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4. SITUATION DE L'AQUACULTURE COTIERE DANS LA REGION DE LA MER NOIRE

Dans les trois pays visités par la mission, l'aquaculture côtière en est à ses premiers pas et ne fait pas l'objet d'une exploitation commerciale. Le travail expérimental a fait certains progrès. Des chercheurs bulgares ont fait des études de mytiliculture, qui devraient favoriser le développement rapide d'une industrie viable dans ce secteur. De leur côté, des biologistes roumains ont obtenu de bons résultats en matière de recherche sur l'élevage du muge, mais il reste encore de nombreuses questions à résoudre. La Bulgarie et la Roumanie ont toutes deux des industries bien développées d'aquaculture en eau douce, qui ont des retombées sur le développement de cette activité dans les régions côtières. On a pu noter par exemple, qu'en Bulgarie on cultive en eau de mer des truites produites dans des écloseries d'eau douce et que, en Roumanie, on est en train de construire une écloserie pour esturgeons. Les trois pays ont effectué des études et prospecté les régions qui se prêtent à l'élevage de différentes espèces.

4.1 Situation de l'aquaculture en Bulgarie

La pisciculture est un domaine d'activité relativement nouveau dans le pays, essentiellement axé sur la production de la carpe commune et autres cyprinidés, ainsi que de la truite arc-en-ciel. Voilà plus de dix ans, des expériences ont été entreprises concernant la culture de carpes chinoises introduites (carpe herbivore, carpe argentée et carpe à grosse tête) et des résultats encourageants ont été obtenus en matière de polyculture de carpes avec alimentation intensive. La production de truite se développe rapidement: à la fin de 1979, la production escomptée devrait être de 1 000 t, soit deux fois plus qu'en 1978. Toutefois, par suite d'un manque d'aliments appropriés, l'expansion n'a pas suivi le rythme de la demande. Il existe maintenant 400 ha d'étangs en béton et 14 écloseries ont été créées pour faire face à la demande d'alevins et de frai. Il existe 6 ha de cages flottantes en filets dans un lac d'eau douce, superficie qui devrait passer à 9 ha d'ici la fin de 1979. Des progrès considérables ont été accomplis en ce qui concerne la production d'algues monocellulaires Chlorella sp., destinée en majeure partie à l'exportation. De petites quantités sont utilisées sur une échelle expérimentale pour préparer des aliments en granulés (1–2 pour cent de Chlorella) pour la truite et la carpe.

Les ressources en eau du pays ont été et sont mises en valeur par des entreprises d'Etat, des coopératives de pisciculture et l'organisme de la pêche sportive. Les entreprises d'Etat exploitent la majorité des lacs artificiels et des lagunes littorales de la mer Noire, tandis que les coopératives de pisciculture utilisent les plans d'eau disponibles sur les exploitations agricoles coopératives. Le poisson produit par les coopératives de pisciculture est acheté par l'Etat qui en assure la distribution et les exploitations reçoivent une assistance technique (par exemple, prévention et lutte contre les maladies, alimentation etc.) de l'Office des pêches d'Etat.

Des crédits peuvent être obtenus de la Banque d'Etat pour de nouvelles entreprises si les projets présentés sont approuvés par le ministère compétent. Un projet est considéré comme viable si l'on peut démontrer qu'il sera rentable avant dix ans. L'aquaculture côtière ne s'est pas encore développée dans le pays et ce n'est que maintenant que l'on commence à étudier des plans d'expansion des activités aquicoles dans les eaux saumâtres et marines. Le gouvernement s'efforce de mettre en place l'infrastructure nécessaire à la création d'une mariculture. Il est envisagé de développer une activité scientifique fondamentale parallèlement aux opérations commerciales, et le gouvernement est prêt à assumer les risques éventuels. Des essais ont été commencés en vue d'élever en mer des truites placées dans des cages en filets, et des moules sur des cordes suspendues. Cette seconde expérience a donné des résultats particulièrement encourageants. On s'est penché naguère sur la culture des algues marines, mais les résultats des premières expériences en laboratoire n'ont pas été transposés sur le plan commercial. A l'heure actuelle, les algues sauvages récoltées sont utilisées pour fabriquer des alginates.

La Bulgarie manque de travailleurs, aussi sa politique de développement vise à produire des aliments et non à créer des emplois. Le gouvernement s'intéresse particulièrement à la création de systèmes d'aquaculture intensifs à haut rendement.

4.1.1 Institutions

Le Ministère de l'agriculture, qui a la responsabilité générale d'administrer les pêches en Bulgarie, est aidé, en ce qui concerne l'élaboration des politiques, par un Office économique d'Etat pour les pêches (Ribno Stopanstvo), qui a sous son autorité trois instituts et plusieurs entreprises.

La gestion des pêches est placée sous la direction du Vice-directeur général de l'Office économique d'Etat, Dr. V. Popov.

Les programmes ordinaires de ces instituts sont financés par des subventions du ministère. Le Comité d'Etat pour la science, la technologie et le développement (Comité d'Etat pour les sciences) subventionne des programmes particulièrement importants.

Tous les instituts des pêches ont des arrangements pour travailler en collaboration avec d'autres instituts travaillant dans des domaines connexes à travers tout le pays, et en particulier avec le Centre de biologie de l'Académie des sciences bulgare pour ce qui concerne la pollution des eaux et la production primaire, et avec le Centre de cibernétique de l'Académie des sciences bulgare pour ce qui concerne l'électronique sous-marine.

L'Office économique d'Etat pour les pêches coiffe également l'Entreprise de pisciculture en eau douce et d'aquaculture marine. Cette entreprise exploite des écloseries pour poissons d'eau douce et fera de l'aquaculture commerciale en eau de mer.

L'Entreprise des chantiers de réparation des bateaux devrait être en mesure d'apporter un soutien à la conception et à la construction des installations d'aquaculture.

