2.3 Situation en matière de nutrition: progrès accomplis au regard des cibles mondiales

MESSAGES CLÉS
  • Au niveau mondial, la réalisation des sept cibles des ODD relatives à la nutrition a pris du retard par rapport à l’horizon 2030. On observe une stagnation s’agissant de l’insuffisance pondérale à la naissance et du surpoids chez l’enfant, et une augmentation de la prévalence de l’anémie chez les femmes âgées de 15 à 49 ans.
  • Au cours des 10 dernières années, les prévalences du retard de croissance et de l’émaciation ont diminué à l’échelle mondiale et les niveaux d’allaitement maternel exclusif ont augmenté, mais les progrès au regard de ces trois indicateurs restent trop lents pour atteindre les cibles à l’horizon 2030.
  • Les nouvelles estimations de la prévalence de l’obésité chez l’adulte font apparaître une augmentation constante au cours des 10 dernières années; de 12,1 pour cent (591 millions de personnes) en 2012, on est passé à 15,8 pour cent (881 millions de personnes) en 2022. On s’attend à ce que ce chiffre dépasse 1,2 milliard d’ici à 2030.
  • S’agissant des progrès au regard des cibles mondiales du Programme 2030 relatives à la nutrition pour les enfants de moins de 5 ans, la moitié des pays ne sont pas sur la bonne voie pour le retard de croissance, et il en va de même pour plus des deux tiers concernant l’émaciation et pour 60 pour cent environ concernant l’excès pondéral.
  • Trois quarts des pays du monde ne sont pas sur la bonne voie pour atteindre la cible mondiale à l’horizon 2030 relative à l’insuffisance pondérale à la naissance, et plus de 40 pour cent sont également en retard concernant la cible définie pour l’allaitement maternel exclusif. Presque tous les pays du monde sont en retard pour ce qui concerne les cibles du Programme 2030 relatives à l’anémie chez les femmes âgées de 15 à 49 ans et à l’obésité chez l’adulte.
  • Dans les pays les moins avancés (PMA), le retard de croissance chez les enfants de moins de 5 ans et l’anémie chez les femmes âgées de 15 à 49 ans atteignent des niveaux bien supérieurs aux estimations pour l’ensemble du monde, tandis que l’émaciation chez l’enfant est de l’ordre de la moyenne mondiale (mais diminue plus rapidement) et que la prévalence de l’excès pondéral chez l’enfant est inférieure à celle-ci. Comme dans le reste du monde, on observe une hausse inquiétante de l’obésité chez l’adulte dans les PMA, alors même que ces pays demeurent touchés de manière disproportionnée par la dénutrition.
  • À l’échelle mondiale, le double fardeau de la malnutrition – coexistence de la dénutrition avec l’excès pondéral et l’obésité – s’est alourdi pendant les 20 dernières années, et s’est caractérisé par une forte hausse des taux d’obésité et une baisse, mais seulement graduelle, de la maigreur et de l’insuffisance pondérale. Le taux d’insuffisance pondérale chez les adultes et les personnes âgées a été divisé par deux tandis que l’obésité gagne du terrain dans tous les groupes d’âge. Le véritable taux de prévalence du double fardeau est bien plus élevé si l’on considère toutes les formes de malnutrition, y compris les carences en micronutriments.
  • Des mesures «à double usage» permettent de s’attaquer tout à la fois à la dénutrition, aux carences en micronutriments, à l’excès pondéral et à l’obésité, en agissant sur les facteurs qui sont communs à toutes les formes de malnutrition. Ces mesures comprennent les soins prénatals, l’allaitement maternel exclusif, l’apport d’aliments sains et nutritifs aux enfants durant la période d’alimentation complémentaire et au-delà, les programmes d’alimentation scolaire, la supplémentation en micronutriments, la protection sociale, une agriculture intégrant l’enjeu nutritionnel, l’enrichissement des aliments en éléments nutritifs et les politiques visant à améliorer l’environnement alimentaire.

La nutrition est à la fois un facteur et un marqueur de développement36. Les avantages apportés par une bonne nutrition ont des retombées positives très larges, des familles aux communautés, aux régions et aux nations. La malnutrition, d’un autre côté, entrave les progrès des pays et compromet gravement la santé, le développement et le bien-être des générations présentes et futures. La malnutrition comprend, au sens large, la dénutrition et les carences en micronutriments, ainsi que l’excès pondéral et l’obésité. Il est primordial de mettre fin à la malnutrition si l’on veut concrétiser les ODD, en particulier l’ODD 2 (Faim zéro), l’ODD 3 (Bonne santé et bien-être) et l’ODD 10 (Inégalités réduites). L’élimination de toutes les formes de malnutrition37 dans le monde est l’une des priorités d’investissement majeures du programme mondial en matière de santé et de développement.

La section 2.3 examine les tendances mondiales et régionales au regard des sept cibles mondiales relatives à la nutrition pour 2030, qui s’inscrivent dans le Programme 2030. Six de ces cibles ont été approuvées par l’Assemblée mondiale de la Santé en 2012; initialement prévue pour 2025, leur échéance a été ultérieurement reportée à 203038. Quatre des six indicateurs ont en outre été retenus pour le suivi des progrès accomplis au regard de la cible 2.2 des ODD, à savoir le retard de croissance, l’émaciation et l’excès pondéral chez les enfants de moins de 5 ans, et l’anémie chez les femmes âgées de 15 à 49 ans39. La septième cible consiste à enrayer l’augmentation de l’obésité chez les adultes; adoptée en 2013 par l’Assemblée mondiale de la Santé dans le cadre du Plan d’action mondial pour la lutte contre les maladies non transmissibles, son échéance est fixée à 202540. En 2016, l’Assemblée générale des Nations Unies a proclamé la Décennie d’action des Nations Unies pour la nutrition (2016-2025)41, qui a donné un nouvel élan aux mesures destinées à éliminer la faim, à éradiquer toutes les formes de malnutrition, et à assurer un accès universel à une alimentation plus saine et plus durable. La présente section propose en outre un examen des progrès accomplis par les 45 pays qui sont actuellement classés par l’Organisation des Nations Unies (ONU) dans la catégorie des PMA, ainsi qu’une analyse du double fardeau de la malnutrition à différentes étapes de la vie, alors qu’on assiste dans le monde à un recul graduel de la dénutrition parallèlement à une aggravation de l’épidémie d’obésité et d’excès pondéral.

