par
Alioune Fall
Agro-machiniste, Institut Sénégalais de Recherches Agricoles (ISRA), Djibélor, Sénégal
Résumé
Cette communication présente la méthodologie utilisée par l'Equipe Systèmes de Djibélor/ISRA pour faire l'inventaire des équipements de traction animale en Basse Casamance. Cet outil de travail simple est basé sur des enquêtes exploratoires et formelles et peut être utile à d'autres organisations de développement rural. L'enquête exploratoire porte sur les matériels, types de traction, ressources, marchés, organisation de la production, systèmes et calendrier culturaux, types de cultures, et le rôle de l'élevage.
L'enquête formelle repose sur des fiches d'enquêtes analysées par ordinateur. Le succès de ce travail dépend de la clarté avec laquelle les objectifs sont présentés aux communautés rurales, de son calendrier, du choix des encadreurs interrogés et des connaissances des enquêteurs. Les données recueillies porteront sur l'état du matériel, les types, les origines, les modes d'acquisition, les ventes, et la gestion des matériels; le recensement des besoins, les modes de gestion et d'utilisation des équipements. L'enquête s'intéresse aussi aux activités des forgerons et aux besoins des fermiers en matière d'outillage aratoire. La diffusion peut être analysée chrono logiquement et/ou géographiquement. L'enquête disposera alors d'une quantification fiable des types de matériels mis en place dans une région et pendant une période donnée. D'après ces données, différents taux peuvent être calculés: taux d'utilisation réel, taux de réforme sur la base du dénombrement ou sur la base des durées de vie moyenne des équipements, taux d'équipement des exploitations. Ces taux débouchent sur une appréciation circonstanciée des besoins en investissement pour l'acquisition ou le renouvellement des matériels de culture attelée.
Ce type d'enquête permet de faire ressortir les aspects sociaux et infrastructuraux de la culture attelée et peut contribuer à orienter les politiques de crédit. Les enquêtes peuvent aussi guider les efforts qui transformeront les circuits commerciaux traditionnels en réseaux artisanaux opérationnels.
Introduction
Jusqu'en 1984, l'Equipe de Recherches sur les Systèmes de Production de Djibélor (Equipe Systèmes) a établi des fiches d'enquêtes et de suivi sur les systèmes de production de la Basse Casamance. Une reprise des enquêtes et leur approfondissement ont permis d'évaluer avec plus de précision divers aspects de la traction animale dans la région.
Nous présenterons ici la méthodologie de l'inventaire du parc de matériels agricoles (culture manuelle et attelée) et nous discuterons la pertinence des différentes variables utilisées pour les analyses ultérieures. Sur la base d'un échantillon bien identifié, nous espérons apporter aux organismes de développement rural un outil de travail simple pour le recensement et l'évaluation des besoins des paysans en matériels agricoles. Le présent document s'articule autour des points suivants:
· présentation de la méthodologie utilisée par l'Equipe Systèmes de Djibélor;
· discussion autour des variables utilisées dans la démarche;
· guide pratique pour des analyses simples et immédiates;
· conclusions et recommandations sur l'échantillonnage et les variables à utiliser.
Méthodologie
Base du sondage
La recherche bibliographique et les interviews menés auprès des autorités administratives représentent deux éléments essentiels de la collecte des informations sur les groupes ciblés. Les systèmes de crédit classique et les programmes agricoles nationaux servent à mettre en évidence la distribution des matériels agricoles. A ce stade de la démarche, le classement des villages suivant le découpage administratif est un bon point de départ: département, arrondissement, communauté rurale, etc. Par contre, les informations concernant les villages, leurs pratiques culturales, le programme agricole, l'ONCAD, sont plus facilement accessibles au niveau des communautés rurales. L'échantillonnage commence avec la stratification des villages en groupes, en fonction du niveau et des types d'équipements présents.
Le chef de village est la principale source d'information. L'objet de l'enquête doit lui être expliqué très clairement. Généralement, s'il est prévenu à temps de la visite, il convoque tous les chefs de quartiers qui sont une source directe d'information sur les exploitations: nombre d'exploitations par quartier, historique du village, etc. La communauté rurale ne tient pas à jour la liste de toutes les exploitations d'un village donné. En effet, les taxes rurales se paient individuellement et non pas par exploitation agricole. Les chefs de village enregistrent les déplacements des ménages au sein des grandes concessions et les créations de nouvelles unités de résidence. Ils sont souvent capables d'indiquer le nombre d'exploitations équipées dans le village. Ces données permettront un choix raisonné de la base de sondage (évaluation du taux d'équipement et suivi éventuel des exploitations).