4.1.2 Systèmes de production

Il n'existe à l'heure actuelle aucun système de production dans les eaux côtières. Le littoral est exposé à des vents du nord et du nord-est et bien qu'il existe un certain nombre de petites baies protégées - certaines ont été mises en valeur à des fins touristiques - la côte est surtout rocheuse et abrupte. Etant donné le nombre limité d'emplacements appropriés, il est nécessaire de mettre au point des systèmes et types de construction capables de supporter une forte action des vagues.

Le nombre de lagunes et lacs côtiers est aussi relativement restreient. Ceux qui se trouvent à proximité de Burgas et de Varna étaient autrefois productifs et ont cessé de l'être à la suite du développement industriel. La production de ces systèmes lacustres et lagunaires consistait ou consiste essentiellement en muges d'espèces diverses (Mugil cephalus, M. auratus et M. saliens) qui, en raison des températures élevées de l'eau pendant les mois d'été, ont de bons taux de croissance. Toutefois, comme les lagunes sont peu profondes, les muges ne survivent pas au froid de l'hiver.

Les alevins de muges semblent être assez abondants le long de la côte. On enregistre deux pointes d'abondance, une mineure au printemps et une majeure à l'automne. La distribution ou l'empoissonnement en alevins de muges a lieu quand les réseaux lacustres/lagunaires sont fermés à la mer Noire. Les alevins qui survivent aux basses températures hivernales présentent de bons taux de croissance. Les alevins de M. auratus et M. saliens déversés à 0,5 g à la fin de l'été atteignent des poids de 150 à 200 g, et M. cephalus atteint 500–700 g pendant la même période.

4.1.3 Plans de développement de l'aquaculture

Etant donné les difficultés que rencontre la flottille océanique et la demande croissante, tant intérieure que saisonnière et touristique, de produits de la pêche, le gouvernement envisage d'accroître la production en encourageant les activités aquicoles et en développant la flottille de la mer Noire. D'après les plans établis, les pêcheries d'eau douce devraient d'ici 1985–90 produire 30 000 t, contre 10 000 t à l'heure actuelle; les pêcheries de la mer Noire devraient produire 20 000 t au lieu de 12 000, et la mariculture 10 000 t, la production actuelle étant insignifiante.

Pour atteindre les taux de production envisagés pour l'aquaculture, on a cherché surtout à développer l'élevage des espèces d'eau douce (carpes et truite arc-en-ciel) ainsi que l'aquaculture côtière (à savoir pisciculture dans les lagunes côtières, mytiliculture et culture en cages de la truite arc-en-ciel en eau de mer). Si l'on ne prévoit pas de grandes difficultés en ce qui concerne l'expansion du secteur de la pisciculture en eau douce, un certain nombre de contraintes ont par contre été identifiées en ce qui concerne la mise en oeuvre du programme de développement de l'aquaculture côtière, notamment des projets relatifs à la truite et à la moule. C'est pourquoi priorité a été accordée à l'exploitation de la lagune côtière de 500 ha (située près de Pomorie, à 25 km environ au nord-est de Burgas, tout d'abord pour l'élevage des muges et ultérieurement de bars (Dicentrarchus labrax) et de plusieurs espèces de poissons plats (turbot, flet (Platichthys flesus luscus) et sole (Solea sp.)). Des plans ont été établis en vue de créer une écloserie et installations annexes près de Pomorie, mais la construction n'est pas encore commencée. La production escomptée de muges d'élevage dans le lac devrait être de l'ordre de 150 à 250 tonnes.

Parallèlement, des efforts ont été déployés en vue d'identifier le long de la côte des emplacements appropriés pour l'élevage en cage de la truite, l'élevage en étang de bars et de muges, et la mytiliculture, soit au sud-est de Burgas soit au nord-est de Varna. La plupart des emplacements reconnus ont été visités par la mission, dont les observations sont contenues dans la section 4.1.4.

Des plans de développement ultérieurs prévoient l'introduction et l'élevage de crevettes penaeidae, deux experts étrangers ayant exprimé leur intérêt pour cet élevage dans les lagunes côtières bulgares; le développement de l'ostréiculture; et éventuellement l'élevage du saumon dans certaines rivières, avec des alevins provenant d'URSS. La possibilité de transplanter une espèce de muge (Mugil soyenni) dans la mer Noire, en raison de sa résistance aux basses températures, a été envisagée, l'URSS fournissant une assistance technique à ce programme.

4.1.4 Emplacements se prêtant à l'aquaculture côtière

Cernomerc - Cet emplacement, situé sur un promontoire bas et rocheux, avec un sol relativement plat à un niveau de 10 à 15 m, a été identifié en vue de la construction d'une petite installation d'alevinage pour des truites arc-en-ciel juvéniles, avant leur transfert et leur élevage en cages de filets, à l'abri d'une île située au nord de Sozopol. Comme le site est à une certaine hauteur par rapport au niveau de la mer, les frais de pompage seraient considérables. En outre, les coûts de construction de réservoirs en béton sur le terrain rocheux seraient appréciables.

Sozopol - Le site réel, à l'abri d'une petite île, qui a déjà servi à des essais de trutticulture en cages flottantes en filets n'a été aperçu que de loin. Il semble que la zone protégée des vents nord-nord-est soit eu étendue et ne puisse pas recevoir un nombre important d'unités de pisciculture.

Gagarine - Une petite unité expérimentale de mytiliculture a été mise en place sur le côté nord d'une petite baie qui est partiellement protégée des vents du nord. La superficie disponible pour la pisciculture semble être d'environ 1 ha. La rive est nue, ce qui indique par moments une importante action des vagues, provoquées par des vents d'est ou de sud. Sur le côté sud de la baie, il existe un camping qui pourrait provoquer des interférences de la part des touristes.

