Introduction

Effets des changements climatiques sur l’agriculture, la sylviculture et les écosystèmes

Le présent examen a pour objet d’évaluer les effets potentiels des changements climatiques sur les organismes nuisibles aux végétaux et, par conséquent, sur la santé des végétaux. Le terme «organisme nuisible aux végétaux», ci-après dénommé «organisme nuisible», désigne toute espèce, souche ou biotype de végétal, d’animal ou d’agent pathogène nuisible pour les végétaux ou produits végétaux, selon la définition qui en est donnée dans la norme internationale pour les mesures phytosanitaires n° 5 (NIMP n° 5) adoptée par la Commission des mesures phytosanitaires de la Convention internationale pour la protection des végétaux (CIPV).

On entend par «changements climatiques» la hausse moyenne de la température de l’air en surface et de la température à la surface des océans combinées, sur l’ensemble du globe et au cours d’une période de 30 ans. Le réchauffement est calculé par rapport à la période 1850-1900, qui sert d’approximation des températures préindustrielles. Le réchauffement survenu entre la période préindustrielle et la période 2006-2015 est estimé à 0,87 °C. L’ampleur du réchauffement d’origine humaine depuis 2000 serait égale à l’ampleur du réchauffement observée depuis la même date, avec une fourchette probable de ± 20 pour cent due à l’incertitude entourant l’apport de l’activité solaire et volcanique pendant la période historique (GIEC, 2018). Selon les projections des modèles climatiques, les caractéristiques climatiques régionales devraient présenter des différences robustes entre le moment présent et celui où le réchauffement planétaire atteindra 1,5 °C, et entre 1,5 °C et 2 °C. Ces différences consistent notamment dans l’augmentation de la température moyenne dans la plupart des régions continentales et océaniques, des extrêmes de chaleur dans la plupart des zones habitées, des épisodes de fortes précipitations dans plusieurs régions et de la probabilité de sécheresses et de déficits de précipitations dans certaines régions (GIEC, 2018).

Les changements climatiques demeurent une menace pour la vie et les moyens d’existence des populations à travers le monde (Altizer et al., 2013; GIEC, 2018). Les changements observés sont les suivants: élévation des températures des terres émergées et des océans à l’échelle mondiale (figure 1), disparition des calottes glaciaires et du manteau neigeux, élévation du niveau des mers, accroissement de l’acidification des océans, augmentation de la fréquence des extrêmes de chaleur, variabilité accrue des régimes de précipitations et hausse de la fréquence des épisodes de fortes précipitations et de sécheresse (figure 2). Ces changements ont été attribués à l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre anthropiques depuis l’ère préindustrielle, en raison de l’intensification des activités agricoles et industrielles, de la combustion de combustibles fossiles et des transformations touchant l’utilisation des terres (figures 3 et 4). L’analyse chimique de la glace et des sédiments révèle que les concentrations atmosphériques de dioxyde de carbone (CO2), de méthane (CH4) et de protoxyde d’azote (N2O) ont augmenté pour atteindre des niveaux sans précédent depuis au moins 800 000 ans.

Figure 1
Source: GIEC (2013).

Le texte original de l’analyse complète de la figure 1 publiée dans le rapport du GIEC 2013 est le suivant:

Figure RID.8 | Cartes des moyennes multimodèles CMIP5 pour les scénarios RCP2,6 et RCP8,5 sur la période 2081-2100 pour: a) l’évolution de la température moyenne annuelle en surface, b) l’évolution moyenne en pourcentage des précipitations moyennes annuelles, c) l’étendue de la banquise dans l’hémisphère Nord en septembre et d) l’évolution du pH de la surface des océans. Les changements indiqués dans les cartes a), b) et d) sont relatifs à la période 1986-2005. Le nombre de modèles CMIP5 utilisés pour calculer la moyenne multimodèle figure dans l’angle supérieur droit de chaque image. Pour les cartes a) et b), les hachures signalent les régions dans lesquelles la moyenne multimodèle est faible par rapport à la variabilité naturelle interne (c’est-à-dire inférieure à un écart type de la variabilité naturelle interne sur des moyennes de 20 ans). Les pointillés signalent les régions dans lesquelles la moyenne multimodèle est grande par rapport à la variabilité naturelle interne (c’est-à-dire supérieure à deux écarts types sur des moyennes de 20 ans) et dans lesquelles 90 % au moins des modèles s’accordent sur le signe du changement (voir encadré 12). Dans les cartes c), les lignes représentent les moyennes modélisées pour la période 1986-2005; les zones remplies concernent la fin du siècle. La moyenne multimodèle CMIP5 est indiquée en blanc, tandis que la moyenne projetée de l’étendue de banquise du sous-ensemble des modèles (dont le nombre figure entre parenthèses) qui reproduisent le plus fidèlement la moyenne climatologique et l’évolution de la banquise arctique sur la période 1979-2012 est indiquée en bleu clair. Pour obtenir davantage de détails techniques, voir les annexes du Résumé technique. {Figures 6.28, 12.1 1, 12.22 et 12.29; figures RT.15, RT.16, RT.17 et RT.20}

Pour de plus amples informations, se reporter à la source originale (rapport du GIEC, 2013). Le texte ci-contre a été reproduit avec l’aimable autorisation du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat.
Figure 2
Source: GIEC (2013).

