FAO

Utilisation et transformation

Évolutions récentes

Sur les 185,4 millions de tonnes (en équivalent poids vif) d’animaux aquatiques produits dans le monde en 2022, environ 89 pour cent (164,6 millions de tonnes) ont été utilisés pour la consommation humaine directe. Les 11 pour cent restants (20,8 millions de tonnes) étaient destinés à des usages non alimentaires, environ 83 pour cent (17 millions de tonnes) étant réduits en farine ou en huile de poisson, et le reste (environ 4 millions de tonnes) étant largement utilisé à des fins d’ornement, dans l’aquaculture (par exemple sous forme d’alevins, de juvéniles ou de petits adultes pour la croissance), comme appât, dans des applications pharmaceutiques, pour l’alimentation d’animaux de compagnie, ou comme matière première pour l’alimentation directe en aquaculture et pour l’élevage de bétail et d’animaux à fourrure.

Malgré quelques fluctuations, la proportion de la production utilisée pour la consommation humaine directe a considérablement augmenté ces dernières décennies, passant de 62 pour cent en 1970 à 89 pour cent en 2022 (figure 32). La croissance la plus notable depuis le milieu des années 1990 est également due à une diminution des captures d’espèces ciblées pour la production de farine de poisson (voir Produits: farine et huile de poisson, p. 72).

FIGURE 32PART DE LA PRODUCTION HALIEUTIQUE ET AQUACOLE MONDIALE D’ANIMAUX AQUATIQUES DESTINÉE À DES USAGES ALIMENTAIRES OU NON ALIMENTAIRES, EN VOLUME

NOTES: À l’exclusion des mammifères aquatiques, crocodiles, alligators, caïmans, éponges, coraux, perles et algues. À partir de valeurs en équivalent poids vif.
SOURCE: Données préliminaires. Données définitives disponibles ici: FAO (à paraître). Statistiques des pêches et de l’aquaculture – Annuaire 2022. Annuaire FAO de statistiques des pêches et de l’aquaculture. Rome. www.fao.org/fishery/fr/statistics/yearbook

En 2022, sur les 165 millions de tonnes destinées à la consommation humaine, les produits vivants, frais ou réfrigérés représentaient environ 43 pour cent. Cela reste la forme privilégiée des produits alimentaires aquatiques, mais aussi la plus coûteuse, suivie des produits congelés (35 pour cent), des produits préparés et en conserve (12 pour cent) et des produits traitésn (10 pour cent) (figure 33). La congélation est la principale méthode de conservation des aliments aquatiques, représentant 62 pour cent des 93 millions de tonnes d’animaux aquatiques transformés et destinés à la consommation humaine (c’est-à-dire à l’exclusion des animaux vivants, frais ou réfrigérés).

FIGURE 33UTILISATION DE LA PRODUCTION HALIEUTIQUE ET AQUACOLE MONDIALE D’ANIMAUX AQUATIQUES, 1962-2022

NOTES: À l’exclusion des mammifères aquatiques, crocodiles, alligators, caïmans, éponges, coraux, perles et algues. Données exprimées en équivalent poids vif.
SOURCE: Données préliminaires. Données définitives disponibles ici: FAO (à paraître). Statistiques des pêches et de l’aquaculture – Annuaire 2022. Annuaire FAO de statistiques des pêches et de l’aquaculture. Rome. www.fao.org/fishery/fr/statistics/yearbook

Les méthodes d’utilisation et de transformation diffèrent fortement entre les continents, les régions et les pays, voire à l’intérieur d’un même pays. La conservation et la transformation peuvent varier en raison des différences que présentent les espèces quant à leurs caractéristiques, à leur composition, à leur taille et à leur forme. Les espèces aquatiques peuvent être préparées au moyen d’un large éventail de méthodes, qui vont de méthodes manuelles à des méthodes entièrement automatisées. En matière de transformation, une pêcherie industrialisée a souvent des besoins différents de ceux d’une petite pêcherie artisanale. Les produits peuvent être conditionnés et commercialisés de diverses manières en fonction du lieu, de l’échelle d’activité, de l’infrastructure du pays et de la demande du marché.

