en culture attelée. Les marges bénéficiaires sont de 38 FCFA en culture attelée et de 49 FCFA en culture manuelle. La culture manuelle du niébé apparaît donc plus économique.

Tableau 12: Compte d'exploitation d'un hectare de sorgho (FCFA)


Culture manuelle

Culture attelée

Rendement (kg ha-1)

706

799

Prix unitaire

60

60

Revenu monétaire brut

42360

47940

Charges variables

16005

14865

- consommation intermédiaire

7235

7280

- main-d'œuvre extérieure

8640

5430

- autres

130

2155

Charges fixes

4958

14309

Coûts totaux de production

20963

29174

Revenu net

21397

18766

Nombre moyen d'actifs

3,4

3,7

Revenu net par actif

6293

5072

Revenu net sans main d'œuvre extérieure

30037

24196

Nombre de journées par hectare

88

92

Rémunération d'une journée travaillée

341

336

Coût d'opportunité du travail familial

43912

35928

Prix de revient au kilo

80

75

Sorgho

L'écart entre les rendements étant faible, les revenus monétaires bruts sont presque identiques. Les coûts de production sont 1,4 fois suppérieurs en culture attelée, avec un revenu net 1,1 fois inférieur à celui de la culture manuelle. La rémunération journalière, tout en étant plus importante en culture manuelle, n'atteint pas le niveau du SMAG dans les deux types de culture.

Valeurs des productions

Le revenu monétaire brut des activités culturales est 1,4 fois supérieur sur l'exploitation en TA. Ce résultat est le fruit de la facilité et de la rapidité des travaux, deux facteurs permettant la culture de superficies moyennes plus grandes.

Le sorgho est produit à perte sur toutes les exploitations avec des marges bénéficiaires négatives de -20 FCFA en culture manuelle et de 15 FCFA en culture attelée. Il est donc plus rentable d'être un ouvrier agricole que de cultiver du sorgho.

A partir des différents comptes d'exploitation ci-dessus et au vu des profits réalisés, les cultures de coton, de mats et d'arachide sont plus rentables en traction animale. L'inverse est observé pour les autres cultures.

Les opérations agricoles ne sont pas les seuls travaux des exploitations. Tous les exploitants font de l'élevage de volaille, d'ovins, de caprins; de la cueillete de karité et de néré (selon le milieu); de l'artisanat et du commerce. Les exploitants en culture attelée offrent en outre des prestations de service (labour, semis et transport). Les locations d'attelage contribuent fort heureusement aux revenus et sont même la source d'un fond de roulement sur quelques exploitations.

Le transport par charrette est une prestation négociée en fonction de la nature du produit transporté et de la distance. Par exemple, le transport d'un sac de charbon de bois sur une distance de 8 km coûte 150 FCFA. Les animaux peuvent transporter dix sacs par voyage. Une journée de deux voyages rapporterait donc 3.000 FCFA. Effectué à pied, ce même service coûterait le double avec un seul sac par voyage. Les différents travaux effectués par les animaux ont rapporté au cours de la deuxième campagne de la saison 644.850 FCFA, soit une moyenne de 29.311 FCFA bruts par exploitation.

Tableau 13: Valeur des productions par type d'exploitation

 

Prix d'achat FCFA

Culture manuelle

Culture attelée

Production (kg)

Valeur FCFA kg-1

Production (kg)

Valeur FCFA kg-1

Coton

105

858

90090

1674

175770

Maïs

60

1069

64140

2851

171060

Arachide

150

352

52800

544

81600

Sorgho

60

706

42360

719

43140

Niébé

175

291

50925

403

70525

Igname

40

6000

240000

5000

200000

Total

-

-

540315

-

742095

Tableau 14: Coûts à l'hectare des prestations de service

Types de travaux

FCFA ha-1

Tracteur bulldozer


Défrichage/essouchage

120000

Labour/hersage

18000 - 22000

Traction animale


Grattage

6000

Scarifiage

5000

Labour à plat

9000 - 13000

Billonnage

5000

Hersage

1500 - 2000

Sarclage

8000 - 10000

Buttage

6000 - 8000

Techniques manuelles


Défrichage/essouchage

12000 - 18000

Semis

2000 - 3000

Sarclage

7000 - 10000

Epandage d'engrais

2000 - 2500

Buttage (igname)

10 - 20 par butte

Compte d'exploitation

Les données exposées jusqu'ici permettent de faire la synthèse suivante au niveau de chaque exploitation. Par rapport à la culture manuelle, la culture attelée a entraîné une augmentation du revenu monétaire brut de 37% et occasionné des charges variables et fixes 1,2 fois et 3,6 fois plus importantes, respectivement. La traction animale a favorisé une augmentation de 33% du revenu monétaire avec des revenus nets d'exploitation de 534.329 FCFA (380.418 FCFA en culture manuelle). L'augmentation des revenus est de 40% lorsque l'exploitant offre des prestations de service à l'extérieur. Le revenu net annuel par actif a augmenté de 29% sur l'exploitation en culture attelée. De toute évidence, la traction animale entraîne une amélioration des conditions de vie.