Enquête exploratoire
L'enquête a mis en évidence deux zones à forte pénétration de la traction animale dans la partie septentrionale de la région, faisant frontière avec la Gambie au nord et avec la Moyenne Casamance à l'est. Ouverte et sans questionnaire, l'enquête était axée sur les points suivants:
· types de matériels agricoles existants dans le village et ses environs;
· types de traction utilisés;
· sources d'approvisionnement en matériels agricoles et en animaux de trait;
· rôles du forgeron villageois et relations forgerons-paysans;
· systèmes de culture et calendrier cultural;
· importance relative des cultures et place de l'élevage dans les activités agricoles.
L'enquête exploratoire s'effectue bien avant la période culturale, lorsque les paysans sont disponibles. Les résultats obtenus servent à la préparation des fiches d'enquête de la phase formelle.
Enquête formelle
Cette enquête se base sur un questionnaire garantissant une collecte de données fiables et quantifiables. Outre les acquis de l'enquête exploratoire, il faudra nécessairement tenir compte de certains facteurs pour donner aux fiches d'enquête leur forme finale:
· quantité et nature des informations disponibles auprès des autorités administratives, organismes de développement rural et structures de recherches;· ressources et moyens disponibles pour la collecte des données;
· contraintes de temps affectant l'enquête.
Si la période de collecte des données devait coïncider avec la campagne agricole, une bonne connaissance préalable du calendrier cultural des paysans est vivement souhaitée. Il faudra aussi tenir compte des jours de repos (vendredi dans les zones islamisées) et éviter les périodes de pointe (préparation du sol, par exemple). Pour assurer une fiabilité maximale des données, il est préférable de ne pas interroger les paysans lorsqu'ils sont surchargés de travail ou lorsqu'ils sont fatigués.
Les enquêtes formelles ont été effectuées dans les villages de Médieg et Boulandor en "zone 4", et de Suel et Bandjikaki en "zone 5" (voir Carte 2 de l'autre communication de l'auteur sur la diffusion des équipements). Ces quatre villages suivis par l'Equipe Systèmes de Djibélor sont assez représentatifs des situations agricoles du nord de la Basse Casamance. Chacun de ces villages dispose d'un enquêteur résident qui a servi de guide et d'interprète pendant toute la durée des enquêtes. En fonction du temps disponible, le nombre d'exploitations enquêtées a largement varié d'une zone à l'autre. Entre 79% et 92% des concessions de Médieg et Boulandor ont été enquêtées. Du fait des contraintes de temps et de la disponibilité des paysans à Suel et Bandjikaki, elle n'a porté que sur les exploitations suivies par l'Equipe Systèmes, soit 21% et 44% respectivement.
L'unité d'observation de base est l'exploitation agricole et dans quelques cas, l'unité de travail. Précisons que certains chefs de ménage ne veulent pas se prononcer sans la présence ou l'avis du chef de concession, qui détient souvent le pouvoir de décision. Une bonne connaissance de l'organisation de l'habitat et de la production minimisera les erreurs et les pertes de temps. Il est possible en effet de recenser plusieurs fois les mêmes matériels utilisés par différents exploitants.
Pour ce type d'enquête, l'interlocuteur de préférence est le chef de concession ou le chef d'exploitation. Deux cas peuvent se présenter:
· le chef d'exploitation exerce des activités agricoles;
· le chef d'exploitation s'occupe d'autres activités (élevage, forge, etc.).
Dans le cas où il n'exerce pas d'activités agricoles, la présence du chef des travaux, qui connaît mieux les conditions d'utilisation du matériel, devient alors nécessaire. Il est très important d'expliquer clairement les objectifs visés par l'enquête avant de commencer toute collecte de données. L'enquêteur doit avoir une très bonne connaissance des équipements existants dans la zone de l'étude. Au cours des discussions, il doit aussi orienter les investigations pour toucher des points précis, ne figurant pas sur le questionnaire, tels que les conditions et les techniques d'utilisation des équipements.