Globalement, dans les pays à revenu élevé, les aliments aquatiques sont davantage transformés que dans les autres pays, avec une part croissante de produits à forte valeur ajoutée tels que des repas prêts à consommer. En 2022, plus de 55 pour cent de la production d’animaux aquatiques destinés à la consommation humaine dans les pays à revenu élevé se présentait sous forme congelée, 26 pour cent sous forme préparée et conservée, et 13 pour cent sous forme traitée. Dans de nombreux pays, la transformation des produits aquatiques est passée de méthodes traditionnelles à des procédés de valorisation plus avancés, en fonction du produit et de sa valeur marchande.

En 2022, environ 31 pour cent des aliments aquatiques produits par les pays à revenu intermédiaire des tranches supérieure et inférieure étaient utilisés sous forme congelée, 9 pour cent sous forme de conserves et de salaisons, et plus de 50 pour cent sous forme vivante, fraîche ou réfrigérée. En revanche, dans les pays à faible revenu, 7 pour cent seulement étaient congelés, 20 pour cent environ traités et 70 pour cent environ proposés sous forme vivante, fraîche ou réfrigérée.

En Europe et en Amérique du Nord, environ deux tiers de la production des pêches et de l’aquaculture utilisée pour la consommation humaine se présente sous forme congelée, préparée et conservée. En Asie et en Afrique, la part de la production d’aliments aquatiques conservés par salage, fumage, fermentation ou séchage est supérieure à la moyenne mondiale. C’est en Amérique latine, suivie de l’Asie et de l’Europe, que la part de la production des pêches et de l’aquaculture utilisée pour la fabrication de farine et d’huile de poisson est la plus élevée.

Une partie de la production d’animaux aquatiques destinés à la consommation humaine est commercialisée sous forme vivante; cette forme est principalement appréciée en Asie de l’Est et du Sud-Est et dispose de marchés de niche dans d’autres pays, essentiellement pour approvisionner les communautés asiatiques. La commercialisation d’animaux aquatiques vivants a continué de croître ces dernières années, notamment grâce à l’amélioration de la logistique et au progrès technologique. Cependant, la commercialisation et le transport peuvent se révéler difficiles, car souvent soumis à de rigoureuses réglementations sanitaires, normes de qualité et exigences de bien-être animal (notamment en Europe et en Amérique du Nord).

L’intérêt pour la production et l’utilisation d’algues (marines et microalgues) s’est considérablement accru ces dernières années au-delà des pays asiatiques traditionnellement producteurs. Les algues contribuent grandement à la sécurité alimentaire et nutritionnelle, fournissent des services écosystémiques, et leur production et leur transformation offrent d’importantes possibilités d’emploi pour les communautés côtières, en particulier pour les femmes et les jeunes. Elles peuvent être transformées en produits alimentaires, ainsi qu’en additifs et en compléments. Elles sont également utilisées par l’industrie non alimentaire pour extraire des agents épaississants tels que l’alginate, l’agar et le carraghénane, comme produits hydrocolloïdes dans les nutraceutiques, les produits pharmaceutiques et les cosmétiques, et comme engrais, ingrédients pour l’alimentation animale, biocombustibles et bioplastiques.

En général, les espèces aquatiques sont très périssables et plusieurs changements chimiques et biologiques se produisent dès la récolte ou la capture; cela peut entraîner des risques de détérioration et compromettre la sécurité sanitaire des aliments si de bonnes pratiques de manipulation et de conservation ne sont pas appliquées au moment de la récolte ou de la capture et tout au long de la chaîne d’approvisionnement. Ces pratiques reposent sur la réduction de la température (refroidissement et congélation), le traitement thermique (mise en conserve, ébullition et fumage), la réduction de l’eau disponible (séchage, salage et fumage) et la modification de l’environnement de stockage (emballage sous vide, emballage sous atmosphère modifiée et réfrigération). Les produits alimentaires aquatiques nécessitent également des installations spéciales telles que des entrepôts frigorifiques et des transports réfrigérés, ainsi qu’une livraison rapide aux consommateurs.