Alépou - Une zone marécageuse de 200 ha, médiocrement reliée à la mer Noire, a été choisie pour le développement de l'aquaculture. La zone semble convenir aux besoins de l'aquaculture: elle peut être soit divisée en étangs soit utilisée comme pêcherie lagunaire si on la remplit d'eau de mer par pompage et si l'on installe une vanne de commande sur le canal de sortie. Fin septembre, le secteur était partiellement rempli d'eau douce, mais il semble qu'il n'y ait qu'un débit limité d'eau douce.

Primorsko - Une vaste zone de marécages et de basses terres drainées située près de l'estuaire de la rivière Djarolska a été reconnue comme pouvant convenir à l'élevage en étangs de muges ou d'autres espèces d'eau douce-saumâtre. A cet endroit, la rivière est saumâtre. Le plan prévoit le forage de puits d'eau douce, de sorte que l'emplacement serait approvisionné tant en eau douce qu'en eau saumâtre.

Kiten - On a étudié la possibilité d'utiliser la zone de l'estuaire de la rivière Karachay, située à 1 km environ au sud de Kiten, en raison de la présence d'anguilles et de l'abondance de muges, ainsi que les vastes marécages et basses terres en amont. Il a été constaté que, si l'eau de la rivière semble avoir une forte densité de phytoplancton, la communication avec la mer est limitée par la formation d'un cordon de sable.

Tous les sites côtiers susmentionnés sont situés entre Burgas et Micurin, sur la côte sud-est de la Bulgarie.

Cap Kaliakra - Les hautes falaises du cap Kaliakra, à 90 km environ à nord-est de Varna, protègent des vents du nord et d'est un vaste plan d'eau qui reste cependant exposé à l'action des vagues venant du sud. Cet emplacement a été reconnu comme convenant à la mytiliculture, et des essais sur palangres sont actuellement en cours. Le rivage, ainsi que les rochers situés au-dessus du niveau de l'eau, portent un abondant manteau d'algues submergées, ce qui indique l'absence d'agitation fréquente due aux vagues. L'eau a une bonne couleur, signe d'une productivité élevée; les salissures sont importantes. Le fond de la mer, à dix mètres de profondeur, est plat et boueux. L'actuelle installation de mytiliculture est surveillée par une coopérative de pêcheurs, soutenue en ce qui concerne cette activité par l'Institut des pêches de Varna qui a entrepris les études et qui est responsable de l'ensemble du projet. La coopérative exploite dans le voisinage un barrage de pêche et de filets fixes, et s'intéresse beaucoup au développement de l'aquaculture. Outre les installations à terre, alimentées en électricité, la coopérative possède un certain nombre de bateaux pour ses activités de pêche. Un bon réseau routier relie le site aux villes avoisinantes.

La zone protégée est assez étendue et, sous réserve de la mise en place d'un système satisfaisant d'élevage et de récolte, une importante industrie myticole pourrait s'établir dans la région. La mission recommande également l'installation de cages en filets dans cette région pour un élevage expérimental de truites.

Lagune de Pomorié - La lagune de 500 ha, peu profonde, située à 25 km environ au nord-est de Burgas, est reliée à la mer à son extrémité sud par un long chenal étroit, dont le lit est au-dessus du niveau de la mer. La lagune se remplit surtout par infiltration à son extrémité nord, où se trouve la plus grande partie des salines. A l'extrémité sud, au voisinage de Pomorié, de nombreuses salines ont été abandonnées mais certaines sont encore en production. Comme il n'existe aucune entrée d'eau douce dans la lagune, la salinité peut atteindre par endroits 85 .

Autrefois, la lagune donnait de fortes quantités de poisson, mais la production actuelle, constitutée principalement de muges, ne représente plus qu'une centaine de tonnes par an. Elle pourrait éventuellement doubler si les jeunes muges, recueillis dans le chenal conduisant à la lagune, étaient mis en hivernage et libérés au printemps. Quelques-unes des salines abandonnées pourraient être aménagées en ce sens.

Le gouvernement se propose d'utiliser à fond ce site important pour développer l'aquaculture et envisage de créer près de Pomorié une station marine. On fera hiverner les alevins de muges en utilisant l'eau chaude provenant (15–20 1/sec) d'une usine de traitement du sel. Le problème concernant l'installation du tuyau d'alimentation en eau sera sans doute résolu et les serres d'hivernage mises en service vers la fin de 1980. Un centre expérimental de production sera créé pour les poissons plats, la truite et, ultérieurement, pour les muges. La plupart des poissons plats produits en écloserie seront utilisés pour l'élevage en stations marines, et le reste sera lâché dans la mer. La production annuelle de poisson plat escomptée est de l'ordre de 1,5 million.

Un emplacement d'une superficie de 1,5 ha situé près de Pomorié a été mis par le gouvernement à la disposition de l'Office d'Etat pour les pêches pour la construction de l'installation marine. L'entreprise sera tout d'abord dotée de cinq cadres et du personnel de soutien technique nécessaire. Le centre pourra être ultérieurement élargi si les pays voisins s'intéressent à un travail coopératif.

La mission a considéré que le programme de construction du centre se justifiait, et reconnu que certaines conceptions nouvelles pourraient se montrer utiles pour d'autres pays.

4.1.5 Recherche

La recherche en matière d'aquaculture côtière comprend deux activités principales: i) la mytiliculture, et ii) l'élevage de la truite arc-en-ciel en eau de mer.

i) Mytiliculture

Les moules cultivées croissant plus rapidement que celles des gisements naturels et étant en outre généralement exemptes de ces concrétions calcaires semblables à des perles qui les rendent impropres à la vente aux consommateurs, l'Institut des pêches de Varna a entrepris en 1971 des études en vue de mettre au point des techniques satisfaisantes pour la mytiliculture le long des côtes de la mer Noire. Au début, les études ont été conduites dans la baie de Varna et dans la zone du cap Kaliakra, afin de reunir les données de base concernant les taux de fixation du naissain et les taux de croissance. Des structures sous-marines et de surface ont été utilisées mais, si des renseignements utiles ont pu être obtenus sur les taux de fixation et de croissance, le matériel utilisé n'a pas résisté à la forte action des vagues. Des résultats bien meilleurs ont été obtenus avec des palangres et il a été démontré en outre que la zone du cap Kaliakra était celle qui convenait le mieux à une mytiliculture pilote et commerciale.