Collecte des données
Des fiches d'enquêtes servent à recueillir les informations. Pour une collecte rapide et un dépouillement ultérieur et informatisé, il faudra mettre au point une classification codée pour identifier les différentes rubriques sur la fiche. Le système de codification proposé par John Dixton (agro-économiste) dans "Farmap: Farm Analysis Package - User's manual Part I", offre une bonne flexibilité, sur la base de trois groupes codés:
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700-B (AP): |
animaux de trait |
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700-B (MP): |
matériels tractés |
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700-B (E): |
équipements |
Les différents types de matériels sont alors classés comme suit:
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5000-5099: |
animaux de trait |
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5400-5499: |
animaux de trait |
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6800-6899: |
matériels de transport |
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7000-7999: |
matériels de culture attelée |
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8000-8999: |
outils manuels. |
Chaque matériel est recensé individuellement sur la fiche. Une attention particulière est accordée aux multiculteurs. En effet, leurs différentes pièces sont destinées à différentes opérations culturales. Il ne faudrait pas commettre l'erreur de recenser le matériel en fonction de son mode d'utilisation.
Le questionnaire peut être divisé en quatre grandes parties:
Inventaire du matériel de l'exploitation
Cet inventaire concerne les outils manuels, le matériel de culture attelée, les équipements ou pièces travaillantes et le matériel de transport. Le statut de chaque matériel (acquisition et gestion) doit être clairement indiqué sur la fiche. Le but de cet inventaire est de recenser tous les matériels ayant une quelconque incidence sur la production agricole (mode d'exécution des différentes opérations culturales) et son maniement (transport de la récolte, de la paille), aucun outil n'est négligé.
Etat du matériel
C'est la partie la plus délicate et la plus importante de l'enquête. Cette évaluation demande une bonne connaissance des pièces d'usure et des coûts de réparation de la part de l'enquêteur qui doit déterminer si le matériel est utilisable ou réformable. L'intérêt de cette évaluation réside dans la caractérisation du parc de matériels agricoles, d'une manière générale, et dans l'estimation du taux de renouvellement des équipements vétustes en relation avec le niveau de technicité des forgerons villageois.
Contraintes d'utilisation et de développement
Les problèmes d'encadrement et de formation des paysans, d'approvisionnement en matériels agricoles et en pièces détachées, de maintenance et de renouvellement du parc de matériels sont posés:
· Pourquoi les paysans utilisent-ils le matériel jusqu'à leur usure totale?
· Qu'en est-il vraiment des relations forgerons - paysans?
· Pourquoi la demande en matériels est-elle croissante?
Autant de questions qui doivent déboucher sur la compréhension des stratégies d'utilisation et de gestion des différents matériels agricoles au niveau aussi bien des parcelles que de l'exploitation agricole. L'étude et la connaissance de cet environnement expliqueront d'une manière précise l'état du parc de matériels agricoles.
Activités du forgeron
La place du forgeron dans le milieu est mise en évidence par l'examen de ses relations avec les paysans et de ses problèmes de formation et d'approvisionnement en matières premières:
· Forge-t-il à plein temps?
· Dispose-t-il de moyens adéquats pour assurer la maintenance du parc?
· Quel est son niveau de formation?
· Comment s'approvisionne-t-il en matières premières de bonne qualité?
Les réponses aux questions de ce type cernent avec précision la capacité de maintenance du forgeron villageois. Elles peuvent déboucher sur une demande de formation complémentaire visant à améliorer la qualité des prestations.
Variables
Outils manuels
Les outils manuels doivent être recensés avec précision. Leur quantité fait ressortir très nettement leur rôle et aide à mieux définir le mode de production. Le sexe de l'utilisateur et la durée de vie de la lame (pièce travaillante) sont deux variables qui renseignent sur le taux et la fréquence d'utilisation de chaque outil.
Matériels de traction animale
Type de matériel et d'équipement
L'inventaire demande une identification complète de tous les types de matériels présents dans le milieu. D'une manière générale, les paysans connaissent les types de matériels adaptés à leurs besoins, leurs objectifs et leurs ressources. Les pièces travaillantes qui équipent un matériel donné (cas des polyculteurs) serviront à caractériser les types de travaux mécanisés effectués sur les parcelles. C'est ainsi qu'un billonnage effectué à la charrue se distingue de celui réalisé au butteur-billonneur. En effet, si le résultat obtenu à la charrue est une raie (technique paysanne courante), le butteur, par contre, exécute un ados parfait. Les différences entre les techniques se notent au niveau de la consistance du billon, par la qualité du travail et par la distance inter-billon, et donc par la densité du semis (nombre de plants par hectare) pour une même spéculation.
