Table des mati�res
- Pr�c�dente - Suivante
4. Incidences des politiques de foresterie en zones arides pour le d�veloppement de ces zones
Les politiques de foresterie en zone aride ont souvent r�ussi jusqu'� un certain point mais beaucoup ont d� �tre abandonn�es lorsque la pression d�mographique s'est accentu�e. La d�marcation classique de la "limite nord de culture" au Sahel, telle qu'elle avait �t� fix�e � l'origine par les puissances coloniales puis adopt�e et reprise par les gouvernements sah�liens, a d� �tre abandonn�e (dans certains cas, les gouvernements ont m�me encourag� l'agriculture plus au nord) �tant donn� la n�cessit� de plus en plus pressante de produire davantage de denr�es alimentaires.
Pour prot�ger leur couverture naturelle d'arbres et d'arbustes, certains pays ont interdit la production ou l'exportation de charbon de bois. Les r�sultats ont �t� mitig�s et les cons�quences difficiles � �viter: contrebande, augmentation de l'abattage d'arbres pour le bois de feu pr�s des centres de population, etc.
Les efforts faits dans le pass� pour interdire l'abattage ou la mutilation des arbres (en particulier les plus importants tels qu'Acacia albida) ont presque certainement eu des effets b�n�fiques mais ils ont aussi ajout� aux difficult�s et aux co�ts sociaux en m�me temps qu'ils ont r�duit la productivit� des individus, en particulier celle des femmes et des enfants qui sont oblig�s d'aller beaucoup plus loin de chez eux pour se procurer du bois de feu.
Des politiques bien intentionn�es accordant une large place aux grandes op�rations de reboisement et de plantation ont conduit � la cr�ation de nouvelles surfaces bois�es. Malheureusement, les terres n�cessaires ont �t� obtenues trop souvent dans le pass� en expropriant les populations locales. Les co�ts �conomiques, sociaux et politiques ont donc �t� beaucoup plus �lev�s que pr�vu (et les avantages r�els souvent d�cevants).
Plusieurs pays ont r�cemment r�vis� leur l�gislation foresti�re. Les faits commencent � montrer que lorsque cela s'est fait en harmonie avec d'autres lois relatives au r�gime foncier et forestier et lorsque d'autres aspects de l'�conomie rurale (en particulier celle des agriculteurs) ont �t� pris en compte, les r�sultats nets ont �t� positifs (par exemple au Rwanda, encore que ce pays soit loin d'�tre un pays "aride"). L� encore cependant, l'exp�rience prouve que les changements de politique sont loin de pouvoir � eux seuls r�soudre d�finitivement le probl�me. Ils ne sont, dans le meilleur des cas, qu'un d�but important (et n�cessaire).
Lorsque les d�cisions rel�vent en particulier de la seule autorit� d'un gouvernement central, de nouvelles politiques peuvent �tre rapidement mises en oeuvre. S'il peut �tre facile dans ce cas de changer d'orientation, de tels changements auront peu d'effet si la r�glementation et les modalit�s d'application sur le terrain ne sont pas elles aussi modifi�es.
On annonce souvent les nouvelles politiques foresti�res visant � lutter contre la d�sertification parmi des d�clarations �nergiques sur la "volont� du gouvernement". Si cette "volont�" ne s'exprime pas en m�me temps par des augmentations parall�les des budgets de fonctionnement et de gestion des organismes charg�s de les appliquer, rien ou pratiquement rien ne changera dans les faits.
Plusieurs pays (notamment le S�n�gal) se sont lanc�s dans une vaste r�orientation � l'�chelle nationale de leurs administrations locales. De nouvelles communaut�s rurales ont �t� cr��es. La participation locale � la planification des ressources et de l'am�nagement du territoire ainsi qu'aux d�cisions a �t� int�gr�e dans un mode nouveau et mieux �quilibr� de d�cision collective sur les ressources � utiliser, le principe et la responsabilit� de leur gestion. � long terme, cette approche est riche de promesses. Ses effets en sont en g�n�ral favorables bien que - comme dans toute op�ration de redistribution - certains �l�ments de la population se retrouvent finalement avec moins de ressources qu'auparavant et que l'�quit� sociale ou �conomique d�pende toujours du point de vue o� on se place.
Outre les divers exemples mentionn�s plus haut, certains autres m�ritent une attention particuli�re car ils illustrent l'importance relative que les politiques foresti�res peuvent avoir pour le d�veloppement des zones arides et/ou la lutte contre la d�sertification.
