1.1 Les circuits dapprovisionnement des villes et les acteurs
1.2 Le secteur des marchés
1.3 La problématique des marchés de gros
1.1.1 Les produits vivriers: circuits marchands et non-marchands
1.1.2 Lorganisation des circuits marchands indirects
1.1.3 Le fonctionnement dans un environnement économique risqué: des stratégies et des pratiques non concurrentielles
1.1.4 Les acteurs des marchés: grossistes et détaillants
1.1.5 Les produits manufacturés et les denrées alimentaires de base (riz, farine, sucre)
En distinguant produits vivriers et produits manufacturés, on présentera dans cette partie le fonctionnement des circuits dapprovisionnement et les caractéristiques de leurs acteurs urbains: les grossistes et les détaillants.
Alors que les études sur le commerce des produits manufacturés restent extrêmement rares, il existe une abondante littérature sur les systèmes de commercialisation des produits alimentaires, vivriers en particulier. Cest la raison pour laquelle on est limité, pour ces produits, à faire le point sur les acquis de la recherche.
On soulignera, en particulier, le rôle déterminant de la mainmise sociale sur linformation commerciale comme facteur-clé de différenciation dans lorganisa-tion et le fonctionnement des systèmes dapprovisionnement, et limportance des pratiques non concurrentielles en tant que réponses économiques à un environnement imparfait.
1.1.1.1 Lauto-approvisionnement aujourdhui en milieu urbain: une réponse à la crise
1.1.1.2 Les circuits marchands fournissent lessentiel de lapprovisionnement urbain en produits vivriers
Lapprovisionnement des citadins des villes subsahariennes est assuré conjointement par des circuits marchands et non-marchands. Parmi les premiers, on a coutume de distinguer les circuits directs dans lesquels le producteur vend directement au consommateur, et les circuits indirects, qui font intervenir un nombre plus ou moins grand dintermédiaires. Par circuits non-marchands, on fait référence aux diverses formes de lauto-approvisionnement (auto-production et échanges intra-familiaux).
Au début des années 70, lexistence dactivités agricoles dans les capitales africaines était mise en relation par les géographes avec le bas niveau durbanisation des pays et la faible capacité intégratrice de leurs centres urbains. Vingt ans plus tard, malgré la pression du foncier dans des métropoles dépassant parfois le million dhabitants, on constate non seulement la permanence dactivités agricoles urbaines mais aussi leur dynamisme soutenu, en particulier dans le secteur du maraîchage.
Lagriculture urbaine - entendue au sens large, à la fois intra-urbaine et surtout périurbaine - recouvre des situations très différentes du point de vue de lapprovisionnement alimentaire. Parmi les ménages pratiquant des activités agricoles on ne connaît pas la proportion de ceux qui assurent toute, ou lessentiel de leur consommation avec leurs propres cultures (auto-production), ni la proportion de ceux qui sont des acheteurs nets, leur production ne couvrant que très imparfaitement leurs besoins de base en grands produits vivriers.
On sait, toutefois, que les activités agricoles, quil sagisse de parcelles cultivées à proximité de la ville ou du retour au village de certains membres du groupe familial au chômage, représentent aujourdhui non seulement une stratégie de rechange en matière de revenus mais parfois aussi un moyen de survie pour des ménages urbains durement touchés par la crise.
Cest, par conséquent, dans ce contexte quil faut analyser aujourdhui le rôle des échanges alimentaires intra-familiaux dans lapprovisionnement des citadins. Entre le village et la ville, depuis longtemps les produits alimentaires circulent dans les deux sens: du village à la ville à la récolte, en sens contraire pendant la période de soudure et pendant «les mauvaises années».
Le recours accru à lauto-approvisionnement, quil sagisse des cultures urbaines ou périurbaines ou des échanges intra-familiaux, est attesté par différentes sources et par nos propres interlocuteurs: il apparaît bien comme lune des réponses à la dégradation des conditions de vie en milieu urbain.
Souples, efficaces, très structurés et surtout organisés, tels sont décrits les systèmes privés de commercialisation des produits vivriers (ARDITI, 1975; CIRES, 1980; COUTY et BARRIS, 1977; YUNG, 1983). Ils ont fait la preuve de leur capacité dassurer, sans heurt important, lapprovisionnement des grandes métropoles, et cela même dans les conditions les plus difficiles. Ils ont su sadapter en permanence aux changements de la demande alimentaire urbaine et ont, en retour, provoqué nombre de mutations dans les systèmes de production agricole.
Les circuits commerciaux, loin dêtre perçus comme un facteur dappauvrissement du monde rural (approche caractéristique de nombreux travaux des années 70), sont plus souvent analysés aujourdhui comme la principale sollicitation externe au développement des campagnes.
La permanence des circuits directs
La commercialisation directe du producteur au consommateur est un fait encore observée sur les marchés de toutes les villes africaines.
Le rôle et limportance de ce circuit varient fortement selon les produits, les saisons culturales, les types de marchés urbains, et le niveau de développement de la fonction commerciale dans le pays.
Il concerne prioritairement les produits maraîchers des cultures intra et périurbaines, moins fréquemment, les autres produits vivriers. Les zones dapprovisionnement sont rarement distantes de plus de trente kilomètres de la ville, et au-delà, la fonction commerciale prend généralement le relais, sauf situation exceptionnelle. Les ventes de produits vivriers en ville par les producteurs - ou plus généralement par les femmes de ceux-ci - seffectuent principalement après la récolte et sur les marchés de quartier, beaucoup plus rarement sur les marchés centraux. Elles ne se pratiquent dailleurs pas que sur les marchés, la vente de porte à porte étant courante dans les quartiers périphériques, proches des zones de culture.
Les apports par vendeur représentent nécessairement de très faibles quantités, mais le volume global peut être significatif: en 1988, Chaleard soulignait comme un fait marquant dans lapprovisionnement de Bouaké en manioc frais, limportance des ventes directes réalisées par les femmes de planteurs (plus du tiers, semble-t-il).
Les circuits indirects: un rôle majeur dans lapprovisionnement urbain
Alors que «crises agricoles et crises alimentaires» (CNRS, 1987) se succèdent dans la plupart des pays africains compromettant la sécurité alimentaire des populations rurales, on constate que les circuits privés, considérés dans leur dynamique historique (GUYER, 1991), ont montré leur capacité à assurer sur le long terme et sans trop dà-coups lapprovisionnement de villes à la forte croissance démographique (LEPLAIDEUR et MOUSTIER, 1991).
Il est vrai que cet approvisionnement est souvent réalisé à un coût élevé, et ce, tant en raison des contraintes sexerçant sur les conditions de la production agricole quen raison de celles propres aux systèmes privés de commercialisation. La politique dimportations de biens de première nécessité - en particulier de riz - a répondu moins au souci des Autorités de se prémunir contre les risques de pénurie urbaine quà celui de garantir le maintien de la paix sociale en permettant de ravitailler à prix modiques les «segments les plus vulnérables des consommateurs urbains».
Dans les pays sahéliens, quand bien même les Offices céréaliers ont été appuyés dans leurs activités par des aides substantielles, leurs achats de céréales locales nont jamais représenté que de très faibles tonnages. Lessentiel des céréales quils ont fourni aux populations urbaines - et encore sagissait-il de certaines catégories très minoritaires - a consisté en maïs, sorgho ou riz importés. En définitive, les circuits privés de commercialisation ont assuré, en quantité et en régularité, lapprovisionnement de la très grande majorité des consommateurs des capitales sahéliennes et ce, même dans les pires conditions.
Dune manière générale, les interventions autoritaires des Etats dans les circuits de commercialisation ont été plus efficaces pour faire disparaître les produits des étals que les sécheresses, les inondations ou les guerres (lapprovisionnement de NDjamena en céréales na jamais cessé, même lorsque la guerre civile transforma la capitale en champ de bataille) (ARDITI, 1993). Nombreux sont les exemples de métropoles dont les habitants ont survécu grâce à la faculté des systèmes privés dorganiser des circuits parallèles dapprovisionnement qui ont permis de compenser, et surtout de suppléer au rationnement alimentaire organisé par les Autorités (Antananarivo, ou Conakry, par exemple).
Ainsi, les circuits privés dapprovisionnement ont non seulement réussi à organiser des flux réguliers sur les villes en produits vivriers de base (céréales, tubercules, féculents) qui composent encore une très grande part de lalimentation urbaine domestique, mais ils ont su aussi sajuster aux changements de cette demande et répondre à celle de nouveaux secteurs tels que la restauration populaire, la fabrication de plats cuisinés, et les filières de transformation artisanales agroalimentaires: on relève, par exemple, le développement remarquable des filières maraîchères urbaines, périurbaines et même internationales, celui de la commercialisation de ligname précoce comme variété de «luxe», des circuits de commercialisation et de transformation du manioc pour la fabrication de lattiéké, et du sorgho germé pour la fabrication de la bière de mil.
1.1.2.1 Des fonctions commerciales spécifiques
1.1.2.2 Lorganisation des circuits marchands et mainmise sociale sur linformation commerciale
En amont de la chaîne de commercialisation, on nobserve pas dintégration de la production par le commerce.
Des cas existent, certes, de grands commerçants urbains mettant en valeur dimportantes exploitations agricoles à laide dune main-doeuvre salariée. Mais, dans ces exemples qui concernent dailleurs toujours les zones soudano-sahéliennes, la finalité est presque toujours domestique (lapprovisionnement du groupe familial et du vaste réseau de dépendants) et secondairement commerciale (ventes des excédents).