Mode de traction
En général différents matériels travaillants dans les mêmes conditions ne demandent pas les mêmes efforts de traction. Par ailleurs, la conception des matériels de transport est révélatrice d'un type de traction bien particulier: timons, harnais, joug, etc. Un inventaire des animaux de trait précisera l'analyse de l'adéquation matériels-animaux de trait pour la constitution d'attelages performants.
Sources d'approvisionnement en matériel
L'accent est mis sur la diversité des sources d'approvisionnement et sur la qualité de fabrication des différents types de matériels recensés dans la zone. Le matériel provient pour une grande part de fabricants industriels locaux (SISCOMA/SISMAR) ou de l'extérieur (Gambie). C'est ainsi que la percée du butteur-billonneur gambien suivant l'axe Brikama (Gambie) - Suel-Sindian, sera liée à la suppression du programme agricole, à la qualité de la fabrication et aux performances techniques du matériel importé.
Acquisition des matériels
Il est important de connaître les différents flux de matériels entre les exploitations agricoles et la dynamique de l'adoption de la technologie. A partir des dates et des modes d'acquisition, il est facile d'obtenir le nombre d'années d'expérience de l'exploitant et ses sources d'approvisionnement (achat, héritage, don, etc.).
Vente de matériels
Les paysans s'attachent très vite à leurs matériels et s'en séparent avec difficulté. Le taux de matériels vendus pourrait correspondre dans une certaine mesure au taux de renouvellement du parc de matériel existant, mais l'inexistence de marché rend quasiment nu le flux de matériels entre les exploitations.
Gestion du parc de matériels
Le mode d'acquisition détermine grandement le mode de gestion du parc de matériels agricoles. La structure de l'exploitation explique dans une grande mesure les problèmes de gestion et les contraintes liées à l'utilisation du matériel. Les équipements de culture attelée connaissent un mode de gestion différent de celui des outils manuels. Si ces derniers sont acquis et entretenus individuellement par le personnel de la ferme, les équipements mécanisés sont gérés par un responsable des travaux qui décide de l'organisation des opérations suivant le calendrier cultural. Il existe souvent des liens de parenté entre les utilisateurs qui rendent complexes, à un certain niveau, la gestion et l'affectation du matériel à telle ou telle parcelle ou exploitation dans le cas des unités de travail dispersées par l'organisation de l'habitat dans le village.
Etat du matériel
Pour plus de clarté, le parc peut être réparti en trois catégories de matériels:
· le matériel fonctionnel et utilisé, en bon état ou en état moyen à médiocre, appartenant au parc des équipements réellement en service.· le matériel fonctionnel et non utilisé est symptomatique des contraintes, surtout techniques, liées à l'adoption de cette technologie, et relatives à l'inadéquation des équipements aux moyens de traction ou aux techniques culturales par exemple.
· le matériel non fonctionnel, qu'il soit réformé ou en panne, met en évidence la carence des circuits de maintenance (s'ils existent): absence de pièces de rechange, connaissances techniques lacunaires des forgerons, etc.
Environnement du matériel agricole
Le niveau de connaissance des utilisateurs (formés ou non), les circuits de maintenance et d'approvisionnement forment ce que nous appelons l'environnement du matériel. Notre approche vise surtout à évaluer les actions et les efforts de développement régionaux (vulgarisation information, formation, etc.) et l'impact des structures institutionnelles mises en place dans le cadre de la politique agricole (système de crédit, sources d'approvisionnement en facteurs de production, etc.).
Recensement des besoins
Les demandes de matériels agricoles formulées par les paysans constituent un bon indicateur de l'impact de la technologie et de son niveau d'adoption ou de diffusion. Elles servent aussi de base à l'appréciation des difficultés rencontrées par les paysans lors de l'acquisition de nouveaux matériels ou du renouvellement des équipements existants.
Activités des forgerons
L'importance des forgerons appelle évidemment une étude séparée. Dans le cadre de cette étude, ils représentent une pièce maîtresse des circuits de maintenance. Leur niveau technique explique dans une large mesure l'état du parc actuel. Ils jouent un rôle fondamental pour le transfert et la stabilité de la technologie adoptée. Il est donc essentiel de bien percevoir leurs activités, aussi dans les relations avec les agriculteurs, l'activité de la forge, le niveau de formation, les outils utilisés (inventaire), les problèmes d'approvisionnement en matières premières, etc.
Analyse
Diffusions
Deux types de diffusion se dégagent: chronologique et géographique.