Soudan: programmes d'agriculture m�canis�e
Pour pouvoir accro�tre les exportations et compte tenu en particulier du prix pr�f�rentiel pay� par l'un de ses voisins, le gouvernement du Soudan accorde des concessions sur de grandes �tendues de terre (jusqu'� 500 ha par contrat, selon certains) pour cultiver le sorgho par rotation, la zone cultiv�e retournant apr�s un certain nombre d'ann�es, du moins th�oriquement, � son �tat d'origine, sur une base plus ou moins continue.
Les textes des contrats �noncent en d�tail les proc�dures de conservation � respecter, qui consistent notamment � laisser des bandes de v�g�tation naturelle entre les superficies d�frich�es pour la culture.
Si sur le papier, dans le souci d'arr�ter l'avanc�e du d�sert, la politique vise effectivement � pr�venir la d�gradation du sol et de la v�g�tation, les calendriers ne sont en fait pas respect�s et de grandes surfaces sont d�frich�es en une seule op�ration rapide. On entasse et on br�le (!) les broussailles et les arbres pour s'en d�barrasser rapidement et la terre est ensuite cultiv�e de fa�on exp�ditive afin d'en tirer des b�n�fices sans tarder. Elle est ensuite abandonn�e dans un tel �tat que toute remise en valeur sera par la suite d'un co�t prohibitif sinon impossible.
La conclusion est que si elles ne sont pas convenablement respect�es et appliqu�es sur le terrain, les mesures de conservation des ressources (c'est-�-dire d'anti-d�sertification) sont inutiles.
Alg�rie: ceintures vertes contre le d�sert
Depuis un certain nombre d'ann�es, les premi�res mesures datant de l'�poque qui a imm�diatement suivie l'ind�pendance, le gouvernement alg�rien a adopt� une politique ambitieuse pour arr�ter l'avanc�e du d�sert dans diverses r�gions du pays. Une mobilisation massive de la population dans l'esprit de la R�volution populaire a �t� renforc�e par le d�ploiement d'importants contingents des forces arm�es. Ce qui avait commenc� comme une op�ration "vivres contre travail" financ�e par des organisations volontaires priv�es a ensuite b�n�fici� d'un financement beaucoup plus important de la part d'un donateur bilat�ral puis du Programme alimentaire mondial. Lorsque le gouvernement a �t� en mesure de d�velopper l'op�ration sur son budget propre, des millions d'hectares d'arbres �taient d�j� plant�s dans la partie montagneuse du nord du pays ainsi que dans une large bande continue au nord du d�sert du Sahara.
Il est bient�t apparu que si, dans les montagnes du nord o� la population rurale est surtout s�dentaire (m�me si l'�levage est une importante activit� secondaire), la plantation d'arbres a �t� en g�n�ral une r�ussite et le paysage rapidement parsem� de zones foresti�res (en particulier sur les pentes les plus raides), dans la partie centrale du pays, la ceinture verte a beaucoup moins bien r�ussi. Des pr�cipitations clairsem�es, jointes � la n�cessit� toujours pr�sente de fourrage (et de bois de feu) pour les pasteurs, en d�pit des vaillants efforts du gouvernement et du reste de la population, n'ont pas permis d'�riger une barri�re totale et efficace contre l'avanc�e du d�sert.
Conclusion: lorsque les conditions du site sont raisonnablement favorables et que la population rurale est essentiellement compos�e d'agriculteurs s�dentaires, les mesures de foresterie et de conservation ont beaucoup plus de chances de r�ussir que dans les zones arides pastorales, en particulier lorsque la participation locale est fond�e sur une forte motivation politique et appuy�e par une structure de gestion efficace des pouvoirs publics.
Les politiques, l�gislations et r�glementations ne serviront de rien dans les pays tropicaux arides si la population locale elle-m�me ne change pas son mode d'utilisation de la terre, de l'eau et de la v�g�tation existantes. Un certain nombre d'�tudes socio-�conomiques effectu�es dans diff�rentes parties du monde montrent clairement que chaque r�gion se caract�rise par un certain type de relations entre la population et la terre sur laquelle elle vit.