Ces dernières décennies, d’importantes améliorations apportées dans les domaines de la transformation, de la réfrigération, de la production et de l’utilisation de glace, de la congélation, du stockage et du transport ont permis d’allonger la durée de conservation tout en garantissant la sécurité sanitaire des aliments, en maintenant la qualité et les caractéristiques nutritionnelles et en évitant les pertes et le gaspillage, ce qui permet d’assurer une distribution nationale et internationale sur de longues distances. Ces améliorations ont également permis une diversification des produits, avec une utilisation plus efficace, plus efficiente et plus lucrative des matières premières, et ont donné lieu à des innovations en matière de diversification des produits destinés à la consommation humaine ainsi qu’à la production de farine ou d’huile de poisson et à d’autres fins, y compris grâce à l’utilisation de sous-produits (voir Produits: farine et huile de poisson, p. 72, et Utilisation des sous-produits, p. 76).

Globalement, le développement de la commercialisation et de la consommation humaine de produits alimentaires aquatiques (voir Consommation apparente de produits alimentaires aquatiques, p. 231, et Commerce des produits aquatiques, p. 88) s’est accompagné d’une importante amélioration de la qualité des aliments et des normes de sécurité sanitaire. Ces dernières décennies, les secteurs de la pêche et de l’aquaculture sont devenus plus complexes et plus dynamiques, avec des évolutions dues à la forte demande du secteur de la vente au détail, à la diversification des espèces, à l’externalisation de la transformation et au renforcement des liens d’approvisionnement entre producteurs, transformateurs et détaillants. Le développement des chaînes de supermarchés et des grands détaillants dans le monde a renforcé leur rôle d’acteurs clés, car ils influencent les exigences et les normes d’accès au marché. Pour répondre aux normes de sécurité sanitaire et de qualité des aliments et assurer la protection des consommateurs, des mesures d’hygiène et de manipulation de plus en plus strictes ont été adoptées aux niveaux national, régional et international sur la base du Code d’usages du Codex sur les poissons et les produits de la pêche (FAO et OMS, 2020) et des orientations qu’il donne aux pays sur les aspects concrets de la mise en œuvre de bonnes pratiques d’hygiène et du système de gestion de la sécurité sanitaire des aliments fondé sur l’analyse des risques aux points critiques (HACCP). Les caractéristiques nutritionnelles des aliments aquatiques peuvent varier en fonction de la manière dont ils sont transformés et préparés. Le chauffage du produit (pour la stérilisation, la pasteurisation, le fumage à chaud ou la cuisson) réduit la quantité de nutriments thermolabiles, y compris de nombreuses vitamines. En revanche, la concentration de certains nutriments peut augmenter avec le chauffage, l’eau étant éliminée.

Produits: farine et huile de poisson

La farine de poisson est une farine riche en protéines obtenue par broyage et séchage de poissons ou de parties de poissons, tandis que l’huile de poisson est obtenue par pressage de poissons cuits et centrifugation du liquide extrait. La farine et l’huile de poisson sont considérées comme les ingrédients les plus nutritifs et les plus digestes pour les poissons d’élevage, ainsi que comme la principale source d’acides gras polyinsaturés oméga 3 à longue chaîne (acide eicosapentaénoïque [EPA] et acide docosahexaénoïque [DHA]) dans l’alimentation des animaux. En ce qui concerne la consommation humaine, l’huile de poisson est la principale source naturelle d’EPA et de DHA, qui remplissent un large éventail de fonctions essentielles pour la santé humaine.

La farine et l’huile de poisson peuvent être produites à partir de poissons entiers, de parures de poisson ou d’autres sous-produits du poisson. Les espèces utilisées entières sont principalement de petits poissons pélagiques tels que l’anchois du Pérou (qui représente la plus grande proportion), le menhaden, le merlan bleu, le capelan, la sardine, le maquereau et le hareng. La quantité de farine et d’huile de poisson produite fluctue chaque année en fonction de l’évolution des captures de ces espèces, en particulier de l’anchois, dont la capturabilité peut être influencée par l’oscillation australe El Niño et par les pratiques de gestion adoptées (voir Répercussions du phénomène El Niño sur la pêche marine et l’aquaculture, p. 219). Au fil du temps, l’adoption de bonnes pratiques de gestion et de systèmes de certification a permis d’accroître le volume des espèces pêchées et reconnues comme provenant d’une source responsable pour la réduction en farine de poisson, diminuant ainsi les volumes de captures non durables pour ces espèces.