La situation inverse est fréquente. Ainsi des producteurs de zones mal desservies par les commerçants peuvent se grouper pour affréter un véhicule, des planteurs à la tête dexploitations produisant plusieurs dizaines de tonnes de tubercules peuvent acheter un camion pour maîtriser les circuits de gros, etc. Ces tentatives, nombreuses, restent très épisodiques et se soldent souvent par des échecs. Si lactivité de commercialisation devient régulière, cest généralement parce que le producteur sest spécialisé dans le convoyage et la vente de ses récoltes et de celles dautres exploitants, accédant de ce fait au statut de «commerçant-exploitant».
En aval, quand la distribution jusquau consommateur nest pas organisée seulement par les détaillantes mais aussi par les artisans de la transformation agroalimentaire, meuniers, restaurateurs des gargotes, préparatrices des plats cuisinés, etc., le travail des détaillantes se spécialise. Par exemple, la redistribution intermarchés est assurée exclusivement par les détaillantes.
Lapprovisionnement des villes en produits vivriers est donc organisé par des grossistes dont le métier spécifique recouvre plusieurs opérations: la prospection, lachat, le groupage des produits, leur collecte, lexpédition, le transport et la mise sur les marchés.
Ces opérations peuvent être assurées par des agents différents, relativement spécialisés, ou par un seul et même agent, seule la fonction transport étant alors remplie par un intervenant spécialisé.
La façon dont se réalise la mainmise sociale sur linformation commerciale est un élément-clé de différenciation dans lorganisation des circuits dapprovisionnement.
Le commerce à moyenne et longue distance suppose en effet un réseau dinformations rassemblant des données sur la production, sur la demande quantitative et qualitative, et sur celui des routes. Comme le souligne Bredeloup (1989): «Il ne suffit pas dêtre présent dans la chaîne de distribution pour avoir une connaissance précise et actualisée de la situation. Chaque maillon détient une information partielle et partiale. De façon à maîtriser linformation, il convient de se déplacer physiquement tout au long du circuit ou bien davoir intégré dans son organisation des agents spécialisés».
Lexistence de réseaux anciens de commercialisation, les trajectoires migratoires des commerçants urbains, leurs relations avec leurs zones dorigine et leur type dimplantation dans le pays, leur essaimage dans des villes relais sur le plan national et international, expliquent le développement de fonctions commerciales spécialisées dans certains circuits dapprovisionnement des villes, indépendamment du produit traité.
On peut distinguer deux formes principales dorganisation des circuits dapprovisionnement:
Les systèmes dapprovisionnement des villes sont caractérisés par la coexistence de différents types de circuits et de réseaux, sans que lon puisse toujours saisir avec précision leurs articulations dans le temps et dans lespace, leurs relations exactes de concurrence, de complémentarité ou de dépendance versus domination.
Dans le commerce des produits vivriers, le niveau élevé datomisation des acteurs, la faiblesse relative des marges, compte tenu de la très forte dispersion de loffre agricole et de limportance du temps improductif, les volumes limités traités par la plupart des grossistes urbains, et le faible montant de capital nécessaire au démarrage dans ce type dactivité, ont souvent fait conclure à lexistence dun système ouvert fonctionnant de façon «plutôt concurrentielle» en dépit de certaines «imperfections du marché».
Les travaux de recherche actuels, en mettant laccent sur lanalyse des stratégies commerciales et du comportement des acteurs, ouvrent de nouvelles perspectives dans la compréhension du fonctionnement des systèmes dapprovisionnement. Pour la plupart, elles relèvent limportance des comportements anticoncurrentiels mis en oeuvre pour prévenir les risques et linstabilité des marchés.
Lenvironnement économique du commerce des produits vivriers se caractérise par un niveau élevé de risques et dincertitudes: en amont, il sagit des risques dus aux aléas de la collecte compte tenu dune offre agricole dispersée et irrégulière, au manque dinformation sur la disponibilité des produits, aux insuffisances de loffre de transport, à son irrégularité et à son prix. En aval, les risques découlent de la conjoncture du marché, de la concurrence permanente de nouveaux arrivants, des fluctuations des prix et de la demande sous leffet de différents facteurs non prévisibles. Lenvironnement institutionnel, quant à lui, se caractérise par lexistence de pratiques réglementaires inadaptées et tatillonnes, de taxations abusives et fréquemment arbitraires, etc. A ces différentes contraintes sajoutent celles propres aux commerçants - de capital, daccès au crédit -, pour ne citer que les deux plus importantes.
Ces contraintes affectent, par conséquent, tous les commerçants, façonnent leurs comportements, orientent leurs choix et fixent leurs stratégies.
Ces stratégies revêtent des formes identiques, quels que soient les produits ou les types dorganisation des circuits (collecteur indépendant ou inséré dans un réseau marchand): ce sont des pratiques dachat et de vente basées sur des relations personnalisées pour fidéliser à la fois les vendeurs et les acheteurs, des contrats et des commandes anticipées pour réguler lapprovisionnement, des systèmes de crédit pour sécuriser lapprovisionnement et garantir lécoulement des marchandises, la constitution dassociations entre commerçants visant à limiter la concurrence sur les marchés dachat ou sur les marchés de vente, et à restreindre laccès au crédit des «outsiders», etc.
Les recherches menées par lIRAT/CIRAD sur les filières maraîchères en Afrique centrale sont particulièrement intéressantes à cet égard1. Dans ce secteur marqué par une très grande variabilité des flux et des prix, on saperçoit que plus la mise de fonds initiale nécessaire est faible, plus facile est, théoriquement, lentrée dans le commerce, et plus fortes sont les pratiques des acheteuses collectrices visant à limiter la concurrence de façon à garantir un niveau dactivité à peu près régulier. Laccès sélectif des nouvelles venues aux réseaux de crédit est au coeur de ces pratiques.
A une toute autre échelle, un certain nombre détudes anciennes (SAUL, 1985; WILHELM, 1994) et plus récentes (ARDITI, 1993) sur le commerce des céréales en zone soudano-sahélienne soulignent, à certains moments-clé, le rôle que jouent les pôles daccumulation représentés par les grands grossistes stockeurs hors marchés. Les études remettent en cause lopinion généralement partagée (depuis les rapports Berg) de systèmes commerciaux concurrentiels.
En définitive, on remarque que les grossistes des marchés constituent des communautés dont laccès est relativement fermé, soudées par de forts liens sociaux et ethniques dans lesquels la concurrence joue peu, ce qui permet la permanence et la stabilité de leurs activités.
La prolifération dintermédiaires occasionnels peut créer lillusion de marchés vivriers «ouverts»; en réalité, la durée de vie très limitée de leur commerce et les faillites rapides et fréquentes qui les sanctionnent, montrent à lévidence que «le jeu économique reste le plus souvent déterminé par le système social».
On en voit les conséquences sur le processus de formation des prix: les grands marchés urbains sur lesquels sexerce lessentiel des activités de gros dapprovisionnement ne sont pas forcément des lieux de formation des prix (au sens de la rencontre entre offre et demande); ceux-ci se fixent en amont, par le jeu des rapports de force et de négociation entre le producteur et le commerçant et, en aval, entre les détaillantes et les acheteurs, suivant les relations de crédit et de confiance nouées et, en dernier ressort, suivant le pouvoir dachat des consommateurs urbains.
1.1.4.1 Les grossistes
1.1.4.2 Les détaillantes des marchés
Les grossistes des marchés urbains sont pour la plupart des grossistes collecteurs traitant des quantités limitées de produits.
Dans le commerce des céréales, en particulier pour les produits secs et les tubercules, daprès nos enquêtes sur les marchés de Ouagadougou et de Bobo-Dioulasso, la majorité des grossistes commercialise en moyenne entre 200 et 300 tonnes par an. Une minorité (moins dune dizaine pour les deux principales villes du pays) peut intervenir sur un millier de tonnes par an2.
A NDjamena, sur le Marché au mil, les ordres de grandeur sont sensiblement les mêmes: sur 70 grossistes environ, quelques six commerçants seulement commercialisent entre 600 et 1000 tonnes par an, la plupart ne dépassant pas les 300 tonnes.
Lenquête générale sur les grossisses en Côte dIvoire permet de se faire une idée du volume moyen dactivité de ces commerçants dans des villes assez différentes: par exemple, sur les marchés dAbidjan, les grossistes de produits secs et féculents traitent moins dune tonne par jour, en moyenne entre 0,5 et 0,8 tonne.
En revanche, les grossistes expéditeurs de la ville de Bouaké, principal centre de redistribution et dexpédition des produits vivriers pour tout le pays, traitent entre deux et trois tonnes par jour, en moyenne.
A Madagascar, les grossistes du marché dIsotry ne traitent que rarement plus de 0,4 tonne par jour, signe de perte de vitesse de ce marché alors que, daprès nos enquêtes, ceux dAndravoahangy et surtout dAnobie commercialisent entre 0,8 et 2 tonnes par jour en moyenne.
Cette moyenne de une tonne par jour sur lannée dans le commerce des produits secs, des tubercules et des fruits (produits majoritairement commercialisés par les grossistes hommes) donne une idée assez concrète du volume dactivité de la majorité des grossistes exerçant sur les marchés de distribution terminale des grands centres urbains.
La maîtrise des débouchés est le principal souci des grossistes car la rapidité de rotation des expéditions en dépend. Ils se déplacent peu, ne possèdent pas de véhicule, utilisent les services de collecteurs ou achètent aux paysans qui se rendent sur les marchés en convoyeurs de leurs récoltes.
La collecte étant longue et coûteuse, les grossistes cherchent à limiter au maximum leurs dépenses et leur temps. Le coût du stockage et du transport, ainsi que les risques de pertes impliquent que lécoulement soit dautant plus rapide que la collecte a été longue.
En ce qui concerne les produits périssables (produits maraîchers) et semi-périssables (manioc, féculents), les quantités traitées par les grossistes collecteurs sont beaucoup plus variables.
