2.2 Coût et accessibilité économique d’une alimentation saine

MESSAGES CLÉS
  • De nouvelles données sur les prix des produits alimentaires ainsi que des améliorations méthodologiques ont permis d’établir des estimations actualisées du coût d’une alimentation saine et des estimations plus précises de son accessibilité économique (ou abordabilité), à partir desquelles les séries des deux ensembles d’indicateurs ont été révisées dans leur totalité.
  • Les prix des produits alimentaires ont augmenté tout au long de l’année 2022, portant le coût moyen d’une alimentation saine à l’échelle mondiale à 3,96 USD en parité de pouvoir d’achat (PPA) par personne et par jour, contre 3,56 USD en PPA en 2021. Les perturbations liées à la pandémie de covid-19 et à la guerre en Ukraine ont contribué à d’importantes hausses des prix internationaux des produits alimentaires et de l’énergie, et ont exacerbé les tensions inflationnistes.
  • Malgré la hausse des prix des produits alimentaires tout au long de 2022, le nombre de personnes n’ayant pas les moyens de s’alimenter sainement dans le monde a retrouvé cette même année le niveau enregistré avant la pandémie (2,83 milliards de personnes) grâce à la reprise économique qui a suivi cette dernière, reprise qui a cependant été inégale selon les régions et les groupes de pays classés par niveau de revenu.
  • Le nombre de personnes ne pouvant se permettre une alimentation saine est passé sous le niveau enregistré avant la pandémie en Asie ainsi qu’en Amérique du Nord et en Europe, tandis qu’il a fortement augmenté en Afrique, où il s’est établi à 924,8 millions en 2022, soit une hausse de 24,6 millions par rapport à 2021 et de 73,4 millions par rapport à 2019.
  • La reprise apparaît encore plus clairement inégale selon les groupes de pays classés par niveau de revenu. En 2022, le nombre de personnes ne pouvant se permettre une alimentation saine est passé sous le niveau enregistré avant la pandémie dans le groupe des pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure ou à revenu élevé pris dans son ensemble, tandis que le groupe des pays à faible revenu a connu les niveaux les plus importants depuis 2017, année à partir de laquelle la FAO a commencé à publier des estimations. Ces chiffres donnent à penser que la capacité budgétaire limitée des pays à faible revenu ne leur a permis d’apporter qu’une protection partielle contre les effets préjudiciables de ces crises.
  • Sur l’ensemble des personnes qui n’avaient pas les moyens de s’alimenter sainement en 2022, 1,68 milliard, soit 59 pour cent, vivaient dans des pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure. Cependant, les pays à faible revenu présentaient le plus fort pourcentage de population n’ayant pas les moyens de s’alimenter sainement (71,5 pour cent), suivis des pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure (52,6 pour cent), des pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure (21,5 pour cent) et des pays à revenu élevé (6,3 pour cent).

Le suivi de l’accès économique à une alimentation saine est essentiel pour éclairer les politiques visant à améliorer la sécurité alimentaire et les résultats nutritionnels, et contribue ainsi à la réalisation des cibles 2.1 et 2.2 des ODD. Une alimentation saine comprend quatre aspects clés: la diversité (diversité des groupes d’aliments et diversité au sein des groupes), l’adéquation (suffisance de tous les nutriments essentiels par rapport aux besoins), la modération (aliments et nutriments liés à un mauvais état de santé) et l’équilibre (apport énergétique et apport en macronutriments). Les aliments consommés ne doivent pas présenter de danger pour la santé.

L’indicateur du coût d’une alimentation saine (CoHD) fournit une estimation au niveau national du coût de l’alimentation saine la moins chère possible dans un pays, définie comme étant composée d’un ensemble diversifié d’aliments disponibles localement qui répondent aux besoins énergétiques et nutritionnels25.

Il est ensuite comparé à la répartition du revenu national, une fois la part de revenu nécessaire pour les biens et services essentiels non alimentaires correctement prise en compte, pour estimer les indicateurs relatifs à la prévalence de l’inaccessibilité économique (PUA) et au nombre de personnes ne pouvant se permettre une alimentation saine (NUA). Ces deux indicateurs mesurent la proportion de la population et le nombre de personnes dans chaque pays qui n’ont pas les moyens de s’alimenter sainement, même au moindre coût. Ils sont essentiels pour mesurer l’incapacité des systèmes agroalimentaires à fournir une alimentation saine à moindre coût accessible à tous, compte tenu des niveaux existants d’inégalité des revenus dans les pays.

