En 2022, la production mondiale de la pêche de capture s’est établie à 92,3 millions de tonnes (en équivalent poids vif), dont 91,0 millions de tonnes d’animaux aquatiques et 1,3 million de tonnes (en poids humide) d’algues, parallèlement à quelque 7 700 tonnes d’autres produits aquatiques tels que des coraux, des perles, des coquillages et des éponges. La production d’animaux aquatiques (91,0 millions de tonnes) dans le secteur de la pêche de capture a diminué de 0,2 pour cent par rapport à la moyenne des trois dernières années (tableau 1, p. 4). Elle avait atteint un pic en 2018 (96,5 millions de tonnes), du fait des prises exceptionnellement élevées d’anchois du Pérou (Engraulis ringens) déclarées par le Pérou et le Chili. Les captures ont ensuite marginalement baissé, sous l’effet notamment de la pandémie de covid-19 en 2020. La tendance relativement stable de la production de la pêche de capture, qui oscille entre 86 millions de tonnes et 93 millions de tonnes par an depuis la fin des années 1980, s’est maintenue en 2022 (figure 13).
FIGURE 13PRODUCTION MONDIALE D’ANIMAUX AQUATIQUES DANS LE SECTEUR DE LA PÊCHE DE CAPTURE, 1950-2022

SOURCE: FAO. 2024. FishStat: Captures mondiales, 1950-2022. [Consulté le 29 mars 2024]. Dans: FishStatJ. Disponible à l’adresse: www.fao.org/fishery/fr/statistics/software/fishstatj. Licence: CC-BY-4.0.
La Chine demeure le premier pays producteur, avec 13,0 millions de tonnes (14,3 pour cent des captures mondiales d’animaux aquatiques en 2022), soit un volume supérieur aux prises cumulées des deuxième et troisième plus grands producteurs mondiaux. Les sept principaux producteurs du secteur de la pêche de capture, à savoir la Chine, les États-Unis d’Amérique, la Fédération de Russie, l’Inde, l’Indonésie, le Pérou et le Viet Nam, représentent plus de 48 pour cent des captures mondiales, proportion qui passe à près de 73 pour cent si l’on considère les 20 plus grands producteurs.
Les dernières tendances observées s’agissant des captures dans les eaux marines et les eaux continentales, sources de respectivement 87,5 pour cent et 12,5 pour cent de la production mondiale, sont exposées plus en détail ci-dessous.
Production de la pêche de capture marine
En 2022, la production totale d’animaux aquatiques dans les eaux marines a atteint 79,7 millions de tonnes, soit un recul de 0,7 pour cent par rapport à 2021, et de 5,5 pour cent par rapport au pic le plus récent de 84,4 millions de tonnes enregistré en 2018, année où des prises relativement importantes d’anchois du Pérou ont été déclarées par le Pérou et le Chili (tableau 6).
TABLEAU 6PRODUCTION D’ANIMAUX AQUATIQUES DANS LE SECTEUR DE LA PÊCHE DE CAPTURE MARINE – PRINCIPAUX PRODUCTEURS

SOURCE: FAO. 2024. FishStat: Captures mondiales, 1950-2022. [Consulté le 29 mars 2024]. Dans: FishStatJ. Disponible à l’adresse: www.fao.org/fishery/fr/statistics/software/fishstatj. Licence: CC-BY-4.0.
Les tendances qui ressortent ces dernières années en ce qui concerne les captures marines à l’échelle mondiale restent, dans une large mesure, liées aux principaux producteurs ainsi qu’aux principales espèces, notamment à la réduction continue, et planifiée, des captures par la Chine, et aux variations observées dans l’abondance de grandes espèces telles que l’anchois du Pérou, la sardine du Pacifique (Sardinops sagax) et le chinchard gros yeux (Trachurus symmetricus), qui sont très importantes et influencées par les épisodes El Niño et d’autres évolutions des conditions océanographiques (voir Répercussions du phénomène El Niño sur la pêche marine et l’aquaculture, p. 219).