Sur de très grands marchés comme celui de la ville de Dakar, les grossistes collecteurs de produits maraîchers traitent également environ une tonne par jour. Mais, lessentiel de ces opérateurs commercialise des volumes nettement plus limités, entre 300 et 500 kg par jour.
Ces grossistes collecteurs sont en général en contact étroit avec les zones de production.
Les femmes sont en nette majorité sur les marchés et sont spécialisées dans les produits périssables: bananes, manioc, produits maraîchers. Elles assurent la recherche du produit (et souvent sa récolte), son groupage, la recherche du véhicule et le convoyage du chargement.
Convoyeuses de produits fragiles, ne disposant pas de réseau de commercialisation ni souvent de structures daccueil, elles cherchent à assurer la sécurité de leurs débouchés par des réseaux courts, intégrant détaillantes, gros consommateurs et transformatrices.
Le risque de leur profession est élevé, les opérateurs occasionnels de ce créneau venant nombreux en pleine période de commercialisation les concurrencer dans leurs zones dachat.
Ces collectrices manquent dinformation sur la demande ponctuelle, font face à la faible solvabilité des clients (les détaillantes) et doivent financer une partie de la filière en aval pour fidéliser leur clientèle.
Les caractéristiques de ces circuits concourent à rendre la revente et la marge bénéficiaire aléatoires et irrégulières.
En conclusion:
Lactivité des détaillantes est principalement conditionnée par lextrême faiblesse de leur capital commercial. Les quantités pouvant être journellement commercialisées sont de ce fait toujours très limitées.
En conséquence, la détaillante est fortement dépendante des possibilités de crédit accordées par le grossiste, ce qui lempêche de jouer entre plusieurs fournisseurs selon les saisons ou létat du marché, pour pouvoir obtenir le «meilleur prix».
Le transport urbain intermarché représente un coût particulièrement élevé dans lensemble des frais de redistribution, et ceci en dépit du développement dans toutes les grandes villes de moyens de transport (mécanisés et surtout non mécanisés: pousse-pousse, charrette, etc.) adaptés précisément aux faibles quantités commercialisées par les détaillantes de produits vivriers. Par conséquent, une bonne partie du transport se fait encore par portage (soit par la détaillante elle-même, soit par porteur), ce qui limite encore les quantités pouvant être commercialisées.
A la vente, lactivité de la détaillante est soumise à une double contrainte: celle de la concurrence dinnombrables autres marchandes, en particulier de toutes les vendeuses à la sauvette, et celle des possibilités financières réduites de sa clientèle.
Dans le domaine des produits manufacturés, lapprovisionnement des marchés, principalement à partir des circuits de la fraude, est le fait marquant de la situation actuelle.
En effet, le recours massif aux importations frauduleuses a permis de satisfaire les besoins des citadins alors même que les circuits de distribution, mis en place par des industries nationales érigées à la grande époque de la substitution des importations (le secteur textile principalement mais aussi les industries agroalimentaires et le petit tissu manufacturier national), se sont révélés incapables de sadapter en prix et en qualité à la demande de ménages paupérisés.
Lessentiel de lapprovisionnement urbain en marchandises générales et en denrées alimentaires de base a longtemps dépendu des réseaux marchands très structurés des grands patrons de commerce. Sils gardent la maîtrise de certains grands secteurs - denrées de base (riz, en particulier), mais aussi matériaux de construction -, on assiste, depuis la fin des années 80, à la prolifération de nouveaux intervenants dans les circuits dapprovisionnement de produits manufacturés: ce sont tous «les exclus des systèmes productifs villageois et urbain à la recherche dun hypothétique revenu dans la petite entreprise contrebandière».
En amont, dans les opérations dapprovisionnement, les recherches actuelles3 (LABAZEE, 1993) mettent en évidence les phénomènes de concurrence qui se développent entre ces différents circuits et leur répercussion en matière de partage de la rente frontalière. En aval, compte tenu de la multiplicité des canaux par lesquels les produits manufacturés arrivent aujourdhui sur les marchés, il faut souligner aussi lexacerbation de la concurrence entre les vendeurs réguliers payant patente et droit de place et les innombrables colporteurs ambulants démarchant les consommateurs urbains. On ajoutera que, dans un tel contexte, il est extrêmement difficile destimer les marges actuelles des commerçants des marchés de produits manufacturés.
Cest le circuit des denrées alimentaires (riz, farine, etc.) qui a offert les plus grandes opportunités daccumulation rapide de richesses ces dernières années en Afrique. En conséquence, la formation et le contrôle de la répartition de la rente interne et/ou frontalière (réexportations non contrôlées) ont fait lobjet des conflits les plus vifs entre grands commerçants et fonctionnaires.
Cest dans le circuit de commercialisation des denrées importées que lon observe les investissements les plus élevés en capacités de stockage (magasins et boutiques divers sur les marchés) et véhicules lourds (semi-remorques).
Ce circuit occupe dans le tissu urbain des espaces toujours bien délimités et dune grande lisibilité - zones de concentration dentrepôts autour des marchés ou dans certains quartiers, boutiques bien construites sur les marchés - et dont le statut doccupation est pour lessentiel bien défini (bail, location, propriété titrée), ce qui en garantit la pérennité, contrairement à la précarité caractéristique des installations de grossistes de produits vivriers.
Les circuits dapprovisionnement des denrées alimentaires sont encore dominés, comme on la noté, par un groupe de quelques grands importateurs ou distributeurs agréés (dans les pays où le secteur de limportation est contrôlé par lEtat) coiffant une pyramide, non seulement de nombreux grossistes régionaux et urbains, mais également de semi-grossistes des marchés. La filière de la distribution repose sur une cascade de crédits entre opérateurs. La rotation des stocks est particulièrement rapide, à tous les échelons, ce qui permet un rapide amortissement des investissements.
1.2.1 La place des marchés dans le secteur commercial urbain
1.2.2 Les caractéristiques des marchés
1.2.3 La localisation et la répartition des marchés sur le territoire de la ville
1.2.4 Le rôle des marchés dans les circuits dapprovisionnement intra-urbains
1.2.5 Les relations fonctionnelles entre marchés et pôles commerciaux: limportance des moyens de transport pour la redistribution
1.2.6 La situation actuelle des marchés: diagnostic technique, sanitaire et économique
1.2.7 Le développement dhypercentres
1.2.1.1 Un secteur moderne de la grande distribution
1.2.1.2 Un secteur import-export animé principalement par des grands commerçants nationaux organisés en réseaux
1.2.1.3 Un secteur de la petite distribution formelle fragilisé
1.2.1.4 Un secteur des marchés qui concentre lessentiel de lactivité et du dynamisme du secteur commercial informel urbain
Le secteur commercial de lapprovisionnement des villes dAfrique subsaharienne peut être décrit succinctement comme suit:
Il se compose essentiellement des filiales de grandes sociétés commerciales étrangères (par exemple, de la Société commerciale pour lAfrique occidentale (SCOA), de la Compagnie française de lAfrique occidentale (CFAO), etc.). Depuis les années 60, elles sont intervenues principalement dans deux directions:
Dautres opérateurs étrangers ou nationaux ont ouvert, à leur suite, dans la plupart des grandes villes africaines, des supermarchés et des supérettes dont les caractéristiques en matière de produits (essentiellement importés, même pour les produits frais) et de clientèle sont semblables. On nobserve pas pour le moment un réel développement de ce secteur dans les villes.
Ce secteur fournit aujourdhui à la population la plus grande partie de son approvisionnement en produits alimentaires de première nécessité et en produits manufacturés.
Ce secteur est issu des anciens circuits marchands à longue distance qui ont façonné lorganisation des échanges en Afrique depuis la période pré-coloniale. Organisant à lorigine les échanges entre des aires de production complémentaires (produits de la forêt comme la cola; contre produits de la zone soudano-sahélienne comme le natron, le poisson séché, le bétail; etc.), ces échanges se sont ensuite accrus pendant la période coloniale pour répondre aux exigences de ravitaillement des troupes et des villes naissantes (céréales, viande, oléagineux principalement). Progressivement, les marchands africains ont saisi les nouvelles opportunités commerciales de la collecte des «produits du cru» (karité, arachide, huile de palme, etc.), dabord comme sous-traitants des grands comptoirs et des libano-syriens, ensuite pour leur propre compte, comme exportateurs.
Les grands commerçants daujourdhui sont très souvent les descendants de ces anciennes lignées marchandes. Ils sont organisés en réseaux solidement structurés, reposant à la fois sur des rapports de parenté et de clientèle. Le «capital relationnel», en dautres termes, le nombre de dépendants, qui peut être mobilisé à leur profit par ces «patrons de commerce» est une condition-clé de leurs stratégies commerciales et donc de leur réussite.
La diversification des risques entre plusieurs activités (commerce des produits agricoles, transport, importations de marchandises générales, etc.) est lune des principales caractéristiques de la pratique entrepreneuriale de ces commerçants.
Ces réseaux marchands ont des champs géographiques dintervention multiples. Ils opèrent aussi bien à léchelle régionale, nationale, transfrontalière quintercontinentale4 (LABAZEE, 1993). Ils mettent en oeuvre simultanément des circuits officiels et des circuits parallèles à cheval sur plusieurs pays, «jouant des différences de politiques économiques suivies par les Etats, de leur appartenance à des zones monétaires distinctes, du prix et de la disponibilité de ces marchandises de part et dautre de ces frontières» (EGG et al., 1988).
Ils sont les principaux fournisseurs des revendeurs des marchés en produits manufacturés et en denrées de première nécessité (riz importé, farine, sucre, etc.). Dans les pays soudano-sahéliens, ces grands commerçants ont aussi maintenu un rôle déterminant dans les circuits de commercialisation des céréales locales et, à ce titre, ils sont les fournisseurs privilégiés, à certaines périodes de lannée, des grossistes des marchés.