Dans la présente édition du rapport, les indicateurs relatifs au coût et à l’accessibilité économique d’une alimentation saine ont été actualisés jusqu’en 2022f. La FAO, en collaboration avec la Banque mondiale, effectue un suivi systématique de ces indicateurs et en publie les séries dans la base de données FAOSTAT et dans la base de données de la Banque mondiale. Les séries des deux indicateurs ont été révisées dans leur totalité à la suite de trois changements importants qui ont été introduits dans le calcul des indicateurs (voir le supplément au chapitre 2).

Premièrement, on a calculé les estimations du coût d’une alimentation saine sur la période 2017-2022 à partir des prix au détail actualisés des produits alimentaires pour 2021 provenant d’un nouveau cycle du Programme de comparaison internationale26 de la Banque mondiale, lesquels ont remplacé ceux du cycle de 2017 qui avaient été utilisés dans les éditions précédentes du présent rapport27.

Deuxièmement, dans l’édition de cette année, la proportion de la population (prévalence) et le nombre de personnes qui n’ont pas les moyens de s’alimenter sainement, aux niveaux mondial et régional et par groupe de pays classés selon le revenu, ont été imputés pour la première fois pour des pays pour lesquels il manquait des informations (voir l’annexe 1B)g.

Troisièmement, un changement important a été introduit dans les méthodes utilisées pour calculer les deux indicateurs. Plus précisément, lorsqu’on définit le seuil de coût aux fins de la comparaison avec la répartition du revenu dans les différents pays, il est indispensable de déterminer le coût des besoins de base non alimentaires et pas seulement le coût d’une alimentation saine. On a donc utilisé une nouvelle méthode pour déterminer le coût des biens et services de base non alimentaires, afin de rendre compte de manière plus précise des écarts entre pays, selon leur groupe de revenu, en ce qui concerne ce coût (voir l’encadré 4 et l’annexe 1B).

ENCADRÉ 4NOUVELLES AMÉLIORATIONS DE LA MÉTHODE UTILISÉE POUR ÉVALUER L’ACCESSIBILITÉ ÉCONOMIQUE D’UNE ALIMENTATION SAINE

Mettre au point de nouveaux indicateurs pour des évaluations mondiales telles que celles présentées dans cette section est toujours une tâche ardue. Depuis leur ajout dans l’édition 2020 du présent rapport, les indicateurs relatifs à l’inaccessibilité économique d’une alimentation saine (prévalence et nombre de personnes) aux niveaux mondial, régional et national ont été régulièrement affinés pour tout à la fois tenir compte des nouvelles informations disponibles et proposer une compréhension plus approfondie de certaines subtilités du processus d’inférence statistique sous-jacent.

Outre l’habituelle actualisation à partir des données les plus récentes, nous avons, pour établir les séries présentées dans cette édition du rapport, procédé à une révision plus substantielle de la méthode, qui remplace celle utilisée par le passé.

S’agissant des données, le principal point à noter cette année est que toutes les estimations du coût d’une alimentation saine (CoHD) au niveau national ont fait l’objet d’une révision visant à tenir compte des prix des produits alimentaires en 2021 récemment publiés dans l’édition 2024 du Programme de comparaison internationale (PCI)26. L’ajout de prix de produits alimentaires supplémentaires par rapport aux publications précédentes a impliqué, le cas échéant, une révision de la composition du «panier alimentaire sain de référence»28.

Concernant les méthodes, le principe général sur lequel reposent les indicateurs reste inchangé, mais nous avons revu la manière dont il a été mis en œuvre pour calculer les estimations. L’accessibilité économique implique que les personnes puissent consacrer suffisamment d’argent à leur alimentation pour pouvoir acheter localement l’ensemble des produits alimentaires les moins chers qui leur sont nécessaires pour avoir une alimentation saine. On exclut ici la possibilité de consommer un produit alimentaire onéreux si un produit moins cher et équivalent sur le plan nutritionnel est disponible.