Il est facile d'�laborer des mesures politiques, mais tout l'art consiste � en concevoir un ensemble qui soit op�rant. Lorsque les donateurs et les gouvernements centraux font de leur mieux pour trouver des m�thodes de lutte contre la d�sertification qui soient applicables, la population locale met chaque ann�e le feu � des plantations d'arbres qui avaient �t� cr��es, au moins en partie, pour lutter contre la d�sertification. Dans ce cas, il est �vident que le gouvernement serait bien inspir� de revoir sa politique foresti�re et c'est peut-�tre tout aussi important - la fa�on dont elle est appliqu�e.
Selon le point de vue de chacun, on peut dire que la principale lacune consiste en ce que les gouvernements et les donateurs ne savent pas exactement ce qui peut �tre compris ou non par la population locale.
Autrement dit, il y a une deuxi�me priorit�: l'attitude et la motivation des ex�cutants d'une politique une fois que celle-ci a �t� �labor�e. Ce qu'il faut, c'est que les organismes gouvernementaux (du haut en bas de l'�chelle) changent d'attitude et d'approche envers la population locale pour obtenir une r�ponse plus productive et plus efficace de ceux qui peuvent en fin de compte concr�tiser ou d�truire les programmes les mieux intentionn�s.
Il existe certes beaucoup d'autres probl�mes et d'autres incertitudes. Mais il nous para�t, et cela m�rite un d�bat beaucoup plus approfondi, qu'il faut surtout en savoir plus sur ce qui peut para�tre justifi� aux yeux de la population locale et sur ce qu'il faut faire pour que les organismes publics et les fonctionnaires soient plus ouverts et aient davantage l'esprit de service vis-�-vis de ceux qui, en d�finitive, gagneront ou perdront la lutte contre la d�sertification
Les politiques foresti�res en zone aride ne peuvent avoir d'utilit� que: a) si elles sont harmonis�es avec les autres mesures et lois relatives au d�veloppement rural et � la conservation, notamment le r�gime foncier et forestier, les prix agricoles et les autres politiques de commercialisation ainsi que les politiques d'utilisation et de conservation des autres ressources naturelles renouvelables; b) si elles sont comprises et - du moins en principe - accept�es par la majorit� de la population rurale, sans distinction de profession ou de statut social; c) si une structure officielle de gestion est en place et fonctionne suffisamment bien pour les appliquer de fa�on efficace.
GLOSSAIRE
Description des termes cl�s utilis�s dans ce texte
Politique |
D'apr�s les "Principles of
Management" de R.C. Davis et A.C. Filley, Grolier's
Modern Business series, N.Y. (1962): ... un principe (ou
un ensemble coh�rent de principes), avec les r�gles
d'action qui en d�coulent, qui conditionne et r�git la
r�alisation effective des objectifs qu'il vise. |
D'apr�s le "Webster's New
International Dictionary" (1925): ... une ligne
d'action ou une m�thode ferme et d�finie adapt�e et
suivie par un gouvernement, une institution, un organisme
ou un individu. |
|
Plan: |
Terme g�n�ral d�signant une
m�thode d'action ou une proc�dure propos�e. Une
m�thode d'action, une proc�dure ou un dispositif. |
Selon la Grolier's Modern Business
series, un "plan" comprend: |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Principe: |
R�gle d'action. R�gle de
conduite, opinion ou conviction qui exerce une influence
directrice sur l'existence et le comportement. |
R�gle de conduite r�gissant de
mani�re constante les actions, soulignant l'id�e d'une
v�rit� fondamentale d'application g�n�rale. |
|
M�thode: |
Proc�dure ou proc�d� ordonn�,
mani�re de faire ...syst�me particulier ou pr�cis de
proc�dure. |
Strat�gie: |
Planification et direction de
grandes op�rations, plus pr�cis�ment manoeuvres pour
placer les forces (ou les ressources) dont on dispose
dans la situation la plus avantageuse avant engagement
effectif. |
Zones arides: |
Dans le pr�sent contexte, toute
zone �tendue souffrant p�riodiquement d'un manque de
pr�cipitations qui constitue une menace grave pour
l'approvisionnement de base de la population en aliments
ou en eau. |
T.M.
CATTERSON, F.A. GULICK et
T. RESCH (1)*
* Toutes les notes se trouvent � la fin du texte.
