La région du COPACE constitue l'un des principaux terrains de pêche du monde. Les captures annuelles réalisées dans la partie nord de la région sont de l'ordre de 2,6 millions de tonnes, avec une valeur au débarquement de quelque 500 millions de dollars E.-U. (Everett) 1
1 Everett, G.V. vues d'ensemble du développement et de la planification halieutiques dans la région du COPACE. Projet de développement des pêches dans l'Atlantique Centre-Est. CECAF/ECAF Series/75/4 (Fr). Rome, FAO/PNUD, octobre 1976.
Ces faits ne constituent pas une nouveauté. On a admis généralement depuis dix ans ou plus que certains, au moins, des stocks les plus précieux étaient surexploités et que la gestion était désirable. On a cependant peu fait dans ce domaine. La seule mesure de gestion recommandée à l'échelon international, est l'emploi de mailles de 70 mm pour la pêche du merlu et de la daurade. Bien que ceci ait été recommande par le sous-comité du COPACE sur l'application des mesures de gestion en 1972, les mailles actuellement utilisées pour la pêche de la merluche, comme le signale le Groupe de travail du COPACE sur le merlu, mesurent de 30 à 65 mm. Sur le plan d'un contrôle plus efficace des pêches de la région, les nombreux accords bilatéraux entre les Etats côtiers et les Etats pratiquant la pêche sans appartenir à la région sont plus significatifs mais ils n'ont pas été passés dans le cadre d'un plan général de gestion de la ressource.
Les raisons pour lesquelles on n'a pu aboutir à une gestion efficace sont claires. Jusqu'à une date récente, la plupart des stocks pouvaient être capturés, dans une plus ou moins grande mesure, hors des limites de la juridiction nationale de l'époque. Chaque stock était exploité par un certain nombre de pays - riverains ou étrangers à la région - et tant que tous les pays intéressés n'étaient pas parvenus à un accord sur la nécessité d'une gestion et sur les mesures spécifiques à prendre, aucune décision n'était possible. Si certains pays avaient pris des mesures hors du cadre d'un accord général, les avantages découlant de ces mesures seraient allés en grande partie aux pays qui ne les auraient pas respectées. L'accord était encore plus difficile à réaliser par suite du manque de conseils scientifiques clairs sur l'état d'un grand nombre de ces ressources. Cette lacune, de son côté, était largement due à l'insuffisance des statistiques fournies par certains des principaux participants.
Même quand un accord était atteint, par exemple sur la nécessité d'une plus grande dimension des mailles pour la pêche du merlu et de la daurade, l'absence de systèmes efficaces de mise en application des mesures, y compris le moyen - pour chaque pays - d'être assuré que les autres pays respectaient l'accord, ont eu pour conséquences que les pêcheurs n'observaient pas les recommandations d'utilisation de mailles plus grandes pour la pêche au chalut du merlu ou de la daurade.
L'extension générale des limites de juridiction nationale aux pêches modifie cette situation. Il existe maintenant une possibilité d'adopter une gestion efficace. Alors que cette opportunité fait suite à une extension de juridiction de la part des Etats côtiers, mesure qui entraîne aussi la responsabilité de la gestion des ressources, les avantages n'iront pas obligatoirement à ces seuls Etats. L'absence de gestion et le développement subséquent d'un excès d'effort coûteux a été aussi préjudiciable (sinon plus) pour les pays exploitant les grandes flottes allant pêcher au loin, que pour les Etats côtiers. Un mode plus rationnel de pêche devrait permettre suffisamment de profits économiques et autres pour que tous les participants s'en trouvent mieux qu'à présent même si l'on peut prévoir que les Etats côtiers en retireront la majeure partie.
De meilleures occasions se présentent parce que des décisions de gestion peuvent être prises individuellement par des Etats côtiers ou, dans le cas de stocks partagés par plusieurs Etats, par un nombre relativement restreint d'Etats côtiers agissant en consultation.
Il n'est pas nécessaire de passer un accord volontaire avec tous les participants, réels ou potentiels, dont certains pensent souvent qu'il est de leur intérêt (à court terme du moins) d'éviter un accord. En outre, possédant la juridiction, l'Etat côtier peut - au moins en principe - veiller à ce que tous les participants respectent les mesures de gestion qui sont prises. Il ne sera cependant guère facile d'assurer une bonne gestion. Il ne s'agit pas simplement de prendre des mesures pour contrôler l'importance des opérations de pêche ou le type de poissons captures. Il convient de choisir les mesures pour qu'elles aient les effets, immédiats ou à long terme, que l'on désire. Il faut pour cela suivre le processus suivant:
i) une évaluation scientifique de la situation des ressources et de l'effet de différentes mesures sur les ressources et les captures qu'elles permettent;ii) une analyse des conséquences économiques, sociales et autres des actions possibles, à court et à long terme;
iii) pour les stocks qui sont, ou qui peuvent être capturés dans plus d'une juridiction, un accord entre les Etats intéressés, portant sur les mesures générales à prendre, par exemple sur le niveau des captures totales admissibles et leur répartition entre les participants;
iv) pour tous les stocks, des décisions prises par chaque pays sur les mesures spécifiques et détaillées qui devraient être prises, y compris celles qui sont nécessaires à l'application des accords multilatéraux concernant les ressources partagées;
v) l'application des décisions juridiques et autres requises pour garantir le respect des mesures qui ont été décidées. Elles doivent comprendre des arrangements par lesquels tous ceux qui sont intéressés par les stocks partagés peuvent être assurés que les autres participants respectent les accords.