Bien que la pêche soit omniprésente dans les zones marines, la production est concentrée dans un petit nombre de pays (figure 14a). Comme les années précédentes, les sept principaux producteurs représentaient 50 pour cent des captures marines totales en 2022 (figure 14b). La Chine a contribué à elle seule pour 14,8 pour cent au total mondial, suivie de l’Indonésie (8,6 pour cent), du Pérou (6,6 pour cent), de la Fédération de Russie (5,9 pour cent), des États-Unis d’Amérique (5,3 pour cent), de l’Inde (4,5 pour cent) et du Viet Nam (4,3 pour cent) (tableau 6).
FIGURE 14PRODUCTION MONDIALE D’ANIMAUX AQUATIQUES DANS LE SECTEUR DE LA PÊCHE DE CAPTURE MARINE

SOURCE: Service d’information géospatiale des Nations Unies. 2020. Géodonnées cartographiques.

SOURCE: FAO. 2024. FishStat: Captures mondiales, 1950-2022. [Consulté le 29 mars 2024]. Dans: FishStatJ. Disponible à l’adresse: www.fao.org/fishery/fr/statistics/software/fishstatj. Licence: CC-BY-4.0.
Si la Chine reste le premier producteur mondial, ses captures marines ont diminué de 17,9 pour cent (passant de 14,4 millions de tonnes en 2015 à 11,8 millions de tonnes en 2022). Le maintien d’une politique de réduction des captures au-delà des treizième et quatorzième plans quinquennaux (2016-2020 et 2021-2025) devrait se traduire par de nouvelles diminutions dans les années à venir; le niveau des captures marines de 2022 était néanmoins très similaire à celui de 2021.
La Chine communique régulièrement ses données de production à la FAO, mais n’a transmis ces dernières années que des informations partielles sur les espèces et les zones de pêche. En 2022, elle a déclaré 2,3 millions de tonnes au total concernant la «pêche en eaux lointaines», mais n’a fourni d’informations détaillées sur les espèces et les zones de pêche que pour les prises débarquées sur son territoire (Pacifique Nord-Ouest, zone 61). Les données sur les captures manquantes, réalisées dans d’autres zones de pêche, ont été obtenues auprès des organisations régionales de gestion des pêches (ORGP), et 1,3 million de tonnes supplémentaires ont été ajoutées à la base de données de la FAO sous la catégorie «poissons de mer non compris ailleurs» pour la zone 61, ce qui entraînera probablement une surestimation des captures totales dans cette zone et dans le groupe d’espèces «autres poissons et animaux aquatiques» représenté à la figure 15. La Chine étant le principal producteur du secteur de la pêche de capture marine, des mesures supplémentaires sont nécessaires – en étroite collaboration avec les organismes officiels compétents – pour veiller à la communication en temps voulu et à la répartition correcte par zone de pêche des statistiques relatives aux captures chinoises.
FIGURE 15PRODUCTION MONDIALE D’ANIMAUX AQUATIQUES DANS LE SECTEUR DE LA PÊCHE DE CAPTURE MARINE – PRINCIPALES ZONES DE PÊCHE DE LA FAO, MOYENNE 2020-2022

SOURCES: FAO. 2024. FishStat: Captures mondiales, 1950-2022. [Consulté le 29 mars 2024]. Dans: FishStatJ. Disponible à l’adresse: www.fao.org/fishery/fr/statistics/software/fishstatj.
Licence: CC-BY-4.0.
Service d’information géospatiale des Nations Unies. 2020. Géodonnées cartographiques.
Au niveau régional, les pays asiatiquesf ont été à l’origine de 50,0 pour cent des captures marines mondiales en 2022; ils étaient suivis de l’Amérique latine et des Caraïbes (15,6 pour cent), de l’Europe (16,7 pour cent), de l’Afrique (9,2 pour cent), de l’Amérique du Nord (6,5 pour cent) et de l’Océanie (2,0 pour cent).