Il sagit de lensemble des petites entreprises commerciales de la ville répertoriées par la Chambre de commerce: boulangeries, quincailleries, librairies-papeteries, commerces alimentaires, etc. Ces entreprises ont peu de rapports économiques avec les commerçants des marchés. Lessentiel de leur clientèle se recrute parmi les ménages salariés du secteur public et privé.
Aussi victimes de la concurrence des produits de la fraude, les petites entreprises sont surtout touchées par les conséquences de la crise économique sur les revenus et lemploi des ménages salariés.
Le marché est encore lendroit où sapprovisionne la très grande majorité de la population urbaine aussi bien pour le manufacturé et le vivrier que pour les grands produits de base de première nécessité (riz, sucre, farine, etc.).
Le commerce des produits alimentaires est un élément important de lactivité économique des marchés. Mais les grands marchés centraux doivent leur dynamisme, leur rayonnement national, et même souvent international, à la vente des produits manufacturés.
Selon leur situation - proximité de plusieurs frontières, marchés de capitales portuaires -, ils sont devenus des centres privilégiés de groupage et déclatement de produits manufacturés acheminés par les multiples circuits animés tant par les réseaux fortement structurés des grands commerçants que par les «petites entreprises contrebandières» (LABAZEE, 1993) (détaillants des marchés, petits trafiquants et «aventuriers» des villes). Cest essentiellement pour ces produits que se pressent autour des boutiques et des étals les consommateurs urbains, les producteurs des régions voisines, les commerçants et les colporteurs étrangers venus chercher auprès de leurs logeurs des lots de pagnes, de tissus, de friperie, de pièces détachées, etc.
Aussi distingue-t-on nettement deux sous-secteurs dans lactivité des marchés:
Les commerçantes de vivriers occupent les secteurs les plus dégradés des marchés, ceux qui cristallisent tous les dysfonctionnements: surconcentration, enclavement, manque dhygiène, bâti vétuste à la limite du dangereux. Quant à la rue, elle accueille aujourdhui non seulement les petites détaillantes progressivement refoulées hors des marchés par les vendeurs de produits manufacturés, mais aussi, en nombre toujours plus grand, des grossistes de produits vivriers.
1.2.2.1 Les marchés dont linfluence sexerce sur la ville, le quartier ou les zones intermédiaires
1.2.2.2 Les marchés «officiels», «administrés» ou «organisés» (suivant les appellations en vigueur) par opposition aux marchés de rue ou spontanés
1.2.2.3 Les marchés polyvalents
1.2.2.4 Les marchés urbains et les marchés villageois
1.2.2.5 Les marchés diurnes et les marchés «de nuit»
1.2.2.6 Les marchés provisoires et les emplacements réservés
Suivant les critères de niveaux de desserte, déquipement et de services, ainsi que de catégories de produits vendus, il existe différentes typologies de marchés urbains.
Les grands marchés historiques localisés dans les quartiers anciennement urbanisés exercent un rayonnement sur la ville toute entière.
Souvent dénommés marchés centraux, même sils ne sont plus situés au centre géographique de la ville actuelle, ils réunissent le nombre le plus important de commerçants, ceux dont la gamme de produits et de services est la plus étendue. Le rayonnement de certains de ces marchés centraux dépasse de loin la seule clientèle locale (la ville) mais atteint la région, le pays tout entier ou même des territoires plus vastes.
Les marchés de quartier (parfois appelés secondaires) sont des équipements de proximité assurant essentiellement un approvisionnement alimentaire des habitants. On considère que leur desserte correspond à environ 10 000 habitants.
Dans les grandes agglomérations, on observe, pour quelques marchés, une desserte à un échelon intermédiaire: selon les découpages administratifs, on parlera de marché dintérêt communal ou de marché de secteur, voire de marché interquartiers. Leur chalandise concerne au moins 100000 habitants.
Parmi les marchés organisés, les plus anciens sexercent sur un terrain officiellement affecté spécifiquement à cet usage. Ils se caractérisent généralement par un certain niveau déquipement (halle, hangars, stalles, latrines, borne-fontaine) et dorganisation, et, à ce titre, ils bénéficient de prestations de la mairie pour lentretien et le nettoyage. Dautres marchés, dits organisés, sont dorigine spontanée et ne disposent daucun équipement public mais sont officiellement «reconnus». Dans les deux cas, la distinction entre marché organisé et marché spontané est surtout dordre fiscal: les marchés «organisés» sont ceux où les droits de place sont en principe régulièrement perçus.
La plupart des marchés de quartiers sont des marchés spontanés, localisés dans la rue, et leur commerçants sont uniquement des tabliers ou des vendeurs à la sauvette. Leur existence est connue des services de la municipalité mais celle-ci ny perçoit pas de droits de place et ny assure aucun service.
En effet, sil existe souvent une liste et une première typologie des marchés de la collectivité locale, celles-ci ne prennent généralement en compte que les mar-chés où sont perçus les droits de place. Il est alors très important de réintroduire les marchés de rue pour une première appréciation, non seulement de la dynamique des marchés en termes de fonctions et de services au public, mais aussi pour évaluer les recettes potentielles pour la collectivité locale.
A lexception des marchés spécialisés, tous les marchés urbains sont polyvalents, cest-à-dire des marchés vendant aussi bien tous les produits manufacturés que les produits alimentaires, des marchés spécialisés dans un seul produit ou une gamme de produits.
Dans cette catégorie, seuls diffèrent dun marché à lautre létendue de la gamme de produits, le nombre et la variété de services (artisans, réparateurs, etc.) et les prix. Les grands marchés présentent toujours la gamme complète de prix et de qualité nécessaire à la satisfaction dune demande hétérogène (clientèle de proximité pour les produits banals, clientèle de produits de luxe, nationale et/ou étrangère).
Nombre de marchés spécialisés résultent dune décision des Autorités qui ont regroupé en un lieu déterminé des activités et des commerces quelles ne voulaient plus laisser subsister au centre-ville, du fait des nuisances entraînées par les ventes de combustibles, de matériaux de construction et danimaux, les activités dartisans divers (ferrailleurs, forgerons, réparations automobiles, etc.) ou bien celles dont les vendeurs sont devenus si nombreux quelles justifient un emplacement spécifique.
On constate que, progressivement, sous leffet de lintervention des Autorités ou du fait des commerçants et artisans à la recherche despace plus fonctionnels, les marchés spécialisés et les artisans sont repoussés de plus en plus loin des centres-villes. Cest particulièrement le cas pour tous les produits et les services liés à la construction de lhabitat domestique. Cet éloignement représente un coût additionnel dapprovisionnement pour la population.
On associe aux marchés spécialisés les «marchés de gares routières» qui ne sont pas non plus de véritables marchés dapprovisionnement polyvalents.
On désigne sous ce terme la concentration dactivités commerciales liées à la présence de voyageurs. Ces marchés se caractérisent par le nombre important dactivités et de services liés à la restauration (gargotes, vente de produits alimentaires préparés ou non sur place) et le grand nombre de vendeurs ambulants.
Dautres caractéristiques peuvent être retenues pour spécifier certains marchés dans lensemble du secteur commercial non sédentaire de la ville.
Dans certaines grandes villes subsahariennes, les villages ayant été englobés par lextension urbaine ont pu maintenir des caractères propres à leur origine rurale, comme le type dhabitat, la proportion élevée dhabitants pratiquant une activité agricole régulière, et notamment la fréquence des marchés. Dans ces «villages-quartiers», la fréquence des marchés nest pas celle quotidienne des marchés urbains.
Des marchés de quartier peuvent ne présenter de jour quune activité réduite (faible nombre de commerçants, gamme de produits limitée) et jouer au contraire un rôle dominant dans lapprovisionnement urbain le soir ou la nuit. Cest le cas, par exemple, du marché de Farakan à Bobo-Dioulasso qui, dès 19 heures, prend le relais du marché central. De jour, il compte environ une centaine de commerçants et, la nuit, il totalise plus de 1000 vendeurs, offrant aussi bien des produits vivriers que toute une gamme variée de produits manufacturés (vêtements, équipements domestiques, etc.).
Les marchés provisoires sont installés sur des terrains réservés par lAdministration pour la construction de marchés dans les zones dextension. On trouve, dans cette catégorie, des marchés en cours de construction et des terrains vagues. Ces terrains, actuellement non utilisés, constituent une réserve demplacements pour les années à venir.
1.2.3.1 Du point de vue géographique
1.2.3.2 Du point de vue de la population desservie
1.2.3.3 La répartition en fonction du découpage administratif
La répartition des marchés, du point de vue géographique, est forcément très variable dune ville à lautre selon la morphologie de la ville (contraintes de site plus ou moins importantes), le type durbanisation, les politiques foncières mises en oeuvre, etc. La répartition des marchés sur le territoire de la ville est aussi tributaire de la plus ou moins grande facilité de circulation des marchandises et des commerçants: elle est donc intimement liée au développement du réseau routier.
Mais, au-delà dune simple localisation des marchés sur une carte, cest le croisement de lanalyse typologique des marchés avec leur mode de répartition spatiale sur le territoire de la ville qui fait apparaître les facteurs déquilibre ou de déséquilibre dans le réseau des marchés urbains.
Si lexamen du réseau des marchés, dune ville à lautre, révèle bien évidemment des situations variées, la polarisation des activités commerciales sur un seul grand marché et ses effets de dépression sur le réseau des marchés secondaires sobserve fréquemment. Nous aurons loccasion dy revenir et den mesurer ses implications à la fin de ce chapitre.
Les données précises sur la population desservie par marché sont difficiles à établir et demandent toujours une étude approfondie. Mais la démarche est nécessaire afin de constituer une base pour la programmation des besoins futurs en équipements commerciaux.