Les études réalisées ont fait ressortir que la moule peut atteindre en 12 à 14 mois la taille commerciale de 50–55 mm. De meilleurs taux de croissance ont été observés sur le naissain fixé pendant les mois de printemps plutôt que sur celui d'automne, ce qui a permis de penser que le début du printemps est la période qui convient le mieux à la mise en place des collecteurs.

Comme l'encrassement par les épibiontes, et en particulier les ascidiens, peut être assez intense, notamment à l'automne, collecteurs et cordages doivent être mis à sécher sur le rivage, généralement pendant deux ou trois jours suivant les conditions météorologiques.

Le système actuel se compose de collecteurs et de cordes de “croissance” suspendus à des palangres et soutenus par des blocs de styromousse, recouverts de filets. Les collecteurs, fabriqués avec les cordes de vieux chaluts, ont 8 m de longueur. Lors de la visite faite par la mission (fin septembre 1979), on comptait 600 collecteurs/cordes d'élevage. Pendant cette période, les collecteurs sont enlevés, coupés en deux tronçons de longueur égale et suspendus à nouveau.

La production actuelle, par élevage sur palangres, est assez faible mais les futurs plans ont un objectif de production de 500 à 600 t par an, suffisantes pour produire 100 t de moules en conserve.

ii) Elevage de la truite arc-en-ciel en eau de mer

En 1971, on a commencé à étudier la possibilité d'élever des truites dans des parcs (filets) installés de façon permanente dans des eaux peu profondes. Comme les installations étaient gravement endommagées pendant les tempêtes hivernales, il a été décidé d'élever la truite dans des cages flottantes en filets, et les premiers essais devraient commencer en 1980.

En général, des truites de 10 à 20 g sont mises en place dans les enclos en mars, quand la température de l'eau de mer est entre 8 et 10°C; la récolte se fait en juin, quand la température est montée à 17–20°C. Pendant cette période, le poisson atteint entre 100 et 250 g, le poids moyen étant de 150 g. Comme les sprats sont disponibles toute l'année, on utilise comme aliment des sprats cuits. La quantité de sprats nécessaire pour produire 1 kg de truite varie entre 5 et 6 kg, pour un coût de 1 à 1,20 Leva. Le prix sur le marché de la truite cultivée en eau de mer est de 3 Leva. Des essais avec des granules pour truite ont donné un taux de conversion plus faible, 2 ou 2,5:1, mais les granules pour truite côutent plus cher que granules pour le sprat.

Une éventuelle expansion de la production de truites cultivées en eau de mer nécessiterait l'amélioration du système de pisciculture. Il est proposé de construire des bassins en béton dans les endroits où le rivage est bas, et de les remplir par pompage avec de l'eau de mer. Les alevins de truites grandiront en bassin jusqu'à ce qu'ils atteignent 30 g, puis seront transférés dans les cages flottantes en filets. Si l'élevage en cages flottantes devait se révéler peu pratique ou non rentable, la truite serait cultivée dans des étangs plus grands en béton ou en terre. Dans ce cas, les étangs seraient utilisés pour élever la truite pendant l'automne et l'hiver, et le muge pendant le printemps et l'été.

Etant donné les difficultés que présente l'élevage de la truite dans des cages flottantes sur une côte plutôt exposée, l'Office d'Etat pour les pêches a eu recours aux services d'un consultant japonais pour mettre au point un matériel apte à supporter de mauvaises conditions météorologiques. L'une des principales raisons qui justifient ce projet est la nécessité d'utiliser, sous forme d'aliment pour truites, les excédents de sprats débarqués par la flottille de la mer Noire.

4.1.6 Coopération et assistance extérieures

Des contacts ont eu lieu avec l'URSS concernant la coopération bilatérale. L'URSS devrait fournir des alevins de saumon pour des expériences d'élevage en mer (ocean ranching).

Il existe aussi un accord de coopération bilatérale avec le Japon dans le domaine des pêches, qui couvre également l'aquaculture. Un expert de l'Université Tokaï a passé six mois en Bulgarie pour participer à la préparation de nouvelles installations et notamment à la conception de cages flottantes.

4.1.7 Facteurs particuliers

L'industrie touristique est le principal concurrent de l'aquaculture en ce qui concerne l'utilisation des eaux côtières et du littoral. Le tourisme est bien organisé et peut probablement fournir davantage de bénéfices que l'aquaculture. Pourtant, les produits de l'aquaculture sont nécessaires pour nourrir la population et, disponibles sur place, l'industrie touristique pourrait en profiter. Il pourrait être utile de délimiter réglementairement des zones, afin que des superficies suffisantes soient réservées pour le développement de l'aquaculture côtière.

4.2 Situation de l'aquaculture en Roumanie

4.2.1 Systèmes de production

Une Entreprise de pêche de l'Etat opère dans le delta du Danube. Elle conduit des opérations de pêche commerciale en mer et sur 75 000 ha de lagunes dans le delta. En outre, 12 000 ha de plans d'eau sont empoissonnés et aménagés pour la production halieutique, en majeure partie dans des zones d'eau douce mais aussi dans quelques zones d'eau saumâtre. Les unités de production sont simplement de vastes lagunes ou lacs avec des barrages construits en travers de leurs accès/exutoires, de façon à commander le niveau de l'eau et les déplacements des poissons. Certaines sont empoissonnées avec des alevins produits en écloserie. La production des unités aménagées est importante, elle est d'environ 2 000 t par an. L'Entreprise pêche aussi 4 000 t en mer et 2 200 t dans les eaux naturelles du delta.