Lors de la détermination de la part de son revenu disponible total qu’un ménage peut raisonnablement consacrer à l’alimentation, il est important de tenir compte du montant minimum que les personnes doivent conserver pour acheter les biens et les services de base non alimentaires nécessaires pour mener une vie digne. Dans les dernières éditions du présent rapport, ce montant était estimé approximativement à une part fixe (48 pour cent) du revenu disponible total du ménage29. Le même pourcentage était appliqué à l’ensemble des pays, sur la base du fait qu’on avait observé qu’en moyenne les personnes qui vivent dans des pays à faible revenu consacrent 52 pour cent de leurs revenus à l’alimentation. En outre, on partait du principe que l’utilisation de cette proportion moyenne n’introduirait pas de biais systématique, même si on pouvait supposer que les personnes pauvres devaient consacrer une part relativement plus importante de leur revenu, et les personnes plus aisées une part relativement moindre, aux besoins alimentaires de base. Avec le recul, nous avons constaté que l’hypothèse selon laquelle les erreurs de classement implicites se neutraliseraient au niveau de l’agrégat était incorrecte.

Cette année, la FAO, en collaboration avec la Banque mondiale, a commencé à modifier la méthode pour tenir compte du fait que la variation, d’un ménage à l’autre, du montant nécessaire pour se procurer les biens et les services de base non alimentaires n’est pas simplement proportionnelle au revenu des ménages.

L’approche idéale consisterait à déterminer, pour chaque pays séparément, le coût d’un ensemble de ces biens et services, défini de manière normative, en fonction des prix du marché (selon la même méthode que celle que nous utilisons pour évaluer le coût d’une alimentation saine). Une telle approche n’est malheureusement pas envisageable, car elle nécessiterait de décider ce qu’il conviendrait d’inclure dans l’ensemble de biens et de services essentiels et d’avoir accès à des données détaillées sur le prix de ces biens et services.

Les informations nécessaires pour déterminer le coût des biens et des services de base non alimentaires pour chaque pays n’étant pas disponibles, nous avons suivi pour cette édition une approche applicable reposant sur la classification des pays en fonction de leur revenu, définie par la Banque mondiale. Dans cette approche, les dépenses non alimentaires correspondent à un coût quotidien évalué par rapport aux seuils de pauvreté internationaux des groupes de pays classés selon le revenu, une part de dépenses non alimentaires étant associée à chacun de ces groupes*. Avec la nouvelle méthode, les seuils de pauvreté internationaux des groupes de pays classés selon le revenu sont multipliés par la part de dépenses non alimentaires définie pour chaque groupe afin de calculer le coût quotidien des besoins de base non alimentaires dans un pays, comme indiqué dans le tableau A.

TABLEAU A CALCUL DU COÛT DES BIENS ET SERVICES DE BASE NON ALIMENTAIRES

SOURCE: Bai, Y., Herforth, A., Cafiero, C., Conti, V., Rissanen, M.O., Masters, W.A. et Rosero Moncayo, J. (à paraître). Methods for monitoring the affordability of a healthy diet. Document de travail de la Division de la statistique de la FAO. Rome, FAO.

On calcule un seuil de coût pour chaque pays en associant le coût de l’alimentation saine la moins chère dans le pays (i) au coût des besoins de base non alimentaires du groupe de revenu (j):

Cost Thresholdi = CoHDi + (IntlPovLinej × NonfoodExpShare Incomej)

Pour terminer, on compare ce seuil à la répartition du revenu dans le pays fournie par la plateforme Pauvreté et inégalités (Poverty and Inequality Platform) de la Banque mondiale pour estimer le pourcentage de la population dont le revenu est inférieur à ce montant. De cette manière, il est établi que le coût du niveau de vie adéquat minimum varie en fonction du niveau de développement économique du pays, ce qui est très cohérent avec le concept qui sous-tend les seuils de pauvreté plus élevés utilisés par la Banque mondiale pour effectuer le suivi de la pauvreté dans les pays où l’incidence de la pauvreté extrême est faible30. Cette révision permet de corriger la surestimation de l’inaccessibilité économique dans les pays à faible revenu ou à revenu intermédiaire de la tranche inférieure et sa sous-estimation dans les pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure ou à revenu élevé, problèmes qui découlent de l’utilisation d’une part fixe du revenu pour la couverture des besoins de base non alimentaires. La figure A montre l’étendue des corrections apportées à la série de valeurs relatives à l’inaccessibilité économique pour chaque groupe de pays.