Le volume de la production mondiale de la pêche de capture transformée en farine ou en huile de poisson a diminué ces dernières décennies. Après avoir culminé à plus de 30 millions de tonnes en 1994, ce qui représentait environ 35 pour cent de la pêche de capture marine, il a diminué au fil des ans pour atteindre moins de 14 millions de tonnes en 2014, puis est remonté à environ 18 millions de tonnes en 2018 en raison de l’augmentation des captures d’anchois du Pérou, avant de revenir aux tendances antérieures, avec plus de 17 millions de tonnes utilisées en 2022. Cela correspondait à environ 22 pour cent de la pêche de capture dans les eaux marines en 2022. Parallèlement, une part croissante de la farine et de l’huile de poisson est fabriquée à partir de sous-produits des activités de transformation, ce qui permet de réduire le gaspillage et d’améliorer la valorisation des ressources. Selon les estimations de l’Organisation des ingrédients marins, en 2022, 34 pour cent de la production mondiale de farine de poisson et 53 pour cent de la production totale d’huile de poisson ont été obtenus à partir de sous-produits (figure 34). Cette utilisation des sous-produits a permis de maintenir, depuis le milieu des années 2000, la quantité totale de farine et d’huile de poisson à un niveau raisonnablement stable, avec respectivement environ 5 millions et 1 million de tonnes en poids de produit, malgré la baisse de la part obtenue à partir de poissons entiers. Il est à noter que la farine de poisson provenant de sous-produits a une valeur nutritionnelle différente: elle est moins riche en protéines mais plus riche en minéraux que la farine de poisson obtenue à partir de poissons entiers.

FIGURE 34UTILISATION DE LA FARINE ET DE L’HUILE DE POISSON

NOTES: * Principalement aliments pour animaux domestiques; ** Aliments pour animaux domestiques, biocombustibles, huile de cuisson.
SOURCE: Estimations de l’Organisation des ingrédients marins.

La stabilité globale de la production s’est accompagnée d’une forte augmentation de la demande due à la croissance rapide de l’aquaculture, de l’élevage de porcs et de volailles, de la production d’aliments pour animaux de compagnie et de l’industrie pharmaceutique. Selon les estimations de l’Organisation des ingrédients marins, en 2021, plus de 87 pour cent des farines de poisson ont été utilisées dans l’aquaculture, plus de 7 pour cent dans l’élevage porcin, 4 pour cent pour d’autres usages (principalement les aliments pour animaux de compagnie) et 1 pour cent pour la volaille. La même année, environ 74 pour cent de l’huile de poisson a été destinée à l’aquaculture, 16 pour cent à la consommation humaine et 10 pour cent à d’autres usages (y compris les aliments pour animaux de compagnie et les biocombustibles) (figure 35).

FIGURE 35PART DE LA MATIÈRE PREMIÈRE UTILISÉE POUR LA PRODUCTION DE FARINE ET D’HUILE DE POISSON, 2022

SOURCE: Estimations de l’Organisation des ingrédients marins.

La demande croissante de farine et d’huile de poisson a entraîné une augmentation de leurs prix, ce qui a influé sur leur utilisation. Leur taux d’inclusion dans les aliments composés destinés à l’aquaculture a connu une nette tendance à la baisse liée, en grande partie, à la diversification des sources de protéines et à l’amélioration de l’efficacité de l’alimentation qui se sont opérées pour répondre aux variations de l’offre et des prix et à la demande croissante des producteurs d’aliments aquacoles. Les farines et les huiles de poisson sont de plus en plus utilisées de manière sélective à des stades spécifiques de la production, notamment dans les écloseries, les stocks de géniteurs et les rations de finition, leur incorporation dans les régimes de croissance étant en baisse. Par exemple, leur part dans l’alimentation des saumons atlantiques d’élevage est aujourd’hui souvent inférieure à 10 pour cent, diminution qui s’est poursuivie dans toutes les catégories d’espèces. En outre, la plupart des principales espèces aquacoles produites n’utilisent pas uniquement, comme source de protéines, des farines ou des huiles de poisson, mais également des ingrédients tels que d’autres sous-produits d’animaux et des protéines d’origine végétale.