L'aquaculture en eau douce est bien implantée en Roumanie, en particulier la carpiculture. L'Etat a des écloseries qui fournissent en alevins les entreprises et les exploitants individuels. La plupart des étangs ont une productivité naturelle de 300–500 kg/ha par an mais, avec une alimentation complémentaire, les rendements dépassent 1 000 kg/ha et certains arrivent à 2 000 kg/ha.

Il existe des écloseries de truites qui produisent des alevins pour l'empoissonnement des rivières en vue de la pêche sportive. La principale contrainte à la production commerciale de la truite concerne la fabrication des aliments. Il est difficile d'obtenir certains des ingrédients nécessaires et les machines pour le traitment des aliments.

4.2.2 Recherche

L'Institut roumain de recherche océanographique conduit des recherches sur la mariculture à Constanta. L'Institut est en train de construire un nouvel ensemble de bureaux et de laboratoires qui sera terminé au début de 1980. Il disposera d'aquariums et de bassins extérieurs destinés à des expériences d'aquaculture. Les autres laboratoires de l'Institut apporteront un soutien aux travaux sur l'aquaculture: le laboratoire d'hydrochimie pour l'analyse de l'eau; le laboratoire de lutte contre la pollution pour l'évaluation de la qualité de l'eau; le laboratoire des ressources halieutiques pour la fabrication du matériel; et le laboratoire d'écologie pour l'étude des cycles biologiques. Actuellement, 15 chercheurs travaillent exclusivement sur l'aquaculture.

L'Institut a conduit des recherches touchant l'aquaculture dans les domaines ci-après:

  1. Reproduction du muge cabot, du flet, des moules, des palourdes et des crevettes (Palaemon sp.).
  2. Elevage: polyculture intensive du muge, du flet et de l'esturgeon; croissance accélérée des alevins Mugil sp. par utilisation de cobalt radioactif; moules; palourdes; crevettes (Palaemon sp.).
  3. Hivernage du muge cabot.
  4. Acclimatation d'espèces d'eau douce à l'eau saumâtre: carpe commune, sandre et truite.
  5. Introduction d'espèces exotiques: huîtres, Crassostrea gigas, C. angulata, C. virginica et Ostrea edulis; crevettes (penaeidae), Penaeus duorarum.

Tout en poursuivant ces travaux l'Institut mettra au point par la suite, des types d'aquaculture prometteurs, depuis le laboratoire jusqu'à l'entreprise industrielle, en passant le stade pilote. Il prévoit aussi d'acquérir les données et compétences de base nécessaires dans les domaines tels que la physiologie, la génétique et la nutrition.

L'Institut de recherche et de pisciculture de Tulcea conduit des recherches sur l'aquaculture en eau douce. Il apporte aussi un soutien à l'aquaculture commerciale en fournissant des géniteurs et des alevins améliorés.

4.2.3 Emplacements convenant à l'aquaculture côtière

De Constanta en allant vers le sud, la côte, avec des rivages abrupts, est exposée aux fortes vagues soulevées par le vent pendant les tempêtes. Les zones protégées possèdent toutes des plages de sable, mises en valeur à des fins touristiques. Il semble que cette partie de la côte offre peu de possibilités de développement pour l'aquaculture.

Au nord de Constanta, la côte se compose essentiellement du delta du Danube. La terre est basse, avec des lagunes et des marécages étendus. Le lac Simoe à lui seul occupe 15 000 ha, en totalité à l'aquaculture. Des marais-salants d'une superficie estimée à 5 000 ha pourraient aussi être mis en valeur pour l'aquaculture.

4.2.4 Facteurs particuliers

En 1975, une prolifération d'algues Exuviaella cordata, connue sous le nom de “marée rouge”, a provoqué des hécatombes de nombreux organismes le long de la côte roumaine. Dans les zones rocheuses, les poissons ont été presque tous tués. Les palourdes ont subi des pertes de plus de 60 pour cent, et de nombreuses moules ont été trouvées mortes sur les plages.

La mission a appris que les marées rouges qui se produisent dans les eaux roumaines ne fabriquent pas de toxines. La mortalité est due à la dégradation de ces algues et par conséquent aux faibles teneurs en oxygène dissous. Toute activité aquicole doit donc prendre en considération les effets potentiellement désastreux d'une marée rouge.

4.2.5 Stratégie de développement

Le gouvernement compte beaucoup sur l'aquaculture pour produire davantage de poisson de bonne qualité, car le pays possède de vastes régions aptes à la pisciculture et parce que conditions d'environnement semblent bonnes. Le plan général demande que la production des eaux intérieures soit triplée, car les besoins de poisson et de produits de la pêche augmentent. La production pourrait progresser essentiellement par le biais d'une intensification. L'objectif premier du développement de l'aquaculture est de produire des aliments plutôt que des emplois.

Les principales activités de développement seront axées sur la construction d'un nouveau laboratoire et centre de production sur le lac Istria, comportant des étangs d'alevinage, des étangs d'élevage et des étangs pour l'hivernage des alevins. Le lac Istria lui-même sera divisé en deux unités de production de 250 ha. Ces installations constitueront un foyer de développement de l'aquaculture dans les zones côtières proches.

Une station pour la reproduction de l'esturgeon sera construite près de Rousska en 1980. Elle fonctionnera suivant les principes de la technologie russe. Il est prévu de lâcher 3,5 millions d'alevins chaque année dans le bras St. George du Danube. Les alevins seront lâchés à l'âge de 45 jours, avec un poids moyen de 3 g. Le point où ils seront lâchés est à 100 km de la mer et on pense que la migration jusqu'à la mer prendra trois mois. Les poissons adultes seront capturés dans la pêcherie commerciale, à leur retour dans l'estuaire. On estime que les retours représenteront l pour cent. Huso huso peut atteindre 50 kg en 18 à 20 ans, et Acipenser stellatus 15 à 20 kg en 15 ans.