La base de données de la FAO sur les captures de la pêche marine à l’échelle mondiale contient des informations sur plus de 3 000 espèces (dont les catégories «non compris ailleurs»). Les poissons représentaient environ 85 pour cent de l’ensemble de la production en 2022, le groupe principal étant celui des petits pélagiques, suivis des gadiformes ainsi que des thonidés et espèces apparentées. Les données relatives aux captures de la pêche marine pour les principales espèces et les principales zones de pêche de la FAO sont présentées à la figure 15.
Les trois principales espèces marines n’ont pas changé depuis 2010. En 2022, comme les années précédentes, l’anchois du Pérou est resté l’espèce la plus pêchée, avec un volume de 4,9 millions de tonnes, toutefois inférieur au pic enregistré en 2018 (7,0 millions de tonnes). Le lieu de l’Alaska (Gadus chalcogrammus) est arrivé en deuxième place, avec 3,4 millions de tonnes, tandis que le listao (Katsuwonus pelamis) s’est classé troisième, avec 3,1 millions de tonnes (tableau 7). Sur les dix principales espèces pêchées en 2022 – toutes des poissons – trois, à savoir la sardine commune (Sardina pilchardus), le listao et l’albacore (Thunnus albacares), ont atteint en 2022 des volumes de prises proches de leurs niveaux record.
TABLEAU 7PRODUCTION D’ANIMAUX AQUATIQUES DANS LE SECTEUR DE LA PÊCHE DE CAPTURE MARINE – PRINCIPALES ESPÈCES/PRINCIPAUX GENRES


SOURCE: FAO. 2024. FishStat: Captures mondiales, 1950-2022. [Consulté le 29 mars 2024]. Dans: FishStatJ. Disponible à l’adresse: www.fao.org/fishery/fr/statistics/software/fishstatj. Licence: CC-BY-4.0.
Les captures de thonidés, en particulier, lesquels constituent l’un des groupes de poissons présentant la plus grande valeur, ont encore progressé, pour atteindre 8,3 millions de tonnes en 2022, soit le plus haut niveau jamais enregistré. Les prises d’autres groupes d’animaux aquatiques de grande valeur, comme les céphalopodes, les crevettes et les homards, ont également conservé leurs niveaux les plus élevés en 2022. S’agissant des homards – l’un des groupes les plus touchés par les restrictions liées à la covid-19 et par la fermeture des marchés d’exportation –, la production s’est relevée, et le volume des captures est passé à plus de 290 000 tonnes en 2022, sans toutefois retrouver le niveau enregistré les années prépandémie.
Le tableau 8 présente les statistiques des captures dans les principales zones de pêche de la FAO pour les quatre dernières années, ainsi que pour les dernières décennies.
TABLEAU 8PRODUCTION D’ANIMAUX AQUATIQUES DANS LE SECTEUR DE LA PÊCHE DE CAPTURE – PRINCIPALES ZONES DE PÊCHE DE LA FAO


* Jusqu’en 1991; URSS – Union des républiques socialistes soviétiques.
SOURCE: FAO. 2024. FishStat: Captures mondiales, 1950-2022. [Consulté le 29 mars 2024]. Dans: FishStatJ. Disponible à l’adresse: www.fao.org/fishery/fr/statistics/software/fishstatj. Licence: CC-BY-4.0.
Les différentes zones de pêche contribuent à des hauteurs très variables aux volumes mondiaux des prises de la pêche marine: en 2022, plus de 50 pour cent des captures ont été réalisées dans le Pacifique Nord-Ouest (zone 61), le Pacifique Centre-Ouest (zone 71) et le Pacifique Sud-Est (zone 87).