La diffusion chronologique (rétrospection) permet de déterminer dans une zone donnée les périodes d'introduction et de mise en place de la traction animale. Sur la base des dates d'acquisition, la représentation graphique par courbe cumulée montre l'évolution et la dynamique du transfert de technologie dans les exploitations.
La diffusion géographique fait souvent ressortir l'existence de zones homogènes d'utilisation des outils et des pratiques culturales. C'est à ce niveau que l'analyse du mode de gestion et d'utilisation du matériel devient très pertinente. Elle fait ressortir les contraintes techniques relatives aux différents types de matériels et les problèmes de maintenance les plus fréquents.
Parc en service
Dans un premier temps, l'analyse de l'introduction et de la diffusion a permis de quantifier les types de matériels mis en place dans la région au cours d'une période donnée. Par ailleurs, les recherches sur le parc des matériels apportent des informations sur la fiabilité, l'inadaptabilité des équipements et les préférences des paysans. Le taux de matériels en service implique l'analyse des différentes situations concernant leur environnement et leur utilisation. Le parc des matériels utilisés inclut tous les équipements fonctionnels et réellement utilisés. Les matériels en bon état, mais inutilisés ne sont pas comptabilisés. Cette méthode permet de mieux discerner les préférences des paysans. Les équipements opérationnels sont classés en trois catégories distinctes: bon, moyen et mauvais état. Le matériel réformable encore utilisé entre dans la troisième catégorie (bâtis usés, cassés, réparations onéreuses). Le taux d'utilisation réel d'un type de matériel à l'année N peut être calculé avec la formule suivante:
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Tut |
le taux d'utilisation. |
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Mut |
le nombre de matériels utilisés à l'année N. |
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Mc |
le placement cumulé du type de matériel jusqu'à l'année N. |
Parc de matériels réformables
Deux méthodes peuvent servir au recensement du parc. Soit en dénombrant les matériels en mauvais état et les équipements réformés ou par estimation de la durée de vie moyenne des équipements.
L'inventaire doit comptabiliser les matériels en mauvais état et ceux qui sont techniquement ou économiquement irréparables. Le taux de réforme peut ainsi être calculé comme suit:
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Trf |
le taux de réforme. |
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Mme |
le nombre de matériels en mauvais état. |
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Mirr |
les matériels irréparables. |
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Mc |
le placement cumulé du type de matériel jusqu'à l'année N. |
L'estimation de la durée de vie moyenne des équipements doit tenir compte des conditions réelles d'utilisation. Les dates d'acquisition et de sortie sont alors nécessaires pour suivre l'évolution dynamique de leur utilisation. Les durées de vie portent sur du matériel réellement réformé. Cette méthode fait donc une estimation par défaut avec la formule suivante:
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Trf |
le taux de réforme. |
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(MN - DV) |
le nombre de matériels placés jusqu'à l'année (N - DV). |
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DV |
la durée de vie. |
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Mc |
le placement cumulé du type de matériel jusqu'à l'année N. |
L'état du parc et le taux de matériels réformables sont largement tributaires de la qualité des circuits de maintenance et du niveau de technicité des forgerons. Leur recensement doit permettre leur localisation cartographique et leur classement en différents niveaux de maintenance, débouchant sur la réalisation d'un réseau opérationnel.
Taux d'équipement
Nous retiendrons ici deux coefficients importants: le dénombrement des matériels par type dans chaque exploitation et pour chaque unité de surface. Le nombre de matériels par unité de surface doit être comparé aux normes d'équipement de la zone d'étude. Cette comparaison donne une meilleure compréhension du taux d'utilisation et de l'état du matériel, tout en permettant une estimation plus précise des besoins des paysans.
Le premier taux met en évidence la typologie technique des exploitations et fait ressortir la division équipées - non équipées (exploitations en culture attelée ou en culture manuelle). Cette classification explique les différences de comportement entre les paysans d'un même système de production. En plus du taux d'équipement, le niveau d'équipement, significatif de la tendance à la constitution de chaînes complètes, implique des analyses pertinentes de corrélation entre le niveau d'équipement et le nombre d'actifs d'une part, et les surfaces cultivées d'autre part.
Aspects économiques
Le taux de matériels réformables (durée de vie dans le milieu) et le recensement des besoins doivent être le point de départ de toute analyse économique visant à dégager une masse de crédit ou d'investissement pour la maintenance ou le renouvellement du parc actuel. L'évaluation des intrants et des performances est largement tributaire de l'analyse économique de l'investissement en matériel agricole (Systèmes Djibélor, 1986). Pour cela, il faudra cerner les avantages et les inconvénients de la culture attelée en analysant un certain nombre de cas "tranchés" (Le Moigne, 1985; Ndiamé, 1986):
· exploitation de culture attelée prospère (équipements importants, main-d'uvre).