L'Institut roumain de recherche marine de Constanta a passé des accords de coopération avec une société américaine pour l'élevage de crevettes Penaeidae avec des systèmes intensifs. Un petit nombre de Penaeus duorarum a déjà été importé en Roumanie, et un biologiste roumain a été envoyé aux Etats-Unis pour être formé. L'Institut se propose de conduire des recherches préparatoires en vue d'une production industrielle, et cherche un montant de 5 millions de Lei pour construire des installations spéciales pour l'élevage de la crevette.

4.3 Situation de l'aquaculture en Turquie

4.3.1 Systèmes de production

La seule activité aquicole pour la production d'espèces marines a lieu actuellement dans les lagunes. Diverses espèces, dont le bar, la dorade, la sole, le muge et l'anguille (Anguila anguila), pénètrent dans les lagunes côtières au printemps et y sont retenues par des barrages jetés en travers du chenal d'entrée. Après avoir grossi pendant tout l'été, les poissons sont capturés au barrage quand ils tentent de retourner à la mer, dès que les températures diminuent en automne. Toutes les captures sont commercialisées y compris certains poissons de taille insuffisante.

Il n'existe que deux stations d'aquaculture en eau douce dans la région qui borde la mer Noire. Dans la zone de Bafra, une exploitation de 30 ha a commencé à élever, en eau douce, des carpes communes mêlées à des muges cabots. Outre le poisson, elle se propose de produire du caviar à partir des oeufs de poisson. Deux stations d'élevage de la truite d'eau douce sont en construction près de Sürmane; l'une appartient à une coopérative, l'autre est privée. La date d'achèvement est prévue pour février 1980. Douze autres demandes en vue de créer des stations trutticoles étaient à l'examen au moment de la visite de la mission.

4.3.2 Plans de développement de l'aquaculture

Le gouvernement accorde une importance considérable au développement de l'aquaculture le long de la côte de la mer Noire car, par tradition, la plupart du poisson produit en Turquie provient de la mer Noire. Il est prévu que Samsun devienne le centre de ce développement en raison de sa position centrale et des infrastructures dont il dispose, telles que usines de traitement etc.

Les principales espèces considérées comme convenant à l'aquaculture sont examinées ci-après.

Muge cabot (Mugil cephalus)

Le muge cabot est assez abondant le long de la côte, en particulier au voisinage de Samsun. C'est une espèce appréciée, car il rapporte 50–60 L.T./kg aux pêcheurs et se vend environ 100 L.T. sur le marché. Les oeufs de muge sont précieux en raison de leur prix élevé sur le marché (4 000 L.T./kg en 1979). Les pêcheurs traitent eux-mêmes le caviar.

La zone du delta de la rivière Rouge, à l'est de Bafra, comprend 25 lacs, dont cinq sont étendus. La superficie totale du plan d'eau de ces lacs est de 4 000 ha. Le plus grand, le lac Bafra, a une profondeur moyenne de 2 m atteignant par endroits 5 m. Les lacs des estuaires ne sont reliés à la mer que par un petit nombre d'ouvertures, souvent fermées pendant les tempêtes par suite de l'accumulation de sable. De vastes marécages sont actuellement improductifs.

Les lacs sont la propriété de l'Etat et sont actuellement loués par périodes de trois ans aux fins d'exploitation. Le loyer est fixé par le gouvernement et il n'y a pas d'appel d'offres. Le titulaire actuel du bail a un accord avec une coopérative de pêche qui effectue de la pêche proprement dite. Les pêcheurs de la coopérative travaillent sur la base de parts et fournissent leurs propres engins.

Cette zone produit en moyenne 400 t de poisson chaque année: 60 pour cent de carpes communes, 25 pour cent de sandres et 15 pour cent de muges cabots. On prend aussi de petites quantités d'écrevisses.

Les muges cabots de grande taille se trouvent en nombre appréciable de mars à juin; les alevins sont abondants à l'automne.

Vu l'abondance de plancton, l'eau du lac Bafra est vert sombre mais, d'après les pêcheurs, cette eau verte ne tue pas le poisson. Les marées rouges n'ont pas été signalées à propos des lacs ou autres zones côtières à proximité de Samsun. La carpe et la sandre sont parfois victimes d'une brusque augmentation de la salinité quand l'eau de mer pénètre. Une autre cause de mortalité est due au fait que le poisson échoue dans de petites mares quand l'eau se retire après des crues provoquées par le ruissellement provenant des terres adjacentes.

Le climat de cette région est doux; il ne gèle jamais et il neige rarement. Les températures mensuelles moyennes de l'eau de la mer à Samsun sont les suivantes:

Janvier14°C
Février14,5°C
Mars15°C
Avril16°C
Mai17°C
Juin21°C
Juillet23°C
Août22°C
Septembre19°C
Octobre18°C
Novembre15°C
Décembre14 ou 15°C

La salinité varie considérablement dans les lacs. Côté terre, l'eau est douce mais près des raccordements avec la mer, elle varie de 30 en hiver à 50 en été.

La zone du delta étant fréquentée par de nombreux oiseaux migrateurs (plus de 200 espèces ont été recencées), le gouverneur de Samsun a proposé que l'on en fasse un parc national. Si ce projet se réalise, la Direction des produits aquatiques aura la principal responsabilité de l'aménagement des lacs. Des améliorations sont à l'étude pour augmenter les captures de muges, et un biologiste a été récemment affecté au lac Bafra. Ces améliorations prévoient entre autres l'ouverture de raccordements supplémentaires avec la mer, la construction de digues et de canaux pour détourner la ruissellement des eaux de pluie. Il n'est pas prévu de construire des barrages aux points d'entrée pour piéger le poisson.