Le Pacifique Nord-Ouest (zone 61) a de nouveau enregistré la production la plus importante au sein des principales zones de pêche de la FAO, avec 18,6 millions de tonnes (soit 23,3 pour cent des captures mondiales de la pêche marine) en 2022, production constituée en grande partie des deux espèces les plus productives de la zone, à savoir le lieu de l’Alaska et la sardine du Pacifique (Sardinops sagax). Même si l’on soustrait 1,3 million de tonnes réattribuées pour 2022 à la pêche chinoise en eaux lointaines, cette zone conserve sa première place, et un écart important avec le Pacifique Centre-Ouest (zone 71), qui arrive en deuxième position avec 13,8 millions de tonnes (soit 17,3 pour cent des captures mondiales de la pêche marine) en 2022.
Le Pacifique Sud-Est (zone 87) se classe troisième, avec une production de 9,0 millions de tonnes en 2022, soit 11,3 pour cent des débarquements mondiaux. Les captures enregistrées récemment dans cette zone indiquent une inversion partielle de la tendance à la baisse observée entre le début des années 1990 et 2016, principalement en raison de l’augmentation des débarquements d’anchois du Pérou. La fluctuation des captures dans la zone 87 reflète également la forte variabilité annuelle associée aux zones de résurgence, notamment en ce qui concerne l’anchois du Pérou, qui représente entre 50 pour cent et 70 pour cent des prises totales dans la zone, ainsi que l’encornet volant géant (Dosidicus gigas).
Des captures record de la pêche de capture marine ont en outre été enregistrées dans les zones suivantes en 2022:
- Atlantique Centre-Est (zone 34): 5,5 millions de tonnes en 2022. Cette zone se caractérise par une forte diversité biologique – ressources pélagiques côtières et de haute mer et ressources démersales de grand fond, notamment. Les captures enregistrées en 2022 s’inscrivent dans la tendance à la hausse observée depuis les années 1970, en particulier en ce qui concerne le pilchard européen.
- Pacifique Centre-Ouest (zone 71): 13,8 millions de tonnes en 2022. Les thonidés et espèces apparentées représentent une part importante des captures, et comptent les deux espèces les plus productives de la zone (le listao et l’albacore). Les captures de la zone sont également constituées de petits pélagiques comme les sardines, les anchois et les comètes. Cependant, on note également une forte proportion de prises déclarées dans la catégorie «poissons de mer non compris ailleurs» (23 pour cent en 2022) ou dans d’autres catégories génériques.
- Océan Indien Ouest (zone 51): 5,7 millions de tonnes en 2022. Les thonidés et espèces apparentées constituent la plus grande part des captures dans cette zone de pêche, suivis des petits pélagiques et de poissons divers (principalement de récif). Une augmentation constante des prises a été observée de manière générale dans l’océan Indien depuis les années 1950, en particulier dans l’océan Indien Est (zone 57); cependant, le volume des captures a reculé ces dernières années du fait d’une réduction de la pression de pêche.
Dans le contexte de l’Accord de 2023 se rapportant à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et portant sur la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique marine des zones ne relevant pas d’une juridiction nationale, la gestion des ressources hauturières suscite un intérêt croissant – lié en partie à des préoccupations générales concernant la surpêche, mais aussi à la volonté de mieux déterminer le niveau d’exploitation des espèces dans ces zones (voir La pêche et l’aquaculture dans le contexte des accords mondiaux sur la biodiversité, p. 220). Les zones de haute mer sont les eaux qui s’étendent en dehors des zones économiques exclusives (ZEE), autrement dit au-delà de 200 miles nautiques d’une côte, et représentent près des deux tiers des océans du monde. Malheureusement, il est impossible d’évaluer la situation des activités de pêche hauturière, car les statistiques mondiales de la FAO sur la pêche de capture ne font pas la distinction entre les prises effectuées dans les ZEE et en haute mer. Dans ses demandes de données annuelles, la FAO invite les pays à lui communiquer la production de leur pêche de capture par espèce et par zone de pêche. Les principales zones de pêche de la FAO ont été définies dans les années 1950, bien avant l’établissement des ZEE, et les deux types de zones ne sont donc pas directement comparables.