La demande croissante et la rentabilité du secteur ont incité à chercher des sources d’aliments aquacoles supplémentaires ou de substitution. Bien que la plupart des farines et des huiles produites à partir de poissons entiers proviennent de pêcheries bien gérées, la viabilité de certaines pêcheries dans certains pays où la production de farines de poisson augmente fortement suscite des inquiétudes. C’est le cas de certains pays d’Afrique de l’Ouest, où des quantités croissantes de prises sont réduites en farine de poisson à des fins d’exportation, en concurrence avec leur utilisation traditionnelle pour la consommation humaine intérieure. En l’absence d’une gestion appropriée des ressources, cette situation non seulement accroît la pression sur les ressources halieutiques, mais nuit également à la sécurité alimentaire et aux moyens d’existence. Dans ces régions, il est essentiel d’améliorer la gouvernance et la gestion des pêches, tout en orientant l’utilisation des espèces aquatiques vers la consommation humaine et la sécurité alimentaire (Thiao et Bunting, 2022).

Globalement, aucune augmentation importante de matières premières n’étant attendue des pêcheries sauvages, toute augmentation de la production de farine et d’huile de poisson devra provenir de sous-produits du poisson et d’autres sources. La recherche s’est récemment employée à trouver d’autres sources d’acides gras polyinsaturés. Il s’agit notamment de stocks de zooplancton marin tel que le krill antarctique (Euphausia superba) et le copépode Calanus finmarchicus, bien que des inquiétudes subsistent quant à l’impact de leur utilisation sur les réseaux trophiques marins. L’huile de krill, en particulier, est commercialisée comme complément nutritif pour l’homme, tandis que la farine de krill trouve un créneau dans la production de certains aliments aquacoles. Toutefois, la transformation du krill pose des problèmes pratiques en ce qui concerne la réduction de sa teneur en fluorure et, en raison de leur coût élevé, les produits à base de zooplancton ne sont pas inclus comme huile en vrac ou ingrédient protéique dans les aliments pour poissons. D’autres sources, comme les farines d’insectes et de bactéries, offrent un bon potentiel en tant qu’intrants protéiques dans les aliments aquacoles (Glencross et al., 2024). L’ensilage de poisson, hydrolysat riche en protéines qui contient de grandes quantités d’acides aminés essentiels, est également de plus en plus utilisé comme additif alimentaire, par exemple dans l’aquaculture et l’industrie des aliments pour animaux de compagnie (voir Systèmes aquacoles innovateurs et solutions en matière d’aliments aquacoles, p. 141).

Utilisation des sous-produits

L’augmentation de la production mondiale des pêches et de l’aquaculture comporte un défi pour le secteur de la transformation des aliments aquatiques. La transformation du poisson génère de grandes quantités de sous-produits tels que des têtes, des peaux, des arêtes, des écailles et des viscères, qui représentent 30 à 70 pour cent du poisson entier, selon l’espèce et le type de transformation (Peñarubia et al., 2023). Un filet de tilapia correspond généralement à 30 pour cent du poisson, le reste étant inutilisé pour la consommation humaine (voir Les produits alimentaires d’origine aquatique: un potentiel inexploité pour une alimentation saine, p. 205). On estime que 50 à 70 pour cent du thon entier est jeté lors de sa mise en conserve (Honrado et al., 2023), tandis que les sous-produits de la transformation des crevettes représentent 40 à 60 pour cent des crevettes entières (Abuzar et al., 2023).

Traditionnellement, les sous-produits de la transformation des aliments aquatiques étaient considérés comme de faible valeur et jetés. Une gestion inappropriée des déchets entraîne une pollution de l’environnement qui crée des aires de reproduction pour les insectes et la vermine, ce qui présente d’importants risques pour la santé publique. En conséquence, la gestion des déchets est de plus en plus soumise, pour des raisons environnementales, à des règles strictes et représente une charge financière croissante pour le secteur des aliments aquatiques. Dans le même temps, les sous-produits peuvent offrir des possibilités. Il importe de mieux les utiliser pour des raisons écologiques, sociales et économiques et pour préserver la santé des consommateurs et la sécurité alimentaire (encadré 17, p. 150).