Il existe le long de la côte de la Marmara, huit emplacements convenant à la pisciculture lagunaire ou à la valliculture. Un seul de ces emplacements a pour le moment un barrage permanent permettant de contrôler l'eau et de piéger le poisson - c'est le lac de Big Drawer. La pêche n'a lieu qu'en novembre. Le canal qui relie le lac à la mer reste ouvert jusqu'au 15 juin, date à laquelle les barrages sont fermés; la pêche commence en novembre. La salinité est faible dans le lac; elle varie entre 0 et 8. On estime à 1,5 million de L.T. le revenu total assuré par la pêche de barrage. Les captures principales concernent le muge (40 t) et l'anguille (5 t). Les muges sont capturés très petits, à 25–40 cm de longueur.

Moule (Mytilus galloprovincialis)

Vu le peu de temps dont disposait la mission, il n'a pas été possible d'effectuer un examen quelconque des stocks de moules. Les renseignements disponibles ont cépendant été examinés et la mission a eu des entretiens avec des biologistes, des administrateurs des pêches et des pêcheurs. Mason a rédigé en 1971 un rapport sur les renseignements et observations disponibles concernant la biologie du stock de moules de la mer Noire. Baird (1973) a décrit les perspectives d'expansion de la pêcherie et signalé les difficultés que présentait le développement d'une pêcherie commerciale. Ces deux rapports suggèrent toutefois que l'aquaculture pourrait contribuer dans une certaine mesure à l'expansion des pêcheries de moules à l'avenir et a recommandé l'exécution d'un programme de recherche.

Peu de recherches ont été effectuées depuis que Mason et Baird ont rédigé leurs rapports sur les pêcheries de moules. Il n'y a pas trace d'un programme de recherche visant à améliorer ce que l'on sait de ces moules ou à mettre au point des méthodes d'élevage.

Les moules sont largement présentes sur la côte turque de la mer Noire. Un certain nombre de gisements situés à l'extrême ouest (Kana Barun, Sile, Kefken) ont été bien prospectés. L'un d'eux (Kefken) aurait 12 km de longueur et plus de 3–4 km de largeur, avec des taux de capture moyens de 50 kg/10 min. avec une drague de 1,5 m. Ce taux de capture a été retrouvé dans d'autres gisements. A l'époque de la présente mission, des bancs étaient signalés jusqu'à Fatsa à l'est. Les pêcheurs ont indiqué qu'ils pouvaient prendre sans difficulté 10 t/jour en utilisant un chalut de fond. On dit que ces moules sont en grande partie exemptes d'accrétions calcaires à l'intérieur de la coquille. Rapana thomesiana thomesiana est le prédateur de gastropodes le plus courant et il inflige des pertes substantielles aux stocks. Quant aux étoiles de mer, elles ne sont pas considérées comme un problème majeur et, apparemment, la région ne connaît pas de marées rouges. La taille moyenne des moules de ces gisements est de 80 mm, avec des extrêmes de 0 à 110 mm mais, dans les échantillons pris, 90 pour cent des moules ont plus de 60 mm de longueur. Les bancs de moules se trouvent entre 30 et 60 m de profondeur et les captures maximum (66,2 kg/10 min.) sont faites à 45 m de profondeur. Les chalutiers ne les pêchent pas, sauf à Fatsa où de petites quantités sont prises pour la production de farine.

On n'a pas fait d'études sur la croissance des moules de la mer Noire, mais il paraît qu'elles atteignent une longueur de 6 cm en trois ans. Dans les deux régions, on trouve de petites moules de tailles différentes, ce qui indique que le naissain se fixe sur une vaste superficie.

L'indice de condition dans la zone du Bosphore a été étudié par Artuz et Erdogan (1969) et a été trouvé faible d'août à décembre. Il s'améliore au printemps et dépasse 35 pour cent entre mars et juillet, avec une pointe en mai. L'indice de condition minimum des moules prises en Europe dans le cadre de captures commerciales est de 40 pour cent. Aucune autre étude de condition n'a été réalisée, mais l'on sait que l'indice de condition dans la mer Noire n'atteint que 27–30 pour cent.

Les quantités de moules débarquées en Turquie entre 1964 et 1971 allaient de 14 à 706 t/an. Bien que l'on ne connaisse pas avec certitude la quantité débarquée en 1978, il est probable qu'elle a été inférieure à 1 000 t, car la production globale d'invertébrés marins n'a été que de 1 400 tonnes.

Les moules ne sont consommées que dans les grands centres; elles sont inconnues dans les régions de l'intérieur. Les plus gros marchés sont à Izmir, Ankara et Istanbul. Les exportations sont inexistantes et le développement de marchés d'exportation poserait des difficultés considérables, à moins que l'on ne trouve une méthode pour améliorer la condition de la chair.

Esturgeon

Trois espèces d'esturgeon passent une partie de leur vie dans les eaux turques de la mer Noire: Acipenser gueldenstaedti colchicus, A. stellatus et Huso huso. Deux autres espèces, A. ruthenus et A. nudiventris, passent la totalité de leur vie dans les eaux douces.

Les esturgeons sont particulièrement abondants entre la rivière Rouge et la rivière Verte. Les stocks ont énormément baissé il y a quelques années, et la pêcherie a été fermée; cependant, il arrive souvent que l'espèce la plus courante, H. huso, soit capturée en même temps que l'anchois dans des sennes coulissantes. La capture de l'esturgeon restera interdite en 1980.

Le stock court le risque de diminuer encore en raison de la construction de barrages en travers des rivières. Un barrage a été terminé et un autre est en cours de construction sur la rivière Rouge; deux barrages ont été récemment construits sur la rivière Verte. Ces barrages se trouvent dans des régions où l'esturgeon va généralement frayer et, outre qu'ils empêchent les esturgeons de parvenir jusqu'aux frayères, ces frayères elles-mêmes seront submergées.