L’évaluation de la malnutrition aux différentes étapes de la vie42 souligne l’importance critique de la chronologie des interventions nutritionnelles: avant la conception et lors de la grossesse et de l’allaitement, puis dans la petite enfance, l’enfance et l’adolescence, jusqu’à l’âge adulte et à la vieillesse. L’exposition à des facteurs environnementaux durant chacune de ces étapes peut infléchir les trajectoires de santé des générations futures. La malnutrition, y compris les carences en micronutriments, durant les phases de vulnérabilité que sont le développement fœtal, les premiers mois de la vie et la petite enfance, augmente le risque de morbidité et de mortalité43, 44, freine la croissance physique et affaiblit le système immunitaire, et engendre ainsi des maladies et des infections récurrentes; elle peut aussi entraîner un développement cognitif sous-optimal et des modifications définitives de la structure et du fonctionnement des systèmes organiques, favorisant ainsi une prédisposition à des maladies chroniques à l’âge adulte45, 46. Des études ont montré que les interventions nutritionnelles prénatales pouvaient se traduire par un meilleur état de santé des nouveau-nés, lequel est associé à de meilleurs résultats sur le plan de l’éducation et du capital humain plus tard dans la vie47, 48. Les enfants qui ont accès à des aliments plus nutritifs dans leur petite enfance sont plus productifs sur le plan économique à l’âge adulte49. En revanche, les carences nutritionnelles durant la petite enfance entravent le développement cérébral et nuisent aux facultés d’apprentissage et à la maturité scolaire, entraînant ainsi une réduction du potentiel de réussite tout au long de la vie ainsi qu’une exacerbation des disparités en matière de santé, et des inégalités sociales50. Le suivi des indicateurs nutritionnels mondiaux aux différentes étapes de la vie met ainsi en lumière le caractère unique de chacune de ces phases et permet d’appuyer les efforts menés à l’échelle nationale et mondiale pour lutter de manière globale contre la malnutrition.

Tendances mondiales et régionales

Cette sous-section présente les dernières informations concernant les sept cibles relatives à la nutrition au niveau mondial (figure 10) et au niveau régional (tableau 7).

FIGURE 10 LES PRÉVALENCES DU RETARD DE CROISSANCE ET DE L’ÉMACIATION AU NIVEAU MONDIAL ONT DIMINUÉ ET LES TAUX D’ALLAITEMENT MATERNEL EXCLUSIF ONT PROGRESSÉ AU COURS DES 10 DERNIÈRES ANNÉES, MAIS LE MONDE N’EST SUR LA BONNE VOIE POUR AUCUNE DES SEPT CIBLES RELATIVES À LA NUTRITION À L’HORIZON 2030

NOTES: L’objectif est d’enrayer la hausse de l’obésité chez l’adulte d’ici à 2025. La méthode de calcul des agrégats mondiaux et des projections jusqu’en 2030 est exposée dans le supplément au chapitre 2 du rapport principal.
SOURCES: Les données relatives à l’insuffisance pondérale à la naissance sont tirées de OMS et UNICEF. 2023. Low birthweight. Dans: UNICEF. [Consulté le 24 juillet 2024]. https://data.unicef.org/topic/nutrition/lowbirthweight; OMS et UNICEF. 2023. Joint low birthweight estimates. Dans: OMS. [Consulté le 24 juillet 2024]. www.who.int/teams/nutrition-and-foodsafety/monitoring-nutritional-status-and-food-safety-and-events/joint-lowbirthweight-estimates; les données relatives à l’allaitement maternel exclusif sont basées sur UNICEF. 2024. Infant and young child feeding. Dans: UNICEF. [Consulté le 24 juillet 2024]. https://data.unicef.org/topic/nutrition/infant-and-young-child-feeding; les données relatives au retard de croissance, à l’émaciation et au surpoids sont basées sur Banque mondiale, OMS et UNICEF. 2023. Levels and trends in child malnutrition. UNICEF / WHO / World Bank Group Joint Child Malnutrition Estimates – Key findings of the 2023 edition. New York (États-Unis d’Amérique), UNICEF, Genève (Suisse), OMS et Washington, Banque mondiale. https://data.unicef.org/resources/jme-report-2023, www.who.int/teams/nutrition-and-food-safety/monitoringnutritional-status-and-food-safety-and-events/joint-child-malnutritionestimates, https://datatopics.worldbank.org/child-malnutrition; les données sur l’anémie sont basées sur OMS. 2021. WHO global anaemia estimates, 2021 edition. Dans: OMS. [Consulté le 24 juillet 2024]. www.who.int/data/gho/data/themes/topics/anaemia_in_women_and_children; les données relatives à l’obésité des adultes sont basées sur OMS. 2024. Données de l’Observatoire de la santé mondiale: Prevalence of obesity among adults, BMI ≥ 30, age-standardized. Estimates by country. [Consulté le 24 juillet 2024]. https://www.who.int/data/gho/data/indicators/indicator-details/GHO/prevalence-of-obesity-among-adults-bmi—30-(age-standardizedestimate)-(-). Licence: CC-BY-4.0.