Elle doit partir des observations et des analyses des marchés qui ont permis dapprécier le niveau dactivité, le nombre de vendeurs, les surfaces commerciales et la nature des produits vendus. La répartition des zones dinfluence est définie en privilégiant la fonction de proximité que chaque marché, même le plus important, est appelé à jouer sur la population environnante pour les besoins quotidiens.
On peut alors calculer la population actuellement desservie et celle à desservir par le marché à court et moyen termes, compte tenu du taux de croissance démographique rapporté aux densités observées et au type durbanisation de la zone desservie.
Le ratio m2 de surface commerciale (marché) pour 100 habitants fournit les indications concernant le niveau de desserte actuelle. Sur la base dun ratio de 15 m2 pour 100 habitants, généralement estimé comme un niveau de desserte commerciale satisfaisant, on détermine la surface de terrains nécessaire pour les marchés à prévoir et le niveau du déficit pour chaque marché existant.
On notera que la saturation de nombreux marchés et la prolifération de vendeurs à la sauvette dans les rues sont certainement le signe de linsuffisance de places de marchés dans certains quartiers.
Inversement, le gonflement de leffectif des marchés et la multiplication des petits métiers de rue sont aussi à mettre en rapport avec une situation économique générale médiocre.
Dans ce contexte, il faut pouvoir distinguer entre les besoins en nouveaux marchés, dont la création devra accompagner la croissance de la population urbaine, et ceux qui, du fait de la réduction extrême du chiffre daffaires et de la parcellisation des volumes de vente caractérisant pour longtemps encore lactivité commerciale des vendeurs non sédentaires, ne pourront être satisfaits.
La distribution des marchés dans une ville, en fonction du découpage administratif, permet dapprécier le niveau déquipement marchand de chaque commune.
Il ny a, en général, pas déquilibre entre les communes pour des raisons qui tiennent à la fois à lhistoire et au mode de développement urbain:
Cette répartition, forcément provisoire, évolue au fur et à mesure que la ville se développe, et a une incidence sur la gestion des marchés et le montant des recettes perçues.
Les communes de périphérie, lorsquelles sont très peuplées, ont un grand besoin des recettes que leur apportent les marchés. Ce sont précisément celles dont les marchés sont les plus pauvrement équipés en boutiques et où les locations mensuelles représentent des ressources plus sûres que les faibles droits de place versés par les micro-détaillantes de vivriers constituant le gros de leffectif des vendeurs de leurs marchés.
Doù la tentative des communes daugmenter la rentabilité de ces marchés en délivrant des permis de construire à des commerçants souvent absentéistes qui profitent de cette opportunité pour «geler» leur installation (boutique transformée en dépôt), ce qui aboutit à leffet inverse à celui recherché en terme de dynamisme économique.
1.2.4.1 Les marchés dapprovisionnement et de redistribution
1.2.4.2 Les marchés de consommation
Le rôle joué par les marchés dans ces circuits et la hiérarchisation ou spécialisation des places de marchés qui se dessinent dans larmature commerciale varient selon les produits considérés: vivriers ou manufacturés.
Suivant les fonctions quils remplissent dans les circuits dapprovisionnement en produits vivriers, on distingue deux grandes types de marchés urbains:
Ce sont ceux où opèrent les grossistes de vivriers. Ainsi, les marchés dapprovisionnement et de redistribution fonctionnent tout à la fois comme «marchés de gros» et «marchés de détail». Ces concentrations de grossistes correspondent souvent à des points de rupture de charge qui varient selon la géographie des approvisionnements (axes routiers principaux, aires à proximité de gares routières ou ferroviaires, débarcadères, etc.). Mais elles trouvent aussi leur origine dans le contexte socio-économique et politique ayant marqué le développement du secteur marchand de la ville (formation du réseau des marchés, interventions de lEtat).
Les principaux dentre eux représentent toujours des lieux darticulation entre circuits nationaux et circuits locaux, entre circuits internationaux et nationaux.
Pour leur approvisionnement, ils drainent les productions et les marchandises bien au-delà des frontières nationales, leur clientèle se composant aussi bien des revendeurs détaillants, locaux et étrangers, que de lensemble des consommateurs urbains.
Ils assurent souvent une fonction de réexpédition pour des villes éloignées.
Quatre facteurs les caractérisent comme places de gros prééminentes:
Dautres marchés dapprovisionnement ont une influence plus locale. Le nombre de grossistes y est réduit (une vingtaine tout au plus), mais on y observe un nombre assez élevé de «revendeuses-détaillantes». La fonction dapprovisionnement et de redistribution quils assurent se limite aux besoins de consommation de la capitale, et éventuellement à un ensemble de quartiers des zones suburbaines.
Ils sont souvent spécialisés dans un ou deux types de produits vivriers, liés à leur situation géographique (proximité dune zone de grande production maraîchère, etc.). En amont, les grossistes de ces marchés se réapprovisionnent à certaines saisons sur les marchés principaux tandis quen aval, leur réseau de redistribution ne concerne quun nombre réduit de marchés.
Il faut souligner dès à présent quil existe toujours plusieurs marchés dapprovisionnement et de redistribution en milieu urbain.
La dispersion de places de gros est un élément important de la problématique de la création des marchés de gros dans les villes subsahariennes.
Sous le nom de marchés de consommation sont regroupés les marchés de quartier, officiels et spontanés, les marchés spécialisés et les marchés de gare routière. Il sagit toujours des marchés de détail.
Les marchés dapprovisionnement et de redistribution structurent lespace urbain sur un réseau de centres de décision commerciale qui présente les caractéristiques suivantes:
Le réseau des marchés ne présente pas un caractère figé dans le temps: selon les saisons, le type de produit et leur origine géographique, limportance respective des marchés dapprovisionnement et de redistribution se modifie, le nombre de grossistes qui sy trouvent augmente ou, au contraire, se contracte.
Lévolution des conditions et des modes de transport, tant des voyageurs que des marchandises, lorganisation des parcours, spontanée ou guidée par des interventions administratives, expliquent lémergence de certains marchés dapprovisionnement, leur déclin, voire leur disparition.
Elle traduit une capacité de réaction très rapide des circuits dapprovisionnement à toute intervention extérieure.
Ceci concerne surtout les grossistes qui travaillent à lextérieur des marchés, dans des conditions très précaires, en particulier sur la chaussée.
On observe souvent, suite à des mesures administratives concernant la réglementation de la circulation, linterdiction de tel ou tel commerce pour cause de nuisance, la disparition, voire la reconstitution, des activités des grossistes dans dautres lieux de la ville, ce qui entraîne de nouvelles concentrations de détaillants et, par là même, le développement dun véritable marché dapprovisionnement et de redistribution.
Il y a à la fois autonomisation partielle et hiérarchisation des places de marchés du point de vue des circuits dapprovisionnement en produits vivriers.
En effet, si les grossistes des places de gros secondaires ont leurs réseaux dapprovisionnement directs auprès des producteurs ou des grossistes régionaux, en période de rareté (chronique comme la soudure ou conjoncturelle), ils sont toujours obligés de se réapprovisionner auprès des grossistes du principal marché de gros qui ont seuls les moyens financiers et le réseau de collecteurs capables de garantir lapprovisionnement pérenne de la ville.
Ce dernier type de marché organise de fait une hiérarchisation dans les circuits de distribution infra-urbains.
Dans le cas des produits manufacturés, on observe toujours une polarisation des activités dapprovisionnement et de redistribution sur un seul grand marché (marché spécialisé ou marché polyvalent).
Lanalyse des relations fonctionnelles entre marchés ne doit pas se limiter aux seuls marchés (organisés ou spontanés). Une approche en terme de circuits dapprovisionnement doit prendre en compte dautres pôles commerciaux qui constituent, avec les marchés, lensemble des centres dapprovisionnement et de redistribution dune ville. Ils assurent les fonctions commerciales essentielles de conditionnement, de stockage, de conservation, de transformation des produits et de transport, sans lesquelles les produits narriveraient pas sur les marchés.
Il nous apparaît indispensable de pouvoir situer sur une carte, en même temps que les marchés, ces différents pôles dapprovisionnement et de redistribution pour comprendre la dynamique des relations entre les marchés au sein de la ville. On peut, de cette manière, saisir les raisons pour lesquelles des marchés simplantent à tel ou tel endroit, celles qui font que certains marchés sétiolent, ou que dautres connaissent au contraire un fort développement.
Les systèmes de transport qui relient les marchés entre eux, et entre ces derniers et les pôles commerciaux, jouent un rôle particulièrement important.
Trop souvent, lors des opération daménagement ou de création de marchés, la question des transports est oubliée. Lorganisation fonctionnelle doit prévoir des aires de stationnement pour le déchargement (poids lourds pour lapprovisionnement, camionnettes, véhicule légers, taxis, ou transport non mécanisé pour la redistribution).
La réflexion sur les conditions dapprovisionnement des ménages urbains doit tenir compte de ce réseau commercial et de transport urbain spontané qui est le moins coûteux et le plus adapté aux revenus des citadins.
En tenir compte, cest principalement définir des emplacements qui leur seront réservés.
Toutes les grandes villes africaines ont connu et connaissent encore une forte croissance démographique. Parallèlement, la situation économique a engendré le développement du secteur informel et la multiplication des petits métiers.
Ces éléments ont eu pour conséquence laugmentation considérable des effectifs des vendeurs sur les marchés existants et, de façon générale, dans toute la ville. Cette augmentation na pas été accompagnée dune expansion significative du nombre déquipements commerciaux.
Ces deux facteurs conjugués sont en grande partie à lorigine de la situation actuelle caractérisée par la saturation, la désorganisation et linsalubrité des équipements existants ainsi que par loccupation généralisée des emprises de la voirie par les vendeurs.