Les sous-produits aquatiques peuvent être transformés en produits alimentaires destinés à la consommation humaine. Ceux qui sont particulièrement riches en micronutriments et en ingrédients bioactifs peuvent être utilisés comme matières premières précieuses pour la fabrication d’aliments nutritifs à faible coût ou de produits de grande valeur utilisés par les industries alimentaire, pharmaceutique et cosmétique et les fabricants de matériaux. La conversion de ces sous-produits en produits à valeur ajoutée peut améliorer la nutrition et la santé humaines, atténuer la pollution de l’environnement et procurer des moyens d’existence et des avantages économiques. Elle peut ainsi aider à réduire la pression exercée sur les ressources aquatiques vivantes et favoriser leur durabilité.

Les sous-produits contenant des têtes, des carcasses et des rabats ventraux, ainsi que des parties des viscères comme le foie et les œufs de poisson sont de bonnes sources de protéines de haute qualité, de lipides tels que des acides gras oméga 3 à longue chaîne, de micronutriments comme les vitamines A, D et B12, et de minéraux (fer, zinc, sélénium et iode, par exemple). La chair hachée et la chair séparée mécaniquement qui en sont issues peuvent être utilisées comme matières premières pour produire du surimi, des galettes, des nuggets et des saucisses. Les têtes et les carcasses peuvent être hachées et transformées en poudre (Abbey et al., 2017) pour être utilisées comme condiments ou comme farine, produisant ainsi une alternative saine (Monteiro et al., 2014). La gélatine peut également être extraite et utilisée comme ingrédient alimentaire pour des films ou des enrobages comestibles; elle peut également remplacer la gélatine provenant de mammifères, qui est généralement à base de porc, offrant ainsi un produit de substitution valable pour certains groupes religieux.

Les sous-produits aquatiques sont une source de composés biologiques de grande valeur contenant du collagène, des peptides, de la chitine, des acides gras polyinsaturés, des enzymes et des minéraux, qui conviennent à des applications biotechnologiques ou pharmaceutiques. Le collagène et la gélatine peuvent être extraits de la peau, des écailles et des arêtes. Le collagène peut être utilisé dans le traitement des brûlures pour la cicatrisation des plaies et la régénération de la peau (Lima Verde et al., 2021). Les sous-produits peuvent être convertis en hydrolysats de protéines aux propriétés fonctionnelles bénéfiques et aux applications potentielles dans les soins de santé et les produits pharmaceutiques (Ryu, Shin et Kim, 2021) et utilisés comme antioxydants naturels à faible coût pour plusieurs applications alimentaires et pharmaceutiques (Sierra et al., 2021). La chitine, présente dans presque tous les crustacés, est utilisée pour fabriquer des produits bioactifs destinés à des applications pharmaceutiques et alimentaires.

Les sous-produits du poisson se détériorent très rapidement, surtout lorsqu’ils contiennent des viscères. Ils doivent être conservés ou transformés le plus rapidement possible. En l’absence de chambres froides, ils peuvent être transformés en aliments pour animaux, en engrais ou en ensilage de poisson riche en protéines hydrolysées et en acides aminés essentiels. Le biodiesel fabriqué à partir d’huile de poisson peut répondre à des spécifications telles que la faible teneur en cendres, le point d’éclair et la densité (Patchimpet et al., 2020). En raison de son excellente biocompatibilité et biodégradabilité, la peau de poisson est utilisée dans des applications alimentaires et pharmaceutiques, ainsi que dans la production de vêtements et de produits en cuir (Yoshida et al., 2016).

Ces technologies utilisant les sous-produits du poisson servent également à transformer les ressources aquatiques de faible valeur et les prises accessoires en produits à valeur ajoutée, ce qui permet de réduire la pollution de l’environnement et d’améliorer la nutrition, les revenus et les moyens d’existence des humains.