On peut obtenir des indications sur les tendances actuelles en matière de captures en haute mer en analysant les prises d’espèces océaniques (épipélagiques et d’eaux profondes), qui ont généralement lieu dans les zones hauturières. Les volumes totaux de captures de ces espèces révèlent une augmentation depuis les années 1950, de 1 million de tonnes à près de 11 millions de tonnes en 2022 – avec une croissance accentuée de la biodiversité à partir de la fin des années 1970 notamment en ce qui concerne les espèces d’eaux profondes – et ce, du fait des progrès technologiques qui y ont facilité la pêche et du besoin d’exploiter de nouveaux lieux de pêche suite aux limitations découlant de l’extension des juridictions et au déclin des ressources dans les zones côtières.
Production de la pêche de capture continentale
En 2022, le volume total des captures en eaux continentales s’est établi à 11,3 millions de tonnes (tableau 9), soit une diminution de 0,3 pour cent par rapport à 2021. Si, durant l’année 2020, la pêche dans les eaux continentales a été sérieusement perturbée par la pandémie de covid-19, la production mondiale a dernièrement été davantage marquée par le recul des captures chinoises. Par ailleurs, la production de la pêche de capture continentale semble rester relativement stable à l’échelle mondiale – d’après les données officielles communiquées –, à un niveau légèrement inférieur au pic de 12,1 millions de tonnes enregistré en 2018.
TABLEAU 9PRODUCTION D’ANIMAUX AQUATIQUES DANS LE SECTEUR DE LA PÊCHE DE CAPTURE CONTINENTALE – PRINCIPAUX PRODUCTEURS/PRINCIPALES RÉGIONS


* Y compris l’Union des républiques socialistes soviétiques jusqu’en 1991.
SOURCE: FAO. 2024. FishStat: Captures mondiales, 1950-2022. [Consulté le 29 mars 2024]. Dans: FishStatJ. Disponible à l’adresse: www.fao.org/fishery/fr/statistics/software/fishstatj. Licence: CC-BY-4.0.
Depuis 2020, la Chine n’est plus le premier producteur du secteur de la pêche continentale. Elle est arrivée en troisième position en 2022, derrière l’Inde (1,9 million de tonnes) et le Bangladesh (1,3 million de tonnes). Elle est restée dans le trio de tête avec 1,2 million de tonnes en 2022, mais ses captures officielles ont diminué de près de 47 pour cent depuis 2017 (2,2 millions de tonnes), du fait des politiques du Ministère chinois de l’agriculture et des affaires rurales, et notamment d’une interdiction de pêche de dix ans dans les eaux du fleuve Yangtze aux fins de la conservation des ressources aquatiques vivantes. Cette réduction des prises a été compensée par le développement de l’aquaculture et de la pêche d’élevage dans les eaux continentales, si bien que la production totale dans les eaux continentales chinoises a augmenté sur cette même période.
Excepté la Chine, la croissance relativement modeste des captures dans les eaux continentales observée ces dernières années est liée à l’augmentation de la production de plusieurs grands pays producteurs, notamment le Bangladesh, l’Inde et la République-Unie de Tanzanie.
Cependant, il est difficile d’évaluer l’évolution à long terme de la production de la pêche de capture continentale. L’augmentation des captures sur les 20 dernières années est attribuable en partie à des améliorations de la communication d’informations et de l’évaluation au niveau des pays, plutôt qu’à une hausse réelle des prises déclarées par certains pays. Ces améliorations peuvent également masquer des tendances à la stabilisation ou à la baisse de la production de la pêche continentale. Beaucoup de systèmes nationaux de collecte de données sur les eaux continentales continuent d’être peu fiables et de faible qualité (voire sont tout simplement inexistants dans certains cas), ce qui entraîne une sous-estimation des captures dans les eaux continentales, y compris celles de plusieurs grands producteurs. On observe en général une sous-déclaration des captures de la pêche de subsistance et de la pêche de loisir, voire leur absence pure et simple des chiffres officiels. De nombreux pays ne communiquent pas leurs chiffres de captures dans les eaux continentales à la FAO, ou ne le font que partiellement. C’est la raison pour laquelle l’Organisation a récemment entrepris d’étudier les possibilités que peuvent lui offrir des méthodes de substitution de remédier à ces lacunes et d’améliorer ses statistiques sur les pêches continentales (encadré 2).