Les probl�mes de s�cheresse et de d�sertification ont acquis une notori�t� mondiale depuis la fin des ann�es 1960 et le d�but des ann�es 1970 o� le d�sastre �cologique et la famine se sont abattus sur les zones arides et semi-arides de l'Afrique sah�lienne. Cette catastrophe a donn� lieu d'abord � une aide humanitaire et plus tard � des programmes de d�veloppement visant � en att�nuer les causes. En d�pit des efforts concert�s d�ploy�s depuis dix ans pour renverser la situation, une autre p�riode d'extr�me s�cheresse fait des ravages dans le paysage africain. Le monde se trouve � nouveau confront� � la r�alit� tragique de la fragilit� de l'existence humaine dans les r�gions arides et semi-arides d'Afrique.
Il n'est donc pas surprenant que les pr�occupations ressenties par les gouvernements africains et leurs partenaires de l'aide au d�veloppement suscitent une intense introspection. Les efforts d�ploy�s dans le pass� sont r�examin�s et l'on s'efforce activement de mieux comprendre les probl�mes et leurs solutions. La consultation actuelle organis�e par la FAO n'est que l'une des importantes rencontres qui ont lieu dans ce but.
Les activit�s du secteur forestier, consid�r�es souvent comme le fer de lance de la lutte contre la d�sertification se sont �norm�ment d�velopp�es dans la partie de l'Afrique sujette � la s�cheresse. En 1983, Weber (2) estimait qu'environ 200 millions de dollars E.-U. avaient �t� affect�s � des op�rations de foresterie dans les huit pays du CILSS uniquement (3). Il �tait beaucoup moins optimiste quant aux r�sultats qualitatifs de ces op�rations. N�anmoins, malgr� des �checs �vidents, dont le moindre n'est pas la poursuite du dramatique recul d'un couvert v�g�tal essentiel, d'importants enseignements ont �t� tir�s de ce qui a �t� fait quant au r�le que la foresterie peut et doit jouer dans le d�veloppement de la r�gion, Il faut soigneusement pr�server ces r�sultats et en tenir compte lors de la conception des programmes futurs, Le but de la pr�sente communication est donc de d�crire le r�le des activit�s foresti�res tel qu'il ressort de cette exp�rience et ses implications pour la lutte contre la s�cheresse et la d�sertification.
2. S�cheresse et d�sertification
Les activit�s foresti�res dans le pass�
Mise en oeuvre d'une plus grande int�gration de l'agriculture et de la foresterie
Un dernier mot
Notes
Avant d'aller plus loin, il est utile de revenir sur la diff�rence entre la s�cheresse et la d�sertification. Ces deux ph�nom�nes sont � notre avis souvent confondus, ce qui nuit �videmment � l'efficacit� des mesures appliqu�es pour les combattre.
La s�cheresse est essentiellement un �v�nement climatique S'il n'entre pas dans notre propos d'examiner en d�tail ici cette question complexe, il n'est pas inutile d'�voquer quelques notions importantes. On pense que les syst�mes m�t�orologiques auxquels est due l'extr�me variabilit� des pr�cipitations dans les r�gions d'Afrique arides et semi-arides sont dus au d�placement des vents et des modes de pr�cipitation provoqu�s par d'autres �v�nements climatiques qui ont lieu bien au-del� des zones touch�es (4). Il existe encore peu de donn�es empiriques qui permettent de lier l'apparition de la s�cheresse � des activit�s humaines. Certains auteurs ont cependant estim� que la s�cheresse se nourrit d'elle-m�me dans une certaine mesure par ses effets sur la v�g�tation et l'�tat des surfaces dans les zones touch�es. Nicholson souligne que cette relation a une signification importante pour l'utilisation des terres dans les zones affect�es, car l'activit� humaine elle-m�me - d�frichement des terres - peut avoir le m�me effet (5). Il faut que les responsables des pays africains et des donateurs prennent conscience du risque �norme de d�gradation qu'implique la conversion syst�matique et bien intentionn�e de zones de v�g�tation naturelle en zones consacr�es � une agriculture marginalement viable. Il semble donc tout � fait logique d'adopter un "sc�nario du probable" lorsqu'on d�finit des interventions mettant en jeu des pratiques d'utilisation des terres dans la r�gion (6). La pr�cipitation moyenne n'est pas un bon indicateur pour �valuer le potentiel de production de ces zones �tant donn� l'extr�me variabilit� maintenant bien connue des pr�cipitations. Une fois que ces terres ont �t� d�frich�es, il est extr�mement on�reux et long de les remettre en �tat. Il ne faut pas voir ici une invitation pessimiste � contr�ler simplement l'expansion des terres agricoles. Ce qu'il faut, ce sont des m�thodes nouvelles d'utilisation de ces terres qui assurent une stabilit� de l'environnement. Ce qui suit consiste en grande partie en des informations sur ces nouvelles m�thodes.