FIGURE A AJUSTEMENT DE LA SÉRIE DE VALEURS RELATIVES À L’INACCESSIBILITÉ ÉCONOMIQUE, PAR GROUPE DE PAYS CLASSÉS SELON LE REVENU, 2017-2022

SOURCE: Auteurs du présent document (FAO).

Comme nous l’avons mentionné plus haut, il s’agit de la première étape d’une révision plus complète des méthodes utilisées pour évaluer la prévalence de l’inaccessibilité économique d’une alimentation saine. Cependant, il est important de tenir compte du fait que le coût d’un niveau de vie digne minimal varie également à l’intérieur de chaque pays. L’absence de prise en compte de ces différences, notamment pour les pays de grande superficie et présentant de forts contrastes, et l’utilisation d’un seuil défini en fonction de la moyenne nationale en tant que coût des besoins de base non alimentaires et d’une alimentation saine peuvent entraîner des estimations biaisées de l’inaccessibilité économique. Le sens et l’importance du biais dépendront de l’orientation et de l’ampleur de la corrélation possible entre les niveaux de revenu et un seuil correctement défini en fonction du lieu.

Nous poursuivons cet examen, en nous fondant sur l’analyse des données issues de nombreuses enquêtes sur la consommation et les dépenses des ménages, afin de déterminer le facteur de correction à appliquer aux seuils par pays pour remédier à ce biais; les résultats seront présentés dans la prochaine édition du rapport. Pour de plus amples détails sur la méthode employée, voir l’annexe 1B et le supplément au chapitre 2.

NOTES: * La part des dépenses non alimentaires est définie comme se situant au deuxième quintile de revenu pour les pays à faible revenu ou à revenu intermédiaire de la tranche inférieure et au premier quintile de revenu pour les pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure ou à revenu élevé31. Les données détaillées sur la part des dépenses et la consommation réelle par personne et par quintile sont dérivées des récentes enquêtes auprès des ménages compilées par la Banque mondiale, lesquelles couvrent 71 pays appartenant à différents groupes de revenu32.

Du fait de ces changements, les séries d’estimations de la prévalence de l’inaccessibilité économique (PUA) et du nombre de personnes ne pouvant se permettre une alimentation saine (NUA) ont été réajustées à des niveaux qui sont considérablement plus faibles que ceux publiés dans les éditions précédentes du présent rapport.

Le coût d’une alimentation saine en 2022

Les prix des produits alimentaires ont continué d’augmenter en 2022 par rapport à la période 2017-2021, et ont tiré vers le haut le coût moyen d’une alimentation saine à l’échelle mondiale et dans toutes les régions. L’Indice FAO des prix des produits alimentaires a progressé de 52 pour cent entre 2019 et 2022, les prix ayant augmenté de 60 pour cent pour les céréales, de 45 pour cent pour les produits laitiers, de 19 pour cent pour la viande, et de pas moins de 125 pour cent pour les huiles par rapport aux niveaux enregistrés avant la pandémie de covid-1933.

Cette tension inflationniste se traduit par une tendance à la hausse de l’indicateur du coût d’une alimentation saine dans le monde depuis 2017 (année à partir de laquelle la FAO a commencé à communiquer des estimations), qui a porté sa valeur moyenne à 3,96 dollars par personne et par jour en PPA, en 2022 (tableau 5). Entre 2020 et 2021, l’indicateur du coût d’une alimentation saine dans le monde a progressé de 6 pour cent (de 3,35 dollars en PPA à 3,56 dollars en PPA), tandis que l’année suivante, il a bondi de 11 pour cent (de 3,56 dollars en PPA en 2021 à 3,96 dollars en PPA en 2022).