La situation de profondes carences techniques et sanitaires qui prévaut sur lensemble des marchés a deux causes essentielles: une insuffisance dinfrastructures techniques de base (drainage, eau, électricité) et un manque dentretien et de services.
Sur la plupart des marchés, les infrastructures de base font défaut, soit parce que ces marchés nont jamais été construits (cest la situation de tous les marchés spontanés), soit parce que, bien quexistants, en particulier sur les grands marchés centraux, ils ne fonctionnent pas ou sont insuffisants. Quant à lentretien et aux services (évacuation des ordures ménagères, nettoiement, entretien des installations et des réseaux) en raison des difficultés tant financières quorganisationnelles de la part des Autorités, ils sont assurés de manière très imparfaite et, seulement, sur les quelques marchés organisés.
Du point de vue organisationnel, les dysfonctionnements les plus apparents se traduisent principalement par le mélange des activités de gros et de détail, le regroupement non fonctionnel des produits, la présence dactivités nuisibles ou dangereuses sur les marchés (utilisation de foyers dans les activités de restauration, blanchisserie, repassage, etc.).
Lensemble de ces facteurs techniques, sanitaires et organisationnels créent des risques graves pour les usagers consommateurs et commerçants.
Certains dysfonctionnements sont moins connus et demandent à être soulignés. On mentionnera, en particulier, le cercle vicieux qui sest instauré à cause de la concurrence des vendeurs à la sauvette qui sagglutinent autour des grands marchés: la prolifération de ces vendeurs qui, pour la plupart, ne paient pas de droits de place, finit par entraver laccès de celui-ci aux usagers consommateurs. Cette situation incite alors les commerçants du marché, qui eux paient des droits, à en sortir à leur tour pour tenter de maintenir leur chiffre daffaires. Cest lune des raisons de la sous-occupation de lintérieur des grands marchés que lon peut constater un peu partout.
Il faut noter, enfin, le faible dynamisme commercial de nombreux marchés de quartier créés à loccasion de programmes durbanisme récents. Ces marchés ont été en général enclavés en plein coeur du quartier, suivant une démarche urbanistique classique, mais aujourdhui obsolète en Europe, qui fait abstraction des axes de circulation et de chalandise. Ces marchés nont jamais correctement fonctionné, les vendeurs ayant toujours préféré sinstaller sur les voies routières les plus passantes à la lisière du quartier.
Le développement dhypercentres concentrant au coeur des agglomérations lensemble des formes dactivité commerciale (gros, demi-gros, détail, micro-détail), à la fois sur lespace public du marché, dans les rues adjacentes et dans les entrepôts des grossistes des quartiers environnants, est un aspect caractéristique de lurbanisme commercial de nombreuses villes subsahariennes aujourdhui.
Il est frappant de constater que les activités dapprovisionnement et de distribution des produits vivriers occupent, en définitive, une place secondaire dans les flux économiques et financiers brassés par ces commerces.
La vente des produits manufacturés est le véritable moteur de lactivité économique de lhypocentre. Certains sont fournis par les circuits non contrôlés dimportation et de réexportation. Dautres permettent une accumulation plus rapide de capital dans un contexte de crise économique aiguë. Les denrées de base importées telles que le riz, le sucre, le sel, la farine, et les produits manufacturés tels que les tissus, les articles de friperie et les pièces détachées, occupent le premier rang dans les échanges trans-frontaliers.
La polarisation des activités commerciales dans le centre-ville sexplique largement par le rôle charnière que joue la plupart des grands marchés entre ces différents circuits.
On doit souligner, par conséquent, que cette surconcentration dactivités et de vendeurs sur un marché pôle exerce un effet dépressif sur lensemble du réseau de distribution.
Les marchés de quartier étant peu attractifs, les usagers (clients et commerçants) les délaissent au profit du marché central pôle, qui exerce alors, à léchelle urbaine, une majeure attraction. Ce processus précipite le déclin des autres marchés dont le niveau de recettes est tellement faible quils ne peuvent pratiquement faire lobjet daucun investissement en létat actuel des choses.
Cette analyse montre comment des interventions publiques peuvent influencer le fonctionnement de lensemble du réseau des marchés. En effet, une intervention limitée au marché pôle risque fort daccentuer encore le déséquilibre de larmature des marchés en survalorisant leffet dattraction de celui-ci.
Il est donc nécessaire dinscrire les interventions publiques dans une stratégie densemble de rééquilibrage du réseau des marchés.
1.3.1 Des situations diverses qui appellent des réponses adaptées
1.3.2 Les caractéristiques des activités de gros dans le tissu urbain: lieux et modes de fonctionnement
1.3.3 Les fonctions dapprovisionnement et de réexpédition
1.3.4 La problématique de la création de marchés de gros
La création de marchés de gros est aujourdhui une nécessité pour les grandes villes subsahariennes. Le marché de gros est en effet la réponse rationnelle pour le développement dune fonction commerciale moderne.
Cette solution suppose cependant de saisir correctement le fonctionnement des circuits de gros à lintérieur de la ville, circuits sur lesquels les décideurs ont le plus souvent une vision réductrice et quelquefois erronée.
Un même problème, en effet, détermine des situations très diverses qui demandent des réponses différentes, cas par cas:
Les caractéristiques ainsi dégagées permettent dapprécier les besoins réels de délocalisation, voire simplement de localisation et de définir les nécessités du ou des marchés de gros à créer.
On peut aussi, et cest fondamental, évaluer lamélioration de lapprovisionnement urbain ou au contraire laggravation des dysfonctionnements que telle ou telle solution entraîne. Le souhait des Autorités est plus souvent dicté par des considérations sur lenvironnement (réductions des nuisances) que soutenu par la conviction que la création dun marché de gros est une étape économique nécessaire pour lamélioration des circuits dapprovisionnement des populations urbaines. Bien que ces deux raisons ne sexcluent dailleurs pas lune lautre, les effets attendus ne sont pas les mêmes et les retombées politiques seront différentes. Il faudra donc définir très précisément les objectifs.
1.3.2.1 Les produits vivriers
1.3.2.2 Les marchandises générales et les denrées alimentaires de première nécessité: une surconcentration dentrepôts dans le centre-ville
Lorganisation des activités de gros recouvre des situations contrastées suivant les groupes de produits (vivriers locaux et importés) et les catégories de grossistes.
On notera, en préambule, ces deux caractéristiques majeures de la répartition spatiale des circuits de gros qui sont communes à toute la sous-région:
Lapprovisionnement des villes en produits vivriers est organisé par des grossistes regroupés sur les marchés dans des quartiers proches des grands marchés, et de plus en plus sur la voie publique.
Les lieux dactivité se différencient nettement en fonction des types de produits commercialisés.
Les grossistes de produits frais (légumes surtout) et de féculents (banane plantain) exercent leurs activités sur les marchés mais aussi, le plus souvent, sur la voie publique. Ces aires de dégroupage des cargaisons peuvent sêtre développées sur un des axes principaux de pénétration de la ville, très souvent à côté dune gare routière.
Cette situation est générale. Elle sobserve aussi bien à Conakry et à Abidjan quà Bouaké, Bangui, Brazzaville, Dakar, etc.
Pour les fruits et les tubercules, il faut remarquer que les plates-formes darrivée fonctionnent à la fois comme relais dans le trajet des poids lourds et comme lieux dachat. Il sagit daires de stationnement situées à côté de grands marchés et de gares routières où sont donnés les ordres dacheminement vers lintérieur de la ville. Les chargements étant le plus souvent achetés en bloc, le dégroupage y est rare.
Ce mode de distribution par chargement est fonction de la taille du marché de consommation urbain: il se développe dans les villes de plus dun million dhabitants.
Les grossistes de produits vivriers secs, tels que les céréales, les légumineuses, les tubercules et, dans certains cas, les fruits (ces deux produits pouvant être traités ensemble par les mêmes grossistes) sont installés principalement sur les marchés (principaux et secondaires) ou dans les quartiers où ils forment souvent un ensemble dense de magasins réunis dans une ou deux rues.
Le regroupement des grossistes sur un marché ou dans un quartier résulte de la combinaison dun ensemble de facteurs historiques (primauté et pouvoir des commerçants de produits secs par rapport aux acteurs des autres circuits commerciaux), ethniques et familiaux (spécialisation dans un type de produits), et enfin socio-économiques (communautés de besoins et dintérêts).
Les quartiers «spécialisés» dans lesquels opèrent aujourdhui les grossistes de produits vivriers sont situés à proximité immédiate du marché central5.
Ce processus, assez récent, de transformation du tissu urbain dhabitation autour des marchés au profit de la fonction commerciale (plus spécialement le commerce de gros et le stockage) trouve sa source dans la pression foncière qui découle de la saturation des installations actuelles des marchés centraux.
En résumé, on observe que les lieux où sexerce le commerce de gros de produits vivriers présentent trois caractéristiques:
Dans ces conditions, lactivité des grossistes représente un facteur parfois non négligeable, mais surtout le plus visible et souvent le plus spectaculaire, des nuisances liées à la présence des grossistes de vivriers dans les villes. Cette situation alimente le discours des Autorités sur «la nécessaire délocalisation des grossistes du centre-ville».
Les besoins prioritaires exprimés par les grossistes de produits vivriers sont de deux types:
Contrairement à lactivité des grossistes de produits vivriers dont lactivité est dispersée, le commerce de gros des marchandises générales et denrées alimentaires importées se déroule essentiellement dans les centres-villes.
Les lieux dactivités dans le commerce de gros des denrées alimentaires se différencient suivant la catégorie du commerçant:
Les grands grossistes importateurs ou grossistes distributeurs
La commercialisation des denrées alimentaires est organisée depuis leur réseau de magasins entrepôts.