TABLEAU 7TENDANCES RÉGIONALES POUR LES SEPT CIBLES RELATIVES À LA NUTRITION

NOTES: n.d. = estimations non disponibles. * Hors Japon. ** Les estimations pour l’Amérique du Nord sont basées uniquement sur les États-Unis d’Amérique.
SOURCES: Voir les sources de la figure 10.

On n’observe pratiquement aucun progrès concernant l’insuffisance pondérale à la naissance, dont la prévalence est passée de 15 pour cent (21,6 millions) en 2012 à 14,7 pour cent (19,8 millions) en 2020 – dernière année pour laquelle des données sont disponibles. D’après les projections effectuées à partir des tendances sur la période 2012-2020, 14,2 pour cent des nouveau-nés en 2030 auront un poids insuffisant à la naissance, alors que la cible à cet horizon était une réduction de 30 pour cent à l’échelle mondiale par rapport à l’année de référence (soit une prévalence de 10,5 pour cent en 2030). L’Océanie (hors Australie et Nouvelle-Zélande) présentait la plus forte prévalence de l’insuffisance pondérale à la naissance parmi toutes les régions du monde en 2012 (17,4 pour cent) et les dernières estimations (prévalence de 17,9 pour cent) indiquent que c’est toujours le cas.

Des progrès importants ont été accomplis s’agissant de l’augmentation du taux mondial d’allaitement maternel exclusif des nourrissons de moins de 6 mois. D’après les dernières estimations, la prévalence mondiale a progressé régulièrement, passant de 37,1 pour cent (25,7 millions) en 2012 à 48 pour cent (31,3 millions) en 2022. Toutefois, le monde n’est pas sur la bonne voie pour atteindre la cible de 70 pour cent en 2030, les projections actuelles tablant sur une prévalence de l’allaitement maternel exclusif de 59 pour cent en 2030. L’Amérique du Nord présente le taux d’allaitement maternel exclusif le plus faible de toutes les régions du monde (25,8 pour cent en 2022). On observe une stagnation pendant les 10 dernières années dans cette région, alors que l’indicateur suit une tendance à la hausse dans les autres.

La prévalence mondiale du retard de croissance chez les enfants de moins de 5 ans a reculé régulièrement, passant de 26,3 pour cent (177,9 millions) en 2012 à 22,3 pour cent (148,1 millions) en 2022 – dernière année pour laquelle des données sont disponibles. En supposant que la tendance observée depuis l’année de référence se poursuive, on s’attend à ce que 19,5 pour cent encore des enfants de moins de 5 ans présentent un retard de croissance en 2030. Le monde n’est actuellement pas sur la bonne voie pour atteindre la cible fixée pour 2030, à savoir réduire de moitié le nombre d’enfants de moins de 5 ans souffrant d’un retard de croissance dans le monde d’ici à cette date (cible de 13,5 pour cent). Cette diminution trop lente implique également que le nombre d’enfants, d’adolescents et d’adultes qui subiront leur vie entière les conséquences d’un retard de croissance pendant la petite enfance restera élevé. L’Océanie (hors Australie et Nouvelle-Zélande) présente les niveaux les plus élevés de retard de croissance chez les enfants de moins de 5 ans (44 pour cent en 2022). La prévalence augmente dans cette région depuis 2012, alors que la plupart des autres régions ont enregistré une amélioration de cet indicateur sur les 10 dernières années.

Le taux mondial de prévalence de l’émaciation chez les enfants de moins de 5 ans a relativement peu évolué au cours des 10 dernières années. En 2012, 7,5 pour cent des enfants de moins de 5 ans (50,7 millions) souffraient d’émaciation. Cette prévalence est passée à 6,8 pour cent (45 millions) en 2022. La progression enregistrée depuis l’année de référence laisse entendre que le monde n’est pas sur la bonne voie pour atteindre la cible fixée pour 2030, à savoir un taux mondial de prévalence de 3 pour cent: d’après les projections, 6,2 pour cent des enfants de moins de 5 ans seront émaciés en 2030, soit plus du double de la cible. Par ailleurs, la prévalence de l’émaciation peut flamber au niveau d’un pays dans les contextes d’insécurité alimentaire aiguë, tels que les saisons de soudure ou les situations d’urgence, ou lors d’augmentations de l’incidence de morbidité (épidémies de diarrhée ou de rougeole, par exemple). L’Asie présente les niveaux les plus élevés d’émaciation chez les enfants de moins de 5 ans; les efforts devront être poursuivis dans cette région pour faire reculer cette pathologie potentiellement mortelle.

La prévalence mondiale de l’excès pondéral chez les enfants de moins de 5 ans a stagné: elle était de 5,5 pour cent (37 millions) en 2012 et de 5,6 pour cent (37 millions) en 2022 – dernière année pour laquelle on dispose de données. D’ici à 2030, 5,7 pour cent des enfants de moins de 5 ans devraient être en surpoids, soit près du double de la cible mondiale, fixée à 3 pour cent. Les enfants en surpoids présentent un risque accru d’obésité et de maladies non transmissibles à l’âge adulte51. Les enfants de moins de 5 ans vivant en Australie et en Nouvelle-Zélande présentent les prévalences d’excès pondéral chez l’enfant les plus élevées de toutes les régions du monde – 19,3 pour cent en 2022.