TABLEAU 5COÛT MOYEN D’UNE ALIMENTATION SAINE, 2017-2022

NOTES: Le coût d’une alimentation saine est exprimé en dollars, en PPA, par habitant et par jour. Pour les groupes mentionnés ci-dessus, il correspond à la moyenne arithmétique du coût d’une alimentation saine dans les pays en question.
SOURCE: FAO. 2024. FAOSTAT: Coût et abordabilité d’une alimentation saine (CoAHD). [Consulté le 24 juillet 2024]. www.fao.org/faostat/fr/#data/CAHD. Licence: CC-BY-4.0.

Parmi les différentes régions, le coût le plus élevé en 2022 a été enregistré en Amérique latine et dans les Caraïbes (4,56 dollars en PPA en moyenne), soit une hausse de près de 12 pour cent en un an seulement. En Asie, le coût moyen d’une alimentation saine est passé de 3,84 dollars en PPA en 2021 à 4,20 dollars en PPA en 2022; l’Asie de l’Est et l’Asie du Sud ont enregistré les coûts moyens les plus importants, de 5,34 dollars en PPA et de 4,28 dollars en PPA, respectivement, dans la région. L’Afrique a vu le coût d’une alimentation saine s’accroître de 10 pour cent (de 3,41 dollars en PPA en 2021 à 3,74 dollars en PPA en 2022), l’Afrique de l’Ouest ayant subi la plus forte poussée entre 2021 et 2022 (11 pour cent), suivie de l’Afrique de l’Est (8,6 pour cent). L’Afrique du Nord est la seule sous-région où le coût moyen d’une alimentation saine a diminué entre 2019 et 2020; il a ensuite augmenté de 10 pour cent de 2021 à 2022. Par rapport aux autres régions, l’Amérique du Nord et l’Europe ont enregistré une hausse modérée du coût moyen d’une alimentation saine durant la pandémie de covid-19 (de 2,95 dollars en PPA en 2019 à 3,12 dollars en PPA en 2021), puis une augmentation substantielle de 14 pour cent de 2021 à 2022 (3,57 dollars en PPA). En Océanie, le coût moyen d’une alimentation saine était de 3,46 dollars en PPA en 2022. Par groupe de revenu, on observe le coût moyen d’une alimentation saine le plus élevé en 2022 dans les pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure et de la tranche supérieure (4,20 dollars en PPA par jour). Viennent ensuite les pays à revenu élevé (3,78 dollars en PPA) et les pays à faible revenu (3,48 dollars en PPA). Dans les pays à faible revenu, le coût moyen d’une alimentation saine a augmenté de près de 5 pour cent entre 2021 et 2022, après une poussée de 10 pour cent de 2020 à 2021.

Prévalence de l’inaccessibilité économique et nombre de personnes ne pouvant se permettre une alimentation saine en 2022

L’édition 2023 du présent rapport a fait apparaître une légère inversion de tendance s’agissant du nombre de personnes ne pouvant se permettre une alimentation saine en 2021, lequel était en baisse par rapport à 2020, bien que toujours supérieur au niveau enregistré avant la pandémie, en 2019. Malgré l’augmentation des prix des produits alimentaires en 2022, l’édition de cette année confirme la poursuite d’une tendance à la baisse s’agissant du nombre de personnes n’ayant pas eu accès financièrement à une alimentation saine en 2022, baisse liée en grande partie à la croissance économique depuis la pandémie. À l’échelle mondiale, on estime à 35,4 pour cent (soit 2,83 milliards) la proportion de personnes qui ne pouvaient se permettre une alimentation saine en 2022, contre 36,4 pour cent (2,88 milliards) en 2021, ce qui correspond à une diminution de 50,1 millions de personnes (figure 8 et tableau 6). Après une diminution de 238 millions (de 3,06 milliards en 2017 à 2,82 milliards en 2019), le nombre de personnes n’ayant pas les moyens de s’alimenter sainement est remonté à 2,97 milliards en 2020, hausse qui a coïncidé avec la pandémie de covid-19. On a ensuite observé une tendance à la baisse pendant deux ans de la prévalence de l’inaccessibilité économique et du nombre de personnes ne pouvant se permettre une alimentation saine.