L'évaluation des ressources sera probablement réalisée dans la zone du COPACE, comme dans la plupart des autres régions, par des groupes de travail spécialisés, en se fondant principalement sur les travaux des chercheurs des institutions de certains pays. Le soutien apporté au projet consistera principalement à compléter ces études nationales en tant que de besoin, à organiser certaines activités, par exemple le traitement des statistiques relatives aux captures et à l'effort qui ont intérêt à être centralisées et à fournir des facilités pour la réunion des groupes de travail y compris, quand cela sera nécessaire, le déplacement des participants.
L'analyse des effets économiques doit être effectuée à l'échelon national, en tenant compte de certains facteurs nationaux particuliers. Dans chaque pays, les responsables des décisions ont besoin de connaître les effets d'éventuelles décisions dans ce pays plutôt que les effets généraux. Quoi qu'il soit, les études générales se révéleront utiles car elles serviront de base à des études nationales plus détaillées. Le projet COPACE pourrait apporter une assistance sur le plan de l'organisation de ces études générales, peut-être par l'intermédiaire de consultants et d'une aide accordée à certains pays pour les études nationales.
Les négociations sur les mesures coordonnées à prendre dans le cas de stocks dont peuvent disposer plusieurs pays sont du ressort des gouvernements en cause. Les possibilités de soutien immédiat de la part du projet sont probablement limitées à la fourniture de locaux pour les réunions nécessaires. Cependant, ces réunions et ces négociations auront beaucoup plus de chances de se montrer productives si l'on dispose d'une bonne documentation sur les effets immédiats et à long terme des différentes décisions et des problèmes techniques soulevés par l'application. Ici, comme il a été mentionné dans les paragraphes précédents, on trouvera des possibilités considérables d'apport efficace de la part du projet.
De même, les décisions sur les mesures nationales seront prises à l'échelon national et la principale fonction du projet consistera à faire en sorte que les responsables nationaux des décisions disposent des informations nécessaires à leur action. Ici, encore, ces informations concernent essentiellement les effets - biologiques, économiques et autres - des actions possibles.
L'application des mesures de gestion est un aspect de la gestion qui a été relativement néglige. Il a parfois semblé qu'on estimait que si une mesure était recommandée, ou si elle était incluse dans la législation, les pêcheurs se comporteraient en conséquence. Comme le montre l'exemple de la recommandation du COPACE sur les dimensions de mailles, ce n'est pas nécessairement le cas. En pratique, les dispositions relatives à l'inspection et à la mise en application représentent une partie nécessaire et souvent coûteuse de toute gestion nationale ou multinationale; la facilité et le coût de la mise en application de différentes mesures et le fait de pouvoir démontrer qu'elles sont appliquées peuvent être des considérations importantes entrant dans le choix entre différentes mesures. Alors qu'on connaît relativement mal ces problèmes dans la région du COPACE, on a acquit ces dernières années une expérience considérable dans d'autres régions (par exemple en Amérique du Nord) pour ce qui concerne la mise en application et l'inspection, à l'échelon national comme entre les Etats côtiers et les flottes de pèche à grande distance. Le projet pourrait apporter une assistance considérable aux pays du COPACE en mettant cette expérience à leur disposition, par exemple au moyen de rapports d'experts.
Le thon présente des problèmes spéciaux. Dans une grande mesure, la pêche du thon est indépendante des autres pêches de la zone du COPACE, sauf pour le cas des bateaux spécialisés qui capturent de petites espèces pélagiques pour servir d'appât. En majeure partie, les questions internationales de statistiques, de recherche scientifique et de gestion, sont traitées par la Commission internationale pour la conservation des thonidés de l'Atlantique (CICTA), qui a établi un programme actif dans ces domaines et le projet du COPACE ne devrait pas chercher à répéter ce programme. Il existe des occasions de coopération entre le COPACE et la CICTA dont a déjà su profiter, par exemple pour les stages de formation aux techniques statistiques et l'évaluation des stocks. De plus, le projet pourrait avoir l'occasion d'aider les Etats côtiers, spécialement dans le golfe de Guinée, à établir une politique commune concernant la gestion de ces ressources, qui pourrait être formulée au sein de la CICTA. Cette politique commune adoptée par les Etats côtiers paraîtrait particulièrement souhaitable en raison des modifications affectant le Droit de la mer.