À l’échelle mondiale, la prévalence de l’anémie chez les femmes âgées de 15 à 49 ans est passée de 28,5 pour cent (520 millions) en 2012 à 29,9 pour cent (571 millions) en 2019. Les projections fondées sur la tendance de 2012 à 2019 – dernière année pour laquelle des données sont disponibles – font ressortir une prévalence de 32,3 pour cent en 2030. À ce rythme, le monde n’atteindra donc pas la cible de réduction de 50 pour cent de la prévalence de l’anémie d’ici à 2030 (prévalence cible de 14,3 pour cent). L’anémie est un état pathologique complexe lié à de nombreux facteurs nutritionnels, ainsi qu’à des facteurs non nutritionnels tels que les infections. Les mesures visant à réduire l’anémie doivent s’attaquer directement à ces multiples causes, qui varient selon les contextes. Des données de plus en plus nombreuses font apparaître un lien important entre la carence en fer, l’anémie et l’obésité, ce qui est particulièrement préoccupant compte tenu de l’augmentation continue à la fois de l’anémie et de l’obésité. Certains éléments indiquent que ce lien biologique pourrait nécessiter de nouvelles approches en matière de prévention et de traitement52, 53. L’anémie touche une plus grande proportion des femmes âgées de 15 à 49 ans en Afrique que dans toute autre région du monde: la prévalence y a atteint 38,9 pour cent en 2019, et on observe une absence pratiquement totale de progrès au cours des 10 dernières années. Des actions de plus grande ampleur seront nécessaires pour accélérer la réduction de l’anémie chez les femmes en âge de procréer, dans le monde entier.

Les nouvelles données relatives à la prévalence de l’obésité chez l’adulte (personnes âgées de 18 ans et plus) font apparaître une augmentation constante au cours des 10 dernières années; de 12,1 pour cent (591 millions de personnes) en 2012, on est passé à 15,8 pour cent (881 millions de personnes) en 2022. Le monde n’est pas sur la bonne voie pour atteindre la cible mondiale fixée pour 2030, à savoir enrayer l’augmentation, étant donné que l’on s’attend à ce que 1,2 milliard d’adultes soient obèses en 2030 (soit une prévalence de 19,8 pour cent à l’échelle mondiale). La région de l’Amérique latine et des Caraïbes est celle qui présente la plus forte prévalence, avec pas loin de 30 pour cent de la population adulte touchée par l’obésité en 2022, suivie de près par l’Océanie (29,5 pour cent) et par l’Amérique du Nord et l’Europe (27,9 pour cent).

Progrès observés dans les pays

Pour la majeure partie des sept cibles mondiales relatives à la nutrition, on compte moins de pays sur la bonne voie que de pays en retard (figure 11). Les trois quarts des pays du monde (146 sur 195) ne sont pas sur la bonne voie s’agissant d’atteindre la cible mondiale fixée pour 2030 en matière d’insuffisance pondérale à la naissance. Ce chiffre ne comprend pas les 37 pays pour lesquels on ne dispose pas de suffisamment de données pour évaluer leur progression, et qui pourraient également être en retard. De plus, 72,8 pour cent des nouveau-nés vivent dans des pays qui sont en retard. Plus de 40 pour cent des pays (82 sur 195) sont en retard concernant la cible mondiale fixée pour 2030 en matière d’allaitement maternel exclusif, et 88 pays n’ont pas été évalués faute de données suffisantes. Plus de la moitié (54,2 pour cent) des nourrissons âgés de moins de 6 mois vivent dans des pays qui sont en retard. La moitié des pays du monde (96 sur 195) ne sont pas en voie d’atteindre la cible mondiale fixée pour 2030 en matière de retard de croissance; les trois quarts des enfants de moins de 5 ans (75,1 pour cent) vivent dans ces pays, et on ne dispose pas de données suffisantes pour évaluer les progrès pour 40 pays. Plus d’un quart des pays du monde (55 sur 195) sont en retard concernant la cible mondiale relative à l’émaciation chez l’enfant; plus de la moitié des enfants de moins de 5 ans (54,7 pour cent) vivent dans ces pays. Pour 72 pays, qui ne représentent que 7,3 pour cent de la population mondiale, les données sont insuffisantes pour suivre les progrès à l’égard de cette cible. Quelque 60 pour cent des pays (119 sur 195) sont en retard par rapport à la cible mondiale fixée pour 2030 concernant l’excès pondéral chez l’enfant; les progrès ne peuvent pas être évalués pour 37 pays faute de données suffisantes. Les pays qui sont en retard au regard de l’indicateur de l’excès pondéral comptent la moitié des enfants âgés de moins de 5 ans (52,5 pour cent). Presque tous les pays du monde (191 sur 195) ne sont pas en voie d’atteindre la cible mondiale fixée pour 2030 en matière d’anémie. Des analyses supplémentaires seront nécessaires pour mieux comprendre les causes de l’anémie liées au contexte propre aux pays et pouvoir ainsi mener des interventions ciblées pour mettre les pays sur la bonne voie concernant cet indicateur. De la même façon, presque tous les pays (191 sur 195) sont en retard au regard de la cible mondiale relative à l’obésité chez l’adulte, et des mesures sont nécessaires de toute urgence pour désamorcer cette bombe à retardement.

FIGURE 11 POUR LA MAJEURE PARTIE DES SEPT CIBLES MONDIALES RELATIVES À LA NUTRITION, ON COMPTE MOINS DE PAYS SUR LA BONNE VOIE QUE DE PAYS EN RETARD

NOTES: L’objectif est d’enrayer la hausse de l’obésité chez l’adulte d’ici à 2025. La part dans la population totale (%) est indiquée entre parenthèses. La méthode utilisée pour évaluer les progrès des pays vers les cibles mondiales relatives à la nutrition est exposée dans le supplément au chapitre 2.
SOURCES: Voir les sources de la figure 10.