Le texte original de l’analyse complète de la figure 1 publiée dans le rapport du GIEC 2013 est le suivant:

Figure RID.2 | Cartes des changements observés de précipitations entre 1901 et 2010, et entre 1951 et 2010 (tendances calculées en utilisant les mêmes critères que pour la figure RID.1) à partir d’un ensemble de données. Pour obtenir davantage de détails techniques, voir les annexes du Résumé technique. {Résumé technique, Axe thématique 1, figure 2; figure 2.29}

Pour de plus amples informations, se reporter à la source originale (rapport du GIEC, 2013). Le texte ci-contre a été reproduit avec l’aimable autorisation du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat.
Figure 3
Source: GIEC (2013).

Le texte original de l’analyse complète de la figure 3 publiée dans le rapport du GIEC 2013 est le suivant:

Figure RID.10 | Augmentation de la température moyenne à la surface du globe en fonction du total des émissions de CO2 cumulées dans le monde à partir de plusieurs sources de données. Les résultats de différents modèles de climat et cycle du carbone pour chaque scénario RCP jusqu’en 2100 sont représentés par des lignes de couleur et des moyennes décennales (points). Certaines moyennes décennales sont identifiées par souci de clarté (ex.: 2050 indiquant la décennie 2040-2049). Les résultats de modèles sur la période historique (1860-2010) sont indiqués en noir. La zone en couleur représente la dispersion des différents modèles pour les quatre scénarios RCP et s’estompe à mesure que le nombre de modèles disponibles diminue pour RCP8,5. La moyenne et la plage multimodèles simulées par les modèles CMIP5, forcés par une augmentation du CO2 de 1 % par an (simulations pour 1 % CO2 an-1), sont indiquées par la fine ligne noire et la zone en gris. Pour un niveau spécifique d’émissions cumulées, les simulations d’augmentation du CO2 de 1 % par an suggèrent un réchauffement inférieur à celles forcées par les scénarios RCP, car ces dernières incluent des forçages additionnels autres que le CO2. Les valeurs de la température sont données par rapport à la période de référence 1861-1880 et les émissions, par rapport à 1870. Les moyennes décennales sont reliées par des lignes droites. Pour obtenir davantage de détails techniques, voir les annexes du Résumé technique. {figure 12.45; Résumé technique, Axe thématique 8, figure 1}

Pour de plus amples informations, se reporter à la source originale (GIEC, 2013). Le texte ci-contre a été reproduit avec l’aimable autorisation du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat.
Figure 4
Source: GIEC (2013).

Le texte original de l’analyse complète de la figure 3 publiée dans le rapport du GIEC 2013 est le suivant:

Figure RID.5 | Estimations du forçage radiatif en 2011 par rapport à 1750 et incertitudes agrégées associées concernant les principaux facteurs du changement climatique. Les valeurs sont des moyennes du forçage radiatif global (FR14), réparties selon les composés émis ou les processus qui aboutissent à une combinaison de facteurs. Les meilleures estimations du forçage radiatif net sont présentées sous la forme d’un losange noir avec les intervalles d’incertitude correspondants; les valeurs numériques sont fournies sur la droite de la figure de même que le degré de confiance (– très élevé, É - élevé, M - moyen, F - faible, TF – très faible). Le FR des carbones suies inclut le forçage de l’albédo induit par la présence de carbone suie sur la neige ou la glace. Les faibles forçages dus aux traînées de condensation (0,05 W m-2, incluant les cirrus produits par ces traînées) aux HFC, aux PFC et aux SF6 (total 0,03 W m-2) ne sont pas présentés. Il est possible d’obtenir les FR des gaz basés sur leurs concentrations en faisant la somme des bandes de même couleur. Le forçage des volcans n’est pas inclus en raison de sa nature épisodique qui rend difficile sa comparaison aux autres mécanismes de forçage. Le forçage radiatif anthropique total est indiqué pour trois années différentes par rapport à 1750. Pour obtenir davantage de détails techniques, y compris les intervalles d’incertitude associés aux différentes composantes et aux différents processus, voir les annexes du Résumé technique. {8.5; figures 8.14 à 8.18; figures RT.6 et RT.7}

Pour de plus amples informations, se reporter à la source originale (GIEC, 2013). Le texte ci-contre a été reproduit avec l’aimable autorisation du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat.