D'un autre point de vue, prendre la s�cheresse en consid�ration est un exercice qui exige un soin particulier dans le choix des mesures de remplacement � prendre dans les zones frapp�es. Confront�s � l'effet de la s�cheresse, les gouvernements aussi bien que donateurs ont parfois choisi des solutions consistant en projets � grande �chelle difficiles � g�rer. Constitu�s essentiellement "d'apports" gouvernementaux, ces projets visent � mettre en place des solutions technocratiques con�ues de fa�on superficielle � des probl�mes mal compris. Mis � part le fait qu'ils sont inapplicables, ils d�g�n�rent aussi souvent en programmes de protection sociale inefficaces qui ne font que d�liter le tissu communautaire sur lequel des solutions peuvent et doivent s'appuyer. Le sens de la perspective est aussi n�cessaire pour comprendre qu'il s'agit d'un probl�me � long terme. Il faut en m�me temps, et c'est tout aussi important, se concentrer sur ce qui est faisable et r�alisable plut�t que sur les probl�mes les plus difficiles. Cela peut signifier, dans les conditions de s�cheresse actuelles, mettre l'accent sur le maintien de syst�mes agricoles et de modes d'existence viables pour les populations situ�es sur le c�t� s�dentaire vuln�rable de la fronti�re de l'agriculture et dont les terres doivent souvent absorber le choc de l'afflux de nomades et de r�fugi�s.
La s�cheresse est impr�visible et r�currente et la famine qui l'accompagne souvent encore plus. Elle pose donc aux gouvernements comme aux donateurs un probl�me particulier, qui est celui d'�tre pr�t � fournir l'aide humanitaire en temps voulu et de fa�on appropri�e. Heureusement, la technologie d'�valuation des effets climatiques qui se d�veloppe � partir des applications de plus en plus larges et complexes de la t�l�d�tection par satellite est prometteuse pour l'avenir. Gr�ce � ces outils et � ces techniques, il est d�sormais possible de pr�voir 60 � 90 jours � l'avance les risques de p�nurie alimentaire dus � la s�cheresse. Ceci doit permettre d'examiner de plus pr�s la situation r�elle sur le terrain et de mobiliser � l'avance les moyens de secours. � mesure que cette technologie se d�veloppera, elle devrait de toute �vidence permettre d'augmenter dans une tr�s large mesure les informations si n�cessaires � un am�nagement appropri� du territoire dans les zones arides et semi-arides d'Afrique.
La d�sertification pose un probl�me encore plus grave que la s�cheresse en ce qu'elle implique une baisse progressive et prolong�e de productivit� dans un monde qui peut difficilement se le permettre compte tenu de l'ampleur de la croissance d�mographique. La s�cheresse aggrave souvent les effets de la d�sertification, mais celle-ci r�sulte principalement de la mauvaise gestion de la terre � laquelle l'homme est conduit pas ces pressions d�mographiques exponentielles. La d�sertification est le probl�me environnemental majeur de l'Afrique aujourd'hui. C'est aussi une limitation importante, sinon la plus importante, qui emp�che l'autosuffisance alimentaire dans de vastes �tendues de ce continent.
La d�sertification est la perte de capacit� productive de la terre l'instauration de conditions d�sertiques. Plus pr�cis�ment, elle peut avoir les r�sultats n�gatifs suivants:
- d�gradation du sol r�sultant de la diminution des mati�res organiques qui r�duit la capacit� d'�change de cations, d'o� une diminution de la r�tention d'eau et une acc�l�ration du lessivage et de l'�limination des �l�ments nutritifs du sol; d�clin persistant des rendements des cultures et succession de mauvaises r�coltes;
- dommages caus�s aux cultures par les vents de sable qui d�capent les jeunes plants ou d�nudent leurs racines;
- d�composition de syst�mes traditionnels d'exploitation socialement et �conomiquement accept�s;
- perte d'une terre v�g�tale indispensable due � l'�rosion �olienne;
- accroissement du ruissellement des eaux de pluie, avec ce que cela implique d'�rosion du sol, de formation de ravines et d'inondations en aval;
- diminution de l'eau de surface durablement disponible et baisse de la nappe phr�atique du fait de la diminution des infiltrations et de la d�gradation des bassins versants;
- insuffisance des ressources en fourrage et en brout ou conversion � des esp�ces v�g�tales moins app�t�es;
- d�stabilisation du sol et d�placement des dunes de sable; diminution de la capacit� de r�g�n�ration naturelle;
- d�ficits localis�s des produits de la for�t, des bois et des arbres, y compris le bois de feu et le charbon de bois, les produits alimentaires, les mat�riaux de construction, la viande de gibier et les mati�res premi�res destin�es aux activit�s productrices de revenu, aux besoins artisanaux et domestiques;
- baisse de la diversit� biologique.