Des progrès importants ont été accomplis en ce qui concerne les lacunes de données au cours des 10 dernières années, grâce à des collectes plus fréquentes de données, à l’utilisation de techniques d’analyse sophistiquées et à des améliorations des flux de données. Il reste cependant beaucoup à faire pour les combler, 20 pour cent environ des pays ne disposant toujours pas de suffisamment de données pour permettre d’évaluer les progrès pour cinq des sept indicateurs. Les évaluations relatives à l’allaitement maternel exclusif et à l’émaciation reposent sur des données primaires collectées principalement dans le cadre d’enquêtes représentatives au niveau national. Les modalités et la fréquence de ces enquêtes peuvent varier selon les pays et les contextes, et les données disponibles peuvent donc manquer de cohérence et parfois ne pas être suffisantes pour évaluer les progrès. Il est urgent de mieux utiliser les données existantes aux fins de l’estimation des tendances au moyen de modèles afin de combler les lacunes pour ces deux indicateurs, et de poursuivre les efforts pour collecter des données de bonne qualité.

Progrès dans les pays les moins avancés

L’ONU définit les pays les moins avancés (PMA)54 comme étant des pays à faible revenu, confrontés à de graves obstacles structurels qui entravent leur développement durable55. Cette classification a été établie par l’Assemblée générale des Nations Unies sur le constat que les PMA parmi ceux en développement avaient besoin de mesures d’appui spécifiques, notamment sur les plans financier et technique, pour stimuler leur développement socioéconomique. La présente analyse, et notamment les projections à l’horizon 2030, porte sur le groupe des 45 PMA tel qu’il a été défini par l’ONU en janvier 2024. La figure 12 montre que les résultats du groupe des PMA sont supérieurs à la moyenne mondiale pour deux des sept indicateurs nutritionnels. Plus précisément, la prévalence de l’allaitement maternel exclusif des enfants de moins de 6 mois dans les PMA est supérieure à la moyenne mondiale depuis l’année de référence (2012), et devrait, d’après les projections, atteindre 61,7 pour cent d’ici à 2030, tandis que la moyenne mondiale devrait rester à 59,0 pour cent. On observe une baisse plus rapide de la prévalence de l’émaciation chez les enfants de moins de 5 ans pour les PMA que pour l’agrégat mondial, alors que ces pays sont partis d’une prévalence plus élevée l’année de référence (8,4 pour cent contre 7,5 pour cent à l’échelle mondiale en 2012). D’ici à 2030, le résultat dans les PMA devrait être légèrement supérieur à celui enregistré en moyenne dans le monde (6,0 pour cent contre 6,2 pour cent à l’échelle mondiale). Cependant, la prévalence de l’émaciation reste trop élevée, et il faut continuer de procéder à des investissements d’urgence dans les interventions qui visent à sauver des vies par la prévention et le traitement de la malnutrition aiguë.

FIGURE 12 PAR RAPPORT AUX ESTIMATIONS POUR L’ENSEMBLE DU MONDE, LES PAYS LES MOINS AVANCÉS PRÉSENTENT DES TAUX BIEN SUPÉRIEURS DE RETARD DE CROISSANCE CHEZ L’ENFANT DE MOINS DE 5 ANS ET D’ANÉMIE CHEZ LES FEMMES ÂGÉES DE 15 A 49 ANS, ET LA MÊME HAUSSE INQUIÉTANTE DE L’OBÉSITE CHEZ L’ADULTE

SOURCES: Voir les sources de la figure 10.

La dénutrition reste un grave problème dans les PMA – le retard de croissance chez les enfants de moins de 5 ans et l’anémie chez les femmes âgées de 15 à 49 ans sont considérablement supérieurs à la moyenne mondiale dans ce groupe de pays. Les projections indiquent que, d’ici à 2030, la prévalence du retard de croissance dans les PMA sera de 28,1 pour cent, contre 19,5 pour cent à l’échelle mondiale, et ce malgré une tendance à la baisse dans ce groupe de pays depuis l’année de référence. En revanche, la tendance mondiale de l’anémie est à la hausse depuis l’année de référence. En 2019 – dernière année pour laquelle des données sont disponibles – la prévalence de l’anémie dans les PMA (39,4 pour cent) a même dépassé celle enregistrée au niveau mondial (29,9 pour cent). La prévalence de l’insuffisance pondérale à la naissance dans les PMA suit l’évolution de la moyenne mondiale – en 2012 (année de référence), elle était de 16,1 pour cent, contre 15,0 pour cent au niveau mondial. En 2020 (dernière année pour laquelle on dispose de données), elle s’est établie à 15,3 pour cent dans les PMA, alors que la moyenne mondiale était proche de 14,7 pour cent. D’ici à 2030, les 45 pays et l’agrégat mondial auront, d’après les projections, des niveaux de prévalence comparables d’insuffisance pondérale à la naissance (14,3 pour cent et 14,2 pour cent, respectivement). Bien que la prévalence de l’excès pondéral chez l’enfant dans les PMA reste inférieure à la moyenne mondiale, on constate dans ce groupe de pays une stagnation des progrès similaire à celle observée à l’échelle mondiale. Par ailleurs, on a constaté une hausse inquiétante de l’obésité chez l’adulte dans les PMA, qui reflète celle observée au niveau mondial, et la part de ces pays dans la charge mondiale de l’obésité chez l’adulte a également augmenté au fil du temps – alors même que la dénutrition continuait de peser fortement sur ce groupe. L’aide destinée à permettre aux PMA de remédier aux obstacles structurels au développement durable, d’améliorer leurs revenus et d’atteindre les sept cibles relatives à la nutrition est l’une des priorités mondiales en matière de développement.