Les effets de ces concentrations, conjugués à ceux d’autres facteurs anthropiques comme la déforestation, sont la cause principale du réchauffement observé depuis le milieu du XXe siècle (GIEC, 2014a, 2014b, 2018; Wuebbles et Hayhoe, 2002). Il importe de souligner que les changements climatiques, notamment le réchauffement de la planète, vont probablement se poursuivre. Selon le Rapport spécial du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) sur le réchauffement planétaire de 1,5 °C, il est probable que le réchauffement planétaire atteindra 1,5 °C entre 2030 et 2052 par rapport aux niveaux préindustriels s’il continue d’augmenter au rythme actuel (GIEC, 2018)1. Les risques liés au climat sont plus élevés avec un réchauffement planétaire de 1,5 °C par rapport aux risques actuels2, mais les risques seront nettement plus graves si le réchauffement atteint 2 °C. Ces risques sont fonction de l’ampleur et du rythme du réchauffement, de la région considérée, des niveaux de développement et de vulnérabilité aux échelons régional et local, ainsi que des mesures d’adaptation et d’atténuation mises en œuvre (GIEC, 2018).

Les effets des changements climatiques se font déjà ressentir sur les systèmes naturels et humains, notamment des modifications de la quantité et de la qualité de l’eau, ainsi qu’une évolution de l’aire de répartition, des activités saisonnières, des mouvements migratoires, de l’abondance et des interactions interspécifiques chez beaucoup d’espèces terrestres, dulçaquicoles et marines (GIEC, 2014a, 2019a, 2019b), avec des effets davantage négatifs que positifs sur les rendements de la plupart des cultures (Porter et al., 2019). Il a été démontré que les changements climatiques affectent les systèmes biologiques à différents niveaux, depuis les gènes jusqu’aux écosystèmes (Garrett et al., 2006; Sutherst et al., 2011). D’après Scheffers et al. (2016), les changements climatiques anthropiques ont altéré 82 pour cent des 94 processus écologiques fondamentaux identifiés par les biologistes, allant de la diversité génétique à la fonction des écosystèmes.

En outre, les risques déjà présents, comme la diminution de la disponibilité d’eau douce, seront amplifiés, et de nouveaux risques apparaîtront au cours du XXIe siècle et au-delà. Les impacts futurs comporteront un risque accru d’extinction des espèces. Par exemple, la plupart des espèces végétales n’ont pas la capacité naturelle de modifier leur aire de répartition suffisamment vite pour pouvoir suivre le rythme des changements climatiques, et les organismes marins seront exposés à une baisse de la concentration d’oxygène et à un accroissement de l’acidification, auxquels ils ne pourront peut-être pas s’adapter. En outre, les changements climatiques peuvent menacer la sécurité alimentaire en raison de leurs répercussions sur les cultures vivrières et les aliments d’origine végétale consommés par les animaux d’élevage. S’agissant du blé, du riz et du maïs, les conséquences les plus graves sont anticipées dans les régions tropicales et subtropicales. D’après les projections, les changements climatiques devraient avoir un impact négatif sur la production si la température augmente localement de 2 °C ou plus par rapport aux niveaux de la fin du XXe siècle, même si ces changements pourraient avoir des effets bénéfiques en certains points du globe, notamment sous les latitudes élevées et en altitude. La production mondiale de denrées alimentaires et de fibres ainsi que la biosécurité des végétaux, qui comprennent l’ensemble des stratégies visant à évaluer et à gérer les risques posés par les maladies infectieuses, les organismes de quarantaine, les espèces exotiques envahissantes et les organismes vivants modifiés présents dans les écosystèmes naturels et aménagés, seront également affectées (Gregory et al., 2009; Stack, Fletcher et Gullino, 2013).

Le présent rapport vise à fournir des informations sur: i) les évolutions survenues au cours des dernières décennies; ii) les évolutions attendues au cours des prochaines décennies compte tenu des changements climatiques; et iii) les mesures qui peuvent être prises pour atténuer les effets des changements climatiques et s’y adapter aux niveaux local, régional et mondial.

Le but du rapport n’est pas d’examiner les causes des changements climatiques ni de fournir un résumé complet de l’ensemble des travaux publiés ces 30 dernières années. En revanche, le rapport renvoie à de nombreuses publications auxquelles le lecteur pourra se référer s’il souhaite approfondir telle ou telle question.

  • 1 L’objectif de l’Accord de Paris (2015) est de limiter le réchauffement planétaire à un niveau nettement inférieur à 2 °C, de préférence à 1,5 °C, par rapport aux niveaux préindustriels.
  • 2 D’après le Rapport spécial du GIEC sur le réchauffement planétaire de 1,5 °C (GIEC, 2018), les activités humaines ont déjà provoqué un réchauffement planétaire d’environ 1 °C au-dessus des niveaux préindustriels.