TABLEAU 6PROPORTION DE LA POPULATION ET NOMBRE DE PERSONNES N’AYANT PAS LES MOYENS DE S’ALIMENTER SAINEMENT, 2017-2022

NOTES: Pour obtenir une estimation du nombre de personnes ne pouvant se permettre une alimentation saine (NUA) dans le monde, on multiplie la prévalence de l’inaccessibilité économique (PUA) de chacune des cinq régions du monde par leur population totale. Il convient d’éviter, lors de l’établissement de l’estimation NUA mondiale, d’additionner les estimations NUA réalisées pour d’autres groupements de pays, tels que ceux fondés sur les niveaux de revenu.
SOURCE: FAO. 2024. FAOSTAT: Coût et abordabilité d’une alimentation saine (CoAHD). [Consulté le 24 juillet 2024]. www.fao.org/faostat/fr/#data/CAHD. Licence: CC-BY-4.0.

FIGURE 8 LA PROPORTION DE LA POPULATION ET LE NOMBRE DE PERSONNES N’AYANT PAS LES MOYENS DE S’ALIMENTER SAINEMENT ONT DIMINUÉ ENTRE 2020 ET 2022

SOURCE: FAO. 2024. FAOSTAT: Coût et abordabilité d’une alimentation saine (CoAHD). [Consulté le 24 juillet 2024]. www.fao.org/faostat/fr/#data/CAHD. Licence: CC-BY-4.0.

La reprise a cependant été inégale selon les régions. La prévalence de l’inaccessibilité économique d’une alimentation saine est passée sous le niveau enregistré avant la pandémie en Asie et en Amérique du Nord et en Europe, mais a fortement augmenté en Afrique, où le nombre de personnes ne pouvant se permettre une alimentation saine s’est établi à 924,8 millions en 2022, soit une hausse de 24,6 millions par rapport à 2021 et de 73,4 millions par rapport à 2019 (tableau 6). En Asie, une alimentation saine était hors de portée pour 1,66 milliard de personnes en 2022, mais une amélioration a été enregistrée deux années de suite, et le nombre de personnes n’ayant pas les moyens de s’alimenter sainement a diminué de 163 millions entre 2020 et 2022. En Amérique latine et dans les Caraïbes, le nombre de personnes ne pouvant se permettre une alimentation saine a augmenté de 9,2 millions de 2020 à 2021, mais cette hausse a été plus que compensée par la réduction de 14,3 millions enregistrée en 2022, qui a ramené le total à 182,9 millions en 2022. En Amérique du Nord et en Europe, l’inaccessibilité économique a également reculé, passant de 57,1 millions en 2021 à 53,6 millions en 2022. Une réduction a également été observée en Océanie, où l’on est passé de 10 millions en 2021 à 9,1 millions en 2022.

On a constaté une nette dégradation en Afrique subsaharienne en 2022, où le nombre de personnes ne pouvant se permettre une alimentation saine a augmenté de 23,9 millions, pour s’établir à 842,9 millions. La majorité des personnes qui n’avaient pas accès financièrement à une alimentation saine en 2022 vivaient en Afrique de l’Est (348,6 millions) et en Afrique de l’Ouest (297,5 millions). Ces deux régions combinées ont présenté une augmentation de 18,9 millions, de 2021 à 2022, du nombre de personnes ne pouvant se permettre une alimentation saine. L’Afrique du Nord a enregistré une diminution de 2020 à 2021 (de 89,9 millions à 81,2 millions), suivie d’une légère remontée en 2022. L’Afrique du Nord affiche toutefois la plus faible prévalence dans la région (31,5 pour cent). L’Asie du Sud a enregistré pour la deuxième année consécutive une diminution du nombre de personnes ne pouvant se permettre une alimentation saine: la réduction, qui a été de 44,2 millions, a ainsi totalement compensé la hausse qui avait été observée dans le sillage de la pandémie de covid-19 en 2020. L’Asie de l’Ouest s’est également relevée, et a vu le nombre de personnes n’ayant pas accès financièrement à une alimentation saine diminuer de 2,7 millions. Après une amélioration significative en 2021 (diminution de 78 millions), l’Asie de l’Est a continué sur sa lancée en 2022, avec une réduction de 3,9 millions du nombre de personnes n’ayant pas les moyens de s’alimenter sainement. En Asie centrale, ce nombre a baissé légèrement, pour s’établir en dessous du niveau enregistré avant la pandémie (12,6 millions). En Amérique du Sud, il a diminué notablement, passant de 126 millions à 113,6 millions, et faisant reculer le chiffre à l’échelle de la région. Aucun changement n’a été observé en Amérique du Nord, tandis que l’Europe a enregistré une diminution importante de la prévalence de l’inaccessibilité, de 6,4 pour cent en 2021 à 5,9 pour cent en 2022, soit une diminution de 3,4 millions du nombre de personnes ne pouvant se permettre une alimentation saine. Ce changement est principalement lié aux progrès accomplis en Europe de l’Est et en Europe méridionale.