En derni�re analyse, le r�sultat le plus important de la d�sertification est la mis�re et la pauvret� des populations qui en sont les victimes. Ces populations n'ont souvent, m�me dans les meilleures ann�es, que de tr�s faibles possibilit�s d'assurer la stabilit� �conomique. Il peut �tre rem�di� � la s�cheresse et � ses cons�quences par des palliatifs d'urgence tels que l'aide alimentaire et m�dicale; la d�sertification au contraire peut n�cessiter un changement complet de mode de vie.
Pour accorder aux activit�s foresti�res la place qui leur revient dans la lutte contre la d�sertification, il faut examiner les causes de cette derni�re. Il n'y a pas de doute qu'il est largement admis que la cause principale de la d�sertification est la pression d�mographique qui incite � utiliser de fa�on de plus en plus intensive des ressources fragiles, ce qui conduit � leur d�gradation et � leur destruction. Dans ces conditions, la d�sertification peut se produire non seulement pendant les ann�es de s�cheresse mais aussi dans les ann�es plus humides.
La disparition du couvert v�g�tal - arbres, arbustes et plantes herbac�es �tant �limin�s par d'autres utilisations de la terre - expose la surface du sol � des conditions climatiques constamment extr�mes et d�lite la fine couche de terre v�g�tale. L'expansion et l'intensification de l'agriculture sont les raisons premi�res de cette nouvelle utilisation de la terre Les faibles gains de productivit� agricole r�alis�s dans les pays sah�liens de l'Afrique de l'Ouest ont �t� obtenus en grande partie en reculant les fronti�res agricoles jusqu'� des sols souvent trop marginaux pour pouvoir soutenir une production pendant plus de quelques ann�es sans n�cessiter de mesures assez importantes de conservation du sol et d'application d'engrais (7). Cette expansion pose des probl�mes particuli�rement graves lorsqu'elle se fait sur des terres en pente dont la d�gradation rapide annule alors l'important effet de bassins versants qu'elles exer�aient pour recharger la nappe phr�atique. M�me sur de meilleurs sols, l'intensification de l'utilisation comprend une expansion des monocultures, le choix de cultures qui �puisent le sol, une m�canisation inappropri�e, l'indiff�rence � l'�gard des n�cessit�s de conservation du sol et le raccourcissement des p�riodes de jach�re. Les feux non contr�l�s, courants dans les zones semi-arides, aggravent encore d�mesur�ment le probl�me. Le surp�turage, qui se traduit par une �limination des esp�ces fourrag�res annuelles app�t�es, la destruction du couvert v�g�tal et la compaction du sol, sont depuis longtemps associ�s � la d�sertification. La r�colte de bois de feu et de charbon de bois pour les besoins domestiques (souvent pour plus de 85 pour cent de la population) a �galement beaucoup contribu� � la d�gradation durable des ressources.
Ces causes, qui t�moignent d'un comportement apparemment irrationnel de l'agriculteur de subsistance, doivent aussi �tre consid�r�es dans le contexte des facteurs sociaux. �conomiques et institutionnels oui interdisent une exploitation soutenable et la conservation des ressources. Ces facteurs sont notamment les suivants: les questions de r�gime foncier et forestier; le manque d'acc�s aux facteurs de production agricole et au cr�dit; le caract�re limit� des initiatives prises pour assurer le d�veloppement rural; les conflits � l'int�rieur des communaut�s et avec les autorit�s locales (par exemple avec les services forestiers); les changements de syst�me politique; l'insuffisance des d�bouch�s; l'absence de possibilit�s de revenu extra-agricole; la perception des risques dans la population rurale (qui la conduit par exemple � avoir de grands troupeaux) et l'absence de garanties sociales, pour n'en citer que quelques-uns.