Le double fardeau de la malnutrition

Le double fardeau de la malnutrition56 – coexistence de la dénutrition avec l’excès pondéral et l’obésité – s’est intensifié durant les dernières décennies dans tous les groupes d’âge et de revenu. Les travaux de recherche ont permis de constater que les pays voient trois types de transition s’opérer dans leur population lorsqu’ils se développent et progressent sur le plan économique. La «transition nutritionnelle» correspond à la modification du régime alimentaire de la population, d’une alimentation fondée sur des denrées alimentaires de base à une plus grande diversité alimentaire, notamment une consommation plus importante de produits laitiers, de poisson, de viande, de fruits et de légumes, mais aussi d’aliments hautement transformés riches en graisses, en sucres et en sel. Elle est souvent liée à la mondialisation, à une urbanisation rapide et à des modes de vie sédentaires, et contribue à la «transition épidémiologique», qui marque une évolution du fardeau de la malnutrition dans la population – d’une prédominance de la dénutrition au surpoids et à l’obésité – ainsi qu’une évolution de la charge de morbidité – des maladies infectieuses aux maladies non transmissibles. On continue d’observer, malgré les éléments qui attestent une transition nutritionnelle, une prévalence des carences en micronutriments dans toutes les régions du monde, qui est souvent omise des estimations du double fardeau43, 57. Les carences en micronutriments peuvent subsister lors de la transition. Par ailleurs, la structure de la population se modifie, principalement sous l’effet d’une baisse des taux de natalité et d’une augmentation de l’espérance de vie. Cette «transition démographique» se caractérise par une augmentation de l’âge moyen dans la population, qui s’accompagne dans le même temps d’un accroissement des risques de maladies non transmissibles58. Par le passé, ces transitions se produisaient graduellement, sur plusieurs siècles, mais elles se sont accélérées ces dernières décennies, et on a constaté une augmentation considérable des changements de régime alimentaire et de l’hétérogénéité nutritionnelle ainsi que du risque de maladie en l’espace d’une seule génération. Les décideurs publics se heurtent ainsi à des difficultés sans précédent, car ils doivent lutter à la fois contre l’excès pondéral et contre la dénutrition, et leurs répercussions sanitaires et économiques.

Le réseau NCD Risk Factor Collaboration (NCD-RisC)59 a récemment mené une étude sur le double fardeau de la malnutrition de 1990 à 2022 chez les adultes, les enfants d’âge scolaire et les adolescents dans 200 pays et territoires. Dans le cadre de cette analyse, les auteurs ont calculé le double fardeau en additionnant la prévalence de l’insuffisance pondérale ou de la maigreur et celle de l’obésité. Le véritable taux de prévalence du double fardeau est bien plus élevé si l’on considère toutes les formes de malnutrition, y compris les carences en micronutriments57. Les résultats ont montré que, dans la plupart des régions, la réduction du double fardeau était liée au recul de l’insuffisance pondérale et de la maigreur, tandis que son augmentation provenait d’un accroissement du surpoids et de l’obésité. Une transition s’est opérée dans la plupart des pays, la prédominance de l’insuffisance pondérale et de la maigreur ayant laissé place à une prédominance du surpoids et de l’obésité, à quelques exceptions près, en Asie du Sud, par exemple, où le recul de l’insuffisance pondérale n’a pas été compensé par une augmentation de l’obésité. En 1990, les niveaux d’obésité les plus élevés dans la population concernaient les adultes, tandis qu’au XXIe siècle, ce sont les enfants d’âge scolaire et les adolescents qui sont de plus en plus touchés par ce fléau60.

La figure 13 illustre le phénomène du double fardeau à l’échelle mondiale chez les enfants d’âge scolaire (5 à 9 ans), les adolescents (10 à 19 ans), les adultes (20 à 59 ans) et les personnes âgées (60 ans et plus) entre 2000 et la dernière année pour laquelle des données sont disponibles (2022), puis jusqu’en 2030 (d’après les projections). La maigreur chez les enfants d’âge scolaire et les adolescents correspond à un indice de masse corporelle (IMC) <–2 points d’écart type sous la médiane des données de référence de l’OMS de 2007 en matière de croissance des enfants d’âge scolaire et des adolescents61, tandis que l’obésité dans ces mêmes groupes d’âge correspond à IMC > 2 points d’écart type au-dessus de la médiane. Chez les adultes et les personnes âgées, l’insuffisance pondérale correspond à un IMC inférieur à 18,5 kg/m2 et l’obésité à un IMC supérieur ou égal à 30 kg/m2. D’ici à 2030, 1 personne sur 6 dans le monde sera âgée de 60 ans ou plus, et le nombre de personnes de ce groupe de population sera passé de 1,1 milliard en 2020 à 1,4 milliard en 203062. Tous les pays du monde voient la proportion de personnes âgées (60 ans ou plus) dans leur population augmenter63. Il convient de mettre davantage l’accent sur ce groupe d’âge dans le programme mondial pour la nutrition en relation avec les cibles des ODD. La collecte périodique de données sur les adultes de plus de 60 ans devrait être renforcée pour favoriser des politiques conformes aux engagements pris au titre de la Décennie des Nations Unies pour le vieillissement en bonne santé (2021-2030)64, 65.

FIGURE 13 À L’ÉCHELLE MONDIALE, LES TAUX D’OBÉSITE ONT FORTEMENT AUGMENTÉ ET LA MAIGREUR ET L’INSUFFISANCE PONDÉRALE ONT RECULÉ CHEZ LES ENFANTS D’ÂGE SCOLAIRE, LES ADOLESCENTS, LES ADULTES ET LES PERSONNES ÂGÉES

NOTE: * Maigreur chez les enfants d’âge scolaire et les adolescents; insuffisance pondérale chez les adultes et les personnes âgées.
SOURCE: OMS. 2024. The Global Health Observatory. [Consulté le 24 juillet 2024]. https://www.who.int/data/gho. Licence: CC-BY-4.0.