La reprise apparaît encore plus clairement inégale selon les groupes de pays classés par niveau de revenu. Les pays à faible revenu ont connu une croissance négative de leur produit intérieur brut (PIB) par habitant en 2020 et en 2021, puis une légère reprise en 202234. L’arrêt de la croissance économique, conjugué à la flambée des prix des produits alimentaires, a considérablement réduit les revenus disponibles étant donné que l’alimentation représente une part plus élevée des dépenses des ménages dans les pays à faible revenu35. La reprise a ainsi été plus lente dans les pays à faible revenu, qui ont présenté depuis 2017 le nombre le plus élevé de personnes ne pouvant se permettre une alimentation saine; en 2022, ce chiffre a atteint 503,2 millions de personnes.

Les pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure ont vu le nombre de personnes n’ayant pas les moyens de s’alimenter sainement diminuer de 2020 à 2022, mais rester supérieur au niveau observé en 2019, avant la pandémie. Cette amélioration a été favorisée par une croissance soutenue du PIB par habitant en 2021 et en 2022, supérieure à celle observée en 201934. Dans les groupes des pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure et des pays à revenu élevé, en revanche, ce nombre est retombé en 2022 bien en deçà du niveau constaté avant la pandémie (tableau 6). Le redémarrage de la croissance du PIB, parallèlement à la possibilité de déployer des politiques budgétaires pour amortir les répercussions économiques néfastes durant les crises, a joué un rôle important dans ces pays35. Les politiques budgétaires ciblées ont permis de neutraliser complètement l’effet de la pandémie de covid-19 et de nombreux autres chocs sur l’accessibilité économique d’une alimentation saine dans les pays riches, mais n’ont atténué que partiellement les répercussions dans les pays à faible revenu.

Sur l’ensemble des personnes qui n’avaient pas les moyens de s’alimenter sainement en 2022, 1,68 milliard, soit 59 pour cent, vivaient dans des pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure (figure 9). Cependant, en pourcentage, les pays à faible revenu présentaient la plus forte proportion de population n’ayant pas les moyens de s’alimenter sainement (71,5 pour cent), suivis des pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure (52,6 pour cent), des pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure (21,5 pour cent) et des pays à revenu élevé (6,3 pour cent) (tableau 6).

FIGURE 9 LES TROIS QUARTS DES PERSONNES QUI N’ONT PAS LES MOYENS DE S’ALIMENTER SAINEMENT VIVENT DANS UN PAYS À FAIBLE REVENU OU À REVENU INTERMÉDIAIRE DE LA TRANCHE INFÉRIEURE

NOTES: Pour obtenir une estimation du nombre de personnes ne pouvant se permettre une alimentation saine (NUA) dans le monde, on multiplie la prévalence de l’inaccessibilité économique (PUA) de chacune des cinq régions du monde par leur population totale. Il convient d’éviter, lors de l’établissement de l’estimation NUA mondiale, d’additionner les estimations NUA réalisées pour d’autres groupements de pays, tels que ceux fondés sur les niveaux de revenu.
SOURCE: FAO. 2024. FAOSTAT: Coût et abordabilité d’une alimentation saine (CoAHD). [Consulté le 24 juillet 2024]. www.fao.org/faostat/fr/#data/CAHD. Licence: CC-BY-4.0.

L’accès économique aux aliments est l’une des composantes de la sécurité alimentaire. Les personnes qui n’ont pas les moyens de s’alimenter sainement, même au moindre coût, risquent d’être exposées, au moins à un certain degré, à l’insécurité alimentaire, laquelle nuit à la qualité de leur alimentation. Une mauvaise alimentation, quant à elle, influe de manière considérable sur les résultats nutritionnels, qui sont examinés dans la section suivante.

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