Afin de protéger le stock, et si possible de l'augmenter, le gouvernement envisage de construire une écloserie pour élever des alevins en vue d'empoissonner la rivière Verte et la rivière Rouge. Le site proposé est à 12 km de la mer sur la rivière Rouge. Il est desservi par une route praticable par tout temps, et a l'électricité. Le terrain, gravier et sable, est plat. La rivière est fortement troublée par des limons et il faudra purifier l'eau avant de l'utiliser dans l'écloserie. Le coût de construction de l'écloserie et de son exploitation pendant cinq ans a été estimé à 41,2 millions de L.T., sur la base des prix de 1978. La Direction des produits aquatiques a demandé qu'un montant de 1,4 million de L.T. soit mis à sa disposition de façon à pouvoir lancer cette activité en 1980 sous forme d'un projet de recherche.

Tout d'abord, de gros poissons seront capturés en mer aux fins de reproduction. Le plan prévoit qu'un million de jeunes poissons seront lâchés dans les rivières chaque année. Au moment où ils seront lâchés, ils auront 15 à 20 cm de long, ce qui demande, estime-t-on, une période de croissance de trois mois. Le poisson sera récolté quand il revient vers ses rivières d'origine après avoir passé environ huit à dix ans en mer. Le poisson sera capturé par les pêcheurs, soit à titre individuel, soit en tant que membres de coopératives. Les captures seront marquées et les pêcheurs seront invités à fournir des données sur le poids, la longueur etc. de leurs prises à la Direction des produits aquatiques.

On estime que 3 pour cent du poisson lâché sera récolté. Cela devrait donner un total de 495 t de chair de poisson et 75 t de caviar chaque année. Calculé au prix de 1978, à raison de 100 L.T./kg pour la chair et de 4 000 L.T./kg pour le caviar, cela donne 49,5 millions de L.T. pour la chair et 300 millions de L.T. pour le caviar. (Aux prix de 1979, 200 L.T./kg pour la chair; 10 000 L.T./kg pour le caviar.)

Si l'on dispose de suffisamment d'alevins, il est prévu d'élever une certaine quantité d'esturgeons pour en faire des aliments pour les poissons des lacs situés près de l'embouchure de la rivière Rouge.

Truite de mer (Salmo trutta labrax)

Il existe un stock naturel de truites de mer dans l'est de la mer Noire. Sa répartition dans les eaux turques ne commence qu'à Ordu, à l'est de la frontière russe. Sa pêche à la senne coulissante ne va pas au-delà de la zone des trois milles marins.

La mission a visité la rivière Storm (Firtina Deresi), l'une des principales rivières à truites du pays. Elle coule rapidement, son eau est claire et le fond rocheux. Au moment des crues de printemps, le niveau de l'eau est élevé.

Les truites sont capturées des deux côtés de l'embouchure au moment où elles entrent dans la rivière à l'occasion de leur migration reproductrice. Les truites remontent sur 8–10 km vers les sources de la rivière, où l'on utilise quelques pièges pour les capturer. En mer, les truites sont capturées accidentellement par les pêcheurs qui prennent le chinchard et la bonite à la senne coulissante, mais non par les pêcheurs d'anchois.

La truite peut atteindre une taille de 50 cm de longueur et un poids de 12 à 15 kg. Elles sont toutes expédiées sur Istanbul, Ankara et Izmir, où les prix sont très élevés, entre 1 500 et 2 000 L.T./kg.

La pêcherie est fermée depuis 1977 en raison d'une diminution apparente des stocks, mais faute de données antérieures, ce fait n'est pas clairement établi.

La Direction des produits aquatiques souhaiterait lancer la mariculture (ocean ranching) en construisant une écloserie sur la rivière Storm près de Rize. Les poissons juvéniles seront lâchés dans les rivières pour migrer ensuite vers la mer. Ils seraient capturés au moment où ils entrent dans la rivière d'origine pour frayer. On sait peu de choses de la biologie ou des habitudes de la truitre de mer, mais la Turquie a une certaine expérience en ce qui concerne la production d'autres espèces de truites en écloserie, expérience qui pourrait facilement être adaptée à la mariculture.

4.3.3 Recherche

Le Département des pêches a peu de moyens de recherche. Le Bureau régional de Samsun n'a qu'un biologiste, qui fait une étude écologique du lac de Bafra. Bien que les universités ne conduisent pas de recherches en rapport avec l'aquaculture côtière, il semblerait qu'elles soient capables de le faire si on leur fournit des crédits.

4.3.4 Facteurs institutionnels

L'organisme responsable de l'aquaculture côtière est le Départment des pêches du Ministère des produits aquatiques. Le personnel du Département des pêches est presque entièrement composé d'ingénieurs agronomes. Ainsi, le Bureau régional de Samsun dispose de 31 personnes, dont un seul biologiste. Il n'existe pas d'agents de vulgarisation pour l'aquaculture, mais le personnel s'arrange pour inclure des activités de vulgarisation parmi ses autres tâches. Le Départment des pêches a un rôle de réglementation et de police et utilise des bateaux patrouilleurs pour faire appliquer la loi. Il n'y a pas de distinction claire entre le personnel qui s'occupe des activités de vulgarisation et celui qui fait appliquer la loi.

D'après la loi, l'autorisation du gouvernment est nécessaire pour pratiquer l'aquaculture.

La participation de coopératives à la pêche, y compris l'aquaculture, est encouragée. En vertu d'un décret de 1972, les coopératives de pêche sont exemptées des droits d'importation sur le matériel de pêche. Cette exemption vaut également pour l'aquaculture et pour les fournitures telles que filets de pêche, moteurs et pour les importations d'alevins et oeufs de poisson. Le Ministère des coopératives et affaires rurales accorde une aide financière aux coopératives sous forme de subventions. Des crédits leur sont aussi fournis.

4.3.5 Coopération et assistance extérieures

La Turquie n'est pas membre de la Commission des pêches de la mer Noire. Il existe néanmoins une Commission scientifique et technique turco-bulgare qui a pour rôle de préparer, depuis octobre 1979, des accords annuels de coopération scientifique et technique. Elle ratifiera aussi des programmes annuels d'échange de chercheurs et d'experts.


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