ENCADRÉ 2ÉVALUATION DES STATISTIQUES DE LA FAO SUR LA PÊCHE CONTINENTALE
La qualité et l’exhaustivité des statistiques sur la pêche continentale se sont considérablement améliorées ces dernières années, mais des problèmes persistent s’agissant de la collecte et de la communication des données nécessaires à la FAO.
L’importance de la pêche continentale pour la sécurité alimentaire nationale et mondiale et les moyens d’existence, en particulier dans les pays à faible revenu et à déficit vivrier et les pays en développement sans littoral, est largement reconnue. Malheureusement, de nombreux pays ne collectent pas systématiquement des données sur la production, ce qui compromet l’élaboration de politiques et de plans pour la pêche aux niveaux national et régional, ainsi que la gestion et la conservation des ressources et des écosystèmes, autant d’activités qui requièrent des statistiques actualisées et fiables. Les administrations des pêches et les parties prenantes du secteur sont souvent marginalisées parmi les responsables politiques et les décideurs chargés de la gestion des ressources hydriques continentales; des statistiques de meilleure qualité pourraient contribuer à remédier à ce problème (voir Priorités concernant la gestion des pêches continentales, p. 171).
Les données officielles sur la pêche continentale communiquées à la FAO ne couvrent souvent pas l’ensemble des activités ni des espèces. La grande diversité des espèces pêchées dans les eaux continentales contraste avec le nombre souvent relativement faible d’espèces pour lesquelles les pays communiquent des données. Ainsi, dans de nombreux cas, seules les principales espèces ciblées ou d’intérêt commercial sont suivies de manière régulière. De ce fait, les données concernant 50 pour cent environ des captures effectuées dans les eaux continentales à l’échelle mondiale ne sont disponibles qu’au niveau d’agrégation supérieur, à savoir la catégorie «poissons d’eau douce non compris ailleurs» (Actinopterygii). La contribution des prises de faible valeur, mais importantes au niveau local, qui sont réalisées dans le cadre de la pêche informelle ou de la pêche de subsistance dans les eaux continentales est sous-déclarée, voire totalement passée sous silence. Les pays qui ont amélioré leurs enquêtes ou rapports sur les captures ne procèdent généralement pas à des analyses rétrospectives ni à des révisions de leurs séries chronologiques, ce qui entraîne des ruptures dans ces dernières, ou des augmentations des captures d’une année sur l’autre résultant des progrès en matière de collecte de données.
Ces problèmes sont en grande partie dus aux défis qui accompagnent en pratique le suivi de la pêche continentale, activité menée essentiellement à petite échelle, souvent extrêmement dispersée, et de nature saisonnière ou occasionnelle. Celle-ci se déroule en outre dans des environnements très divers, comme de grands lacs, des retenues, des fleuves et des rivières, des plaines d’inondation, des ruisseaux, ou encore des rizières. Dans de nombreux cas, et notamment lorsque cette activité constitue une source essentielle d’aliments nutritifs pour les communautés locales, il vient s’ajouter à ces difficultés concrètes un manque de ressources pour le suivi et la gestion des eaux continentales. La plus grande partie de la production de la pêche de capture continentale a lieu dans les économies les moins avancées: cinq des dix premiers pays producteurs relèvent de cette catégorie* (Bangladesh, Cambodge, Myanmar, Ouganda et République-Unie de Tanzanie).
La FAO doit donc estimer ou ajuster une plus grande proportion des captures dans les eaux continentales (par rapport aux captures dans les eaux marines) – dans certains cas à partir d’autres données limitées sur les tendances observées dans les pêcheries en question. Des estimations de captures peuvent en outre être établies sur plusieurs années consécutives, ce qui risque de déboucher sur une constante sous-évaluation ou surévaluation dans les données communiquées.