· exploitation limitée dans ses moyens de production.
· exploitation en culture manuelle.
En plus de ces aspects de l'adoption de la technologie, la connaissance des normes d'équipements, même sur des modèles mathématiques (comparaison du nécessaire et du disponible pour une surface donnée) pourrait affiner l'évaluation des besoins en investissement. Par ailleurs, la discussion serait incomplète sans une analyse de la filière maintenance approvisionnement en matériel agricole. La compréhension du fonctionnement du réseau devrait permettre d'évaluer les moyens complémentaires nécessaires à la transformation des circuits traditionnels en un réseau artisanal opérationnel.
Conclusions
Le sondage d'opinion' l'administration de fiches d'enquêtes sont des outils méthodologiques puissants pour comprendre le monde rural et recenser avec précision les besoins des paysans en intrants agricoles. L'enquête sur le matériel agricole doit être perçue comme un outil d'analyse de l'état et du fonctionnement du parc dont les résultats serviront à orienter la politique de crédit des intrants.
Atteindre cet objectif demande avant tout un inventaire complet de tous les matériels présents dans l'échantillon, pour déboucher sur une quantification précise et une étude rétrospective dynamique. La collecte des données (dates d'acquisition, de sortie) permet de déterminer la durée de vie des équipements qui est un facteur important de l'évaluation du parc en service et du parc réformable. La connaissance de ces éléments est indispensable à l'évaluation du volume de financement à injecter dans le milieu pour équiper les exploitations ou renouveler le matériel. En plus d'expliquer l'état du parc, les modes de gestion et d'utilisation mettent en évidence les différences de comportement des paysans dans l'exécution des opérations culturales. Les différences de stratégies entre exploitations en culture attelée et exploitations en culture manuelle sont significatives du rôle du matériel agricole sur le plan social et dans le processus de production. Développer un outil rapide et efficace de diagnostic a le double avantage d'économiser temps et moyens.
Abstract
This paper presents the methodology used by the ISRA farming systems research team based in Djibélor to obtain an inventory of animal traction equipment in Basse Casamance, Senegal. The methodology is a simple research tool involving exploratory and formal surveys that may be of value to other development organizations. The exploratory surveys collect information on equipment, traction methods, resources, markets, organization of production, cultural systems and calendars, cultivation types and the role of animal husbandry. The formal survey relies on computer processing of surrey notes. Its success depends on the clarity with which its objectives are presented to the rural communities, on its timeliness, on the choice of surveyed personnel and on the field knowledge of the interviewers. The survey relating to equipment obtains information on the condition, types, origins, method of acquisition, sales, management and usage of implements. Information is also collected on blacksmith activity and the perceived needs of farmers in relation to implements. The development of animal traction can be monitored chronologically and/or geographically to give a quantified assessment of equipment introduction in an area over a given period of time. These data can then be used to calculate significant indices including "real usage ratio"; "scrap ratio" (through counts or by estimating average implement life) and "farm equipment ratios". These ratios help to identify investment needs for equipment purchases and replacements. Surveys can highlight social and infrastructural aspects of animal traction and assist the development of credit policies. They may also help in transforming traditional trading processes into operational small-scale pro auction networks.
Références
Le Moigne M. 1985. Mission d'appui au programme machinisme en Casamance, Sénégal, 12-22 mai 1985. Centre d'Etudes et d'Expérimentation du Machinisme Agricole Tropical (CEEMAT), Antony, France. (non publié). (F).
Ndiamé F. 19°6. Aspects économiques de l'utilisation de la traction bovine et de sa promotion par le biais du crédit spécial du PIDAC pour le matériel agricole: étude préliminaire dans la région de Ziguinchor. Mémoire de confirmation. Institut Sénégalais de Recherches Agricoles (ISRA), Dakar, Sénégal. (non publié). 142p. (F).
Systèmes Djibélor 1986. Recherches sur les systèmes de production en Basse-Casamance. Rapport annuel d'activité n° 4: campagne agricole 1985/86. Equipe Systèmes de Djibélor. Départements Systèmes, Institut Sénégalais de Recherches Agricoles (ISRA), Dakar, Sénégal. (F). 82p. (F).