Dans l’ensemble du monde et dans tous les groupes d’âge, la maigreur et l’insuffisance pondérale ont reculé au cours des deux dernières décennies, tandis que l’obésité a fortement augmenté. La prévalence mondiale de la maigreur chez les enfants d’âge scolaire (5 à 9 ans) est passée de 12,3 pour cent en 2000 à 8,5 pour cent en 2022, et les projections indiquent qu’elle devrait s’établir à 7,2 pour cent d’ici à 2030. Dans l’intervalle, l’obésité dans ce groupe d’âge a plus que doublé depuis 2000; de 4 pour cent en 2000 elle est passée à 10,2 pour cent 2022 et devrait, d’après les projections, être 3,6 fois plus élevée que son niveau de 2000 en 2030 (pour atteindre 14,4 pour cent). Chez les adolescents (10 à 19 ans), la prévalence de la maigreur a diminué progressivement de 2000 à 2022 (de 13,2 pour cent à 10,2 pour cent), tandis que le niveau d’obésité a été multiplié par 2,5 au cours de la même période (de 2,8 pour cent à 7,2 pour cent) et atteindra, d’après les projections, 10,0 pour cent en 2030, soit plus du triple de son niveau de 2000.

La prévalence mondiale de l’insuffisance pondérale chez les adultes (20 à 59 ans) a été divisée par deux en 20 ans (de 12,1 pour cent en 2000 à 6,6 pour cent en 2022). Quant à l’obésité, elle a doublé sur la même période, passant de 7,9 pour cent à 15,9 pour cent, et devrait, d’après les projections, atteindre un niveau 2,6 fois plus élevé que son niveau de 2000 d’ici à 2030 (20,3 pour cent). La prévalence mondiale de l’insuffisance pondérale chez les personnes âgées (60 ans et plus) a été divisée par deux entre 2000 et 2022 (de 12,4 pour cent à 6,3 pour cent). La prévalence de l’obésité, en revanche, a augmenté sur la même période, passant de 13,1 pour cent à 18,9 pour cent, et les projections indiquent qu’elle atteindra 21,6 pour cent d’ici à 2030, soit un niveau 1,6 fois plus élevé que celui de 2000. Les politiques qui continuent de s’attaquer au défi persistant de la dénutrition doivent être complétées d’urgence par des politiques destinées à freiner ou à inverser la tendance à la hausse de l’obésité dans tous les groupes de population.

Le double fardeau de la malnutrition appelle des mesures à double usage66-68. Ces mesures permettent de s’attaquer tout à la fois à la dénutrition, à l’excès pondéral et à l’obésité, en agissant sur les facteurs qui sont communs à toutes les formes de malnutrition, notamment les facteurs biologiques, environnementaux et socioéconomiques, et ouvrent ainsi la voie à des politiques, interventions et programmes communs. L’encadré 5 donne quelques exemples de mesures à double usage.

ENCADRÉ 5MESURES À DOUBLE USAGE POUR LUTTER CONTRE LE DOUBLE FARDEAU DE LA MALNUTRITION

Mesures à double usage en faveur des nourrissons et enfants en bas âge (moins de 5 ans)

  • Développer les interventions visant à protéger, promouvoir et appuyer l’allaitement maternel (allaitement immédiat, allaitement exclusif, poursuite de l’allaitement).
  • Favoriser une alimentation complémentaire optimale69 qui privilégie les aliments d’origine animale riches en nutriments, les fruits et les légumes, les fruits à coque, les légumes secs et les graines par rapport aux féculents, et qui évite les aliments riches en sucres, en sel et en acides gras trans, les boissons sucrées et les édulcorants sans sucre.
  • Tenir compte des risques liés à une valeur énergétique excessive des aliments complémentaires, et éviter de donner aux enfants en bas âge des aliments, collations et boissons très énergétiques et à forte teneur en sucres, en matières grasses et en sel.
  • Proposer de nouveaux programmes pour former les agents affectés aux soins de santé primaires de manière qu’ils puissent dispenser des conseils nutritionnels à double usage.
  • Faire connaître les risques liés à l’excès pondéral et à l’obésité, en plus de ceux liés au retard de croissance et à l’émaciation, dans les programmes de suivi de la croissance, notamment dans les contextes où le surpoids chez les enfants est un problème.
  • Veiller à une prévention et une gestion adéquates de l’émaciation modérée et sévère – y compris à l’aide d’aliments thérapeutiques prêts à l’emploi, de compléments alimentaires et d’aliments composés enrichis améliorés – en fonction de l’état de santé et du contexte70.
  • Veiller à ce que des directives de ciblage et des critères clairs soient utilisés dans le cadre de la distribution de suppléments nutritionnels prêts à consommer (aliments thérapeutiques, aliments composés enrichis améliorés), notamment pour la prévention et le traitement de la malnutrition aiguë modérée ou sévère, et gérer la durée du traitement pour éviter un gain de poids excessif ou trop rapide par rapport à ce qui est nécessaire aux fins de prévention ou de rétablissement.