Pour résoudre ce problème, la FAO a pris l’initiative d’effectuer une évaluation des statistiques de la pêche continentale qui sont rendues publiques. L’objectif est de déterminer les pays où des efforts et un appui futur seront nécessaires pour renforcer la collecte de données sur la pêche continentale. La FAO élabore des directives techniques en vue de déterminer les possibilités offertes par des méthodes de substitution en matière d’estimation de la production de la pêche continentale, parallèlement aux enquêtes classiques permettant d’évaluer les captures. Il s’agit notamment d’étudier les méthodes prédictives, telles que les modèles d’habitat des ressources halieutiques, les modèles de densité de l’effort de pêche et les méthodes fondées sur l’inférence, telles que les modèles de consommation de poisson. L’objectif est d’améliorer la qualité globale des statistiques des pêches des autorités nationales et de la FAO, pour en accroître la reconnaissance dans les forums sur les politiques dont les participants examinent l’importance et la contribution essentielle de la pêche continentale à la sécurité alimentaire, aux moyens d’existence et à la réduction de la pauvreté, ainsi que la gestion des ressources aquatiques.

© FAO/Luis Tato
Le manque d’informations détaillées au niveau des espèces s’agissant de la pêche de capture dans les eaux continentales est un problème ancien et constant. Malgré des améliorations dans le suivi des eaux continentales dans de nombreux pays, pour 50 pour cent de la production de la pêche de capture continentale, on ne dispose que d’informations au niveau d’agrégation le plus élevé, à savoir les «poissons d’eau douce non compris ailleurs» (Actinopterygii) – un chiffre qui reste globalement inchangé depuis 20 ans. Cette proportion de captures non identifiées varie cependant considérablement d’un pays et d’une région à l’autre, allant de seulement 10 pour cent en Europe à plus de 60 pour cent pour certains pays d’Asie.
L’un des principaux groupes d’espèces, celui des «carpes, barbeaux et autres cyprinidés», croît de manière constante: d’environ 0,7 million de tonnes par an au milieu des années 2000, ses captures sont passées à presque 1,8 million de tonnes en 2022. La majeure partie de l’augmentation récente des captures en eaux continentales peut lui être attribuée. Les captures de «tilapias et autres cichlidés» ont également augmenté ces dernières années, passant de moins de 0,7 million de tonnes à plus de 0,8 million de tonnes par an. Le chiffre concernant le groupe des «crustacés d’eau douce» est resté stable, entre 0,4 million de tonnes et 0,45 million de tonnes par an, avant de chuter ces dernières années pour s’établir à 0,27 million de tonnes en 2022, principalement du fait du recul de la production de la Chine dans les eaux continentales.
Les captures dans les eaux continentales sont plus concentrées que dans les eaux marines. Elles sont effectuées par de nombreux grands producteurs dans des régions dotées de masses d’eau ou de bassins hydrographiques importants (figure 16a et figure 16). En 2022, plus de 75 pour cent des captures en eaux continentales ont été produites par 14 pays, contre 19 pays pour celles de la pêche marine. La plupart des grands producteurs se trouvent dans des économies parmi les moins développées – plus de 90 pour cent des captures en eaux continentales ont lieu en Asie et en Afrique – et sont de ce fait confrontés à de sérieuses difficultés pour surveiller les pêches continentales qui, par nature, sont extrêmement dispersées et requièrent donc des interventions complexes et des ressources de suivi importantes.
FIGURE 16PRODUCTION D’ANIMAUX AQUATIQUES DANS LE SECTEUR DE LA PÊCHE DE CAPTURE CONTINENTALE

SOURCE: Service d’information géospatiale des Nations Unies. 2020. Géodonnées cartographiques.

SOURCE: FAO. 2024. FishStat: Captures mondiales, 1950-2022. [Consulté le 29 mars 2024]. Dans: FishStatJ. Disponible à l’adresse: www.fao.org/fishery/fr/statistics/software/fishstatj. Licence: CC-BY-4.0.