Les magasins des grands importateurs grossistes peuvent être regroupés en majorité dans un seul quartier adjacent au marché central, comme Dantokpa-Gbogbanou à Cotonou ou Madina à Conakry, ou quelque peu dispersés dans lagglomération. Mais même dans ce dernier cas, on observe toujours une nette concentration dentrepôts dans les quartiers du centre-ville.
On rappellera que la stratégie de la plupart des grands grossistes de denrées alimentaires cherchant à limiter au maximum leurs coûts de stockage consis-te à revendre immédiatement la plus grande partie du stock aux clients semi-grossistes. Ces opérateurs cherchent à entreposer les stocks les plus réduits dans leurs magasins, qui sont souvent danciens entrepôts situés dans leurs concessions et dont les dépenses dentretien sont minimes. Cest le cas généralement des grossistes des villes sahéliennes.
Au contraire, des dépenses importantes pour la construction dentrepôts de grande taille ou la location de magasins sont consenties par les principaux grossistes et/ou importateurs de villes côtières, telles que Cotonou ou Conakry, grâce aux profits substantiels générés par le commerce de réexpédition non contrôlé (riz principalement) vers les pays voisins.
Les conditions dactivité, du point de vue de la majorité de ces opérateurs privés, sont par conséquent satisfaisantes.
Tout au plus existe-t-il un problème pour les «derniers arrivés» du fait de la saturation aujourdhui presque totale des quartiers-entrepôts adjacents aux marchés centraux. Cest la raison pour laquelle on a pu observer quelques implantations décentrées de nouveaux magasins de stockage, comme à Conakry en 1991 ou à NDjamena en 1992.
Mais ces initiatives restent très ponctuelles et ne constituent pas les prémices dun mouvement plus général.
La tendance encore et toujours observée est celle de la densification du centre-ville par les magasins des grands grossistes importateurs et distributeurs de denrées alimentaires ou de produits manufacturés: Cotonou et Conakry en sont des exemples types.
Les petits grossistes
Les lieux dactivités sont identiques à ceux des commerçants de produits vivriers de base: on les trouve aussi bien sur les marchés que dans les quartiers, et exceptionnellement sur la chaussée, comme à Cotonou, à côté du marché Dantokpa. Leurs contraintes étant pratiquement les mêmes que celles des grossistes de produits vivriers, leurs souhaits, en matière damélioration du fonctionnement de leurs activités, sont identiques.
1.3.3.1 Les marchés de gros terminaux: une dominante, la fonction approvisionnement
1.3.3.2 Des villes-carrefours assurant les fonctions de groupage pour la réexpédition
1.3.3.3 La fonction réexpédition: un rôle moteur pour les grossistes importateurs de riz et de denrées alimentaires
Ils opèrent le dégroupage nécessaire à la répartition entre les différents marchés de quartiers. En aval, les clients sont principalement les petites détaillantes des marchés et, secondairement, les consommatrices.
Encadré 1. Importance de quelques marchés de gros dans différentes villes dAfrique et de Madagascar
Bobo-Dioulasso Une ville secondaire de quelque 300000 habitants en 1990, mais un centre de réexpédition pour les fruits et les céréales. A Bobo-Dioulasso, deux marchés centralisent les activités des grossistes: le marché de fruits et tubercules de Sikasso Cira, organisé par des grossistes, et tourné quasi exclusivement vers la réexpédition sur la capitale et les villes du Niger, et le Marché central polyvalent de la ville où exercent les petits grossistes de céréales ainsi que les grossistes de légumes (sur la voirie à côté du marché) pour lapprovisionnement local. Les quantités traitées par les grossistes du Marché central et de ses abords (légumes frais) portent environ sur 30000 tonnes, celles traitées par le marché de Sikasso Cira sur environ 70000 tonnes. Il faut également noter les 60000 tonnes environ de céréales transitant par les magasins des grossistes stockeurs de la ville qui sont, pour lessentiel, destinées à la réexpédition sur Ouagadougou et les villes sahéliennes. NDjamena Une ville moyenne denviron 600000 habitants en 1991. A NDjamena, le Marché au mil constitue la plus importante concentration des activités de gros de produits vivriers de la capitale (plus de 60000 tonnes de céréales), loin devant le Marché central (20000 tonnes) qui est pourtant le pôle dominant pour lapprovisionnement en produits secs et frais. Des aires de dégroupage très actives (produits frais, céréales et aussi poisson frais) se sont développées sur des marchés dapprovisionnement secondaires tels Dembe et Choléra. Au total, on a évalué à environ 45000 tonnes les flux commerciaux de produits maraîchers, fruits et tubercules arrivant sur les quatre marchés dapprovisionnement et de redistribution de la capitale tchadienne, dont 80 pour cent sur les deux principaux marchés urbains (Marché au mil et Marché central). Dakar Une très grande agglomération de près de deux millions dhabitants en 1994. Il existe plusieurs marchés dapprovisionnement et de redistribution de produits vivriers à Dakar. Les deux plus importants en nombre de grossistes et en volumes traités sont situés dans la commune de Pikine: il sagit du marché de fruits Syndicat, regroupant environ 200 grossistes et plus de 1500 vendeurs semi-grossistes, et du marché de légumes et de tubercules de Thiaroye-Gare. Le premier traite environ 260000 tonnes par an alors que le seul «parc à produits» de Thiaroye-Gare, qui regroupe environ 200 grossistes et courtiers, traite à plus de 100000 tonnes de produits frais périssables par an. Ces deux marchés sexercent dans des conditions extrêmement difficiles. Antananarivo Une grande ville denviron 1,1 million dhabitants en 1991. La géographie des zones dapprovisionnement de la capitale malgache a suscité le développement de deux grands marchés, Anosibe et Andravoahangy, aux points de rupture de charge des camions et des camionnettes en provenance de lOuest et du nord. Lactivité du marché dAnosibe, qui sest développée de façon spontanée sur une ancienne gare routière au sud-Ouest de la ville, porte sur quelques 100000 tonnes annuelles, dont 60 pour cent en produits frais périssables (fruits et légumes) et le reste en produits secs. Environ 12000 à 15000 tonnes de fruits et légumes sont réexpédiées sur Toamasina et Majunga. Andravoahangy est devenu le premier centre dapprovisionnement de produits secs (riz et légumineuses) des quartiers nord très peuplés et des localités suburbaines. Ce marché de gros assure aussi la commercialisation des légumes verts produits dans la couronne maraîchère nord et nord-est, et il est un important centre de stockage et de commercialisation de loignon et de lail. Son activité pour les produits secs porte sur au moins 20000 tonnes. Quant à Isotry, situé en plein centre urbain à proximité de la gare ferroviaire et officiellement seul marché de gros de la capitale, il a perdu une grande partie de sa fonction de redistribution des produits secs au profit des deux autres marchés de gros. Le marché dAnalakely ne représente plus, quant à lui, le pôle de redistribution quil a assuré au niveau des circuits dapprovisionnement dans les années 60. Il nassume plus guère un rôle de gros que pour la commercialisation de certains légumes verts (brèdes, cressons et tous les légumes «haut de gamme» dits «européens»). Bouaké Une petite ville moyenne denviron 500000 habitants, mais un rôle exceptionnel de carrefour dans les circuits de commercialisation de produits vivriers de la sous-région. La ville de Bouaké et son marché de gros jouent un rôle particulièrement important et fort ancien dans les circuits marchands de produits vivriers, non seulement de la Côte dIvoire, mais aussi de la sous-région de lAfrique de lOuest. Ce marché traitait en 1993 près de 360000 tonnes, dont plus des deux tiers étaient réexpédiées. On estime quen 1997, année de son ouverture, le futur marché de gros traitera environ 650000 tonnes, dont seules quelque 200000 tonnes représenteront la consommation urbaine de Bouaké. La majorité des réexpéditions concerne
ligname qui fait de Bouaké le plus grand centre de redistribution
de ce tubercule de la sous-région, un tiers des tonnages
réexpédiés portant sur des produits secs (maïs et
arachide). La cola transite dans le sens sud-nord et Bouaké constitue le
principal lieu de stockage et de reconditionnement des noix avant leur
exportation dans les pays voisins du nord. |
En amont, les moyens de transport acheminant les produits jusque sur les aires techniques des grossistes sont extrêmement divers, mais les véhicules légers forment une grande partie du trafic fret et la quasi-totalité de celui des marchés de produits frais (à Dakar, NDjamena, Cotonou, etc.).
La plupart des marchés de gros de produits vivriers assurent aussi une fonction secondaire de réexpédition plus ou moins développée selon le produit, le marché, et le rôle de la ville dans les circuits dapprovisionnement interrégionaux6. Cette fonction peut être ancienne (NDjamena), saisonnière et récente (Cotonou) ou permanente (Anosibe à Antananarivo). Bien que portant sur des tonnages limités, les réexpéditions jouent un rôle économique non négligeable sur le développement de lensemble de lactivité des grossistes.
Certaines villes secondaires remplissent une fonction stratégique de groupage et de réexpédition de produits vivriers dans les circuits à longue distance interrégionaux et/ou internationaux.
Les tonnages traités par les grossistes pour la réexpédition excèdent largement ceux destinés à la consommation urbaine locale. Cest le cas de Bouaké en Côte dIvoire et, dans une bien moindre mesure, celui de Bobo-Dioulasso au Burkina Faso.
Les lieux dactivités et les acteurs ne sont dailleurs pas les mêmes selon que lon considère la fonction approvisionnement de la ville à Bobo, assurée par les petits grossistes du Marché central et des rues adjacentes, ou celle de réexpédition, gérée par les grossistes transporteurs de Sikasso Cira et les grands commerçants stockeurs de la ville.