Pertes et gaspillage d’aliments aquatiques

Les pertes et le gaspillage d’aliments dans les chaînes de valeur aquatiques restent pour la FAO un sujet important. Que ce soit sur le plan de la quantité ou de la qualité, ces pertes et ce gaspillage sont dus à des inefficacités dans les chaînes de valeur. De nombreux pays en développement, en particulier les économies les moins développées, ne sont toujours pas dotés des infrastructures, des services et du savoir-faire requis pour assurer une manipulation et une conservation appropriées à bord des navires et à terre. L’impossibilité d’accès à l’électricité, à l’eau potable, aux routes, à la glace, aux entrepôts frigorifiques et aux moyens de transport réfrigéré sont autant de facteurs qui y contribuent. Les pertes et le gaspillage d’aliments représentent une perte de temps, d’énergie et d’argent et nuisent au bien-être des pêcheurs, des transformateurs, des négociants et des consommateurs.

Le Code de conduite pour une pêche responsable, les Directives volontaires visant à assurer la durabilité de la pêche artisanale dans le contexte de la sécurité alimentaire et de l’éradication de la pauvreté et la Feuille de route sur la transformation bleue de la FAO considèrent tous les pertes et le gaspillage d’aliments comme un problème majeur. En réduisant ces pertes et ce gaspillage, on aide en fin de compte à atteindre l’objectif de politique générale de haut niveau de la FAO qu’est l’amélioration de la production, de la nutrition, de l’environnement et des conditions de vieo ainsi que la cible 12.3 des ODD, qui vise une consommation et une production responsables et la réduction de moitié du gaspillage alimentaire d’ici à 2030. La Feuille de route sur la transformation bleue (FAO, 2022a) est destinée à faciliter l’accès de tous, en particulier des populations vulnérables, à des aliments aquatiques salubres et nutritifs, et à réduire les pertes et le gaspillage d’aliments par une diversification des pratiques et des processus.

En 2011, la FAO a estimé que jusqu’à 35 pour cent de la production mondiale des pêches et de l’aquaculture est perdue ou gaspillée chaque année (FAO, 2011b). La prise de décision est entravée, en particulier au niveau national, par le manque de données et d’informations à jour qui pourraient être utilisées pour cibler et concevoir des interventions de réduction des pertes et du gaspillage.

Consciente du fait que les données sont essentielles à une prise de décision éclairée, la FAO a adopté des méthodes pour évaluer, mesurer et comprendre les pertes et le gaspillage de poisson et développe actuellement un indice des pertes alimentairesp, qui sera utilisé pour normaliser la manière dont les données quantitatives sur les pertes de poisson seront collectées à l’échelle mondiale. Des outils de connaissance tels que des cours en ligneq sur les pertes et le gaspillage de poisson sont mis à disposition, ainsi qu’un site web completr qui renseigne sur tous les aspects de ce problème dans les chaînes de valeur aquatiques. Les initiatives mises en œuvre s’inspirent des travaux menés sur les énergies renouvelables (Puri et al., 2023) autour des chaînes du froid, des méthodes préconisées pour améliorer les manipulations à bord (Ward, 2022), des meilleures pratiques ainsi que des orientations données en ce qui concerne les questions de genre dans le contexte des pertes alimentaires (FAO, 2018a).

Le Code de conduite volontaire pour la réduction des pertes et du gaspillage alimentairess énonce des principes directeurs et des normes internationalement reconnus qui doivent aider à adopter des pratiques responsables en matière de réduction des pertes et du gaspillage alimentaires. Il sert de cadre aux stratégies, politiques, institutions, législations et programmes de réduction des pertes et du gaspillage alimentaires et aide à évaluer l’efficacité des solutions, incitant à agir de concert, à harmoniser les approches et à évaluer les progrès accomplis. Il est appliqué à la pêche dans le cadre de l’adoption d’une approche multidimensionnelle et multipartite de la réduction des pertes et du gaspillage alimentaires, mettant l’accent sur sept points d’entrée clés que sont les politiques, l’équité sociale et l’égalité de genre, les services et infrastructures, les marchés, la technologie, les compétences et connaissances, et la réglementation. À ce jour, des stratégies de réduction des pertes et du gaspillage alimentaires dans les chaînes de valeur des pêches ont été élaborées avec des partenaires en Colombie, en République-Unie de Tanzanie, à Sri Lanka et au Togot (voir Solutions multidimensionnelles au problème des pertes et du gaspillage alimentaires, p. 197, et encadré 33, p. 184).

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