L’Asie représente plus de 60 pour cent de la production mondiale dans les eaux continentales depuis le milieu des années 1990 (7,2 millions de tonnes en 2022) et comprend les cinq principaux producteurs (plus de 50 pour cent des captures en eaux continentales en 2022). Toutefois, dans de nombreux pays asiatiques, la part historique de la pêche continentale est complétée ou remplacée par celle de l’aquaculture.
En Afrique, la situation est bien différente. Avec une production de 3,3 millions de tonnes en 2022, représentant 29 pour cent environ des captures mondiales en eaux continentales, la pêche continentale est pour de nombreux pays africains une source importante de sécurité alimentaire comparativement à la contribution relativement faible de l’aquaculture. Pour beaucoup de pays africains enclavés, la pêche de capture continentale représente entre 80 pour cent et 100 pour cent de la production totale d’animaux aquatiques (figure 17). Cette production est importante, mais aussi très incertaine, pour bon nombre de ces pays (Nigéria, République démocratique du Congo et Tchad, par exemple), ce qui souligne l’urgence d’instaurer un suivi et une gestion efficaces de ce secteur.
FIGURE 17PART DE LA PÊCHE DE CAPTURE CONTINENTALE DANS LA PRODUCTION HALIEUTIQUE ET AQUACOLE TOTALE D’ANIMAUX AQUATIQUES EN VOLUME, EN MOYENNE 2020-2022

NOTES: Animaux aquatiques, à l’exclusion des mammifères aquatiques, des crocodiles, des alligators, des caïmans, des produits aquatiques (coraux, perles, coquillages et éponges) et des algues. Données fondées sur l’équivalent poids vif.
SOURCES: FAO. 2024. FishStat: Captures mondiales, 1950-2022. [Consulté le 29 mars 2024]. Dans: FishStatJ. Disponible à l’adresse: www.fao.org/fishery/fr/statistics/software/fishstatj. Licence: CC-BY-4.0.
Service d’information géospatiale des Nations Unies. 2020. Géodonnées cartographiques.
Qualité des données statistiques de la FAO relatives aux captures
Les rapports nationaux sont la principale – mais pas la seule – source de données utilisée pour alimenter et actualiser les bases de données de la FAO sur la pêche de capture. La qualité des statistiques de l’Organisation est donc fortement tributaire de l’exactitude, de l’exhaustivité et de la communication en temps voulu des données qui sont recueillies par les institutions nationales responsables de la pêche et qui lui sont transmises chaque année.
Les données communiquées sont bien souvent incomplètes, incohérentes ou non conformes aux règles internationales en la matière, et la FAO s’efforce de les gérer, dans la mesure du possible, en collaboration avec ses membres. Malheureusement, dans de nombreux cas, les pays concernés ne répondent pas aux demandes de la FAO visant les problèmes décelés dans les données officielles. Dans ce cas, et lorsque les données transmises présentent des incohérences, la FAO peut réaliser des estimations ou des ajustements sur la base des meilleures données disponibles à partir d’autres sources d’information officielles (notamment celles publiées par les ORGP ou établies au moyen de méthodes standard).
Il demeure également des cas où les États membres ne communiquent pas les informations, ou pas en temps voulu, ce qui nuit à la qualité globale des estimations de la production totale de la pêche de capture établies par la FAO. L’envoi tardif des questionnaires remplis complique les tâches de traitement, de validation et d’examen des statistiques – en particulier pour l’année la plus récente – qui doivent être accomplies par la FAO avant la publication officielle des données chaque année, généralement à la mi-mars.
La plupart des statistiques relatives à la production de la pêche de capture sont bien soumises par les principaux producteurs, ce qui garantit la fiabilité des estimations de la production mondiale de la pêche de capture établies par la FAO, mais l’Organisation continue d’exprimer des inquiétudes face à l’absence de transmission de données de la part de certains pays grands producteurs ou à la qualité des informations qu’ils communiquent.