Pour les grands grossistes importateurs ou les grossistes distributeurs de denrées alimentaires, la fonction réexpédition joue toujours un rôle aussi important que celle de la consommation urbaine, et peut même représenter le moteur de leur activité (Cotonou, Conakry). Leurs clients sont quasi exclusivement des grossistes et semi-grossistes urbains et ruraux, nationaux et étrangers. En amont comme en aval, lapprovisionnement des magasins, comme les flux de réexpédition, se font essentiellement par les gros porteurs.
Aussi faut-il souligner que le trafic fret généré par ces commerces de gros représente une source dembouteillage et de congestion du centre-ville souvent bien plus importante que ceux occasionnés par les activités des grossistes de produits vivriers.
Ces problèmes généraux de circulation et dorganisation des flux de transport (passagers et marchandises), dont souffrent les grandes villes, ont suscité lélaboration de nombreux projets: plans de circulation, projets de rationalisation des activités de transport et projets déquipements connexes en périphérie des villes (plates-formes bimodales, gares routières, zones dentreposage, etc.). Force est de constater que peu de projets ont été réalisés jusquà présent (ils supposent toujours une mobilisation importante de financements extérieurs) et peu de mesures ont été prises par les Autorités pour limiter la prolifération des entrepôts privés en plein coeur des villes sur le court terme (incitations à la délocalisation vers une zone de stockage, application plus rigoureuse de règlements de circulation, de stationnement et de traversée de la ville pour les poids lourds, etc.).
1.3.4.1 Le choix du site dimplantation
1.3.4.2 Le regroupement des grossistes sur un marché de gros unique? Quelles incitations?
1.3.4.3 La gestion et la concertation
1.3.4.4 Limportance de constituer des réserves foncières
La création de marchés de gros représente une étape nécessaire aujourdhui pour lamélioration de lapprovisionnement et de la distribution alimentaires des grandes villes en Afrique. Les avantages économiques quils offrent à lorganisation des filières sont bien identifiés7 (GERGELY, 1996; TOLLENS, 1997). La question qui se pose actuellement est celle des modalités de leur réalisation et non plus seulement de leur justification.
A cet égard, un nombre de facteurs doit être pris en considération.
La création dun marché de gros en-dehors de la ville a lavantage de la simplicité (peu ou pas du tout de problème foncier, pas dexpropriation à envisager) et le mérite de proposer une réponse apparemment rationnelle.
Cependant, à la lumière des analyses qui ont été menées dans plusieurs villes en Afrique et dans la capitale malgache, la création dun seul marché de gros de vivriers ex nihilo implanté très à lextérieur des zones les plus peuplées et des lieux dactivités du centre urbanisé semble vouée à léchec, étant donné la logique actuelle des circuits dapprovisionnement.
En ce qui concerne les critères dimplantation des marchés de gros, le débat est ouvert entre les partisans dune implantation à distance minimum des points de vente principaux (les centres de gravité du réseau des marchés de détail) afin de diminuer les temps de transport intra-urbain (dont le coût est le plus élevé), et ceux qui estiment «... que limpact du marché sur la circulation est plus déterminant: une implantation en périphérie offrirait une facilité daccès qui compenserait le surcoût du trajet pour le détaillant.» (DCGTX, 1988).
Deux aspects de la question doivent être soulignés:
1. Limpact sur les coûts du transport intra-urbain et, dune manière générale, sur les coûts de redistribution.En conclusion, un aménagement de marché de gros de vivriers doit avoir, pour premier objectif, daméliorer le fonctionnement des circuits dapprovisionnement ainsi que les conditions dactivité des opérateurs (grossistes comme détaillants) et non de les pénaliser.Le principal coût dans les circuits de distribution intra-urbaine est celui du transport.
Lune des conséquences de la réalisation dun marché de gros très loin hors de la ville est vraisemblablement, dans un premier temps, la hausse sensible des coûts de distribution intra-urbaine.
Pour pouvoir effectivement amortir ces hausses de prix du transport, il faudrait que les revendeuses puissent augmenter substantiellement leur volume dachat, ce qui paraît difficile dans limmédiat, vu la faiblesse de leurs disponibilités financières.
Il faut souligner, à cet égard, quon ignore en grande partie le coût réel de la redistribution en milieu urbain. Cette méconnaissance des caractéristiques et du coût du fret urbain pour la redistribution intermarchés, qui nest pas propre aux grandes villes africaines (DIAGONAL, 1996), appelle un certain pragmatisme en matière de localisation des équipements de gros et, surtout, une connaissance plus approfondie de cet aspect déterminant de lapprovisionnement urbain.
2. La multiplication des déchargements sauvages au coeur de la ville.
Une implantation loin à lextérieur de la ville est susceptible dentraîner la multiplication des lieux de déchargement sauvages à proximité des marchés de détail, recréant ainsi les nuisances que lon pensait supprimer. Lextrême volatilité des places de grossistes a déjà été soulignée.
Il faut, en effet, tenir compte des spécificités propres du fret approvisionnant les grossistes urbains en fruits et légumes: une très grande part de ces produits est acheminée par véhicules légers (de une à deux tonnes de charge utile). On constate quotidiennement, dans les capitales, combien il leur est facile de «contourner» (au sens propre et figuré) les différentes réglementations de police sur la circulation et le stationnement.
Cest pourquoi, lorsque cest possible (configuration du terrain, possibilité dextension, localisation par rapport aux flux principaux, situation déjà à la périphérie de la ville), il faut privilégier la réorganisation des activités de gros sur les sites existants.
Dans dautres cas, la délocalisation peut savérer nécessaire: des sites dimplantation potentielle doivent être recherchés à distance raisonnable des lieux dactivités du centre urbanisé.
Il sagit de considérer les types de regroupements de grossistes qui peuvent être envisagés en fonction des produits vendus, et la possibilité de rassembler la totalité des grossistes des diverses places de gros de la ville en un seul lieu: le futur marché de gros.
Dans un premier temps, les regroupements possibles et prioritaires concernent les produits frais périssables et semi-périssables (tubercules). Dans les villes de plus dun million dhabitants, les tonnages commercialisés justifient amplement la création de marchés de gros spécifiquement destinés à ces produits. Dans de plus petites villes, notamment celles de la zone soudano-sahélienne dont la consommation comprend encore une part importante de céréales locales, il peut être envisagé de regrouper commerçants de produits secs et les grossistes de vivriers frais. Bon nombre de ces grossistes de produits secs exercent aujourdhui dans les magasins de certains quartiers «spécialisés». Ils sont souvent locataires. Il faut donc les intéresser à se délocaliser sur un marché de gros (conditions de location plus sûres, financièrement abordables, meilleur fonctionnement, etc.). Cest un processus qui demande à être organisé par étapes.
Dune manière générale, on soulignera quil semble indiqué dassocier au départ des opérateurs qui partagent des conditions communes de fonctionnement et dorganisation et de ne pas associer des filières aussi différentes que les filières animales (foirail ou abattoir, comme dans lexemple du projet de Dakar mentionné ci-dessus) à celles de produits vivriers.
La possibilité de regrouper la totalité des grossistes de la ville dès le démarrage du marché de gros dépend de la taille et de la configuration géographique de la ville - et donc de la dispersion des places de gros sur son territoire -, mais aussi de la fonction principale des grossistes urbains (approvisionnement, réexpédition). Le regroupement des grossistes sur léquipement envisagé tient aussi, et surtout, aux efforts de concertation déployés et aux mesures incitatives mises en place pour le favoriser.
Cela suppose un processus de concertation qui tienne compte des souhaits en matière de services (eau, gardiennage, sécurité, éclairage, etc.), dinstallation de stockage, de groupage, de conditionnement et de manutention.
Si le marché de gros représente une condition pour lamélioration du fonctionnement de lapprovisionnement urbain, ses répercussions ne se feront sentir que progressivement sur le moyen et long termes, au cours dun processus de mutation des circuits de gros, des comportements des opérateurs et de lapparition de nouveaux opérateurs. Ces changements ne pourront se réaliser sans un processus correspondant de concertation entre les partenaires concernés.
Les marchés de gros sont des équipements dont les communes attendent légitimement des gains supplémentaires, quel que soit le mode de répartition adopté entre lEtat, lagglomération et la commune où sera implanté le marché.
Par conséquent, le succès dun marché de gros dépendra étroitement de la volonté des opérateurs dy participer et de développer leurs activités dans ce cadre nouveau. Il est donc impératif dimpliquer dès le démarrage du projet les grossistes concernés. En particulier, ceux-ci doivent être consultés, non seulement sur le site dimplantation, mais aussi sur les installations de vente, les services et les règles de fonctionnement du marché et de gestion.
Le type de gestion adopté pour le marché de gros représente un aspect-clé de limplication des grossistes. Dans le cadre des quelques expériences de Sociétés déconomie mixte (SEM) gérantes de grands marchés urbains en Afrique (marchés polyvalents en général), le rôle mineur dévolu dans le capital social aux usagers grossistes directement intéressés ou au secteur privé est une des principales raisons des nombreuses défaillances de gestion.
On préconise aujourdhui dans le montage institutionnel, quand la formule dune SEM est retenue, de limiter lapport dans le capital social des organismes publics et parapublics afin déviter une mainmise de lAdministration, de droit ou de fait, sur la gestion courante de la société. Dautres pistes doivent être enfin explorées, comme celle de la privatisation qui supposent un secteur privé acceptant de prendre des risques.
Quelle que soit la solution retenue pour le court terme, une démarche de programmation urbaine sur le long terme semble nécessaire afin de préparer lavenir.
En particulier, il semble important dattirer lattention des Autorités, dès la mise en oeuvre dun projet de réaménagement ou de création dun marché de gros, sur la nécessité impérieuse de procéder à la constitution de réserves foncières qui sont une condition de la réalisation du réseau déquipements nécessaires à la mutation progressive souhaitée des circuits dapprovisionnement.