Mesures à double usage en faveur des enfants d’âge scolaire (5 à 9 ans) et des adolescents (10 à 19 ans)

  • Revoir les programmes d’alimentation scolaire de manière à faciliter l’accès à une alimentation saine et définir de nouvelles directives nutritionnelles concernant l’alimentation à l’intérieur et aux abords des établissements scolaires. Appuyer ces mesures au moyen de cadres politiques, juridiques et institutionnels. Éliminer ou, au minimum, réglementer la promotion commerciale et la vente d’aliments, de collations et de boissons très énergétiques et à forte teneur en sucres, en matières grasses et en sel à proximité des établissements scolaires.
  • Élaborer une approche «à l’échelle de l’école» qui favorise une alimentation saine, par exemple en intégrant la nutrition dans les programmes scolaires et les cours de connaissances de base en matière de santé; en favorisant l’activité physique dans l’environnement scolaire; en créant des jardins potagers dans les écoles; en renforçant les connaissances et les compétences nécessaires pour sensibiliser, façonner les goûts et mettre en place des habitudes alimentaires saines; en invitant les parents à participer à la planification des repas; et en incitant à adopter des comportements alimentaires sains à la maison.
  • Utiliser des plateformes et autres outils nouveaux qui plaisent aux jeunes, pour susciter des changements de comportement et transmettre aux enfants et aux adolescents des messages essentiels sur les aliments nutritifs et l’alimentation saine.
  • Dans les contextes où la prévalence de l’anémie chez les femmes non enceintes atteint 20 pour cent ou plus, apporter aux adolescentes non enceintes une complémentation temporaire en fer et en acide folique pendant le cycle menstruel. Si la prévalence atteint 40 pour cent ou plus, apporter une complémentation quotidienne en fer71.

Mesures à double usage en faveur des femmes enceintes

  • Diffuser plus largement les recommandations pour les femmes enceintes en matière de soins prénatals (en visant aussi les adolescentes enceintes) dans le système de santé, et mettre l’accent sur les activités de conseil qui encouragent les femmes à avoir une alimentation saine et une activité physique durant la grossesse pour rester en bonne santé et éviter de prendre trop de poids.
  • Effectuer un suivi des apports en compléments protéinés et énergétiques ciblés pour éviter un gain de poids excessif et involontaire durant la grossesse.
  • Distribuer des espèces ou des bons alimentaires pour améliorer l’alimentation maternelle tout en surveillant la prise de poids gestationnelle, afin de détecter une prise de poids insuffisante ou au contraire excessive.
  • Apporter une supplémentation quotidienne en acide folique aux femmes enceintes dans le cadre des soins prénatals courants. Dans les contextes où la prévalence de l’anémie chez les femmes enceintes est inférieure à 20 pour cent, ou lorsqu’une complémentation quotidienne en fer n’est pas acceptable en raison des effets indésirables, apporter une complémentation intermittente en acide folique. Dans les contextes où la prévalence des carences nutritionnelles est élevée, des compléments en micronutriments multiples (comprenant l’acide folique) peuvent être envisagés71.
  • Dans les populations souffrant de dénutrition, communiquer en vue de faire évoluer les comportements (débats publics, campagnes de communication de grande envergure, séances de conseils personnalisés ou en petits groupes, supports visuels de communication), pour favoriser l’augmentation des apports journaliers totaux, notamment de protéines (réduction du risque d’insuffisance pondérale à la naissance) et une supplémentation journalière équilibrée en protéines et en énergie (réduction du risque de donner naissance à un enfant mort-né ou à un enfant de petite taille pour l’âge gestationnel).

Mesures à double usage en faveur de l’ensemble des groupes

  • Accroître la dimension nutritionnelle des programmes de protection sociale pour tous les groupes d’âge ou les groupes ciblés (les femmes enceintes et allaitantes et enfants en bas âge ou les personnes âgées, par exemple) au moyen de modalités dimensionnées de manière adéquate et de nature à améliorer la nutrition – allocations ou bons alimentaires associés à des détaillants qui vendent des produits alimentaires nutritifs (excluant les aliments, collations et boissons très énergétiques et à forte teneur en sucres, en matières grasses et en sel); mise en place d’avantages lorsque les transferts monétaires ou les bons sont utilisés pour acheter des aliments nutritifs; mise en œuvre de stratégies de communication visant à changer les comportements, axées sur l’alimentation saine, l’activité physique et l’utilisation préventive des services de santé (détection précoce de l’excès pondéral, de l’obésité et des maladies non transmissibles).
  • Développer des programmes agricoles intégrant l’enjeu nutritionnel pour encourager la diversification de la production et de la consommation, notamment parmi les ménages pauvres qui vivent dans des zones reculées où l’accès aux marchés est difficile. Concevoir et appuyer une agriculture urbaine et périurbaine pour répondre à la demande croissante d’aliments nutritifs dans les zones urbaines.
  • Mettre en place des mesures à toutes les étapes des systèmes agroalimentaires pour faire en sorte que des aliments nutritifs et diversifiés soient mis à la disposition de tous (y compris les populations vulnérables), par la chaîne de valeur – du producteur au consommateur.
  • Transformer les environnements alimentaires grâce à des politiques et une législation qui mettent fin aux publicités trompeuses pour des substituts du lait maternel (préparations destinées aux nourrissons, préparations de suite); renforcer les restrictions concernant la commercialisation d’aliments, de collations et de boissons très énergétiques et à forte teneur en sucres, en matières grasses et en sel, y compris lorsqu’il s’agit d’aliments enrichis; adopter un étiquetage nutritionnel frontal; mettre en place des taxes ciblées sur les aliments, collations et boissons très énergétiques et à forte teneur en sucres, en matières grasses et en sel, ainsi que des subventions pour les aliments nutritifs, pour encourager des habitudes d’achat plus saines.
  • Amener, par des incitations, les producteurs, détaillants et commerçants à améliorer la qualité nutritionnelle de l’approvisionnement alimentaire en reformulant les aliments néfastes pour la santé à forte teneur en sucres, en matières grasses et en sel et en enrichissant les aliments de base (iodation universelle du sel, enrichissement en vitamines et minéraux de la farine de maïs, de la semoule de maïs, du riz, de la farine de blé et de l’huile végétale).
SOURCE: Adapté de Hawkes, C., Ruel, M.T., Salm, L., Sinclair, B. et Branca, F. 2020. Double-duty actions: seizing programme and policy opportunities to address malnutrition in all its forms. The Lancet, 395 (10218): 142-155. https://doi.org/10.1016/S0140-6736(19)32506-1
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