Tableau 15: Compte d'exploitation par type d'exploitation (FCFA)

Produits

Culture manuelle

Culture attelée

Revenu monétaire brut (cultures)

540315

742095

Charges



Consommation intermédiaire

100872

118853

Main-d'œuvre salariée

37150

29320

Autres charges variables

560

11637

Total charges variables

138582

159810

Amortissements

7297

22090

Autres charges fixes

14018

55177

Total charges fixes

21315

77267

Revenu monétaire net

380418

505018

Autres revenus (location d'attelages)

-

29311

Revenu net d'exploitation

380418

534329

Conclusion

L'autosuffisance alimentaire et la production de surplus commercialisables passent nécessairement par la mécanisation des travaux agricoles. Le passage à la traction animale se heurte toutefois à un éventail de contraintes techniques et socio-économiques, qu'elles soient propres au milieu ou à la technologie elle-même. Dans l'ensemble, les résultats enregistrés en culture attelée sont plus satisfaisants que ceux obtenus par la culture manuelle. L'utilisation, même partielle, de la traction animale, augmentant les superficies cultivées, favorise l'intensification des cultures par l'utilisation d'engrais et de semences améliorées. L'extension des superficies cultivées est de 26%, soit une augmentation moyenne de 15% par actif Sur toutes les cultures, les rendements augmentent en moyenne de 29%: arachide 54%, mais 50%, coton 25%, sorgho 13%, niébé 4%; soit une production globale quasiment multipliée par deux.

Les attelages réduisent les temps nécessaires au labour, au sarclage et au buttage par un facteur de 2,4, 2,8 et 4,5 respectivement. La diminution de la pénibilité du travail permet une économie de 23% sur les temps de labour et d'entretien des cultures. La même analyse montre un accroissement de 15% des charges variables en TA, mais les charges variables unitaires de production sont plus élevées sur toutes les cultures en culture manuelle. Les investissements de la traction animale multiplient par 3,6 les charges fixes, alors que les charges globales augmentent de 48%. Le revenu net d'exploitation augmente de 40% et bénéficie en plus des apports des prestations de service. Le revenu net par actif augmente de 29%. Pour promouvoir le développement de cette technologie, des recommandations peuvent être proposées.

Recommandations sociales

La sensibilisation et l'information doivent amener le cultivateur à prendre conscience de la nécessité du développement agricole dont il est l'élément principal. L'intégration des cultivateurs aux structures de développement passe par la création, en dehors des groupements à caractères coopératifs, d'unités syndicales ou de comités villageois de consultation. Des stimulants moraux de nationalisme et de prestige social devront être créés sous la forme de titres officiels d'encouragement.

Recommandations techniques

· Amélioration des suivis techniques et sociaux par le biais d'un personnel plus nombreux et logistiquement mieux organisé.

· Amélioration de la coordination entre les organismes de financement des équipements et les secteurs de commercialisation des produits agricoles pour assurer de meilleures conditions de vente des produits, assurant ainsi un remboursement mieux garanti des prêts.

· Améliorer la formation technique et humaine des cadres.

Recommandations relatives au cultivateur

· Intensifier la formation technique d'utilisation des intrants et des équipements, du suivi sanitaire et de l'alimentation des animaux, et renforcer ainsi la rentabilité des attelages.

· Former à la préparation et à l'épandage du fumier organique d'origine animale et/ou végétale.

· Vulgariser et enseigner les techniques de production et de conservation des sous-produits agricoles destinés à l'alimentation des animaux de trait.

Recommandations économiques

La révision nécessaire de certains aspects financiers de l'adoption de la traction animale devra tenir compte des recommandations suivantes:

· l'équipement progressif des cultivateurs en matériel de traction éviterait des charges trop élevées pendant les premières années;

· l'organisation de la commercialisation des produits par la création de réseaux de vente privilégiés garantirait un plus haut niveau de sécurité aux producteurs;

· la stabilisation et le soutien des prix agricoles favoriseraient le développement de ce secteur. Il serait vain d'espérer développer la culture attelée si les cultivateurs ne peuvent vendre leurs produits à des prix leurs permettant d'amortir leurs équipements, de rembourser leurs emprunts et de réaliser un bénéfice;

· concernant les crédits, il serait souhaitable d'élargir à tous les projets le système d'assurance des boeufs de trait accordé aux projets financés par le FED en association avec le CNCA.

Abstract

The Project PROPTA, in association the University of Benin in Lomé, carried out a comparative study on animal traction and manual cultivation systems over a nine-month period. Following a one-month technical survey in the five regions of the country, the study concentrated on two zones. Data were obtained on farm labour, land, operating capital and revenues. These were analysed and comparative (manual versus animal traction) information obtained on farm sizes, output ratios, mean production levels, production costs, resident and external labour usage, operation timing task distribution, investment levels, variable and fixed costs and profit levels. Tables are presented on the comparative profitability of growing cotton, maize, groundnuts, cowpeas and sorghum using manual methods or animal traction Cotton, maize and groundnut cultivation appears more profitable in the farms using animal draft power, but manual techniques seem more profitable for cowpea and sorghum cultivation. Compared to manual techniques, animal traction increased fixed and variable costs by factors of 3.6 and 1.2 respectively, but animal traction also contributed to a 37% increase in gross cash revenue. Net revenues per hectare were calculated to be 534.329 FCFA for animal traction and 380.418 FCFA for manual cultivation, representing an increase of 33% in favour of animal traction. This increase reaches 40% if the animals are hired out. The annual net revenue per worker was calculated to be 29% higher on the farms using draft animals. It is concluded that animal traction technology not only contributes to higher profitability, but it also has a positive impact on the welfare of agricultural workers.


Previous Page Top of Page Next Page